Résumé: Après leur voyage à Colibita, Harry se rapproche inexorablement de son vampire, charnellement, sexuellement, partageant des morsures et du plaisir jusque devant Lucius... Mais Severus reste encore frileux à franchir ses réticences et certaines étapes évocatrices des souvenirs douloureux du pavillon chinois.
Voici enfin le chapitre, au bout de ces quinze longs jours d'attente! Je suis désolée si je n'ai pas répondu à tout le monde, je n'ai vu certains messages que très tard, étant donné que le site est toujours bugué et n'envoie plus de mails pour prévenir des messages ou des reviews... J'espère en tout cas que vous aurez tous accès au chapitre! Bonne lecture! ;)
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– Assieds-toi… Tu veux boire quelque chose ?
– Un thé, un café, ce que tu veux…, répondit Harry en souriant.
Il fit un pas en avant pour étreindre brièvement Matthieu puis Charlie, esquiva un jouet de sa fille qui traînait sur le sol, et trouva enfin une place sur la banquette, ravi et aussi enthousiaste qu'Aria qui lui ramenait triomphalement son dernier livre cartonné.
– Je ne pensais pas vous voir avant votre départ ! s'exclama-t-il d'un ton enjoué.
Il était venu à Poudlard chercher Aria pour la journée et voilà qu'il tombait sur les deux hommes dans le salon de Luna et Padma, une petite assemblée joyeuse qui bruissait de paroles et des babillages de sa fille.
– Notre portoloin ne part que vers midi. On est passés prendre un dernier café…
– Et les bagages sont déjà prêts, ce qui est un exploit en soi ! ajouta Matthieu en riant.
Harry gloussa et attrapa la tasse de café que lui tendait Luna.
– Finalement, ce sera la Chine, alors ? Vous avez abandonné l'idée de la Roumanie ?
– Oui, la réserve de Boutefeux Chinois a accepté de nous héberger et même de nous laisser entrer dans les enclos et dans leurs laboratoires… C'est une aubaine qu'on ne peut pas refuser !
En toute discrétion – ou pas –, Luna leva les yeux au ciel et Matthieu éclata de rire.
– L'aubaine que tu ne peux pas refuser, c'est surtout qu'ils t'ont autorisé à monter un de leurs dragons ! répliqua la jeune femme.
Harry sourit, posa sa tasse sur la table basse et attrapa sa fille pour l'asseoir sur ses genoux où elle cherchait désespérément à grimper. De toute évidence, il ne connaissait pas tous les détails de ce voyage mais la complicité entre les quatre professeurs de Poudlard lui faisait toujours chaud au cœur.
– Et puis, maintenant que Mihai va mieux, grâce à toi, murmura Charlie en penchant la tête vers lui, ce n'est plus aussi urgent. Il me rapportera les lettres de Tobias lui-même… Dans sa dernière lettre, il suggérait même qu'il viendrait peut-être en Angleterre au début de l'année prochaine.
La perspective de pouvoir revoir le vampire chatouilla quelque chose au fond de son ventre et Harry cacha son sourire dans les cheveux de sa fille, en lui rendant son câlin et son bisou baveux. Severus le laisserait sans doute libre de passer du temps avec Mihai; il espérait juste que ce ne serait pas trop menaçant et inconfortable pour lui.
– Ah oui ? fit-il innocemment. Je n'ai pas eu de ses nouvelles depuis notre séjour à Colibita… J'ignorais qu'il avait prévu de venir.
– Fin janvier, si tout va bien, murmura à nouveau Charlie. Il confie ses dernières responsabilités à son successeur pour la fin de l'année, et ensuite, il sera libre… Il a prévu plein de voyages !
Libre… C'était un drôle de mot pour parler d'un vampire enchaîné à son besoin de sang pour pouvoir survivre, mais il comprenait cette délivrance à l'idée de ne plus porter de responsabilités, quelles qu'elles soient. Lucius éprouvait le même sentiment depuis qu'il n'était plus Ministre.
Quoi qu'il en soit, l'idée de revoir Mihai dans quelques semaines, de pouvoir peut-être lui donner à nouveau du sang, de partager des moments en tête à tête avec lui, baignait son cœur d'une douce chaleur. Et cette fois, il pourrait enfin lui présenter sa fille et lui montrer ce bonheur qu'il vivait avec ses deux « conjoints », jour après jour.
– Et toi, comment ça va ? demanda Matthieu. Pas trop crevé après ces matchs de haute voltige ?
– Ça va très bien, fit Harry en souriant. C'était intense mais c'était génial ! Et maintenant, je vais enfin pouvoir profiter des fêtes sans entraînements de quidditch dans le froid et sous la pluie !
Sur son genou, Aria s'agita légèrement et s'agrippa à ses vêtements pour tenter de changer de position.
– Ça a l'air d'aller très bien, oui ! ricana Charlie en désignant d'un mouvement de la tête le col de sa chemise légèrement écarté. On ne sait plus si c'est une morsure ou un suçon ! Et Severus te laisse sortir avec ça ?!
En réprimant difficilement un large sourire, Harry réajusta le col de sa chemise et tenta de faire dériver l'attention de tout le monde en s'intéressant au livre que Aria venait d'attraper. Malgré tout, ses pensées à lui restaient focalisées sur la dernière morsure de son vampire, et rien qu'à se souvenir de ce bonheur invraisemblable qu'il avait ressenti entre ses deux conjoints, une douce chaleur serpentait dans son ventre. Severus avait été admirable de maîtrise et de sérénité, et pour la première fois, Lucius avait pu le toucher pendant la morsure. Un plaisir indescriptible… Peut-être bien qu'il en avait eu les larmes aux yeux, après coup, une fois calmé et serré entre leurs bras.
Peut-être bien qu'il leur avait murmuré à tous les deux qu'il les aimait et que Severus, s'il n'avait rien répondu, avait douloureusement soupiré sur sa nuque.
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– Allez… On va y aller, fit Matthieu en posant sa main sur la cuisse de son compagnon pour se lever. Il faudrait pas qu'on rate ce portoloin ou j'en connais un qui va me faire une syncope !
Charlie grimaça sous l'ironie mais il s'empressa de se lever à son tour et, en un tour de main, il était déjà devant la porte, le sourire aux lèvres et le regard lumineux, piaffant presque d'impatience à l'imminence de leur départ. Ils s'étreignirent tous chaleureusement, jusqu'à Aria, les deux bras serrés autour des jambes de Matthieu, et qui lui laissa une trace humide de bisou sur la joue quand il la prit dans ses bras.
– N'oubliez pas que ce sont des vacances ! fit Harry en souriant. Ne travaillez pas trop et prenez du bon temps ! Et puis, c'est presque comme un voyage de noces, cette petite virée au bout du monde !
À la mention de cette vieille confidence, Matthieu lui lança un regard noir tandis que Charlie gloussait en poussant doucement son compagnon pour refermer la porte derrière eux.
– Nous aussi on va y aller, hein, ma puce ? sourit Harry en s'accroupissant auprès de sa fille. On va aller voir Severus ?
– Pa Da !
– Et Blondie ?
– Ba Di !
Tout comme Aria, il gloussa de contentement tandis que Padma éclatait de rire un peu plus loin dans le salon.
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Dans le vestibule du Manoir, Harry assit sa fille sur le banc pour lui retirer ses chaussures et lui enfiler ses chaussons. Elle avait encore les yeux brillants et les joues un peu rouges du froid hivernal et ça lui donnait un air à croquer. Pourtant, ils n'avaient pas traîné longtemps à Pré-au-lard, mais en cette fin décembre, le froid était vif et saisissant. Heureusement, ici et malgré la taille du Manoir, il faisait douillet à souhait.
– On va voir où est Sévie ? fit-il en lui tendant la main.
– Ha !
Elle lui attrapa les doigts, sauta presque de son banc et s'avança vers le couloir du rez-de-chaussée d'un pas décidé.
Par acquis de conscience, Harry jeta un œil par la porte entrouverte de la Bibliothèque, mais elle était vide de toute présence. Il se dirigea jusqu'au Petit Salon, tout aussi désert, et ouvrit les portes des bureaux de ses conjoints pour n'y trouver personne non plus. Cela, en revanche, l'étonnait davantage : quand il était parti pour Poudlard, ils étaient là et aucun n'avait parlé de sortir aujourd'hui. La salle de billard était tout aussi vide, mais il perçut un bruit venant de l'étage et il songea en souriant qu'ils étaient peut-être bien occupés tous les deux mais dans la même pièce, à savoir la chambre de Severus ou la leur. Il hésita un instant, pétri de scrupules, mais il avait le sac à langer de sa fille à poser dans sa chambre et après tout, ils avaient peut-être déjà fini leur petite affaire !
Un pas derrière Aria pour surveiller la façon dont elle grimpait les escaliers à quatre pattes, ils montèrent à l'étage et à nouveau, il perçut un bruit étouffé mais qui ressemblait davantage à de la musique qu'à deux personnes en train de s'envoyer en l'air. En passant, il déposa le sac de sa fille dans sa chambre puis poussa doucement la porte du boudoir au fond du couloir. Le bruit venait bien de cette pièce où ils ne pénétraient jamais : là-bas, tout au bout, Lucius était assis au piano et Harry afficha un sourire émerveillé.
– Ba Di ! s'exclama Aria en poussant franchement la porte et en se précipitant vers l'aristocrate.
Pour la discrétion, il pouvait repasser ! Harry grimaça de dépit, au moins autant que Lucius qui s'était interrompu dès leur entrée dans le boudoir. De toute évidence, il n'avait pas eu l'intention que quelqu'un soit témoin de ses arpèges.
– On peut savoir ce que tu fais ici ? gloussa Harry en s'approchant à pas de loup de peur de le voir se défiler.
Lucius leva les yeux au ciel puis se recula légèrement sur son siège pour prendre Aria sur ses genoux, avant de jeter rapidement un sortilège d'assourdissement quand elle posa ses mains sur les touches du piano.
– Vu que je ne suis plus Ministre et que j'ai davantage de temps libre, j'ai décidé de m'y remettre…
– Oh ! fit Harry avec un sourire ravi. Et quand est-ce que je pourrais assister à ça ?!
– Pas de sitôt ! prévint Lucius en grimaçant. Ça fait bien trop longtemps que je n'ai pas joué et je vais avoir besoin d'un sacré entraînement avant que ce soit ne serait-ce que passable !
Harry passa derrière son mari pour se pencher sur lui et glisser ses bras autour de son torse.
– En tout cas, il y a des choses pour lesquelles tu n'as pas besoin d'entraînement ! gloussa-t-il à son oreille en songeant à sa divine fellation de la veille. Et je me fiche de savoir si tu joues bien ou non, je veux juste voir tes mains et tes doigts caresser les touches du piano.
Un sourire en coin se dessina sur les lèvres de Lucius tandis que Harry l'embrassait dans le petit creux sous son oreille.
– Hum… Et un jour, je t'allongerai sur ce piano !
– Tu sais bien que ça fait partie de mes fantasmes…
Ils frissonnèrent tous les deux, d'envie et de complicité, jusqu'à ce qu'Aria, d'un son disgracieux, ne vienne interrompre la tendresse de leur étreinte.
– Quand ta fille dormira ! fit amèrement Lucius tandis qu'il éclatait de rire.
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Ils déjeunaient avec appétit et bonne humeur quand un elfe entra dans la salle à manger, salué par un son joyeux d'Aria. Harry haussa les sourcils et s'interrompit avec sa fourchette à mi-chemin de sa bouche en voyant que la créature se dirigeait vers lui et non pas vers un de ses conjoints comme il était plus fréquent. Interloqué, il prit le message qu'elle lui tendait et le parcourut rapidement, encore plus surpris à mesure de sa lecture.
– Qu'est-ce que c'est ? l'interrogea Lucius avec un brin de curiosité.
– Gringotts… Qui me demande de passer sans urgence mais rapidement malgré tout…
Machinalement, Harry retourna le parchemin mais le dos était vierge et ne lui fournit pas davantage d'explications.
– Tu as des sujets en instance avec eux ? s'étonna Severus tandis qu'Aria protestait de ne pas voir arriver la cuillère de purée jusqu'à sa bouche.
– Non. Pas du tout. Je n'ai aucun mouvement d'argent sur mes coffres, j'ai joué bénévolement pour les matchs et j'avais renoncé à tous mes droits sur la potion anti-vampire…
Du coin de l'œil, il aperçut Severus grimacer à la mention de la potion et il s'en voulut de sa maladresse. Cela rappelait à son vampire de mauvais souvenirs - même s'il ne regrettait plus aujourd'hui ce qu'il était devenu -, et le nom que la presse donnait à cette potion signifiait aussi l'extinction possible, un jour, de ses semblables.
– Quelque chose qui remonte à l'héritage des Lestrange ? suggéra Lucius.
Harry eut une moue perplexe. À sa connaissance, tout avait été réglé depuis plus de deux ans.
– Si c'était ça, ça n'aurait pas ce caractère semi-urgent, fit-il remarquer. Je vais y passer après manger, pendant sa sieste, ajouta-t-il en regardant Aria. Ça ne vous ennuie pas de la garder… ?
Presque de concert, les deux hommes levèrent les yeux au ciel devant sa question inutile et il leur sourit avec amusement et tendresse.
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Ils terminèrent leur repas tranquillement et ce ne fut que lorsqu'ils sortirent de table que Severus confia Aria à Lucius et qu'il demanda à Harry, d'un simple signe de tête, de le suivre dans son bureau. Il referma soigneusement la porte derrière eux et l'attrapa par le poignet pour le pousser doucement contre le mur, son grand corps sombre plaqué contre le sien.
– Qu'est-ce qu'il y a ? gloussa Harry. Tu veux m'accompagner parce que tu es encore inquiet qu'il m'arrive quelque chose ?
Severus grogna pour toute réponse et glissa son visage dans le creux de son cou. Harry relâcha un souffle un peu étranglé, frissonnant de tout son long. Ce genre de petits gestes avait toujours un effet démesuré sur lui.
Dans la quasi-obscurité du bureau, il n'y voyait pas grand-chose, hormis un rai de lumière sous la porte et le rougeoiement des yeux de son vampire. Les deux bras serrés autour de sa taille, il restait niché dans son cou, presque sous ses cheveux, mais son attitude était étrange. Harry sentait que ce n'était pas l'inquiétude, ni même l'envie de boire qui le taraudait; il avait plutôt l'impression que Severus venait chercher un peu de tendresse ou de réconfort… quelque chose d'aussi surprenant qu'un câlin.
Ils restèrent ainsi, dans les bras l'un de l'autre, peut-être une minute ou deux, puis Harry murmura :
– Tu veux boire ?
À ces mots, Severus finit par se redresser et leva la main pour caresser doucement son visage et ses cheveux.
– Non.
Et pourtant ses yeux étaient plus rouges que jamais, effaçant presque la noirceur de ses pupilles. Le vampire était là, juste sous la surface, et malgré le contrôle qu'exerçait Severus, son aura palpitait dans la pièce.
– J'ai besoin de m'absenter cette après-midi, sans doute pendant que tu seras parti à Gringotts… Et je pense que je vais rentrer tard, cette nuit, peut-être demain matin… Je ne veux pas que tu m'attendes pour te coucher.
Harry esquissa une moue de dépit. Il aurait bien voulu la même communion entre eux trois et la même morsure que la veille, mais cela semblait compromis. Tant pis. Il y en aurait une éternité d'autres…
– Tu ne veux pas boire avant de partir ? insista-t-il, et devant la dénégation calme de Severus, il gloussa : Je ne t'attends pas pour me coucher mais tu viens nous rejoindre quand tu rentres et je t'autorise à me mordre même si je dors.
Severus sourit de satisfaction devant ce que ça supposait de confiance, après toutes ces fois, dans le pavillon chinois, où il l'avait mordu même inconscient.
– Je peux attendre demain matin…
– Mais pas moi.
La tête relevée et appuyée en arrière contre le mur, Harry regardait son vampire droit dans les yeux, avec une assurance tranquille et sereine. Il n'était pas question qu'il attende le matin pour se faire mordre alors que Severus pouvait très bien les rejoindre dans la nuit.
– Je viendrai…
– Promis ?
– Promis.
Doucement, Severus caressa à nouveau ses cheveux puis son cou, là où il le mordait. Il posa son front contre le sien quelques secondes, puis recula à peine son visage pour embrasser ses lèvres.
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– Bonjour, fit Harry à l'employé de guichet qui lui faisait face. J'ai reçu ce courrier de la banque ce matin, et…
– Oh oui ! Lord Potter… Venez, suivez-moi…
À travers le vaste hall encombré de clients, d'employés et de files d'attente, Harry suivit le gobelin vers le fond de la salle. Sous les regards envieux de ceux qui continuaient à patienter, ils franchirent un petit portillon enchanté qui séparait les bureaux privés du tout venant, et rapidement, il se retrouva face à une créature hors d'âge qui respirait le pouvoir et l'autorité.
– Monsieur le directeur… Lord Potter.
L'employé de guichet se retira rapidement, presque avec obséquiosité, et referma la porte derrière lui sans un bruit. Un peu dérouté, Harry observa le gobelin qui lui faisait face : des habits précieux, des mains ornées de bagues, un lourd médaillon en or et rubis sur sa poitrine, et surtout, au milieu de sa figure pointue parcheminée de rides, un regard vif et alerte.
– Asseyez-vous, Lord Potter, fit-il avec un geste de la main pour désigner les fauteuils opulents devant son bureau. Je ne vais pas vous retenir longtemps; j'imagine que vous êtes un homme occupé et vous avez déjà eu l'obligeance de venir rapidement, mais je peux peut-être vous proposer un thé ou autre chose ?
– Un thé ira très bien, approuva Harry en s'asseyant tranquillement.
Tandis qu'un gobelin surgi de nulle part les servait avec diligence, le directeur lui fit la conversation et quelques politesses, mais tout ça ne menait à rien et ne satisfaisait pas sa curiosité.
– Pour quelle raison aviez-vous besoin de me voir si rapidement ? finit-il par dire avant de rire doucement : Je ne pense pas être à découvert et je n'ai aucune dépense particulière en cours…
Le directeur lui rendit un sourire amusé et, abandonnant les convenances qui seyaient davantage à un Lord de la trempe de Lucius, il plongea la main au fond d'un tiroir et en sortit un parchemin usé qu'il lui tendit par-dessus le bureau.
– Nous aurions besoin de votre aide…
– De quoi s'agit-il ? s'étonna Harry avant de tourner son regard vers le parchemin.
À peine lisible, raturé par endroits, tâché à d'autres, le vélin fin comme un cheveu comportait une longue liste d'ingrédients et quelques explications sommaires sur leur ordre de préparation.
– Une potion, soupira le directeur en s'adossant contre le dossier de son fauteuil. Une maladie gobeline; une épidémie comme il s'en produit une tous les siècles à peu près… Pour l'instant, nous la tenons à peu près sous contrôle en isolant les malades mais nous ne pouvons pas prendre le risque qu'elle se répande.
– J'ignorais qu'il existait des maladies spécifiques aux gobelins…
– Sans vouloir vous manquer de respect, Lord Potter, vous ignorez à peu près tout au sujet des gobelins.
C'était dit sans animosité et Harry acquiesça en souriant doucement.
– C'est sans doute vrai.
Le directeur sourit à son tour et prit sa tasse de thé pour en boire une gorgée tandis que Harry baissait les yeux sur la liste d'ingrédients.
– Une potion, donc…
– Oui. La plupart des ingrédients de potion sont efficaces chez notre espèce… Et vous êtes un spécialiste de la question. Vous saurez vous approvisionner au bon endroit, trouver une équivalence si un produit vous fait défaut, et puis vous apparaissez comme une personne de confiance…
– Moi ?! s'exclama Harry. Mais pourquoi ?
Le directeur joua un instant avec l'anse de sa tasse puis le regarda droit dans les yeux.
– Disons que… vous n'avez pas de préjugés. Vous soignez les enfants Cracmols, vous côtoyez de près des créatures malgré l'inquiétude qu'elles pourraient vous inspirer, vous êtes cordial avec les elfes de maison…
– On vous a renseigné à mon sujet, c'est ça ? fit-il en riant.
Le directeur se contenta d'un petit sourire qui avait valeur d'acquiescement et Harry ne savait qu'en penser. S'il devinait que la mention des « créatures » qu'il côtoyait de près concernait Severus – il était de notoriété publique qu'il était devenu un vampire et lui son calice –, le reste de ces informations supposait des contacts à Sainte-Mangouste et dans le monde médical, ou chez les elfes… Ce qui l'étonnait encore davantage.
– Vous comprenez, reprit le directeur, que nous ne pouvons pas prendre le risque que cette épidémie se sache, pour ne pas fragiliser la réputation de notre établissement. Et votre probité a été saluée par tous…
Harry sourit et leva la main pour interrompre son interlocuteur; il préférait ne pas épiloguer et ne pas savoir… Il se replongea dans la liste d'ingrédients, la lisant plus attentivement. La plupart étaient faciles à trouver chez de bons fournisseurs, et les quelques indications sur la préparation de la potion ne laissaient pas présager de grandes difficultés. Le seul point compliqué concernait une succession rapide de changements de température, difficile à obtenir à l'aide de sortilèges. Mais avec sa magie si particulière, cela semblait abordable.
– Je suppose qu'il vous la faut pour hier ? sourit-il en relevant la tête vers le directeur.
– Le plus rapidement possible, bien entendu. Mais nous savons qu'elle nécessite au moins une semaine de préparation.
Avec les fêtes imminentes, cela n'arrangeait pas vraiment ses plans. Il avait encore un ou deux cadeaux de Noël à trouver, il entendait bien profiter de la venue de Draco et de sa famille au Manoir, et surtout de la présence de ses conjoints. À présent que les matchs et les entraînements étaient terminés, que les inquiétudes de Severus étaient résolues et qu'il avait davantage de temps libre, il avait diablement envie de progresser un peu plus dans leur rapprochement à tous les trois… Mais les étapes de la potion comprenaient beaucoup de temps de maturation et hormis un ou deux passages délicats, il pourrait s'accommoder d'y consacrer une heure ou deux par jour.
– Très bien, accepta-t-il. Je vais m'y mettre en rentrant… Quelle quantité vous en faut-il ?
– Peu, répondit le gobelin avec un sourire de soulagement à peine maîtrisé. Un chaudron de deux ou trois litres suffira. Nous sommes très sensibles aux potions et de petites quantités suffisent à être efficaces… Quoi qu'il en soit, permettez-moi de vous remercier au nom de toute notre communauté, Lord Potter… Et sachez que vous pourrez compter sur les gobelins le jour où vous en aurez besoin.
Harry sourit doucement, surpris et un peu gêné de cette déclaration inconditionnelle qui avait presque valeur d'allégeance. Un instant, il faillit dire qu'il n'en aurait jamais besoin, qu'il n'avait pas d'ennemi, et puis il songea brusquement à Vladimir qui leur empoisonnait l'existence depuis des mois et des mois, aux gobelins qui étaient venus poser le sortilège d'argent sur certaines fenêtres du Manoir et sur le pavillon chinois, quelques mois plus tôt, et qui avaient sans doute compris beaucoup de choses sur ce qui s'était joué là-dedans, et il se sentit plutôt soulagé de savoir qu'il pouvait compter sur eux en cas de besoin, comme il savait qu'il pouvait compter sur Mihai et sur la communauté de Colibita… L'impression d'un soutien, invisible mais rassurant; le sentiment de ne pas être seul avec ses conjoints au milieu de ce tourbillon de temps troublés.
– … Nous sommes vos obligés, assura le directeur en inclinant légèrement la tête.
– Attendez au moins que j'ai achevé cette potion ! fit Harry en riant. Et qu'elle soit efficace !
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Le temps d'une ou deux gorgées de thé, il reprit son sérieux, songeant à cette potion, à ces espèces qu'il connaissait mal, qu'elles soient gobelin, elfe, vampire ou autres encore. À ces questions qui le taraudaient sans qu'il n'y trouve de réponse…
– Vous parliez des elfes, tout à l'heure…
Le directeur acquiesça avec un geste qui lui signifiait de poursuivre.
– … J'avais entendu dire, il y a très longtemps, que vous étiez des espèces cousines…
– C'est exact. Nous sommes issus d'un lointaine branche commune… Mais là où les elfes ont accepté leur servitude, les gobelins se sont toujours rebellés, et cette « divergence », il y a de cela plusieurs centaines, voire milliers d'années, nous a amenés à une évolution différente qui a donné des espèces bien distinctes. Malgré tout, nous partageons encore certains traits physiques semblables; nos langages, dans leur version ancienne, sont compréhensibles par les deux espèces, et nos magies se répondent…
– Savez-vous si… les elfes sont aussi sensibles aux potions que vous ?
– À la fois moins et davantage, expliqua le directeur d'un ton docte mais amusé. Ils y sont extrêmement vulnérables, mais bien plus en ce qui concerne les effets secondaires ou néfastes que pour les effets positifs. La balance bénéfice/ risque n'a jamais été en leur faveur, ce qui fait que les elfes ont abandonné depuis longtemps toute utilisation des potions à leur propre usage.
Songeur, Harry roula doucement le parchemin avant de le poser sur le bureau pour reprendre sa tasse de thé.
– Et quelle est… l'espérance de vie d'un elfe ? Aussi longue qu'un sorcier ?
– Eh bien… cela dépend en grande partie de ses conditions de vie, n'est-ce pas ? fit le directeur avec un petit rire. Mais dans le meilleur des cas, cela reste moins long qu'un sorcier. Entre quatre-vingts et cent ans, je dirais… Mais leur fin de vie est régulièrement marquée d'une période de sénescence qui dure quelques années et qui conduit souvent leurs « maîtres » à se débarrasser d'eux dès qu'ils deviennent moins efficaces ou inutiles.
Harry grimaça et se demanda si la folie de Kreattur était davantage due à cette sénescence ou à la folie de ses anciens propriétaires, bien qu'il semblait avoir retrouvé un peu de lucidité depuis la fin de la guerre… Quant à Clay, il était certain que jamais Lucius ne se débarrasserait de lui; il n'était simplement peut-être pas assez conscient de la vieillesse de son elfe… Son regard parcourut le visage parcheminé du gobelin, il se demanda quel âge il pouvait bien avoir et ses yeux tombèrent sur ce médaillon d'or et de rubis, au milieu de son torse.
– Tant que j'y suis, j'avais une autre question à vous poser ! gloussa-t-il.
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Harry sourit et soupira tout à la fois en contemplant la masse d'ingrédients de potion qui patientaient sur la paillasse du laboratoire et qu'il devait préparer le plus rapidement possible. Ses fournisseurs habituels avaient répondu présent malgré l'imminence des fêtes et l'un deux lui avait même rouvert sa boutique pour l'approvisionner alors qu'il était censé être en vacances…
Il avait tout… et surtout un monceau de travail devant lui. Mais malgré ce labeur imprévu, sa rencontre avec le directeur de Gringotts avait été fructueuse et enrichissante.
Une petite heure plus tard, ce furent des pas dans l'escalier en colimaçon qui le tirèrent de sa concentration, rapidement suivis des babillages enthousiastes de sa fille. Il leva les yeux, plein d'une expectative enjouée, et quelques secondes après, Lucius entra dans le laboratoire, Aria dans les bras. Une vision enchanteresse: son mari aussi pâle et blond que sa fille était brune et mate, et quelque chose, dans la façon qu'elle avait de s'accrocher à lui, qui montrait à quel point il était pour elle un adulte de confiance et auquel elle était attachée.
– Tu vois, il est là, lui murmura Lucius en la déposant au sol devant son insistance. Et toi, qu'est-ce que tu prépares encore ? Tu n'en as jamais assez ?
Harry s'accroupit un instant pour embrasser sa fille et lui faire un câlin puis se redressa pour répondre au baiser de son mari.
– Mission des gobelins, gloussa-t-il. Je vais bientôt devenir fournisseur de potions pour toutes les espèces magiques !
– C'est vrai qu'ils m'en avaient touché un mot il y a quelques temps, se souvint Lucius. Je leur avais dit de s'adresser à toi !
– Et tu as aussi omis de m'en parler ? fit Harry en riant.
Il reprit le découpage de ses ingrédients, tentant d'ignorer la main de son mari qui glissait le long de sa taille, sur ses reins, sur le haut de ses fesses. Une tendresse délicieuse et provocante… À vrai dire, il aurait bien eu envie de se glisser dans ses bras, de l'embrasser ou de le déshabiller d'un sortilège, mais il n'avait pas le temps pour ça. Et puis Aria était là, qui tournait autour d'eux en lançant des mots incompréhensibles, et il n'était pas question de se laisser aller à des gestes trop osés. Ce soir, peut-être, quand elle serait couchée… Sûrement !
– Severus est parti ? fit-il pour changer de sujet.
– Oui. Peu de temps après ton départ pour Gringotts, répondit Lucius en s'appuyant contre le bord de la paillasse. Un peu tendu, je ne sais pas pourquoi…
Harry haussa les épaules avec une moue dubitative. Lui aussi avait trouvé son vampire un peu étrange après le déjeuner mais il n'avait pas plus d'explications. Severus avait juste promis de les rejoindre au lit pour le mordre quand il rentrerait et il espérait sincèrement qu'il allait tenir cette promesse-là.
– Peut-être parce qu'il ne sera pas là ce soir, pour réitérer l'expérience d'hier ? suggéra Lucius d'une voix rauque et licencieuse.
Harry se contenta d'un sourire mais en son for intérieur, le souvenir de cette morsure couronnée par une fellation délicieuse faisait déjà battre son cœur plus vite. Nul doute que ce moment allait nourrir ses rêves érotiques pendant bien longtemps, jusqu'à ce que cela ne devienne une réalité de plus en plus fréquente.
– J'en déduis que tu as apprécié ? taquina-t-il son mari.
Lucius s'approcha un peu plus de lui, collé contre son dos, pour murmurer à son oreille, loin de celles d'Aria :
– Tu n'imagines même pas… Vous aviez déjà réussi à partager une morsure devant moi deux ou trois fois, mais tu étais toujours un peu tendu ou mal-à-l'aise… Mais là… pouvoir vous caresser en même temps… pouvoir te sucer… Je n'ai pas eu besoin de me toucher beaucoup pour avoir un orgasme !
Le regard rivé sur ses ingrédients, Harry cacha son sourire dans le col roulé de son pull, un désir effervescent chatouillant le fond de son ventre. Il ne se souvenait même pas que Lucius avait eu du plaisir; tout à sa morsure et à sa fellation, il ne s'en était même pas rendu compte… Mais rien qu'à travers des mots, le potentiel érotique de ce qu'ils avaient fait hier soir le faisait encore frissonner.
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Dans un coin du laboratoire, non loin de lui, Lucius donna le goûter à Aria tandis qu'il finissait ses préparations. Puis, une fois la première étape en route, ils passèrent un bon moment dans la piscine de la rotonde avec elle. Elle s'amusait comme un beau diable, ça lui tenait lieu de bain et au moins, il était sûr qu'elle allait bien dormir cette nuit !
Tandis qu'il lui enfilait directement sa couche et son pyjama au sortir de la piscine, Harry songea aux mots de Lucius au sujet de la morsure de la veille. Derrière le souvenir très érotique de ce moment et ce qu'il représentait de plaisir entre eux, il avait aussi perçu bien d'autres choses et en premier lieu la sincérité de son mari. Avoir pu être là, assister à cette morsure, mais surtout participer, même succinctement, avait pour Lucius une importance essentielle et fondamentale. C'était ne plus être simple spectateur mais partie prenante, faire un peu partie d'eux, de ce couple symbiotique qu'était leur caliciat, ne plus être relégué à un rang extérieur… Être trois, et non pas deux plus un troisième.
Et plus encore que la joie farouche qu'il avait éprouvée la veille à retrouver la présence de ses deux conjoints en même temps lors d'un acte presque sexuel, Harry était heureux de ce « retour » de Lucius avec eux. D'avoir pu l'intégrer à une morsure de cette façon, d'avoir pu lui redonner cette place, cette importance, et il ne pouvait que saluer la générosité de son vampire pendant ce moment. Avoir su se maîtriser, aussi bien dans ses gestes que dans ses réactions vis à vis de Lucius; avoir pu le « partager »…
Il savait bien que le tabou de la morsure tenait davantage à sa nature de calice, pour qui c'était un acte très intime et secret, mais c'était sans doute tout aussi délicat pour son vampire. Autoriser un autre à le toucher, à lui donner du plaisir en sa présence… pendant une morsure… alors qu'ils n'avaient pas eux-mêmes de relations sexuelles complètes comme il était normal entre un vampire et son calice. Lucius n'était pas n'importe qui, bien sûr, mais la réaction de Severus n'en était pas moins magnifique.
À moins que son attitude après le déjeuner, incertaine et un peu aux abois, n'ait été liée à cela ? Ils avaient dit que rien ne resterait en suspens entre eux et Harry se fit la promesse d'en parler avec son vampire pour éclaircir la situation.
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Aria couchée et endormie en quelques secondes, ils s'installèrent dans la salle de cinéma, sur le canapé légèrement transformé pour pouvoir s'y allonger côte à côte et chaudement recouvert par un vaste plaid. Harry avait toujours hésité à suggérer à Lucius d'installer un écran dans leur chambre pour pouvoir se nicher sous une couette en regardant un film. Ça ne devait pas devenir une habitude non plus, parce que dans un lit, il préférait tout de même d'autres activités comme une morsure ou une partie de jambes en l'air, ou même se câliner avant de s'endormir, mais de temps en temps, un film au lit ne serait pas pour lui déplaire.
Ce soir d'ailleurs, le film ne les "embarquait" ni l'un ni l'autre, et ils passaient plus de temps à critiquer le jeu des acteurs et à rire de leurs répliques qu'à se plonger dans l'histoire. Mais c'était drôle, et cette complicité légère était réconfortante. Lucius paraissait gai, enjoué, plus détendu et libre qu'il ne l'avait vu depuis des semaines.
Ce fut une scène de sexe qui les déconnecta complètement du film et qui éveilla en eux une autre forme de complicité. Des images qui donnaient chaud, des sons, des soupirs, des gémissements qui les excitèrent malgré eux. Et puis rire de se sentir si réceptifs à des images suggestives, vérifier d'un geste l'excitation de l'autre, se proposer pour la soulager, ébaucher des caresses et mendier pour des attouchements plus poussés…
Ils firent l'amour là, sur le canapé transformé de la salle de cinéma, à la lueur dorée des corps qui s'aimaient à l'écran, dans le bruit des souffles et des halètements des acteurs, en riant quand Lucius essaya de calquer ses coups de reins sur le rythme des claquements secs de bassin du film avant de se laisser emporter par la montée de l'orgasme.
Ils reprirent leur souffle le sourire aux lèvres tandis que Lucius effaçait les traces de leurs activités d'un coup de baguette…
Ce fut quand Harry les transplana directement dans leur lit, dans ce lit trop grand pour deux et où ils avaient été trois la nuit précédente, que les paroles s'invitèrent presque malgré eux.
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– Tu regrettes ? murmura-t-il dans l'obscurité profonde et silencieuse. Avant ?
– Avant quoi ? répondit immédiatement Lucius. Avant que tu ne fasses partie de nos vies ?…
Harry sourit doucement, même si son mari n'en voyait rien. Sa façon de répondre était presque virulente, comme s'il le défendait de penser une seule seconde qu'il regrettait sa présence. Quelque chose comme une déclaration d'amour inconditionnelle, véhémente; comment pourrait-il regretter l'avant dont il ne faisait pas partie ?!
– Non ! gloussa-t-il. Avant… que Severus ne soit transformé… avant que ça ne change toute notre vie et notre relation…
Les yeux grands ouverts sur le baldaquin du lit, il ne voyait rien d'autre que les ombres mouvantes de l'obscurité de leur chambre. Juste à côté de lui, si près que leurs pieds se touchaient sous la couette, Lucius était également allongé sur le dos, calme et silencieux. Même sa respiration était à peine audible.
– Tu pourrais… regretter ton poste de Ministre… Une certaine liberté… Quand les choses étaient plus simples entre nous…
Harry se tut, incertain de ce qu'il cherchait à dire, ou à savoir. Toute cette période de reconstruction entre eux, même s'il savait vers quel avenir il espérait tendre, était aussi une période de doutes, de remises en question et d'interrogations. Et s'il avait déjà eu l'occasion d'éclaircir les choses avec son vampire, il était toujours plus difficile de savoir ce que pensait son mari au fond de lui et sous les apparences.
– Je ne regrette pas mon poste, affirma Lucius d'une voix claire, ni les responsabilités qui allaient avec. Je crois que j'ai eu mon lot de crises à gérer pendant ces quelques mois et ça m'a bien suffi !
Il y avait eu les attaques éparses de vampires, et puis les attentats du Boxing Day, bien sûr… Ceux des pays voisins également, les alliances à négocier, les traités à signer, la tentative d'enlèvement de Scorpius et la morsure de Severus… Et encore, Harry savait bien qu'il n'était pas au courant de la moitié de tout ce qui s'était passé pendant ces quelques mois.
– Entre tout ça, ta captivité et le pavillon chinois, je crois qu'il n'y a pas grand-chose à sauver de l'année qui vient de s'écouler, ajouta Lucius amèrement. Je n'aimais pas beaucoup votre lien, ni votre union… Si je devais regretter une période, ce serait avant tout ça… notre voyage de noces au Japon, ce genre de choses… Ou depuis notre mariage, fit-il avec un sourire dans la voix.
Harry sourit également, adouci par ces quelques mots.
– Et… ça peut paraître égoïste et même violent pour lui et pour toi, eu égard à ce que vous avez vécu au début, mais je ne regrette absolument pas que Severus soit devenu un vampire, si c'était ta question réelle.
– Malgré… tout ce qu'on ne peut plus faire ensemble ?
Lucius inspira et soupira lentement, cherchant au fond de lui à quel point la balance penchait d'un côté ou de l'autre.
– Malgré tout, affirma-t-il au bout de quelques secondes. Ou plutôt… Je sais qu'on a perdu beaucoup de choses : ce qu'on était tous les trois ensemble, ne serait-ce que dormir ensemble, pouvoir sortir librement sans se demander s'il fait jour et s'il y a trop de lumière pour lui, partir en vacances, en voyage… le sexe… ou du moins certaines pratiques; l'antichambre… Et encore, je pense qu'on ne mesure pas l'ampleur de ce qu'on a perdu et que ce sera de plus en plus criant quand on avancera vers le printemps et l'été : manger sur la terrasse, se promener dans les jardins, se baigner dehors, aller en Provence… Rappelle-toi la crise d'Iris quand Severus n'a pas pu aller à la plage avec elle, juste après son retour…
Harry grimaça en se souvenant de la colère farouche et désespérée de la fillette, submergée par l'absurde de la situation : son Sévie présent en chair et en os, semblable et pourtant si différent.
– … Mais Merlin ! poursuivait Lucius sur sa lancée. J'aime tellement la personne qu'il est aujourd'hui !
Surpris par la confidence et surtout par la ferveur de son mari, Harry haussa les sourcils et tourna la tête vers lui sans distinguer l'expression de son visage dans l'obscurité.
– Plus qu'avant ? hasarda-t-il pour l'inciter à poursuivre.
– Je crois que oui, répondit Lucius après un silence. Il est tellement plus… calme et posé. Et affirmé, en même temps. Tellement plus équilibré… C'est comme s'il avait grandi en stature, en épaisseur… Il a pris une envergure que j'apprécie vraiment.
Le sourire aux lèvres devant cette déclaration que le principal concerné n'entendrait sans doute pas de sitôt, Harry se tourna sur le côté pour se rapprocher un peu plus de son mari.
– Tu parles de lui comme si tu avais redécouvert que tu l'aimais…
– C'est vrai, reconnut Lucius à mi-voix. Je crois que je l'aime encore plus qu'avant. Ou que ça a renouvelé mes sentiments… Ça a réveillé ce qui était devenu une routine ou une habitude. Malgré tout ce qui a changé, je crois que je préfère celui qu'il est aujourd'hui.
Doucement ému par les paroles qui rejoignaient ses propres sentiments, Harry leva légèrement la main pour caresser le bras de son mari. Presque surpris de ne pas le trouver couvert de chair de poule.
– Est-ce que…, hésita-t-il, vous avez réussi à vous rapprocher un peu ? Tu m'avais plus ou moins laissé entendre qu'il te fuyait au lit…
– Pas vraiment, admit Lucius. La période n'y était sans doute pas très propice, entre l'inauguration du musée et Severus qui était accaparé par tes entraînements de quidditch et ses inquiétudes à ton sujet… Mais maintenant que tout ça est derrière nous, on va avoir un peu plus de temps et de sérénité.
– Tu me diras quand tu auras besoin que je vous laisse seuls tous les deux au Manoir ! gloussa Harry.
Même sans le voir, il savait que Lucius souriait et cette idée lui fit chaud au cœur. Cette faculté qu'ils avaient à pouvoir exister à deux sans que le troisième ne soit jaloux était peut-être un des fondements essentiels de ce qu'ils étaient.
Harry glissa doucement sa main sur le ventre de son mari pour l'effleurer du bout des doigts, toujours aussi charmé de sa douceur et de sa fermeté. Il se sentait un peu incertain, troublé de ce doute qui revenait régulièrement dans son esprit, mais qui était peut-être aussi un garde-fou… Si lui n'éprouvait aucune difficulté à laisser du temps à ses deux conjoints seul à seul, il craignait toujours que Lucius ne se sente contraint de faire de même.
– Je sais que Severus et moi avons une relation particulière, commença-t-il. Qui prend beaucoup de place; un peu… fusionnelle. À cause des morsures, mais pas seulement. Est-ce que… tu ne te sens pas trop lésé ? Est-ce que ça ne prend pas trop de place ?
Il ne parlait pas seulement sur le plan sexuel et Lucius l'avait certainement deviné. Le lien qui l'unissait aujourd'hui à Severus était un lien d'union magique d'une créature à son calice et d'un calice à son vampire, un lien qui impliquait bien plus que des morsures et bien plus que Lucius ne pouvait sans doute en comprendre. Une forme de symbiose, le partage d'émotions et de besoins, une fidélité et une affection particulières… Des choses que Lucius ne pouvait pas partager avec eux, ou du moins pas de la même manière; pas avec cet aspect vital, essentiel que cela avait pour eux. Et Harry ne voulait pas qu'il se sente exclu.
– C'est comme ça, fit Lucius, un brin fataliste. Je sais que vous n'y pouvez rien et que ça s'impose à vous… Et de toute façon, je préfère nettement ça à ce que vous étiez à son retour de Colibita au mois d'août. Que les choses se passent bien entre vous est le plus essentiel. Après, si j'arrive à me faire une place entre vous de temps en temps…
Sur les derniers mots, la voix de Lucius contenait un sourire, presque un peu d'humour, et Harry sourit à son tour, approchant à peine son visage pour glisser un baiser sur son épaule.
– … Tout ça est encore en évolution, je le vois bien, reprit-il, songeur. Entre vous et également entre vous et moi. Quelques semaines, quelques mois en arrière, il t'aurait été impossible de laisser Severus te mordre devant moi. Je sais que la fois où je vous avais surpris, à Paris, avait été d'une grande violence pour toi… Et aujourd'hui, nous en sommes à… Severus qui te mord pendant que je te suce !
Harry réprima violemment un sourire licencieux et une poussée de désir au fond de son ventre. Lucius, lui, se tourna brusquement sur le côté pour lui faire face, une main glissée sous son oreiller et l'autre sur son visage, suivant la ligne de sa mâchoire du bout des doigts jusqu'à son menton pour l'attirer dans un baiser d'une tendresse déconcertante.
– Vous êtes de plus en plus libres devant moi, et j'aime ça. J'aime vous voir interagir, j'aime observer votre relation, votre désir, vos regards et toute cette… densité entre vous. C'est un spectacle fascinant…
– Toujours ton petit côté voyeur ! le taquina doucement Harry.
– Sans doute. Sans doute aussi parce que je vous aime, tous les deux, et que je suis heureux de voir votre sérénité quand vous êtes ensemble…
Harry ferma les yeux et déglutit difficilement. Il avait brusquement chaud, et l'émotion l'étreignait jusque dans sa gorge. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas ainsi touché du doigt la générosité de son mari et ça le désarçonnait toujours autant. Le simple fait de les voir en paix le rendait heureux… Son bras se faufila le long de sa taille pour l'enlacer et l'étreindre, et lui rendre un peu de cet amour inconditionnel.
– J'aime vous voir, reprit Lucius avec légèreté. Et si de temps en temps, je peux participer… ! Je sais qu'avec le tabou de la morsure, c'est difficile pour toi, mais…
– J'ai adoré ça, murmura Harry pour qu'aucun doute ne subsiste dans l'esprit de son mari. Lui et toi… j'ai eu l'impression de vous retrouver tous les deux comme avant… Quand on pouvait encore faire l'amour tous les trois…
– Tu crois que ce sera à nouveau possible un jour ? murmura à son tour Lucius.
Harry prit quelques secondes pour se maîtriser et laisser retomber son émotion. Dans la voix de son mari, il sentait tout un tas d'insécurités et d'attentes douloureuses qu'il n'exprimerait sans doute jamais plus précisément que ce soupir plein d'espoir.
– Je ne peux rien affirmer, répondit-il d'une voix mesurée. J'ai encore beaucoup d'étapes à franchir avec Severus, et un certain nombre d'autres à dépasser moi-même; le tabou de la morsure est encore bien présent en moi, plus ou moins suivant les moments et le contexte, mais… c'est ce vers quoi je tends. J'ai envie qu'on en arrive à être libres tous les trois ensemble, que Severus puisse me mordre pendant que tu me fais l'amour, ou qu'il puisse me faire l'amour devant toi, qu'on soit à nouveau trois… Je sais que le chemin est encore long, mais c'est la destination…
Doucement, Harry joua avec sa magie, dessinant les arabesques de son corps de lueurs verdâtres qui illuminèrent jusqu'à leurs visages. Il voulait plonger dans les yeux de son mari, observer ce regard qui plongeait au plus profond de son âme, y lire tout l'amour, toute la tendresse, toute la patience dont il était capable. Et s'imprégner de cette promesse d'une destination commune qui flottait entre eux dans l'air et dans le silence de la nuit.
Ils se dévisagèrent un long moment, un moment doux et serein, tendre et chaud comme un câlin sous une couette. Harry caressa lentement l'épaule de son mari, puis ses doigts glissèrent dans ses longs cheveux blonds, au fil de son dos et jusqu'à sa taille. Lucius ne le quittait pas du regard, avec sur les lèvres un sourire calme et tranquille. Dans l'obscurité de la chambre et les lueurs vertes de sa magie, ses yeux paraissaient plus sombres que d'habitude, presque aussi profonds et envoûtants que ceux de Severus. Et à cet instant, plus que tout le reste, Harry devinait dans l'intensité de son regard la sincérité de son amour pour eux.
– Et toi ? murmura Lucius d'une voix presque inaudible. Est-ce que tu l'aimes encore… ?
Harry se souvenait très bien des mots qu'il avait prononcés, la veille, après cette morsure couronnée de plaisir, et entre les bras de ses deux conjoints. Des mots prononcés avec émotion, d'une voix étranglée, et qui avaient fait soupirer son vampire à la fois de bonheur et de douleur…
– C'est difficile à démêler et à exprimer, confessa-t-il. Mais oui, je l'aime. Encore et malgré tout. Et je l'aime sans doute encore davantage maintenant qu'il est mon vampire.
Il ferma les yeux, se laissant bercer par ce sentiment chaud et intense qui serpentait dans son cœur et dans son ventre à l'énoncé de cette vérité. Severus était son vampire. Plus que jamais, Harry mesurait tout le poids et toute l'immensité de ce petit mot; l'espace infini qui se tenait entre « Severus est un vampire » et « Severus est mon vampire » ; tout ce que cela représentait de possession et d'appartenance à l'autre, tout ce lien qui existait entre eux, d'une profondeur sans égale et d'une beauté à pleurer.
Et sans doute pour la première fois également, il mesurait pourtant tout ce que cela pouvait signifier de vulnérabilité et de soumission pour Severus, et pour n'importe quel vampire… Prendre un calice, c'était aussi accepter de s'adapter au sang d'une unique personne, admettre de dépendre d'elle, de son bon vouloir pour se nourrir et survivre, s'en remettre à une confiance mutuelle… Abdiquer sa liberté de s'abreuver à n'importe quel donneur plus ou moins volontaire pour s'assujettir à un seul. Être subordonné à son besoin d'un autre…
Il comprenait mieux pourquoi ceux de Colibita n'y étaient pas très favorables… Eux avaient réussi, presque malgré eux, à faire de leur lien quelque chose de merveilleux, mais Severus n'en restait pas moins soumis à son sang. Un esclavage magnifique et fier, la tête haute et les yeux rougeoyants, et à chaque fois que son vampire témoignait de sa faim et de son envie de boire, à chaque fois qu'il venait quémander l'autorisation de le mordre, Harry n'en éprouvait que plus de sentiments pour lui.
Le calice en lui, aussi fier qu'il soit de nourrir son vampire, savourait également ce pouvoir comme une petite revanche, un juste retour des choses… Mais l'homme qu'il était au-delà de ce calice, l'homme qui avait connu et aimé Severus dans une autre vie, était toujours un peu ému et touché de cette vulnérabilité.
Le seul moment où Severus, puissant parmi les vampires les plus puissants, se laissait aller à montrer une quelconque faiblesse, c'était avec lui. C'était pour l'approcher, pour le toucher, pour le mordre. Pour un moment d'intimité avec lui, hésitant et symbolique. Pour une morsure merveilleuse, qui le nourrissait et renouvelait leur lien. Pour exprimer son besoin de lui, au-delà du sang, parce qu'il était son calice, son partenaire dans cette union magique, le compagnon de sa propre créature… et que devant lui et devant nul autre, il pouvait se montrer au-delà de son intransigeance, aussi fragile, démuni et exposé qu'il l'était…
… Tout ce que Severus n'avait jamais réussi à être avec lui avant. Seul Lucius avait eu un aperçu de ces facettes trop bien cachées. Mais aujourd'hui que son vampire était capable d'exprimer cette faiblesse, d'être avec lui dans son entièreté, et même d'être avec lui plus qu'il n'en montrait aux autres, Harry ne l'en aimait que davantage. Un amour délicat, attentif et discret, mais qui remuait dans son ventre des montagnes de douceur.
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Ils s'embrassèrent doucement et Harry s'endormit le sourire aux lèvres, empli de cette belle promesse : ils avaient été trois, ils seraient à nouveau trois un jour, entièrement et parfaitement. Ce soir, Severus n'était pas encore rentré, il n'avait pas eu droit à sa morsure, mais il était là avec eux, dans leurs pensées et dans leurs cœurs.
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Ce fut une sensation d'inconfort qui le réveilla, plusieurs heures plus tard. La nuit était encore noire et opaque, et parfaitement silencieuse. Harry remua dans les draps, gêné d'un sentiment désagréable et sans savoir comment le chasser. Ce qui le dérangeait était en lui : une faim grouillante, insidieuse, et ce n'était pas sa faim.
Il soupira et se leva comme un somnambule; ses pas le dirigèrent automatiquement vers la source de son inconfort : la chambre de Severus.
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Severus retira son pull et le jeta en boule dans la salle de bains juste avant que son calice n'ouvre la porte. Le visage à peine éclairé par les arabesques vertes dessinées sur sa peau, il avait cet aspect chiffonné et attendrissant qu'ont les enfants à leur réveil : les cheveux dans tous les sens, la joue barrée par le pli de l'oreiller, les yeux gonflés de sommeil et quasiment clos… Il était certain que Harry avait suivi son instinct et qu'il n'avait même pas eu besoin d'ouvrir les yeux pour faire le chemin jusqu'à sa chambre. Il était nu, également, frissonnant dans l'obscurité et à peine réchauffé par les volutes vertes de sa magie. D'un pas un peu raide, il traversa la pièce pour venir le rejoindre et se coller contre lui, cherchant inconsciemment de la chaleur alors que sa peau était glacée.
– Tu avais promis de venir nous rejoindre, protesta Harry dans un marmonnement contre sa chemise.
Severus l'enlaça avec douceur et glissa ses mains le long de son dos tout chaud. Son calice irradiait cette chaleur de celui qui sort tout juste de dessous la couette et l'odeur de sa peau lui retournait les sens. Il pouvait même sentir sur lui le parfum de Lucius et l'odeur plus animale du sexe et de la sueur séchée sur son corps.
– J'allais venir mais je voulais juste prendre une douche avant de vous rejoindre…
Harry grogna pour la forme, les deux bras repliés contre son torse, pelotonné contre lui. S'ils avaient été allongés et bien au chaud, il n'aurait pas mis plus de quelques secondes à se rendormir là, abandonné et relâché.
– Retourne te coucher et j'arrive dans cinq minutes.
Harry grogna à nouveau, contrarié et pas décidé à bouger de là où il était, malgré la fraîcheur qui hérissait les poils de ses bras.
– Mets-toi au moins sous la couette le temps que je prenne ma douche, sourit Severus en désignant son lit d'un mouvement de la tête.
Harry grogna encore et secoua la tête mais consentit tout de même à jeter un regard vers le lit tout proche.
– Allez, dépêche-toi. Mets-toi au chaud, je n'en ai pas pour longtemps, insista Severus en se retenant de rire. Je te promets que je viendrai te mordre même si tu t'es rendormi.
Ce furent sans doute ces derniers mots qui achevèrent de convaincre son calice. Harry se détacha de son étreinte, réchauffa le lit froid d'une volute de magie et se glissa sous la couette avec un soupir de contentement. Il s'installa sur le côté, la main sous l'oreiller et les genoux repliés… presque en position fœtale. Peu à peu, sa magie se dissipa, plongeant lentement la chambre dans l'obscurité la plus complète. Elle n'empêchait cependant pas Severus de voir parfaitement son calice, ni de contempler son visage serein et souriant, tandis qu'il déboutonnait sa chemise.
Il la retira, grimaçant lorsque le tissu imbibé de sang à demi-séché se décolla de son dos, et fila sous la douche. Merlin merci, Harry ne l'avait pas enlacé et n'avait rien senti, sans quoi il ne serait sans doute pas endormi tranquillement dans son lit en attendant qu'il le rejoigne.
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Severus sortit de sa douche quelques minutes plus tard, un peu plus propre mais la faim chevillée au corps. Même à lui, il tardait de pouvoir mordre son calice, se rassasier et enfin se remettre de sa soirée. Il attrapa sa baguette et se sécha d'un sortilège plutôt que de tacher un drap de bain, puis il fit disparaître sa chemise et son pull d'un Evanesco. Cela lui coûtait un peu, parce qu'il tenait beaucoup à cette chemise mais elle était vraisemblablement irrattrapable.
Il pivota légèrement et tourna la tête pour jeter un œil à son dos, puis grogna de dépit. Il ne se ferait jamais à l'idée de ne plus voir son reflet dans les miroirs ! En se contorsionnant un peu plus, il parvint à apercevoir la marque sombre qui envahissait le creux de ses reins et elle lui sembla déjà plus petite qu'à l'origine. De toute façon, dans quelques heures, sa nature vampirique aurait achevé de faire cicatriser tout ça, et boire le sang de son calice n'allait faire qu'accélérer le processus; il fallait juste que ni Harry ni Lucius ne se rendent compte de rien jusqu'au petit matin. À défaut de sous-vêtement propre sous la main, il enfila un vieux pantalon de pyjama et sortit de la salle de bains.
Harry était toujours là, endormi dans son lit, paisible, et Severus pouvait même entendre les battements lents et profonds de son cœur. Son visage respirait la sérénité et l'abandon; le sommeil avait effacé jusqu'aux petites rides d'expression qui plissaient la peau au coin de ses yeux à force de rires et jusqu'à la fossette que les sourires creusaient dans sa joue gauche. Il était beau… magnifique, même, et ce n'était ni le vampire ni la faim qui parlaient.
Le plus silencieusement possible, Severus souleva la couette et se glissa dans le lit où régnait une tiédeur somptueuse. En percevant le matelas s'affaisser sous son poids et le contact frais de son corps dans son dos, Harry remua et grogna légèrement, sans le fuir pour autant. Au contraire, quand Severus posa la main sur sa hanche pour se coller contre lui, son calice s'en saisit pour enrouler son bras autour de son ventre.
– Mmhh, tu es glacé, marmonna Harry en tirant la couette jusqu'à son menton. Dépêche-toi de me mordre.
Les lèvres de Severus s'étirèrent sur un sourire puis partirent fureter dans le dos de son calice, remontant dans sa nuque, sous ses cheveux, puis glissèrent dans son cou tout chaud. Pour lui faciliter le passage, Harry arrangea instinctivement son oreiller et pencha légèrement la tête. Le sang pulsait juste là, presque à la surface de sa peau parfumée, un peu plus rapide à l'approche de la morsure. Et parce qu'il tardait un peu trop à son goût, Severus sentit son calice presser sa main puis entrelacer leurs doigts. Ce ne serait pas ce soir qu'ils iraient plus loin qu'une morsure – Harry semblait trop fatigué pour que son désir prenne le pas sur son sommeil –, mais ce simple petit geste : entrelacer leurs doigts, le faisait soupirer de bonheur.
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Dans quinze jours, ce sera Noël pour eux, Harry fera un petit cadeau à Severus et Lucius lui en fera un autre, bien différent... ^^
Au plaisir
La vieille aux chats
