— La horde est proche ?

— Trop proche, haleta Bilbon. A deux lieues pas plus, mais ce n'était pas le pire.

— Les wargs ont flairé notre odeur ?

— Pas encore, mais ça viendra. Nous avons un autre problème.

— Ils vous ont vu ? Ils vous ont vu…

— Non, ce n'est pas ça.

— Aaah que vous avais-je dit discret comme une souris, l'étoffe d'un cambrioleur !

Les nains commencèrent à parler entre eux, oubliant totalement le pauvre hobbit et le potentiel danger qui arrivait sur eux. Eawyn eut un sourire attendrit, certaines choses ne changeraient jamais.

— Ecoutez-moi ! J'essaie de vous dire qu'il y a autre chose là-haut !

Eawyn fronça les sourcils. Elle avait entendu des choses parmi les dires des mercenaires, mais elle n'y avait jamais donné crédit. Ainsi quelque chose se terrait vraiment dans ces montagnes. Enfin, ça ne devait pas être si dangereux puisque les mercenaires étaient revenus pour en parler.

— Quelle forme cela avait-il ? Comme un ours ?

La guerrière lâcha un soupir consterné. Evidemment, Gandalf savait pertinemment à quoi ils allaient faire face. Comme toujours.

— Oui… Oui mais plus gros beaucoup plus gros.

— Dans quoi nous avez-vous encore embarqué Gandalf, ne put s'empêcher de pester la Rohirrim.

— Vous saviez pour cette bête !

— Evidemment qu'il sait, grogna l'archère.

Ils allaient encore devoir courir pendant des heures en essayant d'échapper à leur mort imminente. Une routine.

— Il y a une maison pas loin d'ici, où nous pourrions trouver refuge.

— La maison de qui ? Un ami ou un ennemi ?

La réponse n'allait pas leur plaire.

— Ni l'un ni l'autre. Il nous aidera ou il nous tuera.

— Quel choix avons-nous…

— Aucun.

Courir pendant plusieurs heures n'avait jamais été le point fort d'Eawyn. Elle avait l'habitude d'être à cheval et ces derniers mois à parcourir la Terre du Milieu à pieds n'avaient pas aider à améliorer son endurance. Elle déployait tous les efforts du monde pour tenir la distance. Aucun doute que personne ne s'arrêterait pour elle. Elle avait les yeux fixés sur le dos de Dwalin qui courait devant elle. A ses côtés Fili se maintenait à son allure en un encouragement muet. Pas de doute, après cette aventure, elle prendrait une retraite bien méritée dans un endroit loin de tous les problèmes de ce monde.

Elle avait hâte.

Elle grimaça en traversant un gué pour la énième fois. Pourquoi cette fichue région avait-elle autant de rivière ?! Malédiction. Au moins il ne pleuvait pas…

Un grognement puissant les stoppèrent dans leur course. Ils savaient les wargs sur leur talon, mais visiblement l'ours géant les suivait également. C'était loin d'être une bonne nouvelle. Il ne restait plus qu'à espérer que la maison ne se trouve juste après cette forêt.

— De ce côté, vite !

Ils reprirent leur course puisant dans leur dernière force. Après plusieurs minutes à enjamber les racines et autres obstacles dans la forêt, ils virent avec soulagement la plaine apparaître et un peu plus loin la fameuse maison dont le magicien leur avait parlé. Par chance, elle existait encore.

Fili saisit fermement la main de sa compagne et l'entraîna à sa suite. Ils y étaient presque. Bombur les déspassa à vive allure et alla s'écraser contre la porte fermée, bien vite imitée par tous les autres nains. Bien sûr, aucun n'eut l'idée de la déverrouiller.

— Ouvrez la porte !

— Vite !

C'est Thorin qui poussa sans ménagement ses compagnons pour soulever le loquet. Tous se hâtèrent d'entrer. Eawyn se laissa tomber au sol, épuisée alors que les autres refermaient difficilement la porte sous les grognements énervés de l'ours.

— C'est quoi ça ?

— Ca ? C'est notre hôte. Il s'appelle Beorn et c'est un changeur de peau. Parfois c'est un énorme ours brun, parfois c'est un homme grand et fort. L'ours est imprévisible, mais l'homme peut entendre raison. Cependant, c'est quelqu'un qui n'aime pas beaucoup les nains.

Eawyn fixa la porte, pensive. Un changeur… Elle les pensait disparu depuis bien longtemps. Leur capacité avait souvent attiré les convoitise et cela les avait longuement contraint à l'esclavage jusqu'à leur totale disparition. Du moins, elle le pensait. Si lui avait survécu, d'autres le pouvaient. Voilà une quête qui pourrait être intéressante.

— Il est soumis à un maléfice.

— Ne dites pas de bêtises, il n'est soumis qu'à son propre enchantement.

— Les changeur de peau ne sont pas du côté du mal, Maître Nain. Je n'ose imaginer ce que celui-ci à vécu et ce qu'il ressent en voyant les ennemis que nous avons apportés sur ces terres.

— Qu'en savez-vous qu'il ne fait pas partie des forces du mal, cracha Dwalin.

Eawyn le toisa.

— Je m'intéresse aux autres peuples de ces terres, moi. Les changeurs de peau ont été les premières victimes du retour des orques.

Dwalin marmonna dans sa barbe une réponse qu'elle n'aurait sans doute pas appréciée si elle avait été en mesure de la comprendre. A croire qu'elle ne s'entendrait jamais réellement avec eux.

— Bien à présent, tâchez de dormir. Vous ne craignez rien ici cette nuit.

Si le changeur faisait fuir les orques, ils ne risquaient effectivement rien. Cependant, il pouvait les laisser passer pour se débarrasser de ses visiteurs…

Eawyn rassembla un peu de foin et de paille dans un coin pour se faire un lit de fortune. Elle s'éloigna des autres, au moins ce soir elle dormirait bien et ne risquerait rien. Elle enleva ses bottes avec plaisir et s'allongea avec bonheur. Elle espérait que le lendemain, elle pourrait emprunter un peu d'eau à son hôte pour une toilette bien mérité. Elle pourrait enfin changer ses vêtements qui puait le gobelin par sa dernière tenue de rechange. Elle n'était pas certaine de pouvoir rattraper l'odeur de l'actuelle… Il leur restait encore plusieurs semaines de voyage, elle devrait s'en contenter.

Un sourire se dessina sur ses lèvres quand la silhouette de Fili apparut devant elle. Les ronflements des nains se faisaient entendre, il avait attendu que les autres s'endorment pour la rejoindre. Il s'allongea à ses côtés sans un mot. C'est en sentant sa chaleur contre elle qu'elle réalisa qu'il lui avait manqué. Ils n'avaient eu aucun moment ensemble depuis leur départ de Fondcombes. Il n'y avait eu que des regards rapides, des sourires fugaces.

— J'ai hâte que nous arrivions à Erebor, je ne peux me contenter que de cela.

Un souffle contre son oreille.

Un long frisson qui l'électrisa.

Un battement de cœur qui la ramena à ses sentiments pures.

— Je ne le peux pas non plus.

Fili eut un sourire. Son cœur s'allégea. Malgré leur discussion chez les elfes, il avait toujours peur que par son sang le lien qui les unissait soit moins puissant chez elle et qu'elle s'en aille. Il en mourait. Déjà cette proximité distante le rongeait. Si proche, si loin. Il savait que le lien voulait cela et il arrivait à s'accommoder de peu la plupart du temps. Il n'était pas un jeune nain, il savait faire la part des choses et prendre sur lui. Mais elle était son unique, il voulait lui offrir le monde.

Eawyn se réveilla étonnamment tôt le lendemain matin. Le soleil arrivait péniblement. Elle enleva délicatement le bras de Fili et se faufiler jusqu'à la sortie. D'un mouvement de tête, Gandalf lui indiqua qu'elle pouvait sortir sans risque. Une plaine verdoyante s'offrit alors à ses yeux. Un immense sourire se dessina sur ses lèvres en voyant des chevaux galoper au loin. Bon sang, ce que ça lui avait manqué !

Son regard s'accrocha alors sur la silhouette immense à sa gauche. Leur hôte sous forme humaine.

— Maître Changeur, je vous salue et vous remercie de votre hospitalité et de votre protection.

Beorn cessa son activité et l'observa de toute sa hauteur. Il n'avait plus l'habitude d'échanger avec d'autres que les animaux qui lui tenaient compagnie. Il hocha simplement la tête et reprit son activité. Eawyn s'installa non loin et observa silencieusement les équidés. Elle rêvait de s'élancer dans la plaine et de se joindre à eux. Elle profita simplement du soleil sur sa peau et du spectacle qui s'offrait à elle.

— Il y a une réserve d'eau de pluie à l'arrière, lui proposa Beorn en la voyant récurer ses ongles avec son poignard. Vous pouvez prendre un linge dans le placard à côté de l'entrée.

Eawyn relava la tête surprise. Elle fut ravie de ces informations, elle ne rêvait que de cela.

— Je vous remercie, c'est très généreux. Je vais me retirer quelques instants.

Eawyn s'éclipsa rapidement. Elle récupéra le linge et fila vers la réserve d'eau. Il s'agissait d'un bassin qui devait servir la moitié du temps à abreuver les animaux. Elle n'en était pas moins ravie. Elle frotta avec vigueur la crasse qui semblait s'être incrustée sur sa peau. Elle remplit un seau et commença à décrasser ses cheveux. L'eau devint rapidement marron. Elle dut s'y prendre à trois fois pour qu'enfin ils aient l'air propre. Elle s'attaqua ensuite à ses vêtements qui étaient dans un état bien pire. Elle enfila sa tenue de change et s'appliqua à refaire sa coiffure en peignant ses cheveux de ses doigts. Elle mit ensuite tout à sécher à l'air libre. Elle entendait des éclats de voix, les autres devaient se réveiller.

Fili ouvrit péniblement les yeux, il s'étira longuement profitant qu'aucun départ dans l'urgence de soit annoncer. Alors qu'il allait rejoindre son frère, il croisa le regard dur de Thorin. Celui-ci lui fit signe de le suivre. Le blond soupira, il devinait quelle conversation l'attendait. Il était aisé de comprendre ce qui pouvait agacer son oncle et malgré la discrétion dont il pensait avoir fait preuve, rien n'échappait au roi.

Il retrouva son oncle un peu à l'écart, loin des oreilles curieuses. Il inspira longuement. Il ne servait à rien de s'énerver.

— Un jour tu seras roi, Fili.

Le blond acquiesça. Il le savait, on le lui avait souvent répété. Thorin n'avait jamais souhaité de descendance la tâche d'héritier lui était alors revenu et il avait été éduqué ainsi depuis aussi longtemps qu'il s'en souvienne. Il avait souvent maudit ce titre, l'avait apprécié à d'autres occasions.

— Un roi sert son peuple, son peuple à des attentes.

Il resta silencieux.

— Tu ne peux pas les insulter ainsi, cracha Thorin.

Fili eut un hoquet de stupeur. Les insulter ? Vraiment. Il serra les lèvres se retenant de lâcher toute sa colère, il posa sur son oncle un regard assassin. Il y avait des limites à ce qu'il pouvait entendre. Eawyn n'était pas une naine de rang noble, elle n'en était pas moins une personne de valeur. Une personne à qui il tenait énormément.

— Je ne vois pas en quoi cela insulterait notre peuple, soupira Fili. Elle fera une reine digne, une reine qui aura aidé à reprendre notre royaume. Quel meilleur exemple !

Il vit la colère s'inscrire sur le visage de Thorin. Ça ne serait pas si simple.

— Ce n'est pas possible, Fili ! Cela ne se fera pas. Jamais, hurla le brun.

— Mon oncle, ce n'est pas à toi d'en décider.

Thorin lui lança un regard devant lequel il n'aurait pas osé se rebeller quelques mois plus tôt. Un regard qui lui ordonnait de courber l'échine et de se tenir à sa place. Or, il ne lui était pas possible de laisser Thorin tout roi soit-il lui dicter la conduite de son cœur.

— Tu es mon héritier Fili. Cette femme ne sera jamais reine de mon peuple. Certainement pas une humaine, encore moins elle.

Fili ferma les yeux un bref instant, soudain las de cette conversation qui ne mènerait jamais à rien.

— Ma compagne, claqua-t-il.

— Tu te berces d'illusions.

— Je connais mon coeur, je connais les mots des anciens, il n'y a aucun doute. Accepte-le.

— Pas une humaine, elle sera morte demain.

Fili dut faire appel à toute sa volonté pour ne pas se jeter sur son oncle, la colère irradiait dans ses veines.

— Elle est à moitié naine, elle fait partie des nôtres. Tu le saurais si tu n'avais pas passé ton temps à la mépriser. Tu la juges sans la connaître depuis le premier soir.

— Ma première idée était vraie, s'entêta le roi. Elle est une nuisance. Nous n'avions pas besoin d'elle pour reprendre Erebor, elle ne fait que te détourner de ton destin. Elle ne sera pas reine.

Fili eut un rire sans joie.

— Alors je ne serai pas roi. Je laisse la place à mon frère. Espère seulement que son cœur ne croise jamais le chemin d'une humaine ou d'une elfe. Maintenant que nous sommes d'accord sur le fait que je ne serais pas roi et qu'elle ne sera pas reine, je te prierai de ne plus jamais l'insulter. Je ne retiendrai plus ma colère.

Fili se détourna de son oncle sans un regard en arrière. Il retourna dans la bâtisse du changeur ou il trouva tout le monde attablé discutant joyeusement. Balin le sonda d'un regard inquiet. Kili voulut dire quelque chose, mais avant qu'un quelconque mot ne sorte de sa bouche, Fili déposa devant lui l'insigne qui avait jusque-là prouvé son statut d'héritier. Le silence se fit.

— Fili ?

— Bonne chance à toi, mon frère.

Il croisa le regard colérique de Thorin qui venait d'entrer. Il s'en détourna et se servit à manger. Personne n'osa ajouter quoique ce soit. Balin pinça les lèvres, il s'était douté que ça se terminerait comme cela depuis le premier regard qu'il avait croisé entre le prince et la guerrière. Eawyn blanchi comprenant plus ou moins les raisons de cette situation. Il lui avait toujours semblé évident que Thorin ne l'accepterait pas, mais elle pensait que le problème ne surviendrait qu'après la reprise d'Erebor, qu'ils avaient le temps.

Tous recommencèrent à manger sans oser relancer des conversations joyeuses.

— Dites moi, pourquoi Azog le profanateur est-il à vos trousses, questionna finalement Beorn après s'être fait à avoir autant de nains chez lui.

— Vous connaissez Azog ? Comment ?

Eawyn offrit un regard compatissant au changeur, elle connaissait l'histoire.

— Mon peuple fut le premier à vivre dans les montagnes avant que les orques n'arrivent des contrées du nord. Le profanateur a tué presque toute ma famille. Les autres sont devenus ses esclaves… Pas pour le travail voyez-vous, mais pour son plaisir. Mettre en cage des changeurs de peau et les torturer l'amusait beaucoup…

— Il y en a d'autres comme vous ?

Eawyn se retourna vivement vers Bilbon, lui ordonnant silencieusement de se taire. Les orques ne laissaient jamais rien.

— Il y en avait beaucoup.

— Et maintenant ?

Eawyn soupira. Elle savait que Bilbon ne lui voulait pas de mal, qu'il était curieux d'un peuple qu'il ne connaissait pas. Mais il n'était pas bon de raviver les horreurs qu'avait dû vivre cet homme. Notamment la perte de sa famille.

— Maintenant, il n'y en a plus qu'un.

Un silence tendu s'étala.

— Donc il vous faut atteindre la montagne avant le dernier jour de l'automne, changea-t-il de sujet.

— Avant le dernier jour de Durin, confirma Gandalf.

— Le temps va vous manquer.

— C'est pour cela que nous devons traverser la forêt noire.

Eawyn se redressa brusquement et tourna un regard inquiet à Gandalf.

— Depuis quand, s'écria-t-elle.

— Un mal se cache dans cette forêt, sous ses arbres s'abritent des créatures féroces. Je ne m'y risquerai qu'en cas d'extrême nécessité.

— Nous prendrons la route des elfes. Elle est encore sûre.

— Êtes vous certain qu'elle existe encore, s'inquiéta l'archère.

— Sûre ? Les elfes de la forêt noire ne sont pas comme leur semblable. C'est dangereux.

Un plie soucieux apparut sur le visage des nains.

— Que voulez-vous dire ?

— Ces terres sont infestées d'orques. Leur nombre ne cesse d'augmenter et vous êtes à pied, vous n'atteindrez jamais la forêt.

Beorn se redressa.

— Je n'aime pas les nains, ils sont cupides et aveugles, aveugles face à toutes vies qu'ils estiment moindre que la leur.

Il sauva une souris blanche des mains de Dwalin.

— Mais les orques je les hais plus encore. Que vous faut-il ?


Vu l'accueil réservé à cette histoire, je pense la supprimer.

Je l'ai écrite pour moi, mais si je la partage c'est pour avoir un échange dessus, des retours…

J'imagine que c'était trop tard pour écrire sur ce fandom...

Et aussi que cette plateforme se meurt.

C'est bien dommage.