Cette fic est écrite dans le cadre de la 97ème nuit écriture du FoF (Forum Francophone) pour le thème "Coupable". Le FoF est un forum regroupant tous les francophones de ffnet où l'on peut discuter, demander de l'aide ou s'amuser entre nous. Le lien se trouve dans mes favoris. Rejoignez-nous !
Il était coupable. Sirius s'était posé beaucoup de questions depuis son emprisonnement à Askaban, des pensées plus ou moins sombres l'assaillaient continuellement, mais au milieu de tous ses doutes, toutes ses angoisses et toutes ses nuits blanches, une seule certitude se dessinait toujours aussi nettement. Il était coupable.
Au début, il avait cru que se raccrocher à l'idée qu'il était innocent l'aiderait à supporter les détraqueurs. Pendant un moment, cela avait fonctionné. Peu importe ce que pensait Bartemius Croupton, ou ce que dirait un tribunal qui prendrait peut-être un jour le temps de le juger, lui-même connaissait la vérité. Il savait qu'il n'était pas le gardien du secret de James et Lily, il savait qu'il ne les avait pas vendus à Voldemort, il savait qu'il n'avait pas provoqué l'explosion qui avait tué ces treize moldus. Il savait que son emprisonnement n'était que le fruit d'une erreur de jugement dans un monde où les aurors préféraient voir un innocent à Askaban qu'un mangemort en liberté. Au tout début de son emprisonnement, il avait même espéré que la vérité éclaterait rapidement et qu'il serait libéré quand le monde sorcier se serait remis de l'époque de terreur de Voldemort et que l'injustice qu'il avait subie serait découverte.
Il avait rapidement déchanté, quand les détraqueurs lui avaient fait revivre en boucle le moment où il était arrivé devant la maison en ruines de James et Lily et qu'il avait vu leurs corps étendus dans les décombres. Ils étaient les seules personnes à être au courant de la vérité et cette vérité était morte en même temps qu'eux. Le seul qui aurait pu encore rétablir les faits était Queudver, mais ce lâche avait préféré se faire exploser en même temps qu'une bonne dizaine de moldus plutôt que de l'affronter. Peu importe cette vérité qu'il aurait voulu pouvoir hurler au monde entier, il demeurerait un coupable aux yeux de tous.
Petit à petit, les détraqueurs avaient assombri ses pensées, fait ressortir ses angoisses et ses doutes. Ils lui avaient fait revivre la mort de James et Lily, le jour où il les avait convaincus de prendre Peter comme gardien du secret, les jours pendant lesquels ils avaient été enlevés par des mangemorts. Et il avait compris que cette certitude d'être innocent était en train de s'effriter petit à petit. Car il n'était pas innocent. Même en connaissant les faits, il réalisait que Croupton avait eu raison de juger seul qu'il était coupable. Surtout en connaissant les faits. Il n'avait pas vendu James et Lily à Voldemort. Mais il les avait livrés à Peter, et ce fait-là, cette idée-là, personne ne pourrait nier que c'était la sienne, uniquement la sienne, et qu'il ne pouvait désormais rien faire d'autre qu'accepter d'en assumer les conséquences.
Il savait qu'il y avait un traître parmi eux, depuis des mois. Un traître suffisamment proche pour connaître leurs faits et gestes, suffisamment avide de reconnaissance pour être intéressé par Voldemort, suffisamment lâche pour ne pas oser lui tenir tête une fois enrôlé. Il le savait, et il avait depuis longtemps tenu pour acquis que seuls James, Lily et Dumbledore étaient désormais dignes de confiance. Dumbledore avait même été le premier à leur proposer d'être leur gardien du secret, et il aurait été la personne parfaite pour cela, il en était conscient. Il le réalisait maintenant. Mais à l'époque, il avait expliqué à James que Dumbledore vieillissait, qu'il n'avait plus tous ses réflexes, toutes ses capacités, et que peu importe sa puissance, il s'effondrerait un jour face à un mangemort qui n'aurait plus rien à perdre. Qu'un coup de bluff était la manière la plus sure de les protéger, et qu'il n'y avait pas de meilleur coup de bluff que de désigner quelqu'un de tellement improbable que même Voldemort n'aurait jamais osé y penser.
Quelqu'un de suffisamment proche d'eux pour avoir leur confiance, suffisamment avide de reconnaissance pour accepter ce rôle et à la fois suffisamment lâche pour être certains qu'il se cacherait et n'essaierait jamais de se faire remarquer par les mangemorts. Quand il y repensait, cela lui paraissait tellement évident… Le fait que Peter était l'espion leur crevait les yeux depuis le début, comment avaient-ils pu être aussi aveugles et garder le peu de champ de vision qu'il leur restait braqué sur Remus ? Remus dont ils épiaient les moindres faits et gestes, Remus qu'ils avaient discrètement écarté des conversations importantes, Remus que tout semblait accuser mais dont la loyauté et les principes n'avaient jamais flanché.
Il avait pensé être plus malin, plus déterminé, plus prévoyant que tout le monde en proposant ce plan de génie à James et Lily, et il avait échoué, de la manière la plus cruelle et la plus destructrice qui soit. Ses deux meilleurs amis étaient morts, son filleul était orphelin et parti vivre chez sa tante à l'autre bout de l'Angleterre, Remus demeurait désormais seul et il n'avait même pas pu avoir la satisfaction de voir Peter payer le prix de ce qu'il avait fait – la mort était un prix bien trop dérisoire pour ça.
Il avait cru tenir le coup en se disant qu'il était innocent. Mais c'était impossible, parce qu'il ne l'était pas. Il cherchait bien sûr parfois à se le rappeler, à se dire qu'il avait toujours résisté à Voldemort, qu'il n'avait pas livré James et Lily, que lui aurait préféré mourir plutôt que de les trahir. Il cherchait parfois à imaginer un autre futur que celui qui s'étalait sous ses yeux, un futur où il sortirait de prison, où il rencontrerait Harry qui aurait alors terriblement grandi et où il aurait une chance de lui raconter cette vérité que lui seul connaissait désormais. Mais, quand il s'imaginait raconter cette vérité, il réalisait à quel point il serait incapable de conclure en disant qu'il était innocent. Il savait que, s'il affrontait un jour le regard de son filleul, les seuls mots qu'il serait capable de dire seraient : C'est vrai. Je les ai tués.
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