Bêta : Mokonalex

Assistante/Elfe de Maison/Infirmière : Mirabelle 31

Note de l'auteur : Je rentre en clinique demain 15 mai pour être opérée à nouveau le 16 dans l'après-midi. Donc voici la suite de l'histoire pour ne pas vous faire trop attendre...

Etant donné que le chapitre fait plus de 19 000 mots, je l'ai coupé en deux parties. La seconde est déjà revenue de la bêta et sera publiée dans la journée voire demain matin au pire.

J'espère que vous allez apprécier.

Bonne lecture !


Kingsley Shacklebolt récupéra les deux prévenus des mains agressives de ses deux subordonnés. Il n'avait pas été sans remarquer comment ces Aurors avaient traité Harry et Severus dans l'antichambre précédant la salle d'audience et surtout les paroles insultantes jetées méchamment. Le grand noir retira les menottes magiques et prit chacun des deux sorciers par un bras. Il les conduisit dans un box et les installa sur un banc de bois noir ciré avant de les abandonner là sans un mot.

Harry entendit Severus soupirer. Il tourna la tête vers lui et le vit baisser le nez et fixer ses mains posées sur ses genoux. Il fut un instant tenté de repousser le rideau de cheveux noirs qui masquait les yeux d'onyx de son amant. Sachant que leurs gestes étaient certainement surveillés, Harry s'abstint et murmura.

— Tout va bien, Sev' ?

— Tu as vu où on est ? répondit l'homme sans lever les yeux.

Le Gryffondor se redressa alors et de son regard émeraude, il balaya la vaste salle qu'il n'avait pas encore découverte. Les murs de pierres nues étaient éclairés par quelques torches, tandis qu'un immense chandelier couvert de bougies dégoulinantes de cire illuminait la pièce ronde. Un hémicycle constitué de gradins et bancs du même bois noir ciré que le box des accusés se trouvait en face d'eux. Chaque place était occupée par un sorcier ou une sorcière vêtu d'une robe austère d'un pourpre très foncé qui semblait presque noir et d'une haute toque assortie. Les visages sévères et hostiles les toisaient sans aménité.

Au centre de la pièce, au beau milieu de la superbe rosace de carrelage qui ornait le sol, trônait un sinistre et large fauteuil de pierre bardé de chaînes. Cette vision fit frissonner Harry sans le vouloir et il détourna son regard du siège afin d'examiner le reste de la salle. Amélia Bones, qu'il connaissait comme la tante de Susan élève de son année à Poufsouffle, était installée à un pupitre nettement plus haut que les autres. Visiblement, c'était elle qui présidait les débats. La sorcière avait des cheveux châtains ramassés en un chignon soigné et un de ses yeux clairs arborait un curieux monocle en or agrémenté d'une fine chaîne du même métal. L'arrogant et pompeux Percy Weasley, qu'il détestait, était assis à un pupitre beaucoup plus bas que celui de Madame Bones. Il avait sur sa tablette des tas de dossiers et de parchemins, ainsi qu'une plume et un encrier. Visiblement, cet imbécile était le scribe ou le greffier, Harry ne savait pas quel était le terme adéquat dans le Monde Magique.

C'était bien sa veine… non seulement il était arrêté, mais en plus sa vie personnelle la plus intime et secrète était étalée dans les journaux et les détails allaient bientôt être recopiés par le seul fils Weasley qu'il détestait plus que Ron.

Les gradins se remplissaient des ultimes arrivants et Cornélius Fudge fut l'un des derniers membres à s'installer à sa place. Il occupait un autre pupitre, presque aussi haut que celui d'Amélia Bones, mais placé au bout de la première rangée de sièges, un peu à l'écart de la présidente et de son greffier.

Alors que la porte de l'antichambre des membres du Magenmagot allait se refermer, Albus Dumbledore entra. Harry le vit et se sentit soulagé par sa présence. Il donna un léger coup de coude à Severus Rogue près de lui, afin de le prévenir.

— Sev' ! Regarde, Dumbledore est là ! Whaouuuu ! Je l'ai jamais vu fringué comme ça !

Le Maître des Potions leva la tête à contrecœur. C'était dans cette même salle d'audience qu'il avait été jugé et acquitté en 1981 de ses activités de Mangemort. En la quittant libre comme l'air grâce à Dumbledore, il s'était juré qu'il n'y remettrait jamais plus les pieds de toute sa vie, tant l'épreuve avait été ardue. Et pourtant, moins de seize années après, il se trouvait de nouveau dans le box des accusés… pour un baiser. Pour avoir simplement embrassé celui dont il était amoureux et dont il était aimé aussi, il n'en doutait plus.

Albus Dumbledore, vénérable Mage et Président-Sorcier du Magenmagot, venait de faire une entrée très remarquée. Contrairement à ses habitudes, il était en grande tenue officielle : celle qu'il ne mettait que pour les cérémonies importantes. Normalement, il aurait dû revêtir cette robe particulière à chaque procès pour indiquer son rang, mais il préférait ne pas se démarquer et portait la même robe austère que ses confrères. Or aujourd'hui, il avait fait très fort…

La robe pourpre foncé du vieil homme portait trois larges bandes dorées sur chaque manche près des poignets et tout en bas au niveau des pieds. Les mêmes décorations mais plus fines étaient rapportées sur la haute toque assortie qui garnissait la tête du Directeur de Poudlard. Ce n'était pas encore ces symboles de sa présidence qui choquaient, non. Albus portait autour du cou un très large collier d'or ouvragé qui couvrait ses épaules et sa poitrine : L'Ordre de Merlin de Première Classe.

Des chuchotements curieux et même impressionnés se firent entendre lorsqu'il s'avança, la mine sévère. Sa magie crépitait autour de lui et lui donnait une aura menaçante. Cornélius ne put s'empêcher d'avaler sa salive et se ratatina quelque peu derrière son pupitre. Madame Bones replaça son monocle et détailla le vieil homme avec attention. Elle esquissa un petit sourire amusé, comprenant fort bien à quoi jouait Dumbledore.

— Albus ? Vous souhaitez présider les débats ?

— Nullement, ma chère. Je suis ici comme avocat de la défense. Je n'ai aucune intention de voir mes deux petits-fils adoptifs traînés dans la boue et punis au-delà de ce qui est nécessaire ! répondit le vieil homme en allant s'asseoir près des accusés.

Le ton n'était même pas glacé, il était polaire. Harry, bouche bée, regarda son mentor tandis que Severus le fixait avec le plus grand intérêt, intrigué par cet étalage pas du tout coutumier du vieux professeur.

— Nous pouvons commencer puisque tout le monde est là ! affirma Madame Bones en donnant un coup de marteau sur le tas qui se trouvait en haut à droite de son pupitre. L'audience est ouverte ! Nous sommes ici pour juger en notre âme et conscience Harry James Potter et Severus Tobias Rogue qui sont accusés du délit de bougrerie. Je rappelle aux honorables membres du Magenmagot que ce n'est plus un crime depuis 1976, rajouta-t-elle en se tournant vers ses confrères et consœurs vêtus de pourpre. Cornélius, si vous voulez bien relater les faits reprochés aux accusés…

Le Ministre incapable se redressa sur son banc de bois et remonta ses lunettes sur son nez. Il farfouilla quelques secondes parmi les parchemins posés devant lui et commença son récit.

— Hier au soir, Messieurs Potter et Rogue ont été surpris dans une position indécente que la morale et les lois réprouvent. Monsieur Drago Lucius Malefoy a surpris son parrain, l'accusé Rogue, Maître des Potions à Poudlard, en train d'embrasser sur la bouche son élève Harry Potter. Ces faits ont eu lieu dans le bureau de l'accusé Rogue…

L'auditoire était tout ouïe. Parmi les membres du Magenmagot, plusieurs n'avaient pas lu la Gazette et ne savaient donc pas pourquoi ils avaient été convoqués un dimanche matin. Cela faisait des décennies, ou presque, qu'on n'avait pas jugé en urgence une telle affaire. Certainement, le fait que Potter soit impliqué expliquait cette précipitation.

— L'accusé Rogue a poursuivi son filleul à travers les couloirs de Poudlard afin de l'oublietter. Mais avant cette fâcheuse extrémité, le jeune Malefoy a eu le temps de prévenir un de ses condisciples, membre comme lui de la Brigade Inquisitoriale Gardienne des Bonnes Mœurs de Poudlard. J'ai nommé le jeune Ronald Bilius Weasley.

Des têtes se tournèrent vers Lucius, impassible au milieu des gradins, son menton pointu en l'air et une main négligemment posée sur le pommeau de sa célèbre canne serpent. Ces mêmes têtes dévisagèrent ensuite les deux accusés stoïques sur leur banc.

Le Ministre reprit la parole.

— Monsieur Ronald Weasley, n'écoutant que son devoir, s'est alors empressé d'aller prévenir l'Inquisitrice de Poudlard, j'ai nommé Madame Dolorès Jane Ombrage. Les deux déviants ont été arrêtés respectivement par la Brigade Inquisitoriale pour Potter et des Aurors mandatés pour Rogue. Les suspects ont été interrogés sous Véritasérum et la transcription de leurs interrogatoires va vous être remise à l'instant. AUROR ? Faites passer ces copies à l'ensemble des membres !

Kingsley Shacklebolt s'avança vers Cornélius Fudge et tendit la main d'un air impassible. Le Ministre lui remit alors une liasse épaisse de parchemins. Le silence qui régnait à présent ne fut plus troublé que par le bruit léger des feuillets manipulés. Pendant une bonne dizaine de minutes, les sorciers vêtus de pourpre prirent connaissance des textes. Lorsque tous eurent lu et que les parchemins furent reposés, Cornélius continua sa diatribe.

— Comme vous avez pu le constater, les suspects ont avoué et n'ont pas émis de regrets. Chose encore plus abominable, ils ont l'intention de continuer leurs délits. Nous ne pouvons cautionner ce genre de choses ! Ces déviances sont interdites par la loi magique ! En conséquence, nous devons mettre fin à ces excès inadmissibles !

— Si vous permettez, je voudrais intervenir, fit alors tranquillement Albus Dumbledore qui avait sagement écouté jusqu'à présent.

— Allez-y, Albus, accepta Amélia Bones.

Le vieil homme se leva et s'approcha des gradins.

— La Gazette du Sorcier a été prévenue avant le Magenmagot, ce qui est contraire à l'éthique. Dès la première édition du matin, Miss Skeeter avait fait ses choux-gras de l'évènement ! Je suis certain que la plupart d'entre vous a été prévenue par la lecture du journal.

Des hochements de têtes furent alors aperçus dans l'hémicycle. Sur son banc, Lucius resta impassible.

— Une seule personne était au courant de toute l'affaire. Elle seule – en dehors de moi-même – avait accès à une cheminette reliée au réseau externe[1] et pouvait ainsi prévenir la presse, ce qui, je vous le rappelle, est une offense grave à l'éthique du Magenmagot et est interdit. Les affaires en cours ne peuvent être révélées aux journaux avant que le Département de la Justice Magique n'en soit avisé. DOLORÈS OMBRAGE ! Vous étiez la seule capable de cette lamentable indiscrétion !

Toutes les têtes se tournèrent vers la susnommée, y compris celles des deux accusés. Harry ne put s'empêcher d'afficher un large sourire narquois en la dévisageant – la vengeance était douce – tandis que Severus se contenta de lever un sourcil et d'esquisser un léger rictus.

Le teint d'Ombrage affichait maintenant une belle couleur pourpre qui se mariait particulièrement bien avec sa tenue officielle. Elle tenta de minimiser l'accusation et commença à bredouiller des protestations de sa voix de petite fille.

— Mais, non ! Pas du tout ! Je… je n'y suis pour rien…

Un regard tueur de Cornélius Fudge par-dessus ses lunettes lui fit avaler sa salive et se ratatiner sur son banc.

— Dolorès ! Ne me dites pas que c'est à vous que je dois l'hécatombe de beuglantes de ce matin, et la destruction de ma dernière robe neuve ?

Le Ministre n'eut aucune réponse, Albus Dumbledore n'en laissa pas le loisir à la femme habituellement en rose.

— Réfléchissez, Cornélius ! Qui avait absolument toutes les informations sur cette affaire, tard hier soir ? Qui avait accès à une cheminette parmi les occupants de Poudlard ? Et surtout qui avait un intérêt dans cette affaire ? Dolorès a dirigé elle-même les interrogatoires. Comme je l'ai dit, elle a dans son bureau un accès direct avec le réseau de cheminette et nous savons tous qu'elle déteste Harry Potter, elle n'en a jamais fait mystère à l'école. Je suggère qu'un Auror aille interroger de ce pas Miss Rita Skeeter à son domicile, afin de savoir qui lui a fait ces révélations. Si à ce moment-là il est prouvé que Madame Ombrage a abusé de sa position pour informer la presse, chose interdite, il sera toujours temps d'appliquer une sanction.

Le vieil homme trônait au beau milieu de l'hémicycle, tout près du siège de pierre où les accusés étaient normalement installés pour les auditions. Sa magie irradiait de son corps par vague selon son degré d'irritation. Sa voix était bien plus glacée et d'un volume beaucoup plus élevé que la normale. Sans nul doute, sa magie faisait tout pour qu'il soit entendu. Comme quoi, même à cent seize ans, on pouvait encore faire de la magie accidentelle…

— Auror Tonks ? Veuillez-vous rendre avec un collègue de votre choix au domicile de Miss Skeeter pour procéder à son interrogatoire sous Véritasérum. Si nécessaire, votre souvenir sera visionné dans la pensine du Magenmagot.

— Oui, Madame Bones, répondit une jeune femme aux cheveux roses et en tenue d'Auror. Je pars tout de suite !

Le regard de Tonks balaya un instant son petit groupe de collègues réquisitionnés qui était descendu pour assister à l'audience.

— Matt, tu veux venir ? chuchota-t-elle à un Auror brun trapu qui se tenait près de la double porte menant au couloir.

L'Auror Albertus hocha vigoureusement la tête, trop content d'avoir un interrogatoire à mener. Tous deux quittèrent la salle d'audience numéro 10 très discrètement, et un autre Auror verrouilla magiquement la porte derrière eux.

Sur son banc, Dolorès n'en menait pas large. Elle n'avait pas prévu être si vite découverte. Elle espérait encore que Rita ne soit pas chez elle, mais en vadrouille pour un quelconque article. D'ici là, les odieuses révélations faites sur les accusés auraient provoqué une belle distraction et un scandale, et par conséquent on oublierait sa petite indiscrétion.

Cornélius Fudge termina alors ses explications sur l'affaire en cours.

— Messieurs Potter et Rogue, fit-il en fixant hargneusement les deux accusés, vous n'êtes pas sans savoir que la loi magique interdit les relations intimes entre deux personnes du même sexe. Vous avez avoué avoir eu à Poudlard, au Manoir Black et dans un hôtel moldu de Londres, des relations sexuelles contre-nature. Ce n'est pas admissible ! Cette déviance est intolérable et est un affront au Monde Magique ! En outre, c'est un très mauvais exemple pour les élèves à votre charge, Maître des Potions Rogue !

— Cornélius, l'interrompit Albus Dumbledore, le remue-ménage très récent provoqué à Poudlard par la révélation de cette affaire a été entièrement dû au comportement inadmissible de Ronald Weasley qui a monté sa Maison, Gryffondor en l'occurrence, contre son condisciple Harry Potter et un professeur de l'école. Je n'ai eu d'autre choix que de personnellement sévir et punir cet élève en entendant moi-même les menaces et propos tenus. J'ai également été dans l'obligation de le renvoyer quinze jours pour rétablir l'ordre et la discipline. Par sa faute, trois élèves de première et seconde année de sa Maison, respectivement de sangs-mêlés et né-moldu, ont demandé à changer d'établissement tant ils étaient effrayés par les propos de Weasley et les menaces à leur encontre. L'un des enfants est le fils d'un sorcier de sang-pur, membre de la Confédération Internationale des Mages et Sorciers. J'ai eu le plus grand mal à calmer les esprits, et j'ai dû faire usage de mon titre de Grand Manitou afin que les évènements ne dérapent pas et que notre Monde ne soit pas de nouveau exposé à l'inquisition de la Confédération.

Cette déclaration choqua quelque peu les membres qui s'agitèrent sur leurs bancs. Ils savaient tous que cette Confédération Internationale les avait à l'œil et leur reprochait régulièrement leur retard sur l'ensemble des autres communautés magiques. Cornélius ne put s'empêcher de grimacer, il allait encore devoir supporter des hiboux désagréables, voire des beuglantes, et même des visites intempestives d'experts chargés de les remettre dans le droit chemin. Vraiment cette affaire, au demeurant simple, prenait une tournure très désagréable. Il fallait calmer les esprits et se débarrasser des contrevenants au plus vite, Garçon-Qui-Avait-Survécu ou pas !

Le Ministre remua encore quelques parchemins. Il prit connaissance de l'un d'eux et s'adressa à Severus Rogue.

— Les administrateurs de Poudlard ont à la quasi unanimité – puisque Lord Lucius Abraxas Malefoy à voté contre – prononcé le renvoi de Severus Rogue et sa destitution de son titre de Professeur de Potions de l'Ecole de Magie et de Sorcellerie de Poudlard, ainsi que de celui de Directeur de la Maison Serpentard. Par conséquent, Severus Rogue, vous aurez vingt-quatre heures pour quitter vos quartiers et l'enceinte du collège. Monsieur Potter, poursuivit-il en se tournant vers le Gryffondor incriminé, les administrateurs souhaitaient votre renvoi, mais comme Lord Malefoy l'a fait remarquer pendant ces débats, seul le directeur de l'école peut vous expulser puisque vous n'avez commis qu'un simple délit.

La tête de Fudge indiquait qu'il regrettait fort cet état de chose. Potter, tout Sauveur qu'il fut, ne méritait rien de mieux que l'expulsion et Azkaban tout comme son complice. Mais malheureusement, les lois avaient été changées il y avait bien longtemps. Et le responsable de ce changement navrant trônait en grande tenue au centre de la pièce…

Harry lança un regard reconnaissant à Dumbledore et fixa ensuite son intérêt sur son compagnon d'infortune dont la tête penchée tristement indiquait tout le bien qu'il pensait de cette sanction. Il tenta, en pure perte, de croiser son regard dissimulé par un rideau de longs cheveux noirs. Si Severus devait partir dans les vingt-quatre heures, il n'était pas question qu'il reste à Poudlard ! Mais s'il partait, il le ferait de lui-même et pas expulsé comme un vulgaire malfaisant et sa baguette brisée. Certes Voldemort n'était jamais revenu, contrairement aux prévisions les plus pessimistes du vieux mage, mais ça ne voulait pas dire qu'il serait pour autant en sécurité sans baguette. Il y avait très certainement des intégristes homophobes parmi les sorciers de la rue et il n'était pas question qu'il prenne le risque de se balader à Pré-Au-Lard ou au Chemin de Traverse sans de quoi se défendre.

— Il n'est pas question que Potter soit privé de son éducation et de son diplôme ! intervint alors une vieille sorcière ridée et chenue en se levant de son banc pour être remarquée.

Le jeune Gryffondor reconnut alors la femme. C'était le Professeur Griselda Marchebank, présidente de l'Académie des Examinateurs Magiques, et c'était elle qui lui avait fait passer ses BUSEs pratiques de Divination, de Potions et d'Astronomie, matières dans lesquelles il n'avait d'ailleurs pas du tout brillé.

— Madame Marchebank, nota Amélia Bones, nous savons que l'éducation des jeunes sorciers est un sujet qui vous tient particulièrement à cœur. Loin de nous l'idée de priver le Sauveur de la possibilité de terminer ses études et de passer ses ASPICs. C'est le moins que nous puissions faire. Je rappelle aux membres du Magenmagot que notre monde doit beaucoup à Monsieur Potter.

— Rassurez-vous, Griselda, affirma alors Dumbledore, Harry ne sera pas renvoyé et passera ses ASPICs comme prévu.

— Bien ! fit la vieille femme au visage si ridé qu'on aurait dit qu'il était recouvert d'une toile d'araignée.

Satisfaite, elle se rassit et comme Lucius quelques rangs plus haut, elle garda une main sur le pommeau de sa canne et recommença à suivre les débats avec beaucoup d'intérêt.

La voix de Cornélius Fudge se fit à nouveau entendre.

— La loi magique en vigueur prévoit que pour les cas avérés de bougrerie, et ici nul ne peut nier le délit puisque les accusés ont avoués, la loi magique, disais-je, prévoit une amende et des Travaux d'Intérêts Magiques. Personnellement, je requiers l'application la plus sévère de la loi, étant donné que les deux protagonistes de cette triste affaire sont des plus connus. Nous devons faire un exemple, afin de dissuader d'autres personnes de se laisser aller à cette déviance particulière. Et puis, il ne faut pas oublier que Rogue est un professeur et qu'il a eu commerce avec un de ses élèves ! Majeur, certes, mais un élève tout de même, ce qui est un facteur aggravant.

Harry retint un ricanement et un haussement d'épaules qui auraient certainement été très mal perçus. Il ne souhaitait qu'une chose, quitter ce lieu maudit le plus vite possible et sans trop de dommages. Pour une fois que sa célébrité lui servait à quelque chose, il valait mieux en profiter. Par contre, Severus ne serait pas aussi bien loti très certainement. Son passé de Mangemort allait le desservir, même si personne n'avait osé faire mention de ce détail. La présence imposante et intimidante d'Albus Dumbledore devait y être pour quelque chose. Le vieil homme avait d'ailleurs annoncé la couleur dès son entrée dans les lieux : il considérait ces deux jeunes gens comme ses petits-fils adoptifs.

— Etant donné que tout le monde ici a pris connaissance des déclarations sous Véritasérum des deux accusés, il est inutile que nous perdions notre temps à les interroger de nouveau. Je suis certaine que vous avez tous mieux à faire en ce dimanche matin. D'ailleurs, cette affaire aurait pu largement attendre lundi, Cornélius ! Il n'y avait pas mort de sorcier, pesta alors Amélia Bones en se penchant pour regarder le Ministre dans les yeux.

Celui-ci eut la bonne grâce de ne pas répondre à l'accusation de la Directrice du Département de la Justice Magique. Percy Weasley lui avait raconté que Poudlard était au bord de l'émeute à cause de Potter et de Rogue, et que les maigres pouvoirs détenus dans cette enceinte par la Grande Inquisitrice ne suffiraient pas à ramener le calme malgré ses efforts. Si ce que Dumbledore avait dit était vrai, Ronald Weasley avait lui-même provoqué cette émeute et ensuite utilisé son frère aîné pour se venger ou se tirer des ennuis, il ne savait pas trop. Le petit homme au chapeau melon vert allait sans tarder avoir une sérieuse discussion avec Arthur Weasley…

— Je propose que nous nous retirions afin de débattre des sanctions à donner aux deux accusés, poursuivit Madame Bones. En outre, nous pourrons ainsi espérer que les Aurors Tonks et Albertus seront revenus avant la clôture de l'affaire et pourront nous donner des détails sur la fuite d'informations récupérée par Miss Skeeter pour son article.

La sorcière n'hésita pas à regarder fixement Dolorès Ombrage, pour lui faire comprendre que son cas n'était pas passé à la trappe. Elle détestait cette profiteuse cruelle qui avait déjà tristement fait parler d'elle, deux années auparavant avec une histoire épouvantable d'artéfacts de Magie Noire utilisés à Poudlard contre les élèves. Sa nièce Susan n'avait pas eu à souffrir personnellement de ces excès, mais elle s'était longuement plainte dans ses hiboux de l'indigence des cours de ladite Ombrage et de leur absence totale de pratique. Alertée, Amélia s'était inquiété de ce fait auprès de Fudge qui avait minimisé ces révélations, indiquant que les élèves se plaignaient toujours de leurs professeurs. Pourtant, Madame Bones avait cru sa nièce et s'était résolue à lui faire travailler sa pratique en Défense Contre Les Forces du Mal pendant les vacances de fins de trimestres. Susan avait alors révélé à sa tante avoir intégré un groupe d'étude dirigé par Harry Potter et recommandé par les Préfets de Chourave. La jeune sorcière avait ainsi pu obtenir un bon niveau et passer très honorablement sa BUSE de Défense Contre Les Forces du Mal.

Incompétente, cruelle et idiote… C'étaient les qualificatifs qui revenaient toujours en premier dans l'esprit de Madame Bones dès que Dolorès Ombrage était mentionnée. Si celle-ci avait dérapé – une fois de plus – elle n'allait pas lui faire de cadeau ! Et Cornélius aurait cette fois-ci fort à faire pour protéger son âme damnée en rose bonbon, obsédée par les chats.

Le bruit du marteau frappant le tas fit sursauter les personnes présentes dans la salle d'audience numéro 10. Il fallait dire que certains des sorciers convoqués avaient été tirés du lit par leurs Elfes de Maison et s'étaient donc rendormi ou presque pendant que Fudge expliquait ce qu'on reprochait aux accusés. Lucius n'avait pas pu s'empêcher de remarquer qu'Augusta Londubat, qui la veille au soir avait présidé le conseil d'administration de l'école, n'était ce matin pas présente. Il fallait dire que la séance impromptue, exigée par Dolorès pour renvoyer Severus Rogue de son poste d'enseignant à Poudlard, s'était prolongée jusqu'à deux heures du matin, et pour certains des membres les plus âgés, cette veille avait eu raison de leurs forces.

— Membres du Magenmagot, je déclare cette session suspendue. Nous allons nous rendre en salle de débat pour déterminer les peines qui seront données aux accusés.

Aussitôt dit, Madame Bones se leva, emportant avec elle les notes prises pendant les explications du Ministre. Elle lança un regard courroucé vers Ombrage se promettant bien de l'épingler à son tableau de chasse avant qu'il ne soit midi.

Un à un, les sorciers et sorcières vêtus de pourpre foncé se dirigèrent en file indienne vers une petite porte dérobée. Les deux prévenus restèrent seuls dans la salle avec les quelques Aurors déjà présents. Dumbledore avait suivi le mouvement. Avant de s'éloigner, il avait tapoté les genoux des deux jeunes hommes afin de les rassurer. Harry avait balayé la salle du regard, un peu inquiet. Il n'appréciait pas trop de se retrouver ainsi isolé et exposé, surtout sans baguette. Les Aurors auxquels ils avaient eu à faire s'étaient pour la plupart montrés homophobes et menaçants. Si jamais ils devaient se retrouver à leur merci, le jeune Sauveur ne donnait pas cher de leurs peaux.

Severus Rogue gardait le nez obstinément baissé sur ses mains posées sur ses cuisses. Son habituel rideau de cheveux noirs masquait son visage comme souhaité par leur propriétaire. Seul son nez volumineux dépassait…

— Allez, Sev' ! Lève un peu la tête, je veux voir ton visage, murmura Harry.

Le Maître des Potions obéit alors et tourna lentement sa tête vers son jeune amant. Les yeux verts perçants du garçon croisèrent ceux fatigués couleur d'onyx. Severus y lut une certaine dose d'inquiétude et d'appréhension. Il soupira et sa main discrètement glissa vers celle du Gryffondor et la serra.

— Tu n'en es pas conscient, Harry, fit-il en détournant son regard pour fixer les marbrures d'une colonne, mais notre petite vie tranquille, du moins relativement tranquille, telle que nous la connaissions tous deux est maintenant terminée. Je ne sais pas combien de temps ils vont mettre à nous juger et je sais qu'Albus et même Lucius vont tenter de minimiser l'affaire, mais ça ne marchera pas. L'homophobie est profondément ancrée chez les sorciers du Royaume-Uni. Nous sommes le seul pays magique occidental qui punit ainsi les gens pour leurs orientations sexuelles. Nous allons être chassés, sans nul doute. Enfin… moi, du moins. Toi, tu es le Sauveur, tu vas peut-être y échapper. Mais ils vont nous dépouiller, nous ruiner, en bref détruire nos vies.

— Mais non, tu es trop défaitiste, Sev' !

— Et toi, tu fais trop confiance aux gens. Tu ne devrais pas. Est-ce que Ronald Weasley ne t'a rien appris ?

Harry pâlit et grimaça involontairement. Il avait voulu remonter le moral du Serpentard mais il avait oublié que lui aussi avait récemment goûté à la trahison de celui qu'il pensait être son ami, ainsi que celles de Sirius et Remus avec leur affaire de mariage arrangé.

D'accord, on risquait de les chasser du Monde Magique, mais il avait de l'or, et s'il fallait qu'il transfère tous ses biens de Gringotts à la Lloyds ou la Barclays il n'hésiterait pas et Severus ne manquerait de rien, foi de Potter.

Les minutes s'égrenaient doucement. Harry soupira afin de se détendre et s'adossa mollement contre le bois dur du dossier derrière lui. Il étendit ses jambes et leva les yeux en l'air afin d'examiner les détails de l'architecture néo-gothique du plafond de pierre. Près de lui, Severus ne bougea pas. Il avait repris sa position précédente et se dissimulait encore derrière son rideau de cheveux noirs, les yeux fixés sur ses mains crispées sur sa cape. Il n'était pas dupe et entendait très bien les murmures désobligeants des Aurors qui les gardaient.

Ils étaient cinq encore dans la salle d'audience numéro 10. À travers ses longues mèches noires il voyait les représentants de la loi sorcière déambuler baguettes en main et leur lancer des regards tueurs. Severus était persuadé que si Kingsley sortait pour une raison ou une autre, leur dernier garde-fou s'envolerait et ces hommes deviendraient provocateurs voire même agressifs.

Shacklebolt au même moment pensait la même chose. Il savait très bien que les Aurors présents, dont la plupart n'appartenaient pas à une équipe avec laquelle il avait précédemment travaillé, étaient homophobes, comme il était habituel de l'être dans le Monde Magique britannique. En marchant de long en large pour tromper l'ennui, il entendit malgré lui un Auror nommé McClivert dire à son collègue Shingleton qu'il regrettait fort qu'on n'envoie plus les homosexuels à Azkaban et que c'était une pitié que le baiser du Détraqueur ne leur soit plus administré. McClivert ne se gêna pas pour ajouter qu'on devrait le laisser seul dans une pièce avec le soi-disant Sauveur : il lui ficherait une bonne correction dont il ne serait pas prêt de se remettre. Alors que Shingleton avouait quant à lui rêver qu'on lui laissât dresser l'autre anormal, le sale serpent, Kingsley rebroussa chemin et se tourna vers eux.

— Si jamais l'un de vous deux, précisa-t-il en regardant ses deux collègues puis ceux disséminés dans la pièce, ou même un autre d'entre vous, se permettait de toucher ou même d'approcher les prévenus, je me ferais une immense joie de le dénoncer à Robards et à Scrimgeour pour faute grave. Vous avez certaines opinions, soyez assez aimables de les garder pour vous.

La voix puissante de Kingsley Shacklebolt avait claqué comme un coup de tonnerre et fait sursauter Harry qui se redressa alors sur son banc et regarda les Aurors incriminés. Severus avait également relevé la tête et tous deux fixèrent les sorciers en question, le visage figé et les yeux glacés.

Harry ne put s'empêcher de les toiser avec mépris. Ces hommes étaient ceux venus les chercher dans leur petite cellule et qui les avaient bousculés et insultés gratuitement.

Confus et vexés de s'être fait ainsi remonter les bretelles par un Auror plus gradé qu'eux et devant des déviants de la pire espèce, les deux sorciers s'éloignèrent et n'ouvrirent plus la bouche, du moins on les entendit plus.

Le jeune Gryffondor choisit de concentrer toute son attention sur son compagnon dont la mine fermée ne le laissait pas deviner ses pensées. Il avait l'habitude, mais en ces circonstances navrantes il aurait bien aimé savoir à quoi pensait Severus. Harry était persuadé que tout allait bien se passer et qu'ils n'auraient qu'une simple amende. Après tout, Dumbledore était le Président-Sorcier du Magenmagot et il ne faisait aucun doute que le vieil homme allait remuer ciel et terre pour les tirer de là sans trop de dommages.

Un peu avant midi, alors qu'Harry n'en pouvait plus de cette attente forcée dans le silence, les portes de la salle d'audience s'ouvrirent discrètement. Nymphadora Tonks entra, suivie de son collègue Albertus. Après avoir échangé quelques mots à voix basse avec Kingsley, la jeune femme aux cheveux roses et le sorcier qui l'avait accompagnée traversèrent la pièce pour disparaître par la petite porte dérobée précédemment empruntée par les membres du Magenmagot.

— J'espère que cette salope d'Ombrage va en prendre plein la tête, murmura Harry à Severus.

Celui-ci se contenta d'hocher le chef en assentiment et fixa son attention sur la petite et discrète issue. Cela faisait presque deux heures qu'ils poireautaient et il en avait plus qu'assez. De toute façon, le Maître des Potions savait très bien qu'ils étaient fichus et allaient être sanctionnés de façon démesurée, alors pourquoi les faisait-on attendre ainsi ? Certainement pour le plaisir de les angoisser…

Il était midi et quart, presque vingt, lorsque la porte se rouvrit. Madame Bones, qui tenait toujours sa pile de parchemins à la main, fut la première à sortir. Derrière elle, Fudge trottinait sur ses petites jambes rondouillettes et le reste du Magenmagot apparut derrière eux en file indienne comme ils étaient entrés. Harry et Severus virent au milieu des membres Albus Dumbledore et Lucius Malefoy qui conversaient à voix basse, têtes baissées.

Le vieux directeur de Poudlard leva deux yeux graves et las vers ses protégés, tandis que Lucius, la mine figée, croisait de ses iris gris ceux d'obsidienne de son meilleur ami.

— Ça s'est mal passé, murmura Severus à Harry. Je connais Lucius comme si je l'avais fait. Vu sa tête, on va en prendre plein les dents. Et regarde Albus, il n'est pas ravi.

Harry regarda les deux hommes désignés par le Serpentard. Il fronça les sourcils en constatant qu'en effet, on ne pouvait pas dire que Dumbledore et l'autre andouille de Malefoy qu'il détestait semblaient particulièrement heureux. Une sourde angoisse qui l'avait jusque là épargné lui tomba comme du plomb sur l'estomac et une boule dans la gorge l'empêcha alors d'avaler sereinement sa salive.

Un à un, les membres du Magenmagot reprirent leurs places précédemment occupées. Albus retourna près des deux accusés et posa simplement et fugacement sa main sur l'épaule de son ex-Maître des Potions avant de s'éloigner vers le centre de l'hémicycle.

D'instinct, Harry, très discrètement, chercha la main de son compagnon et la serra entre les plis de la cape noir virevoltante et ceux de sa robe de Poudlard. Severus remarqua une différence parmi les membres de l'hémicycle. Il se pencha discrètement vers Harry et sans quasiment remuer les lèvres, il lui glissa ces quelques mots.

— Ombrage n'est plus là.

Aussitôt, Harry tourna la tête fébrilement dans tous les sens et parcourut chaque travée pour dévisager ses occupants. Mais l'odieuse bonne femme à face de crapaud et chevelure atrocement frisée n'était pas revenue. Mince ! Le Gryffondor en fut fortement contrarié. Il aurait donné cher pour savoir ce qui avait bien pu se dire dans cette fameuse salle de débats ou autre – il ne savait plus trop le nom qu'on lui donnait. Si l'Inquisitrice n'était pas là et que les deux Aurors avaient trouvé Rita Skeeter, alors Ombrage avait dû se faire démolir ! Tant mieux ! Et Harry espérait bien tout connaître de ces détails en interrogeant plus tard Albus Dumbledore.

Severus fixait son meilleur ami qui s'obstinait à ne pas vouloir croiser son regard. Le Maître des Potions savait ce que cela voulait dire. Lucius avait dû tout tenter pour minimiser leur affaire mais il avait dû se heurter à des difficultés sérieuses voire insurmontables. Comme il l'avait dit à Harry quelques minutes auparavant, la mine d'Albus ne valait guère mieux.

Les deux inculpés levèrent la tête vers Amélia Bones lorsque celle-ci donna des coups de marteau pour réclamer l'attention générale.

— Membres du Magenmagot, l'audience est reprise !

La sorcière se tourna vers Harry et Severus et les regarda un instant la mine pincée, puis elle croisa le visage fermé de Dumbledore et soupira de façon presque imperceptible.

— Cornélius ? Veuillez annoncer leurs sentences aux accusés, je vous prie !

— Sentences, accusés… Mazette, songea le Sauveur, outré. Mais on les prenait pour des meurtriers de la pire espèce ou quoi ?

La voix de Fudge retentit alors dans la vaste salle. Son ton était agressif et on avait l'impression qu'il prenait un malin plaisir à torturer les malheureux se trouvant en face de lui.

— SEVERUS ROGUE ! Vous avez été jugé coupable du délit de bougrerie. Vous êtes déjà renvoyé de votre poste de professeur de potions et de Directeur de la Maison Serpentard à Poudlard, comme en ont décidé hier soir les administrateurs de l'école. En sus de quoi, le Magenmagot vous condamne à deux mille gallions d'amende et à un mois de Travaux d'Intérêts Magiques à Sainte-Mangouste. Une fois votre peine effectuée, vous ne serez plus autorisé à revenir dans le Monde Magique. Vous serez rayé de la liste officielle des sorciers britanniques. Si vous avez un coffre à Gringotts, je vous conseille d'en retirer votre or et de le fermer car vous ne pourrez plus y accéder en personne dans huit jours. Vous pouvez remercier Lord Malefoy et Albus Dumbledore, grâce à eux vous gardez votre baguette !

Harry n'avait aucune notion de la valeur de l'argent des sorciers. Pour lui, cela ne paraissait être qu'une petite amende et il ne remarqua pas la pâleur soudaine de son amant. Il se contenta de lui serrer les doigts discrètement, entre les plis de leurs vêtements, comme précédemment.

Ses coffres débordaient d'or, alors si jamais il avait la même amende et bien ma foi, il la paierait et n'en mourrait pas. Le jeune sorcier se souciait plus de la séparation inévitable d'avec Severus, puisque celui-ci était chassé comme un malpropre. Foi de Potter, il n'allait pas faire de vieux os dans le Monde Magique ! Pas question de rester à Poudlard sans son amant !

— HARRY POTTER !

Le jeune Sauveur aux yeux verts sursauta en s'entendant apostropher ainsi par Fudge. Il tourna son visage vers le Ministre avec un air d'ennui profond qui agaça l'élu magique au plus haut point.

— Les Professeurs Marchebank et Dumbledore ont décidé que vous ne seriez pas renvoyé de Poudlard. En effet, ils tiennent absolument à ce que vous terminiez vos études, comme vous avez pu le constater tout à l'heure. Etant donné que notre Monde vous doit des remerciements pour nous avoir débarrassés de Vous-Savez-Qui, nous avons accepté leur requête. Vous êtes condamné à la même amende que votre complice Rogue, soit deux mille gallions que nous exigeons dans la semaine et que vous ferez virer dans le coffre du Trésor Magique par Gringotts, tout comme lui. Dès que vous serez libéré de vos obligations scolaires, vous effectuerez également un mois de Travaux d'Intérêts Magiques à Sainte-Mangouste. Vous êtes dorénavant interdit de tout poste au Ministère de la Magie. Si vous désiriez entrer à l'Académie des Aurors pour suivre les traces de votre père et bien c'est raté, nous vous l'interdisons. Aucun déviant n'est accepté pour de tels postes prestigieux. En fait, je vous conseille de retourner dans le Monde Moldu car vous ne trouverez jamais d'embauche dans le Monde Magique, tout Sauveur que vous soyez.

Harry, vexé, serra les dents. Il n'en avait rien à faire de leur Académie des Aurors. Il n'avait émis ce souhait lors des sessions d'orientation que pour faire enrager Dolorès Ombrage qui avait été farouchement contre. En vérité, il ne savait pas trop ce qu'il voulait faire, n'ayant pris aucune décision encore. Mais à présent ce choix lui était de toute façon impossible.

— Dans notre grande mansuétude, nous avons pris la décision de ne pas vous rayer de la liste des sorciers britanniques. L'accès au Monde Magique vous sera toujours permis, mais je vous recommande la plus grande discrétion. Si vous étiez agressé, nous n'accepterions aucune plainte de votre part. Lord Malefoy et Albus Dumbledore ont également insisté pour que vous conserviez votre baguette et nous avons accepté d'accéder à leur requête.

— Et cette salope d'Ombrage ? Elle a quoi pour ses transgressions ? Rien, je présume ! lança alors Harry agressivement, à la surprise d'Albus et de Severus.

— Harry ! pesta le vieil homme en se dirigeant vers lui en deux grandes enjambées. Non ! Que fais-tu ?

— POTTER ! hurla Fudge dont le teint venait soudain de virer au pourpre.

— Monsieur Potter, cette affaire est du ressort des services internes du Magenmagot, affirma Amélia Bones d'une voix paisible en replaçant son monocle en or sur son œil. Par conséquent, il ne vous est pas permis d'en connaître les tenants et aboutissants.

— Mais oui, bien sûr… ricana le Gryffondor désabusé. Elle peut faire sa loi, torturer et menacer tout le monde à Poudlard en toute impunité, et on n'a rien à dire. C'est génial ! Vive la Justice !

— MONSIEUR POTTER ! JE NE VOUS PERMETS PAS ! s'égosilla Fudge au bord de l'apoplexie. VOUS AVEZ CINQ CENT GALLIONS D'AMENDE EN PLUS ! Amélia, mettez fin à ce cirque avant que je ne décide d'expédier ce trublion à Azkaban pour outrage à la cour !

— L'affaire a été jugée et une sentence rendue. L'audience est levée.

Madame Bones frappa un grand coup de son marteau de bois sur le tas posé en haut à droite de son pupitre. Percy Weasley se leva, le nez en l'air et avec la mine affectée d'un constipé chronique… du moins ce fut l'effet qu'il donna à Harry et même à Severus.

L'ex-Terreur des cachots avait bien essayé d'empêcher son Gryffon personnel d'ouvrir sa grande bouche pour déverser son fiel, mais lui tirer discrètement sur le bras n'avait pas eu l'effet escompté. À dire vrai, ça n'avait pas du tout interpelé le jeune homme emporté par sa fureur et sa haine du crapaud en rose.

— Cet esclandre n'était pas nécessaire, Potter ! pesta Severus en se levant du banc, alors que le Magenmagot quittait la salle d'audience numéro 10. Tu es content ? Tu as cinq cent gallions d'amende en plus ! Ça te fait deux mille cinq cent gallions, tu as une idée de ce que ça représente en argent moldu ?

— Nan et je m'en fous, j'ai de l'or plein mes coffres, murmura le Gryffondor à l'ancien Directeur des Serpentards. T'en fais pas, si tu veux je peux même payer ton amende.

— Je ne te demande rien, Potter ! répondit sur le même ton, un Severus très vexé d'être pris pour un miséreux.

Ce n'était pas que les professeurs de Poudlard gagnaient beaucoup, mais il avait un peu d'économies, merci bien. Evidemment, l'amende allait le saigner à blanc et vider la quasi-totalité de son coffre. Harry n'était visiblement pas conscient qu'il allait devoir débourser l'équivalent de douze mille cinq cent livres sterling… Une somme colossale pour n'importe quel sorcier ne s'appelant pas Lucius Malefoy ou Harry Potter….

— Pas ici, mes enfants, pas ici, ce n'est ni le moment ni l'endroit, je vous l'assure, trancha Albus Dumbledore en les prenant chacun par un bras.

— Albus ? Comment ça s'est passé « là-bas » ? Lucius a essayé de m'aider ? tenta le Maître des Potions.

— Moi je veux savoir ce qu'il s'est passé pour Ombrage, ronchonna Harry.

— Je vous dirai tout une fois que nous serons rentrés à Poudlard. Allez, venez… Inutile de nous attarder ici.

— Je pensais que Lucius serait resté pour me parler… fit alors l'ancien Mangemort, déconfit, tout en balayant du regard la salle à présent presque déserte.

— Croyez-moi, mon cher petit, Lucius Malefoy a tenté de vous aider. Il a pris des risques pour vous d'ailleurs, Severus. Il s'en est fallu de peu qu'il ne soit lui-même accusé de complicité ou du moins d'avoir dissimulé qu'il connaissait votre déviance depuis des années. Il a eu chaud à ses plumes comme disent les Moldus.

— Personne ne savait, Albus. Personne. Enfin si… Harry, juste Harry.

— Je sais, je sais, mes enfants, soupira le vieil homme d'une voix fatiguée.

Le trio quitta la salle d'audience et remonta les marches menant au 9ème étage afin de rejoindre l'ascenseur qui les mènerait à l'atrium au niveau 8 d'où ils pourraient prendre une cheminette pour rentrer à Poudlard. Severus, toujours tenu fermement par un bras par le vieux directeur, lui fit remarquer qu'il portait encore sa grande tenue du Magenmagot et son très voyant Ordre de Merlin, et que tous les sorciers présents dans la vaste pièce carrelée d'émeraude où ils venaient d'arriver n'avaient d'yeux que pour lui et par conséquent Harry et lui-même également. Après les révélations de la Gazette du Sorcier par le truchement de cette salope de Rita Skeeter, les sorciers n'allaient pas se priver de lorgner à loisir Harry Potter et Severus Rogue, les deux dépravés que le torchon quotidien du Monde Magique n'allait pas manquer de clouer encore au pilori dans l'édition suivante.

— Ne vous en faites pas, c'est une simple métamorphose de ma robe de ce matin, fit Albus pour répondre à la question du Serpentard.

— Vous en jetez, Professeur Dumbledore, s'amusa Harry au final pas démoralisé du tout par les évènements. Vous avez la classe, comme ça. L'or et le pourpre foncé, ça vous va vachement bien !

— Ah bon ? Tu trouves que c'est chic ? demanda le vieil homme en lâchant le bras de son ex-Maître des Potions pour se saisir d'une poignée de poudre de cheminette.

— Totalement ! Ils ont dû trembler dans leurs chaussettes, tant vous êtes impressionnant ! insista le fléau Gryffondorien.

Severus fronça les sourcils et leva les yeux vers le plafond après avoir lourdement regardé Harry pour lui faire comprendre qu'il exagérait. Le gamin semblait survolté et sans nul doute, les questions allaient fuser dès qu'ils seraient tous trois bien à l'abri dans le bureau directorial.

— Bureau du Directeur, Poudlard ! lança Dumbledore d'une voix claire et forte, tout en jetant la poudre dans l'âtre.

Il attrapa ses deux acolytes et les entraîna avec lui dans les flammes.


Au Terrier, ce matin-là de bonne heure, Molly s'affairait comme tous les jours à préparer le petit déjeuner d'Arthur qui n'était pas encore levé ou traînassait dans son bain – après tout, on était dimanche, il était bien normal de prendre ses aises. La matriarche s'efforçait de ne pas penser que la maison était déserte ces temps-ci et que les enfants vieillissant, ce n'était pas une chose qui allait changer. Autant s'y habituer…

Bill, l'aîné, travaillait pour Gringotts, le plus souvent en Egypte où il était un briseur de sorts très demandé et réputé pour son savoir-faire. Par deux fois, la rouquine avait tenté d'organiser un mariage pour lui, mais elle s'était à chaque fois fait envoyer sur les roses, pour ne pas employer un terme plus vulgaire. La famille Weasley avait beau être de sang-pur, le fait qu'ils soient plus que fauchés et vivent dans une baraque faite de bric et de broc n'aidait pas du tout ses rêves matrimoniaux par procuration.

Le jeune Weasley aux cheveux longs, coiffure habituelle des héritiers de sang-pur, s'était bien gardé de raconter à sa tyrannique maman qu'il avait des vues sur une jeune française quart de vélane employée à Gringotts au Caire et qu'il avait d'ailleurs commencé à sortir « à la moldue » avec elle. Cette liaison, cachée et honteuse pour les sorciers britanniques, le rendait parfaitement heureux et il espérait rester le plus longtemps possible hors des griffes et de l'inquisition maternelle. En un mot : le plus loin possible de l'Angleterre.

Le second fils, Charlie, rentrait encore moins souvent à la maison que son aîné qui devait parfois rendre des comptes à Gringotts Londres. Lui, était dresseur de dragons et travaillait dans une réserve en Roumanie. Rien ne l'obligeait à rentrer à Loutry Sainte-Chaspoule, sinon les exigences des fêtes familiales comme Noël et Pâques… entre autres.

Les efforts maritaux de Molly n'avaient pas été plus couronnés de succès pour Charlie que pour Bill. Il fallait dire que le garçon n'avait en rien facilité les efforts de sa mère – il savait très bien qui était responsable de ces initiatives – et il ne s'était même pas présenté aux rencontres organisées pour lui avec des jeunes filles « propres sur elles » comme Fred et George disaient. En bref, leur façon de dire : des boudins n'ayant que leur sang-pur et la renommée de leur famille (et leur or) comme avantages.

Le second fils Weasley cachait un inavouable secret qu'il s'était promis depuis l'adolescence de ne jamais révéler à quiconque de sa famille, et même à personne au Royaume-Uni : il était gay et entretenait une liaison suivie avec l'un de ses jeunes collègues de la réserve de dragons, un tchèque blond aux yeux bleus portant des lunettes et répondant au prénom exotique de Zlatan.

Percy avait choisi de prendre un appartement tout près du Ministère. Il avait prétexté devoir être disponible à tout moment pour le Ministre Fudge dont il était l'âme damnée – heuuu… le secrétaire particulier/assistant/bonne à tout faire/Elfe de Maison… ainsi que celui d'Amélia Bones pendant les sessions du Magenmagot.

Flattée, Molly l'avait laissé prendre son envol. Percy était ambitieux, plus qu'Arthur c'était indéniable. En outre, le jeune homme était très attaché aux valeurs traditionnelles et elle pensait qu'elle aurait moins de mal à marier celui-là, une fois les aînés casés. Parce qu'en plus, il fallait si possible, les marier dans l'ordre !

Percy n'était pas à la veille de se marier et Fred et George encore moins ! Mais pour les jumeaux, c'était plutôt un avantage et les deux lascars espéraient bien qu'on les oublie quelques années encore… voire quelques décennies.

Molly, voyant les difficultés auxquelles elle devait faire face, s'était résolue à utiliser son arme secrète : Harry Potter. Marier sa fille unique Ginny au Sauveur du Monde Magique aurait été le coup d'éclat lui permettant de redorer le blason familial. Et surtout les prétendantes pour les garçons se seraient alors précipitées. Malheureusement, le petit idiot n'avait rien compris et avait refusé tout de go cette union pourtant avantageuse – Sirius en avait lui-même convenu et Remus aussi. Voilà ce que cela donnait de laisser des Moldus élever des enfants magiques ! Ils ne comprenaient rien aux traditions et se précipitaient pour commettre des mésalliances indignes au nom du soi-disant sacro-saint « amour ». Pffff ! Encore une chose stupide et inutile dont les Moldus s'encombraient ! Et elle s'en fichait bien qu'Arthur ne soit pas d'accord avec elle. De toute façon, lui et ses stupides idées progressistes…

Autant dire que l'ambiance au Terrier depuis le refus scandaleux d'Harry n'était pas au beau fixe. Les jumeaux qui venaient parfois – souvent – se mettre les pieds sous la table n'étaient pas revenus depuis plusieurs semaines, prétextant un travail fou.

Tout en remuant d'une fourchette alerte les œufs brouillés qui coagulaient dans la poêle, la mère de Ron songea encore une fois à ses malheurs récents. La veille au soir, Minerva McGonagall avait appelé par cheminette pour expliquer que Ronald venait d'être renvoyé quinze jours de l'école par un Albus Dumbledore furieux et il y avait à peine une heure, elle avait rappelé pour annoncer que le Gryffondor rebelle se trouvait présentement dans le Poudlard Express en direction de Londres et sa gare de King's Cross.

La Directrice des Gryffondors n'avait pas manqué de révéler à la rouquine honteuse que son dernier fils avait mis la pagaille à Poudlard et surtout dans sa propre Maison. Trois jeunes enfants effrayés par ses menaces avaient demandé à quitter l'établissement aussitôt et un professeur se trouvait sur la sellette et menacé de renvoi, après que Ron l'eût dénoncé pour une chose relevant du domaine personnel dont il avait eu incidemment connaissance. Et il ne fallait pas oublier Harry Potter qui allait peut-être être renvoyé à cause de lui également.

Minerva n'avait pas voulu révéler les détails par cheminette et cela troublait fort la rouquine. Elle sentait confusément qu'on lui cachait quelque chose qu'elle n'allait pas du tout aimer. Alors qu'elle versait les œufs brouillés dans l'assiette contenant déjà deux tranches de bacon et s'apprêtait à servir le thé à son époux, un hibou entra par la lucarne entr'ouverte à cet usage. Il portait deux journaux roulés serrés dans un papier kraft : la Gazette du Sorcier comme chaque jour, plus le Sorcier du Dimanche. Le volatile se posa sur la table et tendit une patte obligeante en vue de se faire délester de son fardeau. Molly détacha donc les deux rouleaux et les posa sur la table sans un regard pour eux. Elle entreprit de fouiller les poches de son tablier à la recherche des dix noises pour le paiement des deux journaux. Les deux petites pièces de bronze dénichées et lâchées dans la bourse que le rapace portait à la patte, Molly posa enfin son large fessier sur une des chaises dépareillée de la cuisine et commença à déplier la Gazette, non sans avoir auparavant hurlé « ARTHUR ! C'EST SERVI ! » se souciant peu qu'il entende ou pas.

La sorcière allait porter à ses lèvres sa tasse de thé qui refroidissait sur la table depuis un bon moment, quand son attention fut capturée par les gros titres. Comme les élèves de Poudlard qui avaient découvert le torchon de la mère Skeeter avant elle, Molly, les yeux écarquillés et le cœur battant d'horreur et d'indignation, découvrit toute l'ignominie à laquelle Severus Rogue et Harry Potter s'adonnaient depuis des semaines voire des mois, si ce que Rita disait était vrai.

À présent, la mère de Ron comprenait pourquoi Minerva n'avait pas voulu lui donner de détails et pourquoi son dernier fils semblait s'être mis dans les ennuis jusqu'au cou. Par Merlin, révéler une telle chose sur Harry Potter le Sauveur et sur un professeur comme Severus Rogue n'avait pas dû lui attirer la bienveillance d'Albus Dumbledore qui passait tous leurs caprices à ces deux mécréants indignes du Monde Magique.

Molly, les deux mains crispées sur les pages ouvertes du quotidien, allait prendre son souffle pour hurler sur son époux lorsque celui-ci, l'air détendu et parfaitement serein, fit son apparition et s'installa à sa place habituelle, devant son assiette pleine. La rouquine, en entendant le raclement de la chaise sur le plancher usé, écarta le journal de son visage et s'écria :

— Arthur ! Il faut que tu lises tout de suite la Gazette ! C'est absolument épouvantable, un scandale sans précédent ! Quand je pense… qu'il a refusé… Le petit rascal ! Le sale petit jocrisse !

— De quoi parles-tu, Molly ? Et surtout de qui ? demanda l'époux blasé qui soulevait à présent la vieille théière jaune ébréchée.

— Regarde ! se contenta de répliquer la furie, en lui collant le journal sous le nez.

Arthur reposa la théière en soupirant et accepta de se saisir de la Gazette, que sa « pas si tendre épouse que ça » lui tendait agressivement. Son sang se figea quelque peu dès qu'il aperçut les gros titres. Le cœur battant, n'osant croire ce qu'il venait d'apercevoir, le sorcier prit le temps de lire soigneusement l'article qui avait horrifié sa femme et ne put s'empêcher de soupirer en découvrant que son fils Ron y était plusieurs fois mentionné. Il pinça les lèvres et son regard se durcit lorsqu'il comprit le rôle odieux que son dernier rejeton avait eu dans l'affaire. Dumbledore avait dû avoir une soirée bien occupée, s'il n'avait pas encore pris le temps de lui envoyer un coup de cheminette pour le mettre au courant…

Cette histoire de Brigade Inquisitoriale avait toujours paru suspecte à Arthur, et il avait tiqué lorsque Ron avait émis le souhait d'en devenir membre. Bien sûr, Molly avait été ravie de l'aubaine. Tout ce qui pouvait rendre ses enfants populaires à Poudlard était le bienvenu. Elle avait déjà eu des Préfets, Préfet-En-Chef et Capitaine de Quidditch, mais ce nouveau titre-là était le bien venu. Dolorès était connue au Ministère où elle avait une place enviée et son appui ultérieur pour obtenir un poste important ou une faveur n'était pas à dédaigner.

Arthur reposa sur la table le journal qu'il venait de replier. Il se versa enfin une tasse de thé et se saisit ensuite de son assiette et de ses couverts sous l'œil inquisiteur de sa chère moitié.

— Je serais toi, Molly, je ne prendrais pas les divagations de cette chipie de Rita pour or comptant. S'il y avait un problème quelconque avec Ron ou Harry, Dumbledore nous aurait prévenus, fit-il d'une voix sereine en sucrant sa tasse de thé.

— JUSTEMENT ! s'énerva la chipie échevelée par l'indignation. Si hier soir tu t'étais pas enfermé dans ta fichue grange au lieu de venir te coucher à une heure décente, tu aurais été à la maison pour recevoir l'appel de cheminette de Minerva concernant Ron ! Albus l'a renvoyé hier pour quinze jours. Il aurait soi-disant semé la zizanie à Gryffondor et fait fuir de l'école trois élèves. Pfff ! Des âneries, j'en suis sûre ! Sûrement des premières années nés-moldus incapables de s'adapter et on met ça sur le dos de ce pauvre Ronnie !

— Je doute qu'Albus se soit laissé manipuler, Molly. Si Ron est sous le coup d'une suspension de deux semaines, c'est qu'il a fait quelque chose de très grave.

— Il a révélé la vérité sur Harry et sur ce sale Mangemort de Rogue, VOILÀ CE QU'IL A FAIT ! s'emporta la rouquine, les deux mains agrippées au dossier d'une des chaises de la cuisine.

— As-tu seulement vu Severus et Harry se comporter de façon suspecte lorsque nous étions dans la maison de Sirius, cet été ? demanda le chef de famille en découpant soigneusement son bacon en fines lamelles, histoire de passer le temps.

— Non, consentit de mauvaise grâce Molly. Mais ça ne veut rien dire et tu le sais ! Ils ont passé leur été à sortir dans le Monde Moldu et ils ne rentraient même pas des week-ends entiers. J'ai toujours été certaine qu'ils avaient des choses à se reprocher. Et je ne suis pas la seule, puisque même la Gazette est d'accord avec moi.

— Rita a toujours embelli ses articles et tu le sais, Molly, tenta le rouquin dans un effort d'apaisement et de minimisation des évènements.

— Ces infos sont précises et en plus Minerva m'a fait comprendre qu'il se passait des choses entre Harry et Severus à Poudlard. Je parie que Ron a vu des horreurs et que c'est pour ça qu'il est renvoyé : il ne faut pas qu'il parle ! Albus a toujours été aveugle dès que Potter ou Rogue étaient concernés. Ma main au feu qu'il les couvre depuis des années !

Afin de distraire sa femme, Arthur, entre deux bouchées de son petit déjeuner, lui demanda de bien vouloir lui raconter en détail les deux coups de cheminette que Minerva McGonagall avait passés depuis la veille. Lorsque Ron rentrerait, en début d'après-midi visiblement, il l'interrogerait pour avoir le fin mot de l'affaire, ou du moins un son de cloche, le second il l'aurait avec Albus certainement sans tarder.

Une fois son venin déversé, Molly ne se calma pas pour autant. Elle était en croisade et rien n'allait l'arrêter !

— Je vais convoquer tous les enfants pour un conseil de famille ! Nous devons prendre une décision officielle pour Harry. Il ne va pas être possible de continuer à le fréquenter sans que cela ne nous retombe dessus et à Remus et Sirius aussi. Harry Potter et Severus Rogue sont des parias et tous leurs proches vont être montrés du doigt pareillement. Je te rappelle Arthur que le soutien à des déviants connus ou condamnés est interdit sous peine d'amende.

— Comme si je ne le savais pas ! maugréa le rouquin de fort mauvaise grâce. Fais ce que tu veux, mais je ne cautionne pas du tout cette initiative, je te préviens…

Molly s'avançait en terrain mouvant sans le savoir et Arthur, qui la suivait attentivement du regard par-dessus ses lunettes cerclées d'or, était plus qu'excédé. La tension et les contrariétés accumulées depuis des mois à cause de l'attitude de son épouse atteignaient présentement un niveau dangereux encore jamais atteint. Il était au bord de l'explosion et de la révolte, et au moindre faux pas de la sorcière, il allait lui montrer qui était le maître dans cette maison. Après tout, il n'était jamais trop tard pour bien faire…


Dans le bureau directorial, Albus Dumbledore et Severus Rogue s'efforçaient de calmer Harry qui déambulait nerveusement dans la pièce en vociférant contre Ombrage. Le Garçon-Qui-Avait-Survécu avait refusé de s'asseoir et laissait libre cours à sa colère et son ressentiment.

— Si je la vois, je l'Avada Kedavratise ! hurla-t-il en brandissant sa baguette et en faisant des moulinets avec elle sous les nez goguenards des anciens directeurs peints.

— Harry ? Cesse un peu tes enfantillages, veux-tu, s'énerva Severus en se servant une tasse de thé qu'un Elfe venait d'apporter. On a compris que tu es en colère, ce n'est pas la peine d'en rajouter ! Range-moi cette satanée baguette et assieds-toi avant de blesser quelqu'un, voire pire !

Le jeune Gryffondor s'immobilisa au milieu du bureau en ronchonnant que le monde était trop injuste. La mine boudeuse, il consentit à s'asseoir tout en regardant son amant de travers, afin de lui faire comprendre qu'il n'appréciait pas son intervention.

Albus tendit à son jeune élève un plateau contenant des sandwichs assortis et bien appétissants. Le rebelle accepta de se servir et arrêta son choix sur un sandwich concombre/œuf dur. Pendant qu'Harry attaquait l'encas, Severus lui servait et sucrait une tasse de thé. Une fois le Gryffondor rassasié, il serait plus calme et on pourrait lui parler sans qu'il ne saute partout comme un pou sur une tête propre.

— Mange, Harry, insista le directeur de Poudlard d'un ton apaisant. Je vais vous raconter ce qu'il s'est passé dans la salle des débats.

Le vieil homme rajouta deux autres sucres dans sa tasse pourtant déjà bien édulcorée et ostensiblement tourna bruyamment sa cuillère, la faisant tinter contre la porcelaine fleurie. Severus sirotait son thé, attendant que son supérieur se décide à révéler ses informations. Harry, lui, mâchouillait machinalement, son regard vert émeraude vissé sur les billes bleues du vénérable mage.

— Mes enfants, Dolorès Ombrage est bien celle qui a révélé toute l'affaire à Miss Skeeter…

— JE LE SAVAIS ! s'exclama Harry, postillonnant des morceaux d'œufs durs par la même occasion.

— Harry, ça suffit ! Tiens-toi tranquille, tu n'as pas trois ans ! trancha le Maître des potions en levant un sourcil agacé. Je te préviens, si tu ne te calmes pas, je vais te faire avaler un Philtre de Paix !

Comme s'il n'avait pas été interrompu, Dumbledore poursuivit son récit, un sourire indulgent sur les lèvres.

— Selon les Aurors Tonks et Albertus, Rita aurait reçu hier soir un appel de cheminette de notre inquisitrice qui semblait extrêmement pressée et désireuse de raconter un scandale bien juteux. Elle a donc tout révélé avec force détails et nous savons que son histoire a fait les beaux jours de la Gazette de ce matin. Comme vous l'avez appris pendant le procès, c'est interdit. Dolorès a donc été sanctionnée. Elle est sous le coup d'une suspension du Magenmagot pour une durée de six mois. Je ne vous cache pas que Cornélius Fudge et Amélia Bones étaient furieux. Elle va être bien surveillée et au moindre faux pas, il se pourrait bien qu'elle perde également sa place de Grande Inquisitrice.

Un petit sourire sournois orna le visage du vieil homme pendant un court instant et il en profita pour glisser dans sa bouche deux bonbons au citron bien acidulés. Ces menaces pesant sur Ombrage étaient vraiment les seules bonnes nouvelles qui étaient apparues à la suite du procès. Albus confirma encore une fois les tentatives de Lucius pour minimiser le délit, tout comme les siennes d'ailleurs.

— Lucius Malefoy a été questionné à votre sujet, Severus. Il a dû faire le serment magique qu'il n'était pas au courant de votre déviance, comme Cornélius le dit si bien. J'ai d'ailleurs annoncé à ce moment-là que je doutais fort que Lord Malefoy ait eu connaissance de quoi que ce soit, n'ayant moi-même jamais rien remarqué, alors que je vous connais depuis que vous avez tous deux onze ans, et que je travaille avec vous depuis dix-huit ans, Severus. J'ai également précisé que j'avais passé les vacances d'été avec vous deux et qu'il n'y avait jamais eu de ma part la moindre suspicion. Ceci étant dit, j'ai insisté que je doutais fort que Lucius soit dans la confidence si moi-même, je ne l'étais pas. Evidemment, Lord Malefoy a aussitôt abondé dans mon sens et je dois avouer que plusieurs membres du Magenmagot étaient plus que remontés et exigeaient son interrogatoire sous Véritasérum pour lever toute suspicion à son égard. Certains m'ont bien regardé de travers, se demandant si je disais la vérité ou si je mentais, mais ils n'ont pas osé insister ni même réclamer la même mesure.

Le vieux directeur ne précisa pas qu'il n'avait, quant à lui, jamais eu aucune suspicion : il n'avait eu que des preuves sous les yeux depuis le début. Sa déclaration avait quand même fait grande impression sur les membres du Magenmagot et Lucius avait finalement été laissé tranquille. Dès ce moment-là, le blond n'avait plus osé intervenir de trop dans les débats. Plusieurs fois, il s'était pincé les lèvres comme pour se retenir de parler, ne voulant pas se mettre dans une situation périlleuse. Albus, lui, avait un peu plus osé, personne n'avait mis sa parole en doute et son grand âge le mettait à l'abri de toute suspicion quant à son orientation sexuelle. Le bruit courait depuis des décennies qu'il avait été fiancé une fois, lorsqu'il était très jeune et que la promise était morte d'une épidémie quelconque. On disait aussi qu'il n'avait jamais voulu se lier à une autre jeune sorcière, ne pouvant oublier sa fiancée. C'était très romantique et cela avait fait rêver plusieurs générations de sorcières obnubilées par le « grand amour » conté dans les « légendes moldues » autrement dits les romans d'amour à l'eau de rose trouvables aisément dans les commerces moldus.

La vérité était moins romantique… Albus s'était retrouvé piégé par un contrat de mariage passé entre ses parents et ceux de la sorcière en question alors qu'ils n'étaient que des adolescents. La fille était laide et le pauvre garçon avait fait des pieds et des mains pour échapper à cette désastreuse union. Merlin l'avait entendu, puisque la terrible épidémie de « petite draguiole » de 1899 qui avait frappé le Monde Magique Britannique avait emporté la demoiselle avant même qu'elle eut terminé ses études à Poudlard. Albus avait été libéré du contrat de mariage et s'était bien juré de ne plus jamais se laisser embarquer dans une telle aventure. C'était pour cette raison qu'il avait toujours fait barrage aux demandes reçues pour Harry, lui laissant quand même la possibilité d'accepter ou non Miss Weasley, étant donnés ses liens avec cette famille.

À cette époque, le vieux sorcier ignorait que les penchants d'Harry étaient les mêmes que les siens et ceux de Severus…

— Comme vous vous en doutez, poursuivit le directeur, vos sanctions auraient pu être encore plus terribles…

Un ricanement désabusé quitta alors la bouche du Maître des Potions pour indiquer tout le bien qu'il pensait de cette constatation.

— Encore plus terribles ? Non mais, Professeur Dumbledore, vous rigolez ou quoi ? Vous avez vu tout ce qu'ils ont fait à Sev' ? l'interrompit grossièrement Harry Potter qui venait de manquer d'avaler son thé de travers. Il est chassé de Poudlard, il a perdu sa place de professeur et celle de directeur de Serpentard, on lui pique son or, on l'envoie bosser gratis à Sainte-Mangouste, il a plus le droit de revenir dans le Monde Magique, il a plus le droit à un coffre à Gringotts, il est plus considéré un sorcier officiellement… le seul truc qu'on lui a laissé, c'est sa baguette !

— Je sais, Harry. Et crois-moi… ils voulaient également la lui prendre et lui interdire d'en posséder une autre. La seule chose qui les a fait reculer c'est ma colère et les protestations de Lucius. Nous avons insisté sur les capacités extraordinaires en potions de Severus qui est, je te le rappelle, le plus jeune Maître des Potions du Monde Magique Britannique, et en plus le meilleur. C'est ce qui leur a donné l'idée d'exploiter ses talents pour un Travail d'Intérêt Magique… Sans cette mesure, je ne suis pas certain que nous aurions réussi.

— Et il va vivre de quoi ? insista Harry. Oui, je veux dire une fois chassé chez les Moldus, il fera quoi ? J'ai jamais entendu Mione ou McGo me dire que le diplôme de Poudlard donnait une situation dans le monde moldu… À part ce foutu papier d'équivalence pour faire des études supérieures. Sev' va pas faire des études à son âge, nan ?

— Je suis là et je peux répondre, Harry…

— Oui, ben vas-y ! Tu vas faire quoi en partant ? Et tu vas aller où, hein ? Si tu pars, je pars avec toi !

— Tu as tes études à terminer, Harry, le coupa Severus, le Professeur Dumbledore et Madame Marchebank se sont démenés pour que tu gardes ce droit, ne gâche pas tout. Avec ton papier d'équivalence, tu pourras aller à l'université moldue. Sans… tu feras quoi ? Et tu oublies qu'il y a des chances que ton parrain te renie et te chasse… Et pour répondre à ta question, je t'apprends que j'ai une maison dans le Yorkshire.

— Le Yorkshire, hein ? Si j'en crois Tante Pétunia, c'est un endroit oublié de Dieu et sûrement de Merlin ! Elle nous a assez raconté que c'était horrible et que les maisons étaient des ruines quand elle y vivait dans sa jeunesse. Elle avait presque traumatisé Dudley qui voulait même pas qu'Oncle Vernon traverse le comté en voiture ! Je sais que tu vivais dans la même ville, alors j'en déduis que ta maison doit être en super état… j'me trompe ?

Les joues de l'ancien Mangemort se colorèrent légèrement et involontairement de rouge, ce qui surprit Harry. Il était plus que rare que le Serpentard se laisse ainsi déstabiliser. À dire vrai, c'était même la première fois que le jeune homme voyait ça.

— Je m'en doutais… soupira le Gryffondor à présent calmé. Bon admettons qu'elle soit en assez bon état pour que tu puisses y habiter à l'année, tu vivras de quoi ? Bosser à Poudlard pendant dix-huit ans ouvre des droits au chômage moldu ?

— Non, Harry, répondit Dumbledore. Malheureusement, l'expérience de Severus dans le Monde Magique ne lui servira à rien chez les Moldus. D'ailleurs, vous serez toujours tous deux soumis au Secret Magique que vous ne pourrez briser.

Le jeune Sauveur baissa la tête en proie à une profonde réflexion. Si Severus n'avait pas assez d'or pour vivre le temps que lui-même termine ses études et le rejoigne, il pourrait toujours lui en donner, ce n'était pas un problème. Pour le travail, peut-être que l'ancien professeur pourrait donner en cachette un coup de main aux jumeaux Weasley sur des potions leur posant problème. Ce serait une question à leur poser. Sinon, il y aurait toujours l'allée des Embrumes… Il y avait plein de commerces par là. Sûrement que certains vendaient des potions et que les talents de Severus ne seraient pas perdus. C'était une chose à étudier… ils verraient en temps et en heure…

— Professeur Dumbledore ? Je pourrai voir Severus quand il sera parti ? Je veux dire… le week-end par exemple. Je… je me vois pas rester ici et ne plus avoir de contacts ou de nouvelles d'ici les vacances de Noël.

— Nous nous arrangerons, Harry. Nous trouverons un hibou à Severus avant son départ définitif et ainsi il pourra communiquer avec toi en toute discrétion.

Harry hocha la tête et songea qu'il avait Hedwige aussi. Elle ne rechignerait pas à faire le voyage pour porter les lettres de son jeune maître. D'ailleurs, il allait se rendre sans trop tarder à Gringotts pour retirer une bonne somme d'or afin d'être tranquille un moment et de pouvoir pallier aux imprévus éventuels. Oui, c'était une bonne idée. Et il allait en parler à Hermione également, elle aurait sûrement des idées inédites ou des solutions pour Severus. Mione connaissait tellement plus de choses qu'eux sur le monde moldu…

— Albus, qu'allez-vous faire d'Harry après mon départ ? demanda l'ex-professeur Rogue en se décidant à prendre un autre sandwich.

— Cette nuit, il restera avec vous, mon petit. Et pour les suivantes, nous lui trouverons une chambre dans un couloir discret, là où personne n'ira le dénicher. Je pense à l'aile droite du second étage[2], par exemple. Depuis qu'on y avait logé Touffu il y a quelques années, ce couloir est fui comme la peste moldue par les élèves. J'avoue que ça va nous arranger…

Harry baissa les yeux et ne put retenir un profond soupir. La séparation toute proche l'angoissait terriblement et il ne savait pas comment il allait réussir à passer l'année dans le château, au milieu des élèves hostiles, de Ron et Ginny et en supportant le rejet de sa propre Maison. Par la barbe de Merlin, ça allait être l'enfer… Et si Remus et Sirius s'y mettaient également, le ciel allait en plus lui tomber sur la tête…


[1] Seules les cheminées d'Albus, de Poppy et de Dolorès sont reliées au réseau de cheminette, afin d'éviter que les élèves n'en abusent. Les autres cheminées du château n'ont accès qu'au réseau interne de Poudlard. Par exemple, les salles communes ne sont reliées qu'aux bureaux de leurs Directeurs de Maison respectifs, à l'infirmerie et au bureau de Dumbledore.

[2] Harry Potter à l'école des sorciers, audio book édition française, ebook Kindle édition française, édition papier Folio Junior. Dans la VO (et le film) ils disent 3ème étage, le RDC comptant pour un étage au Royaume-Uni.