Abby se rendit malgré tout dans le bureau du Dr Fell, en utilisant les ressources qu'il lui avait proposées comme une excuse plus que comme raison principale de sa venue. Cela n'empêcha pas le professeur de lui donner les documents avec une liste de liens, ni Abby d'en être reconnaissante.
Elle ignorait cependant comment aborder le problème « Anthony. » Elle se frotta le front en essayant d'avoir une idée.
Il la regarda longuement et demanda doucement, « Migraine ?
— Oui, mais ce n'est rien, ça va passer. » Dans un jour ou deux, sans doute.
Il lui lança le regard de celui qui a l'habitude d'entendre quelqu'un minimiser sa douleur. « Mon cher Anthony dirait la même chose », observa-t-il en sortant une boîte de paracétamol de son bureau. « En voulez-vous ?
— Il ne vaut mieux pas. » Elle déglutit avec difficulté et ajouta, « S'il vous plaît, remerciez votre mari de m'avoir déposée. Car c'était lui, n'est-ce pas ?
— En effet, et je transmettrai le message. Passez aussi le bonjour à votre fille de notre part, d'ailleurs. » Ses yeux pétillaient. « Je vous assure que mon cher Anthony est aussi réel qu'elle. »
Les épaules d'Abby se relâchèrent, bien qu'elle ne sache pas si c'était de soulagement ou de fatigue. Il savait. Ils savaient tous les deux. « Est-ce qu'il… est-ce que ça le dérange ? » lâcha-t-elle très vite.
« Ma chère », et à présent elle discernait clairement de l'amusement dans son regard. « Cela faisait une éternité que je ne l'avais pas entendu rire à ce point. Ne vous inquiétez vraiment pas pour lui. »
Crowley parvient tout juste à atteindre la cuisine et s'écroule dans une des chaises autour de la table. La tête posée sur une main, il étouffe son bâillement afin que le mouvement ne fasse pas craquer sa mâchoire. Quelqu'un glisse une tasse de café sous son nez et il murmure « Merci, mon ange » avant de lever les yeux et réaliser qu'il s'agit de Warlock. « Merci, môme » se corrige-t-il avant de mettre ses mains autour du café chaud, soulagé que ce soit le week-end. « J'imagine que tu as entendu les rumeurs actuelles ? » demande-t-il.
« Ouais. » Warlock baisse les yeux et une légère note taquine apparaît dans sa voix. « Si tu n'existes pas, ça veut dire que je ne suis pas obligé de rendre le devoir que tu as demandé ?
— Ah. Tu rêves » La commissure des lèvres de Crowley se soulève en un sourire pince-sans-rire.
Warlock le lui rend et se laisse tomber sur une autre chaise. « Du coup, les rumeurs ?
— Me suis dit qu'on devrait parler de la façon de les gérer. C'pas comme si t'avais déjà vécu ça, après tout. » Crowley cligne des yeux avec méfiance devant le toast restant et en prend à contrecœur un morceau pour goûter. Warlock lui passe la pâte à tartiner salée. « Règles de base qu'Aziraphale et moi on respecte en général. Primo, pas de mensonge. Induire en erreur ? Pas de problème. Mentir ? Non. Secundo, on ne révèle pas la vérité publiquement sans en discuter avant. Si un étudiant l'apprend à l'occasion… » Il lance un sourire à Warlock. « …ou pose la question, tout simplement, c'est différent. Tertio, on essaye de faire les révélations d'une manière qui nous permet d'être témoin de leurs expressions hilarantes. Et il peut raconter toutes les histoires qu'il veut sur son cher époux Anthony. Tu noteras qu'il ne mentionne jamais mon nom complet. A part ça, on se laisse surtout porter par les événements.
— Pigé. J'ai juste pris l'habitude de la fermer. » Warlock rapproche de lui sa propre tasse de thé. « Je ne veux pas qu'ils sachent que je vis avec vous.
Crowley se force à manger tout en levant un sourcil, prêt à écouter. « Ah non ? »
Warlock s'appuie au sol avec ses doigts de pieds et ne lève pas les yeux de sa tasse. « Pas par honte. C'est juste… j'attire déjà trop d'attention en disant juste que j'ai parlé avec toi. Je… » Iel déglutit et se ratatine sur iel-même. « Je ne veux pas imaginer ce que ça serait s'ils savaient… » Iel fait un geste de la main censé embrasser la totalité de l'appartement et de la situation. « Désolé.
— Nan, pas besoin. Fallait qu'on le sache. On te mettra pas sous les projecteurs alors. » Il lève les yeux tandis qu'Aziraphale les rejoint. « Salut mon ange. On parlait de ton mari qui-n'existe-pas. »
Tandis qu'il s'assied bien droit pour se verser une tasse de thé, Aziraphale semble bien trop enjoué et radieux pour l'heure qu'il est. « Ah, oui, voilà un problème bien épineux. »
