Bêta : Mokonalex

Elfe de Maison/Assistante : Mirabelle31, vaguement dispo entre deux vacations.

Note de l'auteur : Je suis de nouveau grand-mère depuis le 13 mai 2018 d'une petite Alice. Ça ne nous rajeunit pas... Onze ans déjà que je sévis dans la fanfiction. ^^ Et le chapitre suivant en est à la moitié, on croise les doigts que je puisse rapidement le terminer.

Bonne lecture !


Harry et Severus s'immobilisèrent quelques secondes en percevant l'hostilité sur les visages des clients de la banque. Le Serpentard qui avait l'ouïe fine entendit même quelques paroles insultantes à propos de leur orientation sexuelle. Un gros sorcier rougeaud les toisa, et alors qu'Harry s'avançait vers un guichet libre, l'homme osa cracher sur le sol à son passage.

Le geste fit d'instinct Severus sortir sa baguette de la manche de sa robe. Mais avant qu'il ne puisse la pointer sous le nez du malotru, Harry avait tendu la main et fait un geste d'apaisement vers son amant. Il n'était pas utile d'en venir aux baguettes ou aux mains et d'aggraver leur cas.

La voix de crécelle de Gripsec résonna dans le hall de la banque :

— Si vous crachez à Gringotts, vous nettoyez ! TOUT DE SUITE !

Le bruit de ses petits pas pressés se fit entendre sur le carrelage et le gobelin habituellement chargé des wagonnets apparut et se dressa de toute sa petite taille devant le sorcier cracheur.

— Si vous ne nettoyez pas, nous ferons appel à un sorcier de ménage mais nous vous facturerons l'intervention trois gallions !

— Trois gallions ! C'est du vol, protesta l'obèse en robe grise.

— Quatre si vous protestez ! Et si vous recommencez, nous fermerons vos coffres.

— Pour un crachat ? Ce sont des criminels ! Je suis dans mon droit !

— On ne crache pas à Gringotts ! Peu importe la raison ! Et les Gobelins ne reconnaissant pas les jugements sorciers de cette nature, ces clients sont les bienvenus. Monsieur Potter, Professeur Rogue, approchez-vous du comptoir 5 et je vais traiter vos opérations.

Severus fit un petit signe de tête sec au gobelin et redressa ses épaules, toisant le malotru comme s'il était une crotte de noueux. Harry se contenta de lui jeter un vague regard, faisant presque comme s'il n'existait pas. Alors que le Serpentard traversait le hall, un sorcier très pressé le bouscula violemment. Severus, choqué, s'immobilisa et se retourna pour confirmer l'identité du maladroit. Une longue tignasse blond platine étincela deux secondes lorsque le soleil s'y refléta à l'ouverture de la porte donnant sur le Chemin de Traverse.

Lucius ? Mais pourquoi cette bousculade ?

— Sev' ? Mais pourquoi ce con t'a bousculé ? Je croyais que c'était ton meilleur ami ? chuchota Harry.

Le potionniste allait répondre qu'il ne comprenait pas quand il sentit une pesanteur étrange dans la poche de sa robe. Il glissa alors sa main à l'intérieur et perçut sous ses doigts la rondeur d'une bourse pleine. Il reconnut le toucher des pièces d'or à travers le cuir de dragon utilisé pour les bourses les plus chères. Lucius n'utilisait que ce genre de bourse…

Severus en fut aussitôt très vexé. Son ami le prenait-il donc pour un miséreux, pour lui faire ainsi l'aumône et d'une telle façon ? En le bousculant anonymement en plus ?

Son regard s'assombrit et sa mâchoire se serra.

Alors que nos deux sorciers se dirigeaient vers le comptoir 5 recommandé par Gripsec, Ragnok Pattes-de-Poule, le directeur, glissa sa tête hideuse par la porte qu'il venait d'entrebâiller et héla le gobelin les précédant.

— Gripsec, envoyez-les-moi. Je m'occupe de cette affaire. Nous avons à parler.

Harry hâta le pas et se dirigea vers Ragnok, trop content que les autres sorciers ne puissent assister à l'infâmie : le paiement des amendes et la fermeture du coffre de Severus.

Dès qu'ils furent entrés dans le bureau, le jeune sorcier poussa un soupir de soulagement.

— Merci. Ce sera plus discret ici.

Les deux gobelins hochèrent la tête en silence et Ragnok pointa deux chaises du doigt, indiquant par ce geste que les visiteurs pouvaient s'asseoir.

Le bureau était sombre. Les murs étaient de bois brun foncé, sans doute du chêne selon l'avis d'Harry. Des rayonnages contenaient des centaines de parchemins roulés et des chemises sanglées à la façon des dossiers moldus. Ragnok trônait sur un siège de cuir doré à roulettes et disparaissait quasiment derrière un immense bureau de chêne ciré de facture très sobre. Les chaises étaient très inconfortables – juste une planche de bois comme assise – on n'avait vraiment pas envie d'y passer des heures.

— Bienvenue à Gringotts, Messieurs. Nous avons reçu une circulaire du Ministère indiquant que vous deviez virer certaines sommes au Trésor Magique et que nous devions fermer votre coffre, Professeur.

Comme toujours, Ragnok allait droit à l'essentiel. Le temps était de l'argent, selon l'adage moldu, et il mettait un point d'honneur à l'appliquer.

— J'ai de l'or, donc payez ces voleurs, ronchonna Harry, et si Severus n'a pas assez dans son coffre, prenez la somme dans l'un des miens.

— Harry… j'ai de quoi payer ! protesta le Serpentard.

— Le Professeur Rogue a de l'or en quantité suffisante dans son coffre, mais pas plus. Malheureusement, Professeur Rogue, poursuivit le directeur de la banque, il ne vous restera quasiment plus rien, une fois l'amende payée.

Un parchemin à la main, le Gobelin attira vers lui un boulier antique et se mit à pousser et tirer les boules de bois à toute vitesse. Intrigué par cet artefact étrange, Harry le regarda faire avec intérêt. Severus avala sa salive d'appréhension. Il allait avoir sans tarder la confirmation de son indigence future.

— Après virement au Trésor Magique des deux mille gallions de l'amende, Professeur Rogue, il vous restera cinquante-six gallions, cinq mornilles et dix-neuf noises[1].

— Par Merlin, murmura le sorcier en se frottant le visage.

— Laisse tomber, Sev', j'ai de l'or, ne t'en fais pas !

— À ce propos, Monsieur Potter, j'ai une fâcheuse nouvelle à vous apprendre, annonça alors le gobelin avec un rictus carnassier.

Le jeune Sauveur en disgrâce tourna brusquement la tête vers lui, et il sentit son compagnon se raidir sur la chaise d'à-côté. Mais qu'est-ce que le Ministère avait encore inventé pour leur pourrir la vie ? Parce qu'il en était persuadé, ces charognards homophobes n'allaient pas les laisser s'en tirer à si bon compte.

— Laquelle ? demanda-t-il, d'une voix polaire.

— Croyez bien, Monsieur Potter, que nous n'y sommes pour rien. C'est une vieille loi magique, qui n'est plus appliquée depuis des décennies, voire des siècles… Elle est tombée en désuétude mais n'a jamais été abolie. Quelqu'un au Ministère a fait un peu de zèle et nous a envoyé une circulaire nous rappelant que nous devions vous appliquer cette loi.

— Accouchez ! s'énerva Harry, qui venait de prendre une vilaine teinte pourpre à cette annonce.

— Vous et votre ami avez été condamnés à une peine dite infâmante et pour cela, chassés du Monde Magique pour l'un et limité au maximum pour l'autre c'est-à-dire, vous, Monsieur Potter. Selon la loi de Hypocritus le Zélé, datant de l'an 999 et toujours en vigueur, votre condamnation annule tous les héritages auxquels vous pouviez prétendre ainsi que les legs déjà obtenus. J'en suis désolé, mais on ne nous laisse pas le choix. Nous devons donc reprendre tout l'or que vous avez reçu depuis 1981.

— Quoi ? s'horrifia le Gryffondor, les deux mains crispées sur le rebord de sa chaise. Vous voulez dire que tous les coffres que j'ai reçus en héritage au cours des années, on me les reprend ?

— C'est bien cela. Il vous restera juste le coffre de votre famille, le n°687, qui appartenait à votre père et avant lui à votre grand-père et votre arrière-grand-père. Votre grand-père Fleamont Potter avait fait fortune et donc le coffre était bien plein, mais votre père n'a jamais travaillé un seul jour de sa vie, bien qu'il ait débuté une formation d'Auror. Et comme il menait grand train et entretenait ses amis, le niveau de l'or a rapidement baissé dans le coffre. L'amende de deux mille cinq cents gallions que vous devez payer va également vous laisser dans la gêne.

Le gobelin se tut alors et regarda fixement le jeune homme, étudiant sa réaction. Severus Rogue, à l'annonce de cette odieuse nouvelle, avait agrippé le bras d'Harry comme pour l'empêcher de faire un esclandre. Il connaissait bien son Gryffondor qui partait au quart de tour à la moindre attaque verbale ou physique. Mais Harry, choqué et totalement déboussolé était devenu d'une pâleur mortelle. Il réussit juste à bredouiller quelques mots à Ragnok, d'une voix blanche.

— Combien ? Combien il va me rester ?

À nouveau, le boulier fut sollicité et les dents serrées, Harry attendit les quelques secondes nécessaires au gobelin pour avoir la réponse.

— Monsieur Potter, je suis au regret de vous annoncer qu'il ne vous restera plus que cent cinquante-quatre gallions, seize mornilles et huit noises[2] dans votre coffre.

— C'est tout ? Ça ne me semble pas beaucoup… ça fait combien en argent moldu ?

— Dans les sept cent soixante-dix livres sterling, Monsieur Potter.

— QUOI ?

Harry, outré, avait bondi hors de sa chaise tel un diable d'une boite. Une main ferme l'obligea à réintégrer son siège.

— Pas d'esclandre, Potter !

— Mais Sev'… tu te rends compte, tu n'as plus rien, je n'ai presque plus rien non plus. On est dans une bouse de dragon colossale ! Quand je pense que je viens de dépenser une centaine de gallions au Dragon Vert… Si j'avais su…

Le repas fantaisiste terminé il y avait moins de trente minutes lui pesa soudain terriblement sur l'estomac.

— Je croyais James Potter aussi riche que les Malefoy, demanda Severus, intrigué. Il se vantait beaucoup de sa fortune quand nous étions élèves à Poudlard.

— C'était le cas du vivant de Fleamont et d'Euphémia Potter. Comme je vous l'ai dit, il avait fait fortune et avait fait quelques placements forts judicieux à cette époque. Mais c'étaient des placements à terme et à leur mort, James Potter n'en a renouvelé absolument aucun. Il s'est contenté de vivre largement du contenu du coffre sans qu'aucune rentrée n'ait jamais lieu. Monsieur Potter, si vos parents avaient vécu, à l'allure où votre père dépensait, ils auraient été sans le moindre sou en moins de trois ans. L'or dont vous disposiez largement venait des divers héritages dont vous avez bénéficié après avoir vaincu Vous-Savez-Qui. Mais cette loi qui revient sur le tapis… vous en prive.

— Et à cause de l'amende et des dépenses inconsidérées de mon père, je me retrouve sans rien. C'est bien cela ?

— Oui. Et je dois vous apprendre que votre parrain a modifié son testament très récemment… en fait dès l'annonce de votre peine par le Magenmagot. Vous étiez son héritier, vous ne l'êtes plus.

— Super, alors lui, rien à en tirer du parrain inutile !

— Ça ne m'étonne pas du tout de ce cabot pouilleux, marmonna l'ex-professeur de potions.

Harry frotta son visage entre deux mains lasses et s'adossa pesamment contre les planches inconfortables de sa chaise.

— Payez cette fichue amende, qu'on en finisse, soupira-t-il, totalement écœuré.

— Nous devons fermer le coffre du Professeur Rogue, et j'en suis fort désolé. Un ancien coffre comme celui-là, c'est toujours un regret de perdre un client.

— C'était le coffre de ma mère, révéla Severus tout en fixant ses mains crispées sur le tissu de sa robe.

— Et avant elle, c'était le coffre des héritiers de la famille Prince. Chaque héritier ou héritière utilisait ce coffre tant qu'il ne pouvait utiliser le coffre principal, soit tant que leurs parents vivaient. Ayant été reniée, votre mère n'a jamais eu accès au coffre principal.

— Je peux savoir qui a hérité de la fortune de mon grand-père ? tenta Severus qui s'était souvent posé la question mais n'avait jamais eu l'opportunité d'interroger un gobelin à ce sujet.

— Le Trésor Magique, révéla alors Ragnok. Votre grand-père n'avait pas d'autre famille ni héritier que sa fille unique. En la reniant, il s'est privé de sa seule héritière. Il aurait fait un testament en ce sens, vous auriez pu hériter en tant que petit-fils, mais il n'a jamais accepté. Il a préféré tout abandonner au Ministère et donc au Trésor Magique. Et pourtant, j'avais insisté pour qu'il change d'avis. Mais non. Le coffre principal des Prince a été fermé puis réattribué, le manoir vendu aux enchères -à très bas prix- je vous le dis, au profit du Ministère encore une fois.

— Mais c'est dégueulasse ! s'offusqua le jeune sorcier à lunettes. Comment peut-on ainsi déshériter ses enfants et les laisser dans la misère ? Le Monde Magique est vraiment pourri jusqu'à l'os ! Mon coffre 687 aussi va être fermé ?

— Non, Monsieur Potter, votre coffre restera disponible tant que vous y laisserez de l'or. Un coffre vide non alimenté pendant trois mois est automatiquement fermé et annulé. Cependant, le coffre n°736 du Professeur sera fermé. Nous allons vous remettre dans quelques minutes l'or qu'il restera après le virement magique au Trésor.

— Attendez ! l'interrompit Harry. Severus ne peut plus avoir de coffre à lui, n'est-ce pas ?

— C'est exact.

— Mais moi, je peux ?

— Encore exact, Monsieur Potter.

— Changez le nom du titulaire du coffre. Mettez mon nom et un gallion de mon or dans le coffre en attendant. On peut ?

— Oui, Monsieur Potter, c'est tout à fait possible, si le Professeur Rogue donne son accord.

— Mais pourquoi, Harry ? Je ne pourrai de toute façon plus y accéder…

— On ne sait jamais, Sev'. J'ai le sentiment qu'on devrait le faire si on en a la possibilité légale. On en reparlera à la maison, ok ?

— J'accepte, Ragnok. Mettez le coffre au nom d'Harry.

Severus espérait pouvoir un jour refaire des potions et éventuellement les vendre, mais pour le moment il ignorait totalement comment. L'avenir des deux sorciers semblait fortement compromis. L'or qu'on allait lui apporter devrait être converti en livres sterling et servirait à payer ce qu'il devait au Flamant Rose. Ce serait très certainement la dernière fois qu'il pourrait voir Rick et Walt… à moins d'un miracle.

— Gripsec, apportez-moi le dossier du Professeur Rogue, je vous prie.

Le petit gobelin qui se tenait silencieux depuis de début de la réunion acquiesça d'un signe de tête et apporta à son chef un dossier sanglé style moldu qui attendait sur une table au fond de la pièce. Ragnok s'en saisit, l'ouvrit et en sortit des parchemins préparés qui n'attendaient plus que la signature de l'intéressé.

— Professeur Rogue, si vous voulez bien signer l'ordre de virement au Trésor Magique, demanda Ragnok en lui tendant une plume.

Severus hocha la tête sans un mot, prit la plume, la trempa dans l'encrier qu'il vit sur le bureau, lut le texte imprimé sur le parchemin et pour finir y étala sa signature de son écriture en pattes de mouche.

Le directeur de Gringotts lui mit ensuite sous le nez, un autre parchemin intitulé en grand « Fermeture d'un coffre ». De la même façon, Severus en prit connaissance, cocha la case « changement du titulaire » au lieu de celle « fermeture définitive » laissée en blanc, écrivit le nom d'Harry Potter dans la case du nouveau propriétaire, data et signa. Cette procédure était normalement faite lors des décès et des héritages. Ici, ce n'était pas le cas, on le dépouillait tout simplement. Et encore il n'avait pas à se plaindre, le coffre n'était pas vraiment perdu puisque Harry en prenait possession. D'ailleurs, il n'était pas certain que ça soit une bonne idée, il n'avait plus ou quasiment plus de quoi faire la moindre potion. Gagner de l'or ainsi allait être sacrément difficile.

Une fois les documents signés par Severus retournés dans leur chemise et rangés sur une étagère par Gripsec qui attendait toujours, ce fut le tour d'Harry. Un nouveau dossier fut tendu à Ragnok et un parchemin de virement au Trésor Magique également présenté à Harry pour une signature.

— Je vais retirer cent gallions de ce qu'il reste, annonça Harry à Ragnok. Vous changerez cinquante gallions en livres sterling, les cinquante autres je les garde en or. Vous prendrez un gallion dans mon coffre comme je l'ai dit précédemment pour laisser le coffre 736 ouvert. Je ne sais pas encore ce que je vais faire de ma vie, mais vous me reverrez certainement à Gringotts. Il va falloir que nous trouvions une occupation pour gagner de l'or ou de l'argent moldu.

— Si je puis me permettre, vous pourriez vendre des potions par hibou, suggéra Ragnok. Il y a des potions controversées, peu recommandées par le Ministère et donc introuvables… Il y aurait de l'or à gagner…

— Pour ça, il nous faudrait un toit, et du matériel, mais nous n'avons ni l'un ni l'autre, répondit sèchement Harry. On ne fera pas fortune avec un chaudron d'école et un kit pour Poudlard de potions. Severus n'a plus aucun matériel.

— C'est très regrettable. Il est fort dommage que le Professeur Rogue ait été radié de la liste des sorciers britanniques, car nous ne pouvons lui octroyer de crédit, ni à vous Monsieur Potter, vu que vous n'avez aucune ressource ni qualification. Très regrettable, vraiment…

Harry et Severus doutaient fort que Ragnok se sente aussi concerné et misérable qu'il avait l'air de paraître en cet instant. Les gobelins étaient de redoutables roublards et celui-ci en était le chef…
Ils se débrouilleraient avec le monde moldu, comme ils pourraient.

Les deux sorciers quittèrent leurs chaises en même temps, saluèrent les gobelins d'un signe de tête et sortirent de la pièce. Dans la banque, les files de sorciers aux guichets avaient diminué. Le gros malotru cracheur était parti mais d'autres ne se gênèrent pas pour les insulter voire les menacer. Tous deux étaient connus, Harry pour son état de sauveur, Severus pour avoir enseigné les potions à des centaines de cornichons à baguettes depuis dix-huit ans.

Le Serpentard et le Gryffondor quittèrent les lieux sous des murmures désapprobateurs. La dernière parole qu'Harry entendit avant que les portes de Gringotts ne se referment fut « Azkaban et le baiser ! Ces chiens ne valent pas mieux ! »

Super pour la tolérance…

Severus qui avait bien évidemment entendu lui aussi, s'immobilisa sur le perron de marbre blanc baigné de soleil. Le visage fermé, il regarda une derrière fois autour de lui, le spectacle de ce coin de rue. Leurs Glamours s'étaient réinstallés dès la sortie de la banque et lentement, Harry et Severus, silencieux, amorcèrent pour la dernière fois le chemin vers le chaudron baveur, indifférents cette fois au brouhaha environnant et sans accorder un regard aux vitrines des magasins.


Lucius Malefoy avait quitté la banque sur les chapeaux de roue. À son grand regret, il n'avait pas trouvé d'autre solution que de bousculer son ami Severus pour glisser dans sa poche une des bourses pleines qu'il venait de retirer de son coffre. À la base, il avait eu pour projet d'expédier à l'ancien professeur une bourse par hibou, sachant très bien que son ami allait se retrouver sans ressources. Il avait été accidentellement présent lorsque Fudge avait reçu dans son antichambre, un vague sous-fifre employé au Trésor Magique qui venait lui suggérer, parchemin à l'appui, d'utiliser contre le Sauveur l'ancienne loi de Hypocritus Le Zélé. Cette loi désuète et scélérate permettait au Ministère de lui retirer la majorité de son or, des legs reçus et autres biens. La peine prononcée contre Potter et Rogue étant infâmante, l'ancienne loi, autrefois très prisée des Sang-Purs, méritait d'être appliquée. Il fallait faire un exemple.

Remonté contre l'Élu, Cornélius Fudge n'avait émis aucune objection. Lucius non plus, mais intérieurement, il avait grimacé. Severus Rogue, privé d'or et d'emploi, n'avait que Potter et son or pour assurer sa subsistance. Or, Fudge et l'idiot inconnu qui se trouvaient à cet instant devant lui venaient de priver les deux condamnés de leurs ressources. Lucius Malefoy se fichait de Potter comme de son premier Endoloris jeté à un Moldu, mais Severus Rogue était son meilleur ami, et il allait se retrouver sans or, sans travail, abandonné de tous dans le Monde Moldu hostile. C'était épouvantable. Et le pire c'est que le malheureux n'en avait aucun soupçon. Et Potter non plus !

Lucius avait donc décidé de faire un crochet rapide par Gringotts pour retirer de son coffre quelques bourses bien pleines. Il passerait à la Poste du Chemin de Traverse et paierait un hibou postal quelconque pour envoyer de l'or à son ami. Cela l'aiderait bien en attendant qu'il trouve une occupation rémunérée.

Il n'avait pas eu besoin d'aller à la Poste. En sortant du wagonnet, il avait poussé la porte menant au hall principal où se trouvaient les guichets et avait aperçu Severus et Harry qui entraient dans les lieux. Pressant le pas, il avait foncé sur son ami qui ne l'avait pas remarqué, l'avait heurté volontairement, en avait profité pour glisser une bourse dans sa vaste poche et avait fui les lieux comme s'il avait un Troll aux fesses et sans même se retourner.

C'était chose faite. En rentrant au Manoir en fin d'après-midi, il s'arrangerait pour envoyer une lettre à Severus. Lucius supposait que la cheminette de son ami avait été fermée. Il connaissait bien le protocole. Lorsqu'un sorcier était radié de la liste officielle des Sorciers Britanniques, son ou ses coffres à Gringotts étaient fermés, le Chemin de Traverse et ses rues adjacentes inaccessibles ainsi que Pré-Au-Lard et Poudlard et son abonnement au Réseau de Cheminette clos. Si le sorcier travaillait dans le Monde Magique, il perdait automatiquement son emploi. Severus avait été renvoyé de Poudlard, condamné, son coffre fermé, il ne restait plus que la cheminette. Lucius était persuadé que lorsque les deux renégats rentreraient chez eux, leur cheminée ne leur servirait plus qu'à faire du feu. Également, tous les abonnements aux journaux et magazines du Monde Magique, comme La Gazette du Sorcier, Le Chicaneur, Sorcière-Hebdo ou Salut Les Sorciers étaient magiquement annulés. La plupart du temps les éditeurs ne s'en rendaient pas compte, les listings des abonnés étant automatisés.

On pouvait contourner ces annulations. Il suffisait qu'un sorcier pouvant toujours accéder au Monde Magique achète de lui-même ou se fasse livrer le journal et le paie. Ce sorcier, une fois en possession légale de la publication, pouvait en faire ce que bon lui semblait : la lire, la brûler, en faire des piles dans son grenier ou sa cave, des confetti ou des dragons en papier… Il pouvait également l'offrir à un malheureux n'ayant pas les moyens de se payer un abonnement ou mieux encore, à un sorcier expulsé de leur monde.

Narcissa contrôlait absolument tout ce qui entrait et sortait du Manoir. C'était elle qui gérait les abonnements, les choisissait, gérait les Elfes-de-maison (les achetait, les renvoyait… ), décidait des achats alimentaires, vestimentaires, mobiliers et immobiliers. C'était également elle qui avait décidé de l'éducation de Drago et engagé ses précepteurs. Lucius ne servait qu'à payer les fantaisies de Madame. La seule chose qu'il avait obtenue c'était que son meilleur ami, Severus Rogue, soit le parrain de son fils Drago. Pour se venger, Narcissa avait imposé sa sœur, Bellatrix la cinglée, comme marraine. Elle n'avait pas eu l'occasion d'intervenir dans l'éducation de son filleul, elle était morte à Azkaban, embrassée par un Détraqueur.

Lucius n'était pas le maître chez lui et personne dans le Monde Magique ne le soupçonnait. Il s'arrangeait pour faire ses coups en douce et mettait un point d'honneur à garder le nez propre. Personne ne pourrait trouver de reproches à lui faire : il était l'un des sorciers les plus honorables qu'il se puisse trouver parmi les Sangs-Purs Britanniques.

L'ancien Mangemort blond platine toucha de la pointe de sa baguette magique le mur de briques rouges menant au Chaudron Baveur. L'arche attendue se forma rapidement et il entra dans le cellier. Profitant que les lieux étaient déserts, Lucius s'immobilisa entre deux tonneaux de Bièraubeurre et rapidement conjura un énorme dossier sanglé qui semblait bien lourd. Le mot Gringotts s'inscrivit en travers et en grosses capitales. Le sorcier le glissa ostensiblement sous son bras et traversa le cellier. Il ouvrit la porte donnant sur la salle commune de l'auberge et entra.

— Bonjour, Tom ! Ma comptable est-elle arrivée ?

— Bonjour Lord Malefoy. Oui, Miss de Plantz est là depuis au moins dix minutes.

— Il y avait un monde fou à Gringotts ! Je n'ai même pas eu le temps de déjeuner. Pourriez-vous nous faire porter du thé et des scones ? Nous avons beaucoup de travail cet après-midi.

— Bien sûr, Lord Malefoy. Je vous apporte un plateau tout de suite.

Le barman du Chaudron Baveur était un bossu, chauve, sans âge et totalement édenté. Il était en outre affligé d'un rire agricole extrêmement niais.

Lucius réservait chaque semaine un salon privé au Chaudron Baveur. Il y recevait sa comptable Miss Nola de Plantz que Narcissa ne supportait pas et refusait de recevoir au Manoir Malefoy. Il s'était donc accordé avec Tom pour disposer d'un salon privé à volonté afin de régler ses affaires courantes. Cette organisation convenait à tous les protagonistes et Tom se faisait un joli tas d'or avec cet arrangement.

Alors que Lucius se dirigeait d'un bon pas vers ledit salon tout en saluant d'un signe de tête sec les sorciers présents qu'il reconnaissait, Tom se saisissait du plateau préalablement préparé – il connaissait bien sa clientèle et leurs habitudes – et suivait le noble. Lord Malefoy ouvrit la porte basse, se pencha pour ne pas heurter le linteau et entra.

Miss de Plantz était installée à une grande table, entourée de dossiers, parchemins, livres comptables et autres fournitures de bureau. Une plume à la main, elle grattait un parchemin frénétiquement.

— Bonjour, Miss de Plantz, avez-vous terminé ce courrier urgent ?

— Bonjour My Lord. Oui, encore un paragraphe, et vous n'aurez qu'à relire et signer.

— Parfait. J'ai récupéré les documents que nous attendions de Gringotts à propos de ces nouveaux placements financiers.

Tom posa le plateau sur la table, à l'écart des mystérieux dossiers et des parchemins, puis sortit de la pièce en refermant soigneusement la porte derrière lui. Décidément, Lord Malefoy était un travailleur acharné. Il était bien agréable pour son établissement que Lady Malefoy refuse de recevoir le personnel de son époux dans sa demeure. La location de ce salon lui assurait des rentrées confortables. De plus, une mauvaise langue souhaitant traiter Lucius Malefoy de fainéant et de désœuvré en serait pour sa peine. Lui, Tom, avait la preuve du contraire.

Miss de Plantz était une jeune sorcière blonde et rondouillette. Elle portait des lunettes ovales en métal argenté et un chignon tiré très sobre. Comme Lucius, elle venait d'une famille noble de sang-pur. Elle était fille unique et l'héritière de la fortune familiale. Son père, avec qui elle vivait seule, n'était pas pressé du tout de lui trouver un époux digne de son rang. Il fallait dire que la demoiselle n'y mettait pas non plus du sien. Elle était snob, revêche et vindicative pour le commun des mortels. Peu de sorciers et sorcières trouvaient grâce à ses yeux. Lucius Malefoy était de ceux-là.

Le Mangemort posa sur la table le dossier qu'il tenait encore. Un rictus étrange orna alors son visage pâle et figé. Il tira sa baguette de la manche de sa robe brodée et ornée d'Astrakan. Il la pointa sur la porte.

Assurdiato ! Collaporta !

La porte se décolla comme une ventouse et reprit sa place avec une lueur bleuté et un léger vrombissement. À présent personne n'entrerait.

Lucius se retourna vers la comptable qui venait de poser sa plume sur la table, abandonnant l'écriture de la lettre urgente. Elle se leva, quitta sa place et s'avança au centre de la pièce.

— LUCIUS !

— Ma douce ! Comment allez-vous depuis la semaine dernière ?

Lord Malefoy, habituellement si digne et si guindé, ouvrit les bras en grand et laissa la jeune sorcière s'y précipiter.

C'était cela, le secret inavouable de Lucius, celui que soupçonnait avec raison son meilleur ami, Severus Rogue. En effet le blond platine avait une maîtresse et la coquine le faisait marcher, ou plutôt courir !

Nola de Plantz, trente ans et vieille fille, avait un souhait ardent : devenir la nouvelle Lady Malefoy. Mais la place était déjà prise par la rigide et frigide Narcissa Black…

Miss de Plantz tentait désespérément de convaincre son amant de divorcer pour l'épouser bien que cet acte soit absolument la pire des infamies pour un honnête sorcier. On ne divorçait pas dans le Monde Magique. C'était autorisé, théoriquement, mais ceux qui s'y risquaient étaient montrés du doigt toute leur vie et devenaient la risée de leurs pairs. Lucius s'y refusant obstinément, la gente demoiselle avait entrepris une nouvelle croisade : convaincre son chéri d'empoisonner son encombrante épouse ou de lui faire avoir un accident fâcheux et -presque- totalement inattendu, comme le lui avait suggéré sa voisine et meilleure amie, Madame Veuve Zabini… Mais là encore, le blond tenait bon, ayant très peur des conséquences. Si encore, le Seigneur des Ténèbres avait été de ce monde, ils auraient pu s'arranger…

L'avantage de Nola était l'amour de Lucius, car le vilain cachottier était fou amoureux de la demoiselle. Elle était pourtant très loin d'être un prix de beauté. Elle n'était pas non plus la plus gracieuse des sorcières ni la plus aimable. Ses atouts résidaient ailleurs…

— Lucius… vite… je vous veux, tout de suite !

— Ooooh ! Ma très chère… comme vous m'avez manqué… marmonna-t-il en couvrant la sorcière de baisers brûlants.

Miss de Plantz recula vers la table, les deux mains accrochées à la cape de velours noir de Lucius. D'un revers, elle balaya les dossiers qui s'y trouvaient et qui s'écrasèrent sur le plancher avec un bruit sourd. Des deux mains, elle releva ses cotillons, dévoilant sous son austère robe noire et traditionnelle de sorcière, une belle épaisseur de jupons blancs et roses froufroutants bordés de dentelles. Des bas noirs attachés juste au-dessus des genoux par des jarretières de rubans noirs apparurent à la vue du sorcier dont les joues se colorèrent de rouge. Fou de désir devant les cuisses laiteuses de sa belle, Lucius quitta sa cape et sa robe, les laissant tomber à ses pieds. Il dégrafa sa ceinture et ouvrit les boutons de son pantalon et de son caleçon de toile blanche.

Nola de Plantz s'était allongée sur la table, les cuisses écartées et l'intimité dévoilée. Lucius se précipita sur elle comme un soudard. D'un coup de rein, il alla au fond des choses et entreprit un ramonage en règle.

Un témoin involontaire aurait été très surpris de ce comportement inattendu et passablement bestial. Miss de Plantz, au contact de Lucius, s'était révélée une totale obsédée sexuelle à la limite de la nymphomanie. Et notre cher Lucius, au contact de Nola de Plantz devenait un dépravé de la pire espèce. Dès que ces deux oiseaux se retrouvaient dans la même cage, ils oubliaient leur rang et toute dignité. Adieu les convenances, la bonne éducation, l'oppression du Monde Magique et vive la luxure et le stupre ! En bref, Nola et Lucius se jetaient l'un sur l'autre et baisaient pendant des heures, dans toutes les positions, comme des strangulots en rut.

Bientôt, la pièce ne fut plus remplie que de soupirs, de gémissements, de petits cris, de râles, de « oh oui, encore » et de « tiens, prends-ça ! », sans compter le bruit des baisers baveux, de la chair claquant contre la chair et des pieds de la table malmenée raclant sur le plancher à chaque coup de boutoir.

Accroché au mur près de la porte basse menant à la salle de l'auberge, un cafard n'en perdait pas une miette. Ses antennes s'agitaient et de temps en temps ses deux paires d'ailes frémissaient d'excitation. Cette blatte était entrée dans la pièce à son ouverture par Lucius Malefoy. L'insecte se trouvait depuis un moment dans l'auberge à l'affut d'un scoop. Il surveillait les sorciers présents, écoutait les conversations, prêt à se servir de tout ce qui pourrait lui tomber dans l'oreille et sous les yeux. Le rendez-vous de Malefoy avec une comptable avait été une promesse de secrets financiers dévoilés, de choses croustillantes comme des détournements de fonds, des malversations, du blanchiment d'argent sale, en bref tout ce qu'une journaliste lamentable comme Rita Skeeter pouvait espérer.

Mais à la place, la fouineuse était aux premières loges pour un porno digne du cracmol Marc Dorcel, très connu dans le Monde Moldu européen et dans les bouges mal famés de l'Allée des Embrumes. Après quelques minutes d'horreur, Rita s'était remise du choc et avait suivi avec attention les ébats amoureux incendiaires du couple illégitime. Qu'allait-elle faire de cette révélation ? Faire chanter le noble ? Le menacer de tout révéler à sa femme, à son fils ? Faire un scandale en publiant un article dévastateur et croustillant ? Oui, mais… quel magazine ou journal accepterait de publier un tel texte ? Voyons voir… son photographe, Bozo, connaissait -il lui semblait- un canard infect publié dans l'Allée des Embrumes avec force photos terriblement inconvenantes pour ne pas dire cochonnes. En bref, du bon porno bien gras et dégoûtant, tel que semblaient l'apprécier les Moldus ou les sorciers les plus dépravés et déviants.

Sous sa forme de cafard, il lui était impossible d'utiliser sa baguette et donc de lancer un sort de photo sur les protagonistes de la scène excitante… hem, hem… absolument épouvantable se déroulant sous ses yeux extasiés… heu… éberlués ! Elle allait devoir utiliser la pensine de la Gazette, figer l'image, prendre un cliché ou plusieurs… oui, plein… Mais il lui faisait quoi, là ? C'était possible de faire ça ? Mais quelle imagination… et il faisait très chaud dans ce salon, les cafards aimaient la chaleur, certes, mais quand même…

Si elle s'approchait un peu en rampant sur le mur-là, elle verrait mieux ce qu'il faisait de son… truc démentiel. Elle avait un doute sur l'endroit où le cochon… enfin, le sorcier l'avait glissé. Par le caleçon de Merlin et ses coucougnettes argentées, elle n'aurait jamais pensé qu'on puisse faire des choses pareilles et en plus les apprécier.

Poussée par la curiosité, le vice, la méchanceté ou l'appât du gain, voire la possibilité d'un Prix Foulitzer pour avoir démasqué un nouveau pervers, au choix, Rita rampa sur le mur blanchi à la chaux, se mettant ainsi à nu. Son exosquelette brun rayé se voyait à présent comme le nez au milieu de la figure et Miss de Plantz qui faisait face à ce mur aperçut la triste vermine.

— LUCIUS ! UN CAFARD ! IL Y A UN CAFARD SUR LE MUR !

Aussitôt le sorcier cessa ses administrations et se retourna, le pantalon et le caleçon aux genoux. Rita, découverte, tenta de s'envoler pour se dissimuler dans la pénombre, se fustigeant pour les risques pris. Mais les cafards volant très mal, se contentant de faire des sauts maladroits et de planer vaguement d'un point A à un point B, elle n'eut pas le temps de s'éloigner.

— Quelle sale bête ! pesta le noble blond, il faudra que Tom achète une potion insecticide efficace !

Lucius se pencha pour attraper la Gazette du jour que Tom avait laissée sur la table avant même leur arrivée. Elle était encore roulée et sanglée d'un anneau de papier brun rigide. Armé de cette massue improvisée, Lord Malefoy, le sexe en érection à l'air libre, sautilla jusqu'au mur car entravé par ses vêtements et balança un grand coup de journal sur le cafard qui assommé tomba sur le sol poussiéreux. Aussitôt, une semelle en cuir de dragon écrasa avec un bruit sinistre l'insecte dégoûtant. La dernière vision de Rita Skeeter avant de rendre l'âme fut un sexe rose rigide et luisant dressé fièrement au milieu d'un nid de poils blond platine du plus bel effet.

Il faudrait attendre quelques jours pour que le Service de l'État-civil magique prenne connaissance du décès car automatiquement mentionné sur le parchemin de naissance en marge du document. Personne ne retrouverait jamais le corps de la journaliste vedette et pendant des semaines, les journaux en feraient leurs choux-gras…

Lucius Malefoy avait bien involontairement échappé à un scandale qui aurait ruiné sa vie. Pire, si Rita avait été témoin des ambitions criminelles de Nola envers Narcissa, tous deux auraient fini à Azkaban pour complot et tentative d'assassinat.

— Où en étions-nous, très chère ? fit l'ancien Mangemort en se retournant vers sa maîtresse.

— Nous parlions de faire la brouette javanaise…

— Croyez-vous ? Que penseriez-vous de l'hippogriffe infernal ? Ou mieux, le touilleur dans le chaudron ?

— Vous êtes un grand fou, Lucius !


Ignorant que Lucius Malefoy rencontrait sa maîtresse au Chaudron Baveur, Harry et Severus avaient longé le Chemin de Traverse, comme deux robots téléguidés moldus. Ils étaient entrés dans le cellier, puis dans la salle d'auberge, toujours sous leurs Glamours. Severus avait déposé machinalement quelques noises dans la tirelire près de la cheminée, saisi une poignée de poudre verte et l'avait lancée dans l'âtre, Harry sur les talons. Personne n'avait fait attention à eux, ni écouté leur destination. Ils étaient rentrés dans leur masure de l'impasse du Tisseur sans encombre, la cheminette fonctionnant visiblement encore et sans un mot avaient retiré leurs Glamours. Les deux sorciers s'étaient assis en soupirant autour de la table de cuisine et ils avaient vidé leurs poches puis étalés pièces d'or et billets moldus sur la toile cirée.

Dehors le temps s'était gâté pendant leur absence. Il pleuvait à verse et le vent soufflait. Harry jeta un rapide coup d'œil par la fenêtre de la cuisine.

— Sale temps…

— Oui. J'espère que la bâche installée par Dobby va tenir…

— J'espère aussi. C'est quoi cette bourse ? demanda Harry en tendant la main pour saisir l'objet.

— Lucius m'a bousculé tout à l'heure, tu te rappelles ? Il a glissé ça dans ma poche.

— Ah ouais ? C'est sympa… Y a combien dedans ? Il te file souvent du fric comme ça ?

— Non, c'est la première fois. Je suppose qu'il savait ce qui nous attendait. Ragnok a dit que les sangs-purs connaissaient cette fichue loi…

Harry défit les cordons et le cuir de dragon s'étala comme un napperon, dévoilant un tas de pièces scintillantes. Le jeune sorcier se mit à les compter en faisant des petits tas de pièces tandis que son aîné se relevait, allait vers le buffet prendre deux verres et une bouteille de Vieil Ogden rangée là par Dobby le matin même.

— 148, 149, 150 ! Y a cent cinquante gallions ! Tu comptes faire quoi ? Les garder ou les lui rendre ?

Severus cessa de remplir le second verre, le poussa d'un doigt vers Harry et soupira.

— En d'autres temps, je les lui aurais rendus, mais nous n'avons pas les moyens de jouer à ça, non ?

— Nous ne sommes plus « en d'autres temps ». Donc, on les garde. On le remerciera… déclara le Gryffondor en soulevant le verre de whisky pour en prendre une gorgée qui le fit tousser. Bordel, c'est fort ! Je m'y ferai jamais…

— J'espère bien, répliqua Severus en se rasseyant devant leurs petits tas de pièces.

Les deux sorciers se turent et sirotèrent leurs verres, les yeux dans le vague, essayant de digérer leurs nouvelles épreuves tandis que la pénombre s'installait dans la pièce, le ciel se couvrant de plus en plus et le vent hurlant autour de la maison.

Le niveau dans la bouteille diminuait au fur et à mesure que leur alcoolémie grandissait.

— Je dé… déteste le… le Monde Ma… magique, déclara Harry au bout d'un très long moment.

— Bienvenue au club, ajouta le Serpentard en vidant son quatrième ou cinquième verre.

— Sev'… Tu as des… des dettes ici ?

— Nan, juste Rick à payer. J'ai payé la facture de gaz au début du mois.

— Ok.

— On ira solder mon ardoise demain tant qu'on a des livres sterling.

— Ok.

— Arrête de boire, Harry.

Une bourrasque plus forte fit trembler les tuiles de l'appentis et l'une d'elles, mal accrochée, tomba dans la courette avec un bruit de tessons qui éclataient.

— Merde ! pesta Harry, la cabane va tomber su' l'chien ! Foutu comté !

Severus poussa son verre vide au milieu de la table et se leva avec peine.

— Je vais aller voir là-haut si ça tient l'coup.

— Te casse pas la gueule dans… dans l'escalier… t'en tiens une bonne…

Le potionniste ricana avec mépris et sortit de la pièce en titubant légèrement. Harry entendit son pas dans l'escalier qui grinçait dangereusement et alors qu'il allait se servir un autre verre, il entendit le bruit typique de la cheminette.

— Severus ? Harry ? Vous êtes là, mes enfants ?

— Ouais, ouais, Prossefor… Doubledor… répondit Harry d'une voix mal assurée.

Il quitta sa chaise et ferma les yeux. Les murs dansaient devant lui et son estomac tentait de remonter le long de son œsophage pour se faire la malle, dégoûté du traitement qu'on lui infligeait. À grand-peine, en se tenant aux murs et aux vieux meubles de la cuisine, Harry se déplaça jusqu'à la cheminée du salon et se laissa tomber à genoux devant l'âtre où la tête barbue du vieux mage apparaissait.

— Harry ? Tu n'as pas l'air bien… Où est Severus ?

Le sale gamin ivre mort fit un geste de la main pour désigner l'étage.

— Sev' véfirie… heuuu… véridie… enfin, il regarde si le toit se parre bas avec la tempête…

— Tu as bu ?

— J'ai l'droit.

— Je ne dis pas le contraire, mais est-ce une bonne idée ?

— On fête not' bo… bonne fortune… ricana Harry, désabusé.

— Il s'est passé quelque chose ?

— Y m'ont piqué tout mon z'or ! Z'ai plus rien !

— Comment ça, tu n'as plus rien ?

— Ra… Ragnok, il a dit que le Miti… le Minispère… appliquait une vieille loi pour me prendre l'or que j'a… j'avais eu en héritage !

— Ils ont osé ressortir la vieille loi d'Hypocritus ?

— Oui, oui… lui !

— Par la barbe de Merlin ! Je savais qu'on aurait dû l'abolir depuis tout ce temps ! Je vais soumettre ce projet au Magenmagot à la prochaine réunion. C'est n'importe quoi !

— Farpaitement ! N'importe quoi ! Z'ai plus rien ! Lessivé, le Ryry !

— Combien il te reste ?

— Cinquante gallions dans mon coffre ! Un seul dans celui de Sev, d'a… d'ailleurs, c'est un à moi. Z'ai pris le coffre à sa place.

— Tu as fait un transfert à ton nom ?

— C'est ça !

— Bien. Si je vous appelais ce soir, c'était pour vous dire que votre cheminette devait être fermée. D'ailleurs lorsque j'ai appelé ce midi, l'appel n'a pas abouti. J'ai donc pris contact avec Madame Edgecombe du service gérant le Réseau de Cheminette. Elle venait de fermer votre ligne. Severus ayant été radié de la liste officielle des sorciers, il n'avait plus le droit au Réseau de Cheminette. J'ai donc ordonné la réouverture mais à mon nom. C'est moi qui paierai les factures d'abonnement ainsi toi et Severus pourrez me joindre à Poudlard. Personne n'y trouvera à redire. Et pour la poudre, on s'arrangera, on la mettra sur la note de Poudlard, les administrateurs n'y verront que du feu.

— Z'avez… le droit ?

— Rien ne me l'interdit… et puis ce qu'ils ignorent ne peut pas leur nuire.

— Ok, réussit à prononcer Harry qui chancelait de plus en plus sur ses genoux.

— Va prendre une potion de dégrisement, Harry ! C'est un ordre ! Et que je ne te vois plus dans cet état-là !

— Vous… vous z'avez pas vu Sev', alors ! éclata de rire le fléau Gryffondorien.

— Je préfère ne pas le voir ainsi ! Ça m'épargnera la salive d'une bonne beuglante en direct. Bonne soirée, et dormez bien !

— Vi… vi… merci beaucoup…

La communication s'interrompit et Harry mit plusieurs minutes à se relever. Il était encore à genoux et accroché à l'accoudoir du fauteuil râpé de Severus lorsque celui-ci refit son apparition dans la pièce. Il avait dû mettre la main sur une de ses potions car il marchait droit et ne semblait plus incommodé par ses libations. Un flacon fut placé sous le nez de l'apprenti soulard qui se mit à loucher en tentant de le fixer.

— Tu es dans un bel état ! Avale ça ! C'était qui à la cheminette ?

— Albus.

— Il voulait quoi ?

Harry ne répondit pas tout de suite, il s'escrimait à tenter de déboucher la fiole de potion.

— Rhaaa ! Z'arrive pas…

— Donne-moi ça !

— T'… t'aurais pu me le déchouber…

— Et bien voilà, il est déchoubé, comme tu dis.

— Sev… pourquoi tu bouges ?

— Je suis immobile, idiot ! C'est l'alcool !

— L'alcool bouge ?

— Laisse tomber ! BOIS !

Maladroitement Harry ingurgita avec force grimaces le contenu du flacon. Il resta accroupi quelques secondes, toujours accroché à l'accoudoir, les yeux fermés et la respiration haletante.

Enfin, il put se redresser et courut littéralement vers l'évier de la cuisine où Severus l'entendit vomir. Il jeta un regard sur la vieille pendule de cuisine en formica que sa mère avait accrochée au manteau de la cheminée. Elle fonctionnait pour la première fois depuis des années, Dobby l'ayant remontée. Il était déjà dix-huit heures ? Par Merlin, mais ils n'avaient pas vu l'après-midi passer !

— Dobby ?

L'Elfe popa à l'appel de son nom.

— Que peut faire Dobby pour Maître Rogue ?

— Pourrais-tu nous préparer quelque chose à manger ? Nous sommes fatigués et nous allons nous retirer pour la nuit dès que nous aurons dîné.

— Dobby a tout ce qu'il faut !

Et l'Elfe idolâtre d'Harry courut vers la cuisine où il poussa des piaillements aigus en découvrant son sorcier favori avachi, le nez dans l'évier.

Dobby n'eut pas le temps de demander à Harry ce qui n'allait pas. Un énorme oiseau exotique venait de faire son apparition à la fenêtre de la cuisine. Le Gryffondor leva le nez en entendant le bruit des petits coups de bec sur la vitre juste au-dessus de lui.

— C'est quoi encore, ce truc ? On dirait l'oiseau postal de Sirius !

Severus choisit de faire son apparition dans la cuisine à ce moment-là.

— Tu parles du sale cabot ? Tu ne trouves pas que notre journée est assez gâchée ?

— Regarde l'oiseau, Sev'.

Les sourcils du Serpentard se froncèrent et son regard se fit dur. Il venait d'apercevoir à travers les lattes de bois du vieux store vénitien, un volatile qui n'avait rien à faire là, et surtout pas par ce temps. Il ne manqua pas de remarquer également que l'oiseau tenait dans son bec une magnifique enveloppe rouge…

— Une beuglante ! Ben voyons ! Ce crétin n'en rate décidément pas une !

— Ouais, soupira Harry, découragé. Dobby ? Tu veux bien aller récupérer la lettre ?

— Dobby peut détruire la vilaine beuglante, Harry Potter, Monsieur !

— Non merci, Dobby. Je veux savoir ce que Sirius a encore à me reprocher. Me déshériter n'était pas suffisant ?

Tandis que Dobby sortait dans la courette, Severus traversa la cuisine et s'installa à la table. Il avait faim et l'arrivée de cette beuglante retardait leur souper. Enfin quoi, il fallait encore mettre le couvert, sortir les Tupperwares magiques du frigo et les réchauffer, et quand on avait faim, chaque seconde comptait.

L'Elfe revint avec la beuglante et la tendit à Harry avec une petite dose d'appréhension. Le sort s'acharnait contre ses bien-aimés maîtres, même officieux. La lettre se mit à fumer dès que le jeune destinataire la prit en main. Il leva un regard vers son amant qui, stoïque, assistait à la scène.

— Ouvre-la, Harry, plus tu attendras, pire ce sera. Tu connais le principe.

— C'est pas comme si c'était la première. Entre Molly Weasley et Sirius, je suis verni de ce côté-là.

Harry décacheta la missive flamboyante. Elle lévita aussitôt devant son visage en se transformant en hideuse bouche dentue qui se mit à brailler avec la voix de Sirius Black.

— HARRY JAMES POTTER ! TU ES LA HONTE DE TA FAMILLE ! COMMENT AS-TU OSÉ COMMETTRE UNE TELLE INFAMIE ? TU REFUSES D'ÉPOUSER UNE HONNÊTE JEUNE FILLE, DE SANG-PUR EN PLUS ! TOI ! UN SIMPLE SANG-MÊLÉ ! ET TOUT ÇA À CAUSE DE CET INFÂME ENFLURE DE SERVILUS ?

VOUS N'ÊTES QUE DEUX PERVERS DÉGOÛTANTS QUI MÉRITERAIENT DE POURRIR À AZKABAN ! DEUX GIBIERS POUR DÉTRAQUEURS, VOILÀ CE QUE VOUS ÊTES ! JAMES TE RENIERAIT S'IL ÉTAIT ENCORE DE CE MONDE !

JE TE RENIE ET JE TE DESHÉRITE ! TU N'ES PLUS MON FILLEUL ! TU ES INDIGNE DES MARAUDEURS ET DES POTTER ! MÊME QUEUDVER, CE SALE RAT, A PLUS DE VALEUR QUE TOI !

MAIS QU'EST-CE QU'ON POUVAIT ATTENDRE D'UN SALE GOSSE ENGENDRÉ PAR CETTE PUTE EVANS DONT JAMES S'ETAIT ENTICHÉ ? JE LUI AVAIS BIEN DIT DE NE PAS L'ÉPOUSER ! S'IL M'AVAIT ÉCOUTÉ, IL SERAIT TOUJOURS LÀ AVEC MOI !

JE NE VEUX PLUS JAMAIS ENTENDRE PARLER DE TOI NI DE TON SALE MANGEMORT ! JE SAVAIS QUE J'AURAIS DÛ TUER CE CRÉTIN QUAND NOUS ÉTIONS À POUDLARD ! SI JE LE CROISE, JE LE TUE ET REMUS AUSSI LE TUERA ! ET JE T'INTERDIS DE REMETTRE LES PIEDS AU SQUARE GRIMMAURD, SINON…

Harry ne saurait jamais quelles menaces Sirius lui adressait s'il contrevenait à cette interdiction, car Severus, dès qu'il avait entendu parler de Lily en ces termes insultants et de la tentative de meurtre sur sa personne, s'était levé et avait brandi sa baguette vers la beuglante pour lui jeter un Incendio.

Le ton de Sirius avait été extrêmement agressif et même violent. Il était véritablement hors de lui lorsqu'il avait fait cette beuglante. Harry avait pâli de plus en plus au fur et à mesure que les insultes et menaces lui parvenaient. Il regarda sans un mot la lettre se consumer tandis qu'elle lévitait toujours. Les quelques cendres qui tombèrent sur le carrelage furent aussitôt évanouies par Dobby d'un claquement de doigts.

— Méchant sorcier, gronda l'Elfe en colère. Harry Potter est le plus grand sorcier du monde et Severus Rogue le plus grand maître des potions du monde ! Sirius Black est un vil personnage ! Aussi mauvais que mon ancienne maîtresse Narcissa et sa sœur Bellatrix !

— C'est une famille de dégénérés, Dobby, confirma tranquillement le propriétaire des lieux en rangeant sa baguette dans sa manche. Tu veux bien nous servir ? J'ai faim.

— Oui, Maître Rogue.

— Assieds-toi, demanda Severus en prenant son compagnon par le bras.

— Sev… il a traité ma mère de pute ! Tu te rends compte ? Je croyais qu'ils étaient amis ! Il vivait chez eux ! Et… mais quel hypocrite ! Qu'il aille se faire foutre, je n'ai pas besoin de parrain, il n'a jamais servi à rien du tout ! À quoi pensait mon père en le choisissant ? Pfff !

— Il est peu probable que tu le croises de nouveau. Il ne reviendra pas dans notre pays, il est trop bien où il est. Et même le loup, tu ne le reverras plus. Oublie ces crétins.


À Poudlard, la grosse horloge dans sa tour venait de sonner quinze heures. Miss Octopus s'admirait devant sa psyché. Elle avait revêtu une robe moldue bleu marine à pois blancs. Ladite robe, de forme portefeuille, lui seyait particulièrement. Elle portait également des escarpins de cuir bleu marine et un petit chapeau de paille blanc et bleu assorti à sa robe. Satisfaite de l'image renvoyée par le miroir, la bibliothécaire attrapa sur une console, un sac à main Hermès Birkin marine que lui avait offert pour Noël, Kingsley, son cousin favori. Miss Octopus ouvrit le sac, y glissa sa baguette, un portemonnaie en cuir de dragon pouvant passer pour du croco aux yeux des moldus ignares et un joli mouchoir brodé orné de dentelles.

Ainsi parée, la demoiselle sortit de ses quartiers. Albus Dumbledore l'avait installée au quatrième étage, non loin de la bibliothèque. On avait ouvert pour elle, une suite destinée normalement aux invités du château. Madame Pince, la titulaire officielle du poste, vivait dans un appartement dont l'entrée se situait au fond de la Réserve Interdite aux élèves. Comme cette malheureuse était hospitalisée, on ne pouvait quand même pas loger chez elle sa remplaçante. Le claquement des talons de la sorcière fut le seul bruit qui troubla les couloirs déserts traversés à moment-là. Les sales gamins étaient tous en cours et la bibliothèque fermée jusqu'à dix-huit heures. Elle avait donc, normalement, largement le temps de mettre ses projets à exécution.

Miss Octopus descendit tranquillement les escaliers de marbre, traversa le hall et sortit par la grand-porte pour entrer dans le cloître. À Poudlard, le temps était bien plus clément que dans le Yorkshire, curieusement… Lorsque la sorcière leva les yeux, elle vit un beau ciel bleu céruléen et espéra que ce temps splendide dure un peu plus. Elle n'avait pas pris de veste ou de gilet mais ce n'était pas important. Si elle avait froid, un sortilège de chauffage sur sa personne suffirait à régler le problème.

Son petit sac accroché à son avant-bras, elle se dirigea vers le chemin carrossable menant à Pré-Au-Lard. Elle n'avait pas le choix : il était impossible de transplaner à l'intérieur des barrières magiques entourant le château. Il fallait donc longer ce chemin mal empierré au risque d'abimer ses jolies chaussures et ensuite franchir les grilles aux sangliers ailés. Une fois hors du parc, on avait passé les barrières magiques et on pouvait transplaner où l'on voulait. Miss Octopus prit son temps. Elle poussa même le vice jusqu'à s'arrêter quelques instants pour admirer les ondulations du calamar géant qui troublaient les eaux calmes du lac Noir. Une fois sur le territoire de Pré-Au-Lard, elle transplana vers Edimbourg.

La sorcière américaine apparut dans le jardin de l'église située à l'angle de Whitehill Road et de Newcraighall Road. Elle traversa tranquillement le rond-point en faisant attention aux nombreux véhicules qui circulaient à cette heure. Elle dirigea son pas vers le centre commercial Fort Kinnaird et une fois sur l'immense parking, elle scruta les enseignes des magasins afin de trouver celui qu'elle cherchait. Le Toys R Us se trouvait juste à un angle et elle le repéra relativement facilement. Miss Octopus n'était pas dépaysée dans le Monde Moldu. Elle savait parfaitement s'y fondre. Elle connaissait les us et coutumes de ceux qu'elle appelait chez elle, les Non-Mages. La belle noire pressa le pas, anticipant par avance son excursion dans ce lieu. À son approche, les portes automatiques s'ouvrirent. Pas besoin de magie, juste un peu de technologie moldue…

Un large sourire orna un instant son visage et ses yeux bruns étincelèrent. Miss Octopus entreprit d'explorer tous les rayons. Elle dédaigna celui des poupées qu'elle avait détestées étant enfant, perdit un temps fou au rayon Légo et faillit craquer pour un bateau pirate complet avec ses personnages. Mais elle ne venait pas pour cela.

Pendant de longues minutes, elle poursuivit ses recherches. Elle hésita devant une ou deux peluches, mais se ravisa. Il serait toujours temps d'y retourner si elle ne trouvait pas l'objet convoité dont elle avait une idée très précise. Enfin, elle le vit ! Et par Merlin, quel bonheur, il y en avait plusieurs modèles ! Lequel choisir ? Le rose ? Non, elle n'aimait pas le rose. Le violet ? C'était mieux… elle adorait le violet. Le blanc n'était pas mal non plus… Oh et puis au diable l'avarice ! Le change moldu des gallions était relativement avantageux. Elle pouvait se le permettre. Elle prit un violet, et puis un blanc, resta quelques secondes figée devant le rose et amusée, elle prit également cette boite.

Mission accomplie ! Elle avait trouvé son bonheur ! Elle pouvait rentrer à Poudlard, elle serait à l'heure pour la sortie des cours. Il fallait à présent passer à la caisse.

Il n'y avait que deux personnes, d'ailleurs ensemble, à une caisse. Miss Octopus se plaça derrière elles. Elle posa ses trois boites sur le tapis roulant, ouvrit son beau sac à main et en sortit son portemonnaie…


1. 281,66 £ soit 314,54 € (le jour de l'écriture du chapitre)

2. 774,79 £, soit 865,57 € (le jour de l'écriture du chapitre)