Elfe bêta : Mokonalex

Note de l'auteur : la suite est à la bêta, donc patience.
Bonne lecture à tous.


Severus et Harry se réveillèrent vers dix-huit heures en entendant le grincement des roues du chariot poussé par un Elfe. Etonné par le bruit, Harry se redressa et tourna la tête vers la grille les séparant du couloir.

— Qu'est-ce que c'est ?

— La soupe. Il doit être six heures, il fait nuit.

En effet, leur cellule était presque plongée dans le noir vu qu'on était en plein hiver. Ce n'était pas la meurtrière servant de fenêtre qui allait améliorer la situation. La seule source de lumière provenait des torches magiques accrochées à intervalles réguliers dans le couloir. Severus se redressa également et s'assit en tailleur sur sa paillasse, attendant l'Elfe qui visiblement servait les détenus dans les cellules précédentes. Curieux, Harry se leva, exerçant ses jambes afin de voir s'il avait bien récupéré des Maléfices précédemment infligés.

— Ça va, Harry ? Tu te sens comment ?

— Mieux, Sev', encore heureux.

Harry marcha lentement jusqu'à la grille, s'accrocha aux barreaux et regarda dans le couloir. A sa droite, un Elfe poussait en effet un chariot en bois avec des roues en métal qui grinçaient. Sur ce chariot, il y avait une énorme marmite en fer blanc porteuse d'un gros robinet à sa base. Sur l'étagère inférieure dudit chariot, des piles de gamelles métalliques étaient entassées.

— Harry ? fit une voix connue.

Le jeune Gryffondor tourna la tête et vit un prisonnier le regarder depuis la cellule d'en face.

— Mondingus ? Qu'est-ce vous fichez là ? Vous avez fait quoi, cette fois-ci ? demanda-t-il, amusé.

— Bah ! Rien de méchant, une petite méprise, un malentendu avec une affaire de chaudrons. Les gens sont si mesquins. Et toi ?

L'Elfe glissa une assiette pleine sous la grille de Mondingus ainsi une petite miche de pain et lui remplit sa cruche magiquement. Puis il se tourna vers la cellule d'Harry, regarda à l'intérieur et vit les deux prisonniers. Il prit donc deux gamelles et les remplit de soupe, les posa sur le sol et tendit sans un mot deux pains et deux cuillères à Harry. La cruche fut également remplie magiquement.

— Merci, dit-il à l'Elfe qui se figea et le regarda, étonné.

Un prisonnier qui le remerciait ? Quelle étrange chose !

Dans les cellules déjà servies, on entendait le bruit des cuillères raclant contre le métal des gamelles. Harris et Willy avait attaqué leur souper.

— Mangez pendant que c'est chaud, lui recommanda Ding. Tu me raconteras après.

Severus se leva et marcha jusqu'à la grille où il prit son assiette, ainsi que la cuillère et le pain qu'Harry lui tendait.

— Mondingus…

— Rogue… je vous ai vus arriver cet aprèm. Juste, je sais pas pourquoi vous êtes là. Par Merlin, qu'est-ce que vous avez bien pu fabriquer pour mériter Azkaban ?

— Après la soupe, Ding. Comme tu l'as dit à Harry, c'est mieux de manger chaud.

Mondingus se mit à rire, l'assiette entre les mains. Il allait s'installer sous sa fenêtre, le mur faisant comme un banc, mais il fut interrompu par l'alarme.

Aussitôt, on vit Marcus Flint courir baguette au poing. Il s'arrêta devant la cellule n°1 et pesta. Il courut en sens inverse et fila dans son bureau sans même prendre le temps de fermer la porte derrière lui. Willy Larbrouss, qui occupait la cellule n°6, était celui qui se trouvait le plus près du bureau. Ayant l'ouïe fine, il entendit absolument tout ce qu'il se passait : Flint passait un appel de cheminette au gardien en bas à l'accueil.

— BRUTUS ! C'est Marcus Flint, au second étage. J'ai un mort dans une cellule ! L'Elfe de la soupe vient de le trouver.

— Ah ouais ? Déjà ? Il fait pas si froid pourtant. On n'a que moins sept dehors là. C'est qui ta p'tite nature, là ?

— Ronald Weasley, le prévenu en attente de son procès.

— Ah ouais, lui. Bon, faut que j'appelle les Aurors. Pas le choix. Touche à rien, surtout ! C'est ton premier mort ?

— Ouais…

— T'en verras d'autres, mon gars !

La communication s'interrompit et Willy raconta aux autres ce qu'il avait entendu.

— Ron ? Mort ? s'étonna Harry. Mais de quoi ?

— On le saura avec l'autopsie magique, répondit Severus en haussant les épaules. Mange ta soupe, chaton.

— Elle est bonne ? demanda Harry en allant s'asseoir près de son amant, l'assiette à la main.

— Manque un peu de poivre, à mon goût, mais elle est tolérable.

Ok. Dans le langage Severusien, ça voulait dire « pas mauvaise, voire bonne ». Curieusement, la mort de Ron n'affecta pas Harry autant qu'il l'aurait pensé. Bien entendu, si l'évènement était arrivé quelques années auparavant, il en aurait certainement été effondré. A présent, avec tout ce qui s'était passé depuis… la froideur de Ron, son intolérance, son homophobie, sa trahison, les magouilles de Molly… Harry avait fait un trait sur cette amitié depuis des mois.

L'assiette vidée, Harry se mit à songer à Hermione. Elle ignorait toutes leurs aventures récentes, à moins qu'elle n'ait lu la Gazette du Sorcier. Si elle savait, elle devait se demander ce qui avait bien pu se passer et paniquer. Rick et Walt avaient sûrement été avertis par Dumbledore. Misère… eux aussi devaient paniquer, surtout Walt, connu pour son extrême sensibilité.

— Harry, murmura Severus très discrètement. Si tu as encore faim, nous avons des boites de nourriture dans les sacoches sans fonds. Il faudra juste attendre l'extinction des feux.

— A quelle heure ils éteignent les torches du couloir ? demanda Harry sur le même ton.

— Vingt heures trente, l'hiver et vingt-deux l'été, si je me rappelle bien. Tu as donc intérêt à aller aux toilettes avant sinon, tu vas galérer.

— C'est où qu'on fait ça ?

— Là-bas, le trou, répondit Severus en désignant un trou maçonné dans un angle de la pièce. Et ne me demande pas s'il y a du papier, c'est non. Enfin… j'en ai, mais Azkaban n'en fournit pas.

— Super pour l'hygiène ! Je suppose qu'il n'y a pas de douches prévues ?

— Pas durant notre séjour. La seule douche autorisée, c'est celle du jour de la sortie. Si tu veux te laver quelque peu, il faudra économie l'eau de boisson, ou alors utiliser un Aguamenti Calefactum en croisant les doigts que Flint n'entende pas l'eau couler.

— Il sera là la nuit aussi ?

— Non. La nuit il n'y a aucun gardien. En cas d'urgence, comme un souci médicomagique, eh bien il faut attendre le matin.

— On a le temps de mourir, pesta Harry. Je me demande de quoi Ron est mort et pourquoi il n'a pas appelé à l'aide.

— Pourquoi ? Marcus Flint lui a lancé un sortilège de mutisme, tellement il hurlait et vociférait. Weasley a cherché les ennuis, il les a trouvés.

— Severus ? Ecoute, y a du monde qui arrive.

— Ce sont les Aurors qui viennent récupérer le corps et enquêter.

— Déjà ? s'étonna le jeune Gryffondor.

— En cas d'urgence, ils prennent la cheminette. Les transferts en barque, ça fait partie du rituel d'arrivée et de départ, histoire de bien mettre les prisonniers en condition…

En effet, Severus avait vu juste. On entendait une cavalcade de pieds chaussés de lourdes bottes dans les escaliers de pierre. Le premier Auror sur les lieux fut Gawain Robards. Il était accompagné d'une équipe d'Aurors que ni Harry ni Severus ne connaissaient – du moins favorablement. Ils n'étaient donc pas des membres du très secret Ordre du Phénix. Curieux, nos deux sorciers prisonniers rejoignirent la grille qui les séparait de la liberté. Accrochés aux barreaux, tout comme leurs codétenus des cellules voisines, ils ne perdaient pas une miette de ce qui se passait. On vit arriver derrière les Aurors, le célèbre légistomage Gérald Ackerley et son éternel acolyte le sorcier-funèbre Ulysse Sawbridge.

Severus remarqua que les Aurors Shingleton et McClivert, homophobes virulents, faisaient partie de la brigade de Robards et étaient donc du voyage. Ils avaient intérêt à se méfier de ces deux-là… Il n'avait pas oublié leurs insultes et leurs menaces lors de son procès pour le fameux délit de bougrerie. Le Serpentard posa son index sur ses lèvres, indiquant à Harry qu'il ne devait pas dire un mot mais seulement écouter. On s'agitait au fond du couloir. Marcus Flint ouvrait visiblement la grille de la cellule n°1 car on entendait le bruit des clés et du pêne qui jouait dans la serrure. Et puis, ils perçurent le grincement de la grille qu'on ouvrait.

— Restez dehors ! fit la voix de l'Auror-En-Chef Robards. Laissez travailler le légistomage ! Ma main au feu que c'est encore un crime ! Jamais deux sans trois qu'on dit ! On parie que c'est le troisième ?

— Je te dis ça dans cinq minutes, Robards.

— J'y compte bien, Ackerley !

Le légistomage entra dans la cellule. Ronald Weasley était allongé de tout son long, sur le dos. Il gisait sur les dalles humides et glacées près de la grille servant de porte. D'ailleurs son corps gênait l'ouverture au large et Ulysse Sawbridge, sorcier plutôt dodu n'avait pas la place pour entrer sans que l'on déplace le corps pour ouvrir l'accès en grand.

Les yeux du cadavres, vitreux, étaient grands ouverts. Aucune trace de violence n'était visible. Son uniforme de prisonnier sale et usé n'était pas dérangé. Ackerley sortit sa baguette de son holster et lança une succession de sortilèges sous les yeux intéressés et impatients des forces de l'ordre magiques qui attendaient dans le couloir. Le parchemin médicomagique habituel apparut et commença à se remplir automatiquement dans l'ordre des sortilèges jetés.

Nom : Ronald Bilius Weasley

Âge : 17 ans 10 mois et 27 jours

Statut du sang : sang-pur

Date et heure du décès : le 28 janvier 1998 à 14h45

Causes du décès : Suspicion d'empoisonnement. Présence d'une substance inconnue et non identifiable dans l'estomac.

Les antécédents ne révélaient absolument rien d'anormal. Ron n'avait jamais eu que des petits bobos et des maladies infantiles sans gravité, toutes soignées magiquement. La seule chose étrange était que le détenu était sous un sort de mutisme.

— Chef Robards ? Même topo que pour Rufus Fudge. C'est visiblement encore un empoisonnement. Impossible de déterminer à quoi.

— Un tueur en série ? On a un tueur en série sur les bras ? pesta Gawain horrifié en prenant le parchemin des mains d'Ackerley.

— Pas forcément, Gawain. C'est peut-être accidentel. Va savoir ! En tout cas, la mort d'Ombrage est un accident, je le confirme.

— Ouais… elle… je veux bien. Mais entre nous, Weasley et Fudge, mourir à quelques minutes d'intervalles, des mêmes causes ? Pour moi c'est clair ! Ce n'est pas naturel !

— Je pense que tu as deux tueurs, Gawain. Le même type ne pouvait pas être au Ministère et ici à la fois ! Il faut une heure par le bateau et Brutus ne quitte jamais son bureau la journée. Il te l'a dit. Il y prend même ses repas. Et la nuit la cheminette est fermée.

— Ouais… ça veut dire que le tueur était dans les murs ! Et qu'il y est peut-être encore ! Apportez le Véritasérum, on va interroger tous les prisonniers de cet étage et tous les gardiens de la prison ! Au boulot ! Et c'est quoi ce sort de mutisme ? GARDIEN ?

— Chef Robards ? répondit Marcus Flint en s'approchant d'eux.

— La victime était sous sort de mutisme. Pourquoi ? C'est vous ?

— Oui, Chef. C'était insupportable ici. Il n'arrêtait pas de hurler, d'insulter, de menacer. Un vrai fou furieux ! Et tout ça depuis que les nouveaux prisonniers ont été amenés par Kingsley Shacklebolt et son équipe ce midi.

— Tiens donc… et qui sont ces prisonniers ?

— Le Professeur Severus Rogue et Harry Potter, Chef Robards, répondit docilement Marcus.

— Comme par hasard ! On va les interroger tout de suite ! Ouvrez la cellule !

Flint fit jouer la clé dans la serrure et ouvrit la grille avec un air désolé à l'adresse de son ancien Directeur de Maison.

— Alors comme ça, vous êtes ici… tous les deux… et dans la même cellule ! Ben voyons ! Pourquoi ne sont-ils pas séparés, ces déviants ?

— Le Chef Shacklebolt a dit qu'il ne fallait pas. Il dit que ce sont des Obscurials et qu'ils s'ancrent l'un l'autre. Je l'ai entendu dire à Brutus avant de partir qu'il avait eu la peur de sa vie en voyant l'Obscurus de Rogue.

— Bizarre, cette affaire ! McClivert, joignez Kingsley au quartier général et demandez-lui des explications et une éventuelle confirmation.

— Oui, Chef.

— Qui a du Véritasérum ?

— Moi, Chef, répondit l'Auror Johnson en lui tendant une petite fiole contenant un liquide transparent.

Baguette au poing, visant Harry et Severus, il entra dans la cellule.

— Flint ? Conjurez une chaise, s'il vous plaît !

— Tout de suite, Chef.

La chaise de Marcus était un simple tabouret, mais on ne pouvait pas trop en demander à Flint qui n'avait eu que deux BUSEs (soins aux créatures magiques et défense contre les forces du mal) et un seul ASPIC (celui de défense).

— Potter ! Asseyez-vous sur ce siège et ouvrez la bouche !

Harry lança un regard las à Severus et s'assit sans un mot. Obéissant, il ouvrit la bouche et tira la langue. Gawain Robards utilisa le compte-gouttes pour y déposer les trois gouttes recommandées. Il attendit que le regard du jeune Gryffondor se voile.

— Quel est votre nom ?

— Harry James Potter.

— Quel âge avez-vous ?

— Dix-sept ans et demi.

— Pourquoi êtes-vous à Azkaban ?

— Je ne peux pas terminer mon Travail d'Intérêt Magique à Sainte-Mangouste.

— Et pourquoi donc ?

— Un visiteur m'a lancé un Doloris et ensuite un Avada Kedavra.

Robards sursauta. Il avait entendu un truc comme ça à midi mais avait cru que c'était une idiotie.

— Est-ce que le sort de mort vous a atteint ?

— Oui.

— Par Merlin… ok ok… Et qui vous a jeté ces deux impardonnables ?

— Rufus Fudge.

— Par les culottes de McIntosh ! Potter, êtes-vous responsable de la mort de Rufus Fudge ?

— Non.

— Savez-vous qui l'a tué ?

— Non.

— Êtes-vous responsable de la mort de Ronald Weasley ?

— Non.

— Savez-vous qui l'a tué ?

— Non.

Gawain eut une brusque inspiration et tenta deux autres questions.

— Que savez-vous de la mort de Dolorès Ombrage ?

— Rien.

— Êtes-vous un Obscurial ?

— Il parait que c'est le nom qu'on leur donne, oui.

Robards se frotta le visage d'une main lasse.

— Levez-vous et allez vous asseoir sur votre paillasse.

Comme un zombi, Harry se leva et alla s'asseoir là où on le lui avait demandé. Les mains sur les genoux, il fixait un point dans le mur sans avoir l'air de le voir.

— ROGUE ! A vous ! Asseyez-vous ici ! ordonna l'Auror en désignant le tabouret de sa baguette.

Severus soupira. Il ne pouvait rien faire d'autre que d'obéir et de répondre aux questions de Robards qui seraient certainement les mêmes ou presque que celles d'Harry. Lui aussi eut le droit à ses trois gouttes de Véritasérum.

— Nom, prénoms, âge et qualité !

— Severus Tobias Rogue, trente-huit ans, Maître des Potions, répondit-il d'une voix monotone quand la potion eut agi.

— Pourquoi avez-vous quitté Sainte-Mangouste ?

— Pour protéger Harry. Il ne pouvait pas rester, c'était trop dangereux.

Robards marmonna quelques insanités sur les déviants qui ne pouvaient même pas se passer l'un de l'autre quelques heures…

— Êtes-vous un Obscurial ?

— Kingsley dit que je le suis car il a vu mon Obscurus. Je l'ignorais avant.

— Tiens donc… Et qui dit que Potter est un Obscurial ?

— Albus Dumbledore et Kingsley.

— Bon, d'accord… Maintenant, dites-moi… Avez-vous quelque chose à voir avec la mort de Rufus Fudge ?

— Non.

— Avez-vous tué ou fait tuer Ronald Weasley ?

— Non.

— Savez-vous qui l'a fait ?

— Non.

— Que savez-vous de la mort de Dolorès Ombrage ?

— Rien.

Gawain se frotta le menton et se souvint de ce que Jenny Biscus avait déclaré dans la Gazette, sur la disparition de Rita Skeeter. Rogue avait l'air d'en savoir plus qu'il n'en disait selon elle.

— Que savez-vous de la disparition de Rita Skeeter ?

— Rien.

Ackerley qui avait tout écouté entra dans la cellule et tapota l'épaule de l'Auror.

— Ils ne savent rien et n'y sont pour rien. Shingleton vient d'interroger Mondingus Fletcher et Harris Laverrue pendant que Johnson interrogeait Larbrouss. Les réponses sont identiques. Ils ne savent rien, n'ont rien vu et n'ont aucune idée de qui est responsable.

— C'était à prévoir. Ils sont enfermés de toute façon. Mais ils auraient pu voir quelque chose. Flint ? On va vous interroger dans votre bureau, venez. Evariste n'est pas là, aujourd'hui ?

— Non, il est de repos le mercredi, Chef.

Ce fut à ce moment-là que McClivert revint, tout essoufflé.

— J'ai eu Kingsley à la cheminette, Chef. Il confirme. Il a vu l'Obscurus de Rogue ce midi et il dit que celui de Potter a été vu par Albus Dumbledore quand, inconscient, Potter a démoli l'infirmerie de Poudlard parce qu'on avait séparé les déviants. Il dit que l'ordre de ne pas les séparer vient de Dumbledore. Selon Kingsley, ça serait trop dangereux de s'y risquer. Brutus dit qu'il n'est pas question qu'on lui démolisse sa prison ! Et donc il exige qu'on les laisse tranquilles. Il dit que dans un mois, ils seront relâchés et retourneront dans le Monde Moldu définitivement.

— Oui. Ça, je suis au courant. Rogue n'a plus le droit de revenir et Potter n'a pas été vu depuis, à part à Sainte-Mangouste. Bon, laissons-les tranquilles. Ils ne savent rien de ce qui nous intéresse de toute façon. Ferme la grille des déviants avec un sort, Flint la verrouillera en revenant.

Gawain Robards n'avait pas prévu de photographe officiel du Département de la Justice Magique lorsqu'il avait quitté le Ministère. Il faut dire qu'il était dix-huit heures passées et que celui attitré avait quitté les lieux depuis plus d'une heure.

Habitué à ces aléas, Ackerley avait fait les photos lui-même avec sa baguette et avait ensuite déplacé le corps afin de pouvoir ouvrir la grille en grand. Ulysse Sawbridge avait pu entrer dans la cellule et placer le cadavre dans un de ces fameux « sacs à sorciers » comme on disait. Lorsque les interrogatoires sous Véritasérum avaient été terminés et que McClivert était remonté, le sac noir contenant Ron se trouvait sur une civière en lévitation. Ulysse et l'Auror Johnson prirent chacun les poignées de la civière et la petite troupe longea le couloir pour quitter les lieux. En apercevant vaguement la civière passer, Harry eut une pensée attristée pour Arthur, les jumeaux, Charlie et Bill. En bref, les Weasley les plus intéressants pour lui.

Selon Severus, les cadavres étaient évacués par la cheminette du bureau d'accueil, et expédiés à la morgue de Sainte-Mangouste afin d'être stockés dans des tiroirs réfrigérés magiques. Profitant qu'il y avait encore de la lumière dans le couloir et que Mondingus n'était plus à sa grille à les regarder, Harry fila au fond de la cellule pour se soulager avec un soupir de satisfaction. Alors qu'il revenait, Severus s'avançait pour prendre sa place.

Le Gryffondor s'allongea sur sa paillasse et fixa le plafond à travers ses lunettes à faux verres. Il faisait très froid dans la cellule car de la vapeur s'échappait de sa bouche à chaque expiration. Passer un mois dans cet endroit n'allait pas être une partie de plaisir, certes non. Mais pourrir la vie de Cornélius Fudge valait vraiment ce petit sacrifice. D'ailleurs, c'était quoi cette histoire ? Ombrage, morte ? Fudge junior, mort ? Et Ron… mais que se passait-il donc dans le Monde Magique ?

— Severus ?

— Oui ?

— Ombrage est morte, Rufus Fudge est mort ainsi que Ron. Comment ça se fait ?

— Je n'en sais pas plus que toi, chaton, répondit le potionniste en se glissant sous sa couverture près d'Harry.

— On dirait que quelqu'un n'apprécie pas ce qu'ils m'ont fait.

— En effet, c'est plutôt curieux.

— Tu sais, Sev', si Daryl Mulciber est retrouvé mort demain, je crois que j'aurai ma petite idée.

— Je crois que je sais à qui tu penses, Harry.

— J'ai froid, Sev'. Tu me serres contre toi ?

— Toujours… répondit le Serpentard en se couchant sur lui et en l'embrassant à pleine bouche.

Harry et Severus auraient peut-être osé aller plus loin si Mondingus ne les avait pas appelés. Le voleur voulait tout savoir de leur présence en ce triste lieu. Il fallait dire que voir arriver un ex-professeur de Poudlard ainsi que le Sauveur du Monde Magique, ce n'était pas quelque chose à laquelle on pouvait normalement s'attendre.

— POTTER ! ROGUE ! HÉ ! VOUS DORMEZ PAS DÉJÀ, QUAND MÊME !

Severus soupira et retira sa main de sous la chemise de prisonnier d'Harry. Il se redressa et regarda vers le couloir.

— Qu'est-ce que tu veux, Ding' ? On est occupés !

— Occupés ? A quoi, bon sang ! On se fait chier comme des rats morts !

Il marqua un moment de silence et soupira.

– Oh. Je vois. C'est pas l'endroit, les mecs !

La voix de Willy Larbrouss se fit entendre alors.

— Y font quoi ?

— Laisse tomber Willy, c'est pas d'ton âge !

On entendit alors Harris ricaner depuis son grabat.

— J'te f'rais dire, Ding' que Will, il a quarante-trois ans…

— Ta gueule, Harris, tu sais bien que cette andouille n'a jamais vu le loup ! Tu vas le traumatiser !

— Hé, pas faux, mec… Pas faux. Willy ? C'est pas d'ton âge, mon gars, tu pigeras pas.

— Bon, si au lieu de faire la bête à deux dos, vous nous racontiez c'que vous fichez-là tous les deux ! Et faites gaffe à Marcus. S'il vous chope, il racontera tout à Brutus, vu qu'Evariste n'est pas là. Faudrait pas que vous ayez huit jours de plus à faire dans ce trou à rats. La saison ne s'prête pas pour ça.

Ce fut Severus qui leur résuma leurs aventures – la version officielle bien entendu. Ils confirmèrent qu'ils ignoraient tout des décès cités précédemment, ainsi que de la disparition de Skeeter. Pas qu'elle soit très regrettée.

A l'heure dite, Marcus Flint vint éteindre les torches. C'était l'heure du couvre-feu et lui il rentrait à la maison par la cheminette. Dès que tous les gardiens avaient quitté les lieux, Brutus en verrouillait l'accès et rejoignait ses quartiers situés au rez-de-chaussée. Il était le seul à avoir un logement de fonction et faisait office de concierge.

Pour vingt-et-une heure, la prison fut plongée dans la pénombre et le silence.

Pour Harry et Severus, la soirée commençait. Severus sortit de sa musette une boite contenant des saucisses et du bacon qu'il réchauffa de sa baguette de secours et déposa sur de larges tranches de pain des Elfes. Une fois restaurés, il déboucha un thermos de thé, en versa dans deux mugs métalliques qu'il avait aussi dissimulés et rajouta une rasade de Whisky Pur Feu Vieil Ogden. Harry éclata de rire et spontanément heurta la tasse de son amant dans le but de trinquer.

— Manque plus qu'une clope et la vie pourrait être belle.

— Tu n'y as pas pensé ?

— Chais plus… j'ai mis plein de trucs dans ma musette. Tu veux bien faire un Accio dedans ? J'ai pas de baguette de secours.

Severus, un petit rictus aux lèvres ne mit pas une minute à récupérer un briquet et leurs deux paquets de cigarettes non entamés. Un sort sur la grille allait empêcher l'odeur de tabac de passer par là et d'attirer leurs codétenus. Ce sort donna une idée à Harry.

— Tu peux mettre un Assurdiato sur notre cellule ?

— Oui, pourquoi ?

— Je veux faire l'amour avec toi.

— Par Merlin, gronda Severus, faire l'amour à Azkaban, ça c'est de l'inédit ! Je suis presque certain que personne n'a osé en mille ans !

— Eh bien, finis ta clope et viens inaugurer…


Il était près de vingt heures quand Kingsley Shacklebolt et Maugrey Fol Œil transplanèrent au Terrier. Arthur, Bill, Charlie et les jumeaux étaient à table. Un Patronus en forme de lynx – celui de Kingsley – les avait prévenus de leur visite. Quand les deux Aurors entrèrent dans la salle à manger, ils virent des emballages de nourriture chinoise à emporter dont les marques indiquaient leur provenance moldue. Forcément, la cuisinière ayant quitté les lieux, les hommes de la maison devaient dorénavant se débrouiller seuls.

— Arthur, les garçons… bonsoir à tous, lança Kingsley en avançant vers la tablée.

— King, Fol Œil ! Asseyez-vous ! Un petit Vieil Ogden ?

— Merci Arthur, mais je suis en service, marmonna Kingsley. Par contre, je ne dirais pas non à une bonne tasse de thé.

— Moi, chuis pas en service, fit Fol Œil avec un rictus. Et je le serai plus jamais. Donc, je prendrai un whisky sans souci.

Arthur fit un signe de tête à Bill qui fila remplir la vieille théière et la réchauffer d'un coup de baguette tandis que George sortait une flasque de whisky de la poche de son blouson et en versait un verre à Fol Œil. Les deux Aurors remarquèrent que tous les Weasley étaient à la Bièraubeurre.

— Tu disais que tu étais en service, King ? Des nouvelles ?

— Oui, Arthur, soupira le grand noir depuis sa place. Je n'ai pas de bonnes nouvelles.

Un mug fut déposé devant lui ainsi que le sucrier et une petite cuillère. La théière remplie d'English Breakfast basique fut posée à côté, le temps d'infuser.

— A chaque fois que quelqu'un nous parle de Ron, depuis des mois, ce ne sont jamais de bonnes nouvelles ! gronda Charlie, excédé. Je m'attends à tout maintenant.

— Ce soir, à dix-huit heures, l'Elfe servant la soupe a trouvé Ron mort dans sa cellule à Azkaban. Selon le légistomage Ackerley, il est possible qu'il s'agisse d'un empoisonnement, mais il ignore avec quoi. Et donc ce n'est pas une certitude absolue. Il pense pourtant que les similitudes avec la mort de Rufus Fudge sont trop énormes pour être un hasard.

Un silence lourd accueillit sa révélation. Les frères Weasley se regardèrent en silence puis regardèrent leur père.

— Il fallait s'y attendre, marmonna Arthur en acceptant le verre de Vieil Ogden que lui tendait à présent Fred. Ron n'arrêtait pas ses idioties. Il a dû mettre quelqu'un de puissant très en colère.

— Selon le Gardien Flint, il était sous sort de mutisme. Il n'arrêtait pas de hurler, menacer, insulter, surtout deux prisonniers particuliers arrivés à midi à Azkaban. Ça devenait invivable pour le personnel et les détenus. Ils ont donc été dans l'obligation de le museler.

— C'étaient qui les prisonniers ? demanda Fred en jetant un œil soupçonneux vers George.

— Harry et Severus.

— Je l'aurais parié ! pesta George, la mine écœurée.

— Pourquoi sont-ils à Azkaban ? demanda alors Bill.

— Harry a été attaqué ce matin dans un couloir de Sainte-Mangouste… Doloris et Avada Kedavra. Il était mort quand on l'a déposé dans la salle d'examen des Urgences. La Médicomage a tenté de faire repartir son cœur selon les nouvelles techniques inventées d'après les façons moldues. Ça n'a pas marché. Alors Severus est arrivé avec Spleen et… j'ai vu une chose absolument incroyable, terrifiante.

— Quoi donc ? fit Charlie tout-ouïe.

— Severus s'est précipité sur Harry et l'a pris dans ses bras. Je crois même l'avoir entendu sangloter. Et puis…

Il hésita, ne sachant comment la nouvelle allait être prise.

— Dis-leur, King ! Ou alors je le fais.

Kingsley fit un geste vers Fol Œil, lui laissant le loisir de faire la révélation en question.

— Ben, mes enfants, Rogue a ressuscité Potter ! Comme je vous l'dis !

— Ressuscité ? pesta Bill. Comment ? Il n'y a aucun moyen pour ça !

— Severus est un Obscurial, paraît-il. Son Obscurus est sorti de lui, je l'ai vu. Il est entré dans Harry et a fait repartir son cœur. Le gamin a sursauté, pris une grande respiration et s'est réveillé.

— Par la barbe de Merlin ! gronda Bill. Les Obscurus, ça fait pas ressusciter les gens, King ! Ça détruit et ça tue !

— D'après Albus, Harry en est un aussi, un Obscurial. Quand on l'a séparé de Severus, il a détruit l'infirmerie de Poudlard.

— Ben ça, tu vois, c'est plus du comportement d'un Obscurus, confirma Bill. Mais un Obscurial en ressusciter un autre ? Du jamais vu !

— Et si deux Obscurials sont amoureux l'un de l'autre ? proposa Fred.

— Ça ferait quoi ? termina George.

— Bonne question, répondit Fol Œil en vidant son verre.

— L'enquête sous Véritasérum de Gawain Robards a prouvé que ni Harry, ni Severus n'ont à voir dans la mort de Ron, de Rufus Fudge ou d'Ombrage. Aucun des autres prisonniers ou même des gardiens n'est impliqué.

— Quelqu'un fait le ménage, fit Charlie en hochant la tête.

— C'est ce que j'pense aussi, tonna Fol Œil. Et vu toutes les saloperies que Potter et Rogue ont dû endurer ces derniers mois, on n'a pas fini de trouver des cadavres, moi j'vous l'dis !

— Ben si c'est ça, faut les libérer immédiatement et les laisser repartir dans le Monde Moldu. Et surtout leur rendre tout leur or qu'on leur a piqué, déclara Fred. Le Ministère a été absolument lamentable sur ce coup-là. Pour juste un délit, on les a chassés, ruinés, privés de travail, agressés, tué pour Harry ! Car je vous rappelle que s'il n'était pas résistant aux impardonnables, ben il serait entre quatre planches ! Et maintenant, on apprend qu'ils sont à Azkaban ! Et bien entendu sans aucune raison valable ! C'est de l'acharnement ! Et je ne parle pas de Pomfresh qui a viré Severus malade de l'infirmerie quand Dumbledore lui a demandé de le soigner !

— Je sais bien. Mais la Loi dit que si un condamné ne fait pas son Travail d'Intérêt Magique, il doit aller en prison pour le même temps, affirma Kingsley en sirotant sa tasse de thé.

— Ils les auraient faits leurs Travaux, si on leur avait fichu la paix ! Mais nan, fallait que ce connard de neveu de Fudge le torture et le tue ! Et bien entendu, sans aucune punition ! grinça George, totalement furieux.

— Exact. Je l'ai arrêté et il a été libéré dès son arrivée au Ministère. Mais si tu as raison Fred, on risque d'avoir un autre cadavre sur les bras d'ici demain. Il est même peut-être déjà mort.

— Qui et pourquoi ? demanda alors Charlie, étonné.

— Hier, Daryl Mulciber a lancé un Diffindo sur Harry alors qu'il passait le balai dans un couloir. Son collègue de l'entretien l'a conduit aux Urgences, il était blessé au visage. Mais le salopard a pu s'en aller tranquillement. Oh, on l'a bien arrêté, après que la sécurité de l'hôpital ait stupéfixé Mulciber, mais comme pour Fudge, à peine arrivé au Ministère, il a été libéré aussitôt.

— C'est lamentable, soupira Arthur que tous ces évènements bouleversaient.

— S'acharner sur Severus et Harry a été une très mauvaise idée de Fudge. Si ça continue, il va être le prochain, lui ou Travers du Trésor Magique. C'est lui qui a ressorti la vieille loi d'Hypocritus Le Zélé pour les priver de tout leur or. Cette loi n'était plus appliquée depuis des siècles mais n'avait pas été abolie.

— Ils voulaient faire un exemple, en utilisant pour ça des figures connues du Monde Magique, soupira Charlie.

— Vous avez une idée de qui est derrière tout ça ? tenta Bill.

— Aucune. Personne ne sait rien, personne ne voit rien. On ne sait pas comment ils font, c'est incompréhensible. La mort d'Ombrage a été jugée accidentelle, mais avec tout ce qui s'est passé depuis, je vais vous avouer que j'ai de très gros doutes.

— Ron n'avait aucune chance d'échapper à ce vengeur, alors, soupira Arthur.

— Pour Ron, c'est pas certain non plus que ce soit le même, répondit Fol Œil. Il a blessé gravement un enfant, et il a tué une vieille dame sur le Chemin de Traverse. Les familles ont pu organiser quelque chose pour le faire payer. Mais je vais vous dire, et j'en suis bien désolé, Arthur, mais Ronald était dangereux, incontrôlable. Un véritable tueur ! Laissé libre, il aurait fait autant de dégâts qu'un Mangemort, j'en suis malheureusement certain. Trop vu ce genre-là autrefois.

— Oui. J'ai bien peur que tu n'aies raison, Fol Œil. J'avais beau dire à Molly d'arrêter de l'encourager, mais en vain. Elle continuait. D'abord la Brigade Inquisitoriale, et puis après ce Comité de Bienséance… Et à chaque bêtise, elle le couvrait, niait tout. Albus m'avait prévenu du danger. J'aurais dû l'écouter, il serait peut-être vivant. J'aurais dû laisser le conseil de discipline le renvoyer de Poudlard et lui casser sa baguette. Il n'aurait pas tué cette pauvre femme, et il n'aurait pas fini à Azkaban… C'est de ma faute.

— N'importe quoi ! Tu as tout fait pour l'aider, P'pa ! pesta Bill. Ron était mauvais, pourri jusqu'à l'os ! Fol Œil et Dumbledore ont raison. Même sans baguette il aurait été dangereux. Les Moldus n'ont pas de baguettes et pourtant ils s'entretuent et ont des tueurs en série. On lit les journaux moldus à Gringotts, donc on est au courant de ces choses !

— Le corps vous sera rendu dans trois jours pour les obsèques, à moins que vous ne le réclamiez pas. Dans ce cas, il sera inhumé dans le carré des prisonniers au pied de la prison d'Azkaban. Nous ne l'avons emporté que parce que le décès n'était pas naturel.

— Je vais le faire enterrer. Il reste encore une place dans le caveau de famille, annonça Arthur en se frottant les yeux avec son mouchoir.

— On aidera à payer un cercueil, affirmèrent alors les jumeaux en même temps.

— Nous aussi. Il ne sera pas dit qu'on l'enterrera comme un chien, ajouta Charlie en regardant Bill qui hochait la tête.

— Est-ce que Molly a été avertie ?

— Gawain Robards et un de ses gars sont en ce moment chez Muriel pour les prévenir, déclara alors Kingsley en se levant de table. Merci pour le thé, Arthur. Et je suis navré de tout ce qui vous arrive depuis quelques temps. Toutes mes condoléances.

— Merci, King, Fol Œil.

— On doit encore passer à Poudlard, on doit prévenir Albus des derniers évènements.

— Harry et Rogue vont bien quand même ? demanda Fred en tendant la main à Kingsley pour lui faire ses adieux.

— Pas terrible quand on les a laissés. Harry était à peine conscient et Severus n'a laissé personne l'approcher. J'essaierai d'avoir des nouvelles avec Marcus Flint demain.

— Flint ? Pourquoi lui ? insista Fred.

— Flint est le gardien de leur étage.

— Alors ils seront tranquilles. Flint est un demeuré, mais un Serpentard et il idolâtre Severus, comme tous les Serpents.

— J'ai remarqué. Il leur a donné des tenues de prisonniers flambant neuves. Allons-y, Fol Œil, l'heure tourne.


A Poudlard, Albus Dumbledore venait d'apprendre la nouvelle par Kingsley et Fol Œil. Assis derrière son bureau, le vieil homme était songeur et triturait sa baguette de sureau, les yeux dans le vague. La mort de Ron Weasley épargnait le Monde Magique d'une potentielle hécatombe car deux victimes en quelques jours, pour un garçon de dix-sept ans, c'était énorme. Alastor avait raison, quelqu'un faisait le ménage. Albus ne regretterait certainement pas Dolorès Ombrage qui ne valait pas mieux qu'un Mangemort. Quant à Rufus Fudge, c'était un vil personnage qui abusait de la position de son oncle pour faire n'importe quoi en toute impunité. Tenter de tuer Harry Potter ? Il n'avait eu que ce qu'il méritait.

Si Kingsley et Alastor avaient raison, on trouverait bientôt les cadavres de Mulciber et Travers. Et si tel était le cas, il profiterait de ces décès pour faire fléchir Cornélius. Le Ministre paniquerait, persuadé qu'il serait la prochaine victime. C'était possible… Pour bien faire, il faudrait que la vieille loi scélérate soit abrogée entre temps, que Severus et Harry sortent d'Azkaban, et pour finir, il faudrait que le Ministère leur rendre leur or, du moins celui d'Harry. Albus savait très bien que Severus n'avait aucune fortune personnelle, son grand-père ayant refusé de tester en sa faveur.

Le vieux Directeur de Poudlard n'avait pas osé raconter à Walt Lestrange ce qui était arrivé à son cousin Severus ainsi qu'à Harry. Le jeune Sauveur lui avait bien dit que Walt était hypersensible et que Rick, Severus et lui, s'efforçaient de toujours le ménager. De trois élèves, Albus était passé à treize, ce soir. Un petit groupe de dix anciens Cracmols avait demandé à être reçu et le choixpeau les avait répartis : trois Serpentards, deux Gryffondors, deux Serdaigles et trois Poufsouffles. Albus les avait présentés à Minerva, Pomona, Filius et Horace. Tout le monde avait été enchanté. Ça commençait à faire beaucoup d'élèves pour le vieux sorcier, surtout qu'il devait gérer aussi son école, alors enseigner même deux heures à dix élèves, ça allait mais il y avait les copies à corriger, les cours à prévoir… et il n'allait pas en rajeunissant.

Et si la potion du Prince continuait à lui ramener des élèves adultes, le problème allait s'aggraver. Il fallait qu'il trouve un professeur. Ce fut Alastor qui lui donna l'idée.

— Ce pauvre Arthur… Il m'a fait bien de la peine. Son divorce d'avec Molly lui a fait perdre son boulot, alors qu'il ne gagnait pas bien lourd déjà, mais en plus il doit enterrer un de ses gosses.

— Il a perdu son travail ? Personne ne m'a raconté ça ! s'étonna Albus Dumbledore. Il faut dire que je n'ai pas eu beaucoup de temps pour éplucher la Gazette. A part la première page… je n'ai pas lu grand-chose.

Eh bien voilà ! Il avait sa solution ! Arthur était de toute confiance, et il avait besoin d'un emploi ! Il allait tout à l'heure lui proposer la place ! Il allait accepter, bien entendu !

°Ouf ! Une épine en moins dans mon pied ! °

Un Patronus calma sa joie. Il s'agissait de celui de Tonks, un gros lièvre…

— King, Fol Œil, faut que vous veniez tout de suite, la femme de Mulciber a trouvé son époux mort en rentrant chez eux, et… les Elfes de ménage du Ministère ont trouvé Travers mort dans le Service du Trésor Magique où il faisait des heures sup'. C'est la panique, ici. Fudge est hystérique.

— Je viens avec vous. Il est temps que le Magenmagot mette les pieds dans le chaudron ! Vous aviez raison. Nous avons visiblement un ou plusieurs vengeurs sur les bras. FUMSECK ! Emmène-nous au Ministère de la Magie !


Le phénix déposa les trois hommes dans l'Atrium du Ministère. Il y avait là une agitation suspecte étant donné l'heure avancée. Les cheminettes s'allumaient sans cesse, laissant entrer et sortir des hordes de sorcier : les Aurors, les tireurs d'élite de baguettes, les Langues-de-Plomb, les membres du Magenmagot qui venaient aux nouvelles et bien entendu, les inévitables journalistes.

— Ah ! Albus, te voilà, s'exclama Dedalus Diggle son vieux tube violet à la main. C'est le branle-bas de combat ici. Cornélius a rameuté tout le monde. Il veut des têtes. Enfin, c'est ce qu'il dit. Il accuse tout le monde et n'importe qui. Surtout Potter et Rogue ! Il dit que c'est de leur faute, qu'ils sont les responsables de cette hécatombe.

— Ils ne sont responsables de rien du tout ! Ils sont enfermés à Azkaban depuis ce midi ! Robards est allé les interroger sous Véritasérum et il a eu la confirmation de leur innocence. Alors qu'est-ce que Cornélius est encore en train d'inventer ? Il commence à me courir sur le râble !

— Il est dans son bureau, enfermé avec deux Aurors et deux tireurs d'élite de baguettes et refuse d'en sortir ou même d'ouvrir la porte. Miss Bondupois est au bord du burn-out, soupira Diggle.

— Où est Amélia ?

— Elle enquête avec ses Aurors. Ils ont rappelé tout le monde. Ça crise, je peux te le dire. On en est à quatre meurtres depuis ce matin. Sans compter la mort accidentelle de Dolorès Ombrage. Ça commence à faire beaucoup.

— Je file faire entendre raison à Cornélius et il a intérêt à écouter ou je vais me fâcher.

Albus Dumbledore planta là son vieil ami et prit l'ascenseur pour se rendre au niveau 1, là où les services du Ministre se trouvaient. Le couloir était rempli de monde : Albus reconnut des chefs de service venant aux nouvelles, des Aurors, des Langues-de-Plomb et de très nombreux membres du Magenmagot. Il y avait surtout la nouvelle peste de la Gazette, Miss Jenny Biscus avec Bozo, le photographe de la non-regrettée et toujours manquante Rita Skeeter.

Le vieil homme marcha d'un pas décidé vers le fond du couloir et bouscula plusieurs personnes pour entrer dans le bureau de Miss Bondupois à qui Tonks faisait respirer des sels magiques.

— Que ceux qui n'ont rien à faire ici rentrent chez eux ! Ordre du Magenmagot ! Alastor ! Fais passer le mot aux Aurors. Mettez un peu d'ordre dans ce foutoir !

A la porte de Cornélius, Lucius Malefoy tentait de négocier son entrée, mais le Ministre s'était barricadé et refusait d'ouvrir.

— CORNÉLIUS ! C'EST ALBUS DUMBLEDORE ! OUVREZ CETTE FICHUE PORTE OU JE LA DÉFONCE !

— Qu'est-ce qui me prouve que vous n'êtes pas un imposteur ?

— Rien ! Mais vous enfermer dans votre bureau ne résoudra rien. J'ai la solution ! Nous devons aller jusqu'à la salle d'audience n°10 pour une session du Magenmagot immédiatement !

— Vous… vous savez ce qui se passe ? Un fou est en train de tuer tout le monde ! Dolorès, mon neveu, ce pauvre Travers aussi ! Mais que se passe-t-il ?

— Lord Malefoy va venir vous chercher et vous escortera jusqu'à la salle d'audience. Miss Bondupois ?

— Pro… Professeur Dumbledore ? renifla la secrétaire, un mouchoir sur le nez.

— Envoyez une convocation générale à tous les membres du Magenmagot pour une session urgente et immédiate. La plupart se trouve au Ministère à tenter de savoir ce qui se passe, de toute façon ! Prévenez aussi Amélia Bones, qu'elle nous rejoigne.

— Tout de suite, Professeur Dumbledore.

— Professeur Dumbledore ! Quelques mots pour la Gazette ! Est-ce vrai que les deux sodomites ont commis ces meurtres ? Va-t-on les exécuter ? Il faut remettre le Baiser du Détraqueur pour les déviants. C'est ce que vous allez voter ce soir ?

Albus, les yeux étincelants de rage, s'immobilisa et toisa la journaliste avec mépris.

— Certainement pas ! Harry Potter et Severus Rogue n'ont rien fait du tout et l'enquête l'a déjà prouvé ! Si vous faisiez correctement votre travail au lieu d'inventer des inepties, vous le sauriez déjà ! Attention, Miss Biscus… Faites très attention, vous commencez à me fatiguer très sérieusement avec vos articles mensongers. Si vous espérez suivre les traces de Miss Skeeter, vous faites une très grave erreur. Je n'hésiterai pas à vous faire arrêter et expédier à Azkaban pour Trouble à l'Ordre Public, Diffamation et autres du genre. Vous êtes prévenue ! Je vous ai à l'œil ! Et c'est aussi valable pour vos confrères ! Vous pouvez faire passer le mot ! AURORS ! FAITES PARTIR LES JOURNALISTES !

Une équipe du Département de la Justice Magique s'approcha, baguettes aux poings et les gratte-papiers et leurs photographes furent obligés de quitter les lieux sur le champ.

Pendant ce temps, Lucius Malefoy avait réussi à négocier l'ouverture de la porte et était entré dans le bureau où Cornélius, totalement paniqué, se terrait. Albus Dumbledore entra à sa suite dès que les journalistes eurent quitté le couloir du niveau 1.

— Inutile de paniquer, Cornélius, nous allons régler ça tout de suite. Mettez votre tenue du Magenmagot ! Nous allons salle d'audience n°10.

— Et… et ça suffira ? Mon neveu, Dumbledore ! Ce sont ces deux sodomites, n'est-ce pas ? Potter et Rogue ! Ils ont tué mon neveu ! Et cette pauvre Dolorès ! Où est Percy ? Pourquoi n'est-il pas là ? WEATHERBY !

— Pour commencer, Severus et Harry ne sont responsables de rien ! Ils sont à Azkaban depuis midi à cause de votre neveu, Cornélius ! Votre neveu qui a lancé un Doloris et un Avada Kedavra à Harry Potter, comme ça, pour s'amuser ! Neveu que vous avez fait libérer à peine arrêté ! La même chose pour Mulciber qui a attaqué Harry hier ! Vous ne comprenez donc pas que quelqu'un veut les venger ? Et Ronald Weasley a été tué ce soir dans sa cellule d'Azkaban ! Certainement par la même main !

La tête qu'affichait Malefoy devant ces révélations prouvait ou du moins faisait soupçonner à Albus que le Mangemort blond n'y était, pour une fois, pour rien.

— Je vais être le prochain ! Ils vont me tuer aussi ! gémit Cornélius Fudge à deux doigts de la panique.

— Pas du tout ! Si vous faites ce que je vous dis, il ne vous arrivera rien !

— Vous… vous êtes sûr ?

— Je le suis, Cornélius ! Allez, venez. On a du travail ! Venez aussi, Lucius.

Perchés sur le dessus d'une armoire, dans le bureau de Miss Bondupois, deux Elfes-De-Maison invisibles souriaient de toutes leurs dents.

Dobby et Winky : 5

Ministère : 0


Tous les membres du Magenmagot qui avaient pu être joints à cette heure tardive étaient présents. Et ils étaient passablement agités dans la salle d'audience n°10, la plus grande du Ministère. Albus, en grande tenue pourpre, entra, suivi d'Amélia Bones et de Cornélius Fudge. Au signe de tête du Président-Sorcier, Kingsley Shacklebolt hocha la sienne, verrouilla les portes et s'installa devant avec son collègue Alan Savage. Tonks et Fiertalon patrouillaient autour de l'aréopage, et Dawlish – absent pour cause de vacances au ski – était remplacé par Gawain Robards.

Albus frappa le tas de son marteau pour exiger le calme.

— Je déclare ouverte cette session d'urgence du Magenmagot !

Le silence se fit alors et toutes les têtes se tournèrent vers lui. Il était rare qu'il trouve le temps de présider les séances en dehors des vacances scolaires et donc l'affaire devait être importante. Albus remarqua qu'il ne manquait pas grand-monde… les plus âgés, et encore, Augusta Londubat et Griselda Marchebank la doyenne étaient présentes. Et elles étaient réputées pour se coucher avec les poules, comme disaient les Moldus.

— Comme la plupart d'entre vous le sait à cette heure tardive, nous avons eu à déplorer aujourd'hui cinq morts suspectes : quatre crimes et un accident que je qualifierai de douteux au vu des circonstances. Cet après-midi, Dolorès Ombrage a été trouvée morte dans sa chambre de Sainte-Mangouste, étranglée par un Filet-du-Diable qui se trouvait dans un pot de fleur marqué Voltiflor, posé sur sa table de chevet. Le décès a eu lieu à treize heures quarante-cinq, selon le légistomage Ackerley. Le décès a été jugé accidentel, mais entre nous j'ai de sérieux doutes et vous comprendrez pourquoi dans quelques minutes. A l'heure de la fermeture des bureaux, un Elfe-du-Ministère chargé du ménage a trouvé Rufus Fudge mort dans son bureau. Selon Ackerley, il est mort vers quinze heures. A dix-huit heures, à Azkaban, le prévenu Ronald Weasley a été trouvé mort dans sa cellule du second étage par l'Elfe chargé de distribuer la soupe aux prisonniers de ce niveau. Selon Ackerley, il est mort à quatorze heures quarante-cinq. Ce qui nous fait trois décès en même pas deux heures et à des endroits très éloignés les uns des autres. Ce soir, un autre Elfe-du-Ministère a trouvé le corps de Timeus Travers dans son bureau du Trésor Magique. Selon Ackerley, il est mort à vingt heures. Et pour terminer, les Aurors ont reçu un appel d'urgence émanant de Madame Loretta Mulciber. Elle a trouvé son époux Daryl décédé, en rentrant chez elle après avoir passé la journée à faire du shopping avec Lady Malefoy. Selon Ackerley, il est mort à dix-neuf heures. Ce qui nous fait cinq décès depuis l'heure de midi. Je soupçonne un règlement de compte !

— Albus, l'interrompit Amélia. Nos Aurors n'ont pas trouvé de liens entre les victimes. Comment pouvez-vous affirmer que c'est un règlement de compte ?

— Je le sais, et Cornélius s'en doute aussi. C'est pour cette raison que nous sommes réunis. Nous devons faire cesser cette hécatombe car elle risque de se prolonger, je le crains.

— Expliquez-nous, Dumbledore ! ordonna un membre depuis son fauteuil.

— Les victimes ont un point commun : elles sont toutes responsables à un degré ou un autre du malheur d'Harry Potter et de Severus Rogue. Ne me dites pas que vous n'avez pas lu La Gazette du Sorcier ces jours-ci ! Vous avez vu, de vos yeux vu, la misère dans laquelle sont plongés ces deux sorciers depuis leur bannissement ! Dolorès Ombrage a été celle qui les a arrêtés et qui les a obligés à avouer sous Véritasérum la nature de leur relation. Elle est décédée. Ronald Weasley a été celui qui les a dénoncés à Dolorès après avoir reçu l'information de Drago Malefoy avant que ce garçon ne soit oublietté de cette connaissance. Ronald Weasley est mort. Hier, Daryl Mulciber a attaqué Harry Potter alors qu'il faisait son Travail d'Intérêt Magique à Sainte-Mangouste. Devant témoins, il a lancé un Diffindo sur le visage d'Harry qui a dû recevoir des soins des Urgences. Arrêté, il a été libéré immédiatement. Mulciber est mort ce soir. Aujourd'hui, en fin de matinée, Rufus Fudge a attaqué Harry Potter avec un Doloris, et dans la foulée un Avada Kedavra qui a atteint sa cible. Harry a survécu encore une fois à ce sortilège, pour une raison que nous ignorons toujours depuis seize ans car ce n'est pas la première fois, vous le savez. Ces deux impardonnables sont punissables d'Azkaban à vie. Or Rufus Fudge n'a pas été inquiété. Comme Mulciber, il a été libéré quelques minutes après son arrestation. Et Rufus Fudge est comme les précédents, décédé. Et ce soir, Timeus Travers a été tué de la même façon ! Et il est le responsable qui a fait réactiver la vieille loi d'Hypocritus Le Zélé qui était tombée en désuétude depuis plus de trois cents ans. Il a donc ordonné que tout l'or possédé par Harry Potter lui soit retiré. Il a aussi ordonné que les patentes des potions créées et enregistrées légalement depuis des années par Severus Rogue soient annulées. Tout ceci afin qu'aucun de ces deux sorciers n'ait plus un gallion à son nom. Cornélius, vous avez ordonné qu'ils soient chassés tous les deux, vous avez ordonné qu'on prive Severus Rogue de son coffre à Gringotts. Coffre qui lui venait de sa mère et était quasi millénaire ! Je ne m'étonne donc pas que vous pensiez être le prochain sur la liste du tueur, ou des tueurs !

— Il faut arrêter Potter et Rogue ! grondèrent plusieurs personnes dans l'assemblée.

— Les arrêter ? Ils sont à Azkaban depuis midi ! Travers avait aussi interdit au Professeur Spleen, éminent directeur de Sainte-Mangouste, de fournir gratuitement un repas à deux malheureux qui ne pouvaient se l'offrir et qui travaillaient pour lui ! Et c'était leur seul repas possible de la journée comme vous le savez ! Soit ils mendiaient leur pain dans les rues moldues, soit ils travaillaient pour le Monde Magique. Les deux étaient incompatibles ! Travers a voulu les faire mourir de faim ! Il l'a payé ! Et comme Severus et Harry n'étaient physiquement plus aptes à travailler, affamés et blessé gravement pour Harry, ils ont été conduits à Azkaban au lieu de recevoir des soins et des repas ! Et vous osez les accuser ? Comment auraient-ils pu faire quoi que ce soit, enfermés, sans baguettes et affaiblis sur des paillasses, avec un gardien rodant dans le couloir ? L'Auror Robards, ici présent, a interrogé les prisonniers de l'étage ainsi que leur gardien, sous Véritasérum, et pour les crimes connus à dix-huit heures. Aucun d'eux ne savait quelque chose. Auror Robards, si vous pouviez confirmer…

— Je le confirme ! Mes hommes et moi avons interrogé les suspects et ils sont innocents de ces crimes. Ils étaient enfermés et le sont toujours, affirma l'Auror avec assurance.

— Albus ! paniqua encore Fudge. Mais si vous dites vrai, alors tous ceux qui ont voté les sanctions contre Potter et Rogue sont en danger de mort !

—C'est exact, Cornélius. Vous avez tout compris.

Ce fut la panique dans l'aréopage. Tous savaient qu'ils n'allaient pas échapper aux mystérieux vengeurs. Dumbledore dut taper encore une fois sur son tas plusieurs grands coups de marteau pour réclamer calme et silence.

— Il y a une solution !

— Laquelle ? insista Cornélius.

— Défaire ce que vous avez fait ! Réparer les injustices ! On ne ruine pas exprès quelqu'un pour un simple délit ! On ne le torture pas aux Doloris et on ne l'exécute pas d'un Avada ! Harry est privé d'éducation car il ne peut pas supporter physiquement la séparation d'avec Severus. Madame Pomfresh, le Professeur Slughorn et moi-même l'avons remarqué. Severus ne peut plus travailler. Il est Maître des Potions, je vous le rappelle, or on l'a privé de ça aussi, comme le Directeur de La Guilde des Potionnistes le lui a confirmé. Monsieur Travers et ses initiatives encore une fois ! Severus n'a pas de maison car il vivait à Poudlard depuis ses onze ans. La maison de ses défunts parents étant une ruine qui s'est écroulée du temps où il était à Poudlard, il n'avait aucun refuge. Harry a été renié par son parrain et déshérité et donc était à la rue aussi. Effet de la sanction infâmante… Sans or, ils sont condamnés à mourir de faim et de froid dans les rues moldues ! C'est un beau remerciement que vous lui avez fait pour vous avoir sauvé de Lord Voldemort ! Annulez ces sanctions stupides, rendez son or à Harry, et ses patentes de potions à Severus ! Supprimez leur séjour à Azkaban et leurs Travaux d'Intérêt Magique. Ils seront en danger à Sainte-Mangouste. Laissez-les partir et rejoindre le Monde Moldu si vous ne voulez pas d'eux dans notre monde. Si vous vous obstinez, vous serez les prochaines victimes !

Albus se tut alors et les laissa digérer les nouvelles. Tous chuchotaient, certains – ceux qui avaient dû voter les pires punitions – paniquaient visiblement.

— Albus ! tenta Fudge. Si nous annulons les sanctions prises par Travers, est-ce que vous pouvez nous garantir que ces deux sodomites ne reviendront pas dans notre monde ? Et que les vengeurs cesseront leurs crimes ?

— Severus et Harry ne reviendront jamais. Ils ne sont pas revenus depuis leur départ. Ils se sont juste présentés à la convocation pour leurs TIM. Sans cette convocation, vous ne les auriez jamais revus, n'auriez jamais su ce qu'ils faisaient ni où et comment ils vivaient. Et vous auriez cinq sorciers de plus en vie. Je suis certain que les crimes cesseront dès que justice sera rendue. Et il est également impératif d'abroger définitivement la Loi d'Hypocritus Le Zélé. Elle a fait bien trop de mal en mille ans. Je ne comprends même pas comment vous avez osé signer ces documents, Cornélius !

Fudge eut le bon goût de rougir et de marmonner que Travers avait été très convaincant mais Albus n'était pas dupe. Cornélius était un homophobe virulent et tout ce qui avait pu pourrir la vie de deux déviants, comme il disait, avait été bon à prendre.

Deux heures après, alors que tout le monde était fatigué et souhaitait rentrer se coucher, le Magenmagot vota.

La Loi d'Hypocritus Le Zélé fut abrogée et avec effet rétroactif pour la dernière victime : Harry Potter.

Il fut donc ordonné que le Trésor Magique lui rende absolument tout l'or qu'il lui avait pris.

Les patentes des potions de Severus lui furent également restituées, de meilleure grâce, quand on apprit qu'il avait sauvé le fils de John O'donnell, employé très estimé au Ministère.

Etant donné qu'un Travail d'Intérêt Magique était prouvé dangereux et potentiellement mortel pour les deux bannis, il fut annulé. Et par conséquent leur séjour à Azkaban également. Fudge soupira qu'il ne souhaitait pas recevoir une autre beuglante comme celle reçue d'une Miss Granger dans l'après-midi. Il expliqua qu'il avait lancé le sort pour détruire la missive rouge et qu'elle s'était multipliée et l'avait menacé, insulté et lui avait lancé des sorts ! Une lettre lancer des sorts ? Cette sorcière était dangereuse ! Albus lui assura que Miss Granger vivait dans le Monde Moldu, et n'avait aucune intention de retourner dans le Monde Magique, comme beaucoup de nés-moldus malheureusement. Elle voulait juste qu'on cesse de s'acharner sur son meilleur ami.

— Vu l'heure, laissons ces deux malheureux dormir dans leur cellule. Au moins ils ne seront pas dans la rue cette nuit, surtout tant qu'ils n'auront pas d'or pour se payer une chambre d'hôtel et un repas chaud. Kingsley Shacklebolt et son équipe pourront aller les chercher demain matin. Gringotts devra être prévenu dès l'ouverture de la banque qu'ils doivent rendre l'or à Harry.

— Je vais laisser un mémo sur le bureau du chef de service au Trésor Magique, ronchonna Cornélius.

— Bien, nous sommes tous d'accord. Je déclare donc cette séance terminée. Rentrons tous nous coucher !

Installés dans des fauteuils, au balcon qui servait pour les journalistes lors des procès à sensations, deux Elfes souriaient. Ils avaient gagné. On allait délivrer leurs Maîtres et ils allaient rentrer à la maison. De concert, ils popèrent jusqu'à l'Impasse du Tisseur. Ils avaient des choses à faire : raviver le feu, faire le ménage, nettoyer le labo de potions, vérifier que le frigo soit bien plein…

Dobby avait encore un petit souci. Oui, une vilaine sorcière se permettait des mensonges sur son bien-aimé Harry Potter. Cette Miss Biscus devenait pénible. Gare à elle… Il restait encore un peu de potion dans le flacon de Winky.


Harry, nu sous les couvertures généreusement octroyées par Azkaban-Palace, comme il disait, dormait, étalé sur le dos comme une crêpe en ronflant légèrement. Le jour tentait de misérablement faire son apparition par la meurtrière placée très haut dans le mur, si haut qu'on ne pouvait voir que la couleur du ciel et encore… très vaguement. L'Elfe servant les petits déjeuners était déjà passé car il y avait deux bols de porridge posés sur le sol près de la grille. Bien évidemment, le contenu des bols était glacé, depuis le temps qu'ils gisaient là, et dans le froid ambiant.

La seule solution pour se tenir chaud, c'était de se déshabiller totalement et de se coller l'un contre l'autre sous les couvertures. La chaleur humaine, on ne faisait pas mieux, d'après Severus ! Sauf… le fuel… selon l'avis d'Harry.

Forcément, être nu dans les bras l'un de l'autre, ça donnait des idées plus ou moins bien placées. Et quand on n'avait rien d'autre à faire, ça occupait. Et ça faisait enrager Mondingus et ricaner Harris. Et s'interroger Willy… « ça a l'air d'être bien, faudra que j'essaie ».

La main de Severus glissa sur les abdominaux d'Harry, rejoignant la bande de poils sous le nombril et descendant vers la touffe drue ornant le pubis. Cette main baladeuse et matinale attrapa un sexe en voie de rigidification et commença à le caresser lentement. Le Maître des Potions plongea sous les couvertures et descendit le long des jambes du Gryffondor. Une bouche gourmande le happa alors et commença un lent mouvement de succion. Un éclat de rire se fit entendre alors.

— Par Merlin, Severus ! Quel réveil en fanfare !

Mais une voix les interrompit.

— Les mecs, faites gaffe, Evariste vous fera pas de cadeau s'il vous chope. Vous prenez des risques, ça vaut pas le coup. Faites pas ça dans la journée.

— Mondingus ? fit Harry. On fait rien de spécial.

— Appelle-moi con aussi. Je connais la musique, Harry. Quand j'ai de l'or je file dans le Monde Moldu pour me faire une pute, comme beaucoup.

— C'est quoi une pute ? entendit-on depuis l'autre bout du couloir.

— La ferme, Willy ! C'est pas d'ton âge, on t'a dit ! lui répondit Laverrue.

— Laisse-le donc, faudra qu'on l'emmène avec nous un jour. Il peut pas rester puceau jusqu'à cinquante balais ! lança Mondingus. Nan, juste pour vous dire, les gars, Evariste… c'est pas le mauvais bougre, mais il plaisante pas avec ça. Il est comme les autres, coincé. Y a pas moyen. C'est un sang-pur, qu'est-ce que vous voulez ! Pas un sang-mêlé comme nous autres… Alors, ramassez vos bites et habillez-vous. Vous aurez toute la nuit pour baiser, et aucun gardien pour vous faire suer.

— Merci du conseil, Ding'.

— Pas de problème, Rogue.

La conversation avait eu un effet refroidissant sur les ardeurs du duo et ils décidèrent sagement de s'habiller du pyjama rayé officiel et de tenter d'avaler les bols qu'ils apercevaient, avant que l'Elfe ne revienne les chercher. Ce fut Harry qui se leva pour les récupérer. Il grimaça en les trouvant quasiment congelés. Un coup d'œil dans la cruche lui fit apercevoir une couche de glace.

— Sev ? L'eau est gelée dans la cruche. Et le porridge est glacé. Mais glacé genre avec des glaçons dedans.

— Ici, faut se dépêcher pour manger chaud quand la bouffe arrive, expliqua Mondingus. Avec le froid qu'il fait dehors, tout gèle.

— Ouais, mais on a à manger… C'est pas toujours le cas, répondit Harry en jouant toujours le rôle défini à la base : celui de misérable clochard.

Le Gryffondor retourna s'asseoir sur sa paillasse et présenta un bol à Severus qui enfilait ses chaussures. Le Maître des Potions y jeta un coup d'œil.

— Pose-les sur le sol et enroule-toi dans une couverture, je vais les réchauffer dans deux minutes. Ça n'a pas l'air trop mauvais.

Severus prit discrètement sa baguette de secours et lança un sort de réchauffage sur chacun des bols. Le contenu se mit à fumer. Harry remua sa cuillère dans le porridge et en goûta un peu.

— Pas mauvais. Manque un peu de sucre mais ça se laisse manger.

Les deux prisonniers entamèrent leur repas dans le silence. A quoi allait-ils donc bien pouvoir employer leurs journées ? La pièce était très sombre, lire allait être difficile sans se fatiguer les yeux, en outre ils n'étaient pas censés posséder quoi que ce soit. Passer un mois enfermés comme ça allait représenter un sacré challenge. Et encore, ils étaient à deux… Harry demanda comment Sirius avait bien pu faire et Severus ricana en lui disant que son état mental déficient était la preuve qu'il n'avait pas pu s'accommoder de la situation. Bon, déjà qu'il n'était pas très équilibré avant son incarcération…

Faire réviser Harry en lui posant des colles sur diverses matières était une idée mais les trois autres écoutaient et trichaient. Ils tentaient de donner des réponses, le plus souvent archi-fausses et ça faisait rire Harry qui ne se concentrait plus. Azkaban n'était pas un endroit propice pour les révisions. A dire vrai, c'était un endroit qui n'était propice à rien.

A dix heures trente, le pas lourd d'Evariste se fit entendre pour la première fois de la matinée. Le sorcier apparut devant eux, de l'autre côté de la grille, dans sa tenue de gardien identique à celle de Flint. La comparaison cessait là. Evariste Ogg, sorcier de sang-pur, était gras, bouffi, avec une tête ronde et des cheveux longs et rares, un peu comme ceux de Rusard. Il les toisa avec mépris après les avoir scrutés et retourna sur ses pas.

Le gardien était resté devant la cheminée de leur pièce de repos depuis son arrivée. Il avait appris de la bouche de Brutus en arrivant que Weasley avait été trouvé mort la veille au soir et qu'ils avaient tous été interrogés parce que c'était un crime. Evariste avait affiché une honnête surprise et avait donc passé Marcus Flint à la question, exigeant de tout savoir sur les évènements, tous les détails et aussi qui étaient les nouveaux arrivants. Il avait d'ailleurs pas mal pesté de les savoir dans la même cellule.

Mais ce qui contraria le plus ce gardien, ce fut d'apprendre la mort de Ron. C'était bien embêtant… Le Boss avait mis un contrat sur la tête de ce p'tit con, et c'était normalement son boulot – vu sa position – d'exécuter ce contrat, et donc de récupérer la récompense de mille gallions ! S'il tenait celui qui lui avait coupé l'herbe sous le pied, il allait le lui payer.

Trente minutes plus tard, un appel de cheminette de Brutus bouscula leurs habitudes.

— Les mecs ! Vous avez une levée d'écrou ! Severus Rogue et Harry Potter sortent dans une heure. Le chef Shacklebolt vient d'appeler, il arrive avec son équipe et le Président-Sorcier du Magenmagot. Vous pouvez aller prévenir les prisonniers.

— J'y vais, Evariste, fit Marcus en se levant. Reste au chaud.

Flint courut dans le corridor glacé. Il se planta devant la grille de la cellule n°4.

— Professeur Rogue, Potter ! Vous sortez dans une heure. Dumbledore vient vous chercher avec le chef Shacklebolt.

— Ah ! Mais nan ! Pas question ! cria Harry en se dressant sur ses pieds, enroulé dans sa couverture et le nez rouge. Moi je veux pas partir ! On est bien ici, on n'a pas la pluie sur nous, ni la neige, et on a à manger trois fois par jour et une couverture chacun ! Pas question, je reste ici, on est mieux ici que dehors !

En le voyant taper du pied pour renforcer ses dire, Severus éclata de rire. Aux grilles des cellules voisines, Ding, Harris et Willy le regardaient avec des yeux ronds. Marcus Flint sembla penser que Potter avait perdu la raison et regarda son ancien professeur pour avoir des explications. Mais celui-ci riait comme un fou et roulait à présent sur sa paillasse, laissant Harry les poings sur les hanches et la mine renfrognée.

— Te moque pas de moi, Sev'rus ! Si tu te moques, je te préviens, c'est la GUERRE ! La guerre des CHATOUILLES !

Et il se jeta sur son compagnon doigts en avant pour chercher à les remuer sur ses côtes et pire, ses aisselles.

— Marcus ? fit la voix tranquille de Mondingus. Y avait quoi dans leur porridge, ce matin ? Parce qu'à moi il a pas fait cet effet-là.