Bêta : Mokonalex
Assistante/Elfe de maison/Infirmière : Mirabelle31
Note de l'auteur : JE SUIS EN VIE !
Oui. Et je peux vous dire que j'ai eu chaud à mes plumes récemment. En bref, j'ai bien failli mourir en février. Donc vive les transfusions sanguines et les chirurgiens qu'on tire de leurs lits à 4 heures du mat...
Comme vous le savez, j'ai un cancer et depuis octobre j'ai subi 3 opérations chirurgicales, 4 séjours en hôpitaux et cliniques et 1 en maison de repos (celui-là, j'ai pas aimé du tout). La dernière opération a été faite en urgence en pleine nuit pour me sauver la vie (on remercie le SAMU et les pompiers...) et j'en suis sortie... mutilée. Et je dois avoir recours matin et soir aux bons soins d'une infirmière, définitivement.
Ma prochaine intervention est en mai. On croise les doigts, elle ne sera pas simple non plus. Surtout que j'ai une "chance" sur 5 de mourir à chaque opération rien qu'à cause de l'anesthésie. Je ne vous parle même pas des rayons et de la chimio... Pour faire simple, le cancer est allé s'installer "ailleurs" et a fait pas mal de dégâts pas prévus du tout au passage.
Donc, c'est véritablement un miracle que je sois là à de nouveau poster un chapitre. Je vous le dis tout de suite, je n'en ai plus d'avance, mais je ne voulais pas vous faire attendre. Le suivant est commencé et n'a "que" 9000 et quelques mots. Je n'ai pas écrit depuis des mois, ça m'était impossible mais là, je vais suffisamment bien pour bientôt recommencer.
Merci à ceux qui m'ont envoyés des MP de soutien. Bisous à toutes et tous et bonne lecture.
Ce chapitre contient une scène MA censurée. Vous pouvez trouver la version intégrale chez FanFics en Folie.
Il était 7h en ce dimanche matin lorsque les torches s'allumèrent seules dans la chambre du Maître des Potions. Elles étaient ensorcelées ainsi pour servir de réveil lors des week-ends et des vacances scolaires. Le reste du temps, une sonnerie stridente jetait l'occupant des lieux à bas du lit.
La lumière vacillante émise par les torches dévoila un spectacle inhabituel dans cette pièce froide et sans fenêtre. Le lit habituellement bien fait était ravagé et les drap et couvertures rejetés et entassés n'importe comment. Deux corps nus gisaient en travers de la couche, bras et jambes entrelacés. Un pot de chocolat à tartiner moldu largement entamé était abandonné sur l'une des tables de nuit avec une cuillère à soupe en or plantée dedans. Des traces suspectes de chocolat étaient encore visibles sur les corps inertes. Severus Rogue avait les poils de son ventre et de son pubis collés par la pâte sucrée.
Le sorcier était pâle, presque d'une façon maladive. Son système pileux bien noir, comme ses cheveux, tranchait sur sa peau blême. Il était fin, presque trop mince, mais malgré tout musclé. Il avait bien plus de poils sur le corps que le jeune homme qui dormait contre lui. Le peu de bronzage qu'il avait réussi à gagner pendant ses sorties avec Harry n'était plus qu'un souvenir. Le Gryffondor s'en était étonné car lui avait gardé ses couleurs, mais le Serpentard avait l'habitude. Jamais le maigre bronzage qu'il avait obtenu parfois dans son enfance n'avait persisté plus de quelques semaines.
Harry était nettement plus petit que son amant, mais pas beaucoup plus épais que lui. Les mauvais traitements et privations infligés par les Dursley avaient perturbé sa croissance. Jamais le Sauveur n'atteindrait la taille que la génétique avait prévue pour lui. Il stagnait depuis une année à un modeste mètre soixante-cinq, alors que le ténébreux professeur le dominait de son mètre quatre-vingt six. Au désespoir du jeune homme, Hermione Granger l'avait maintenant dépassé lors de sa dernière poussée de croissance.
La lueur des torches ne réveilla pas tout de suite le couple profondément endormi. Ils s'étaient tous deux assoupis tardivement après que le jeune sorcier aux yeux verts eut fait une démonstration à son amant d'une certaine utilisation pas vraiment prévue par ses créateurs de la fameuse pâte à tartiner moldue au chocolat de la marque Nutella™. À la grande confusion de Severus, Harry lui avait tartiné le pénis de chocolat et s'était appliqué ensuite à le consommer à grands renforts de coups de langue et de soupirs bruyants de plaisir ou de gourmandise. Amusé par la démonstration, le rigide et sévère enseignant avait réciproqué le geste avec beaucoup d'enthousiasme, prouvant ainsi qu'il était capable d'apprécier une sucrerie, ce dont Albus Dumbledore doutait sincèrement. Les deux hommes avaient ensuite fait sauvagement l'amour, comme le prouvait l'état pitoyable du lit. Ils avaient sombré aussitôt après dans un sommeil réparateur, les angoisses de la soirée momentanément oubliées.
Le premier qui remua et papillota des paupières fut le plus âgé des deux. Il mit quelques instants à se souvenir où il était, n'étant pas habitué à la présence de quelqu'un dans son lit des cachots, et surtout à se trouver ainsi découvert. Normalement, il se couchait dans son lit aux draps impeccablement tendus et se réveillait bien couvert sans avoir quasiment bougé. Et là, par Merlin, la plupart des couvertures tombait sur le sol de pierre et le drap plus que froissé était emmêlé entre leurs pieds. Le couvre-lit matelassé vert et argent était invisible et avait donc dû passer par-dessus bord au pied du lit. En bref, ce n'était plus un lit, mais un grabat…
Les souvenirs de la veille lui revinrent en bloc et une sourde angoisse l'étreignit alors, lui tombant dessus comme une chape de plomb. Le souffle lui manqua soudain et il s'étrangla une seconde ou deux avant de pouvoir reprendre une bonne goulée d'air frais. Severus se tourna sur le côté et attira Harry contre lui, cherchant instinctivement le réconfort dans ses bras. Il se rendait compte qu'il agissait comme une midinette moldue mais ignorait pourquoi. Il avait un besoin presque viscéral de la présence du jeune Gryffondor et ceci le plus souvent possible. Jamais il n'avait ressenti une telle chose de toute sa vie et commençait à se demander si c'était cela qu'être amoureux. C'était une sensation exaltante mais aussi terrifiante et il comprenait qu'elle puisse perturber autant les Moldus, eux si familiers de ce sentiment, pourtant rarissime ou fortement dissimulé chez les sorciers.
Le Maître des Potions ne doutait pas une seule minute que parmi les couples magiques mariés contre leur gré avec d'illustres inconnus, certains aient pu tomber amoureux de leur conjoint. Mais ce n'était jamais révélé, comme si l'amour était une tare dont on devait dissimuler la moindre manifestation comme une maladie honteuse. Il savait que certaines sorcières mal mariées prenaient des amants dans le Monde Moldu et pour cela se fournissaient en potions de contraception voire abortives dans l'Allée des Embrumes, ces deux préparations étant toutes deux interdites par le Ministère de la Magie. On voulait bien s'amuser chez les Moldus, mais on ne voulait pas prendre le risque de ramener un bâtard surtout lorsqu'on avait trop bu pour penser au sortilège de contraception, ou qu'on le ratait pour la même raison.
Sentant un bras tiède l'enserrer, Harry se réveilla tout doucement, appréciant le contact étroit de l'homme contre lui. Il resta les yeux fermés, savourant la douceur des petits baisers que le Serpentard déposait sur sa mâchoire rugueuse d'une légère barbe matinale.
Le jeune homme était comme un chaton assoiffé de caresses. Il avait découvert avec son aîné le plaisir indicible des baisers et autres câlineries et décidément ne s'en lassait pas. Il était toujours demandeur et le Maître des cachots, peu habitué à ces marques d'intérêt pour sa personne, se faisait un pur plaisir de lui sauter dessus à tout moment, trop ravi qu'un sorcier apprécie autant ses administrations. Il fallait dire que leurs magies les influençaient à leur corps défendant, aggravant leur sensibilité et leur réceptivité aux caresses et baisers, ainsi que la puissance de leurs orgasmes.
Severus Rogue se posait souvent la question de savoir si ce serait la même chose avec un autre sorcier ou si Harry Potter, le Survivant, était vraiment unique et idéalement fait pour lui. En voyant Lucius Malefoy et sa femme Narcissa évoluer dans l'intimité de leur manoir du Wiltshire, il avait de très gros doutes : le couple Malefoy « semblait » s'apprécier et pourtant ne donnait aucune indication sur le fait de ressentir des choses particulières ensemble.
Ils n'avaient eu qu'un seul enfant et Severus savait qu'ils faisaient chambre à part, Drago n'ayant jamais dissimulé cette information, la trouvant tout à fait banale. D'après ce que le potionniste savait, cet arrangement était plus que commun chez les couples mariés ayant déjà donné un héritier à la lignée. Ils avaient fait leur devoir, qu'on ne vienne maintenant plus les embêter avec la corvée conjugale !
Tous ces détails, lorsqu'il y songeait, lui donnaient à penser que le nommé Harry Potter, petit sorcier aux yeux verts et aux cheveux plein d'épis avait quelques chose de particulier qui n'était perceptible que par lui. Sinon, d'autres jeunes gens – et filles – à l'école auraient montré un quelconque intérêt pour le garçon en tentant de devenir un ami proche. Or on ne pouvait pas dire que le héros du Monde Magique était si entouré que ça. Aucun des Weasley ne semblait intéressé, la preuve le dernier ne lui parlait même plus et Harry n'avait jamais mentionné quoi que ce soit de douteux venant des jumeaux ou d'un autre, ni même avoué être si proche que ça d'eux.
Oui, vraiment, il y avait ici des indices sérieux. Personne ne semblait affecté par la promiscuité ou le contact avec Harry Potter de la façon dont lui l'était.
Les mouvements du garçon contre lui tirèrent la Terreur des lieux de sa rêverie.
— Bien dormi, chaton ?
Le chaton en question ne put s'empêcher un sourire attendri et ravi en entendant le sobriquet dont il venait d'être affublé.
— Je dors toujours bien avec toi, mon amour… tenta-t-il, les yeux toujours clos.
Severus retint sa respiration et se figea. Que venait-il t'entendre ? Harry l'avait appelé « son amour » ? Personne ne lui avait jamais dit une telle chose et cela réchauffait son cœur endurci tel un baiser ou une caresse. En vérité, s'entendre dire des mots doux comme cela, c'était vraiment très agréable, surtout venant de la bouche de l'être aimé.
Le sorcier venait de se faire à l'idée que ce qu'il ressentait devait être de l'amour et entendre Harry le nommer ainsi venait également de lui faire comprendre que peut-être c'était réciproque… L'affaire était à suivre…
— Viens, lève-toi. Il nous faut prendre une douche maintenant ou nous allons être en retard au petit déjeuner, dit-il en se remettant sur le dos et en fermant un court instant les paupières.
— Tu as vraiment envie d'aller affronter la Grande Salle, Sev' ? soupira Harry en entrouvrant un œil émeraude.
— Envie ? Non, pas vraiment. Je ne suis pas masochiste. Mais nous n'avons pas le choix. De toute façon tout le monde ou presque doit être au courant à présent.
Severus entendit Harry soupirer sans rien rajouter. Non, ils n'avaient vraiment pas le choix. Ils allaient devoir se lever et aller affronter les fauves entassés dans l'arène qu'était la Grande Salle sous le regard avide et malsain d'une dresseuse nommée Dolorès Ombrage.
Il rouvrit les yeux, jeta un regard vers le garçon et vit qu'il avait replié son bras sur son visage pour le dissimuler. Nier que Severus avait peur aurait été une aberration… Il avait toujours tenu compte de sa peur. Lorsqu'il était un Mangemort puis un espion, elle lui avait souvent sauvé la vie en l'empêchant de commettre le genre de folies ou de stupidités habituellement trouvables chez les Gryffondors. Tout le monde savait que James Potter avait été suffisamment imbu de lui-même et sûr de lui pour ne même pas avoir sa baguette sur sa personne lorsqu'il avait été tué par Voldemort. Comment un sorcier traqué et caché avait-il pu se comporter d'une façon aussi idiote ? Aucun sens commun et aucun instinct de conservation ! Mais cela avait aussi coûté la vie à la pauvre Lily Evans… Tout ça à cause encore une fois d'une idée stupide de ce sale cabot pouilleux de Black ! Enfin… Inutile de refaire le monde à 8h moins 10 du matin un dimanche 21 septembre surtout lorsqu'on était destiné à être jeté en pâture au Monde Magique dans moins de quarante cinq minutes.
Harry se leva, nu comme un ver et se dirigea lunettes sur le nez vers la salle de bain dont il laissa comme à son habitude la porte ouverte. Severus le regarda s'éloigner, admirant les petites fossettes que son amant avait au dessus de chaque fesse et qu'il trouvait absolument craquantes, bien qu'il aurait préféré se faire torturer plutôt que de l'avouer de vive voix. Encore que… c'était à voir.
Beaucoup de choses avaient récemment changé. Notamment ses sentiments, et il allait falloir réfléchir sérieusement à la question.
Le Maître des Potions se leva également et passa une main hésitante sur les poils collés de son ventre qui le tiraillaient désagréablement. Se faire sucer avec du chocolat avait été une expérience intéressante et ô combien gratifiante, mais les résidus collants étaient une véritable torture lorsqu'on avait comme lui le poil généreux au bas ventre et sous le nombril… d'ailleurs c'étaient bien les seuls endroits où il était poilu car il n'en avait pas sur les bras, ni le torse ou les jambes, contrairement à beaucoup d'hommes.
Le bruit de l'eau coulant dans la douche lui fit hâter le pas. Il n'aimait rien de plus qu'une douche coquine avec son petit lionceau personnel. Décidément, le semblant de vie à deux qu'il avait avec Harry et les quelques éléments de routine mis en place étaient très plaisants. Rien à voir avec les amants d'un soir qu'on oubliettait presque sans regret au petit matin alors qu'ils dormaient encore.
Severus resta immobile un instant dans l'encadrement de la porte. Il regarda le bel éphèbe qui se shampooinait les cheveux, debout sous le pommeau de douche. L'eau savonneuse glissait le long de son dos, épousant ses courbes délicates. La tête renversée en arrière, les yeux clos et la bouche entrouverte, Harry savourait l'instant présent sans se douter que son amant le regardait avec insistance et un intérêt très grandissant si on tenait compte de son érection débutante.
Le jeune Sauveur à la cicatrice célèbre sursauta lorsqu'un corps tiède et très masculin, se plaqua contre son dos nu et que deux bras secs mais forts l'enlacèrent. Il gloussa lorsqu'une bouche avide entama un butinage en règle de son cou. Harry tourna alors la tête et attrapa celle de l'ancien Mangemort de sa main droite pour lui ravir ses lèvres.
Scène MA censurée
Les bras d'Harry cédèrent et il se retrouva plaqué contre le carrelage vert mouillé par l'eau qui ruisselait toujours du large pommeau antique. La joue contre la faïence, les yeux fermés, il savoura le poids de Severus qui pesait dans son dos, remuant du bassin comme s'il était atteint de la « danse de Saint-Guy[1] ».
Scène MA censurée
Les deux hommes restèrent appuyés contre le carrelage mural pendant plusieurs minutes, le cœur battant.
— Qu'est… qu'est-ce qui t'as pris… Sev' ? murmura Harry le souffle encore court. On devait… se laver. Pas baiser comme… des malades.
— Mmmm… t'as un trop beau p'tit cul. Pas pu résister.
— Après… ce qu'on a fait… cette nuit ? T'es gonflé ! Et… t'aurais pu prév'nir… Encore heureux… que c'était encore lubrifié.
— Chaton, avec tout le sperme que je t'ai donné depuis hier… tu es forcément bien lubrifié, ricana le Professeur Rogue.
— Ah, c'est élégant ! Bravo, tiens ! Viens donc te laver avant qu'on ne soit à la bourre.
Le garçon avait raison et Severus le savait. L'heure tournait et même si leur petit intermède les avait bien distraits, la matinée allait être très certainement pénible. Il y avait de fortes chances pour que Kingsley ou un autre Auror vienne chercher les deux délinquants afin de les conduire devant le Magenmagot.
Bien que ni Harry et Severus ne l'aient remarqué, leurs deux magies avaient encore envahi la salle de bain pour leur habituel ballet érotique. L'attrait de la nouveauté étant passé, les deux sorciers ne s'en préoccupaient plus beaucoup. Il fallait dire qu'ils avaient à présent des soucis d'une autre nature.
Une fois séchés et habillés, nos deux amoureux se regardèrent gravement, debout au milieu du salon du Maître des potions. Harry portait encore sa tenue d'école de la veille que Dobby avait lavée et repassée pendant la nuit et la Terreur des cachots son habituelle robe noire pleine de boutons et sa longue cape, celle qui flottait largement derrière lui et qui impressionnait le plus les élèves.
— On y va, Sev' ? demanda Harry en lui serrant les doigts entre les siens.
— Allons-y, répondit l'homme un peu sèchement en reprenant sa main que son amant avait saisie.
Cette froideur apparente ne gêna pas outre mesure Harry. Il commençait à connaître l'oiseau et ne se formalisait plus de son attitude parfois – souvent – glaciale. C'était sa façon de se protéger. Afficher un air rébarbatif en permanence faisait fuir tout le monde et ainsi on lui fichait une paix royale. Et aussi personne ne savait à quoi il pouvait bien penser, caché derrière ses puissantes barrières d'occlumancie.
La porte de l'appartement se referma derrière le couple et le léger vrombissement de la barrière magique de protection se remettant en place se fit entendre. Harry ne put s'empêcher de penser que c'était peut-être la dernière fois qu'il l'entendait et Severus également.
— Je pense qu'il serait plus que judicieux que tu te dissimules derrière cette intolérable cape d'invisibilité. Inutile qu'on nous aperçoive ensemble et qu'on en fasse encore un peu plus des gorges chaudes, suggéra le professeur de potions.
Le jeune Gryffondor se contenta d'hocher la tête en assentiment. Il retira doucement la cape pliée à l'intérieur de sa chemise après avoir déboutonné sa robe d'école.
— Je vais passer par l'antichambre, donc je te laisse ici, annonça l'homme d'une voix à peine audible à son invisible compagnon dont il percevait malgré tout la présence à ses côtés.
— Ils sont déjà tous là. Tu entends le boucan ? remarqua le garçon sur le même ton.
Severus hocha la tête et émit un léger soupir. Il tira sur les pans de sa robe et se redressa, se préparant à afficher une mine glaciale et menaçante à tous ceux qui croiseraient dorénavant son chemin. Harry le regarda s'éloigner, il fixa le dos du sorcier, ses cheveux noirs brillants qui flottaient sur ses épaules, ainsi que la cape qui traînait sur le sol. Un nœud au creux de l'estomac, le jeune Sauveur murmura :
— Je t'aime, Sev'.
Les pas de l'homme ralentirent significativement puis reprirent leur cours normal. Harry espérait qu'il avait entendu sa déclaration impromptue. Il n'attendait pas de réponse. En fait, il voulait tester l'effet que ça faisait de le dire ainsi, d'un peu loin, juste pour savoir s'il était prêt à le lui dire en face. Un peu puéril, mais après tout, il n'avait que dix-sept ans.
Dans la Grande Salle, les commentaires allaient évidemment bon train dès l'arrivée des premiers élèves. Les Gryffondors et les Serpentards s'étaient empressés de tout raconter des évènements de la veille au soir aux deux autres Maisons qui n'étaient pas au courant. Les deux Serdaigles qui faisaient partie de la Brigade Inquisitoriale n'avaient pas osé révéler ce qu'ils avaient incidemment appris dans le Bureau d'Ombrage. La fureur de Dumbledore y avait été pour beaucoup. Les deux jeunes sorciers ne souhaitaient pas se mettre le plus grand mage du monde à dos.
Bien évidemment, le petit déjeuner à peine commencé, tout le monde ne parlait plus que de ça. Harry Potter était gay et il était l'amant de Severus Rogue, gay lui aussi bien entendu. Il y avait deux déviants dans l'école et c'était une nouvelle abominable. Les Serpentards accusaient le coup et certains avaient même eu le culot de présenter leurs condoléances à Drago Malefoy comme s'il avait été victime d'un deuil. Au final, ce n'était guère étonnant. Dans ces familles, lorsqu'un sorcier ou une sorcière s'avérait être d'une orientation sexuelle interdite, il ou elle était systématiquement renié, rayé de l'arbre généalogique, souvent déshérité et chassé et même considéré comme mort, d'où les condoléances un peu étranges. Depuis la veille, la fouine se considérait sans parrain. Il avait averti Lucius par cheminette et celui-ci avait grimacé sans rien dire. Il n'avait pas semblé avoir de réaction, mais Drago se doutait qu'elle viendrait et que ça serait fracassant. En attendant, le blondinet peroxydé scrutait chaque élève entrant dans la Grande Salle et étudiait les diverses réactions.
Hermione Granger, le cheveux en bataille et l'œil noir furibond était entrée dans la vaste pièce, encadrée par Dean Thomas et Seamus Finnigan comme gardes du corps. Elle avait toisé avec arrogance chaque élève de sang-pur susceptible de dire du mal de son meilleur ami. Certains comme Neville Londubat affichaient une neutralité déconcertante. Mione savait que Neville aimait bien Harry. Elle avait vu le livre sur les plantes qu'il avait offert au jeune héros du Monde Magique pour son anniversaire. D'ailleurs elle avait trouvé que c'était un choix particulièrement pertinent qui couvrait le programme des ASPICs de botanique. Mais comme Seamus le lui avait indiqué, il était probable que Neville avait eu le crâne farci d'homophobie et autres idées rétrogrades depuis sa plus tendre enfance. Après tout, il était élevé par sa grand-mère, la matriarche Augusta Londubat, et elle était connue pour sa rigidité et sa mentalité d'un autre siècle.
Mais au moins, Neville n'affichait ni haine ni désapprobation farouche. Il se contentait de faire comme si de rien n'était.
À la table des Rouge et Or, Ron triomphait. Il racontait à qui voulait l'entendre qu'il avait découvert et révélé l'infamie du vaurien Potter et celle de son complice le sale pédophile pédéraste. Pour Ron, il ne faisait aucun doute qu'Harry Potter allait être renvoyé de l'école et Severus Rogue chassé de Poudlard. Hermione fut à deux doigts de lui arracher les yeux avec sa petite cuillère en or lorsqu'elle l'entendit se demander qui allait bien pouvoir remplacer le criminel au poste de Maître des Potions.
Malheureusement, l'absence très remarquée des deux protagonistes de l'affaire donnait de l'eau au moulin des Inquisiteurs et les rumeurs allaient bon train. la table des Gryffondors, il manquait aussi le petit Chad Osborne-Miller et les deux fillettes Eva Flynn et Marjorie Holden. Hermione savait très bien ce qu'il se passait. Elle avait reçu un mémo du Professeur McGonagall dès son réveil. Le morceau de parchemin, transmis par un Elfe, lui avait expliqué que le petit Chad avait quitté Poudlard par la cheminette avec armes et bagages comme on disait, pour se faire transférer à sa demande au Collège Merlin de Galway. Ses deux pères étaient venus le chercher et avaient eu une longue discussion avec Albus Dumbledore devant une tasse de thé, pendant que Chad jouait avec Fumseck. Les deux hommes avaient bien compris le problème et s'étaient rangés à l'avis de Dumbledore. Leur fils serait bien plus tranquille en Irlande où un tel comportement n'était pas admis chez les sorciers.
Comme l'avait si bien expliqué Mrs Finnigan à son fils Seamus, l'Irlande du sud n'avait pas de lois homophobes et vivait comme les gens du 20ème siècle. Du moins… le 20ème siècle des Mondes Magiques des autres pays…
Hermione avait également appris que Marjorie Holden était rentrée chez elle, tout comme Eva Flynn. Dumbledore et McGonagall faisaient actuellement des pieds et des mains pour que la fillette né-moldue soit transférée au Collège Merlin également, mais ses parents étant réfractaires à la magie et souhaitant que celle-ci soit extirpée du corps de leur enfant, l'affaire avait été transmise au Bureau de Liaison avec les Moldus et aux Langues-de-Plomb étant donné le risque encouru par la gamine. Albus avait usé de son titre de Président-Sorcier du Magenmagot pour ordonner une enquête magico-sociale sur les parents et les conditions de vie de Marjorie. Dans le plus grand secret, des sortilèges de surveillance et des artéfacts d'enregistrement magiques avaient été installés dans la demeure familiale pendant la nuit par une équipe du Département des Mystères. Si la petite sorcière se retrouvait en danger physique ou moral, une équipe d'Oubliators interviendrait pour ce qu'ils appelaient une « extraction ». La mémoire des Moldus serait modifiée et ils seraient persuadés que leur enfant était décédée des années auparavant. Bien sûr, toute trace actuelle de Marjorie serait retirée des lieux.
Le Département des Mystères avait une équipe particulièrement douée pour arranger ce genre de contes. Ils mettaient un point d'honneur à fignoler les détails et les sorciers « extraits » avaient des tombes dans les cimetières et des certificats de décès fournis aux familles.
Les Flynn avaient quant à eux récupéré leur fille et réfléchissaient à l'endroit où ils allaient à présent l'envoyer à l'école. Exodius Flynn, Cracmol de son état, connaissait parfaitement les limites du Monde Magique et son retard sur celui des Moldus. Il n'avait pas du tout été étonné de savoir que sa fille avait été choquée par le comportement rétrograde de ses condisciples. Lorsqu'Eva avait expliqué à son père qui était le sorcier accusé, il avait lancé un regard interrogateur à Dumbledore et celui-ci avait simplement hoché une fois la tête en silence. Le Cracmol avait alors secoué la sienne de désolation et annoncé qu'il n'était pas si étonné que ça et que si les sorciers s'attaquaient à leur Sauveur, c'était que le Monde Magique était bien malade.
Albus avait suggéré le Collège Merlin de Galway et indiqué que normalement deux autres condisciples de Miss Flynn devaient s'y rendre aussi. Le couple Flynn avait promis d'y réfléchir très rapidement…
Hermione avait également appris par le billet de Minerva que son meilleur ami se trouvait « là où personne n'aurait l'idée de les chercher ». Elle avait écrit « les », pas « le ». Ça voulait dire qu'Harry et Severus étaient ensemble, très certainement quelque part dans le dédale des cachots. Ils avaient passé la nuit à l'abri, mais lorsqu'elle était entrée dans la Grande Salle avec Dean et Seamus et qu'elle avait vu et entendu les réactions, la jeune brunette avait vite compris que si l'un des deux – ou les deux – se présentaient pour le petit déjeuner, les choses allaient dégénérer. Il ne manquait plus que cette fouineuse de Rita Skeeter ait eu vent de quelque chose et les ennuis allaient pleuvoir encore plus vite sur Harry Potter et le Professeur Rogue.
Malheureusement, les pensées d'Hermione furent prophétiques ce matin-là.
Le premier des deux à entrer dans la Grande Salle fut le Professeur Severus Rogue. Il était pourtant passé par la discrète antichambre dont la porte donnait derrière la Grande Table professorale. Mais les élèves étaient à l'affut et les murmures diminuèrent un peu lorsque le sorcier prit place entre Albus Dumbledore et Filius Flitwick. Après avoir lancé un regard tueur breveté « made by Severus » à Dolorès Ombrage qui arborait un sourire hideux sur son visage de crapaud, la Terreur des cachots prit le temps de toiser les élèves avec sa mine des mauvais jours en s'attardant sur sa Maison et surtout son filleul qui se ratatina sur son banc. Ceux qui croisèrent par malheur son regard mauvais en eurent l'appétit coupé et certains fondirent même en larmes.
Le Directeur des Serpentards en fut très satisfait et afficha un rictus goguenard pendant quelques secondes. Albus lui tapota le bras gentiment et se pencha vers lui.
— N'en faites pas trop, mon cher garçon. Je n'ai pas envie d'avoir à gérer des crises de larmes ou pire. Dites-moi, qu'avez-vous fait de notre petit Harry ? Je ne l'ai pas vu entrer…
Severus n'eut même pas le temps de répondre à la question posée. Les deux Grandes Portes monumentales s'ouvrirent au large, au grand dam d'Argus Rusard qui se précipita pour tenter de les refermer. Mais comme elles avaient été ouvertes par magie, il eut beau s'escrimer, rien n'y fit.
Tous les visages se tournèrent vers le nouveau venu et le silence se fit. Harry Potter entra, la tête droite et le visage fermé. Il rayonnait de son petit corps menu une puissance magique nettement perceptible qui certainement en effraya plus d'un. Lui aussi dévisagea ses condisciples en se dirigeant vers la table des Gryffondors, et il n'échappa à personne que le Sauveur du Monde Magique avait sa baguette dans sa main et jouait avec elle comme une majorette avec son bâton. Beaucoup perçurent la menace non déguisée et en frissonnèrent. Après tout, un garçon qui a à peine quinze mois était capable de résister à un Avada Kedavra et de tuer le plus puissant Mage Noir de ces derniers siècles n'était surtout pas à sous-estimer.
Juste avant de bifurquer dans l'allée entre sa table et celle des Poufsouffles, Harry tourna la tête vers les professeurs et son regard se planta dans celui plus que sombre du Maître des Potions qui lui fit un petit sourire amusé et le salua de sa coupe d'or remplie de jus de citrouille.
— Severus… marmonna le vieux Directeur de Poudlard. N'en rajoutez pas ! Par Merlin, on dirait que ça vous amuse !
— Pas vraiment, Albus. Mais vous savez, tout comme moi, que nous sommes grillés. Tout le monde est au courant dans l'école, alors pourquoi ne nous ferions-nous pas plaisir ? Regardez la tête de Dolorès… rien que ça, n'a pas de prix[2]…
En effet, le crapaud en rose très foncé, signe visiblement chez elle de victoire, fulminait littéralement et tordait sa serviette de table dans tous les sens, en proie à la plus noire des colères. Comment ce petit dépravé osait-il venir ainsi dans la Grande Salle pour s'y pavaner ? Et son complice avec lui ! Et à la table des professeurs, encore en plus ! Oh, tout ceci allait se payer sans tarder… Que ces deux anormaux attendent donc que le courrier arrive et on allait bien rire. Si les élèves voulaient des détails, ils allaient en avoir…
Dean et Seamus, tous deux ravis de voir leur ami, s'écartèrent un peu plus l'un de l'autre pour lui permettre de s'installer entre eux à sa place habituelle, face à Hermione qui affichait un sourire enchanté.
— Harry ! Je suis contente que tu sois là ! J'ai eu peur que tu aies été renvoyé hier soir. Alors quand le Professeur McGonagall m'a dit que tu étais simplement… en sécurité, j'avoue que j'en ai été soulagée.
Le jeune homme comprit en s'asseyant que la brunette savait où il avait passé la nuit. Il allait lui demander comment s'était passée la soirée à la tour de Godric après son départ mais n'en eut pas le temps.
— Qu'est-ce que tu fous ici, Potter ! On t'a dit qu'on voulait pas de toi, ici ! Fous l'camp, espèce d'anormal ! Dégage avec ton pédophile pédéraste !
Ron Weasley venait de se lever et baguette tendue vers Harry, il le menaçait, le visage crispé de haine, encouragé par les trois quarts des sangs-purs de la Maison. Harry lui lança à peine un regard méprisant d'une demi-seconde et répondit « du café, tiens… pour une fois » à Dean qui lui demandait s'il voulait du thé ou du café ce matin.
Tandis que Dean remplissait délicatement le mug de son ami de café, Hermione lui beurrait deux toasts de pain de mie grillé pendant que Seamus lui servait des œufs brouillés et du bacon. Les trois compères affichaient ainsi ostensiblement leur soutien indéfectible à leur ami aux yeux verts.
— JE TE PARLE, POTTER !
— Asseyez-vous, Monsieur Weasley, tonna McGonagall furieuse, ou je pourrais bien vous retirer encore quelques points supplémentaires. À moins qu'une nouvelle retenue ne soit plus à votre goût ?
Harry prit sa baguette qu'il avait posée sur la table et l'air dédaigneux, il se tourna un instant vers Ron. Les élèves assis à la table des Gryffondors virent tous la lueur jaunâtre qui sortit de la baguette de houx et toutes les têtes des Rouge et Or se tournèrent vers le receveur dudit sort ou maléfice.
Le rouquin s'était rassis sous la surprise et tentait visiblement de parler, mais il n'y parvenait pas. Plus il essayait de se libérer, plus il s'empourprait. Et bien que de bonnes âmes charitables tentassent de lui venir en aide, rien ne fonctionna.
— Tu lui as jeté quoi à l'autre BIGOTE là ? s'enquit Seamus avec un air avide.
— Le Bloclang, c'est un petit maléfice assez sympa qui colle la langue au palais. Alors quand on ne sait pas – comme Ronald – lancer de sorts informulés, on est coincé. On ne peut plus se servir de sa baguette. Normalement un Finite Incantatem suffit à s'en libérer, mais vous ai-je dit que ce n'est pas la formule normale ?
— Non, mais nous sommes ravis de l'apprendre, ricana Dean.
— Au fait, Seam'… Bigote ? De quoi tu causes ? À ce que je sache Ron n'est pas religieux…
— Non, l'interrompit Dean Thomas, c'est une BOUSE.
Et le noir éclata de rire laissant Harry et Hermione se regarder avec perplexité.
— Expliquez-vous ! ordonna la jeune Gryffondor avant de porter sa seconde tasse de thé au citron à ses lèvres.
— B.O.U.S.E… révéla alors Dean, ou plus simplement Brigade d'Ombrage Uniquement Sans Esprit.
— Mouais, mouais, c'est pas mal, mais ma BIGOTE est mieux !
— Et c'est quoi ? fit Harry amusé, tout en dévorant ses œufs brouillés.
— Brigade Inquisitoriale Gardienne de l'Obéissance aux Traités d'Education.
— Joli ! siffla Harry visiblement épaté. Celui là je l'adore ! Va pour Bigote, Seamus. Dean, pour les plus débiles, on réservera le terme de Bouse. Comme un titre honorifique, tu vois ?
— Je vois, et ça me va parfaitement. Bon maintenant qu'on a cloué le bec à une bouse, et au sens propre, on fait quoi aujourd'hui ?
— Tu feras rien du tout ! répondit alors un nommé Harper qui était dans une année inférieure et dont Harry ignorait encore l'existence ou presque il y a peu. T'as rien à faire dans cette école, tu dois partir ! On veut pas attraper ton anormalité. Weasley nous a bien dit que c'était contagieux, alors tu fous l'camp ! Ou on te mettra dehors nous-mêmes !
Les yeux plissés de colère, la jeune Préfète allait répliquer vertement mais son attention fut distraite par un cri de colère et de rage à la table professorale. Miss Octopus, encore une fois installée près de Dolorès Ombrage, avait par une très curieuse inadvertance, renversé son jus de goyave sur la robe rose en tweed de la Grande Inquisitrice. Bien entendu, c'était aussi par un très malheureux concours de circonstance que le jus de fruit préféré de sa Majesté Octo, comme disait Harry, avait reçu très discrètement un maléfice de tache perpétuelle. Quoi que tenteraient Dolorès et/ou les Elfes, la tenue resterait irrémédiablement salie. Dolorès tempêta et se leva pour éponger les dégâts, tandis que la redoutable préposée aux grimoires de la bibliothèque haussait les épaules et reprenait sa tasse de thé vert à la menthe afin d'en apprécier les derniers centilitres.
— Bravo, la Poulpesque… s'amusa Harry, enchanté.
— Pourquoi tu lui donnes ces drôles de surnoms ? s'inquiéta alors Hermione qui détestait voir quelque chose lui échapper.
— Une minute, Mione.
Harry se tourna vers Harper et les yeux glacés, il répliqua.
— Si tu crois vraiment que c'est contagieux, c'est que tu es aussi stupide que Ron Weasley ! Il n'y a qu'un demeuré pour croire de telles sornettes. J'avais entendu dire que les sangs-purs étaient des crétins consanguins avec des quotients intellectuels de veracrasses mais je ne pensais pas que leur stupidité allait jusque là. On atteint même des sommets. Rends-moi service, Harper, ne m'adresse plus jamais la parole ou tu pourrais rentrer chez toi en petits morceaux, vu ?
— Ouais… comme le Professeur Quirrel quoi… révéla Dean d'une voix paisible. T'avais fait fort sur ce coup-là, Harry. Le tuer à mains nues… à onze ans… Brillant, mec ! Ce type était d'un chiant !
Harper blêmit alors et choisit de s'occuper de ses propres affaires. Harry lança ensuite un Assurdiato autour de son petit groupe.
— Dean, combien de fois je dois te l'dire ? J'ai pas tué Quirrel, je l'ai juste réduit en cendres avec mes mains. C'est l'autre débile de Voldy qui l'a tué en quittant son corps qu'il squattait. Ça lui a pas porté bonheur à lui non plus, il paraît…
— On s'en fout, Harry. Le truc c'est que l'autre idiot là, il le sait pas ! répondit le black en désignant Harper d'un mouvement de menton.
— C'est pas faux… acquiesça le jeune sorcier aux yeux verts en attrapant un des toasts qu'Hermione lui avait beurré.
— Bon, tu la racontes ta putain d'histoire sur la beauté fatale qui fait fantasmer Dean ? demanda alors Seamus qui s'impatientait.
— Oui, oui ! Raconte tout ce que tu sais sur cette perle divine… supplia presque le jeune Thomas qui n'en pouvait plus d'attendre.
— Ok, fit Harry en levant les yeux au ciel devant le comportement affligeant de Dean. Vous savez que j'ai passé presque tout le mois d'août ici tout seul avec les profs.
— Ouais, et tu t'étais bien gardé de nous dire que tu en avais profité pour te faire sauter par Rogue, mais ce n'est qu'un détail… ricana Seamus.
Harry, gêné et rougissant, se frotta le visage entre ses deux mains afin de se donner un semblant de contenance puis il saisit son gobelet de jus de citrouille sans croiser le regard d'Hermione qui le fixait, il le sentait très bien.
— Dean, fais le taire où tu sauras rien sur Miss Octopus…
— QUOI ? Mais putain, tu vas la fermer, triple buse d'andouille ! Irlandais de mes deux ! On s'en fout qui baise Harry, bordel ! Tant que c'est pas dans mon cul que ça rentre, j'en ai rien à cirer !
— Langage, Dean Thomas ! C'est pas parce que personne d'autre que ne nous n'entend que je ne peux pas te retirer de points ! pesta la seule fille du petit groupe, outrée de cet étalage de grossièretés.
— Miss Octopus adore aller nourrir le calamar géant. Elle va lui jeter des bouts de pain sec que les Elfes lui refilent. Je l'ai vue faire un jour que je traînais au bord du Lac Noir. On a discuté… commença Harry afin de calmer les esprits de ses amis.
Dean était tout ouïe et en avait même cessé de manger. Les deux autres suivaient sans rien dire, intrigués du comportement de la demoiselle. Après tout, nourrir le calamar, on pouvait attendre ça d'Hagrid mais pas d'une bibliothécaire remplaçante.
— Elle m'a dit qu'elle adorait les poulpes, pieuvres et autres céphalopodes. Elle a même un aquarium géant d'eau de mer contenant trois poulpes, dans ses quartiers. Elle collectionne également les figurines, objets et bijoux en forme de pieuvres. Voilà, maintenant vous savez pourquoi je l'appelle « la poulpesque » et pour Majesté, c'est facile, elle se balade le nez en l'air pire que la mère Malefoy, on dirait un membre de la famille royale. Quant à « Octo », ben j'ai coupé Octopus en deux… c'est tout. Bon, c'est vrai que lorsqu'elle range les bouquins dans les étagères à la bibliothèque, elle se démène tant que tu dirais qu'elle a huit bras ou des tentacules, alors je trouve que ces surnoms lui vont très bien.
— Elle aime les pieuvres et tout ce qui y ressemble, marmonna Dean qui semblait presque avoir eu connaissance d'un secret d'état, tant il était concentré. Donc, ce serait bien que je trouve un petit bibelot ou autre avec ce motif pour lui offrir. Je marquerais des points, là…
Les deux autres jeunes sorciers se mirent à rire de bon cœur en entendant les délires obsessionnels de leur ami. Seamus se promettait bien de surveiller Dean comme du lait sur le feu. Il n'était pas question que le jeune sorcier noir se retrouve dans le même style d'ennuis que leur copain Harry, simplement parce qu'il bavait devant une bibliothécaire plus âgée que lui.
Le ciel s'obscurcit alors dans la Grande Salle. Tous les élèves levèrent pratiquement le nez en l'air comme un seul homme. Une impressionnante nuée de hiboux venait de faire son entrée dans le ciel enchanté de la vaste pièce. La quantité de rapaces présents indiquait qu'il se passait quelque chose d'anormal. Presque tous les hiboux de l'école étaient là, ainsi que ceux des élèves, des parents et d'autres, complètement inconnus, qui devaient provenir soit de bureaux de poste, soit d'expéditeurs inhabituels.
Harry ne put s'empêcher un soupir déchirant et baissa le nez dans son assiette sous le regard inquiet d'Hermione, tandis que Seamus mettait sa main sur l'épaule de son condisciple pour lui affirmer son soutien.
Hedwige se posa devant son maître et tendit sa patte afin qu'il en retire le rouleau qui y était accroché. La Gazette du Sorcier était facilement reconnaissable. Harry ne la recevait que lorsque les événements le justifiaient. En bref, il ne payait que pour les éditions spéciales. Le jeune Sauveur se douta bien quelle était la nouvelle qui semblait remuer autant le Monde Magique.
Hermione, Dean et Seamus avaient aussi reçu le quotidien sorcier. Et tous les trois, ils prirent connaissance des gros titres.
SCANDALE DANS LE MONDE MAGIQUE !
Le Sauveur est un pervers, un sodomite, et son complice est l'ancien Mangemort Severus Rogue.
par Rita Skeeter, reporter
Nous avons appris hier soir, d'une source ministérielle, que Harry Potter le Garçon-qui-a-survécu a été surpris plus tôt dans la journée, dans une fâcheuse posture en compagnie de son enseignant, le Professeur Severus Rogue, Maître des Potions à Poudlard et Directeur de Serpentard. Selon Drago Malefoy, témoin accidentel de la scène avant d'être oublietté, son parrain Severus Rogue était dans son bureau en train d'embrasser Monsieur Potter d'une façon que la morale réprouve et qui n'est habituelle que chez les couples mariés. Rogue a ensuite poursuivi le témoin à travers les couloirs de Poudlard afin de lui jeter un Sortilège d'Amnésie. Avant d'être ainsi agressé, Monsieur Malefoy, chef de la Brigade Inquisitoriale Gardienne des Bonnes Mœurs de l'école a réussi à transmettre l'information à l'un de ses subordonnés, Monsieur Ronald Weasley qui s'est empressé de faire son devoir et de confier les renseignements à Madame Dolorès Ombrage, Grande Inquisitrice et Gardienne des Bonnes Mœurs, Professeur d'étude des Moldus. Madame Ombrage a ordonné l'arrestation de Messieurs Potter et Rogue et ils ont été entendus sous Véritasérum. Les suspects ont immédiatement avoué leurs crimes et révélé être amants depuis plusieurs mois.
Le Magenmagot interrogera très bientôt les coupables de ces délits honteux mettant en péril la moralité des jeunes sorciers fréquentant l'école de Poudlard. Selon nos sources, trois élèves auraient déjà demandé leur transfert dans un autre établissement, choqués par ces révélations terribles.
Monsieur Drago Malefoy affirme ne plus connaître son parrain et se refuse désormais à lui accorder ce titre. À l'heure où nous imprimions, Lord Lucius Malefoy n'était pas joignable pour nous révéler le fond de sa pensée sur ces tragiques événements. Monsieur Ronald Weasley, interrogé en exclusivité par cheminette, nous a confié être profondément bouleversé et nous a expliqué que sa famille avait fait une demande de mariage officielle au tuteur de Monsieur Potter qui avait accepté chaleureusement. La fiancée, Miss Ginevra Weasley s'était vue violemment éconduite par Harry Potter qui avait affirmé refuser ce mariage et toute union qu'on lui organiserait. Monsieur Ronald Weasley nous a affirmé comprendre maintenant les raisons de ce refus : Harry Potter entretenait déjà une relation homosexuelle illicite avec l'ancien Mangemort Rogue.
Nous avons tenté en vain de joindre hier soir le Directeur de Poudlard qui n'a pas daigné répondre à nos appels de cheminette. Albus Dumbledore protègerait-il les deux pervers ?
Que risquent les contrevenants ?
Selon le Département de la Justice Magique, les deux coupables pourraient se voir infliger une forte amende, des heures de travaux d'intérêt magique, mais malheureusement plus Azkaban ni le baiser par un Détraqueur. Severus Rogue devrait quant à lui perdre son poste d'enseignant des potions et Harry Potter qui a déjà été expulsé de la Maison Gryffondor, devrait être renvoyé de l'école et avoir sa baguette brisée.
À la Gazette du Sorcier, nous lançons un sondage pour connaître votre opinion. Doit-on réinstaurer la peine du baiser pour les sodomites et ainsi requalifier le délit de bougrerie en crime de bougrerie ? Nous attendons vos hiboux.
Chers lecteurs, nous ne manquerons pas de vous tenir au courant des suites de cette terrible affaire. Ne ratez pas nos prochains numéros !
Rappel de la biographie d'Harry Potter le Sauveur en dernière page, suivie de Qui est Severus Rogue ?…/
Harry laissa retomber le journal sur la table sans se soucier qu'il recouvre le reste d'œufs au bacon qui s'y trouvait encore. Un énorme poids pesait sur son estomac et ses boyaux se contractaient violemment sous la bouffée d'angoisse qu'il ressentait à ce moment précis. Il lança un regard totalement paniqué vers Hermione qui l'examinait la bouche pincée et les yeux lançant des éclairs.
— Je vais tuer cette petite vermine de Ron Weasley ! s'exclama la brunette en retirant sa baguette de la poche de sa robe.
— Courage, Ry ! soupira Dean. On est avec toi, mec ! Fais pas la conne, Hermione ! Putain ! Tu risques l'expulsion si tu touches à ce connard !
Dean parlait comme à son habitude, c'est-à-dire comme un charretier, manie qu'il avait empruntée à Ron Weasley depuis la première année. Les Weasley étaient mal élevés et grossiers, se tenant mal en toutes circonstances et Dean qui trouvait son langage fleuri particulièrement cool s'était rapidement laissé aller et jurait comme un païen dès qu'il se trouvait à Poudlard. À la maison, par contre, il n'avait pas une seule minute intérêt à y songer…
— Harry…
— Il n'en vaut pas la peine, Mione… soupira le jeune Sauveur que tout le monde fixait des yeux dans la Grande Salle.
Il regarda en direction de la table professorale, ne voulant pas croiser les regards de ses condisciples dont il n'entendait pas les conversations, l'Assurdiato lancé auparavant tenant toujours.
Albus Dumbledore, le front plissé et les yeux furibonds, toisait Dolorès Ombrage comme une crotte de noueux scrofuleux[3] tout en écoutant attentivement ce que lui racontait un Severus Rogue passablement agité, si l'on en jugeait par son débit de parole.
— Comment osent-ils raconter que tu as été viré de Gryffondor ? Ce sont des foutaises ! s'énerva Seamus qui était toujours plongé dans l'article de Skeeter. Et les petits sont pas partis à cause du scandale, mais des menaces de cette andouille de Weasmoche !
— Moi… ce que je voudrais bien savoir, c'est l'identité de celui qui a vendu la mèche aux journaux dès hier soir, gronda la brunette aux cheveux emmêlés. Je crois que j'en ai une petite idée, rajouta-t-elle en tournant son visage vers Ombrage qui trônait avec un large sourire satisfait sur son odieuse face.
— Ron m'a encore trahi… une fois de plus, constata Harry en lançant un coup d'œil à l'autre bout de la table.
Il vit Ginny, penchée en avant, qui conversait avec son frère sans qu'il ne puisse comprendre ce dont ils parlaient à cause de la bulle de silence les entourant lui et ses amis. De toute façon, il ne pouvait s'agir que de lui, vu le regard victorieux et revanchard que la rouquine lui lança.
Autour du petit groupe de Gryffondors composé d'Harry et de ses amis, on commençait à s'agiter sérieusement. Les compères remarquèrent rapidement que cela s'était également propagé aux autres tables et Hermione songea qu'il était peut-être plus judicieux d'entendre ce qui se passait maintenant.
— Harry, ça bouge, on dirait. On devrait écouter.
Au signe de tête résigné du garçon aux yeux verts, la jeune fille annula le sort d'un coup de baguette et le petit groupe fut littéralement assailli par le brouhaha qui régnait dans la Grande Salle. Ce fut à ce moment-là que le Directeur visiblement en colère se leva et lança un bruyant « SILENCE ! » bien aidé par le Sonorus qu'il avait jeté sur ses cordes vocales.
Le choc eut pour effet de calmer la foule des élèves et Albus put murmurer un Sourdinam afin de récupérer son volume de voix habituel.
— Mes chers élèves, je dois vous avouer que je suis très mécontent de ce qui se passe dans cette école en ce moment ! Et je ne parle pas ici du Professeur Rogue ou même d'Harry Potter ! Non, je parle de vous ! Et aussi de celle qui a vendu cette affaire aux journaux !
Le vieil homme se tourna alors ostensiblement vers Ombrage afin de lui faire comprendre qu'il n'était point dupe.
— Ceci est une grave infraction et par conséquent le Magenmagot en sera averti et des sanctions prises, sans nul doute…
Son regard se fit un peu plus appuyé et le crapaud à la robe rose tachée eut le bon goût de grimacer légèrement, la menace ayant été parfaitement saisie.
— Je tiens à rectifier certaines petites choses. Harry Potter n'a pas été expulsé de Gryffondor. Il est toujours un membre de cette honorable Maison. Les trois élèves de première et seconde année qui ont souhaité nous quitter l'ont fait pour de toutes autres raisons que celles évoquées dans la Gazette.
— ON IRA PAS EN COURS AVEC LE PÉDOPHILE ! ET ON VEUT PAS DE POTTER NON PLUS !
Ron Weasley s'était levé de son banc et avait grossièrement interrompu le Directeur. Tous les élèves, stupéfaits, se tournèrent vers lui puis vers le vieil homme, attendant sa réaction.
— JE REFUSE D'ATTRAPER LEUR ANORMALITÉ !
Plusieurs élèves hochèrent la tête en silence, n'osant pas se manifester bruyamment. Mais Dumbledore, que les évènements récents plus la lecture de l'article de Rita avaient prodigieusement énervé, piqua alors une crise mémorable.
— RONALD WEASLEY ! Depuis hier je ne fais que vous donner des avertissements que vous refusez d'entendre ! Vous avez largement outrepassé vos droits et épuisé ma patience ! En conséquence, vous êtes renvoyé pour deux semaines, prenant effet immédiatement ! Allez faire vos malles, le Poudlard Express vous attend ! Je vous retire également votre titre de Préfet de Gryffondor. Monsieur Seamus Finnigan prendra votre place et se montrera très efficace, j'en suis sûr ! Miss Granger, je compte sur vous pour expliquer son devoir à votre ami. Minerva, vous me convoquez Arthur Weasley immédiatement. Oui, seul. Miss Weasley, je vous conseille de vous faire très discrète où vous rejoindrez votre frère au Terrier, me suis-je bien fait comprendre ?
Ginny hocha la tête, pâle et terrifiée. Par Merlin, elle ne voulait pas être renvoyée. Ron allait se faire démolir par Molly ! Et les jumeaux… misère… ils n'allaient jamais laisser ça passer.
Il était fort dommage pour Ron que le Bloclang n'ait pas duré plus longtemps. Cet idiot aurait dû choisir de se remplir la panse plutôt que de déblatérer ainsi devant le Directeur de Poudlard, surtout après ce qui s'était passé la veille au soir dans la salle commune de Gryffondor.
À la table des Serpentards, personne ne mouftait. Tous prenaient bien sagement la température ne tenant pas à se faire remarquer ou même renvoyer provisoirement comme l'autre idiot de belette. Celui-là, décidément, ne savait jamais quand il devait la fermer. Crétin de Gryffondor ! Drago Malefoy étudiait son ex-parrain avec attention, tout en se tenant discrètement derrière Goyle dont le volume suffisait à le dissimuler. À l'insulte de « pédophile », Hagrid avait dû retenir Severus qui avait tenté de se lever pour aller lancer un impardonnable quelconque au petit imbécile. Le Maître des Potions essayait en vain de se libérer des bras du demi-géant tandis que Flitwick et Chourave s'efforçaient de le calmer par des paroles réconfortantes. Dans sa fureur, il ne remarqua pas que pas un seul de ses collègues – à part Ombrage – ne semblait lui en vouloir pour son idylle avec Harry Potter, ni même lui reprochait son homosexualité.
Les Poufsouffles se tenaient à carreaux et les Serdaigles étudiaient le journal, comparaient ce que Dumbledore avait révélé à ce que Chambers et son collègue de la Brigade Inquisitoriale avaient maintenant à dire et attendaient pour se faire une opinion. Déjà, quelques nés-moldus protestaient et s'horrifiaient de l'article, révélant ainsi une ouverture d'esprit que les sorciers de sang-pur étaient bien loin d'avoir.
Harry n'avait même pas remarqué qu'Hedwige était repartie avec les autres hiboux après avoir volé la dernière tranche de bacon de Dean. Il n'avait qu'une envie, quitter la Grande Salle pour retourner dans les cachots avec Severus, loin de ce monde de fous. Skeeter avait osé proposer un sondage pour savoir si la peine capitale devait être remise en vigueur pour les gays. C'était tout bonnement monstrueux ! Il n'était pas question qu'il reste une seule minute de plus dans le Monde Magique. Il en avait soupé de ces débiles rétrogrades.
— J'en ai assez. Je m'en vais, annonça-t-il à ses amis d'une voix blanche. Je refuse de rester plus longtemps dans ce monde. Je retourne chez les Moldus.
— Si tu pars, je pars avec toi ! affirma Hermione à la surprise de son ami.
— Tu es folle ? Et tes ASPICs ? Ton fameux papier d'équivalence ?
La jeune fille fit un geste de la main indiquant qu'elle s'en fichait, ou plutôt qu'elle avait plus d'un tour dans son sac…
Dean et Seamus allaient protester quand les grandes portes s'ouvrirent avec fracas, résonnant dans le silence provisoire rétabli par Dumbledore. Le boucan fit sursauter tout le monde et même crier certains élèves émotifs. Une équipe d'Aurors composée d'une bonne douzaine de sorciers en capes couleur mastic entra, avec à leur tête, Cornélius Fudge le Ministre de la Magie.
— Cornélius ? Mais qu'est-ce que vous– ?
Albus n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Faisant fi de sa présence, Fudge déroula le parchemin qu'il tenait à la main et annonça :
— Harry Potter et Severus Rogue sont en état d'arrestation pour délit de bougrerie. Ils seront jugés par le Magenmagot après audition. Rogue, vous êtes d'ores et déjà renvoyé de votre poste de professeur de potions. Le conseil d'administration de Poudlard vient de rendre son verdict. Potter vous êtes également expulsé de l'école. Votre baguette, je vous prie !
— JAMAIS ! hurla alors Harry en pointant le fin bâton de houx vers le Ministre.
Au signe de tête d'Albus, Hagrid relâcha Severus qui prit également sa baguette, prêt à défendre sa liberté et celle d'Harry. Mais le vieil homme posa une main apaisante sur le bras du Maître des Potions et lui fit abaisser sa baguette noire.
— Si Harry est arrêté, alors je pars immédiatement ! fit Hermione Granger en se levant de table, à la surprise de tous les autres élèves. Il n'est pas question que je reste une seule minute dans un monde archaïque et rétrograde qui a mille ans de retard sur le Monde Moldu ! Je préfère retourner chez les Moldus, la vie y est bien plus confortable, quoi que vous, sorciers de sang-pur, en pensiez ! L'hiver on a chaud, on a un éclairage suffisant de jour comme de nuit dans les maisons ! Il y a des loisirs et la liberté, une chose dont vous ne connaissez même pas les prémices ! Professeur McGonagall, rajouta-t-elle en retirant son pin's en forme de P, vous allez devoir trouver également une Préfète. Je vous demande juste de ne pas choisir une sang-pur ou vous irez à la catastrophe.
— Mais… Miss Granger… Vous… c'est très précipité… balbutia Minerva, la main sur le cœur. Vos ASPICs…
— Si y avait pas les ASPICS à la fin d'l'année, lança alors Dean Thomas, Seamus et moi on partirait maintenant nous aussi ! Tout ça pour vous dire que dès qu'on aura nos diplômes, on remettra plus jamais un seul pied dans votre monde d'attardés !
Fudge fulminait. Littéralement. Il tournait entre ses mains, son chapeau melon vert pomme en se demandant s'il devait arrêter ses deux énergumènes pour avoir osé l'interrompre ainsi. Mais il avait d'autres fléreurs à fouetter. L'article de Skeeter avait fait suffisamment de scandale et depuis l'aube, son bureau était envahi de hiboux portant des lettres et des beuglantes. Ces dernières lui avaient déjà coûté une de ses robes neuves, il n'était pas question que ce cirque continue. Il allait ramener l'ordre sur le champ !
— AURORS ! EMMENEZ-LES ! hurla-t-il excédé.
Tandis que deux équipes se dirigeaient baguettes aux poings vers les malheureux sorciers concernés, Dolorès Ombrage jubilait une tasse de thé à la main. Elle ne vit pas – et personne d'autre non plus – le rictus sournois qui orna un court instant le visage de Miss Octopus… Sa Poulpesque Majesté avait une idée saugrenue et la folle en rose allait le sentir passer…
Dumbledore se pencha à l'oreille de Severus et lui murmura quelque chose que personne d'autre que lui ne comprit. Puis il prit la baguette de bouleau noir des mains du Serpentard et la glissa dans sa manche opposée à celle où il dissimulait sa propre baguette de sureau.
— Laissez-les faire, vous ne risquez rien. Je vous accompagne de toute façon.
— Albus… Et Harry… ?
— Je m'en occupe tout de suite.
Puis se tournant vers Kingsley qui venait arrêter Severus, il rajouta.
— Mettez-les dans la même cellule. Et c'est un ordre, Kingsley ! Ensuite arrangez-vous pour que personne ne vienne les importuner : visiteurs, curieux, Aurors, membres du Ministère, journalistes, Ombrage etc. Personne. Compris ?
— Parfaitement, Professeur. J'y veillerai personnellement.
— Je crains une agression dès qu'ils mettront un seul orteil hors de Poudlard, avoua le vieil homme en fixant l'Auror noir dans les yeux.
Avec un soupir dégoûté à peine dissimulé, Kingsley sortit une paire de menottes magiques de sa poche et les accrocha aux poignets de l'ancien Mangemort.
— Navré, Severus, mais ce sont les ordres. Pas le choix…
Le ténébreux Serpentard ne répondit pas. Il fixait Harry qui menaçait toujours le Ministre, tout comme Hermione, Dean et Seamus qui avaient eux aussi sorti leurs baguettes.
Il fallut l'intervention de Dumbledore pour que les étudiants rangent leurs artéfacts magiques et la baguette d'Harry rejoignit le plus discrètement du monde celle de Severus dans la manche droite de sa robe à fleurs. Le jeune Sauveur fut lui aussi menotté sous le regard désolé d'Ed Fiertalon, actuel professeur de Défense Contre Les Forces du Mal et ancien Auror de l'équipe de Kingsley Shacklebolt. L'homme se félicitait de ne plus être provisoirement en fonction, il échappait à ce genre de missions ingrates et révoltantes. En temps que sang-mêlé, il y avait longtemps qu'il s'était fait une opinion, mais il fallait bien travailler pour toucher un salaire et faire vivre sa famille. Et le seul diplôme qu'il avait à part celui de Poudlard, c'était celui d'Auror…
Kingsley prit les deux interpellés, chacun par un bras et voulut les conduire hors de la Grande Salle. Harry se dégagea d'un « NON » agressif. Malgré les menottes limitant ses mouvements, sa main gauche attrapa celle de droite de Severus et après un regard échangé, tous deux suivirent Kingsley sans un mot.
Cornélius voulut protester devant cet étalage infect d'anormalité, mais le regard tueur que Dumbledore lui jeta alors, le fit se ratatiner dans son pantalon.
Dans un recoin sombre du hall, dissimulé par une statue, Ron Weasley souriait de toutes ses dents. Percy avait été très diligent… il n'avait pas mis plus de quelques minutes à prévenir le Ministre… La vengeance n'était pas un plat à manger froid. Pas pour lui, de toute façon…
Kingsley avait tenu parole. Il avait installé Harry et Severus dans la cellule numéro 4 du Quartier Général des Aurors au second niveau du Ministère de la Magie. Elle était l'une des plus récentes, et par conséquent était propre et comportait une seule banquette agrémentée d'un fin matelas recouvert de coutil gris rayé. Les détenus avaient eu leurs menottes retirées et avaient pu faire connaissance avec leur nouvelle et certainement très provisoire villégiature. À part le bat-flanc faisant aussi office de couchette, on trouvait un WC en émail blanc sans abattant dont la chasse d'eau était un bouton bleu sur le mur. Un aménagement magique dernier cri, sans nul doute… Étonnant, dans ce monde obstinément tourné vers le passé.
— Je croyais que Dumbledore ne voulait pas convoquer le Magenmagot un dimanche matin, ricana Severus en s'installant sur la couche et en s'adossant tranquillement au mur.
— Ah ouais ? Ben c'est raté, pouffa Harry qui se sentait mieux maintenant qu'il était de nouveau tout près de son amant.
Cette dépendance était curieuse d'ailleurs… Etait-ce parce qu'il était amoureux du sorcier ou il y avait-il une autre raison ? Les deux hommes se méfiaient à présent. Rien de ce qu'ils vivaient ensemble et ressentaient n'était visiblement habituel chez les autres sorciers.
La nouvelle de l'arrestation des deux sorciers s'était répandue dans tout le Ministère bien que l'on fut un dimanche matin. De multiples appels de cheminette lancés par les Aurors réquisitionnés avaient sorti de leurs grasses matinées la totalité des membres du Magenmagot dont certains n'étaient pas encore au courant, n'ayant pas lu la Gazette. Une audience allait débuter à 10h et déjà les premiers titulaires des places enviées au Magenmagot se présentaient au Ministère.
Lucius Malefoy était de ceux-là.
Il avait lu la presse en prenant son petit-déjeuner et avait, la mine blasée, écouté Narcissa pester et s'indigner du comportement indécent de Severus Rogue. Comment avait-il osé s'adonner à de telles pratiques ? Ce n'était pas une attitude respectable pour un honorable membre du corps enseignant de Poudlard ! Par Merlin, Severus était l'un de leurs intimes et de plus le parrain de Drago. Le déshonneur risquait de rejaillir sur leur noble Maison. Narcissa avait enjoint Lucius à réagir car curieusement même la lecture de l'article ne lui avait pas retiré son flegme habituel. Il n'avait pas daigné répondre, se contentant de terminer son repas avant d'annoncer qu'il se rendait à Londres, au Ministère.
Narcissa avait hoché la tête, enfin satisfaite et cessé ses vociférations épuisantes pour les oreilles se trouvant dans sa proximité immédiate.
Le grand Mangemort blond se trouvait très embarrassé par la situation. Non pas pour les raisons invoquées par son épouse, mais tout simplement parce que Severus était son meilleur ami et qu'il l'appréciait particulièrement. Il savait que celui-ci refusait obstinément le mariage et fuyait la compagnie des femmes lors des mondanités auxquelles il était parfois convié, notamment pour les fêtes de fin d'année. Comme le ténébreux Maître des Potions n'avait jamais accepté une seule invitation pour un week-end en deux décennies, Lucius Malefoy avait toujours soupçonné que son ami avait une vie secrète, très certainement dans le Monde Moldu.
Il avait également souvent songé que celui-ci devait être, soit un grand consommateur de femmes mais il en doutait, soit homosexuel, et il venait maintenant d'avoir la confirmation que sa seconde supposition était la bonne.
Malefoy n'avait aucune envie de voir son ami embrassé par un Détraqueur ou même expédié à Azkaban. C'était une situation fâcheuse et il était bien dommage qu'elle avait été révélée par Drago. Pourquoi cet idiot n'avait-il pas frappé avant d'entrer chez son parrain ? Enfin quand même, son éducation lui avait coûté assez cher et il avait eu les meilleurs précepteurs et professeurs de bonnes manières dans son enfance. Pas étonnant que Severus l'ait oublietté… Il aurait fait de même dans sa situation. Et sans aucune hésitation…
Le noble ne prit même pas la peine d'aller mettre sa tenue pourpre officielle du Magenmagot. Il se présenta au Quartier Général des Aurors et le menton en avant, la mine sèche et la canne à la main, il demanda à avoir accès au détenu Rogue pour lui parler.
— Désolé, M'sieur Malefoy, lui répondit un des Aurors présents. Le chef Shacklebolt nous a donné des ordres stricts qui lui viennent du Président-Sorcier : personne ne peut voir les prévenus avant le procès. Vous le verrez dans la salle d'audience numéro 10 dans une petite demi-heure.
— Bien, bien… Mais dites-moi, est-il confortablement installé au moins ?
— Oh oui, pour sûr ! Il est dans la 4 avec Potter. C'est la cellule la plus récente, alors elle est chouette. Trop chouette pour les brigands qu'on doit y mettre le plus souvent, d'ailleurs.
— Alors c'est parfait, répondit Lucius qui n'avait pas dit son dernier mot.
Il sortit ostensiblement sa montre à gousset de la poche de son gilet vert brodé et l'ouvrit d'un coup d'ongle pour vérifier l'heure.
— Je vais donc aller me préparer pour cette audience et rejoindre Cornélius. Merci de m'avoir indiqué dans quelle salle le procès avait lieu, on ne me l'avait pas dit. À bientôt et bien le bonjour chez vous…
— De même, de même… marmonna l'Auror en se retournant pour reprendre sa passionnante lecture de Quidditch Magazine.
Un petit sourire amusé aux lèvres, Lucius sortit du Quartier Général des Aurors mais n'alla pas jusqu'aux ascenseurs. À la place, il se désillusionna habilement d'un ancien sort de Magie Noire normalement utilisé par les Mangemorts et qui, par conséquent, passait à travers tous les maigres moyens de détection du Ministère. Adossé au mur gris sale près de la porte, il attendit qu'elle s'ouvre pour se faufiler de nouveau dans la pièce. Les deux Aurors qui avaient permis son passage ne se rendirent compte de rien et Lucius se dirigea à pas feutrés vers le couloir menant aux cellules. Personne ne vit la porte s'ouvrir car elle était dissimulée à la vue des Aurors par une vieille armoire métallique contenant des dossiers et des piles de parchemins. De plus, personne ne surveillait vraiment ni ne travaillait. On était dimanche, ils avaient été réquisitionnés par Fudge, il n'était pas question du tout qu'ils fassent du zèle.
Lucius se précipita vers la porte numéro 4 et jeta un œil dans la cellule par le judas. Severus était assis sur la couchette, adossé contre le mur, et Harry Potter était allongé sur le matelas, les lunettes à la main et la tête sur les cuisses de son amant. Visiblement, le garçon s'était endormi. Cette vue lui confirma que les dires de Skeeter et de Drago étaient bien réels et il ne put s'empêcher de soupirer. Pourquoi Severus avait-il pris un sorcier comme amant ? Déjà un Moldu c'était risqué, mais Harry Potter en plus ! Et son élève, un tout jeune homme ayant la moitié de son âge…
Le blond regarda rapidement autour de lui afin de s'assurer que le couloir était libre. Il lança un Alohomora sur la serrure puis retira ensuite son sort particulier de désillusion et entra dans la cellule. Le cliquetis indiquant le déverrouillage de la porte avait tiré Severus Rogue de sa rêverie. Harry s'était endormi allongé sur lui, alors qu'il lui caressait les cheveux. Ce n'était pas bien compliqué, il suffisait de lui gratouiller le cuir chevelu quelques minutes et le petit Gryffondor s'endormait comme une souche.
— Lucius ? Mais qu'est-ce que tu fais là ? Dumbledore avait dit « pas de visites »… demanda le Maître des Potions, un peu inquiet malgré tout.
— Severus… soupira le noble en fixant son meilleur ami droit dans les yeux. Harry Potter, hein ? Tant qu'à faire ! Tu peux m'expliquer pourquoi tu as pris tous ces risques ? Enfin, par Salazar, il y a le Monde Moldu pour ça !
— Je sais, répondit sèchement l'ancien Professeur de Potions. Mais on ne choisit pas toujours, figure-toi !
— Bien sûr que si, on choisit, idiot ! Il n'y que… attends… Severus ! Ne me dis pas que tu es tombé amoureux de ce Minus Habens ?
— Baisse d'un ton, Lucius ! Je préfèrerais qu'il dorme encore un peu, ça lui évitera de stresser. En outre, mon cher et vieil ami, Harry – contrairement à ce que je pensais – n'est pas un crétin. C'est certain, il ne donne pas le meilleur de lui-même à Poudlard. C'est un fait. Il faut voir aussi qui est le débile qu'il traînait comme meilleur ami jusqu'à ces derniers mois.
— Weasley. Que veux-tu espérer de ces traîtres-à-leur-sang ? Ils n'ont jamais été capables d'offrir une éducation décente à leurs rejetons. Bref ! Je suis venu voir si tout allait bien et si tu étais bien traité. Navré que Drago t'ait dénoncé, tu sais bien comment Narcissa l'a élevé… je n'ai eu que peu de choses à dire. Il faut que je t'annonce que ton procès va avoir lieu dans une demi-heure environ. Enfin… dès que Cornélius aura mis la main sur la totalité du Magenmagot. Oui, il veut tout le monde ! Pour si peu… enfin bref…
— Il parait que je suis viré de Poudlard. C'est ce que cet idiot qui se dit « ministre » a déclaré. Vous êtes décidément tous tombés du lit, ce matin, pesta Severus en regardant Lucius d'un air dépité.
— Oh non, pas tombés du lit ! On nous a plutôt empêchés d'aller nous coucher hier soir, oui ! Ombrage a convoqué tout le conseil d'administration de l'école à 23h ! Et pour être sûre que le message soit entendu, elle a appelé elle-même Augusta Londubat. Tu penses bien que cette vieille mégère acariâtre a sauté sur l'occasion. Elle avait eu tous les détails avec Dolorès, ça n'a pas fait de plis. Tu n'étais pas là pour te défendre… de toute façon, ça n'aurait servi à rien, tu avais avoué. Alors, ils t'ont viré. Ils sont en train de chercher un autre Maître des Potions actuellement. Moi je voulais qu'ils attendent le jugement du Magenmagot pour prendre leur décision, mais ils n'ont rien voulu savoir. Le crime était trop grand, selon leurs termes.
— Toi aussi, tu penses que je suis un monstre ? Un pervers bon pour les Détraqueurs ? demanda sèchement Severus avec son air des mauvais jours.
— Nous avons tous nos petits secrets… éluda mystérieusement Lord Malefoy. Et qui dit secrets, dit choses inavouables… du moins pour certains…
Les yeux plissés, la Terreur des cachots toisa le blond d'un air calculateur. Ainsi, Lucius avait des choses à cacher. Une maîtresse, très certainement…
— Lucius, je me fous de ce que tu peux bien faire de tes loisirs et sous le nez de Narcissa. Mais prends garde à toi. Rita Skeeter est un animagus non déclaré, une saleté de cafard. Cette forme ô combien adéquate pour sa personne est idéale pour fouiner partout et dénicher des scoops. Dumbledore nous a tous prévenus. D'ailleurs, c'est pour cette raison que nous faisons souvent des demandes de budgets pour « extermination de nuisibles ». On vous disait « rats et cafards », en fait c'était pour elle, et avant si on avait pu attraper Queudver comme ça plus tôt… Albus en aurait pissé dans ses robes de bonheur.
— La salope ! Alors c'est comme ça qu'elle a su ?
— Ne rêve pas. C'est Ombrage qui lui a dit, j'en mettrais ma main au feu.
— Elle commence à être encombrante celle-là… marmonna Lucius Malefoy en consultant de nouveau sa montre. Sev', je dois y aller. Je te préviens, personne ne prendra de risque pour vous deux. J'essaierai pendant les débats de minimiser votre affaire. Après tout, vous n'avez fait que vous embrasser…
— Je te remercie, mais nous avons avoué sous Véritasérum…
— Oui je sais, et c'est embêtant. Enfin, vous ne serez pas réinterrogés avec la potion, c'est toujours ça.
Lucius regarda quelques secondes, Harry qui dormait toujours. Il vit la main fine et blanche de son meilleur ami qui continuait à caresser les cheveux noirs en bataille. Pour lui, il était plus qu'évident que Severus Rogue était amoureux du jeune homme, sinon il n'aurait jamais pris tous ces risques. Il espérait au fond de lui-même qu'au moins c'était réciproque. Ils pourraient s'en sortir à deux, en quittant le Monde Magique. Seuls… ils n'avaient quasiment aucune chance. Il frissonna en pensant à l'horreur que deviendrait sa vie, si jamais… Non ! Il ne fallait pas penser à cela ! Narcissa n'en saurait jamais rien… Et personne d'autre non plus ! Il prenait assez de précautions…
— Je dois y aller. J'ai dû utiliser un certains maléfice de désillusion que tu connais bien pour pouvoir entrer ici…
— Tu es fou ? Tu n'y penses pas, voyons, Lucius ! Les alarmes ! s'horrifia Severus, imaginant déjà son ami sous les verrous pour cette raison.
— Inexistantes ou presque. Rien n'a réagi. Tu veux que je te dise ? Ce vieux débile de Fudge est tellement imbu de lui-même et sûr que rien n'y personne ne viendra troubler sa petite vie qu'il a fait des coupes budgétaires sur les barrières magiques des édifices publics. Le jour où un nouveau Mage Noir émergera… il ne faudra pas qu'il vienne pleurer !
— Ne parle pas de malheur et file ! chuchota le nouveau demandeur d'emploi.
Le blond se contenta d'hocher la tête en silence et se lança un sort informulé avec la baguette qu'il venait de retirer du fût de sa canne. La porte s'ouvrit sans grincer et puis se referma de même. Severus entendit le cliquetis particulier de la serrure qui s'enclenchait. Ce Ministère était un véritable moulin, comme disaient les Moldus.
Severus aurait pu s'échapper avec Harry sans souci en se faisant désillusionner par Lucius. On n'aurait jamais pu faire une chose pareille du temps de Millicent Bagnold4.
Le ténébreux potionniste ne se faisait aucune illusion. Il allait devoir quitter le Monde Magique. On allait lui infliger en outre une sévère amende qui allait certainement épuiser le contenu de son coffre. Adieu ses économies… Plus de poste à Poudlard, donc plus de rentrées d'argent… sa petite vie paisible et ses week-ends londoniens allaient prendre fin également. Et puis, il allait être séparé de son amant qui lui allait très certainement retourner dans le giron de Dumbledore. Ils ne se verraient plus ou presque. Misère… Pourquoi avait-il fallu que ce petit idiot de Drago Malefoy se comporte comme un mécréant de l'Allée des Embrumes ? Et Weasley… trahir ainsi Harry ! Ce petit merdeux ne perdait rien pour attendre. Il avait mangé son pain blanc, foi de Severus. Le sorcier savait qu'il n'avait pas fini de radoter et de ressasser sa rancœur contre le destin, Drago, Ron Weasley, Ombrage et Skeeter… sans compter le reste du troupeau, tous ces sorciers et sorcières coincés, homophobes, rétrogrades et arriérés !
En soupirant une dernière fois, il secoua Harry par l'épaule afin de le réveiller. On allait venir les chercher dans peu de temps. Autant qu'ils soient tous deux un tant soit peu préparés.
— Chaton ? Debout ! Tu as assez dormi comme ça, il va être l'heure.
— Sev' ? marmonna Harry en se frottant un œil du dos de la main. Je m'suis endormi ? Mince, j'aurais pas cru. J'ai bien dormi pourtant cette nuit.
— On aurait d'ailleurs mieux fait de ne pas se lever. Mais bon… on n'a pas le choix, autant que ça se termine. Au moins, on sait qu'on a un allié dans la place, voire deux.
— Deux ? fit le jeune balafré en se redressant puis remettant ses lunettes sur son nez. Pourquoi deux ? Le Professeur McGonagall vient aussi ?
— Non. Deux, comme Albus Dumbledore et Lucius Malefoy.
— Malefoy ? sursauta Harry comme si une mouche l'avait piqué. Tu fais encore confiance à… à cette famille de dégénérés pour nous aider ? C'est à cause d'un Malefoy – et ton filleul encore en plus – que nous sommes dans cette merde noire !
— Langage, Harry ! Je ne parle pas de Drago mais de Lucius. C'est également mon meilleur ami et crois-moi, il n'est pas gâté chez lui. Il est marié à une femme que bien sûr il n'aime pas. Il la supporte comme on dit. Il est censé l'apprécier, selon la version officielle. C'est elle qui a éduqué son fils ainsi. Elle en a fait le « presque » parfait sang-pur qui obéira aux traditions sans même se poser de questions. Je dis « presque » parce que visiblement elle ne lui a pas appris à frapper aux portes ni à réfléchir suffisamment par lui-même, afin de ne pas détruire la vie de son parrain. Mais bon, c'était peut-être trop demander à Narcissa Black, cousine de ton abruti de parrain.
— On est aussi gâtés l'un que l'autre. Moi avec mon parrain, toi avec ton filleul. Quelle merde ! Quand je pense que dans le Monde Moldu on pouvait marcher en ville main dans la main… s'embrasser sans finir au poste de police… Oui, je sais, pas partout ! Y a des endroits où on nous tirait une tronche pas possible. Mais dans Soho… poursuivit Harry, rêveur, on pouvait et c'était trop génial…
Harry se nicha dans les bras de Severus qui ne le repoussa pas. Le jeune homme posa sa joue sur la poitrine du sorcier et écouta les battements apaisants de son cœur. Le rythme régulier calmait toujours le garçon et il ne savait pas pourquoi. Dès qu'il pouvait, il se nichait ainsi comme si cette place avait toujours été faite pour lui, n'attendant que lui. Ses bras fins entourèrent la taille souple du Serpentard et il sentit un des bras de l'homme l'enserrer et le plaquer contre lui d'un geste protecteur. Aucun d'eux n'eut le loisir de profiter de cette position plus d'une minute. Un cliquetis résonna dans le silence et la porte de la cellule s'ouvrit. Un Auror inconnu apparut baguette à la main. Derrière lui, un de ses collègues tenait deux paires des fameuses menottes magiques dont on les avait déjà précédemment affublés.
— Debout ! Vous allez comparaître dans la salle d'audience numéro 10 dans quelques minutes. Tendez vos poignets et écartez-vous l'un de l'autre ! On n'a pas besoin d'avoir le spectacle de vos perversités dégoûtantes ! Je me demande à quoi pensait le Chef en vous collant tous deux dans la même cellule ! Pouah ! Y aurait que moi, vous seriez à Azkaban depuis plus d'une heure et embrassés pour midi, Sauveur du Monde Magique ou pas ! termina l'Auror en crachant aux pieds d'Harry qui pinça les lèvres et plissa les yeux derrière ses lunettes rondes.
Le second Auror leur remis les menottes et les serra même un peu trop, ce qui fit grimacer Harry et arracha un sourire ravi à ce même Auror. Celui-là, on pouvait parier qu'il avait répondu favorablement à la question du sondage de Rita Skeeter.
Les deux amants furent traînés dans quelques couloirs, baladés en ascenseurs et à travers des escaliers pour arriver enfin au niveau 10, étage où se trouvaient toutes les salles d'audiences et le vestiaire des Membres du Magenmagot, ainsi que leur salle de repos.
Les deux grandes portes s'ouvrirent et les quatre sorciers présents dans l'antichambre entendirent nettement la voix d'Amélia Bones qui visiblement présidait les débats.
— AURORS ! FAITES ENTRER LES ACCUSÉS !
1 Maladie neurologique orpheline dite « Chorée de Huntington » caractérisée entre autre par des successions de mouvements spontanés excessifs, abrupts, imprévisibles et irréguliers.
2 Pour le reste, il y a Mastercard Gringotts…
3 Atteint de scrofule, autre nom des écrouelles : nom ancien de l'adénite cervicale chronique, d'origine tuberculeuse, qui donnait lieu à un abcès froid qui se fistulisait durablement, puis laissait des cicatrices. (Les rois de France étaient censés guérir les écrouelles par imposition des mains, le jour de leur sacre.)
4 Sorcière ayant précédé Cornélius Fudge au poste de ministre.
