Bonjour et bienvenu dans « Anxiousness », une fanfiction sur l'univers de Twilight de Stephenie Meyer et plus spécifiquement sur les Quileutes. J'ai pour projet d'écrire une fiction sur chaque imprégnation, commençons par celle de Kim et Jared. Il devrait y avoir une cinquantaine de chapitres tous assez courts. Peut être que certains d'entre vous ont déjà lu "Finding the whale" une fanfiction non achevée, il y a un lien, mais je l'ai supprimé le temps de recommencer l'univers. N'hésitez surtout pas à donner votre avis, c'est si motivant et ça peut me pousser à poster bien plus vite le chapitre suivant. Après tout, c'est une aventure collective ! Lors de votre lecture, je vous conseille d'être accompagné par la mélodie suivante, « In the androgynous dark » de Brambles, qui représente à mes yeux la noirceur tout comme le désir de vivre qui habitent ce récit.


La folie est comme un lac gelé.

Une lumière tamisée habite la pièce aux murs d'un écru apaisant, les murs ont beau être hauts, le tout est exiguë. Pas plus d'une dizaine de mètres carrés. Un meuble aux multiples étagères couvertes de jouets et de figurine amusantes se soulève près d'un des murs, tandis qu'un labrador somnole dans un large panier qui me semble confortable. C'est une situation préférable à la mienne, assise dans un fauteuil d'un rouge criard face au Docteur Lopez, ma psychiatre depuis deux ans. Nous avons passé l'après midi à parler de ma rentrée au lycée, en ce mois de septembre, du travail de ma mère, de mon nouvel appareil photo acheté avec mes quelques économies, pendant que je triturais mes doigts. Un coup d'œil à l'horloge au mur m'indique qu'il ne me reste que quelques minutes de consultation, je ne voudrais pas lui prendre de son temps, je la vois tous les mois après tout. J'aimerais que ce soit plus régulièrement, mais ma mère doit me conduire depuis Forks jusqu'à Port Angeles, ce qui représente plus de deux heures de route aller retour. Nous travaillons ensemble sur mon anxiété, et il reste encore du travail, vu que je ne suis même pas capable de prendre seule un bus. Passer mon permis de conduire, n'en parlons pas.

- Et tu as parlé à ce garçon, Jared c'est ça ? Me demande ma psychiatre, avec un sourire complice.

Jared est un garçon du lycée, et dire qu'il me plait serait un euphémisme. Nous vivons dans la même réserve depuis toujours, nous sommes assis côte à côte en cours d'histoire et nos mères sont amies. Cependant, malgré l'ensemble de ces facteurs qui pourraient nous lier, il ne me remarque pas le moins du monde. C'est étrange, que la seule personne avec qui je puisse parler de lui, se trouve être une femme d'une cinquantaine d'années dans le cadre d'un rendez vous médical ? J'aurais préféré en bavarder avec une amie de mon âge.

- Non ! Je m'exclame, mon visage qui s'empourpre et mon cœur qui s'emballe, comme une évidence.

Et je n'ai toujours pas écrit cette lettre dont elle m'a parlé. En effet, il est utile d'écrire une lettre destinée à une personne à qui on ne parle plus ou à qui on ne peut pas s'adresser, pour se défaire de ses sentiments, pour mieux les maîtriser. Bien sûr, il n'est pas nécessaire de l'envoyer. Elle me le demande à nouveau car elle voit bien que je veux lui dire quelque chose de précis. Il faut que je lui dise. Allez, parles lui, c'est son travail, ou tu ne vas encore pas en dormir de la nuit.

- Kim, tu voudrais ajouter quelque chose ? M'interroge la femme âgée en cherchant mon regard, de sa voix douce habituelle, le silence planant depuis de longues secondes.

- Je … Je commence avant de réaliser que ma voix est trop basse, avant de tousser à plusieurs reprises.

Cesses de vouloir gagner du temps, pauvre fille.

- Je fais des mauvais rêves. Je lâche cette révélation d'une banale affligeante avant de déglutir.

- Quel genre de mauvais rêves ?

- Je rêve d'une jeune fille. Elle dit qu'elle a besoin de mon aide, mais j'ignore s'il s'agit toujours de la même fille. Elle a parfois une mèche rose dans les cheveux et elle se contente de me sourire. D'autres fois, elle me court après et j'ai le réflexe de m'enfuir. Mais ces derniers temps, elle est le plus souvent loin de moi. Comme inaccessible, elle souffre et me demande de l'aider même si j'en suis incapable. Une seule chose reste toujours identique. J'explique lentement, et chaque mot me libère petit à petit du poids de cette confession.

- Laquelle ? Demande-t-elle, les sourcils légèrement froncés.

- Elle me ressemble comme deux goutes d'eau. Enfin, des fois elle est un peu plus jeune que moi. Je précise, mordillant ma lèvre inférieure en resserrant les jambes, couvertes d'un simple jean d'un bleu délavé.

- Comme une représentation de toi-même ?

- Non. Je sais que ce n'est pas moi, pas un reflet ni un miroir, mais c'est mon portrait craché. J'insiste, ayant peur d'avoir mal choisis mes mots.

- C'est pour ça que c'est si difficile de la voir souffrir. Qu'est-ce qui peut bien lui arriver ?

- Elle pleure ou elle hurle. Elle tente de me montrer ses blessures mais j'ai du mal à la regarder, à la voir se noyer, être comme avalée par la terre … J'explique d'une voix encore plus basse, me remémorant les images de ces maudits rêves.

- Désolé, ça doit avoir l'air dingue. J'ajoute, avec une moue gênée, en contraste avec l'aura détendue et le regard bienveillant de la professionnelle.

- Kim, ce que tu dis n'est ni dingue, ni fou, ni aucune autre sornette que tu pourrais te raconter. C'est ton expérience et elle est légitime. Merci de me faire confiance en me la racontant, tu fais de gros progrès, depuis quand ces rêves t'embêtent ? M'assure madame Lopez avant de m'interroger.

- Depuis quelques semaines. Je réponds après avoir hausser les épaules.

Menteuse, ça va bientôt faire trois mois. Depuis le début de l'été à vrai dire.

- Je pense que tu connais déjà la signification de ce rêve. Cette personne, parfois un peu plus jeune que toi, mais qui te ressemble tant, c'est ta petite sœur … Tu ne peux pas continuer à te flageoler pour sa disparition, Kim. Tu étais une enfant, toi aussi, rien de tout cela n'est de ta faute. Tu n'avais que cinq ans ans. Je n'ose même pas imaginer ce que vous avez pu vivre, toi et ta famille, dans l'incertitude et l'ignorance de ce qui a pu lui arriver.

- Je sais. Je rétorque sans conviction, ayant hâte que cette conversation qui me met de plus en plus mal à l'aise se termine.

- N'oublies pas ce petit conseil. Lorsque tu fais une crise d'angoisse, tu t'isoles, tu t'assoies et tu comptes tes respirations jusqu'à cinquante. Ça te ramène à ton propre corps. Tu es une merveilleuse jeune fille de seize ans, profites de tes années lycée, il faut que tu vives ta vie.

Et sur cet ultime conseil, Toby, qui s'est réveillé, vient se frotter contre ma jambe alors que mes doigts passent délicatement dans son poil brillant. Le labrador est une source de réconfort pendant que sa maîtresse accepte mon chèque, ou plutôt celui de ma mère qui m'attend à l'extérieur. J'ai eu le temps de voir cet animal grandir, en plus de deux ans, on ne dirait presque plus le même animal. Alors que j'en suis restée au même point. J'ignore si ces rendez vous sont si utiles, mais je m'y accroche comme à une bouée dans une tempête. Compter jusqu'à cinquante. Rien de bien compliqué, mais ça ne fonctionne pas. Je me sens de plus en plus glisser dans mes angoisses et ma peur de vivre. La folie est comme un lac gelé sur lequel je me déplace péniblement, dans la crainte qu'il ne craque et que le courant glacé ne m'emporte au loin jusqu'à ce que je me noie sous le givre. Dans l'insignifiance totale.