Comme un air de vacances…
Alors que le soleil semblait au zénith et cognait contre le bitume, Candice soupira de satisfaction en rencontrant enfin un brin d'ombre. Abritée par le auvent de la porte d'entrée de cette bâtisse encore inconnue, elle jeta un oeil derrière elle, observant la mine ensoleillée de l'assemblée. Souriante, elle ôta son grand chapeau rose de sa tête et entreprit la recherche de ses clés dans son sac à main. L'intérieur se démarquait par son dérangement… Les stylos éparpillés rencontraient un chargeur posé en vrac... Un portefeuille à peine refermé recouvraient des post-it griffonnés… Enfin, comme d'habitude, ce sac était un vrai fourre-tout et un obstacle à toute recherche fructueuse. Derrière elle, Antoine l'observait, non sans souffler contre l'attente interminable qu'elle leur imposait. Et vue la mine nullement réjouie de la brune derrière lui, Antoine n'était pas le seul à s'agacer…
« Mais tu cherches quoi ?! pesta une voix féminine derrière-elle.
- Bah les clés !
- Mais c'est moi qui les ai ! souffla Emma. Comme t'en avais plein les mains, la dame de l'accueil me les a données…
- Eh bah qu'est-ce que t'attends alors ?! maugréa sa mère.
- Oui bah ça va ! Tu pourrais être plus aimable hein… s'amusa-t-elle en glissant la clé dans la serrure. »
La porte en bois jaune s'ouvrit sur un salon à la décoration minimaliste. Épatée par la beauté de l'endroit, la commandante s'immisça sur le parquet, faisant rouler sa valise jusqu'aux canapés qui entouraient une table basse en verre où dormaient quelques prospectus. À côté, une grande table habitait la pièce. Recouverte d'une jolie nappe rouge, le meuble se distinguait par sa largeur proéminente. Voilà un endroit familial satisfaisant pour se retrouver autour d'un bon repas… Et la luminosité de l'espace était frappante, sûrement grâce aux baies vitrées qui donnaient sur un petit jardin-terrasse privatif. Admiratifs, chacun se donnait à ses propres commentaires…
« Bon c'est pas mal en vrai ! La cuisine est équipée en plus, on est sauvés ! déclara Jules avant de s'avachir sur le fauteuil marron.
- Pas mal ?! répéta Emma faussement surprise. Archi canon, tu veux dire…
- Pour le coup, je suis plutôt d'accord avec ma fille… rajouta Candice.
- Mamaaaaaaan ?! hurla une voix depuis l'étage.
- Quoi ?!
- Vous prenez quelle chambre vous ?
- Avec Antoine on est au dernier étage je vous ai dit….
- Ouais c'est carrément tout le palier qu'est privatisé quoi… bouda Martin en descendant au salon.
- Privilège de l'âge ! intervint Antoine d'un ton moqueur. Tu veux que je te monte ta valise ma chérie ? demanda-t-il à sa fille qui avait déjà investi la terrasse.
- Je m'en charge ! lança Emma. Je vais la mettre dans notre chambre…
- Merci… sourit-il sincèrement. C'est gentil d'avoir accepté de cohabiter avec elle d'ailleurs.
- J'préfèrai ça que de me taper les jumeaux ! ironisa-t-elle.
- Eh ! Les jumeaux t'entendent hein ! rétorquèrent-ils ave amertume.
- Oh la la ! Enfin je les retrouve… soupira gaiement Candice en grimpant les escaliers. »
Arrivée au deuxième étage, Candice poussa la porte de leur suite. Émerveillée, elle contempla le joli nid douillet qui les attendait avec salle de bain accolée. De quoi garder un peu d'intimité dans cette villa bien chargée ! Elle tira les rideaux de leur chambre pour laisser s'infiltrer quelques rayons du soleil et la vue océan s'offrait à elle, avec en prime un petit balcon appréciable. Le bonheur… songeait-elle alors qu'Antoine faisait irruption dans la pièce.
« Tiens ! Ton sac…
- Merci… T'as vu ? demanda-t-elle en montrant l'océan. C'est royal franchement…
- J'avoue ! T'as bien choisi… murmura-t-il à son oreille tout en l'enserrant par la taille.
- Et les enfants s'engueulent… s'amusa-t-elle. C'est signe que tout va bien !
- Suzanne est déjà en train d'installer un campement pour ses jouets ! observa-t-il en regardant la pelouse s'animer sous leurs yeux.
- Hum… soupira-t-elle en se retournant dans ses bras. On va être bien là…
- Ah oui ! Là on est très très bien ! ironisa-t-il en la faisant reculer. »
Candice éclata de rire, s'amusant à l'embrasser sans parvenir à repousser sa marche forcée. Rapidement, le bas de ses jambes rencontra un obstacle et la blonde tomba à la renverse sur le matelas, entraînant dans sa chute son compagnon qui rigolait à son tour. Il l'embrassa à nouveau, s'amusant à la taquiner pour la faire rire davantage. Et Candice s'apprêtait à riposter lorsqu'une voix meugla depuis le couloir.
« Mamaaaaaan ! cria Emma qui débarqua rapidement dans la pièce.
- Quoi ?
- Ah bah je comprends mieux pourquoi ça voulait privatiser l'étage… ironisa la jeunette en les observant se relever du lit.
- Bon… Qu'est-ce qu'il y a ?
- C'est toi qu'a le code wifi ? J'aimerais bien envoyer des photos à Sacha, il m'harcèle depuis qu'on a atterri.
- Oh la la ! Mais il avait qu'à venir aussi…
- Bah non, tu sais bien… Il voulait se reposer avant d'entamer sa tournée.
- Oui bien sûr ! Et puis l'avion c'est mauvais car ça pollue… ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel.
- Bah il a pas tort hein !
- Oui enfin on est pas dupes… On a bien compris que c'est juste parce qu'il avait peur de l'avion qu'il est pas venu hein… rigola Candice en fouillant dans son sac. Tiens ! Le code… Et tu le perds pas !
- Mais non…
- Tu feras un bisou à Éloïse aussi…
- Ouais… souffla-t-elle. Tu crois qu'elle va m'en vouloir d'être partie loin sans elle ?
- Si tu l'appelles tous les jours ça devrait aller…
- Et on lui rapportera un souvenir ! rajouta son beau-père en souriant.
- Hum… Bon je les appelle, avant que Sacha déclare l'État d'urgence…
Antoine éclata de rire tout en sortant son téléphone. Candice le vit et l'usurpa des mains.
- Eh ! protesta-t-il. Mais !
- Ah non j'te vois venir ! Cette semaine c'est vacances ! rappela-t-elle en insistant sur le dernier mot.
- J'suis le commissaire Candice, forcément que je dois m'inquiéter de ce qu'il se passe là-bas…
- Sauf que ça fait même pas 24h qu'on est partis et t'allais déjà appeler Marquez !
- N'importe quoi… mentit-il penaud.
- Je te connais chéri… minauda-t-elle en volant le téléphone avant de quitter la pièce. Et je t'ai laissé la valise pour que tu sortes les affaires ! cria-t-elle depuis les escaliers.
- Bah voyons… bouda le commissaire en fixant le bagage rose devant lui. Ah la la, j'te jure ! »
. . . . .
Alors que leurs affaires s'arrangeaient peu à peu, la fratrie avait investi le grand salon désormais totalement recouvert de cartes, prospectus et guides touristiques. Leur beau-père les rejoignit rapidement, s'affalant dans le canapé à son tour.
« T'as rangé nos affaires ? s'exclama Candice depuis la cuisine.
- Oui ! Tout est rangé… J'ai même fait le lit…
- Bien… lâcha-t-elle admirative avant de le rejoindre sur le fauteuil. Merci… minauda-t-elle en lui offrant un baiser sur la joue. Dis… Ça te dit un restau en amoureux ce soir ?
- Ah bah sympa… À peine arrivés, déjà expédiés… maugréa Jules.
- Mais on a encore une semaine entière pour faire des restaus les enfants… Puis vous oubliez que normalement c'est un voyage de non-noces hein… rappela-t-elle en souriant.
- Techniquement, vous en avez déjà fait un…
- Alors, intervint Antoine, si je peux me permettre… une semaine sous la menace de la mort permanente qui finit avec un harpon dans les fesses… j'appelle pas ça un voyage de non-noces...
- Mais ça c'est parce que vous êtes incapables de rester sans rien faire ! répliqua Emma. On te connaît maman… Faut toujours que tu fourres ton nez partout !
L'assemblée la dévisagea, acquiesçant les propos de la brune.
- C'est pour ça que cette semaine, je veux que ce soit cool… tranquille… sans prise de tête…
- Ça va durer 2 jours, plaisanta Martin.
- Eh ! Je vous rappelle que je me suis engagée à rester neutre. Je suis pas commandant, ni détective… Je suis juste Candice !
- Hum…
- Puis vous chipotez alors que vous adorez rester tous ensemble !
- Mais ça va, on plaisantait ! On restera tous les 5 pour la soirée… Toute façon on est tous crevés !
- D'ailleurs, j'ai pas du tout eu le temps de regarder les activités qu'il y avait à faire à La Réunion… Vous avez repéré des trucs ? demanda Jules en s'intéressant aux prospectus.
- Déjà le piton de la Fournaise ! Faut absolument qu'on y fasse une rando !
- Ah de ouf !
- Je suis pas trop randonnée moi… ajouta Candice. Mais il paraît qu'il y a une vue à tomber là-haut ! Je ferais un effort… Exceptionnellement…
- Pardon ? s'étouffa Antoine.
- Quoi ?
- C'est hors de question ! Tu montes pas là-haut avec ton cœur…
Candice souffla, agacée par sa restriction.
- Mais tout va bien… Je fais plus de crise depuis des mois…
- Sauf que le risque 0 n'existe pas et que t'es encore fragile !
- Mais j'essaierai et si ça va pas, j'arrête !
- Ah non ! C'est même pas la peine d'y penser !
- Quoi ?! s'indigna-t-elle. Tu vas m'attacher ici ?!
- Eh bah s'il le faut, j'hésiterai pas.
- Non mais tu peux pas arrêter de t'inquiéter juste deux secondes, nan ?
- Bah nan ! Et je te préviens Candice, si t'essayes, je prends un vol direct pour Paris ! rétorqua-t-il avec énervement. Comme ça c'est réglé !
- Mais ça va pas non ?
- C'est le Piton ou c'est moi, Candice ! ordonna-t-il visage fermé. »
Les enfants hochèrent négativement la tête face à la joute verbale qui s'offrait à eux. Ils n'étaient arrivés que quelques heures plus tôt et déjà leurs parents s'engueulaient. Agacés, ils les laissèrent dans leur guéguerre spéciale tête de mule et rejoignirent la terrasse où Suzanne coloriait gentiment.
« Bon demain journée plage toute façon ! s'exclama Léo avec engouement.
- J'ai pris plein de bouées ! répondit la plus jeune en jetant ses crayons sur la table.
- Go ! On les gonfle ! s'écrièrent les jumeaux en suivant la petite.
- En attendant, l'accès direct à la plage depuis la terrasse, c'est classe hein ! observa Emma en souriant.
- P'tain mais i piscines et 5 bars ! Mais c'est dingue ce truc !
- Bah c'est un complexe hôtelier quoi… J'avais repéré un restau 5 étoiles aussi…
- Montre ! ordonna Jules avec vigueur.
- Il me semble qu'il faut s'inscrire à la réception. Parce que nous, on a pas la formule tout inclus. Maman préférait qu'on ait un logement indépendant.
- Mais on a accès à toutes les activités de l'hôtel ?
- Évidemment !
- Ok… Cette semaine s'annonce dingue ! »
