Bêta : Mokonalex

Assistante/Elfe de Maison/ Infirmière/Victime favorite... Heuu... partenaire au Scrabble : Mirabelle31

Note de l'auteur : Il va falloir vous contenter de ce chapitre-là un peu plus longtemps que pour les autres. Il ne m'en reste qu'un seul entier et la moitié d'un autre. Je vais garder un chapitre en marge de sécurité pour le cas où je ferais des modifications quelconques. Mais bon, ça ne devrait pas prendre des semaines non plus, à moins que ça n'aille pas encore. (On croise les doigts, hein !)

Donc bonne lecture tout le monde !


Le mois de septembre n'avait pas encore touché à sa fin et pourtant l'année allait se terminer pour Harry Potter et surtout Severus Rogue.

Les deux amants avaient pourtant pris toutes les précautions voulues et personne n'aurait pu se douter qu'il y avait quelque chose entre ces deux-là. Les retenues n'avaient pas été plus nombreuses que les autres années. En cours, aucun n'avait donné d'indication par son comportement : pas de coups d'œil outranciers, de petits mots glissés ici ou là. Non rien. Alors… comment un drame pouvait-il survenir ?

Drago Malefoy était celui par qui le scandale allait arriver !

Le Prince des Serpentards, accessoirement Chef de la Brigade Inquisitoriale Gardienne des Bonnes Mœurs et filleul du Professeur Severus Rogue, se croyant absolument tout permis, entra un après-midi dans le bureau de son Directeur de Maison, et sans frapper !

Pour un sang-pur bien élevé et de noble lignée, ce grave manquement à l'étiquette était impardonnable. Moralement et socialement, c'était critiquable mais surtout ce geste allait avoir des conséquences dramatiques dont l'ampleur allait atteindre rapidement des sommets et le scandale faire le tour du Monde Magique.

Le 20 septembre 1997 était un samedi. Comme tous les samedis, Severus Rogue comptait sortir dans le Monde Moldu. Il devait se rendre à Londres au Flamant Rose, accompagné d'Harry Potter et passer la soirée et la nuit hors de Poudlard, avec la bénédiction d'Albus Dumbledore. Harry avait pris l'habitude de laisser des vêtements moldus dans les quartiers du Maître des Potions. Ainsi, il n'avait pas besoin de s'habiller dans son dortoir, au risque de se faire surprendre, ni traverser l'école sur sept étages et même huit avec les cachots, sous une cape d'invisibilité. Non, le garçon se contentait d'aller frapper chez Rogue comme s'il se rendait à une retenue. Habituellement, ça ne posait aucun problème et c'était presque un rituel réglé comme du papier à musique.

Mais, la machine bien huilée du Sauveur allait en cette fin d'après-midi du 20 recevoir un joli grain de sable qui allait l'enrayer.

Drago Malefoy ne frappa pas à la porte ! Il pénétra dans le bureau de son Directeur de Maison sans s'annoncer, ni respecter la plus humble des politesses : ne pas entrer sans être invité !

Quelle ironie, pour quelqu'un qui se vantait d'être gardien des bonnes mœurs…

En poussant la porte et en entrant comme en terrain conquis, Drago assista à une scène inattendue. Harry Potter était assis sur le bureau du Maître des Potions et celui-ci debout entre ses jambes, tenait le Gryffondor dans ses bras et l'embrassait à bouche que veux-tu.

Le blond resta alors figé, la mâchoire presque décrochée de surprise et la main encore sur la poignée de porte. Son parrain, Severus Rogue commettait sous ses yeux un crime abominable contre la morale et avec Potty, ce nabot balafré ! Madame Ombrage devait l'apprendre immédiatement et mettre ces criminels hors d'état de nuire !

Comment osaient-ils se comporter de façon aussi monstrueuse ? C'était contre-nature et contre toutes les règles de la bienséance ! Les sorciers ne se laissaient pas aller à ce genre de bas instincts. C'était bon pour les Moldus qui étaient inférieurs et se laissaient guider par des pulsions primitives !

Pendant une dizaine de secondes, Drago resta planté, le souffle coupé complètement par la vue anormale. Harry se pressait contre Severus tout en gémissant de plaisir et avec ses deux mains glissées dans les longues mèches noires de l'homme. Son parrain se contentait de serrer Potter dans ses bras, pourtant il sembla un instant à Malefoy que le sorcier se… frottait ? Il n'en était pas très sûr, contre l'entrejambe de son élève.

Mais c'était dégoûtant !

Un grondement étranglé d'horreur et de dégoût franchit alors les lèvres de Drago. Le bruit fit immédiatement les deux coupables se retourner et cette fois-ci, ce fut la surprise que l'on put voir sur le visage d'Harry Potter.

La surprise suivie d'une lueur de panique…

Le jeune Gryffondor lança un regard horrifié et rempli de peur à Severus qui pinça les lèvres, le cœur battant. Ils devaient arrêter Drago qui venait de s'enfuir et l'empêcher de parler, et pour ça, il n'y avait pas trente-six solutions : ils devaient oublietter le jeune Serpentard.

— J'y vais, Harry ! Il faut que quelqu'un l'arrête ou on est foutus ! Rentre discrètement à la tour de Gryffondor. Je crois que notre sortie est annulée ou du moins compromise en l'état actuel des choses !

— Sev' ! Et si on n'y arrive pas ?

Severus soupira et sortit sa baguette de la manche de sa redingote. Il s'élança vers la porte restée au large ouverte. Avant d'en franchir le seuil pour s'élancer en courant à la poursuite de son filleul, le Maître des Potions lança :

— Alors on assumera.

Tandis qu'Harry Potter sortait sa cape d'invisibilité de la poche de sa robe d'école, Drago courait comme un dératé dans les couloirs des cachots. Il devait semer son parrain qui connaissait tous les raccourcis et surtout réussir à atteindre le bureau de Dolorès Ombrage au premier étage juste à côté de sa salle de classe. Avisant Ron Weasley qui venait vers lui, l'air nonchalant, le blondinet l'attrapa par une des manches de sa robe, ce qui eut pour effet de faire vaciller le rouquin.

— COURS, WEASLEY ! On doit aller d'urgence chez Ombrage !

— Pourquoi ? fit alors Ron en obéissant néanmoins.

— Rogue me poursuit pour m'oublietter, haleta Malefoy. Je l'ai surpris avec Potter ! Ils s'embrassaient !

Cette révélation eut presque pour effet d'immobiliser Ron au milieu du couloir, mais Drago le tirait toujours par la manche et il ne put que suivre.

— COURS ! Ils étaient dans son bureau, collés l'un contre l'autre et ils se bécotaient sur la bouche ! Des pervers !

— Quelle horreur ! gémit alors Ron. Mon meilleur… ami… Par Merlin !

— Si je me fais choper par mon parrain, trouve Madame Ombrage et raconte-lui tout ! Vite, file par là ! Il faut pas qu'il nous attrape tous les deux !

Ron comprit immédiatement la stratégie mise en œuvre. Il prit aussitôt une autre direction et se dissimula derrière une armure étincelante. Bien lui en prit car moins de quinze secondes plus tard, il vit Severus Rogue courir, cheveux au vent et cape flottant derrière lui comme deux ailes. Il remarqua la baguette que le sorcier tenait fermement devant lui comme une épée et entendit un « aïe » émis visiblement par Malefoy, un bruit de corps qui chutait et ensuite plus rien. Ron se douta de ce qui était arrivé à son collègue de la Brigade Inquisitoriale. Si vraiment Drago avait vu ce qu'il venait d'affirmer, il y avait en effet de fortes chances pour que le Maître des Potions lui coure après pour lui retirer ce souvenir particulier.

Ceci signifiait que le rouquin était dorénavant le seul détenteur du secret de cette petite vermine hypocrite d'Harry Potter !

Le petit saligaud avait osé refuser le mariage avec Ginny, que sa mère lui avait officiellement proposé. Et tout ça pour quoi ? Pour se rouler dans la fange et le stupre avec l'abominable Chauve-souris des cachots !

Les traits du visage de Ronald Weasley se durcirent. Sa bouche afficha un pli amer et ses yeux bleus lancèrent des éclairs glacés. Le garçon passa sa main sur les deux pin's qui ornaient le revers gauche de sa robe d'école. Le « I » signifiait « membre de la Brigade Inquisitoriale », le « P » indiquait « Préfet », en l'occurrence il était le Préfet des Gryffondors bien qu'il n'eût jamais fait de zèle avec cette fonction. Non, Ron préférait de beaucoup la Brigade Inquisitoriale… et il allait de ce pas faire son rapport à « la Dame en Rose ».

À la base, seuls les Serpentards avaient été membres de la Brigade d'Ombrage. Et puis, comme une partie des titulaires avait quitté l'école pour cause de diplômes obtenus, la cinglée en rose avait dû recruter largement dans les autres Maisons, l'année suivante. Une seule condition avait été exigée : le sorcier ou la sorcière devait être de sang-pur. En effet, seuls les élèves issus des plus grandes et plus vieilles familles connaissaient et maîtrisaient les coutumes ancestrales et savaient donc parfaitement ce qu'on attendait d'eux dans le Monde Magique.

Les familles polluées par les nés-moldus avaient trop abandonné les anciennes coutumes et s'étaient pour beaucoup perdues et fourvoyées. Les Weasley, bien que socialement défavorisés par leur pauvreté avait su conserver leur sang-pur et surtout, ils étaient éduqués depuis des générations pour tenir un rang que malheureusement ils n'avaient plus faute d'or.

Ron avait été le seul Gryffondor à se présenter pour ce poste. Ginny s'estimait trop jeune et Molly était d'accord avec elle. Les jumeaux et Percy avaient déjà quitté Poudlard, sinon il y aurait eu de fortes chances pour que Percy postule lui aussi. Le rouquin était persuadé que l'honneur de sa famille toute entière reposait sur ses épaules, du moins à Poudlard car au Ministère, Percy s'était déjà fait remarquer pour sa rigidité et son intégrité. En ce qui concernait Bill et Charlie, ils étaient bien trop loin de l'Angleterre pour être affectés par la politique ministérielle et les jumeaux étaient des marginaux qui se faisaient un peu trop remarquer et pas pour de bonnes raisons. Ginny, elle… et bien c'était une fille. Juste une fille. Et pour Ron, cela voulait simplement dire qu'elle n'avait qu'à fermer son bec et faire ce qu'on lui ordonnait. Pour l'instant, c'était d'avoir de bonnes notes, de ranger sa chambre et de jouer décemment au Quidditch quand on avait besoin d'elle pour une partie. Le reste n'avait aucun intérêt. Ginny devrait obéir sans discuter lorsque les parents choisiraient de la marier. Ils allaient devoir recommencer à chercher un bon parti, vu que ce petit salopard de Potter avait refusé ! Maintenant, Ron comprenait pourquoi… et il en était furieux. Furieux et horrifié de n'avoir rien remarqué auparavant. Enfin franchement, une telle perversité ne devait pas passer inaperçue… Comment n'avait-il rien vu ?

Tout en se fustigeant de son incapacité à remarquer la perversité chez un sorcier lambda, Ron longea le couloir du premier étage en se retournant fréquemment, l'œil aux aguets et la baguette en main. Il ne croisa qu'une Poufsouffle de seconde année qui portait un gros chat noir dans ses bras. Le chat avait un pansement à une patte et la fillette devait sortir du bureau de Gobe-Planche, la professeure de soins aux créatures magiques, dont l'appartement se trouvait au-delà de l'infirmerie.

Soulagé d'être arrivé à bon port, Ron Weasley se planta devant la porte de Dolorès Ombrage. Une petite plaque émaillée ornée d'un chaton au nez aplati annonçait l'identité du professeur occupant ce bureau. Le jeune sorcier frappa, le cœur battant, excité d'être le héraut[1] qui allait lui apprendre une incroyable nouvelle.

— Entrez ! fit une voix mielleuse et haut perchée.

Aussitôt, le Gryffondor entra dans la pièce et referma la porte derrière lui. Il avala sa salive et avança d'un pas.

— Professeur, Malefoy m'envoie vous apprendre une nouvelle incroyable. C'est même si incroyable que j'ai du mal à le croire moi-même… Mais je le crois quand même, vous savez, parce qu'il a dû être oublietté pour maintenant…

Dolorès Ombrage leva un sourcil intrigué en entendant les paroles décousues et même passablement stupides prononcées par le rouquin. Celui-là n'était décidemment pas le plus brillant de sa Brigade… pas le plus idiot non plus, il y avait Crabbe et Goyle… mais Weasley était un crétin. Et elle était experte pour juger de la crétinerie.

— Monsieur Weasley, si c'est si important et incroyable, pourquoi Monsieur Malefoy n'est-il pas venu m'apporter cette nouvelle lui-même ?

— Ben, M'dame… bredouilla Ron en dansant d'un pied sur l'autre. C'est comme j'vous l'ai dit… Il a dû être oublietté pour maintenant. Son parrain lui courait après comme un dératé pour lui enlever son souvenir.

Dolorès Ombrage se figea dans son mouvement et la plume d'autruche rose qu'elle tenait, resta suspendue dans les airs. Le crapaud aux cheveux permanentés analysa rapidement le peu d'informations qu'elle venait d'obtenir. Le parrain de Drago Malefoy, c'était le Professeur Rogue, comme tout le staff de Poudlard le savait. Visiblement, le jeune Serpentard avait assisté à quelque chose qu'il n'aurait jamais dû voir. Cette chose était suffisamment grave pour que son parrain lui coure après dans les couloirs afin de lui jeter un sortilège d'amnésie. Visiblement, Malefoy se sachant poursuivit, avait réussi à passer l'information à Weasley pour qu'elle lui parvienne malgré tout.

— Weasley… Qu'est-ce que Malefoy vous a raconté ? Qu'a-t-il vu de si particulier ?

Ron leva les yeux vers la femme en rose et ouvrit la bouche pour commencer son explication. Il n'en revenait pas lui-même ! Ce petit goret d'Harry Potter avait osé commettre une telle infamie. Et depuis quand est-ce que cela durait ? Jusqu'où était-il allé avec le bâtard graisseux ? Quand Remus et Sirius allaient l'apprendre, le renégat n'aurait qu'à bien se tenir ! Il allait être renié sur le champ et chassé, tout Sauveur qu'il soit.

Dans son fauteuil en tapisserie damassée de soie rose, Dolorès Ombrage attendait, toute ouïe, les yeux étincelants. Derrière elle, sur le mur de pierres peintes en rose, les chatons s'agitaient dans les rangées d'assiettes de collection. Le bruit qu'ils faisaient était parfois insoutenable.

La Grande Inquisitrice avait reproduit dans cette nouvelle pièce le bureau qu'elle avait possédé du temps où elle était Professeur de Défense Contre les Forces du Mal, identique à la décoration du cabinet qu'elle occupait toujours au Ministère.

— J'ai croisé Malefoy dans le couloir des cachots, il courait comme un fou et m'a entraîné avec lui. Il disait que je devais vous prévenir car son parrain était après lui pour l'oublietter. Il m'a dit qu'il avait vu le Professeur Rogue et Harry Potter qui s'embrassaient dans le bureau de Rogue. Ils étaient collés l'un à l'autre qu'il a dit. Je me suis caché et j'ai vu Rogue qui courait aussi. Il a pointé sa baguette, j'ai entendu un « aïe » et le bruit d'un corps qui tombait à terre. Je me suis pas retourné mais j'ai compris que c'était Malefoy qui venait de se faire avoir. Il a dû être oublietté et donc y avait que moi pour vous prévenir.

Ombrage afficha un petit sourire cruel qui s'élargit soudain en un rictus affreux. Elle tenait enfin ce petit sagouin de Potter ! Des années qu'elle espérait lui mettre la main dessus, c'était inespéré, surtout si ce que Weasley venait de dire était vrai. Elle devait attraper les coupables mais avant, trouver Malefoy et vérifier son état mental. L'odieuse bonne femme se frotta les mains et ouvrit le tiroir du haut de son bureau lui aussi peint en rose. Dans un petit flacon de verre provenant du Ministère de la Magie se trouvait un liquide incolore ressemblant à de l'eau pour celui qui n'aurait pas lu l'étiquette. Elle glissa discrètement le flacon dans la poche de sa robe.

— Weasley, allez me chercher la Brigade Inquisitoriale au complet. Nous avons une mission urgente.

— Oui, M'dame, répondit Ron, content de lui.

Le Gryffondor sortit de la pièce avec le sentiment du devoir bien accompli. Il avait parfaitement exécuté l'ordre donné par son chef de section, Drago Malefoy. Harry Potter allait payer pour son crime impardonnable et Molly se consolerait ainsi plus vite du refus malpoli du nabot balafré comme l'appelait Malefoy.

Ombrage dut presque se mettre le poing dans la bouche pour ne pas hurler sa liesse à la face du monde… enfin… disons à ses assiettes de chatons. Maintenant, c'était à elle de jouer et pour ça, elle était la meilleure. Elle se dirigea vers la cheminée et commença la destruction en règle de deux vies…


Severus Rogue n'avait eu aucun mal à rattraper Drago Malefoy. Il lui avait lancé un simple maléfice cuisant pour le ralentir, ensuite il l'avait immobilisé d'un Petrificus Totalus informulé. Une fois son filleul à terre avec les yeux agrandis de surprise et de terreur, le Maître des Potions s'était excusé mentalement et avait pointé sa baguette au milieu du front du blondinet. Il avait soigneusement recherché le souvenir en question, grâce à ses dons de Légilimens et lancé enfin l'incantation du Sortilège d'Amnésie.

Le professeur ne s'était ensuite pas attardé dans le couloir désert du premier étage. Il s'était éloigné quelque peu et avait annulé le Maléfice du Saucisson, une fois quasiment hors de vue. Il avait ensuite pris le temps de se désillusionner pour regagner ses cachots. Tout en se fustigeant de n'avoir pas fermé la porte de son bureau afin d'inciter ses Serpentards à lui rendre visite, il arpenta ensuite les pavés de la pièce avec nervosité. Harry n'était plus là, bien entendu. Normalement, le Gryffon avait dû regagner discrètement la tour des Rouge et Or. Drago avait été neutralisé et oublietté. Théoriquement, les dégâts étaient limités et tout danger écarté. Mais il serait préférable que la sortie de ce samedi soit annulée pour plus de sureté. Si aucune information mal venue ne filtrait parmi les élèves ou le personnel de l'école, il serait toujours temps de reprendre ses bonnes habitudes la semaine suivante, mais en redoublant de précautions.

Tout d'abord, il allait fermer cette foutue porte donnant sur la Salle Commune des Vert et Argent. Tant pis pour eux, ce petit con de Drago n'avait qu'à frapper. Par Merlin, ce n'était pas un moulin Moldu. Mais où avait-il appris à se comporter ainsi ? Lucius allait en entendre parler sérieusement. C'était inadmissible pour un sang-pur ayant reçu une éducation que les Malefoy estimaient élitiste.

Severus visa la porte avec sa baguette et lança un sortilège de verrouillage, puis il alla s'asseoir derrière sa table de travail. Puisque la soirée était gâchée, autant avancer un peu sur les corrections de ses copies. Le potionniste avait à peine ouvert le couvercle de son flacon d'encre rouge inaltérable de chez Scribenpenne que la cheminée de la pièce s'allumait d'une lueur verte. Une tête vénérable et barbue bien connue apparut dans les flammes.

— Severus ? Ah ! Vous êtes là ! Qu'est-ce qui s'est passé ? Je viens d'avoir quelques échos qui ne sentent pas bon, mon garçon. La Brigade Inquisitoriale de Dolorès est allée, il y a quelques minutes, arrêter Harry pour comportement criminel, immoral et dépravations sexuelles contre-natures. Vous êtes accusé également d'avoir perverti un élève par votre vice. J'ai envoyé Minerva aux nouvelles lorsque Miss Granger m'a appelé par cheminette pour me mettre au courant. Elle était bouleversée. Elle a entendu la Brigade se vanter que des Aurors avaient été appelés pour vous arrêter et vous interroger sous Véritasérum.

— Comment est-ce possible, Albus ? s'horrifia la Terreur des cachots en se précipitant vers l'âtre.

— Je l'ignore, mais si vous me disiez ce qui a motivé Dolorès. Faites vite, Severus, nous n'avons que peu de temps pour contre-attaquer.

— Drago Malefoy est entré dans mon bureau sans frapper. J'étais avec Harry et nous nous apprêtions à quitter Poudlard pour Londres. Il nous a vus nous embrasser. Rien de plus. Je lui ai couru après pour l'oublietter. Je ne comprends pas comment c'est arrivé aux oreilles d'Ombrage, par Merlin ! Et où est Harry ? Que vont-ils lui faire ?

— La dénonciation vient de Ronald Weasley. Il fallait s'y attendre… Il a eu l'opportunité et il a sauté dessus. Sans nul doute Malefoy a réussi à lui passer l'information avant que vous le rattrapiez. C'est rageant.

Severus resta planté devant la cheminée. Albus ne lui avait fait aucun reproche. Il ne s'était pas non plus étonné. Est-ce que ça voulait dire que le secret qu'il gardait depuis si longtemps n'en était pas un du tout pour le vieil homme ?

— Vous saviez, Albus ?

Le Directeur fit un vague mouvement de la main indiquant que ce n'était pas le problème et qu'il était inutile de mettre ça sur le tapis.

— Pour Harry, choisit de répondre Dumbledore, Minerva va tenter d'avoir accès à lui en tant que Directrice de Maison. Dolorès va sortir ses griffes et ça va être dur de le lui soustraire. Il va certainement avoir le droit au Véritasérum lui aussi.

— Il balancera tout. Il ne saura pas y résister. Moi-même, j'aurai du mal… Je fournis le Ministère avec ma formule améliorée.

— Zut ! pesta Dumbledore qui sentait l'étau se resserrer sur ses deux jeunes gens préférés. Ouvrez les barrières de votre cheminée, Severus. J'arrive.

Le Maître des Potions sortit sa baguette de sa poche et marmonna un mot de passe en tendant le fin bâton de bouleau noir vers le foyer. Il entendit le bruit des robes du Professeur Dumbledore qui se relevait et le vit ensuite traverser les flammes.

À peine était-il arrivé à bon port que des poings tambourinaient à la porte donnant sur le couloir des cachots.

— AU NOM DU MINISTÈRE, OUVREZ ! VOUS ÊTES EN ÉTAT D'ARRESTATION !


Harry Potter s'était dissimulé sous sa cape d'invisibilité et obéissant à son amant, il avait quitté le plus discrètement du monde les cachots. Ses chaussures ensorcelées par un Silencio, il avait regagné le 7ème étage et la tour de Gryffondor sans se faire remarquer. Il avait croisé Severus qui baguette tendue courait après Drago Malefoy. Il avait vu Drago attraper Ron par la manche et lui donner un ordre qu'il n'avait pu saisir étant trop éloigné. Soucieux et même franchement angoissé, pour dire la vérité, il avait attendu qu'un élève sorte par le portrait de la Grosse Dame pour se glisser incognito dans la Salle Commune des Rouge et Or.

Là, il avait rejoint son dortoir et s'était caché dans son lit, derrière les rideaux fermés de son baldaquin. Il avait retiré robe et cape, ainsi que ses souliers et sa cravate. Il s'était emparé du livre récemment emprunté à la bibliothèque de l'école et sa baguette sous son oreiller, il s'était allongé sur le couvre-lit, désirant ainsi donner le change et faire croire qu'il n'avait pas quitté les lieux.

Cela aurait pu être une bonne idée, si Ron Weasley n'avait pas vu Harry quitter la tour une bonne heure auparavant avec l'intention – soi-disant – de se rendre en retenue dans les cachots. Le Sauveur recevant une part non négligeable des retenues normalement distribuées par le tyran local, nul n'avait émis de doute quant à la légitimité de ladite retenue. Comme personne n'avait vu Harry revenir, sa présence dans le dortoir allait être discutable et lui causer plus de soucis qu'il ne l'avait pensé d'un premier abord.

La Brigade Inquisitoriale, Gardienne des Bonnes Mœurs, cette fois-ci commandée par Ron Weasley puisque Malefoy était à l'infirmerie, entra de force dans la Salle Commune. La Grosse Dame ayant émis des doutes quant à la présence des membres provenant des autres Maisons de l'école, elle avait refusé d'ouvrir sa toile à Ron qu'elle connaissait pourtant et qui bien entendu possédait le mot de passe. Elle voulait bien lui ouvrir à lui, mais elle refusait de laisser entrer une dizaine de Serpentards ainsi que deux Serdaigles. Il fallut que le rouquin la menace en lui mettant sous le nez ses insignes de Préfet et d'Inquisiteur pour que la méfiante en robe rose à bouillonnés ne rebrousse chemin en laissant son portrait grand ouvert. La Grosse Dame n'était pas allée bien loin. Elle s'était précipitée dans le bureau de McGonagall en utilisant la toile du vieux McCormick, sorcier célèbre pour avoir distillé de vieilles paires de bas après avoir appris que les Moldus buvaient du jus de chaussettes. De là, après avoir bousculé le sorcier écossais et dérangé Minerva de sa petite séance de correction de copies de fin d'après-midi, elle avait raconté à la Directrice de Gryffondor ce qui se mijotait dans la Salle Commune. L'enseignante de métamorphose était d'accord avec la Grosse Dame, la présence de la Brigade Inquisitoriale était une très mauvaise nouvelle et il valait mieux qu'elle aille de ce pas voir ce qui se passait.

Ron avait traversé la Salle Commune en hurlant qu'il voulait savoir où se trouvait Potter. Hermione qui descendait justement les escaliers menant aux dortoirs, s'était immobilisée sur une marche et poings sur les hanches, elle avait vociféré qu'Harry était parti en retenue et que si Ron ne s'en souvenait pas, c'était qu'il était bien plus stupide qu'elle le pensait !

Le rouquin s'était empourpré et avait répondu vertement et l'index tendu qu'Hermione n'avait pas à se mêler des affaires de la Brigade. Et là, le sale petit traître s'était planté au milieu de ses jeunes condisciples et avait annoncé d'une voix de stentor que Potter était coupable de crime immoral et de dépravations sexuelles contre-natures. En outre, il annonça que son complice Severus Rogue était accusé d'avoir perverti un élève par son vice et qu'il allait répondre lui aussi de ses crimes devant les Aurors et sous Véritasérum. Il avait beau avoir oublietté Malefoy, son forfait avait été découvert.

Hermione comprit immédiatement ce qui se passait. Elle remplit également en une fraction de seconde, les blancs dans les récits d'Harry concernant son été. Visiblement, son meilleur ami était gay et leur professeur de potions également. S'étant trouvés par hasard dans le Londres Moldu et dans une boite gay, comme Harry l'avait si bien avoué, les deux hommes avaient de toute évidence démarré une relation personnelle et amoureuse qui avait été maintenue dans l'ombre depuis le début du mois d'août.

La jeune fille ignorait où se trouvait Harry à cette heure. Elle ne savait pas trop non plus ce qui se passait vraiment. Harry et le Professeur Rogue avaient dû être surpris. Il fallait en savoir plus !

— Qu'est-ce que c'est que ces sornettes ? ricana-t-elle en descendant les dernières marches de l'escalier. Harry ? Un criminel ? Et d'où sortent ces bêtises ? Tu sais très bien qu'il n'y a pas plus sage que lui ! Par Merlin ! Il n'a même pas bu de Champagne pour son anniversaire ! Comme si tu ne le savais pas ! Franchement, Ron, tu abuses !

— Malefoy a surpris Harry et Rogue en train de s'embrasser sur la bouche dans le bureau du sale pédophile pédéraste.

— Un quoi ? Ne dis donc pas de sottises et cesse d'employer des mots que tu ne comprends même pas !

Les oreilles de Ron affichaient une couleur pourpre qui était un indice sérieux sur son agitation du moment. Du coin de l'œil, il vit Ginny qui s'énervait, bouche bée et visiblement très choquée des révélations inattendues qu'il avait faites. Dean et Seamus avaient froncés les sourcils lorsque Ron avait annoncé les « chefs d'accusation ». Il n'y avait qu'Harry pour se coller dans un pétrin pareil, et pour quoi ? Ou plutôt pour qui ? Pour l'hideuse Chauve-souris des cachots !

— CRABBE ! GOYLE ! NOTT ! Venez avec moi fouiller les dortoirs ! PARKINSON, BULSTRODE ! Personne ne doit entrer ou sortir d'ici avant qu'on l'ait trouvé, alors gardez cette putain de porte ! brailla Ron, comme s'il était investi d'une mission divine.

Aucun de ses acolytes ne protesta. Ombrage lui avait confié une mission et puisque Drago était à l'infirmerie, ils devaient tous obéir à la Belette, alias Weasmoche.

— CHAMBERS ! Tu restes ici et tu les surveilles, fit Ron en désignant ses condisciples interloqués. LES AUTRES, FOUILLEZ PARTOUT !

— Heuu… Weasley… j'peux aller aux toilettes avant ? demanda le dénommé Chambers dont la cravate indiquait qu'il était un Serdaigle.

— Ok, mais grouille-toi ! Hermione, montre-lui le chemin !

L'occasion était idéale : en conduisant ce type dans la salle de bain, la jeune Préfète allait pouvoir tenter d'utiliser la cheminée qui réchauffait le vestiaire servant au déshabillage des élèves mâles. Il faudrait faire vite pour ne pas se faire griller. Hermione poussa une porte et s'effaça pour laisser entrer l'Inquisiteur.

— C'est la porte au fond. Elle mène aux toilettes des garçons. Si tu permets, je te laisse y aller seul. Ce n'est pas un endroit convenable à visiter pour moi. Je vais rester ici dans le vestiaire et en profiter pour voir si des petits n'auraient rien oublié. Les premières années sont très têtes en l'air.

— Merci, oui. C'est bien… Tu fais bien ton job de Préfète.

— Je l'espère ! répondit Hermione en levant le nez de manière un peu snob.

Son regard se fit sournois lorsqu'il suivit Chambers qui traversait la pièce toute en longueur et passait la porte marquée « WC » juste à côté de celle indiquant « DOUCHES » en lettres de cuivre bien astiquées.

À peine le garçon était-il entré dans les toilettes qu'Hermione se précipitait vers l'âtre qui réchauffait toute l'année les vestiaires, l'endroit glacé n'étant pas propice à un déshabillage s'il n'était pas un minimum chauffé. Elle retira de la poche de sa robe le pot de poudre de cheminette qu'elle avait volé dans la Salle Commune… ou plutôt… provisoirement emprunté. Dans les braises rougeoyantes présentes entre les chenets de bronze, la brunette jeta une poignée de poudre verte en annonçant discrètement : « Bureau du Professeur Dumbledore ».

Elle croisa les doigts en lançant des regards inquiets vers la porte menant aux toilettes et pria pour que Chambers soit sujet à des crises aigües de constipation ou pire. Lorsque le Directeur prit la communication, elle soupira de soulagement.

— Professeur Dumbledore ! Je dois faire vite avant d'être surprise ! Ombrage a envoyé sa Brigade de choc pour arrêter Harry. Il aurait soi-disant commis un crime immoral, quelque chose à voir avec des dépravations sexuelles contre-natures et le Professeur Rogue serait également impliqué selon Ron qui remplace Malefoy. Il aurait soi-disant perverti un élève par son vice. Il paraîtrait également que Malefoy aurait été oublietté par son parrain.

— Ils ont pris Harry, Miss Granger ? demanda le vieil homme, dont les yeux ne pétillaient plus derrière ses lunettes en demi-lune.

— Non, Monsieur. À dire vrai, je ne sais pas où il est. Il est sorti il y a une bonne heure pour aller en… retenue dans les cachots. Je ne l'ai pas vu revenir. Ron dit que les Aurors vont arrêter aussi le Professeur Rogue et que tous deux seront interrogés avec du Véritasérum !

Hermione sursauta en entendant le bruit que faisait une des chasses d'eau dans la pièce d'à côté et balbutia au Directeur qu'elle devait couper la communication. Lorsque Chambers revint, il trouva la jeune fille qui rangeait dans un placard une paire de chaussons moldus oubliés par un des jeunes Gryffondors. Elle ramena l'inquisiteur dans la Salle Commune pour s'apercevoir qu'Harry avait été déniché par Ron et ses sbires et qu'il avait été tiré du lit ou autre, car il était fortement débraillé. On lui avait juste permis de mettre ses souliers, mais le garçon n'avait pas eu le temps de nouer les lacets. La baguette de houx d'Harry tournoyait entre les doigts tachetés de son de son ancien meilleur ami.

— Rends-moi ma baguette, Ron ! ordonna le Sauveur, furieux.

— Tu plaisantes ? Un sale pervers comme toi n'a rien à faire d'une baguette ! On connait ton crime ! Tu t'imaginais peut-être que d'oublietter Malefoy allait vous sauver toi et ton complice ? Dans tes rêves ! persifla le rouquin, son dégoût profond affiché sur son visage.

— Un crime ? Quel crime ! s'énerva Harry. En quoi est-ce un crime ?

— Alors tu avoues ! Impudique, obscène ! Emmenez-le, Madame Ombrage va être ravie d'interroger ce petit dépravé et il avouera toutes ses débauches contre natures !

— Tu me sembles avoir pas mal élargi ton vocabulaire en insultes ces temps-ci, Ronald ! Laisse Harry tranquille, il n'a rien fait du tout !

— Ne parle pas de ce que tu ne sais pas, Hermione ! aboya le rouquin en approchant son visage empourpré de celui fermé et furieux de la jeune fille.

La Préfète était plantée bras croisés devant son ancien ami et ses yeux lançaient des éclairs.

— Tu vas vraiment trop loin, Ron ! Je vais dire au Professeur McGonagall ce que tu mijotes et elle mettra fin à tes délires paranoïaques !

— Cause toujours… ricana Ron.

Hermione lança un regard d'impuissance à Harry qui pâle comme la mort ne pouvait même pas protester, Goyle l'ayant emprisonné dans l'étau de ses bras et également appliqué fermement une main sur sa bouche pour le faire taire.


Lorsque La Grosse Dame se précipita dans la toile du vieux McCormick en bousculant celui-ci au passage, Minerva McGonagall en fut particulièrement surprise. Jamais aucun sorcier peint ne se permettait de venir squatter un des tableaux qui ornait son bureau et par conséquent, il devait y avoir une quelconque urgence.

— Oui, Milady ?

— Professeur ! La Brigade Inquisitoriale a exigé d'entrer dans la Salle Commune. Elle était menée par ce rouquin, ce Weasley. Il avait le mot de passe bien entendu, mais je lui ai fait remarquer qu'il n'était pas normal que des Serpentards et des Serdaigles entrent dans la tour de Godric.

— La Brigade… ? manqua de s'étouffer la professeur de métamorphose qui relâcha sa plume pleine d'encre sur le malheureux devoir d'ailleurs raté d'un première année.

— Ils viennent arrêter Monsieur Potter, je les ai entendus ! Et ils vont aussi arrêter le Professeur Rogue pour crime contre-nature.

La Grosse Dame était à présent rouge comme une tomate à la pensée dudit crime. McCormick qui lui avait fait, bon gré mal gré, une petite place dans son tableau, s'étouffait à tenter de dissimuler son fou rire, ce qui lui attira les foudres de la dame en robe de bal encombrante.

Minerva en resta stupéfaite. Qu'est-ce que c'était que cette histoire ? Albus Dumbledore était-il au courant ? Elle était d'avis d'aller lui demander avant de foncer tête baissée, encore une fois, et de tomber sur l'affreuse Dolorès Ombrage qu'elle détestait. L'expérience lui avait appris qu'il valait mieux faire montre d'un petit côté Serpentard lorsqu'on devait affronter le crapaud de Poudlard. L'écossaise se précipita alors vers l'âtre dont les braises réchauffaient paresseusement les murs glacés de son bureau. À genoux, elle y lança nerveusement une poignée de poudre verte qu'elle tira d'une boite en porcelaine ornée d'un filet en tartan.

— Bureau du Professeur Dumbledore !

La sorcière attendit une minute ou presque que le vieil homme s'agenouille. Elle lui confia ce que la Grosse Dame venait de lui dire. Albus ne sembla pas du tout étonné. Il révéla qu'il venait à peine d'avoir Miss Granger à la cheminette. D'ailleurs, il s'était agenouillé un peu précipitamment pour prendre sa communication et ses vieux os le rappelaient maintenant à l'ordre, ce qui expliquait son délai pour répondre à l'appel de sa sous-directrice.

— Je vérifiais quelque chose avec l'un de mes artéfacts de surveillance de l'école et je comptais appeler Severus tout de suite après. Miss Granger m'a en effet prévenu, il y a peine quelques minutes. Monsieur Weasley a conduit sa Brigade chez les Gryffondors dans le but d'arrêter Harry Potter.

— Mais enfin Albus, c'est quoi cette histoire ? Et en quoi Severus est impliqué ?

— Je n'ai que le premier rapport de Miss Granger. Drago Malefoy aurait surpris Severus en train d'embrasser Harry dans son bureau. Selon toute vraisemblance, Monsieur Malefoy serait parvenu à s'enfuir et à tout raconter à Monsieur Weasley, avant que son parrain ne l'oubliette de cette scène particulière. Dolorès a bien entendu envoyé son équipe de bras cassés arrêter les protagonistes. Je vous suggère de filer voir ce qu'il en est et de tenter de récupérer Monsieur Potter. Je règlerai les détails moi-même.

— Potter et… Severus ? Mais… c'est terriblement inconvenant ! Du jamais vu…

Dumbledore l'interrompit avant qu'elle ne monte sur ses grands sombrals.

— Filez, Minerva ! Je vais appeler Severus et tenter d'en avoir le cœur net.

La tête chapeautée de l'écossaise se retira des flammes vertes et la communication s'interrompit. Le Directeur resta à genoux et lança une poignée de poudre sur les braises rougeoyantes. Par Merlin, il ne savait vraiment pas ce qui se passait, mais il allait en avoir le cœur net !


La Directrice des Gryffondors entra dans sa Salle Commune juste au moment où Goyle qui avait ceinturé Harry le bâillonnait pour l'empêcher de protester. Elle balaya la scène du regard et la moutarde lui monta franchement au nez en voyant la pièce Rouge et Or envahie d'Inquisiteurs et ses Gryffies passablement effrayés. Miss Granger, les bras croisés et les yeux lançant des éclairs, trônait au beau milieu de tout ce petit monde et visiblement s'opposait à Ronald Weasley.

— JE PEUX SAVOIR CE QUI SE PASSE ICI ? tonna la vieille femme, furieuse. GOYLE ! LÂCHEZ MONSIEUR POTTER !

— Professeur McGonagall, en profita Hermione, ils sont venus pour soi-disant arrêter Harry sous un prétexte complètement stupide. Je n'ai jamais rien entendu de plus idiot ! rajouta-t-elle agressive en dardant Ron de ses prunelles chocolat.

— J'ai des ordres ! répondit sèchement le rouquin, les oreilles malgré tout empourprées de se voir invectivé de la sorte par sa Directrice de Maison. Je dois conduire Potter chez Madame Ombrage. Elle va l'interroger sous Véritasérum !

— QUOI ? s'horrifia l'intéressé que Goyle venait de lâcher provisoirement. Ça va pas, non ?

— Tais-toi, Potter ! aboya le dernier fils de Molly. Tu ne tromperas personne avec tes simagrées. Je sais la vérité, moi ! Tu n'es qu'un sodomite, je le sais ! Tu as passé ton été à courir le Monde Moldu avec Rogue, tu ne rentrais même pas des nuits entières ! Maintenant on sait pourquoi ! Sale pervers !

La claque qu'Hermione lui assena fit sursauter l'ensemble des élèves présents. Curieusement, Minerva ne releva pas et ne retira pas de points à la Préfète. Seamus ne put s'empêcher un petit sourire et remarqua que Pansy Parkinson se mordait la lèvre pour ne pas s'esclaffer. Visiblement, Ron ne faisait pas non plus l'unanimité chez les Inquisiteurs.

— Celle-là, tu ne l'as pas volée, Ronald Weasley ! gronda la jeune sorcière aux cheveux emmêlés. Je ne veux plus jamais entendre parler de toi ! À partir de maintenant, je ne te connais plus et tu n'es plus notre ami ! Tu ne mérites plus ce titre depuis très longtemps, plus d'une année ! Les amis ne trahissent pas ainsi et ne se comportent pas comme des porcs arriérés ! D'ailleurs, tu peux oublier toute idée incongrue de mariage que tu aurais sur ma personne, je vis au 20ème siècle, moi ! Pas au Moyen-âge ! Et il serait un peu temps que ce Monde qui se vante d'être plus évolué que celui des Moldus se rende compte que c'est le contraire et qu'il a mille ans de retard ! AU MOINS !

L'envolée d'Hermione avait été parfaitement entendue et si elle avait fait rougir certains sangs-purs honteux d'être mis plus bas que terre et comparés aux Moldus, elle avait intrigué les nés-moldus et sangs-mêlés qui n'avaient jamais pris le temps de se poser les bonnes questions. Mais Ron ne comptait pas en rester là. Il prit Harry par le bras et le traîna sans un mot vers la sortie. Il fut aussitôt entouré par les membres de sa Brigade ce qui empêcha le Sauveur de tenter une échappée et découragea Dean et Seamus d'essayer de le tirer de là. Minerva McGonagall les suivit aussitôt, baguette à la main, prête à en découdre avec Dolorès si nécessaire.

Hermione les vit s'éloigner, impuissante. Elle espérait que la présence de leur Directrice de Maison allait changer les choses et arranger les affaires d'Harry. Mais pourquoi au fond d'elle, n'y croyait-elle pas une seule minute ?


Harry Potter avait été installé sur une affreuse chaise rose au velours damassé et ligoté façon moldue. L'horrible bonne femme qui tenait lieu de Professeur d'Etude des Moldus avait sorti un petit flacon transparent de la poche de sa robe et avait obligé Harry à tirer la langue pour lui faire avaler les trois gouttes nécessaires. Bien entendu, Minerva avait protesté et tempêté que tout ceci était illégal, mais Dolorès avait crié plus fort qu'elle, lui rappelant que son titre de Grande Inquisitrice lui permettait de passer directement au dessus d'elle, et même d'Albus Dumbledore et des Aurors… McGo avait semblé accuser le coup et elle avait tremblé de rage en voyant Ron Weasley et Pansy Parkinson maltraiter Harry afin de l'obliger à ouvrir la bouche. Comme le Pékinois lui pinçait le nez, le jeune Sauveur avait dû se résoudre à obéir pour respirer et il n'avait pu éviter le flacon qu'on lui avait précipité dans le bec. Au diable les trois gouttes ! Il parlerait bien mieux avec la moitié de la fiole dans le gosier !

Dolorès Ombrage affichait un sourire hilare qui lui donnait encore plus un air d'odieux crapaud. Elle était installée derrière son bureau et caressait la plume qui allait bientôt prendre note de tous les aveux du sale petit pervers…

Elle l'avait toujours su que ce voyou avait des tendances anormales ! Un débauché, un dévergondé ! Voilà ce qu'il était !

La Grande Inquisitrice se leva lentement et lança un regard d'intimidation à Minerva, la mettant au défi de se mêler de l'affaire. Celle-ci donna un coup d'œil navré à son élève et rongeant son frein, elle garda le silence.

— Comment vous appelez-vous ?

La demande était simple et Harry aurait dû y répondre aussitôt sans même se poser de question, et avec l'habituelle voix monocorde typique des personnes sous l'influence de cette potion. Pourtant, le Sauveur ne répondit pas tout de suite. Il tremblait et de grosses gouttes de sueur perlaient sur son front. Minerva McGonagall leva un sourcil surpris. Potter semblait lutter contre la drogue ! Pourtant, Severus s'était assez vanté d'avoir réussi ce qui était réputé impossible : À savoir, améliorer le Véritasérum. Sa version, brevetée et achetée par le Ministère durait plus longtemps et était plus puissante que l'ancienne. Il était admis que maintenant, personne ne pouvait y résister…

— Harry James Potter… répondit quand même le garçon.

Dolorès Ombrage afficha un sourire encore plus radieux que le précédent, si c'était humainement possible. Potter avait de la volonté, sans nul doute, mais elle était plus rusée que lui et, de plus, chose amusante, c'était la potion de son amant qui allait causer sa perte…

— Avez-vous commis des actes contre natures avec le Professeur Rogue ?

La réponse ne se fit pas attendre et surprit l'assemblée suspendue aux lèvres purpurines du Sauveur.

— Non.

Comment ça, non ? Mais Malefoy avait bien vu ces deux énergumènes s'embrasser, non ? Dolorès n'y comprenait plus rien. Elle se tourna vers Weasley qui se sentant sur la sellette, protesta aussitôt.

— Il ment, Professeur ! Malefoy était poursuivi par Rogue, je l'ai vu ! Et il a été oublietté, c'est prouvé ! Donc ce que Malefoy a vu était vrai, sinon Rogue ne se serait pas donné cette peine !

— On ne peut pas contrer ce nouveau Véritasérum, pesta Ombrage.

Pansy Parkinson eut alors le mauvais goût de s'avancer et d'émettre une hypothèse, ce qui agaça prodigieusement McGonagall qui avait exulté en entendant Harry nier.

— Professeur Ombrage ? Si vous permettez, vous devriez peut-être reformuler votre question. Je pense que Potter, dans sa perversité, est persuadé que ses actes immondes sont tout à fait acceptables voire normaux. Après tout, il a été élevé par des Moldus… Et Weasley nous a dit, qu'ils étaient parmi les pires Moldus qu'on pouvait trouver dans ce monde inférieur.

Minerva grimaça involontairement. La petit idiote n'avait pas tort, ces Moldus-là étaient les pires qu'on pouvait rencontrer.

Ombrage regarda Parkinson avec le plus grand intérêt.

— Miss Parkinson, je pense que vous avez tout à fait raison. Vingt points pour Serpentard. Je ne manquerai pas d'exprimer ma satisfaction envers votre personne lorsque je rencontrerai Monsieur Votre Père au Ministère.

Pansy afficha un sourire suffisant et hocha la tête pour remercier la Grande Inquisitrice. Elle remarqua même la mine jalouse que Millicent Bulstrode exposait au monde.

— Monsieur Potter… susurra Ombrage en prenant bien son temps pour marquer les esprits. Avez-vous échangé un ou plusieurs baisers sur la bouche avec le Maître des Potions ?

La question précise et quelque peu crue et choquante pour ces pauvres sorciers coincés eut le mérite de les faire rougir, toussoter et tourner la tête de honte. Harry lui, tenta encore de lutter afin de ne pas répondre mais la question était claire, nette et directe et il lui fut impossible de s'y soustraire.

— Oui.

Des cris à peine étouffés se firent alors entendre. C'était donc vrai ! Ron Weasley se pavana comme un coq sur son tas de fumier, hochant la tête pour affirmer qu'il l'avait toujours su et qu'on ne pouvait mentir impunément à un honorable membre de la Brigade Inquisitoriale. Pour faire bonne mesure, il passa devant le suspect interrogé et poussa l'audace jusqu'à lui cracher dessus, ce qui lui valut un maléfice cuisant dont il ne put identifier la provenance.

Personne ne vit Minerva McGonagall ranger sa baguette dans sa manche avec un petit air sournois très satisfait. Ok, Potter avait avoué. Il avait donc des choses de nature particulière à se reprocher et visiblement Severus Rogue avait été un avide participant à ces ébats… si ébats il y avait eus. Et on allait certainement le savoir parce que cette saleté d'Ombrage n'allait pas s'arrêter en si bon chemin. Mais que faisait Albus ? Par Merlin !

— Avez-vous eu des relations intimes et je dirai même, sexuelles, avec le Professeur Rogue ? poursuivit Ombrage de sa voix de petite fille.

Elle termina sa question par un gloussement amusé qui domina un instant le boucan que faisaient les chatons dans leurs odieuses assiettes.

Parkinson et Bulstrode hoquetèrent de surprise et rougirent copieusement, leurs chastes oreilles ne pouvant supporter de tels propos ignobles. Crabbe et Goyle se regardèrent, également rouges et fixèrent ensuite leurs chaussures en se dandinant. Les autres pouffaient ou tentaient de garder un air stoïque, mais tous étaient d'accord sur une chose : personne ne souhaitait se trouver à la place de Potter. Se faire choper par Ombrage c'était dur, mais en plus bécoter leur Directeur de Maison et/ou Professeur de Potions c'était quelque chose qu'aucun ne trouvait envisageable. Nott regarda même Harry avec intérêt en se disant que le petit con avait vraiment des couilles pour oser faire de telles choses interdites avec en plus quelqu'un aussi détestable.

Encore une fois, on vit Harry se trémousser malgré les liens qui le retenaient et tenter de lutter contre le Véritasérum. C'était déjà un exploit qu'il arrive à retarder ses réponses autant qu'il le faisait… On ne pouvait lui nier sa force incroyable de caractère.

— Oui, finit-il par lâcher de façon monocorde.

Des cris d'horreur se firent alors entendre et les membres de la Brigade s'agitèrent. Le suspecter c'était une chose mais entendre l'aveu… c'était incroyable, absolument inouï.

— Depuis combien de temps cette infamie dure ? demanda Dolorès d'une voix sèche.

Harry ne répondit pas. Pour lui il n'y avait rien à dire, il n'y avait aucune infamie dans sa vie. Ombrage se souvenant de la mise en garde de Parkinson, choisit alors de reformuler sa question.

— Je reprends. Monsieur Potter, depuis combien de temps vous couchez avec Severus Rogue ?

La question avait le mérite d'être claire mais aussi crue, surtout pour les « pauvres » petits sorciers épargnés par les turpitudes de la chair. Les rougissements reprirent de plus belle.

— Un mois et demi.

Cette fois-ci, elle les tenait ! Cornélius Fudge n'allait pas en revenir ! Il lui suffisait à présent d'interroger Rogue et de recouper ses aveux avec ceux de son complice et le gredin serait renvoyé de Poudlard ainsi que Potter. Il était plus que temps que quelqu'un mette de l'ordre ici. Pas question que les dépravations des Moldus ne viennent entacher le Monde Magique.

— Où avez-vous commis ces actions particulières ? insista-t-elle.

— À l'hôtel… chez mon parrain… dans les cachots… énonça Harry après un petit temps de lutte.

Il était parfaitement conscient qu'il se dénonçait, se mettait dans une situation impossible et Severus avec lui. Mais malgré ses efforts, il ne pouvait s'en empêcher. Il était furieux de sa faiblesse, pourtant il était loin d'être faible justement. Il n'aurait même pas dû pouvoir hésiter à répondre.

— Dans les cachots… donc ici même, c'est très intéressant. Et à l'hôtel, dites-vous ? Dans le Monde Moldu, je présume ?

— Oui, répondit Harry.

Il était facile de deviner que ce n'était pas dans le Monde Magique car il n'y avait pas d'hôtels, juste des auberges plus ou moins mal famées et mal tenues, le Chaudron Baveur étant encore ce qui se faisait de plus luxueux. Mais dans cet endroit, aucun couple masculin ne se serait risqué à louer une chambre, cela aurait été bien trop suspicieux.

Ron était fou de rage. Harry avait osé commettre ses monstruosités, ses obscénités répugnantes et scabreuses quand les Weasley se trouvaient au Square Grimmaurd. Il aurait dû s'en douter qu'il y avait une raison inavouable à son refus d'épouser Ginny. Dès ce soir, Molly et Arthur sauraient à quelle mésalliance ils avaient finalement échappée.

Sans le savoir, Ron avait dormi tout le mois de juillet ou presque dans la même petite chambre qu'un dépravé ! Et d'ailleurs, ça faisait six ans passés qu'il vivait dans le même dortoir que ce dévoyé.

— Il n'est pas question qu'il reste dans le dortoir avec nous ! Professeur Ombrage, une telle indécence n'est pas tolérable. Et… et si c'était contagieux, hein ? Hors de question que j'attrape son anormalité !

Quelques-uns des garçons présents frémirent d'horreur en pensant à la possibilité que ça puisse être contagieux. Des visages inquiets et des yeux pleins d'espoir se tournèrent vers la Grande Inquisitrice pour attendre le salut qui ne pouvait venir que d'elle.

Minerva leva les yeux au plafond en entendant les stupidités émises par Ronald Weasley. À se demander ce que ses parents lui avaient appris, à ce crétin ! Elle se promettait d'avoir une petite conversation avec Molly sans tarder.

— Monsieur Potter… poursuivit Dolorès, un sourire avide sur son visage batracien, avez-vous l'intention de poursuivre votre relation… particulière avec Severus Rogue, maintenant que vous avez été découverts ?

La question figea les spectateurs. Harry venait d'avouer sous Véritasérum entretenir une liaison contre nature avec l'un de ses professeurs ayant vingt ans de plus que lui. Allait-il persister ? Un tel aveu serait le signe que Potter ne songeait nullement à se repentir, et qu'il souhaitait continuer sa vie dissolue. Le silence fut soudain pesant. Encore une fois, le jeune Gryffondor arrêté semblait lutter contre la drogue. Il était clair qu'il ne voulait pas répondre.

McGonagall ne put s'empêcher d'admirer la détermination du garçon à protéger son secret et certainement aussi Severus Rogue. Si on lui avait dit un jour que ces deux-là étaient homosexuels et qu'ils finiraient ensemble, elle ne l'aurait jamais cru. Ce n'était pas difficile, il n'y avait officiellement pas d'homosexuels dans le Monde Magique. Ce n'était plus un crime comme autrefois mais ça restait un délit et Potter allait sans tarder se retrouver devant le Magenmagot et Severus avec lui. Le Maître des Potions risquait sa place d'enseignant et Harry celle d'élève. Minerva n'était pas sûre que le garçon puisse être renvoyé car c'était normalement une décision laissée à la libre appréciation du Directeur de l'école. Sans aucun doute, Albus protègerait Harry jusqu'à son dernier souffle. Mais quelle serait la vie du lionceau soumis à la haine et l'ostracisme de ses pairs ?

— Oui.

La réponse d'Harry horrifia encore plus les Inquisiteurs que la précédente découverte de sa soi-disant infamie. Le Sauveur du Monde Magique persistait et signait !

Une bouffée de fierté envahit alors la Directrice des Gryffondors. Son lionceau n'avait pas failli, il avait le courage d'aller au bout de ses convictions. D'autres, dans la même situation, auraient pris peur et renié leurs affections premières, apeurés des conséquences. Mais visiblement, pas Harry.

— Vous remarquez tous que Monsieur Potter n'exprime aucun regret et qu'il persiste dans son erreur… susurra Ombrage avec un bonheur plus que visible sur sa vilaine face.

— Comment voulez-vous qu'il exprime des regrets quelconques ? ricana alors Minerva McGonagall, il est sous Véritasérum ! Cette drogue n'est pas connue pour cet effet, ou alors j'ai raté un épisode ?

La Grande Inquisitrice se tourna alors vers la trouble-fête comme si elle avait été piquée et la toisa méchamment.

— Minerva, s'il y a une chose qui m'horripile vraiment, c'est qu'une personne incompétente se permette de mettre mes capacités en jugement !

— INCOMPÉTENTE ? VRAIMENT ? OSEZ DONC ME LE REDIRE EN FACE ! hurla alors la Directrice des Gryffondors en pointant sa baguette sous le nez du crapaud en rose. Cette petite farce a assez duré. Vous vous êtes bien amusée, maintenant c'est terminé. Potter va rentrer avec moi à la tour de Godric et je vous conseille de museler et de tenir votre petite Brigade de choc, sinon, je pourrais bien malencontreusement vider les sabliers de leurs Maisons respectives, y compris la mienne, rajouta-t-elle en fixant Ron d'un air mauvais. Ça ne me gênerait pas, il y a des éléments dont je ne suis pas fière qui s'y sont égarés !

— Vous n'avez pas autorité ! glapit alors Ombrage furieuse.

— Oh que si, je la prends et gare à vous si vous vous interposez. Ma baguette pourrait accidentellement vous transformer en théière rose ébréchée, à l'insu de mon plein gré, bien entendu, ricana la vieille professeure de métamorphose. Parkinson ? Libérez Monsieur Potter, je vous prie. TOUT DE SUITE !

Minerva jeta un coup d'œil à Harry. Il avait toujours les yeux dans le vague et ne semblait pas réagir au monde qui l'entourait. Par les culottes trouées de Merlin, ce Véritasérum était bien plus puissant que l'ancien. Potter aurait dû retrouver ses esprits depuis déjà plusieurs minutes.

— Il ne quittera pas ce bureau. Les Aurors vont l'emmener avec eux. Ils doivent être actuellement en train d'arrêter son complice.

— Mais vous délirez complètement, ma pauvre Dolorès ! Les Aurors, maintenant ! Comme s'ils étaient des criminels passibles d'Azkaban ! Et pourquoi ? Je vous le demande un peu ! Un simple baiser ! C'est ridicule ! Ce monde devient de plus en plus perverti et stupide ! Vous ne vous rendez même pas compte de votre bêtise et du ridicule de la situation. Et quant à vous, Weasley, vous êtes la honte de la Maison Gryffondor !

Ron devint rouge comme une tomate en entendant sa Directrice de Maison le dénigrer ainsi.

— Je ne veux pas qu'il revienne dans le dortoir ! Pas question que nous soyons tous contaminés par son anormalité. Même ses Moldus le disent, qu'il est anormal !

— Ce n'est pas à vous de décider, Monsieur Weasley, mais soyez-en assuré, nous allons en reparler très bientôt…

Le ton était plutôt menaçant et Ron ne put s'empêcher d'avaler sa salive. Minerva traversa le bureau en trois enjambées décidées et attrapa Harry par le bras pour lui faire quitter son siège. Le jeune sorcier libéré de ses liens par Pansy Parkinson se leva docilement, le regard fixe et suivi Minerva McGonagall qui l'entraîna vers la porte.

— Je vous déconseille fortement de me suivre, fit alors Minerva en ouvrant le battant de bois, baguette toujours à la main.

— Ce n'est pas la peine, minauda Ombrage, Potter n'échappera pas aux Aurors. Emmenez donc votre petit protégé si ça vous amuse, mais nous savons à quoi nous en tenir et c'est tout ce qui compte. Nous verrons bien comment le Monde Magique réagira à la nouvelle que leur petit Sauveur est un sale pervers, un misérable sodomite !


Le bruit des Aurors tambourinant à la porte avait saisi le Maître des Potions. Il ne comprenait pas ce qui se passait. Il n'y avait pas vingt minutes, il était bien tranquillement avec Harry dans son bureau et ils se bécotaient en attendant le moment où il serait l'heure que tous deux s'habillent en Moldus et sortent discrètement de Poudlard, par le passage secret que Severus avait employé pour rejoindre Voldemort, lorsqu'il était encore un espion de l'Ordre du Phénix. Il y avait bien longtemps que ce discret souterrain n'était plus utilisé que pour lui permettre de rejoindre le Londres moldu pour ses frasques du samedi soir.

Et puis Malefoy les avait surpris. Severus avait couru comme un sprinter moldu à travers les couloirs et les étages afin de rejoindre son filleul et de lui ôter ce souvenir. Il avait cru naïvement que l'affaire était terminée. Mais son répit avait été de bien courte durée, à peine deux ou trois minutes. Et maintenant, il apprenait qu'Harry avait été arrêté par Ombrage et que des Aurors tambourinaient à sa porte ! Mais qu'avait-il donc bien pu faire au ciel, par Merlin ?

— Severus ! Retournez à votre bureau et installez-vous ! Corrigez donc ces copies que je vois là.

Le Serpentard regarda Albus avec des yeux ronds une fraction de seconde. Puis comprenant que le vieux fou avait une idée derrière la tête, il se précipita à son bureau et s'écroula plus qu'il ne s'assit sur sa chaise habituelle. Il reprit la plume précédemment abandonnée et la plongea dans l'encre rouge. Il attrapa la première copie de la pile et ne put s'empêcher un petit rictus en découvrant qu'il s'agissait de celle de Ronald Weasley. Albus ne venait-il pas de dire que ce petit veracrasse avait transmis à Ombrage les informations obtenues accidentellement par Malefoy ? Il allait le payer !

Le Directeur s'était installé dans la chaise occupée habituellement par les élèves ou les visiteurs. D'un geste de baguette, il avait conjuré un plateau contenant un service à thé pour deux personnes[2] et des petits gâteaux au chocolat noir ainsi que de la tarte au citron, on ne se refaisait pas. Le vieil homme se saisit alors de la théière fleurie posée sur le plateau et commença à verser du thé dans les deux tasses assorties.

— Toujours pas de sucre, Severus ?

— Vous le savez très bien. Et… on fait quoi, ils s'impatientent dehors. Je n'ai aucune envie de les voir défoncer la porte de mon bureau…

— Et bien, mon garçon, fit le Directeur négligemment en mettant quatre sucres dans la tasse qu'il se destinait, ouvrez-leur avec votre baguette. Moi je suis très bien installé, pas vous ? Laissez-donc entrer ce pauvre Kingsley… Oui j'ai reconnu sa voix. Cornélius l'envoie encore faire son sale boulot. Je me demande ce qu'il veut…

— Vous êtes sûr que vous ne le savez pas ? pesta Severus légèrement inquiet.

— On verra si j'ai raison, s'amusa le vieux professeur. Si Minerva avait été là, j'aurais parié avec elle.

Severus Rogue émit alors une sorte de grognement désabusé. Minerva pariait sur tout et avec n'importe qui… Il obéit néanmoins à l'injonction et reposa sa plume à la pointe rougie pour se saisir de sa baguette de bouleau noir.

La porte s'ouvrit au large et les deux Aurors qui s'apprêtaient à la défoncer façon moldue se retrouvèrent soudain étalés par terre sous l'élan déployé. Kingsley Shacklebolt pesta en se retrouvant emmêlé dans ses robes violettes favorites, tandis que Nymphadora Tonks, assise par terre, pointait sa baguette sur son collant moldu noir pour en réparer la belle échelle qui venait d'y apparaître avec un joli trou au niveau du genou.

— Une tasse de thé, Kingsley ? fit sournoisement Albus avec un faux sourire aimable, tout en soulevant sa tasse en une invite qui ne trompa pas le Maître des Potions.

— Je ne suis pas là pour prendre le thé, Albus, soupira l'Auror noir en se relevant. Je suis chargé d'arrêter Severus. Merci Tonks, tu peux nous laisser, maintenant. Monte la garde dehors dans le couloir avec les autres.

— Mais… t'es sûr, King ? C'est pas très prudent… hésita la jeune femme aux cheveux roses.

— Que veux-tu qu'il m'arrive avec Albus Dumbledore dans la pièce ?

— C'est vrai, admit-elle en hochant la tête.

La fille remonta sa cape sur ses épaules et sortit du bureau la tête haute en reniflant tout de même pour montrer sa désapprobation. Lorsque la porte se referma sur Tonks, Kingsley agita sa baguette pour faire apparaître une chaise identique à celles occupées par les deux enseignants.

— Je déteste quand Fudge m'envoie faire ce genre de sale boulot, ronchonna-t-il. Je ne vais pas te cacher la vérité, Severus, tu es dans de sales draps. Ombrage a demandé au Ministre que tu sois arrêté, conduit au Ministère et placé en cellule afin d'être entendu officiellement par le Magenmagot. Mais avant, je dois te conduire chez elle, là-haut pour qu'elle t'interroge sous Véritasérum. Par contre, j'ai une question. MAIS BORDEL, QU'EST-CE TU AS BIEN PU FOUTRE POUR MÉRITER UN TEL TRAITEMENT ?

La fin de la question avait pratiquement été hurlée. On voyait bien que l'Auror noir était énervé et même furieux d'avoir été envoyé pour arrêter quelqu'un sans même avoir une seule petite idée du chef d'inculpation.

— Cornélius ne vous a donc rien dit, mon cher ami ? s'amusa Dumbledore en attaquant une part de tarte au citron. Au fait, je manque à tous mes devoirs, une tasse de thé ?

— Non, il ne m'a rien dit, bien entendu, pesta Kingsley. Il ne dit jamais rien quand c'est dérangeant. Et encore une fois pas de thé, merci. Mais si vous aviez plus costaud, je ne dis pas non. Pourquoi j'ai l'impression que je suis pas couché, moi, ce soir ?

— Severus est accusé de comportement immoral criminel et de dépravations sexuelles contre-nature.

— Hein ? Et t'as fait quoi ? s'étonna l'Auror en se tournant vers le Maître des Potions qui venait de conjurer un verre et sortait à présent une bouteille entamée de Vieil Ogden du dernier tiroir de son bureau. Laisse-moi deviner, t'as fait de l'œil à Miss Teigne en passant dans le couloir et Rusard t'a vu ? Ou tu as dit à Minerva qu'elle avait de jolies mitaines et elle a cru que tu la draguais ? Je vois des trucs tellement stupides tous les jours que je m'attends à tout.

Puis se tournant vers Albus, Shacklebolt lui raconta son anecdote du jour.

— Figurez-vous, Albus, que ce matin, j'ai dû enregistrer une plainte d'une sorcière qui accusait son voisin qui louchait, de faire tourner son lait dans les bouteilles moldues que le laitier de son village déposait tous les jours. Selon elle, il regardait ses bouteilles d'un peu trop près et comme il louchait… blablabla… c'était de sa faute. Le gars en question est un cracmol, je le précise. Même s'il avait voulu ensorceler le lait, il en aurait été bien incapable. Y en a j'vous jure ! Je suis sûr que l'enquête va révéler que cette idiote ne ramasse pas son lait avant le milieu de l'après-midi et que c'est pour ça qu'il tourne ! Je me demande pourquoi j'ai fait Auror ! On devait chasser des Mages Noirs soi-disant. Non seulement y en a pas, mais en plus on n'a que des conneries comme ça.

Severus tendit un verre plein de whisky Pur Feu à Kingsley, tout en songeant malgré tout, qu'il y avait de forte chance qu'il dorme en préventive cette nuit, et Harry également. Ça serait chouette si on les mettait dans la même cellule.

— Harry Potter a également été arrêté par Ombrage, révéla Dumbledore en soupirant. Il doit être en ce moment même interrogé sous Véritasérum. Malheureusement, nous ne pouvons rien y faire. Dolorès a la loi pour elle, et elle le sait.

Devant le regard ébahi de l'Auror, le vieil homme choisit de mettre carte sur table.

— Vous allez l'apprendre dans quelques minutes, je suppose, puisque nous allons devoir assister à l'interrogatoire de Severus, là-haut dans le bureau du crapaud… heuu… de Madame Ombrage. Harry et Severus ont été surpris ici même en train d'échanger un baiser. Monsieur Malefoy les a vus, j'ignore comment…

— Il est entré sans frapper, murmura l'ancien Mangemort, le rouge aux joues.

— Bref, Severus a couru après son filleul pour l'oublietter de ce fâcheux incident, mais avant d'être rattrapé, il semblerait que Monsieur Malefoy ait répété sa petite histoire à Ronald Weasley et qu'il n'ait rien trouvé de mieux à faire que d'aller tout raconter à cette chère Dolorès aussitôt.

— Ouais, je vois, révéla Kingsley. Encore un Weasley de la veine de ce prétentieux coincé de Percy. Alors celui-là, si j'me r'tenais pas, je lui collerais un ou deux maléfices cuisants à chaque fois que je le croise dans les couloirs.

L'Auror noir avala son verre de whisky presque cul sec et se mit à tousser ne s'attendant pas à un breuvage de cette qualité.

— Par Merlin, c'est du bon ! Elle décape ta potion, là !

— Elle peut ! Au prix qu'elle coûte… marmonna le Serpentard en regardant la copie de Weasley d'un œil sombre.

Quitte à être arrêté et déféré devant le Magenmagot pour son « crime », il allait prendre le temps de corriger… non… de démolir le torchon de ce petit saligaud !

Laissant la bouteille sur la table et négligeant sa tasse de thé qui refroidissait, Severus reprit la plume plantée dans l'encrier et commença à examiner attentivement le parchemin.

— Heuuu… Albus ? Il fait quoi, là ? C'est pas pour dire, mais c'est pas vraiment le moment de corriger des copies. C'est que je dois le monter chez l'autre cinglée là… Pas que ça m'enchante mais bon…

— Laissez-lui cette dernière fantaisie, Kingsley. Il y a de fortes chances pour que Severus n'ait plus l'occasion de corriger une seule copie d'ici un bon moment.

Shacklebolt ne répondit pas. Severus Rogue, qu'il avait bien connu en tant qu'espion à la fin de la guerre contre Voldemort, alors que lui-même était un tout jeune Auror fraîchement diplômé, était dans les ennuis jusqu'au cou et même un peu plus. Il avait commis le double crime d'être d'abord d'une orientation sexuelle interdite, bien qu'on ne tue plus pour ça, et en plus d'avoir eu une relation quelconque avec le Sauveur Harry Potter. King voyait venir le coup qu'on allait accuser le potionniste d'avoir rendu Potter gay, en bref de l'avoir perverti ou contaminé. Comme si c'était quelque chose de contagieux…

Les deux hommes regardèrent Severus s'acharner sur le malheureux bout de parchemin. Ils virent également le joli TROLL bien rouge et souligné trois fois que le Maître des Potions griffonna de sa plume acérée. Lorsque celui-ci l'allongea sur son support et referma soigneusement son flacon d'encre, Albus prit alors la parole d'une voix douce.

— Allons-y, Severus. Je resterai pour votre interrogatoire. J'en ai le pouvoir en tant que Président-Sorcier du Magenmagot. C'est en des temps comme celui-ci que je me félicite d'avoir ce poste qui pourtant souvent me gave.

— Est-ce que je risque Azkaban, Albus ? s'inquiéta le ténébreux sorcier en se levant de sa chaise. Et Harry ?

— Mon cher petit, moi vivant, je peux vous assurer que vous ne mettrez pas un seul orteil dans cet endroit ! Par contre, ce que je ne peux pas vous promettre, c'est comment les administrateurs de l'école vont le prendre, ainsi que les sorciers de la rue…

— Adieu ma place d'enseignant, si je comprends bien… soupira le Serpentard en attachant l'agrafe de sa cape. Et Harry ne passera pas ses ASPICs, il va être renvoyé…

— C'est à moi de décider du renvoi des élèves, et je n'ai aucune envie de voir Harry partir loin de Poudlard.

Kingsley grinça presque des dents en conduisant hors de son bureau le Professeur Rogue dont il avait quelques secondes auparavant soustrait la baguette magique. Il ne protesta pas lorsqu'Albus le toisa par-dessus ses lunettes en demi-lunes en tendant la main pour récupérer le bâton de bois noir finement ouvragé.

Severus se retourna une seconde avant que la porte ne se referme. Il lança un dernier regard à son bureau, persuadé qu'il n'allait plus jamais le revoir…


1 Messager porteur d'importantes nouvelles.

2 En fait le goûter conjuré par Albus provient des cuisines. Il ne vient pas du néant, c'est impossible et fait partie des cinq exceptions à la Loi de Gamp sur la métamorphose élémentaire.