Londres, 6 ans après les événements de Peter Pan.

Wendy était dans sa chambre misérable, comme tous les soirs à cette heure ci. Ses vêtements étaient sales, ses cheveux aussi. Son beau visage plein de suie et son dos est endolori lui rappellent les travaux de la journée.

Elle regarda le ciel par sa fenêtre... viendrait-il ce soir ? Pourquoi faire ? Ça faisait bien trois ans qu'elle ne l'avait pas vu, et encore, ce soir la, il avait débarqué dans sa chambre comme une fleur au bout de trois ans sans la moindre nouvelle, et il lui avait demandé son aide pour un problème au pays imaginaire. Ce soir la, elle avait beaucoup pleuré et beaucoup crié aussi. Le moment était mal choisi, ca faisait à peine une semaine qu'elle avait appris le décès de ses parents dans un accident de voiture sur Regent Street.

Après ça, Peter n'était plus revenu, et elle doutait d'entendre de nouveau parler de lui après ce qu'elle lui avait dit. Bien sûr, elle n'en pensait rien, mais il n'avait pas cherché à savoir comment elle allait depuis tout ce temps ni même remarqué qu'elle avait l'air si triste. Alors elle avait tout simplement explosé. Toute la peine qu'elle avait accumulé cette dernière semaine et la frustration qu'elle avait ressenti lorsque Peter n'était plus revenu la voir avait explosé sur la seule personne à qui elle tenait vraiment et qui la comprenait. Enfin, il la comprenait, auparavant, lorsqu'ils étaient tous les deux des enfants de 13 ans, insouciants et bêtes.

Wendy n'était plus une enfant. Six ans étaient passés et elle était devenue une magnifique jeune femme. Ses cheveux longs et blonds ondulaient le long de ses épaules (lorsqu'elle avait le temps de les coiffer) et ses yeux bleus étincelaient toujours de cette intelligence espiègle qu'aucune épreuve n'avait pu éteindre. Ses formes bien sûr s'étaient épanouies, même si elle demeurait un peu maigre, au vu des circonstances. Quelles circonstances me direz vous? L esclavage.

Aucun autre mot n'aurait pu qualifier ce qu'on lui infligeait depuis la mort de ses parents.

Il avait bien fallu que quelqu'un hérite de la maison et des biens, ses frères étant encore mineurs et elle étant.. hé bien.. une femme, ils n'avaient aucun droit. Les héritiers, un oncle et une tante éloignés, avaient bien veillés, selon les souhaits de ses parents, à ce que ses deux frères soient envoyés dans de prestigieuses écoles très lointaines et qui bénéficiaient surtout d'un internat. De Wendy, il n'avaient su que faire. La marier aurait nécessité beaucoup d'investissement et de temps, qu'ils n'étaient pas disposés à donner.

Pourtant les nouveaux héritiers ne manquaient pas d'argent, bien au contraire . Et ils ne manquaient pas d'en profiter et d'en faire profiter tous leurs amis par la même occasion. Des fêtes étaient données pratiquement tous les week ends, et des gens souvent peu recommandables dormaient un peu partout, trop ivres pour reprendre la route. Bientôt, on manqua de place. Les héritiers se souvinrent de Wendy, se rappelant que non seulement il fallait la nourrir, mais que en plus elle avait l'audace d'occuper une chambre. Le problème fut vite réglé. Elle fut remisée dans les quartiers des domestiques. Ces derniers l'accueillirent à bras ouverts. Elle avait été une gentille maîtresse et ils se faisaient une joie d'adoucir son quotidien.

Elle eut bientôt plus de travail que tous les autres, et même si elle se donnait du mal ce n'était jamais suffisant. Son oncle et sa tante prirent rapidement plaisir à la tourmenter. Ils en firent un jeu et n'hésitèrent pas non plus à en faire profiter leurs amis. Quoi de plus drôle en effet que de voir une jeune fille bien née se faire maltraiter ? Le jeu dégénéra. Bientôt elle reçu des gifles, puis des coups de ceinture.

Certains soirs la laissaient blessée et meurtrie au point qu'elle ne pouvait plus bouger pendant plusieurs jours. Ensuite elle devait trouver la force de se lever car elle avait des taches et étaient menacée de représailles si elle ne les exécutait pas.

Elle essaya de s'enfuir, à plusieurs reprises. Malgré tous ses efforts, les autorités finissaient toujours pas la croiser et à la rendre à ses propriétaires officiels, c'est à dire son oncle et sa tante, puisqu'elle n'était pas mariée.

Après quatre tentatives, elle avait bien du se faire une raison et accepter son sort.

Bien sûr, tous les jours n'étaient pas atroces, et Wendy étant ce qu'elle est, elle trouva de la joie même dans les plus petites choses. Par exemple, Les ragots qu'on entendait dans la cuisine étaient des plus croustillants, et les histoires salaces que racontaient les domestiques étaient du genre à faire pâlir à coup sûr n'importe quelle personne de la haute société. Les filles qu'elle fréquentait étaient adorables. Grâce à elles elle se sentait moins seule.

Et puis de toutes façons, quelle autre solution avait elle ? Que pouvait elle espérer à présent qu'elle vivait une vie si misérable ? Elle qui avait autrefois combattu des pirates et nagé avec des sirènes …

C'était ce genre de sombres pensées qui trottaient dans la tête de Wendy lorsqu'elle vit une ombre passer au dessus de sa fenêtre au grenier.

Était-ce possible ? Après tout ce temps ? Elle se redressa. Non, impossible. Elle se recoucha et s'enfouie sous sa petite couverture.

Ensuite, elle eut un doute. Et si c'était possible ? A tout hasard, qu'est ce que cela lui coûtait d'aller voir ?

Elle se redressa à nouveau, se leva, puis descendit l'escalier qui menait au jardin, enveloppée de son petit châle.

La nuit glaciale l'engloutie. L'hiver touchait presque à sa fin mais Wendy sentait tout de même des frissons lui passer sur les jambes lorsqu'elle passa le palier de la porte.

Elle attendit, les yeux grands ouverts tentant d'apercevoir quelque chose, n'importe quoi.

Au bout de ce qui lui parut une éternité, elle se dit que finalement elle avait du rêver, ou qu'un oiseau avait survolé sa fenêtre, tout simplement.

Elle attendit encore un peu. Lorsqu'elle senti que ses orteils commençaient à perdre leur sensibilité, elle se demanda si elle n'avait pas perdu la tête, à force de prendre des coups. Finalement elle se décida à rentrer.

Elle se retourna, et son cœur cessa de battre.

Il y avait un homme au bout de l'allée, entre elle et la porte. Il était dans l'ombre de la maison, et paraissait extrêmement menaçant, sa grande silhouette sombre se découpant devant le bâtiment.

- Qui êtes vous ? Lança-t-elle d'une voix qu'elle espérait pas trop tremblante.

Pas de réponse.

Elle voulut reculer mais ses jambes ne lui obéissaient plus , elle était tétanisée par le froid et la peur.

L'homme fit un pas en avant.

- N'avancez pas! Voulu hurler Wendy, mais sa voix sorti à peine comme un murmure.

Elle douta qu'il entendit car il continua d'avancer.

- Wendy ? Demanda une voix grave.

Il connaissait son nom. Qui était-ce ? Wendy en était sure, elle ne connaissait personne d'aussi grand, elle s'en serait souvenu.

- Qui êtes vous ? Répéta-t-elle avec un peu plus d'assurance cette fois ci.

L'homme mit ses mains sur sa bouche, dans un geste scandalisé.

- Mon dieu.. qu'est ce qu'ils t'ont fait ? Murmura-t-il

Il continua d'avancer et sorti finalement de l'ombre de la maison. A peine éclairé par les étoiles, la lune, et un réverbère lointain, Wendy cru reconnaître un visage familier. Cependant, rien n'était cohérent. Le visage avait trop d'angles la ou il n'y avait auparavant que des rondeurs. Un nez fin et droit au milieu d'un visage à la mâchoire ciselée. L'homme était trop grand aussi , et trop musclé. Rien n'allait. C'était impossible. Elle devait être morte, ou rêver.

- Tu ne dis rien ?

Wendy dut bien se faire raison, car il s'était arrêté à deux pas d'elle, et si tout son physique était totalement différent de ce qu'elle avait connu, ses yeux bleus,eux, en revanche n'avaient pas changés, toujours pétillants de malice.

- Peter ?