Chapitre 9
Clochette vint fanfaronner devant Peter, lui rappelant avec joie qu'elle l'avait prévenue, et qu'elle savait que Wendy le ferait souffrir.
Peter l'envoya balader. S'il y en avait un qui avait fait souffrir l'autre, c'était lui, mais il se garderait bien de l'avouer à Clo.
Lorsqu'il ne sût plus quoi faire, Peter alla voir sa vieille chamane, qui avait toujours été de bon conseils par le passé. Lorsque Peter arriva au village, il y régnait une effervescence inhabituelle, mais il s'en fichait, à moins qu'ils aient retrouvé Wendy, ça ne l'intéressait pas.
Il trouva Mamake dans sa hutte,occupée à mélanger des plantes et à les écraser avec son pilon.
- Peter pan a décidé de ramener la neige au village ?
- Tu sais bien que je fais pas exprès.
- Exprès ou pas, le mauvais temps te suit mon garçon.
- Je sais. Aide moi s'il te plaît! Je ne sais plus quoi faire, j'ai cherché partout.
- Est ce que tu as cherché dans ton cœur ? Demanda la vieille femme en le gratifiant d'un sourire ridé.
- Assez avec tes énigmes par pitié! Peter se frotta les yeux.
- Viens avec moi.
- Où ça ?
- Assez avec tes questions!
Mamake ramassa son bol et le tendit à Peter qui lui emboîta le pas. Ils arrivèrent devant le bâtiment fermé qui permettait aux indiens de vénérer leurs esprits, Peter n'avait jamais été autorisé à y entrer.
- Entre.
Peter hésita, que lui voulait encore la vieille chamane ?
- Tu veux retrouver ta Wendy oui ou non?
Il acquiesça.
- Rentre la dedans, tu trouveras la solution à beaucoup de tes problèmes!
Peter entra. Il faisait noir comme dans un four à l'intérieur. Mamake ne le suivit pas. Elle prit son bol qu'elle enflamma à l'aide d'une torche, le déposa à l'entrée de la cabane et sortit, laissant Peter enfermé avec l'odeur nauséabonde de la fumée qui s'en échappait.
Peter tambourina à la porte. Il essaya de l'ouvrir, en vain. Dépité, il finit par s'asseoir par terre, les yeux dans le vague.
Peu de temps avait passé lorsqu'il commença à apercevoir des choses bouger dans le noir, des hallucinations dues à la fatigue probablement. Il ne se rappelait pas la dernière fois qu'il avait dormi.
Des formes éthérées bougeaient devant lui, d'un teint grisâtre comme si elles étaient faites de cendres. Il cligna plusieurs fois des paupières, et du bien se rendre à l'évidence, il y avait bien quelque chose devant lui. Peter se redressa, sur ses gardes. Une voix étrangement familière s'éleva de la forme dont les contours se précisaient.
- Peter ? Peter c'est bien toi? Oh comme tu as grandis mon chéri!
Sa gorge se noua. C'était la voix de sa mère. Peu à peu, il vit apparaître son contour familier, son visage rond et amical qui lui souriait. Il ne répondit rien. Que dire après toutes ces années ?
Elle resta la, à le regarder, puis fronça les sourcils.
- Tu n'as pas l'air en forme mon fils, est ce que tout va bien?
Finalement, il osa poser la question qui lui brûlait les lèvres et lui rongeait le cœur depuis toutes ces années.
- Pourquoi tu m'as abandonné maman ?
- Oh mon chéri, elle fit mine de le prendre dans ses bras, il se déroba. Tu m'en veux toujours n'est ce pas? Je pensais que tu aurais compris.
- Compris quoi?
- Il t'aurait tué Peter, si je t'avais laissé rester auprès de moi. Quand ton père est mort, nous n'avions plus personne pour s'occuper de nous, il y avait cet homme du village qui jurait pouvoir subvenir à nos besoins. Quand je l'ai pris pour compagnon je ne pensais pas qu'il te voudrait du mal. Moi j'ai tenu un an après que tu sois parti, toi, si tu étais resté, tu n'aurais pas fini la semaine, il était tellement violent! Tu ne te rappelle pas?
Maintenant qu'elle en parlait, des souvenirs remontaient à la mémoire de Peter, des cris, des coups, et sa mère qui pleurait, souvent. Elle avait des bleus aussi, sur le visage,il s'en rappelait à présent.
- Tu as fais ça pour me sauver ?
- Évidemment ! Quelle autre raison? Est ce que tu pensais vraiment que j'aurai abandonné mon petit garçon? Je savais bien que dehors, quelqu'un te trouverait et prendrait soin de toi. Pour moi, il n'y avait plus rien à faire.
Elle devint floue.
- Mon chéri, je vais devoir repartir, est ce que tu es heureux ?
- Je l'étais, maman, mais j'ai fais une bêtise, je vais essayer de la réparer.
- Bien, mon garçon, n'oublie pas que je t'aime surtout !
Et comme dans un souffle, elle disparu, laissant Peter plus seul que jamais. La porte derrière lui s'ouvrît, le laissant enfin retourner vers la lumière du jour, et vers la pluie.
Lorsqu'il sorti, le village en entier semblait l'attendre dehors. Il les regarda, ses visages si familiers qu'il avait vu grandir, et qui l'avaient soutenu dans tant d'épreuves. Peter s'effondra. Le visage dans les mains, assis par terre en position fœtale, il pleura toutes les larmes de son corps, toutes ces larmes qu'il ne s'était jamais autorisé à verser. Ce n'était plus qu'un petit garçon, qui avait pensé à tort pendant toute sa vie qu'il n'était pas digne d'être aimé.
A deux pas de là, un peu en retrait, Wendy regardait Peter, entouré par ses amis trempés qui,malgré la pluie lui tapotaient l'épaule en lui chuchotant des paroles encourageantes.
Elle retourna dans la maison de Mamake, car c'est la qu'elle habitait depuis qu'elle et Peter s'étaient disputés. Mamake lui apprenait le mode de vie des indiens, ce qui lui permettait de s'occuper à la fois les mains et l'esprit. Wendy était méconnaissable dans les tenues traditionnelles indiennes, ses cheveux noués en une tresse retombant derrière son dos.
Elle décida qu'elle n'irait pas consoler Peter. S'il pleurait, tant pis pour lui. Il avait été méchant avec elle et elle ne lui adresserait plus la parole tant qu'il n'aurait pas présenté des excuses en bonne et due forme. Elle pouvait bien être amoureuse, mais nom de non elle avait sa fierté !
Elle attendit donc (fièrement) que la pluie finisse par se calmer, et descendit à la rivière avec son panier pour relever les filets et ramener le poisson. Elle supposa que,vu qu'il ne pleuvait plus, Peter devait être parti. Wendy sortit donc de sa petite maison de bois avec son panier tressé posé sur sa tête.
De son côté, Peter, qui était loin d'avoir quitté le village, demandait piteusement à Mamake:
- Mama, tu m'avais dis que ta potion me donnerai une solution à mes problèmes, merci de m'avoir permis de voir ma mère, mais pour Wendy? Je fais quoi?
- Tu vas chercher du poisson mon garçon!
Peter soupira. Cette manie que Mamake avait de parler en énigmes était vraiment fatiguante. Il n'essaya même pas d'argumenter et fit comme s'il avait compris. Sûrement pas qu'elle voulait qu'il aille se mouiller le visage pour se remettre les idées en place ou quelque chose comme ça. Autant faire ce qu'elle voulait,
Elle serait plus coopérative ensuite.
Il descendit donc d'un pas traînant vers la rivière. Depuis que Wendy était partie, Peter ne se sentait plus l'envie de voler, oh il pouvait, naturellement, mais il se sentait tellement écrasé par le poids de son chagrin, qu'il était mieux au sol finalement.
Une jeune indienne ramassait ses lignes au bord de l'eau. Elle avait la même couleur de cheveux que Wendy, c'était joli. Peter la salua d'un mouvement de la tête et s'agenouilla au bord de la rivière pour se mouiller le visage.
Wendy se redressa, croyant rêver. Peter venait de la saluer et il ne l'avait même pas reconnue ! Et quelle tête il avait le pauvre! Elle commençait presque à culpabiliser un peu lorsqu'il fronça les sourcils.
- Wendy ?
- Je suis toujours fâchée contre toi Peter.
- C'était la que tu te cachais ?? Je t'ai cherchée partout !
- Tu voulais que je parte, je suis partie, je vois pas ce que tu veux de plus.
Wendy avait remis son panier sur sa tête et commençait sa longue marche vers le village.
- Wendy s'il te plaît, écoute moi au moins !
Elle accéléra le pas, son panier était lourd et elle comptait bien laisser Peter se repentir encore un peu avant d'envisager de lui pardonner. Surtout qu'il ne s'était toujours pas excusé. Mais il avait beaucoup plu depuis ce matin et la piste était glissante . Son pied dérapa sur une pierre, et Wendy bascula en arrière, sa tête heurtant violemment le sol . Des étoiles apparurent devant ses yeux, puis ce fut le noir complet.
