Elfe bêta : Mokonalex
Note de l'auteur : C'est le dernier chapitre entier que j'ai de disponible. Le prochain n'a que 6000 mots, donc la moitié à peu près. Il va falloir attendre un peu pour l'avoir car je ne suis pas très en forme. En attendant, bonne lecture à tous et bonne rentrée (à Poudlard ou pas...)
PS : Attention, scènes violentes. Sev' est en mode mangemort...
L'habituel parchemin médicomagique apparut et flotta dans l'air devant Severus Rogue. Le potionniste le regarda se remplir à toute vitesse et en prit connaissance au fur et à mesure.
Walt était toujours en vie mais dans un état critique et plongé dans le coma. Il avait bien évidemment une hémorragie interne, ses poumons se remplissaient de sang mais aucune artère n'avait été sectionnée sinon il serait mort quasiment sur le coup.
— Il n'est pas encore mort, mais on doit faire très vite. Chaque seconde compte ! Harry, conjure-moi un sac Ziploc à surgelés comme je vous ai vu utiliser l'autre jour.
Le Gryffondor hocha la tête et obéit à la demande tandis que Severus fouillait dans sa sacoche de potions. Il s'agenouilla près du moribond et déposa la besace sur le sol.
— Tiens le sachet ouvert, chaton. Je vais retirer le poignard et le déposer dedans, avec ça on pourra retrouver le salopard qui a fait ça à Walt.
— Et tu le tueras ! Si tu le fais pas, je te jure que je le ferai, Sev' ! aboya Harry en essuyant ses larmes avec sa manche de chemise.
— Mon Walt… Sauve mon Walt, Sev', gémit Rick effondré. Je… je peux pas vivre sans lui. On s'est pas quittés depuis qu'on a seize ans. Sans Walt, je pourrai pas continuer… Je veux pas qu'il meure !
Rick était dévasté, une véritable ruine. Voir un tel colosse se transformer ainsi c'était comme voir une montagne s'écrouler en un tas de sable et de petits cailloux : c'était terrifiant.
— Devestio chemise ! fit le Maître des Potions en pointant sa baguette sur le torse de Walt.
Il jeta un coup d'œil sur le corps fin de son cousin. La plaie était nette, le couteau ne semblait pas être un couteau de chasse à bords dentelés. Plutôt un poignard classique et assez ancien… les poignards modernes avaient des manches en ABS[1], avait-il remarqué. Or celui-ci était en bois.
— Wingardium Leviosa !
Le couteau sortit doucement de la plaie et Harry le fit entrer dans le sachet congélation sans y mettre les doigts, puis il ferma le zip pour sécuriser le tout. Pendant ce temps, Severus avait versé un demi-flacon de potion violette sur la plaie. Rick sursauta et s'accrocha à la main de son compagnon lorsque la potion se mit à fumer et à bouillonner sur la peau de Walt. Severus avait demandé à Rick de déposer Walt bien à plat sur le dos et c'est ce qu'il avait fait. Le sang coulait abondamment de la plaie et instinctivement, Harry pointa sa baguette vers elle.
— Tergeo, Episkey !
— Ça ne suffira pas, Harry, c'est trop profond, mais continue, ça ne lui fera pas de mal. Je viens t'aider dans deux minutes.
Severus avait sorti de sa sacoche trois potions de régénération sanguine et après les avoir débouchées, il expédiait le contenu de chaque flacon dans l'estomac de son cousin à l'aide d'un sort médicomagique. Puis il se pencha vers Walt et posa la pointe de sa baguette en bouleau noir sur le bord de la plaie.
— Vulnera Sanentur… Vulnera Sanentur… Vulnera Sanentur… marmonna-t-il en remontant la baguette le long de la plaie à chaque incantation.
Stupéfait, Rick regarda le trou sanguinolent se refermer millimètre par millimètre… Lorsque Severus releva sa baguette, il n'y avait même pas de cicatrice.
— Anapneo ! ajouta-t-il pour favoriser la respiration de Walt.
Normalement avec ce sort, tout ce qui pouvait gêner allait disparaître, donc le sang dans les poumons ou un éventuel corps étranger.
— Comment tu as fait ça ? bredouilla Rick, terrifié. Tu peux guérir tout ? Tu peux ressusciter les morts aussi ?
— Il m'a bien ressuscité, moi… selon ce que j'ai appris il n'y a pas longtemps, avoua Harry. Mais je ne sais pas s'il peut le faire aux autres aussi.
— Je ne crois pas, chaton. Je n'ai rien fait de conscient ce jour-là. Je pense que c'est ma magie qui a décidé seule qu'elle ne voulait pas te perdre. Le sort que je viens d'utiliser sur Walt, je l'ai inventé quand j'étais à l'école. Ton père et ton parrain passaient leur temps à me lancer des sorts pour me blesser, des Diffindo, des trucs comme ça…
Harry baissa la tête et se rembrunit. Son père et son parrain avaient-ils fait autre chose dans leurs vies que des conneries ? Il en doutait fort.
— Je me demande comment Cousine Lily a pu épouser un tel connard, marmonna Rick. Désolé, Harry, mais avec tout ce que j'ai appris sur eux, je me pose des questions.
Severus n'avait jamais dit à Harry qu'il soupçonnait James et Sirius d'avoir drogué Lily avec une potion de soumission ou un Confondus pour que James Potter puisse enfin obtenir son dernier caprice. Potter aîné était mort, Lily aussi, et le sale cabot était au diable vauvert, ce n'était pas la peine de faire du mal à Harry avec d'éventuelles révélations dérangeantes.
Le potionniste prit le pouls de Walt. On le percevait mieux à présent. Il allait se remettre, normalement. Il fallait juste le coucher et attendre qu'il se réveille.
— Rick ? Lève-toi et prends Walt dans tes bras. Il faut le monter et le coucher. Il va s'en sortir. Je lui ai donné trois potions de régénération sanguine, Harry. Tu lui donneras une potion antidouleur de grade trois s'il se plaint d'avoir mal en se réveillant.
Rick pleurait toujours en soulevant le corps inerte. Il parsemait de baisers le visage pâle aux yeux clos et narines pincées. Il serra Walt contre lui et se dirigea vers l'escalier. Severus regarda Harry lancer deux ou trois Recurvite sur le carrelage afin de faire disparaître toutes les traces. Le Gryffondor savait pertinemment que son Severus allait s'occuper de venger son cousin et que donc toute investigation policière de Scotland Yard était inutile. Le trio grimpa l'escalier et Rick traversa le couloir et le salon pour s'engouffrer dans sa chambre. Harry écarta la couette fleurie afin que Rick dépose Walt sur le lit.
— WINKY ! appela Severus.
Alors que Rick se demandait ce que ça voulait dire, il vit apparaître avec un petit « pop » un Elfe-De-Maison inconnu, visiblement femelle, au vu de sa vêture. Il avait déjà rencontré Dobby et Walt lui avait expliqué ce qu'était un Elfe et montré un dessin issu d'un de ses livres sur les créatures magiques.
— Maître Severus a demandé sa Winky ?
— Winky, mon cousin Walt que tu vois sur le lit a été attaqué et gravement blessé. Je l'ai soigné mais je dois partir pour retrouver le criminel. Peux-tu t'occuper de lui en mon absence ? Harry n'a pas de connaissances médicomagiques.
Winky se tourna vers le lit et regarda attentivement le corps inerte. Elle hocha la tête.
— Winky peut, Maître Severus. Winky soignera Maître Walt. C'est un Lestrange. Winky le reconnait. Maître Severus doit emmener Dobby avec lui. Dobby très bon pour les vengeances, ajouta l'Elfe avec un grand sourire carnassier.
— C'est noté, Winky, répondit Severus en échangeant un regard entendu avec Harry. Si j'ai besoin de lui, je l'appellerai.
Oui, ils savaient de quoi Dobby était capable…
Pendant que d'un claquement de doigts, Winky déshabillait totalement Walt et lui conjurait un pyjama rayé style infirmerie de Poudlard puis le bardait de sorts de nursing, Severus avait tendu la main vers le sachet toujours en possession d'Harry. Rick qui tenait encore la main de Walt ne le quittait pas des yeux.
Harry remit le sachet à Severus qui l'ouvrit mais n'en retira pas encore le poignard.
— Comment tu vas faire ?
— Comme ceci, chaton.
Severus pointa sa baguette sur lui et tous virent sa tenue moldue être remplacée par une tenue de Mangemort : tunique noire matelassée en cuir, gros ceinturon avec étuis pour couteau et baguette de rechange, sac à potions. Il portait un pantalon assorti à la tunique et des bottes en cuir de dragon, une robe de sorcier noire sans manches recouvrait le tout ainsi qu'une lourde cape à capuchon pointu bien raide. Sur son visage, on découvrit un sinistre masque d'argent orné de runes et de volutes. Pire, ce truc modifiait la voix qui devenait métallique. Les mains de Severus portaient d'épais et longs gants noirs en cuir de dragon.
— Tenue de Mangemort, constata Winky sans s'émotionner. Mon petit Maître Barty en avait une belle aussi. Maître Barty était très élégant ainsi. Maître Severus est très chic.
C'était bien d'un Elfe-De-Maison de trouver un Mangemort élégant… Harry la regarda en souriant. Après Dobby plus rien ne l'étonnait...
De ses mains gantées, Severus sortit le poignard du sachet. Il expliqua à Rick et Harry que les empreintes et l'ADN du criminel étaient sur le manche du couteau et que par conséquent l'auteur du crime ne lui échapperait pas. Il pointa d'abord sa baguette sur la lame.
— Tergeo sang de Dionysus Walter Lestrange !
Le couteau sembla se nettoyer, car on ne vit plus du tout de sang. Mais Severus n'avait pas terminé.
— Avensegium !
Harry se souvint alors avoir lu dans un des bouquins d'Hermione, un jour, quelque chose sur ce sort. Il permettait de retrouver le propriétaire de l'objet sur lequel il était jeté. Un traceur magique, quoi !
Du poignard s'échappa une sorte de filament doré qui se faufila dans l'appartement jusqu'à l'escalier menant dans le bar et certainement dans la rue.
— Je vais suivre la piste. Ne m'attendez pas. Les heures de ce salaud sont comptées.
Personne ne protesta, pas même Rick et sa sensibilité moldue. Il n'avait pas réclamé la police, ni appelé une ambulance. Il avait compris depuis longtemps que Severus et Harry avec leurs pouvoirs étaient bien supérieurs à ces gens-là et il venait d'en avoir encore la preuve. Qui que soit l'auteur du crime, il paierait et Rick s'en fichait de comment.
Severus se désillusionna et se mit en chasse pour suivre la piste. Aucun Moldu ne verrait le filament doré et aucun d'eux ne le verrait lui dans ses atours d'autrefois. Alors qu'il franchissait la porte donnant sur l'escalier du bar, il entendit Rick.
— Il a transplané ? Il a pas fait le bruit de d'habitude.
— Non. Sev' est toujours là, il est juste invisible et il va suivre la piste sans que personne ne le remarque.
— Vous pouvez vous rendre invisibles ? J'adore la magie…
— Je vais me réchauffer une tasse de thé, Rick. Tu en veux une ?
— Nan merci. Je crois que je pourrai rien avaler tant que mon Walt sera pas réveillé.
— Allonge-toi près de lui et dors, alors. Le temps passera bien plus vite. Je te réveillerai si y a un truc.
Alors que Severus transplanait de l'autre côté de la porte magiquement verrouillée du bar afin de ne pas perturber l'enchantement, et qu'Harry se faisait un thé, Rick acceptait la suggestion de son cousin et en caleçon et tee-shirt, se couchait sous la couette, Walt dans ses bras.
Le Maître des Potions savait que sa famille était en sécurité dans l'appartement. Winky veillerait sur Walt tandis que Harry protègerait Rick d'une intervention magique et Rick, lui, protègerait son cousin d'une agression moldue, dans la mesure où il ne serait pas attaqué par derrière, par des lâches de la pire espèce. Severus l'ignorait mais il avait un « assistant ». Prévenu discrètement par Winky, Dobby, furieux de cette attaque lamentable, avait pris la décision de suivre Severus. Invisible également, il filait l'ancien Mangemort grâce à ses pouvoirs elfiques. Pas question que Winky pleure son Maître s'il lui arrivait quelque chose dans sa quête de vengeance. Et pas question que Harry Potter pleure son Severus tout comme le gentil cousin moldu pleurait son Walt.
Le Serpentard était persuadé que l'attaque de Walt venait du groupe de la veille. Jamais il n'y avait de grabuge au Flamant Rose, habituellement. Parfois, un ou deux avinés se crêpaient le chignon pour des futilités ou une fois ou deux, Severus se souvenait avoir assisté à des scènes de ménages et, à chaque fois, Rick avait empoigné les trouble-fêtes par leurs fonds de pantalons et les avaient mis à la porte sans difficulté. La scène de la veille avait été hautement inhabituelle. Ils avaient ici à faire à un groupe de marginaux homophobes décidés à « casser du pédé » comme ils aimaient à le dire. Combien de fois dans son enfance et adolescence, Severus avait-il entendu Tobias tenir ce genre de discours ? Il serait millionnaire s'il avait touché dix gallions à chaque fois.
Le troupeau de sales types ne devait pas être très loin. Ils paraissaient être venus à pied ou alors s'étaient garés plus loin, mais vu leur nombre, il avait fallu au moins deux voitures voire trois. Pourtant, Severus marcha longtemps. Il descendit Caledonian Road jusqu'au pont de Thornhill qu'il ne franchit pas. A la place, le filament doré le mena le long des berges de Regent's canal. Il suivit l'ancien chemin de halage, remarqua les quelques péniches amarrées là sous les arbres et continua à suivre la piste, se demandant bien où elle allait le mener. On arrivait au bout du canal qui finissait en cul de sac si on exceptait un tunnel bien sombre et étroit sans berges. En hauteur, un peu au-dessus du niveau de l'eau, on était sur Muriel Street, pas très loin de la maison de ce connard de Black. Mais juste avant le fameux cul-de-sac, le filament tourna à gauche et entra dans les taillis. Le Serpentard afficha une mine inquiétante en découvrant soudain sous les monceaux de ronces un petit sentier menant à une bâtisse de briques rouges : un entrepôt victorien visiblement abandonné et en mauvais état. La piste ne semblait pas aller plus loin.
— Hominum Revelio, murmura-t-il, baguette tendue.
Des silhouettes plus ou moins mouvantes et légèrement lumineuses se matérialisèrent quelques dizaines de secondes. Il en compta douze.
° Parfait… vous allez piger votre douleur, mes gaillards. °
La baguette de Severus était indétectable par les Services des Usages Abusifs de la Magie, et celle de remplacement l'était également. C'était Lord Voldemort qui avait inventé ce sort et vu que tous les Mangemorts connaissant ce petit truc – sauf lui et Lucius – étaient morts, il était bien tranquille. McNair était toujours vivant ainsi que sûrement quelques autres mais ils avaient été des sous-fifres et n'avaient pas reçu la connaissance de cette bien utile création. En bref, Mafalda Hopkrik, la fameuse surveillante du sud de l'Angleterre, ne verrait rien de ce qui allait sans tarder arriver.
Severus entra dans l'immeuble par une porte restée ouverte. Pas étonnant, elle pendait sur un gond et râclait le sol. Une partie des tuiles du toit étant manquante, on voyait bien dans l'entrepôt grâce à ces puits de lumière improvisés. La bande de vermines puantes de la veille était là. Severus reconnut le chef et les filles qui étaient entrées avec lui au Flamant Rose.
Le groupe était avachi sur des cartons étalés sur le béton sale et entourait un feu qui brûlait dans un tambour de lave-linge. Ils étaient cernés de cadavres de canettes de bière à bas prix et deux d'entre eux échangeaient une seringue sale et un garrot afin de s'injecter une cochonnerie dans les veines. Un autre sniffait un rail de coke sur un morceau de vitre brisée.
Un ramassis de déchets inutiles.
Le chef gloussait et pavoisait. Fier de lui, il racontait avec force détails la façon dont il avait réglé son compte au p'tit minet qui faisait le beau dans le bar, la veille.
Ainsi donc, Harry était la véritable cible. Walt, qui n'avait pas été présent, avait été pris pour Harry à cause de sa taille et de la couleur de ses cheveux. Il était évident que ce guignol avait choisi Harry/Walt comme cible car il avait bien pigé que Severus était trop fort pour lui. On pariait qu'il avait attaqué Walt dans le dos ?
La suite des vantardises confirma les suppositions de Severus.
Bien.
Il en avait assez entendu. Il était plus que temps de lui faire payer cette agression. Surtout qu'un des acolytes, survolté, venait de suggérer qu'ils y retournent dans la soirée, mais armés, afin de liquider tous ces sales pédés.
Oh que non… Pas question de les laisser faire.
Severus lança un Collaporta tout en visant chacune des ouvertures qu'il pouvait apercevoir d'où il était. Il n'y en avait visiblement que trois pour tout le bâtiment. Le bruit violent des portes qui claquaient et se verrouillaient les unes après les autres fit sursauter le gang qui regarda tout autour de lui, intrigué mais pas encore inquiet.
Visant le centre de la pièce plongé dans la pénombre car ayant un morceau de toiture intacte à cet endroit, l'ancien Mangemort murmura un joli Nebulus qui fit apparaître une épaisse nappe de brouillard. Severus choisit ensuite de transplaner dans ce brouillard et d'annuler son sortilège de désillusion. Un petit Sonorus et sa voix métallique allait devenir véritablement terrifiante.
— Vous croyez donc que vous allez sortir d'ici vivants ? Terrible erreur ! Le moment est venu pour vous de payer ! C'est l'heure du châtiment ! Vous avez commis votre dernier crime en vous attaquant à ma famille. Maintenant, la mort vous attend !
° Sourdinam… Prenez ça dans les dents…°
Les voyous se redressèrent, paniqués. D'où venait cette voix étrange ? Qui leur faisait une sale blague ? L'un d'entre eux alla vers la porte la plus proche d'où il était assis mais il ne réussit pas à l'ouvrir. Il en essaya une seconde, mais n'y arriva pas non plus.
— Tim ! On est enfermés ! lança-t-il à celui qui paraissait être le chef.
Un éclat de rire sinistre se fit entendre et ils virent tout à coup émerger d'un étrange brouillard qu'ils n'avaient pas encore remarqué une silhouette sombre, étrangement vêtue avec un drôle de chapeau pointu et un masque d'argent.
— C'EST CE GUIGNOL ! hurla-t-il en montrant Severus du doigt. TUEZ-LE !
L'un des idiots sortit une arme et visa mais Severus transplana aussitôt à l'autre bout de l'entrepôt et lança un Expelliarmus. Trois révolvers et deux couteaux volèrent vers lui. Des Evanesco les firent disparaître. Alors que quelques-uns des voyous se dirigeaient vers lui, il transplana de nouveau dans le brouillard et s'y accroupit, souriant derrière son masque. Penché en deux, il avança jusqu'à un endroit où le nuage conjuré finissait et se dissimula derrière une vieille cuve métallique rouillée qui penchait sur ses pieds brisés.
— Levicorpus ! murmura-t-il en visant le chef qui les haranguait à tenter de trouver une sortie.
Des cris perçants se firent entendre lorsque les vermines virent leur chef se retrouver tête en bas et suspendu par une cheville dans le vide. Les hurlements perçants dudit chef étaient une plaisante musique aux oreilles de Severus. Ces cris lui rappelèrent les raids ordonnés par le défunt Seigneur des Ténèbres et s'il devait l'avouer, il en avait bien apprécié certains… Mais chut…
— Endoloris ! poursuivit Severus, indifférent à l'agitation qui régnait autour de lui.
Le dénommé Tim se tortilla en poussant des hurlements de douleur stridents qui terrifièrent encore plus les autres. Un des récents shootés, sa seringue encore dans le bras, émit un maigre sourire et annonça d'une voix hachée que whaou, c'était d'la bonne…
— Sectumsempra ! Sectumsempra !
Les deux bras du suspendu tombèrent sur le sol sous les hurlements d'horreur de ses acolytes. Les jets de sang artériel jaillissant des moignons arrosèrent quelques-uns. Deux d'entre eux se mirent à vomir et une des filles tomba dans les pommes. Les cris de Tim se transformèrent en gémissements et Severus, magnanime – ou pas – choisit de mettre fin à ses jours avec un joli Bombarda, inspiré par Ron Weasley, il devait bien se l'avouer.
Tous les Moldus tentaient à présent soit de sortir, soit de se cacher. Les deux choses étant évidemment totalement impossibles dans ce lieu. Severus les visait comme des ballons à la kermesse. Selon son humeur, il les Avada Kedavratisait, ou alors les ligotait d'un Incarcerem et les « allumait » comme des chandelles avec des Lacarnum Inflammarae. Il osa même un Maléfice de Vide-Entrailles sur celui qui avait menacé Harry la veille.
Et puis lorsque tous les bruits se turent, qu'il n'y eut plus de cris ni de gémissements, seulement l'odeur du sang et de la chair brûlée, il lança un Feudeymon et transplana à l'extérieur. Voulant éviter que le feu ne se propage plus loin que nécessaire, il entoura le bâtiment en flammes d'un Protego Horribilis. Puis il se désillusionna de nouveau et jeta un Prior Incanto sur sa baguette. Les traces écrites des sorts et maléfices qu'il venait de lancer depuis son départ du Flamant Rose apparurent sous forme d'une terrifiante liste dans l'air. Un Destructum plus tard et la liste avait disparu et sa baguette était vierge de nouveau. Severus attendit quelques minutes devant les flammes avec un air rêveur. Lorsqu'il entendit la sirène des pompiers moldus qui s'approchaient prévenus peut-être par un passant, il transplana jusque chez Rick et Walt, dans la chambre à coucher qu'il partageait avec Harry.
Sans baguette, il fit disparaître sa tenue de Mangemort comme autrefois, et se retrouva vêtu de la même tenue qu'il avait portée depuis son réveil : un jean noir et une chemise en coton anthracite offerte par Walt et Harry. Tranquillement, il traversa l'appartement et ouvrit doucement la porte de la chambre de Rick.
Walt dormait dans les bras de Rick, couché près de lui. Winky était assise sur une chaise près du chevet du blessé et Harry installé en tailleur, pieds nus sur la couette aux pieds de Walt. Il chuchotait à Rick qui lui répondait de la même façon.
Severus toqua deux petits coups sur la porte pour annoncer sa présence avant de pénétrer dans les lieux.
— Comment va-t-il ?
— Sev'rus ! fit Harry avec un grand sourire soulagé. Walt s'est réveillé tout à l'heure. Il était un peu confus, et même groggy pour tout dire. Il avait un peu mal alors je lui ai donné la potion comme tu avais dit. Et il s'est endormi dans les bras de Rick aussitôt après.
— Excellente nouvelle. Demain, il sera comme neuf. Physiquement, du moins… Psychiquement, je n'en sais rien. Traumatisé, très certainement.
— Merci d'avoir sauvé mon Walt, Sev'. J'ai eu tellement peur qu'il meure ! Il pourra prendre ta potion quand il voudra si avoir lui-même un bébé est si important pour lui. Je veux juste qu'il soit heureux.
— On a le temps. On attendra qu'il soit remis et qu'il la redemande éventuellement. Dis-lui juste que tu es d'accord, ça lui fera plaisir.
— Je vais prendre un videur, Sev'. Je peux pas prendre encore de risques.
— Ça coûte cher, Rick. Je vais mettre des sorts sur la porte du bar. Ceux qui tenteront d'entrer pour foutre le bordel auront brutalement envie d'aller se faire pendre ailleurs.
— Ça existe un sort pareil ? demanda le Sauveur avec un air suspicieux.
— Il en existe un comme ça pour repousser les Moldus, Harry, le Repello Moldum. S'il faut l'adapter, on l'adaptera, c'est pas un problème.
— Pour toi, rien n'est un problème, mon amour. Tu t'es… occupé du criminel ?
— Lui et tous ses petits copains ne nuiront plus jamais à personne.
— Ok. Donc, tu en as tué combien cet aprèm ? s'enquit Harry avec un air avide inattendu.
— Juste douze. Je vais me faire un thé, qui en veut un ?
— Douze ? Tu avais promis que tu m'en laisserais un ! Tricheur !
— J'ai… oublié ? fit Severus en haussant les épaules et en faisant l'innocent.
Rick n'en revenait pas de les voir s'amuser après avoir mentionné la mort de douze personnes tuées de sang-froid. Les sorciers avaient vraiment des mœurs étranges. Mais sur ce coup-là, il ne leur en voulait pas du tout. Non, pas du tout. Et même, il était plutôt soulagé et reconnaissant.
— Rick… l'appela Harry d'une voix douce. Tu ouvres le Flamant Rose, ce soir ?
— Ouais, pas le choix, Harry. Le samedi est notre meilleur jour de la semaine. Je peux pas me permettre de rester fermé. Faut payer les charges, les fournisseurs, les impôts… On a fini de payer le bar mais pas tout à fait l'appartement. Il nous reste encore deux ans à banquer. On n'a pas de gros besoins. Notre seul luxe, ça a été la déco de l'appartement. Walt est dingue de ces décorateurs et donc j'ai accepté pour lui faire plaisir. Je regrette pas, c'est une franche réussite. Tout le monde nous le dit.
— C'est clair ! J'adore totalement ! Je pense que je vais m'acheter une maison. Une maison à moi. Oh, on a celle de Sev'rus, et depuis qu'elle a été retapée elle est vachement mieux, sans comparaison. Mais Sev' n'y a pas de bons souvenirs. J'aimerais bien qu'on ait un autre endroit, genre pour passer les week-ends, les vacances.
— Tu veux une maison de campagne, quoi !
— Ouais, mais plus j'y pense, plus je me dis que j'aimerais bien une maison à la mer. Tu sais, genre vue sur mer, et tu traverses la rue et tu es à la plage. Ça serait hyper cool, une maison comme ça.
— Moldue ou Magique ? demanda Rick avec un petit sourire.
— Je crois que je tenterai magique en premier, à cause du labo de potions pour Severus. Des vacances sans potions ? Mais ça serait pas des vacances pour lui. Et si je ne trouve pas, ben j'essaierai une agence moldue. Je crois qu'il y a une agence immobilière sur le Chemin de Traverse pas loin du siège de la Gazette du Sorcier. Faudra que j'aille y faire un tour. Je verrai bien.
Les jumeaux Weasley étaient retournés au Charm'heure, mais cette fois-là sans Lee Jordan. A la place, leur frère Charlie les avait accompagnés et pendant que Gred et Forge s'encanaillaient avec deux demoiselles (différentes de la dernière fois), le dresseur de dragon en avait profité pour monter passer un moment avec le dénommé Sidney. Il avait bien apprécié sa sortie et se promettait d'y retourner à chaque fois qu'il reviendrait au Royaume-Uni. Bill, après l'enterrement de Ron, avait choisi de rester un peu au Terrier avec Arthur qui avait stoïquement supporté l'épreuve des obsèques.
Bien entendu, Molly, soutenue par Tante Muriel, avait fait un cinéma pas possible et accusé pêlemêle Arthur, Harry et Severus d'être responsables de la mort de Ron entre les sinistres murs d'Azkaban. Ginny n'avait rien osé dire. Le décès de Ron l'avait choquée et elle avait bien compris que les méfaits de son frère avaient dû déranger quelqu'un de très puissant. Il fallait dire que tuer une vieille dame sur le Chemin de Traverse, ce n'était pas rien. Mais qu'est-ce qui avait bien pu lui passer par la tête ? Elle se promettait bien de ne pas s'engager dans la Brigade Inquisitoriale l'année prochaine et de se tenir à carreau. Elle avait des projets d'avenir, merci bien, et ne souhaitait pas terminer entre quatre planches. D'accord, elle n'avait pas pu se fiancer à Harry Potter – et heureusement finalement – mais elle ambitionnait de jouer professionnellement au Quidditch et espérait que sa mère ne tenterait pas à nouveau de la fiancer trop rapidement. Elle croisait les doigts que la disgrâce récente de Molly due à son divorce ferait les prétendants possibles refuser les propositions maritales de sa mère.
Arthur avait repris le chemin de Poudlard et retrouvé sa classe après quelques jours de congés forcés dus à son deuil récent. Walt aussi était retourné en cours. Le troisième jour après l'agression dont son cousin avait été victime, Severus, suivi d'Harry, avait répondu à l'appel paniqué de Rick. Walt déprimait, pleurait, paniquait, ne voulait plus quitter soit le lit, soit l'appartement et refusait dorénavant de descendre l'escalier menant au bar. Pire, il faisait des cauchemars la nuit et hurlait, revivant la scène de l'agression.
Le téléphone moldu récemment installé dans la maison de l'impasse du Tisseur à la demande d'Harry avait été inauguré par Rick cette nuit-là. La sonnerie stridente avait fait sursauter le couple de sorciers à plus de trois heures du matin. Severus et Harry s'étaient assis dans leur lit, et s'étaient regardés, inquiets. Une seule personne possédait leur numéro de téléphone : Rick.
Severus avait carrément transplané dans le salon à l'étage en dessous, là où se trouvait le poste téléphonique de British Telecom. Il avait décroché et entendu la voix paniquée et épuisée du cousin d'Harry. Celui-ci lui avait raconté tout ce qui se passait et le désespoir de Rick demandant s'il existait une potion pour aider Walt avait décidé Severus à agir immédiatement.
— Pas à ma connaissance, Rick. Mais j'ai une solution. J'arrive avec Harry. On s'habille et on transplane. Fais juste chauffer la bouilloire et sors l'Earl Grey. T'inquiète pas, dans quelques minutes, Walt sera comme avant.
Et il avait raccroché. Harry avait suivi son Serpentard et écouté la conversation après avoir appuyé sur le bouton du haut-parleur. Il avait regardé Severus les yeux dans les yeux.
— Tu dois l'oublietter, Sev'. Il ne peut pas continuer comme ça. Il est traumatisé. On s'en doutait vu comment il est sensible de nature. Si tu ne le fais pas, il va devenir fou. Ou pire… se suicider.
— Je vais l'oublietter, chaton. C'était mon intention depuis le début. Je vais lui faire oublier les derniers jours et lui implanter des faux souvenirs.
— Lesquels ?
— Il pensera qu'il a eu une pneumonie, qu'il a gardé le lit pendant plusieurs jours en proie à une forte fièvre et que je l'ai soigné avec mes potions. La douleur résiduelle qu'il ressent par moment là où le couteau a frappé va nous servir. On lui dira que c'est une conséquence de sa pneumonie et que ça passera. Il faudra en profiter pour l'enguirlander et lui dire de mettre des pulls chauds l'hiver et pas des petites chemises fines.
— Bonne idée. Et c'est pas faute de lui avoir dit, pour les chemises, mais il dit qu'il n'aime pas être engoncé dans des pulls ou des sweats. On se servira de ça. Le principal c'est qu'il oublie totalement l'agression et les jours suivants.
Et c'est ce qu'il se passa. Les deux sorciers se vêtirent d'un sort et transplanèrent directement dans le salon/salle à manger de Rick. Le cousin moldu d'Harry arborait une sérieuse paire de cernes sous les yeux, signe que ses nuits étaient fortement agitées.
Harry resta dans le salon avec Rick et l'obligea à avaler une bonne tasse de thé dans laquelle il glissa quelques gouttes de Philtre de Paix. Severus, baguette au poing, entra dans la chambre à coucher où Walt dormait d'un sommeil plus qu'agité. Le Maître des Potions y resta une bonne quinzaine de minutes et revint ensuite. Sans un mot, il s'installa à sa place habituelle à la table et prit le mug plein de thé qu'Harry lui avait servi. D'un coup de baguette, il le réchauffa, le trouvant trop tiédasse.
— J'ai fait comme on a dit, Harry. Je suppose que tu as tout expliqué à Rick ?
— Oui, je lui ai dit.
— Donc, Walt n'a plus aucun souvenir d'avoir été poignardé. Et comme il n'a aucune cicatrice, il ne faudra plus jamais mentionner cet évènement. Il va se réveiller ce matin pensant avoir été bien malade pendant plusieurs jours et n'avoir pas quitté son lit. Il faudra jouer le jeu et lui dire qu'il a fait une pneumonie parce qu'il a pris froid en sortant en chemise quand les températures étaient glaciales. On va lui rappeler que l'Ecosse en mai, c'est pas le printemps londonien. Et qu'il n'est pas habitué à ce climat. Comme on l'avait mis en garde déjà, il va marcher à fond. Et il fera attention à mettre un pull et une veste maintenant. Au moins, ça sera ça de gagné.
— Oui, c'est pas faux, répondit Rick en hochant la tête. Il me donne froid chaque jour quand il prend le Fumseck Express en manche de chemise. Harry m'a bien dit que Poudlard n'est pas isolé ni chauffé, du moins selon nos standards.
— On va lui dire que la fièvre est tombée, qu'il est d'ailleurs totalement guéri et qu'il peut retourner en cours à condition de s'habiller chaudement, poursuivit le potionniste.
— Fais-le acheter un pull Serpy, Sev'rus, un comme les élèves. Il le mettra, il sera trop fier.
— Tu as raison, Harry. On va lui en commander un chez Madame Guipure dès aujourd'hui.
Et voilà ! Walt Lestrange, dès cette nuit-là, oublia tout de sa mésaventure. Il retourna donc en classe avec un beau pull neuf et son écharpe Serpentard autour du cou. Il ne fit plus de cauchemars, ne paniqua plus, ni même n'hésita plus une seule seconde à descendre l'escalier menant au bar et à la partie discothèque.
Mis au courant par Harry dans une de ses missives hebdomadaires, Albus Dumbledore approuva et l'air de rien s'arrangea pour s'inviter à dîner le vendredi soir suivant chez Rick et Walt où se trouvaient bien entendu Harry et Severus pour le week-end. Albus en profita pour féliciter Walt de ses résultats aux examens de première année, et raconter tous les ragots entendus à Poudlard ou lus dans la Gazette du Sorcier ainsi que les autres publications magiques. Harry s'inquiétait de savoir si Arthur tenait le coup et supportait le décès de Ron. Les jumeaux lui avaient dit que oui, mais Albus devait voir Arthur bien plus souvent qu'eux. Et puis, il n'avait pas la même relation avec lui que les jumeaux.
Être à Poudlard semblait bénéfique pour le patriarche des Weasley. Il était calme, épanoui et paraissait apprécier son travail bien plus que celui qu'il avait avant au Ministère. Il fallait dire que la paye était bien meilleure. Selon Severus, elle devait faire presque le double de celle qu'il avait au Ministère, ce qui était loin d'être négligeable.
Ce fut certainement cette providentielle manne financière qui poussa Arthur à accepter l'idée des jumeaux. Les deux terreurs avaient invité leur père au Dragon Vert pour y déjeuner et celui-ci s'y était rendu vêtu d'une robe de sorcier neuve de bonne facture et d'une cape assortie. Jamais encore ses fils ne lui avaient vu de vêtements neufs de cette qualité. Entre l'entrée et le plat, ils lui racontèrent leurs visites au Charm'heure, lui expliquant que c'était un endroit agréable où on était extrêmement bien reçu. Le Vieil Ogden était du meilleur cru et les petits fours proposés absolument succulents. Le personnel était charmant et plein d'attentions. Ils se gardèrent cependant de lui expliquer de quelles attentions il s'agissait.
Ayant besoin de faire un petit break après une semaine d'enseignement à une classe comble (presque quarante élèves) et la fin des corrections des examens de fin d'année, Arthur eut donc l'idée de se présenter à l'adresse que tout le Monde Magique connaissait dorénavant pour en avoir au moins lu une publicité quelque part.
Arrivé au fin fond de l'allée des Embrumes, il se retrouva devant la porte blindée et après une légère hésitation, il souleva le heurtoir et le laissa retomber. Aussitôt, il entendit un bruit de clé, une serrure qui s'actionnait et la porte s'ouvrit. Un jeune homme, en tenue de soirée et portant un badge indiquant sa fonction : Sorcier de Sécurité, lui permit d'entrer dans une sorte de sas où une élégante dame d'un certain âge trônait dignement derrière un comptoir.
— Oh, bienvenue, Professeur Weasley ! Ça me fait bien plaisir de vous voir !
— Kenny ? Quelle surprise ! Si je m'attendais ! Vous travaillez donc ici ?
Le jeune sorcier blond hocha la tête fièrement et acquiesça.
— Oui, Professeur. C'est ma sœur Gwendolyne qui m'a trouvé cette place. Entrez, entrez… Madame Mathilda va s'occuper de vous expliquer comment ça se passe ici.
Kennilworthy Penrose était l'un des premiers cracmols du cours pour adultes d'Arthur. Celui-ci avait passé haut-la-main ses examens de première année (comme tous les autres d'ailleurs). Voir qu'il avait trouvé un petit job était bien agréable. En voilà un qui visiblement n'aurait aucun souci d'intégration malgré son abandon à onze ans dans le Monde Moldu.
— M'dame Mathilda ! lança Kenny à la caissière. Je vous présente le Professeur Weasley, c'est mon prof à Poudlard.
Arthur retira son chapeau, prit la main tendue devant lui et s'inclina devant la sorcière.
— Chère Madame, c'est un honneur…
— Bienvenue Professeur… Kenny m'a beaucoup parlé de vous et de vos cours.
Confus et flatté, Arthur releva la tête et se mit à rougir en détaillant la sorcière se tenant devant lui. Madame Mathilda avait quasiment la cinquantaine, les cheveux courts ondulés et bien plaqués sur son crâne à la façon des années folles. Elle portait une robe noire sobre avec un grand col de dentelle de guipure blanche. Un léger voile de poudre de riz lui donnait le teint rose et une touche de rouge à lèvres rouge pâle relevait sa bouche. Une paire de boucles d'oreilles pendantes en perles était ses seuls bijoux visibles si on exceptait une sobre montre bracelet en or et cuir noir à son poignet.
La dame était digne, propre sur elle, souriante… et elle avait une voix douce. Et mieux, elle savait visiblement se tenir en société. Et Arthur n'était pas du tout habitué à ça. Ce standing le séduisit et il trouva la sorcière très à son goût. Alors qu'elle prenait un bracelet en caoutchouc dans un petit panier d'osier posé sur le comptoir, et allait commencer son speech de bienvenue, un vieil homme voûté qui marchait avec une canne traversa le petit hall dans le but de quitter l'établissement. Kenny s'empressa et se précipita pour lui ouvrir la porte.
— Bonne promenade, patron !
— Merci, Kenny.
Arthur se retourna machinalement et resta figé, bouche ouverte.
— Vous, c'est vous ? Je vous croyais mort depuis tout ce temps… Et vous êtes là, par Merlin… bredouilla-t-il, les yeux plein de larmes.
— Arthur… soupira le vieux sorcier en le reconnaissant. Ça fait tellement longtemps. Viens, mon garçon, nous avons des tas de choses à nous dire.
Il se retourna vers la sous-madame qui les regardait sans rien dire.
— Madame Mathilda, j'emmène ce jeune homme avec moi. C'est un vieil ami de la famille. Je le ramènerai après ma promenade.
N'attendant pas de réponse, Fergus Nutcombe prit Arthur par le bras et l'entraîna au dehors.
— On va aller prendre un verre au Diablotin Rouge, c'est à deux pas d'ici. Nous y serons tranquilles pour discuter. Tu vas un peu me raconter ce que tu es devenu toutes ces années.
— M'sieur Nutcombe, bredouilla Arthur, avant j'ai une faveur à vous demander. Est-ce que vous pourriez me dire où Kyle est enterré, s'il vous plaît ? Personne n'a jamais voulu me le dire et je n'ai jamais pu aller me recueillir sur sa sépulture ni lui porter de fleurs.
Le Boss hocha la tête en silence. Evidemment que personne n'avait voulu répondre à cette question d'Arthur. Personne n'était venu aux obsèques, à part lui, sa femme, l'officiant des pompes magico-funèbres et le druide.
— Tes parents ne t'ont pas autorisé à venir à l'époque, pas vrai ?
— Je n'ai pas eu le droit, en effet. Et pire, avoua Arthur dans un souffle, je n'ai plus jamais eu le droit de prononcer son nom. Mère était même prête à me dénoncer comme complice si j'osais. Ensuite, on m'a fiancé à Molly Prewett et elle non plus ne voulait pas entendre parler de cette histoire. Mais je n'ai pas oublié. J'ai pensé à Kyle chaque jour que Merlin a fait depuis cette triste date.
— Kyle est enseveli avec sa mère dans un cimetière moldu. Je m'y rends deux fois par semaine quoi qu'il arrive : le mercredi à dix-huit heures et le samedi à midi. Tu es le bienvenu pour m'accompagner, Arthur. Je suis certain que Kyle sera ravi de te voir, de là où il est.
— Merci, Monsieur Nutcombe, répondit Arthur, ému, en s'essuyant les yeux avec un mouchoir.
— Ici, pas de noms, Arthur. Ici, je suis juste le Boss. Tu remarqueras bien vite que tout le monde m'appelle juste comme ça : Boss. Les trois quart de l'Allée des Embrumes m'appartiennent. Mais nous en reparlerons plus tard. Tu vas me raconter ta vie complète depuis la dernière fois que je t'ai vu chez nous, quand ma pauvre femme et mon pauvre garçon étaient encore parmi nous.
Le Boss poussa la porte d'un pub dont Arthur n'avait jamais entendu parler et entra. Aussitôt, le silence se fit dans l'établissement. Le barman quitta son poste et s'inclina devant les deux hommes.
— Par ici, Boss. Votre table vous attend. Du thé pour deux ?
— Du thé pour deux et deux petits verres de Vieil Ogden, Pete. Et qu'on ne nous dérange pas ! Si Cicéron me cherche, tu me préviens avec un messager ou un Elfe, c'est tout.
— Bien, Boss. C'est compris.
Fergus Nutcombe se dirigea vers une table isolée au fond de la salle. Arthur le suivit et remarqua la déférence que les clients lui montraient quand le Boss passait près d'eux. On inclinait la tête, chapeau retiré en lui souhaitant le bonjour et Fergus avait une réponse pour quasiment chacun, les appelant par leurs prénoms et demandant des nouvelles de leurs enfants ou épouses. Arthur prit place à la table en face du Boss tandis que Pete s'approchait porteur d'un plateau contenant deux tasses, une théière avec son pot à lait et son sucrier ainsi que deux minuscules verres remplis de liquide ambré. Sans un mot, il déposa le tout sur la table et retourna vers son comptoir, plateau à la main.
— Sers-toi, mon garçon. Je ne m'attendais pas à te rencontrer aujourd'hui. Tu viens souvent au Charm'heure ?
— Non, M'sieur Nut- hem… Boss. C'est la première fois. Ce sont mes fils jumeaux qui voulaient que je vienne avec eux. Apparemment, ils sont des visiteurs réguliers de cet établissement. Ils disent que c'est très bien.
— C'est bien gentil de leur part, répondit le Boss avec un léger sourire. Mais parle-moi de toi. Tu travailles à Poudlard depuis peu, Kenny nous a raconté. Il est très fier de ses résultats aux examens de première année.
— Kenny est un très bon élève. Je fonde les plus grands espoirs sur lui.
— Excellent, excellent ! fit alors Fergus Nutcombe en prenant la théière reposée par Arthur. Cette potion révolutionnaire est un bienfait pour le Monde Magique.
— Je trouve aussi. Pourtant Albus Dumbledore craint que le retour de nombreux Cracmols devenus subitement des sorciers ne provoque quelques… réactions. Certains qui n'ont hérité que parce que leurs aînés étaient sans magie ne vont pas vouloir aisément céder leurs places ou partager l'or reçu en legs.
— Dumbledore a tout à fait raison. Je pense que sans tarder nous entendrons parler de quelques scandales. Mais dis-moi, comment vis-tu ton divorce ? Oui, j'ai lu la Gazette et elle en a fait mention, tu penses bien.
Arthur soupira et reposa sa petite cuillère avec laquelle il touillait son thé bien chaud.
— Bien. J'ai enfin la paix. Oh bien sûr, il y a des inconvénients. Je dois apprendre les sortilèges ménagers puisque je n'ai pas d'Elfe-De-Maison, et je dois avouer que je ne suis pas très doué pour les sortilèges culinaires. J'ai résolu depuis peu de me faire livrer mes repas depuis les cuisines de Poudlard. Mes fils aînés ne sont pas plus doués que moi en cuisine. Molly était pénible à vivre mais elle était une bonne cuisinière. On ne peut pas lui retirer ça.
Fergus Nutcombe porta sa tasse à ses lèvres, avala une gorgée brûlante de son Darjeeling favori et demanda :
— Sept enfants… c'est ce que l'article disait. C'est beaucoup. Je crois que tu détiens le record du nombre d'enfants de tout le Royaume-Uni Magique. Tu n'as pas eu trop de mal à les élever ?
— Oh que si ! Je ne gagnais pas assez au Ministère… Juste le salaire minimal légal. Impossible de leur offrir des vêtements neufs, des livres d'école neufs… Payer Poudlard était un défi chaque année. Et encore, le Professeur Dumbledore m'avait fait obtenir des bourses pour aider. Et le reste, je payais à crédit. Ces dernières années pourtant, les grands m'ont aidés. William travaille à Gringotts et Charles est dresseur de dragons en Roumanie. Ils ont aidé à payer les livres et les uniformes pour leurs cadets. Ce sont de bons garçons.
— En effet. Parle-moi de tes enfants, Arthur…
Le Boss avait bien entendu une arrière-pensée en faisant cette demande.
Et Arthur raconta. Il expliqua qu'il n'avait jamais souhaité en avoir autant, mais Molly voulait absolument une très nombreuse famille et surtout une fille. Et donc, tous les deux ans, elle avait un nouvel enfant, et même une fois des jumeaux. La fille était arrivée alors que Ron n'avait que dix-sept mois et les jumeaux pas même quatre ans. C'était trop et trop vite. Oh, il ne les avait pas regrettés non, mais s'il avait eu le choix véritablement il n'en aurait jamais eu autant ! Quatre peut-être… mais sept… non. Il n'était pas assez riche. Ce n'était pas le tout de les faire mais il fallait les nourrir et les élever, leur donner une situation, les marier !
Il parla aussi du caractère de ses enfants. Bill et Charlie, travailleurs, braves et dévoués. Percy qui était snob et coincé, obsédé par le Ministère et tellement pétri d'ambition qu'il était plus qu'étonnant qu'il n'ait pas été réparti à Serpentard. Fred et George, les boute-en-train, toujours à rigoler, faire des blagues, et qui avaient un commerce florissant, à sa grande surprise et fierté. Et puis, il parla de Ron, de son comportement, de sa méchanceté, de sa paresse. Comment avait-il pu être aussi différent des autres ? Il ne comprenait pas. Et Ginny semblait vouloir le copier et ça le désespérait.
Il raconta comment Molly lui avait été imposée alors qu'il n'avait pas envie de se marier et surtout pas avec elle. Elle était trop dominatrice pour lui. Il aurait préféré une femme douce et discrète mais hélas…Père et Mère avaient pris la décision pour lui. Le Boss se contenta d'hocher la tête. Septimus Weasley n'avait pas été un mauvais bougre mais sa femme Cedrella Black était une véritable mégère de son vivant. Personne ne l'avait regrettée celle-là, il en était persuadé. Pas même ses enfants et ses petits-enfants !
— Ron devait tenir du côté des Black, sûrement. Je ne vois pas d'autre explication. Il a été élevé de la même façon que les autres. Comment a-t-il pu agir ainsi ? gémit le pauvre Arthur en secouant la tête.
— Malheureusement, je crains que nous ne le saurons jamais. A-t-on une idée sur les causes de son trépas soudain ? Mourir à Azkaban, ce n'est pas inhabituel étant donné les conditions de détention, mais empoisonné, il paraît ? J'avoue que je suis perplexe, déclara le Boss.
Il ne mentait pas. Il s'était félicité de la vitesse à laquelle ses ordres avaient été exécutés et avait promis une petite prime supplémentaire à Evariste Ogg, son âme damnée à la prison des sorciers. Pourtant, celui-ci lui avait loyalement et sincèrement avoué n'y être pour rien et donc ne pas mériter la prime ni son bonus. Fergus, Cicéron et Ed avaient cherché à comprendre ce mystère mais rien n'avait filtré. Selon Ambrosius, les Aurors se cassaient les dents sur cette affaire également. En bref, personne ne savait rien.
— On ne sait pas non plus. Les Aurors m'ont dit n'avoir aucune piste. Ils pensent à un empoisonnement oui, mais ils ignorent avec quel poison et ils ne savent pas non plus qui aurait pu le lui administrer.
— Eh bien, quelle affaire ! En effet, ce garçon était inquiétant. Il aurait mal tourné sans nul doute. A se demander si c'est bien toi qui l'a fait…
— Vous… vous pensez ? s'inquiéta Arthur, le rouge aux joues. Molly aurait pu m'être infidèle ?
— Ma foi, tout est possible. Tu me dis que tu en as trois sur le lot qui sont totalement différents en caractères et comportements. Es-tu sûr d'être bien le père de tout ce petit monde ?
— Heuu… oui, enfin… je l'espère. Comment on peut savoir ça ?
— Marcus Shield vend depuis peu une nouvelle potion qui s'appelle la « Potion d'Héritage ». Elle révèle les identités des ascendants jusqu'aux arrière-grands-parents d'après ce que je sais. Il me semble qu'elle est très chère comme toutes les potions de ce Prince. Mais je dois avouer qu'il fait d'excellentes potions, celle pour l'arthrose est une merveille. Elle m'a véritablement soulagé. Rien à voir avec celles prescrites à Sainte-Mangouste. Si tu connais un Maître des Potions, peut-être acceptera-t-il de t'en faire à un prix plus faible. Celui de Poudlard, peut-être ?
— Oh, Horace Slughorn ne se donnera pas cette peine. Albus Dumbledore a déjà eu du mal à le faire accepter de donner des cours de potions à ma classe d'anciens Cracmols. Mais peut-être que… oui, je connais un potionniste mais il vit dans le Monde Moldu. Je verrai à lui envoyer un hibou, avec un peu de chance, il acceptera.
— Termine ton verre de vieil Ogden, Arthur, nous allons rendre visite à Kyle. Inutile d'attendre samedi midi, tu as bien assez attendu. Il repose au cimetière de Nunhead ici à Londres. C'est près de la cathédrale Saint-Paul, enfin pas trop loin à vol d'oiseau. C'est un endroit magnifique. Il fait vingt-et-un hectares, autant te dire que si on ne sait pas où chercher une sépulture, on ne la trouve pas. J'ai fait exprès afin que personne du Monde Magique ne vienne troubler son repos et celui de sa pauvre mère.
Assis à la table dans la cuisine de l'Impasse du Tisseur, Albus Dumbledore, silencieux et songeur, tenait entre ses mains le parchemin d'héritage d'Harry. Ainsi donc, Lily Evans était la fille de Daisy Prewett… ce qui, oui, faisait de Molly ex-Weasley, sa tante. En effet, il se souvenait à présent que les Prewett – Ignatius et Lucretia née Black – avaient eu une fille bien longtemps avant leurs jumeaux et Molly. Il estimait la différence d'âge entre l'aînée et la dernière à une bonne vingtaine d'années. Un jour, cette aînée n'avait plus été vue et elle n'avait pas été admise à Poudlard non plus. Albus l'avait pensée décédée et n'y avait pas plus songé que ça. C'était juste après la guerre et les Mondes Magiques et Moldus se remettaient difficilement de leurs blessures. Entre le tyran moldu Hitler et Gellert Grindelwald, ils avaient eu fort à faire à cette époque-là. Beaucoup de gens, y compris des sorciers, avaient péri pendant le Blitz… Rapidement, tout le monde avait oublié Daisy Prewett. A présent, il comprenait que Cracmolle, elle avait été abandonnée dans le Monde Moldu dévasté, que ses parents avaient tiré un trait sur elle, se concentrant sur leurs jumeaux alors en bas âge et plus tard Molly qui avait été une surprise et non désirée selon les indiscrétions de cette vieille bique de Muriel.
— En effet, Harry. Molly est bien la tante de Lily, comme le parchemin l'indique. Il n'y a pas d'erreur. Je me rappelle de Daisy, ta grand-mère. Oh, je ne l'ai pas connue personnellement, mais je me souviens de son existence. Nous l'avons cru morte à l'époque quand elle n'a pas eu sa lettre. C'était l'après-guerre, il y avait eu beaucoup de morts dans certaines familles malchanceuses à cette époque-là. Je t'avoue que je n'ai pas pensé qu'elle avait été abandonnée car Cracmolle. Rien sur cet état n'avait jamais filtré.
— Ron m'avait parlé de ses oncles jumeaux tués par les Mangemorts mais jamais d'une tante qu'il aurait eue. Pourtant, il m'avait raconté que son père a un cousin cracmol qui est comptable dans le Monde Moldu, donc ce n'est pas tant que ça un tabou chez eux.
— Pas pour Arthur, non, mais… chez les Prewett, ça l'était visiblement. Je ne suis pas certain que Molly sache d'ailleurs qu'elle a eu une sœur aînée abandonnée car Cracmolle. Elle ne l'a pas connue et les jumeaux Prewett étaient si jeunes qu'ils ne devaient pas s'en souvenir. C'étaient des bambins, je pense. Ce n'est pas utile que Molly apprenne votre parenté, elle est bien assez remontée contre toi et aussi Severus. Malgré ce que les Aurors lui ont assuré, elle vous estime responsables de la mort de Ronald.
— C'est trop facile ! pesta Harry, furieux. C'est de sa faute à elle ! Rien qu'à elle ! Fred et George m'ont tout raconté, comment elle poussait Ron, comment elle lui passait tous ses caprices, lui trouvait toutes les excuses ! C'est de sa faute !
— Ne t'énerve pas, chaton, déclara calmement Severus en versant du thé dans la tasse que tenait son jeune compagnon. Prends donc un de ces petits biscuits au citron.
— Au citron ? s'intéressa Albus. Ils sont au citron ? Je ne les connais pas…
— Ce sont des biscuits moldus venant du Tesco local, Albus. C'est normal que vous ne les connaissiez pas.
La bouche pleine, Harry poussa devant le vieux Directeur un second parchemin. C'était une copie magiquement faite par Severus du parchemin d'héritage de Rick.
— Un second parchemin ? s'étonna le vieil homme, un biscuit à la main. C'est qui ? Ah ! Rick… voyons voir…
Albus lut les noms en commençant par le bas de la feuille. Il hocha la tête en voyant les noms de ses grands-parents moldus, semblables du côté paternel à ceux de Lily Potter. Severus et Harry le virent lever deux sourcils surpris qui plissèrent son front en lisant les noms côté maternel.
— Par Merlin ! Ulric Mortensen et Morticia Rookwood ? C'est intéressant !
— Vous les connaissez, Albus ?
— Personnellement ? Non, Severus. Mais leurs familles sont très connues. Les Mortensen sont une famille de sorciers de sang-pur venant de Suède comme leur nom l'indique. Je me souviens de Sven Mortensen, le père d'Ulric. Il faisait partie de la Confédération Internationale des Mages et Sorciers au tout début du siècle. A l'époque le siège était à Londres, ensuite il a été déplacé à Rotterdam. Sven Mortensen était le représentant de la Suède. Je n'étais moi-même que celui de la Grande-Bretagne, et pas encore le Grand Manitou. Ça, c'est venu bien plus tard. Donc, si j'analyse bien la situation, cet Ulric était un Cracmol et a été abandonné dans le Monde Magique britannique à cette époque.
— Ouais, avoua Harry. Rick m'a dit que son pépé était épicier dans un petit village. S'il avait été un sorcier, Rick l'aurait su et le type n'aurait pas été un simple épicier, du moins pas chez les Moldus. Nan, il aurait tenu une épicerie magique à Pré-Au-Lard ou au Chemin de Traverse.
— Exact, Harry. Et Morticia était une Cracmolle. Mauricius Rookwood n'aurait jamais laissé sa fille épouser un Cracmol si elle avait été une sorcière. Connaissant l'oiseau, je suis même étonné que cette Morticia n'ait pas été tuée par son père. C'est qu'il était violent l'animal, et réputé sanguinaire ! C'était un partisan de Gellert, je me souviens. Il aurait vécu plus longtemps, il aurait suivi Lord Voldemort sans nul doute.
— Donc, Ann Mortensen, la mère de Rick, était une Cracmol de sang-pur. Mais comment ça se fait que la magie ne se soit pas réveillée en Rick comme pour Maman quand y a eu un apport de sang moldu ?
— Une grande part de hasard, certainement, Harry. Mais tu m'as bien dit que Rick ne voyait pas mon Patronus, donc il est fort possible qu'il soit vraiment un Moldu et n'ait pas hérité des gènes magiques de sa mère.
— Merde ! Comment on peut savoir ça ? pesta Harry.
— Langage, chaton ! gronda Severus.
— Severus, mon petit, essayez de donner une potion Retour de Magie à Rick. Si ça se trouve il est un Cracmol malgré tout. Si jamais elle ne marche pas du tout, et bien vous saurez qu'il est un Moldu.
— Pourquoi pas… acquiesça le Maître des Potions, songeur.
Franchement, Severus avait des doutes. Le fait que Rick ne voie pas les Patroni ne disait rien qui vaille. Enfin… on verrait bien le week-end prochain. Ils tenteraient l'expérience.
Fergus Nutcombe avait fait transplaner Arthur derrière les hauts murs du cimetière de Nunhead, non loin de l'entrée principale située dans Linden Grove. Arthur eut la surprise de se retrouver dans une véritable forêt tant il y avait des arbres partout. Et parmi eux, au détour des allées sablées, il voyait des chapelles style gothique et des pierres tombales, certaines récentes et d'autres ayant au moins cent cinquante ans à son humble avis. Il était dix-huit heures et le ciel était bleu, la température clémente et une légère brise soufflait. Dans les vertes frondaisons les surplombant on entendait des oiseaux pépier.
— Je vais nous mettre un « Ne-Me-Remarquez-Pas ». Inutile que les Moldus ne voient nos robes de sorcier.
Le Boss sortit sa baguette de sa manche gauche et lança son sort.
— Voilà, on sera tranquilles. Viens, c'est par là, il faut quitter l'allée et s'éloigner sous les arbres. Je les ai bien dissimulés, crois-moi. Personne ne sait où ils sont et personne ne pourra venir les troubler. A l'époque, je craignais qu'on ne vienne profaner leur sépulture étant donné les circonstances.
— Oui, je comprends, soupira tristement Arthur.
Les deux sorciers marchèrent en silence un long moment. A un moment, la progression devint même plus ardue. Il y avait un épais tapis de feuilles mortes datant de l'automne précédent, des ronces, des fougères, des tas de plantes qui avait envahi à peu près tout et les tombes anciennes, abandonnées depuis plus d'un siècle étaient couvertes de mousses et les épitaphes plus lisibles du tout. A un moment, Fergus s'arrêta dans une toute petite clairière de quelques mètres carrés. Une rangée de tombes de facture ancienne était alignée en face d'eux contre des arbres centenaires. La lumière verte qui traversait les feuillages donnait une apparence irréelle aux lieux. Tout était… et bien… vert… moussu… magique. C'était vraiment ce qu'Arthur ressentait à cet instant précis.
Pourtant une des tombes au centre n'avait pas de mousse bien que son style semblait aussi gothique que les autres. Et elle avait une particularité : elle avait des fleurs fraîches au pied de la stèle. La gorge serrée, Arthur songea qu'il n'avait pas eu le temps d'acheter de fleurs sur le Chemin de Traverse, ni même dans l'Allée des Embrumes au cas où un fleuriste y était installé, ce qu'il ignorait totalement.
Sans un mot, il s'approchèrent. Arthur retira son chapeau et ses yeux le piquèrent furieusement en découvrant les inscriptions gravées dans la pierre. La stèle haute et terminée en arc pointu sculpté de feuilles d'acanthes et de fleurs portait ces simples mots.
Kyle Fergus Nutcombe 15 ans, 1965
Sonja Greta Mortensen épouse Nutcombe 35 ans, 1965
Reposez en paix.
Les larmes s'échappèrent des yeux d'Arthur en lisant. Cela faisait trente-trois ans qu'il attendait ce moment… Enfin, il avait retrouvé son meilleur ami.
1 L'ABS est un matériau plastique moderne.
