Hey ! Voici la suite avec l'avant-dernier chapitre de cette histoire qui s'achèvera fin de semaine !
Je ne me retiens pas plus longtemps et vous laisse lire ! Bonne lecture !
Rar :
Guest : Je compatis, vraiment, car je ne vis pas bien le suspens non plus ! Par contre ça m'amuse toujours lors de la découpe des chapitres à me demander où cela sera le plus propice de couper pour mettre vos nerfs de lecteurs à rude épreuve ! ;) Bonne lecture !
Lorsque Severus avait ouvert la porte de son appartement, il avait su immédiatement que quelque chose clochait. A dire vrai, un mauvais pressentiment l'avait envahi dès l'instant où il avait quitté le 1911, quelques minutes plus tôt. Il avait d'abord mis cela sur le compte d'une certaine inquiétude pour la jeune femme, car après tout cela aurait été naturel, après les événements de la veille. Si certains clients du Havana avaient dû être hospitalisés, c'est que certains cas d'intoxication avaient dû être sérieux. Granger ne buvait pas d'alcool, ce qui était déjà un bon point, mais cela la rendait également plus sensibles aux produits stupéfiants, auxquels son organisme n'était clairement pas habitué. Cela étant, Severus en avait vu d'autres dans sa vie, et il n'était pas l'un des meilleurs alchimistes de sa génération pour rien. Il en connaissait un rayon sur les empoisonnements, et avec un peu d'honnêteté, il fallait bien admettre qu'il ne craignait guère de devoir gérer les effets secondaires que le produit qu'elle avait absorbé pouvait avoir générés chez la Gryffondor. Il saurait y remédier, à n'en pas douter.
S'il devait être franc avec lui-même, ce qu'il redoutait surtout, en réalité, c'était l'idée de se retrouver seul à seule avec la jeune femme, dont la seule pensée suffisait à faire accélérer les battements de son cœur et échauffer son sang. Il lui avait dit qu'ils devaient avoir une discussion à son retour, et cela était en effet nécessaire. Seulement, l'idée de devoir se confronter à la demoiselle lui tordait les entrailles comme jamais auparavant. Il était toujours furieux qu'elle se soit mis en tête de régler cette histoire toute seule, évidemment, mais doutait de réussir à le rester bien longtemps une fois qu'elle braquerait sur lui son regard noisette si désarmant. Cela serait la première fois qu'ils se retrouveraient face à face après la soirée mémorable au Calcio, quinze jours plus tôt…
S'efforçant de faire le vide en lui et de fermer son esprit, il avait tourné la clef dans la serrure. Seul le silence l'avait accueilli. Un silence lourd et glacé, dont il avait perçu la signification avant même de vérifier par lui-même que la jeune femme n'était pas tout simplement endormie. Granger était partie.
La colère l'avait embrasé comme une traînée de poudre. Par Salazar, à quel moment au juste avait-il pu penser que cette gamine impertinente allait l'attendre chez lui bien sagement ? Non, évidemment, il reconnaissait bien là toute l'ingratitude des membres de la maison rouge et or ! Il l'avait récupérée la veille dans un état pas possible, lui évitant au mieux un séjour à l'hôpital, au pire de faire une mauvaise rencontre, il l'avait hébergée, soignée, lui avait même laissé l'accès à son lieu de vie, et c'était ainsi qu'elle le remerciait ? En se sauvant comme une voleuse avant même qu'il ne soit rentré, sans un mot ni un message de remerciement ? Par tous les Saints, sans doute l'avait-il tenue en plus haute estime que cela, car une partie de lui n'avait pu qu'être révoltée de ce comportement digne de ses deux idiots d'amis plutôt que de la Miss-Parfaite qu'elle avait toujours été.
Excédé, il avait jeté sa veste en travers d'une chaise de la cuisine, avant de s'assurer qu'elle n'avait tout de même rien laissé susceptible de signaler son départ. Mais il n'y avait rien. Pour ainsi dire, s'il ne l'avait pas lui-même amenée chez lui la veille, il n'aurait jamais soupçonné qu'elle avait passé la nuit dans l'appartement. Le lit était impeccablement fait, la salle de bain était si propre qu'il doutait même qu'elle s'en soit servie, et tous les livres de sa bibliothèque étaient en place. Il n'y avait guère que la chaise du bureau qui n'était pas rangée et…
Severus s'était figé un instant, avant de considérer le meuble avec stupeur. Par Merlin, elle n'aurait tout de même pas osé… ? Quelle question ! Évidemment, qu'elle avait osé ! Ne venait-il pas de constater une nouvelle fois à quel point ces satanés lions pouvaient être impolis ?
D'un geste vif, il avait ouvert les tiroirs de son bureau un à un. Ses notes personnelles sur différents essais alchimiques étaient toujours en place, de même que les divers documents administratifs concernant son retour de l'étranger, son appartement, et son emploi au 1911. Les dossiers concernant son enquête en cours, en revanche, n'étaient plus aussi bien rangés qu'il les avait laissés. Un numéro de téléphone apparaissait d'ailleurs par transparence sur une feuille vierge sur le haut de la pile, et le Serpentard avait tiqué en comprenant qu'après avoir récupéré la note écrite, la jeune femme avait dû tomber sur ses dossiers… et les avait inévitablement lus. Celui concernant l'enquête, bien-sûr, qui avait dû lui apprendre la dernière chose qu'il voulait qu'elle sache, à savoir qu'il était toujours auror, et affecté sur l'affaire des pharmacies moldues. Et le sien. Celui qu'il avait demandé juste après sa conversation avec Arthur, histoire de s'assurer que la Gryffondor ne lui cachait rien d'autre que ses ambitions à suivre les traces de Sherlock Holmes.
Rien au monde ne l'aurait fait culpabiliser d'avoir demandé une copie du dossier de la jeune femme, bien-sûr. C'était son boulot, après tout. A la réflexion, il aurait même dû le faire bien avant, dès le premier jour où il avait croisé Hermione Granger dans le quartier. Jamais il ne serait excusé d'avoir ainsi fouillé dans sa vie privée. Néanmoins, l'idée qu'elle ait pu tomber sur ces dossiers en son absence lui laissait une sensation des plus inconfortables au fond de l'estomac. Il n'était pas naïf au point de penser qu'elle l'avait bien pris. Ces fichus lions étaient incapables de réfléchir avec professionnalisme et discernement, il fallait toujours qu'ils surréagissent pour tout, laissant leurs émotions interférer avec le côté pratique des choses et…
Et merde ! Elle allait le détester après cela ! Pour une fois qu'il ne se fichait pas d'être haï par quelqu'un ! Enfin, c'était la deuxième fois, pour être précis, et malheureusement, elle lui rappelait étrangement la première. Décidément, il avait un problème avec les jolies filles de Gryffondor ! Avait-il songé, exaspéré, avant de s'intimer à faire le vide dans son esprit et à mettre sous clef la tempête de sentiments qui l'assaillait.
Pour l'heure, qu'Hermione Granger le haïsse n'était pas la priorité, en réalité. Il aurait tout le temps de se pencher sur la question plus tard. En attendant, il lui fallait surtout déterminer où était la demoiselle, dans quel état, et ce qu'elle comptait faire pour la suite des événements. Il la connaissait suffisamment pour savoir qu'à présent qu'elle avait découvert la réalité, elle n'allait pas rester sans rien faire. A tous les coups, elle tâcherait d'avancer coûte que coûte dans l'affaire des vols, histoire de prouver qu'elle savait se débrouiller, comme elle l'avait toujours fait durant ses années à Poudlard. Après tout, qui avait fini pétrifiée par un basilic en deuxième année, à vouloir résoudre l'énigme de la Chambre des Secrets toute seule ? Et qui avait risqué sa vie pour sauver un stupide hippogriffe et éviter la prison à ce crétin de Black ? Sans même parler de son escapade avec Potter au département des mystères, et de cette quête presque suicidaire à la recherche des Horcruxes et…
Non, vraiment, rien n'était plus dangereux qu'un Gryffondor décidé à faire ses preuves, il en savait quelque chose ! Il fallait qu'il trouve Granger avant qu'elle ne se mette dans les ennuis jusqu'au cou. Malheureusement, il avait la désagréable sensation qu'elle n'en était déjà pas loin…
OoOoO
Elle avait enfin une piste sérieuse. Non, à dire vrai, elle était à deux doigts de résoudre enfin cette affaire, et l'excitation qui coulait dans ses veines aidait à lui faire oublier les récents et fâcheux événements, ainsi que le fait qu'elle s'apprêtait à se rendre seule sur les quais de la Tamise à une heure indécente, seulement armée de sa baguette alors que l'homme qu'elle s'apprêtait à retrouver était sans aucun doute un sorcier. C'était dans ce genre de moment qu'elle aurait aimé avoir un berger allemand plutôt qu'un chat, clairement….
Mais elle en avait vu d'autres, n'est-ce pas ? Après tout, elle avait activement participé à la dernière guerre, et elle ne s'en était pas trop mal sortie, au vu des circonstances. Venir à bout d'un seul homme, sorcier ou non, ne lui poserait guère de problème, après avoir affronté une armée de mangemorts. Seulement, à l'époque, elle n'était pas toute seule, et alors qu'elle se dirigeait vers le lieu de rendez-vous à pas rapides, jamais la présence de Harry et de Ron ne lui avait autant manqué qu'en cet instant.
Comme elle avait à de multiples reprises reproché à son meilleur ami de faire cavalier seul et de ne jamais demander de l'aide, elle avait, évidemment, pris la peine d'envoyer un message à Arthur, histoire de le prévenir qu'elle suivrait ce soir-là une piste qui la mènerait jusqu'au port de Londres. Bien qu'elle s'était efforcée de maîtriser le tremblement de sa voix au moment de transmettre le message à son patronus pour envoi, elle doutait y avoir réussi tout à fait. Il fallait dire aussi que le seul énoncé de cette sortie nocturne était carrément glauque, et ressemblait à s'y méprendre aux scènes sombres et anxiogènes des films moldus. Heureusement, Arthur n'aurait sans doute pas la référence, et elle espérait qu'il ne rappliquerait pas avant qu'elle ait été bien certaine d'avoir ferré le bon poisson. Quelle humiliation cela aurait été de faire déplacer les aurors s'il s'avérait que l'homme en question n'était pas le bon.
Évidemment, elle aurait tout aussi bien pu demander de l'aide à un certain homme de sa connaissance, dont elle avait récemment appris son attachement au bureau des aurors mais, eh bien, cela ne lui avait pas paru être une très bonne idée. En tout cas, son orgueil avait vivement protesté quand l'idée lui avait traversé l'esprit, et son cœur avait largement appuyé cet avis. Avait-elle jamais eu besoin de Severus Rogue pour s'en sortir dans la vie ? Bien-sûr que non, et pourtant, elle en avait connu, des situations alambiquées ! Alors ce n'était pas à présent qu'elle était éperdument amoureuse de lui et qu'elle venait de découvrir qu'il bossait sur la même affaire qu'elle _ officiellement, pour sa part, du moins plus qu'elle _, que les choses allaient changer ! Bien au contraire. Il s'était bien fichu d'elle, durant toutes ses semaines, et était à peu de choses près la dernière personne qu'elle souhaitait voir.
Même si, là tout de suite, dans le dédale de ruelles sombres et tortueuses du quartier des quais, seulement éclairées par quelques ampoules halogènes clignotantes, elle n'aurait sans doute pas dit non à sa présence à ses cotés. A son regard sombre et assuré, qui semblait ne jamais connaître le doute. A son parfum subtil et enivrant, dont le seul souvenir la rendait folle. A ses bras chauds et puissants, dans lesquels elle s'était sentie tellement en sécurité, la veille au soir et…
Hermione avait resserré sur elle les pans de son manteau et forcé le pas, tout en jetant des coups d'œil peu rassurés autour d'elle, en s'efforçant de chasser ces pensées de son esprit. Bon sang ce qu'elle détestait Londres la nuit ! Enfin, surtout quand il lui fallait s'enfoncer dans ce genre de quartier mal famé dans l'idée d'aller retrouver une population qui n'était clairement pas la plus fréquentable de la capitale anglaise.
Son intuition de la veille s'était révélée exacte. Avec un peu de chance et un soupçon de magie, elle avait réussi à convaincre le directeur de la boîte de ménage de la pharmacie de lui donner la liste des femmes de ménage qui s'occupaient de l'entretien quotidien des différentes officines. Quelques sortilèges de recoupement plus tard, un nom s'était détaché parmi la liste de candidats potentiels. Le gérant de la société de ménage lui avait appris qu'il s'agissait là de la fille de l'une de ses employées, qui faisait souvent les remplacements de sa mère lors des absences de celle-ci. Hermione avait été sidérée de constater que personne ne semblait contrôler plus que cela la fiabilité des équipes, mais l'homme lui avait assuré que la pratique était courante, au vu des difficultés à trouver du personnel motivé.
« Tant que mes employés me proposent une solution pour assurer leurs heures, cela ne me pose pas de problèmes que quelqu'un les remplace au pied levé. Je fais un avenant à la semaine et tout le monde y trouve son compte ». Certains avaient, de toute évidence, besoin de renflouer leur compte de façon un peu plus fournie qu'en faisant quelques heures de ménage.
Sa petite enquête auprès de la société de ménage lui ayant déjà pris du temps _ sans compter celui qu'elle avait passé à errer comme une âme en peine chez elle en se fustigeant de tous les noms pour ne pas avoir compris plus tôt que Severus Rogue était toujours auror, et s'être intimée de ne plus nourrir le moindre sentiment amoureux à son encontre sur le champ _ la soirée était déjà bien avancée, si bien qu'elle avait remis l'interrogatoire de la jeune employée au lendemain. Pour l'heure, elle devait encore s'assurer que celui qui s'amusait aux dépends des clients des divers bars du quartier était bien l'homme vers lequel l'avait orienté Dylan. Elle aurait bien le temps de trouver le lien entre les deux plus tard.
Le cœur battant à tout rompre, les doigts serrés autour de sa baguette, Hermione s'était faufilée sur le quai indiqué, baigné dans la semi-obscurité de cette fin de soirée estivale. Il avait fait chaud toute la journée, et les températures commençaient seulement à être plus respirables, si bien qu'il y avait plus de monde que prévu sur les docks. Le souffle court, elle s'était assise à même le sol près d'une pile de containers métalliques près à être chargés sur un bateau le lendemain. Il était encore tôt, mais elle avait préféré être en avance plutôt que de risquer arriver en retard. Elle ne savait pas trop à quoi s'attendre, en réalité. Dylan lui avait simplement dit que les achats se faisaient à cet endroit, que le vendeur avait un petit fourgon de livraison et qu'il s'éterniserait après avoir chargé les marchandises pour sa tournée sur lendemain. De toute évidence, l'homme en question était livreur, et se servait de son boulot pour faire des allers et venus sur le port sans éveiller l'attention.
Ne restait plus qu'à attendre l'heure fatidique.
Cela était très fâcheux, car Hermione avait le cœur qui battait à cent à l'heure, et quand enfin il s'était à peu près calmé, trente minutes après son arrivée sur les lieux, cela avait laissé le champ libre à son esprit pour s'aventurer sur des sujets tout aussi désagréables. Comme le fait qu'elle était toujours amoureuse de Severus Rogue depuis le début d'après midi, malgré toutes ses tentatives pour tenter de mettre un terme aux sentiments qu'elle avait développés pour le Serpentard. Comme souvent lorsque l'on tentait d'oublier quelque chose, sa mémoire semblait bien décidée à justement faire remonter en surface tous les souvenirs qu'elle avait de l'ancien espion, de la première fois où elle l'avait recroisé au 1911 à son réveil dans sa chambre le matin précédent, en passant par le jour où elle avait soigné son arcade ensanglantée et toutes les fois où elle l'avait croisé, lui et son demi-sourire si troublant.
Qu'elle se trouvait naïve ! Bête à manger du foin, même. Si Harry avait été à Londres, ou qu'elle en avait parlé à n'importe lequel de ses amis de Poudlard, nul doute que tout le monde lui aurait dit qu'il était impossible que Severus Rogue ait ainsi changé de vie. Qu'il se montre, sinon agréable, du moins pas complètement désagréable, et qu'il était évident que s'il lui avait accordé autant d'attention, ce n'était pas sans raison. Après tout, il avait été le directeur de Serpentard pendant près de vingt ans, sans même parler de son ancienne condition d'espion.
Elle en était là de ses réflexions quand le bruit d'un moteur l'avait tirée de ses pensées, lui faisant aussitôt oublié le pas-tout-à-fait barman du 1911. L'adrénaline l'avait aussitôt envahie tandis qu'elle se redressait, tâchant de trouver un point d'observation entre l'empilement des conteneurs qui lui permettrait d'analyser la situation avant de se révéler. Il ne s'agissait pas non plus de sauter à la gorge du premier livreur venu, car dans de tels entrepôts, ce n'était pas les fourgons de livraison qui manquaient. D'ailleurs, il avait vite paru évident que la camionnette qui s'était arrêtée près de l'entrepôt n'était pas celle qu'elle attendait. Le chauffeur en était descendu, avait chargé l'arrière et était reparti sans demander son reste.
Fausse alerte.
Elle avait dû attendre quarante minutes de plus, et l'arrivée puis le départ de deux fourgons supplémentaires avant que l'homme qu'elle attendait ne se présente. Il avait, comme ses collègues, chargé son petit camion avec de nombreux cartons, puis avait tiré un paquet de cigarettes de sa poche et s'était adossé contre son fourgon le temps de fumer. Jusque là, il n'y avait pas de quoi le suspecter, mais bientôt un scooter l'avait rejoint, et l'homme qui en était descendu s'était approché, glissant quelques mots au fumeur avant de sortir une enveloppe de son blouson pour en récupérer une autre du livreur au fourgon.
Il y avait peu de chance que cet homme soit le mauvais.
Hermione avait pris une profonde inspiration, tentant de calmer son rythme cardiaque chaotique et de faire taire l'appréhension _ ou la panique ?_ qui montait en elle. Elle pouvait le faire. Ce n'était pas parce qu'elle était seule qu'elle ne le pouvait pas, après tout. Depuis quand avait-elle besoin de Harry ou de Ron pour oser les choses ? Cela avait toujours été eux qui avaient eu besoin d'elle, n'est-ce pas ? C'était normal d'être anxieuse, évidemment. Elle était courageuse, pas téméraire, après tout. Et puis, ne disait-on pas qu'on était bien plus insouciant durant l'adolescence qu'à l'âge adulte ? De toute évidence, elle avait passé le cap de l'âge adulte quelque part entre la fin de la guerre sorcière et cette soirée estivale, avait-elle songé en affermissant sa prise sur sa baguette et en se redressant lentement.
Le cœur d'Hermione s'était glacé d'effroi quand une main s'était soudain plaquée contre sa bouche, étouffant le cri de surprise qu'elle avait poussé, tandis qu'un bras s'enroulait autour de sa taille pour l'attirer en arrière, l'immobilisant fermement contre un corps masculin avant même qu'elle n'ait eu le temps de faire un seul pas vers le quai. Par Merlin, elle n'avait même pas entendu l'individu approcher tant elle s'était inquiétée de ce qui allait arriver ! Si elle s'était décidée à passer directement à l'action, plutôt que de cogiter pour rien, elle ne serait pas faite repérer avant même d'avoir pu intervenir. Quelle idiote, vraiment !
- Qu'est-ce que vous n'avez pas compris au juste dans « Essayez de ne pas déclencher de catastrophe » ? avait grondé un voix sourde à son oreille.
Elle avait frémi toute entière à l'entente de la voix basse et menaçante de son agresseur, avant que le sens des derniers mots ne l'emplisse soudain, et qu'elle reconnaisse le timbre de cette voix sombre. Le soulagement l'avait envahie comme jamais auparavant, si bien que ses jambes avaient presque manqué se dérober sous elle tandis que sa tension se relâchait aussitôt.
La main sur sa bouche s'était doucement écartée, à présent qu'il n'y avait plus de risque qu'elle hurle de terreur, mais le bras sur sa taille était restée en place, lui donnant juste assez de place pour pivoter sur elle-même et faire face à Severus Rogue. Hermione avait retenu un nouveau tressaillement quand son regard avait rencontré celui, froid et sévère, de l'ancien espion, mais elle n'aurait su dire si cela était dû à l'adrénaline qui courrait encore dans ses veines, au fait de se retrouver face à lui à présent qu'elle connaissait la vérité le concernant, ou parce qu'il avait l'air plus furieux que jamais. Dans la semi-obscurité qui régnait sur les docks, son profil sévère était souligné par la lumière blafarde d'un réverbère situé à quelques pas de là, et les traits de son visage difficilement distincts dans la pénombre. Malgré cela, il était évident qu'une colère froide l'habitait. Sa mâchoire était serrée, son expression impénétrable, et l'éclat de ses yeux sombres plus coupant que jamais.
- Professeur…, avait-elle murmuré, de soulagement ou de surprise, là non plus elle n'aurait pas su dire.
- Je ne suis plus Professeur, Granger ! Ne pourriez-vous pas prendre la peine d'écouter ce que je dis, pour changer ?! Avait-il répondu dans un murmure furieux.
Hermione avait dégluti, réalisant que tout ou partie de sa colère était dirigée contre elle. Sans doute n'avait-il pas été ravi de constater qu'elle était partie sans prévenir lorsqu'il était rentré chez lui. Néanmoins, elle avait une bonne excuse pour cela, et ne manquait pas non plus de raisons de lui en vouloir, d'ailleurs ! Pensait-il réellement être le seul à avoir de quoi être furieux ? Certainement pas, non !
- Vous préférez peut-être que je vous appelle « Agent Rogue » ? Avait-elle vertement répliqué au souvenir des dossiers parcourus plus tôt dans la journée.
Il n'avait pas semblé apprécier le sarcasme, et le regard venimeux qu'il lui avait lancé était clairement un avertissement à ne pas s'engager sur ce chemin escarpé, mais Hermione l'avait ignoré. En réalité, elle s'était soudain sentie tellement en colère contre lui que plus rien n'avait eu d'importance, en cet instant, et certainement pas le fait qu'ils étaient dans un coin perdu du port au beau milieu de la nuit, à quelques dizaines de mètres d'un potentiel criminel. L'humiliation qu'elle avait ressentie en début d'après-midi l'avait rattrapée alors qu'elle faisait face au sorcier dont elle s'était stupidement éprise, se muant en une ire sourde et battante qu'elle ressentait le besoin impérieux d'exprimer, et c'était tant mieux si c'était lui qui en faisait les frais. Après tout, il était le premier responsable du sentiment béant qui lui tordait les entrailles depuis quelques heures, et de cette brûlure qui ne cessait de lui houspiller le cœur depuis des semaines.
- A moins que vous n'ayez un grade plus important, après toutes ces années passées à vous couper en quatre pour Marshall ! Avait-elle poursuivi, animée par une témérité impertinente.
- Je vous conseille vivement de ne pas vous aventurer sur ce terrain, Miss Granger ! Avait-il sifflé à voix basse alors que ses doigts se crispaient autour du bras de la jeune femme.
- Oh parce que c'était censé être confidentiel, peut-être ? Avait-elle ironisé.
- Vous n'aviez pas à fouiller dans ce bureau ! Je vous avais dit de ne toucher à rien !
- Vous n'auriez pas eu à vous en inquiéter si vous m'aviez dit la vérité depuis le début ! Avait-elle murmuré en retour sur le même ton furieux.
- Je vous rappelle que vous n'avez pas fait preuve d'une grande sincérité non plus, en ce qui vous concerne !
Hermione s'était tue, ne trouvant rien à répondre à cela, et les deux sorciers s'étaient affrontés du regard un instant, chacun animé par la colère d'avoir été dupé par l'autre. La Gryffondor avait eu beau savoir qu'elle avait en effet ses tords également, cela ne l'avait pas aidée à calmer sa hargne. Elle lui en voulait, bon sang, plus qu'elle en avait jamais voulu à quelqu'un ! Au fond, elle savait bien que cela n'était pas dû qu'au fait qu'il lui avait caché être toujours auror. C'était un tout, et elle n'aurait su dire exactement ce qui l'exaspérait le plus. Qu'il ait enquêté sur elle, qu'il se soit joué d'elle pendant tout ce temps, ou qu'il ne lui aurait même pas dit la vérité si elle ne l'avait pas découverte par inadvertance.
Alors qu'elle le fixait avec toute la colère dont elle était capable, l'ancien espion avait semblé se lasser de ce petit jeu, et avait rompu l'échange de regard sans se soucier de la laisser gagner, à croire qu'il était bien au dessus de ce combat d'ego. Il l'avait doucement mais fermement poussée de côté, comme si elle n'était qu'une petite chose fragile et gênante en travers de son chemin, et qu'elle n'était bonne à rien d'autre que lui faire perdre du temps, pour jeter un coup d'œil entre les conteneurs vers le quai. Hermione en aurait hurlé de rage.
- Vous m'avez soupçonnée tout ce temps ! Avait-elle repris finalement, d'une voix clairement accusatrice.
- Oh, parce que vous non peut-être ? Avait-il ironisé sans même la regarder. Ne me prenez pas pour un idiot, Miss Granger, je sais pertinemment que votre première invitation à déjeuner n'était pas innocente.
Hermione avait dégluti sa colère, excédée. Par Merlin, ce qu'il était insupportable à être si perspicace !
- Je ne me suis interrogée vous concernant que durant quelques instants, avait-elle contré, avouant à contre cœur son impair, ce qui lui avait valu un coup d'œil entendu du Serpentard. Vous en revanche, vous avez demandé mon dossier au ministère !
- Vous en auriez fait autant si vous aviez pu, avait-il répliqué en haussant les épaules, nullement coupable.
Par Gryffondor mais c'est qu'il allait réellement réussir à la faire sortir de ces gonds !
- Vous avez fait semblant d'avoir changé de vie et de…
- C'est ce qu'on appelle communément « une couverture », Granger. Je pensais qu'une détective chevronnée telle que vous saurait ce genre de chose ! Avait-il dit, ses mots dégoulinant d'ironie.
- … vous montrer aimable, et même charmant, avait poursuivi Hermione sans relever, incapable de s'arrêter à présent que toute la rancœur et l'humiliation accumulées au fil des dernières heures se déversaient hors d'elle.
Le Serpentard avait tiqué à ces mots, et il avait délaissé son point de vue vers ce qui se passait sur les quais pour lui jeter un coup d'œil, dénué d'ironie cette fois.
- Granger…
- Vous avez accepté mon invitation à dîner alors que vous saviez parfaitement qu'il n'y avait rien de vrai dans tout cela. Je vous ai embrassé…, avait-elle soufflé, et sa voix s'était brisée sur le denier mot.
Elle allait pleurer. Bon sang, elle allait véritablement finir par craquer devant lui, alors qu'elle avait si bien réussi à tenir jusque là. Mais c'était trop pour elle, cette fois. Se faire repousser après la soirée au Calcio avait déjà été un coup dur, mais apprendre qu'il s'était ainsi joué d'elle durant toutes ces semaines était la goutte d'eau qui faisait déborder le vase. Elle se sentait tellement mal depuis le début de l'après-midi. Tellement humiliée et amère qu'elle était incapable de garder tout ce flot d'émotions pour elle. D'ailleurs, il lui semblait très juste qu'il récolte une partie de ce qu'il avait semé. A cet instant, elle aurait donné n'importe quoi pour voir une trace de regret sur son visage toujours si impassible. Du regret, ou même une once de culpabilité. N'importe quoi qui lui aurait prouvé qu'il s'en voulait d'avoir agi de façon si calculatrice avec elle, sans se soucier de ce qu'elle pouvait ressentir.
Un nouveau bruit de moteur s'était élevé à quelques mètres de là, moins puissant que le rugissement du fourgon de livraison, signe qu'un nouveau client devait être arrivé pour se fournir en stupéfiant ou en crack. Par réflexe, Rogue l'avait lâchée du regard pour porter son attention vers la provenance du bruit, visiblement partagé entre son devoir et l'avalanche de reproches qu'elle était entrain de lui faire. Sans doute craignait-il qu'elle ne perde totalement le contrôle de ses nerfs et qu'elle ne révèle leur présence.
Néanmoins, il s'inquiétait pour rien. Des éclats de voix leur étaient parvenus du quai, et la Gryffondor s'était aussitôt reconcentrée sur l'action en cours. Elle avait discrètement essuyé ses yeux d'un revers de main, et était venue jeter un nouveau coup d'œil à travers l'ouverture entre les conteneurs, ignorant le Serpentard près d'elle et son regard scrutateur posé sur elle.
- Hermione…, avait-il murmuré après quelques secondes de silence, d'une voix étonnement hésitante.
- Chut ! Je connais cette voix, avait-elle murmuré en fronçant les sourcils tandis que le ton montait non loin de là entre le dealer et son nouveau client.
Le regard rivé sur ce qui se passait sur les docks, elle n'avait pas vu le regard courroucé de l'ancien espion, absolument pas ravi de s'entendre dire « chut » par une gamine de la moitié de son âge qui venait de lui faire une liste de reproches longue comme le bras.
- Mais c'est… C'est impossible…, avait soufflé la Gryffondor en blêmissant soudain.
Le sorcier l'avait aussitôt poussée légèrement afin de dégager la vue vers le quai, et elle l'avait senti se figer près d'elle alors que lui aussi reconnaissait le nouveau venu. Ils avaient échangé un regard, et même s'il contrôlait mieux ses expressions faciales qu'elle, il avait été évident qu'il partageait sa surprise.
- C'est Camilo, avait-elle murmuré d'une voix blanche.
OooOo
Depuis le temps qu'il bossait en temps qu'agent double, puis auror, il était rare que Severus soit surpris par quoique ce soit. Néanmoins, ce soir-là, tapi dans l'ombre d'un empilement de conteneurs près de Granger sur les quais du port de Londres, il aurait menti en affirmant ne pas avoir été pris de court par l'apparition soudaine du gérant du Calcio sur les docks. A côté de lui, Granger, qui ne jouissait pas de la même expérience, était tombée des nues. Le regard confus, elle semblait complètement perdue.
- Mais qu'est-ce que Camilo ferait ici ? Avait-elle demandé, sidérée. Je croyais qu'il faisait de la prévention pour lutter contre les ravages de la drogue !
Sa question était sans doute plus rhétorique qu'autre chose, mais Severus n'avait pu s'empêcher d'y répondre, affligé de la crédulité de la jeune femme.
- A croire que c'est lui qui a fini par basculer du côté obscur, et non l'inverse, avait-il ironisé d'une voix tranchante, sans aucune empathie pour la Gryffondor désemparée.
- Non, il y a forcément une autre explication ! Avait protesté la demoiselle à voix basse en jetant un énième coup d'œil aux deux hommes qui s'embrouillaient un peu plus loin. Peut-être que c'est cet homme qui a vendu la drogue au petit-ami de sa fille, il y a des années, et qu'il est venu réclamer vengeance.
Severus avait laissé échappé une exclamation dédaigneuse et condescendante, exaspéré.
- Comment peut-on avoir participé à une guerre et être toujours aussi naïve ? C'est plus fort que vous, hein, de tout édulcorer ainsi et de trouver une raison héroïque aux agissements de chacun ? C'est bien du Gryffondor tout craché ça !
- Vous voyez le mal partout, je ne suis pas certaine que cela soit bien mieux ! Avait-elle répliqué, et le regard hargneux qu'elle lui avait adressé en disait long sur le fond de sa pensée.
De toute évidence, elle n'était pas prête de digérer le fait qu'il ait demandé son dossier au ministère.
- Nous en reparlerons quand vous aurez autant d'expérience que moi de la nature humaine, Granger ! Avait-il rétorqué avec hauteur en jaugeant une dernière fois de la situation sur les quais avant de sortir sa baguette. J'y vais. Vous, restez-ici et, pour une fois dans votre vie, tâchez de…
- Quoi ?! S'était indignée la jeune femme, outrée. Si vous croyez que je vais rester sagement ici pendant que vous intervenez seul !
Le Serpentard avait émis un claquement de langue agacé et lui avait retourné un regard acéré, mais la petite impertinente l'avait simplement soutenu avec une défiance insupportable. Mais quelle plaie, ces Gryffondor ! Par Merlin, ils étaient aussi têtus que des hippogriffes !
- Pour l'amour de Dieu, Granger ! Avait-il pesté, excédé. Vous ne croyez pas que vous en avez assez fait comme ça ? Vous n'êtes pas auror, bon sang ! Vous suivez une formation pour devenir gratte papier dans un bureau du ministère !
Malgré la semi-obscurité qui était tombée à cette heure avancée de la soirée, le sorcier avait clairement discerné l'éclat flamboyant qui s'était allumé dans les yeux de la jeune femme à ces mots.
- Vous pensez que je ne sais pas me battre ? Avait-elle sifflé à voix basse, vexée au plus profond de son être. J'ai déjà combattu par le passé et vous le savez très bien !
- Justement, c'est une chance que vous soyez encore en vie, considérant que vous n'étiez à l'époque qu'une bande de gamins même pas diplômés ! Tenez-vous donc si peu à la vie, vous autres rouge et or, pour vous obstiner à vous lancer à corps perdu dans les ennuis ?
- Je vous rappelle que sans ceux que vous qualifiez de « gamins », nous n'aurions sans doute pas gagné cette fichue guerre ! Avait rétorqué la jeune femme avec fureur.
- Bon ça suffit ! Avait tonné Severus, à bout de patience. Vous restez ici, ce n'est pas négociable ! Et ne m'obligez pas à vous stupéfixier pour m'assurer que vous ne fassiez rien d'idiot, cette fois ! Avait-il jeté avec humeur avant de se relever pour s'éloigner à pas de loup dans l'obscurité, ignorant la Gryffondor fulminante derrière lui.
Devant l'entrepôt, le ton ne cessait de monter entre les deux hommes, dont la conversation se répercutait sur les hauts murs de pierres nus et sur les multiples empilements de conteneurs attendant d'être chargés le lendemain. Severus n'y avait prêté qu'une oreille distraite, peu préoccupé par la raison de leur dispute. Contrairement à Granger, son jugement ne serait pas altéré par les sentiments ou une quelconque empathie qu'il aurait pu vouer à Camilo. Il se fichait bien de qui était responsable de tous ces vols et agressions, tant qu'il le neutralisait. Aucune excuse n'était recevable pour justifier de tels agissements.
- … avait convenu qu'il n'y aurait pas de violence ! Avait vociféré le gérant du Calcio à quelques pas de là. Cette femme qui a été violée cette semaine, cela n'aurait jamais dû arriver !
- Lâche-moi un peu, papy, tu veux ? J'ai joué à ton petit jeu trop longtemps déjà ! C'est toi qui a donné des idées à d'autres, je n'ai même pas eu besoin de chercher les clients !
- On avait un marché !
Le dealer avait éclaté d'un rire moqueur et cassant dont l'écho s'était répandu comme l'aboiement d'une hyène affamée.
- Putain, me fais pas rire ! Tu croyais vraiment que j'allais me contenter de ton blé quand je peux me faire dix fois plus en vendant le reste de stup à d'autres ? C'est toi qui voulais donner une leçon à tous ces gens, pas moi. Moi, je vis que pour le fric, tu comprends ça ?
Tapi contre l'angle du dernier conteneur en bout de file, juste avant l'esplanade dégagée de l'entrepôt, Severus avait jeté un coup d'œil sur la scène. Tout à leur altercation, les deux hommes ne faisaient pas attention à ce qu'il se passait autour d'eux, et il n'y avait, pour l'heure, pas d'autres clients en vu. Si Granger avait eu raison dans le signalement qu'elle avait fait remonter à Marshall, quelques mois plus tôt, le dealer était un sorcier. Pour tremper dans ce genre d'affaire, il devait être un piètre mage, ou être devenu complètement accro au crack. Le neutraliser ne demanderait sans doute pas trop d'effort, pour peu que cet idiot de Camilo ne fasse pas tout foirer.
Severus avait pris une profonde inspiration, lente et posée, bien loin de la respiration anarchique d'Hermione un peu plus tôt, et avait fait le vide dans son esprit pour se concentrer uniquement sur ce qui allait suivre. Il était confiant, et sûr de lui. Cette mission n'était rien d'autre qu'une formalité pour lui qui avait passé les cinq dernières années à traquer et à neutraliser les derniers partisans du Seigneur des Ténèbres, qui n'étaient pas les plus dociles que les rangs de mangemorts avaient compté, c'était certain.
Il avait quitté le refuge des conteneurs pour s'avancer vers les deux hommes, sa baguette brandie.
A quelques mètres de là, le dealer, qui avait saisi Camilo au collet pour lui jeter ses derniers mots à la figure, avait soudainement lâché le quinquagénaire et s'était précipitamment reculé en levant les mains, son expression paniquée clairement distincte sous la lumière blafarde que diffusaient les projecteurs accrochés à l'entrée du hangars.
- Oh putain ! Ok doucement mon gars ! On se calme, d'accord ? On doit pouvoir trouver un arrangement ! Avait soudain glapi le dealer d'une voix paniquée juste au moment où le Serpentard sortait de son abri.
Severus, qui arrivait dans le dos de Camilo, avait tiqué en avisant l'arme à feu qu'avait soudain sortie le gérant du Calcio, et pointée vers le délinquant qui le menaçait une seconde plus tôt. Par tous les Saints, la situation se compliquait ! S'il était intervenu dès le début, au lieu de perdre son temps à tenir tête à Granger, il aurait pu s'éviter tous ces soucis inutiles !
- Ne bougez plus ! Avait-il vivement invectivé les deux hommes en pointant sa baguette sur eux.
Tout s'était alors passé très vite.
Profitant de la surprise soudaine de Camilo qui s'était retourné pour voir qui était le nouvel assaillant auquel il devrait faire face, le dealer avait sorti sa baguette d'un geste, et lancé un sortilège de répulsion au moldu. Ce dernier s'était retrouvé projeté en arrière, percutant Severus de plein fouet avant qu'il n'ait eu le temps de s'écarter, et les deux hommes étaient tombés à la renverse dans un pêle-mêle de bras et de jambes tandis que l'arme à feu heurtait le sol dans un bruit métallique qui avait couvert le cri étouffé qui était monté de derrière les conteneurs empilés non loin de là.
Profitant que les deux hommes soient à terre, le dealer avait jeté un nouveau sortilège dans leur direction tandis que Severus faisait de son mieux pour se dégager du corps de Camilo qui entravait ses jambes. Il n'avait eu que le temps d'ériger un sortilège de protection pour dévier le rayon lumineux qui arrivait droit sur eux, tandis que de l'autre main il tentait de repousser le poids inanimé qui l'empêchait de se relever.
- Bordel mais vous êtes qui vous ?! Avait hurlé le dealer avec hargne.
- Bureau des Aurors du ministère de la magie ! Avait scandé Severus tout en matérialisant un nouveau sort de protection pour éviter les maléfices lancés contre lui.
Il avait vu les yeux du dealer s'arrondir de stupeur et de panique. Sans doute n'avait-il pas songé que la communauté sorcière s'intéresserait à une bête histoire de vol de stupéfiants dans les officines moldues, car il avait semblé affolé par l'identité de Severus. L'hypothèse selon laquelle il n'était sans doute pas un grand sorcier s'était confirmée quand il avait esquissé un premier pas en arrière, puis un second dans une amorce de fuite évidente. Le Serpentard avait retenu un juron en réalisant qu'il allait se carapater sans demander son reste, et avait écarté sans ménagement le corps gémissant de Camilo, tentant de dégager sa deuxième jambe pour se relever afin d'empêcher le délinquant de se volatiliser. Le jeune homme avait couru jusqu'à la portière conducteur du camion, qu'il avait vivement ouverte avant d'attraper ce qui devait être les enveloppes pleines de liquidité, recettes des ventes de la soirée, puis avait commencé à pivoter sur lui-même dans l'intention évidente de transplaner.
- Locomotor Mortis ! Avait scandé une voix féminine depuis l'autre bout du quai.
Le rayon de couleur orangé avait déchiré la pénombre du port et heurté de plein fouet le dealer qui se préparait à disparaître, l'interrompant dans son amorce de transplanage. Il s'était écroulé au sol, les jambes soudainement liées ensemble de façon serrée, et en avait lâché sa baguette de surprise tout en poussant un cri grossier.
Severus avait enfin réussi à s'extirper de sous le corps massif de Camilo, juste au moment ou deux mains féminines s'étaient posées sur ses épaules avec précipitation.
- Vous allez bien ? Avait demandé la voix paniquée de Granger à ses côtés.
Le Serpentard n'avait répondu que par un grondement sourd tandis qu'il se relevait enfin, ignorant la douleur lancinant dans sa cheville qui s'était sans doute tordue dans la chute.
- Oui, ça va. Occupez vous de lui avant que je m'en charge, ou il ne restera pas grand-chose de cet idiot ! Avait-il craché à moitié avec un mépris évident en désignant le patron du Calcio d'un signe du menton.
Heureusement, Granger avait eu la bonne idée de ne pas protester, cette fois. Sans doute s'inquiétait-elle réellement de ce qui pouvait arriver à Camilo, qu'elle avait côtoyé régulièrement lors des soirées dansantes organisées dans son établissement. Severus, quant à lui, se fichait bien de ce qu'il adviendrait de lui, en réalité, mais si cela pouvait lui permettre de s'assurer que le quinquagénaire ne tenterait plus de folie, et éloigner la Gryffondor d'une pierre deux coups, il n'allait pas s'en priver !
Alors qu'il s'avançait vers la camionnette, il avait repoussé plusieurs maléfices jetés avec rage par le dealer toujours étendu à terre, qui ponctuait toutes ses incantations d'insultes bien corsées qui avaient eu le don d'exaspérer plus encore Severus. Excédé de la tournure qu'avait prise la situation, le Serpentard s'était protégé d'un dernier sortilège avant de riposter, stupéfixiant le délinquant sans sommation, sans pouvoir retenir un soupir à la fois soulagé et agacé quand le corps de ce dernier s'était écroulé et que sa litanie de grossièreté s'était enfin tarie.
Pressé d'en finir au plus vite avec cette affaire, il avait fait rouler le corps figé du bout de son pied indemne, avant de lancer une incantation d'entrave. Des fines volutes de lumière argentées s'étaient échappées de sa baguette pour venir s'enrouler autour des poignées et des chevilles du sorcier neutralisé. Pour la forme, l'auror avait également agrémenté le tout d'un sortilège de bâillon, si bien qu'en plus d'avoir les deux jambes prises ensemble, le jeune homme s'était retrouvé incapable d'ouvrir la bouche. Enfin la tranquillité pour…
- Camilo s'il vous plaît ! Ne faites pas n'importe quoi ! Avait soudain retenti la voix angoissée de Granger derrière lui.
Severus avait fait volte face, avant de blêmir soudain en réalisant que le patron du Calcio tenait en joue la Gryffondor avec son arme à feu. Bien que toujours au sol, il s'était relevé sur son séant, et son regard paniqué, proche de celui d'une biche prise entre les phares d'une voiture, attestait de la panique et de la folie qui étaient siennes. Son regard était passé de la demoiselle au dealer qui gisait aux pieds de Severus, puis à la baguette que tenait toujours celui-ci, avant de revenir sur celle de la Gryffondor qui gisait au sol à ses côtés, et qu'elle avait dû poser le temps de se pencher sur le quinquagénaire pour jauger de son état.
- Vous… vous êtes quoi au juste ? C'est quoi toutes ces lumières et… et ces… ces baguettes magiques ? Et qu'est-ce que c'est le ministère de la magie ? Je n'en ai jamais entendu parler !
- Camilo s'il vous plaît, calmez-vous, avait encore prié Granger d'une voix lente, qu'elle voulait sans doute apaisante, mais où la panique transperçait de façon notable.
- Posez ce flingue, avait ordonné le Serpentard en levant sa baguette vers le gérant du Calcio.
Mais à ce geste, le moldu avait braqué derechef l'arme vers la Gryffondor. Même à la distance où il se tenait, Severus avait vu sa main trembler, et son cœur avait loupé un battement en songeant que dans l'état de fébrilité dans lequel se trouvait l'homme, le coup pouvait partir à tout instant.
- Ne bougez pas ! Avait d'ailleurs hurlé l'homme à terre d'une voix déformée par le désespoir. Ne m'obligez pas à tirer, je ne suis pas là pour vous ! Je… je ne suis pas un criminel, vous comprenez !
- Camilo, on sait que vous ne feriez de mal à personne, avait de nouveau tenté Granger avec douceur sous le regard impuissant de Severus. Alors baissez cette arme, je vous en prie. Je suis sûre qu'il y a une explication à tout ceci et…
Les mains du moldu avaient tremblé davantage à ces mots, et le Serpentard avait regardé avec horreur l'arme osciller de bas en haut, craignant à tout instant que le doigt sur la gâchette ne s'enfonce soudain, scellant le sort de Granger en une fraction de seconde.
- Je voulais juste leur faire peur, avait répondu Camilo d'une voix tremblante. J'ai essayé… J'ai essayé de leur faire comprendre à quel point la drogue pouvait faire des ravages… Mais personne ne m'a écouté… Ils ont ri, se sont servi des flyers pour jeter leur chewing-gum, mais aucun d'eux ne m'a pris au sérieux…
- Moi je vous écoute Camilo… je sais à quel point c'est difficile de perdre un proche… Vous avez seulement voulu leur éviter la même chose qu'à Alice, avait murmuré Granger d'une voix si basse que Severus l'avait à peine entendue.
Avec lenteur, la jeune femme avait tenté un pas en avant. Le patron du Calcio n'avait pas réagi. Ses épaules s'étaient mises à trembler aux mots doux de la Gryffondor, secoués par des sanglots silencieux à l'évocation de sa fille, et de la situation qui lui avait échappée. Pour un peu, Severus aurait presque pu compatir, si son arme n'avait pas continué d'être braquée sur la poitrine de la jeune femme.
- Granger, avait grondé l'ancien espion alors que la sorcière s'agenouillait lentement près du moldu, son regard plongé dans le sien.
Par Merlin, cette gamine était tout bonnement inconsciente ! Que croyait-elle, au juste ? Qu'avec des mots doux et un peu d'empathie, elle allait réussir à faire entendre raison à ce père qui avait tout perdu ? Même s'il ne l'aurait avoué pour rien au monde, Severus connaissait bien les sentiments qui pouvaient habiter ce dernier. Quand l'être aimé disparaissait subitement, plus rien n'avait d'importance, et la douleur était telle qu'on regrettait simplement de ne pas avoir pu être celui qui était parti, de ne pas pouvoir échanger sa vie contre celle de l'être cher parti trop tôt. Et quand, malheureusement, on se rendait compte que cela était impossible, seuls la colère et l'espoir d'une vengeance pouvaient aider à rester debout.
Là où, des années plus tôt, Severus avait choisi de rejoindre le côté du bien pour faire tomber le Seigneur des Ténèbres, Camilo avait opté pour la prévention et l'information. Mais cela avait été un échec, et le Serpentard imaginait sans peine la sensation de perdre une deuxième fois sa fille, comme si tous ces jeunes imprudents, seulement désireux de faire la fête et de s'amuser, la tuaient une deuxième fois en ignorant ses mises en garde et en se moquant de ce qu'il lui était arrivé. Cela n'excusait rien, bien-sûr, mais il comprenait ce qui avait pu mener ce père privée de sa fille à vouloir tenter une méthode plus impactante. Comme il l'avait souvent répété lors de ses visites au 1911, presque comme un aveu de sa culpabilité dans cette affaire, on ne se sentait pas concerné jusqu'à être personnellement touché par les choses. Camilo avait fait en sorte que l'angoisse de la drogue s'immisce dans l'esprit de chacun à Londres.
- Je ne voulais pas faire de mal à qui que ce soit…Je me suis dit qu'en détroussant simplement les gens, cela suffirait à leur faire comprendre qu'il fallait faire attention… Je voulais juste éviter que d'autres accidents arrivent...
- Je suis certaine que vous avez sauvé la vie de plus de personnes que vous ne le pensez, avait murmuré la jeune femme.
Severus avait retenu son souffle en la voyant lever une main hésitante vers le bras qui pointait toujours l'arme sur elle, avec bien moins de conviction que quelques minutes plus tôt. Le cœur au bord des lèvres, il avait vu les doigts fins de la Gryffondor s'approcher en tremblant du quinquagénaire, et se poser doucement sur les siens alors qu'elle lui faisait lentement baisser son pistolet vers le sol tout en glissant son autre main sur son épaule avec compassion.
- Vous ne pouvez pas régler le problème de la drogue à vous seul, Cami…
- Vous là, plus un geste ! Avait soudain vociféré une voix en provenance de l'autre extrémité du quai.
Severus avait vivement sursauté et avait fait volte face, plissant les yeux lorsque la lumière aveuglante d'une lampe torche braquée sur lui avait agressé ses rétines habituées à la semi-obscurité du début de la nuit. Lorsqu'enfin ses yeux s'étaient adaptés à cette nouvelle luminosité, cela avait été pour constater avec effroi qu'en plus de la lampe rivée sur eux, le nouveau venu, vêtu de la tenue réglementaire des gardiens du port, avait également pointé sur eux son arme de service.
Le faisceau de la lampe torche, ainsi que la menace de l'arme braquée dans son prolongement, s'étaient un instant arrêtés sur Severus et sur l'homme à terre à ses pieds, avant de glisser vers Granger et Camilo, toujours au sol à quelques pas de là. Severus avait réalisé, trop tard, que pour un gardien de la paix moldu, la menace ne venait pas de lui et de sa baguette, mais bien de Camilo et du pistolet entre ses mains, et qu'il avait pointé vers le nouveau venu dans un réflexe d'auto-défense que n'importe qui aurait eu en pareilles circonstances. Severus lui même avait pivoté en levant sa baguette vers le gardien, mais celui-ci n'avait guère perçu la dangerosité de l'objet qui devait lui paraître bien inoffensif et de nature tout à fait incongrue dans ce contexte.
- Baissez votre arme ! Baissez votre arme ! Avait hurlé le gardien de la paix en mettant le gérant du Calcio en joue.
- Non attendez, ce n'est pas ce que vous croyez ! Avait tenté Granger, les yeux agrandis de terreur.
Malheureusement, elle n'avait pas eu l'occasion d'expliquer la situation. Complètement dépassé par la situation, et sans doute en proie à la panique et à un stress trop important, Camilo avait tenté de se relever, agitant d'autant plus son pistolet en direction du vigile.
Se sentant menacé, le gardien des docks avait tiré.
La détonation avait déchiré le silence qui régnait sur les quais, et avait été presque aussitôt suivie par une autre. Le son fracassant avait explosé aux oreilles de Severus, l'assourdissant un instant, et avait couvert le cri terrorisé de Granger, ainsi qu'un autre, que le Serpentard avait mis une seconde à identifier comme le sien alors que sous ses yeux horrifiés, la Gryffondor s'effondrait comme une poupée de chiffons près de Camilo qui s'était écroulé dans le même temps.
La suite, le Serpentard aurait été incapable de la raconter avec précision, car il avait eu l'impression de vivre la scène depuis un autre corps que le sien. Tétanisé, le souffle coupé, il était resté une seconde, une interminable seconde, à observer le corps immobile de la jeune femme, à l'affût du moindre mouvement qui aurait relâché l'étau qui lui avait soudain enserré le cœur. Mais Granger n'avait pas bougé, et Severus avait eu l'impression qu'un gouffre s'ouvrait soudain sous ses pieds.
Puis, presque sans réfléchir, il avait neutralisé le gardien, lui aussi paralysé par l'action qui venait de se produire. Peut-être était-ce là la première fois qu'il tirait sur quelqu'un, ou peut-être se demandait-il pourquoi les deux corps étaient tombés alors qu'il n'avait tiré qu'une seule fois, ne s'attendant pas à ce que dans sa chute, le doigt de Camilo ne se serre sur la détente de son propre pistolet.
Severus s'était précipité, le cœur battant si vite qu'il avait eu l'impression qu'il allait lâcher d'un instant à l'autre sous le coup de la terreur brute qui l'envahissait alors qu'il s'agenouillait près du corps immobile de la Gryffondor en répétant son prénom avec frénésie, horrifié à la seule idée qu'elle puisse être…. Non, il ne voulait même pas l'envisager. Il avait déjà vécu cela une fois, il ne supporterait pas que cela arrive de nouveau.
- Hermione… Par Merlin, Hermione, s'il vous plaît…, avait-il supplié en posant ses mains sur le corps recroquevillé de la jeune femme, en proie à une panique grandissante.
Il avait posé sa tête sur ses genoux, écartant doucement les mèches brunes qui entravaient son visage. Si le soulagement l'avait envahi lorsque les paupières de la Gryffondor avaient papillonné avec difficulté et qu'un gémissement douloureux lui échappait, preuve qu'elle était toujours en vie, il avait vite déchanté lorsque ses yeux étaient tombés sur la tâche sombre qui se dessinait sur son abdomen, et à la sensation du liquide chaud et poisseux sous ses doigts lorsque le sang avait coulé le long de son flanc. La panique l'avait gagné pour de bon alors que l'idée qu'il risquait de la perdre d'une seconde à l'autre l'envahissait, impérieuse et insupportable.
- … verus…, avait-elle murmuré avec difficulté, la respiration chaotique.
- Par Merlin, non, non non non non, s'était-il exclamé, horrifié, alors que les yeux de la jeune femme se révulsaient déjà et que ses paupières se refermaient de nouveau. Hermione, Hermione s'il vous plaît, restez avec moi… Ça va allez, ça va aller…
Malgré l'insistance de Severus pour la garder consciente, la jeune femme s'était évanouie dans ses bras.
Promis, cela sera la dernière dose de suspens de cette fiction puisque le dernier chapitre arrive samedi ! :)
Alors, qui avait deviné pour l'auteur des agressions ? A dire vrai, je ne suis pas du tout une habituée des fictions avec une intrigue autre que la relation amoureuse ! De base, il n'y avait pas toute cette histoire dans celle-ci, c'était simplement la rencontre entre Severus et Hermione dans une autre vie choisie loin de la société sorcière. Et puis une idée en amenant une autre, quelques nuits de réflexion, et voilà ! Du coup j'espère que l'intrigue vous a tenu en haleine car c'est une première pour moi sur du Severus/Hermione !
Pour l'anecdote, j'ai deux chats et à moi aussi, il m'est déjà arrivé de souhaiter avoir des bergers allemands plutôt que des greffiers, certains soirs en sortant du boulot ! xD A se demander pourquoi on adopte des chats ! =p
A samedi ! =)
