Hello there !

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Bonne lecture !

Lundi se lève doux pour Ruby. L'infirmerie, c'est son royaume de calme. De la porte jusqu'à la fenêtre. De la salle de bain au bureau. Pas une âme qui vive sous ses lumières bienveillantes. Elle s'enfonce dans son fauteuil, café en main, les yeux sur Le Chicaneur. Le souvenir de samedi soir la chatouille. Un excès de moquerie envers Hermione ? Un sourire coupable traverse son visage. Un peu, oui. Mais c'était dans la bonne humeur, se persuade-t-elle. Les pages du journal crissent, rompant le silence matinal. La journée promet d'être légère, pense Ruby. Elle ajuste ses lunettes, plongeant plus profondément dans les nouvelles extravagantes du monde magique. À l'extérieur, Poudlard s'éveille doucement, baigné d'une lumière timide. La magie flotte dans l'air, imperceptible et pourtant si présente. Ruby repose sa tasse, un soupir s'échappe. Elle devrait peut-être s'excuser auprès d'Hermione, songe-t-elle. Un geste simple pour dissiper un malaise éventuel.

Les minutes s'égrènent, paisibles. Ruby réorganise machinalement quelques flacons sur son bureau, gestes routiniers d'une infirmière consciencieuse. Le silence de l'infirmerie la berce, mais elle s'ennuie. Aller un petit bras cassé, une grippe. Même une gastro lui ferait plaisir.

L'instant où on évoque le loup, il apparaît. Ruby voit Hermione franchir le seuil de son infirmerie, accrochée à Severus comme une bernique à son rocher.

« Ça va ? » interroge Ruby, inquiète.

Severus, avec sa réserve habituelle, marmonne, « Aucune idée. »

« Et elle, qu'est-ce qu'elle a? »

« Je ne sais pas. » répète-t-il, son impatience montant d'un cran.

« Et c'est toi qui l'amènes ici, collée à toi comme une moule à son rocher, pourquoi ?

— Pas la moindre idée.

— Tu es d'une grande aide merci... Hey, Mione, tu es blessée ? » Hermione se détache de lui, ses sanglots toujours aussi forts.

« Elle t'a dit quelque chose ?

— Dans la grande salle, son comportement était... anormal, comme droguée et paniquée. Je lui ai suggéré de te consulter.

— Elle pleurait là-bas ?

— Non, elle s'est mise à pleurer en sortant, m'a assailli de reproches puis s'est effondrée, murmurant quelque chose à propos de ne pas vouloir être un pirate.

— Un pirate ? » Ruby fronce les sourcils, confuse.

« Exact.

— Laisse-la ici. Va faire ton travail, je prends le relais. » Mais Severus reste immobile, son inquiétude palpable.

« Severus, elle est juste épuisée, ça va passer. Fou le camp.

— Elle n'est pas en état d'enseigner...

— J'informe Minerva immédiatement. Maintenant, dégage. »


Hermione est sur le lit, écrasée de honte. Ce n'est pas elle, pas l'Hermione Granger, la femme forte et déterminée. Éclater en sanglots dans un couloir à huit heures moins le quart, ce n'est pas digne d'une trentenaire accomplie, pense t-elle. La gryffondor s'en veut, agacée par sa faiblesse. Le silence pesant de l'infirmerie lui fait écho, chaque pulsation de son cœur lui rappelle sa chute. « Merde. » lâche-t-elle, essuyant une larme, espérant sauver ce qui reste de sa fierté.

Elle s'est dévoilée, vulnérable, et pire, surtout devant Severus. Comment le regardera-t-elle maintenant ? Elle examine ses mains, perdues, se demandant si demain, elles lui sembleront toujours les mêmes. Comment affronter Severus après s'être effondrée ainsi ? Sa force, son indépendance, tout semble voler en éclats pour un moment de faiblesse.

Tout lui paraît insurmontable. Une rumeur a suffi pour ébranler ce qu'elle a construit avec Severus. La peur du jugement de Ruby, la pitié chez Severus, tout ça la terrifie. Comment rebondir après une telle scène ?

Hermione, assise sur le lit de l'infirmerie, se sent minuscule, submergée par la honte.

Ruby prend les devants, contactant Minerva pour signaler qu'Hermione n'est pas en état d'enseigner. Elle préfère intervenir avant qu'Hermione, poussée par son sens du devoir, ne se précipite en classe, aggravant son état. Mieux dans l'infirmerie vide, ses larmes pourront couler librement, loin des regards des élèves. Hermione, habituellement si ponctuelle, doit reconnaître ses limites aujourd'hui.

Avec un soupir, Ruby vide la desserte médicale pour y déposer un autre genre de potion : chocolat chaud pour Hermione, café pour elle, et quelques biscuits. Les mouchoirs, des tas de mouchoirs.

Hermione, immergée dans ses pensées, accepte la tasse de chocolat chaud. Ses mains tremblent un peu, saisissant ce petit réconfort.

« Merci. » souffle-t-elle, une voix éraillée d'émotion brisant le calme de l'infirmerie. Elle s'autorise une gorgée, sentant la chaleur se diffuser lentement en elle. En face, Ruby, empathique, savoure son café.

« Il est temps de lâcher prise, Mione. » murmure Ruby. « Pleurer n'est pas une faiblesse. »

Hermione hoche la tête, incapable de répondre. Elle sait que Rebecca a raison, mais l'accepter, c'est un autre combat. Pour l'instant, elle se contente de savourer le chocolat, laissant les larmes couler, moins amères cette fois.

Les biscuits restent intouchés. Les mouchoirs se succèdent.

« Je suis là, tu sais ? » assure Ruby, un sourire timide flottant sur ses lèvres. « Pour les bons, les mauvais jours, et surtout pour ceux où tu décides de devenir un pirate. »

Un rire étouffé s'échappe d'Hermione, un son fragile, mais c'est un début.

« Je m'excuse pour cet écart, ce n'est pas...

— Tes règles arrivent quand, Mione ? » Ruby coupe, pratique et directe.

Surprise par la question, Hermione marque une pause. « Euh, dans deux jours, pourquoi ? » demande-t-elle, intriguée par où Ruby veut en venir.

« SPM. » Ruby acquiesce, comme si cela expliquait tout. Comme si. « Ne t'en fais pas. » Son assurance est solide. « Tout ce que tu me diras restera entre ces quatre murs. Alors, qu'est-ce que c'est cette histoire de pirate ? »

Hermione pousse un soupir, ses épaules s'affaissant légèrement sous le poids de l'incompréhension. « Non. Ne me prends pas pour une idiote, je ne suis pas une enfant, je...

— Jamais dit ça. » Ruby l'interrompt doucement mais fermement. « Parfois, le SPM, c'est une vraie tempête. Souvent, tout ce qu'il faut, c'est du chocolat chaud, un peu de patience, et beaucoup de repos. » Son regard glisse vers la desserte, maintenant un sanctuaire de réconfort.

« Merci. Je ne sais pas pourquoi la semaine dernière me paraissait bien merdique. Le week end encore pire. Et je n'ai pas dormi de la nuit.» marmonne Hermione, la tête dans son chocolats chaud.

Ruby, avec un sourire compréhensif, se lance dans son récit. « La ménopause, c'était un combat. Je me sentais comme étrangère hystérique. »

Hermione, intriguée, demande, « Mais. Tu as quel âge, Ruby ?

— 44. La ménopause précoce m'a frappée à 39. Enfin, je vois le bout. » rit Ruby avec soulagement.

« Et... ça va maintenant ?

— Ça s'arrange. La ménopause a été rude, et John peut témoigner. Les hormones, c'est un tsunami émotionnel. »

Hermione hoche la tête. « 44, c'est vraiment tôt, non ? »

« Oui, mais ça a simplifié certaines choses. Pas d'enfants pour nous, c'était déjà nôtre choix. » Ruby esquive le sujet délicat. « Tu as essayé des traitements hormonaux moldus ?

— Après la guerre, oui. Mais ça ne me convenait pas.

— Alors, on évitera le cours de biologie sur le cycle menstruel. » Ruby sourit. « Patience, chocolat, et repos. C'est notre armure dans ce monde d'hommes et d'hormones.

— Franchement, l'idée de péter les plombs à cause de mes règles, ça me gonfle. C'est tellement cliché. » grommelle Hermione, l'air fatigué.

Ruby réplique avec un sourire, « Pourtant, des fois, c'est vrai. J'ai une théorie : notre utérus est en mode elfe de maison. Quand il se rend compte qu'il n'y aura pas de bébé, il pète un câble et se flagelle en mode 'punition'. »

Hermione rit doucement, « Ma lutte pour la S.A.L.E. prend une nouvelle dimension du coup.

— Allez, explique-moi cette histoire de pirate. Je sais que le SPM peut jouer des tours, mais c'est la première fois que je te vois débarquer en larmes. Qu'est-ce qui s'est passé exactement ?

— C'est un peu le bazar dans ma tête. Dimanche, j'ai repensé à notre conversation de samedi et..." Hermione cherche ses mots.

« Je suis vraiment désolée d'avoir cru à cette rumeur. J'aurais dû te parler directement. » s'excuse Ruby.

« Pas grave. Puis, Harry m'a sermonnée aussi. Et ce matin, je sais pas, Remus me parle de bateaux et… » Hermione essaie de se rassembler. « Et puis, j'ai cogité sur ma théorie des pirates, paléontologues et cow-boys. Je veux pas être pirate, mais paléontologue, ça me saoule. Et dans ma tête, c'est Ron et Harry les cow-boys. Je déraille complètement. » Elle soupire. « Et puis, j'ai réfléchi à ce que je ressens pour Severus, et là… Avec tout le monde qui dit que c'est évident, je sur-interprète le moindre de ses gestes, et ça me rend dingue. Et la nuit dernière, j'ai quasi pas dormi. Plus les SPM, la totale...

— Tu veux parler de ta théorie sur les pirates ? »

Hermione joue distraitement avec le bord de la couverture, évitant le regard de Ruby. « Tu veux vraiment entendre parler de ma théorie sur les pirates ? » Elle esquisse un sourire forcé. « C'est juste une idée loufoque de mon adolescence, rien d'important. Je te raconterai, peut-être un jour.

— Et pour Severus ? » interroge Ruby, penchée en avant, capturant le regard fuyant de son amie.

Parler de Severus, ça serre le cœur d'Hermione. « En parler... ça rend les choses trop concrètes. Je ne peux pas me permettre de vivre dans un mensonge ou d'aggraver ma névrose. Je veux juste... savoir. » Ses mots flottent dans l'air, chargés d'une incertitude palpable.

Ruby hausse les sourcils, souris. « Une névrose, vraiment ? Mais qu'est-ce que tu cherches à savoir exactement à propos de Severus ? »

La Gryffondor soupire, la confusion se lisant dans ses yeux. « En vérité, je ne suis même pas sûre de vouloir savoir s'il ressent quelque chose. Parce que je ne suis pas convaincue à 100% qu'il y ait quelque chose de mon côté. » Elle baisse les yeux, confrontée à l'ampleur de ses propres doutes.

Ruby pose une main rassurante sur la sienne. « Pour ça, Hermione, c'est toi seule qui peux trouver la réponse. Mais tu ne sera jamais sure à 100%. Il y a un stade où tu choisis d'aimer quelqu'un. Ce n'est pas purement émotionnel. Mais c'est pas 100% rationnel non plus. Tu attends d'être sure à 100%. Tu veux des garanties. Mais ton coeur ne vends pas des machines à laver, c'est pas satisfait ou remboursé. »

Elle se sent naviguer en pleine tempête, ses pensées tourbillonnantes comme une mer déchaînée. Elle fixe ses mains, posées à plat sur le drap froissé de l'infirmerie, se sentant soudain très petite. « C'est là le problème » murmure-t-elle, la voix chargée d'une lourde. « J'ai l'impression d'être face à un iceberg, et je ne sais pas si c'est une réalité tangible ou juste une illusion, un produit de mon imagination hyperactive et de mes hormones en ébullition. »

Ruby, toujours à ses côtés, lui offre un sourire encourageant. « Si Sev est l'iceberg, alors oui, il est bien réel. »

Mais Hermione secoue la tête, perdue dans son analogie. « Non, Sev n'est pas l'iceberg. Enfin, si, mais pas dans le sens où tu l'entends. L'iceberg, ce sont mes sentiments, un monstre caché sous la surface. »

Elle reprend, le regard sombre, « Imagine si, effectivement, il me plaît et que c'est réciproque, tant mieux. Mais si tout ça n'était qu'une illusion de mon côté, mais que lui, il ressent quelque chose... Ce serait un désastre. »

Ruby, pensive, l'interroge, « Et si c'était toi qui avais des sentiments, mais pas lui ? »

Hermione esquive, « Ça, ce n'est pas un problème. Je... je trouverai un moyen de les contenir. »

« Tu disais que Ron avait la capacité émotionnelle d'une petite cuillère, n'est-ce pas ? » rappelle Ruby, un brin taquine.

« Oui, mais... » elle s'arrête, se rendant compte de l'absurdité de sa propre logique.

« Tu penses vraiment pouvoir ajuster tes sentiments comme on règle le thermostat ? Hermione, ce n'est pas si simple. »

La gryffondor sourit amèrement, « J'ai survécu à la guerre et au concours administratif du ministère. Je devrais pouvoir gérer ça, non ?

« Survivre, oui. Mais pas vivre indéfiniment dans le déni. » répond Ruby. « On va jouer à oui ou non. »

Elle lève un sourcil, amusée malgré elle par l'inversion des règles. « Le jeu, c'est ni oui ni non, Ruby, pas l'inverse.

— Mais si, mais si. Tu ne pourras répondre que par oui ou non. Pour être claire et avancer, plutôt que de te perdre dans tes habituels 'ça dépend', 'peut-être', ou 'qui sait'. » Ruby fixe Hermione, déterminée. « Prête ? Première question : as-tu déjà été amoureuse ?

— Je... crois. » tente Hermione, avant d'être interrompue.

« Non, ça ne marche pas comme ça.

— C'est injuste, je ne peux pas juste répondre par oui ou non à ça. » proteste Hermione, troublée par la simplicité brutale du jeu.

« Alors, c'est que c'est non. » conclut Ruby, sans laisser de place au doute.

« C'est difficile de l'admettre... Je pense avoir aimé Ron. Mais c'était plus un mélange d'attirance et d'amitié.

— Mais ce n'était pas de l'amour, pas vrai ? L'amour, ce n'est pas forcément avoir des papillons dans le ventre tout le temps. Parfois, quand c'est tellement simple, tu ne sais plus vraiment. » explique Ruby, cherchant à démêler les sentiments de son amie. « Alors, Severus te manque-t-il quand il est absent ?

— Oui. » Hermione lâche le mot sans hésitation.

« Voilà, tu vois comment on joue !» dit Ruby avec un sourire encourageant.

« Ne sois pas condescendante, j'avais compris. » rétorque Hermione, un brin irritée. « Les réponses oui ou non, c'est compliqué à donner. La vie c'est nuancé.

— Certes mais à un moment donné, il faut avancer. Et bien, est-ce qu'il te plaît, déjà ? »

Hermione se perd dans ses pensées, « Dans quel sens ? » demande-t-elle, cherchant à gagner du temps.

Avec une voix solennelle et grave, Ruby gronde, « Est-ce que tu trouves Severus Snape Sexy ? »

Hermione rit puis redevient sérieuse, « Je ne sais pas. Je n'ai jamais vraiment réfléchi à... à ce genre de choses le concernant. »

« Ah, tu dérailles encore. » taquine Ruby. « Bien, voilà ta mission. Sujet de la semaine : Les fesses du Professeur Snape. »

Hermione expire, un mélange d'appréhension et d'enthousiasme nouant son estomac. L'idée de voir Severus autrement la traverse comme un frisson. Imaginer Poudlard sans lui ? Impensable. Leurs échanges, leur entente, c'est le ciment de ses jours. Et le penser plus qu'ami... c'était hors de portée, jusqu'à ce que la rumeur l'y pousse.

Elle fixe le sol de l'infirmerie, cogitant. Cette foutue rumeur, a-t-elle déterré des sentiments enfouis ? Ou est-ce juste une de ces prophéties qui se réalisent parce qu'on y pense trop ? « Tu réalises parfois l'importance d'une personne seulement à l'idée de la perdre. » murmure-t-elle.

« Et donc je dois imaginer Severus mort pour savoir si je l'aime ? » lance-t-elle avec un brin de sarcasme. Ruby hausse les épaules. « Si ça te fait avancer. Oui. »

Hermione décide de laisser ces pensées pour plus tard. Elle fait signe à Ruby de sortir du lit. Quitte a pouvoir se reposer, autant le faire sans une drôle d'infirmière ménopausée et trop curieuse dans son lit.


Hermione gît dans son lit d'infirmerie, le regard fixé sur le plafond, alors que midi sonne à Poudlard. L'épuisement émotionnel, c'est son nouveau compagnon de chambrée. Pas de ceux qui vous laissent récupérer en un claquement de doigts. Certes, elle a dormi une heure, mais c'est tout. Dormir maintenant, c'est risquer l'insomnie ce soir, et elle n'a aucune envie de tourner en rond ce soir. Lire ? Interdit. Enfin, presque. Ruby, dans un élan de compassion, lui a déposé un assortiment de magazines, entre Closer, People, et Vogue. « Super » pense-t-elle, sans une once d'enthousiasme. Pas qu'elle méprise la presse "féminine", mais franchement, ce n'est pas son truc.

Elle a bien tenté de s'intéresser au conte de fées moderne de Kate et William, sans succès. Trop prévisible, trop loin de sa réalité. Et puis, il y a eu cet article sur le testament de Paul Newman. La couverture l'avait accrochée, avec l'espoir que ça parle de ça filmographie, après tout, "l'arnaqueur" elle avait bien aimé. Mais non, le papier se perdait en spéculations sur sa veuve et son héritage. Elle s'en moque, de l'héritage de Newman, aussi croustillant soit-il selon le magazine.

Hermione se sent prisonnière de ces murs blancs, de cette literie qui n'a rien de confortable. Ici, le seul mystère, c'est de savoir combien de temps elle tiendra sans craquer.

Ruby revient, l'air concerné, lui proposant cette fois-ci une pile de Daily Prophet. "Pour changer", dit-elle avec un sourire qui se veut rassurant. Hermione feuillette le premier exemplaire, tombant sur un article débattant de la dernière mode en matière de capes d'invisibilité. "Indispensable ou simple caprice ?", s'interroge le journaliste. Hermione lève les yeux au ciel. Comme si la mode des capes d'invisibilité allait occuper ses pensées.

Elle repose le journal, son esprit vagabondant vers Severus. Que ferait-il, enfermé ici ? Probablement se plaindre.

Le silence de l'infirmerie lui pèse. Hermione se tourne et se retourne, cherchant le sommeil qui la fuit. Les mots de Harry, de Ruby, d'Hannah, de tout le monde, résonnent encore dans sa tête. Elle soupire, lasse. Ce n'est ni le lieu ni le moment pour de telles réflexions.

Pourtant, l'idée persiste, s'immisce dans ses pensées malgré elle.


Vers 13h, Remus fait irruption, panique palpable, Teddy endormi dans ses bras. Severus, le suivant de près, affiche une moue sceptique. Dans la grande salle, c'est l'heure du déjeuner, Hermione se redresse pour mieux voir. Ruby, lâchant son exemplaire de "Public Health Reviews", s'élance vers eux, comme assoiffée de quelque événement. Enfin, de l'action. Severus lance des regards en direction d'Hermione, toujours alitée.

« Qu'est-ce qu'il a ? » demande Ruby, l'urgence dans la voix.

« Je ne sais pas. » commence Remus, l'inquiétude tissant sa voix. « Après mon cours, je suis allé le voir. Il était un peu fiévreux hier et... » Sa voix s'effiloche, comme rongée par l'inquiétude.

« Pourquoi tu ne me l'as pas apporté plus tôt ? » Ruby l'interrompt, pragmatique.

Il se défend, mal à l'aise. « C'était le week-end, je ne voulais pas t'importuner. Il avait 38,5, ce n'est pas alarmant. Mais quand je suis revenu, sa température avait grimpé à 39,3. Et il est couvert de petits trucs rouges.

— Il n'avait rien ce matin ?

— Non, rien du tout. » assure Remus, perdu.

C'est alors que Severus, qui s'était jusqu'alors tenu en retrait, intervient. « Il a dix ans. Il déteste l'infirmerie, et c'est un métamorphomage. Bien sûr qu'il t'a caché ses symptômes. » dit-il, son ton trahissant une pointe d'irritation.

Hermione, profitant de l'agitation ambiante pour rester en retrait, laisse son regard glisser vers Severus. Beau ? Non, le terme ne lui semble pas convenir.

Elle l'analyse, distraitement. Pas un canon de beauté, Severus, mais loin d'être repoussant. En fait, il vieillit bien, mieux que ce qu'elle aurait parié en le voyant jeune. Grand, avec cette allure de qui sait se tenir droit sans effort. Ses dents, sujet de moquerie d'Hermione, ont l'air plus droite. Et puis, il y a sa peau. Il bois moins que durant la guerre et n'a plus ce teint jaune, du à une cirrhose mal soignée. Moins de verres, plus de soins.

C'est cet ensemble, ces petits détails, qui le rendent... intéressant. Pas de quoi faire chavirer au premier regard, mais assez pour piquer la curiosité, pour inviter à regarder deux fois plutôt qu'une.

Attirant ? étrangement oui. Mais pourquoi ? C'est ce mélange de force et de vulnérabilité cachée qui l'intrigue. Attirant comme vouloir toucher une flamme. Attirant comme cette intensité dans son regard quand il réfléchit, comme si en forçant un peut-il était capable de tout régler.

Il y a aussi cette assurance, cette confiance en lui qui ne bascule jamais dans l'arrogance injustifiée.

C'est un homme qui connaît mal sa valeur tout en essayant de la contrebalancer en se faisant le plus discret possible. Et puis, son cerveau. Son cerveau est attirant. Cette capacité à avoir l'air de tout savoir à l'avance, de ne jamais être surpris. C'est quelque chose qui transparaît dans chaque geste, chaque parole, malgré son éternel masque d'impassibilité.

Hermione regarde encore et toujours cette main posée sur le barreau de son lit. Elle n'arrive pas à se rendre compte de tout ce que cette main et son cerveau ont pu faire pour l'Ordre et pour Voldemort. Ça fait peur, et c'est assez attirant. Avec ses énigmes et ses silences, il est comme un gros Rubik's Cube un peu cabossé que des sorciers se sont trimbalé dans leur sac. Le jour où ce Rubik's Cube pourrait leur servir. Dumbledore où Voldemort. Peu importe, les deux l'ont méprisé, utilisé à leur fin, puis abandonné.

Elle jette un œil au foulard noué autour de son cou. Elle sait ce qu'il y cache. Il l'enlève de temps en temps mais uniquement devant elle, Remus ou sa mère, pour ce qu'elle sait.

Elle a vu la cicatrice de Nagini. C'est assez discret si l'on n'y fait pas attention. Deux petits points entourés d'une bande de chair cicatrisée inégale. Avec le temps, ça a blanchi et elle pourrait être en partie cachée par le col.

Elle se surprend à vouloir explorer les profondeurs de cet homme, à découvrir ce qui se cache derrière ce regard souvent si dur, si distant. C'est cette énigme, cette promesse d'infinies découvertes, qui rend Severus irrésistiblement attirant à ses yeux. Mais une fois l'énigme résolue, est-ce qu'elle le trouvera toujours intéressant ?

Severus se relève du lit. S'il garde les mêmes fesses, sans doute que oui, se dit Hermione.

Dans un mouvement brusque, il pivote vers Hermione, son regard perçant fixé sur elle. « Ce ne serait pas un début de varicelle que tu aurais choppé avec les marmots de Potter ? » Son ton, quelque part entre l'accusation et la curiosité, fait sourire Hermione malgré elle.

« Teddy a la varicelle. Hermione, elle, est victime de surmenage et de dérèglement hormonal. Le jour où ça arrivera à Teddy, on aura d'autres problèmes à régler avant. » rétorque Ruby, d'une voix où l'amusement se mêle à la sévérité professionnelle.

Remus, visiblement dépassé, s'accroche à chaque mot. « Il a la varicelle ? Où est-ce qu'il aurait bien pu l'attraper ? Ça dure combien de temps ? » Sa voix trahit son inquiétude, celle d'un père confronté à l'imprévu.

« Aucune idée où il a pu la chopper. Ce n'est pas très courant de la choper après dix ans. Tu l'as eue, j'espère ?

— Non. » admet Remus, son inquiétude montant d'un cran.

« C'est très contagieux. Éloigne-toi. Si tu n'as pas encore été contaminé, tu as de la chance. Je vais faire venir un vaccin. Va te désinfecter les mains immédiatement. » ordonne Ruby, sans laisser de place au débat.

Remus, désemparé, insiste. « Mais attends, je ne peux pas le laisser comme ça.

— Tant que je n'ai pas le vaccin, tu ne l'approches pas. La varicelle, chez les enfants, c'est bénin. Chez l'adulte, ça peut vite dégénérer. » Puis, se tournant vers Severus et Hermione, elle cherche à s'assurer de leur sécurité. « Vous l'avez eue ?

— Oui. » Certifient-ils en même temps.

Ruby, alors, se tourne de nouveau vers le loup-garou. « Bon, Mon petit Lupin, tu montes te changer, tu prends une douche, tu te laves le mieux possible, et on va voir pour faire venir un vaccin.

— Mais je ne peux pas laisser Teddy seul, il… » Remus tente de protester, la voix teintée d'une détresse paternelle.

« Il est vaseux, il a de la fièvre, il va dormir. Il ne se rendra même pas compte du temps que tu es partie. » rétorque l'infirmière coupant court à toute réplique.

Remus, la mine basse, se résigne et part suivre les instructions, laissant derrière lui son fils allongé sur le lit.

Hermione le trouve bien petit a dans ce lit.


Dans l'intimité des quartiers de Severus, un verre de whisky tourbé à la main, il lance son diagnostic avec une assurance teintée d'irritation. « Arrête tes conneries, il ne va pas crever, ton gamin. Plus de 90% des mômes sont immunisés avant Poudlard. Il aura des boutons qui vont le gratter. Et pour lui remonter le moral, tu vas le gaver de chocolat. Rien d'incroyable. Il va juste avoir des démangeaisons. »

Remus, debout, bras croisés, son inquiétude palpable dans l'air chargé de la pièce, riposte. « Je ne l'ai jamais eu, moi. Je ne sais pas à quoi m'attendre. Ça impressionne, quand tu ne connais pas.

— Teddy est entre les mains d'une infirmière formée par le bureau des Aurors. Et franchement, veiller sur un enfant malade, un singe savant armé d'une boîte de paracétamol pourrait s'en sortir. »

« Le jour où tu auras des enfants, tu réagiras autrement. »Le ton du Gryffondor s'adoucit, un sourire malicieux se dessinant sur son visage malgré l'angoisse.

— Solution toute trouvée, je n'en aurai jamais. Et cesse de jouer les mères poules, ça ne te va pas du tout.

— Si sa mère avait été là, elle aurait réagi bien avant moi.

Le Serpentard, un brin provocateur, ne peut s'empêcher de piquer. « On parle bien de Tonks qui n'était même pas capable de maintenir en vie ; un pot de basilic ?

— Un ami, ça soutient. Ça ne critique pas votre épouse morte tombée pour la nation.

— Ah, arrête. Ton gamin va bien.

— Dixit celui qui, en moins de quinze minutes, a demandé trois fois à Hermione si elle allait bien ? Avec toutes ces rumeurs, tu pourrais au moins essayer de ne pas leur donner du grain à moudre, sinon elle va vraiment commencer à se poser des questions. Si ce n'est pas déjà le cas…

— De quoi tu parles ? Severus feint l'indifférence.

— La rumeur. Tu n'as pas remarqué qu'on te regarde un peu trop ces derniers temps ?

— Hum. Je pensais que c'était à cause de mes nouvelles bottes." Laisse-t-il échapper pince sans rire.

« Sois plus discret, c'est tout.

— Mais discret vis-à-vis de quoi ?

— La moitié de l'école est persuadée que tu es en couple avec Hermione. C'est le bruit qui court depuis une semaine. Et elle est sans doute au courant. Elle est adulte, elle sait passer outre. Mais si tu continues à te comporter étrangement, là, elle va commencer à se poser de sérieuses questions.

— Te serais-tu transformé en un foutu névrosé, corrompu par des romances à l'eau de rose ? Je te savais mièvre et romantique, mais là, tu touches le fond. » Severus conclut avec dédain, refusant de céder à la panique intérieur. Son regard sombre se perdant dans le fond de son verre.