Hi ! Une fois n'est pas coutume, je suis encore en retard. Quoique non en fait. Ma prise de retard est devenue tellement habituelle qu'il me faudrait une absence de plus de 6 mois pour que l'on puisse réellement parler de retard ^^ Mais trêve de bavardages, voici un vague retour en arrière afin de vous resituer dans l'histoire.
Résumé : Cuddy a fini par rencontrer Sanford Wells pour parler de sa situation, ce qui a un brin inquiété le diagnosticien, celui-ci n'étant pas sûr quant aux conséquences à venir. Le soir même, les deux médecins se retrouvent et semblent alors véritablement prendre conscience de la nature de leur relation.
Bref, ce fut un chapitre sans saveur mais il fallait bien qu'il y ait cette transition. J'espère néanmoins m'être rattrapée sur celui-ci.
À Anna : merci à toi. Cela dit je contexte le fait que le chapitre précédent était disons convenable. Après tu as le droit de l'avoir apprécié, mais à mon sens il était fade. Enfin bref passons. Toi qui voulais une suite rapidement, je crois qu'on peut dire que je t'ai superbement faite attendre ! Je m'en excuse, même si ça ne sert pas à grand-chose puisque ça sera comme ça jusqu'à la fin.
À Huddylove : tiens, je suis suivie ici par des Huddyennes blogueuses ! xD Sache que ça me fait grandement plaisir. Par pur hasard, dis-tu ? Tu n'as pas débarqué ici via le lien que j'ai laissé sur le 1e article de mon Blog, donc en fin de compte je suis d'autant plus ravie que tu sois tombée sur une de mes fics :)) Je pense me souvenir de toi mais je ne suis pas sûre de ne pas me tromper… Serais-tu cette personne avec qui je parlais beaucoup il y a quelques années ? Le temps où je me consacrais à mon Blog est révolu depuis tellement longtemps, et je n'y suis pas retournée depuis un bon bout de temps maintenant alors j'espère que tu ne m'en voudras pas. Si tu as un peu de temps pour lire des fics qui ne sont présentes qu'ici j'en serais très contente ; et à titre d'information si tu comptes t'attaquer à celle-ci j'ai envie de te dire ''bon courage'' :3
Sur ce…
Good Read ;)
Chap' 26
Jeudi 1er Novembre 2007
Elle le dévisagea, ne sachant pas vraiment si elle n'osait rien dire parce qu'elle ne voulait pas briser cet instant de silence bienheureux ou bien parce qu'elle appréhendait un tantinet la réaction qu'il pourrait bien avoir suite à ce qu'elle avait à lui dire. Peut-être était-ce un peu des deux. Il fallait pourtant le mettre au courant, alors elle se força un peu.
Tu as prévu quelque chose ce week-end ?
Il leva les yeux de sa revue, restant ensuite ancré à son visage comme si c'était la première fois qu'il le voyait. Et puis un léger sourire prit forme sur ses lèvres, se voulant railleur.
Tu sais très bien que je ne prévois jamais rien à l'avance alors… non, rien. Annonça-t-il en refermant le magasine, se tournant ensuite complètement face à elle. Je suppose que si tu me poses la question c'est parce que toi tu as prévu un truc.
En effet. Dit-elle simplement, laissant volontairement le questionnement s'installer dans son esprit.
Il ne fallut pas attendre ad vitam æternam pour qu'une réaction n'apparaisse. Désireux d'en savoir davantage, le diagnosticien plissa les yeux, la regardant avec insistance. Elle ne put alors s'empêcher de sourire doucement, ayant bien du mal à rester stoïque face à sa mine d'enquêteur chevronné. Mais l'esquisse de ses lèvres s'effaça assez rapidement lorsque revint à son esprit les raisons de tout cela. L'air de rien et avec cette touche d'indifférence qu'il n'avait que très rarement eu l'occasion de constater chez elle, Cuddy remit une mèche de cheveux derrière son oreille, sans jamais le quitter des yeux.
Je vais chez ma sœur.
À sa déclaration, il ne put contrôler son émotion. Une légère lueur de surprise apparut dans son regard, disparaissant presque aussitôt. Il fut d'ailleurs étonné de son propre trouble sans parvenir à trouver une explication.
Elle n'est toujours pas au courant. Constata-t-il plus qu'il ne demanda.
Maintenant qu'elle savait qu'il était en train de cogiter bon nombre de choses à ce propos, la Doyenne se dit qu'elle aurait peut-être dû le mettre au courant avant de se trouver à deux jours de ce fichu week-end. Celui-ci ne l'emballait pas, et sur cette pensée un peu morne elle se sermonna de ne rien lui avoir dit plus tôt. Au fond d'elle elle savait qu'il lui aurait apporté l'assurance qu'elle avait secrètement tant de mal à trouver. Oui, elle aurait dû lui en toucher deux mots.
Pourquoi ?
Ce simple mot suffit à la sortir des pensées dans lesquelles la jeune femme s'était plongée. Elle en aurait presque sursauté, mais n'en fit rien. Son regard vert foncé se perdit dans le bleu nocturne du sien, s'amarrant avec franchise à ce point sombre qui venait de prendre une fabuleuse expansion.
Je… Prononça-t-elle du bout des lèvres sans parvenir à continuer.
Cuddy se renferma, ne sachant plus par où commencer. Elle hésita même. Allait-il comprendre ? Pourrait-il se passer de faire une quelconque réflexion ? Le fait de se poser ces questions et bien d'autres encore ne l'aida pas. Et puis pourquoi avait-elle ce questionnement ? Elle le connaissait assez bien pour savoir sans trop se tromper comment il réagissait.
Le néphrologue, lui, la regarda avec cette impression de déjà-vu qui lui torpilla l'estomac. Évidemment elle lui cachait encore quelque chose, mais la question qui s'imposa à lui n'était pas portée sur l'identité de ce mystère mais bien sur le fait qu'il n'avait rien vu venir. Certes il ne vivait pas avec elle, ils n'étaient pas comme tous ces couples dont il savait qu'elle rêvait en secret ; mais cela n'empêchait pas le fait qu'il était assez perspicace pour dénicher les petites choses qui sortent de l'ordinaire, surtout lorsqu'il s'agissait de Lisa Cuddy. Pourquoi Diantre n'avait-il rien vu ? Il ferma les yeux un instant, expulsant silencieusement un soupir d'incompréhension.
Et puis elle reprit, toujours peu sûre d'elle et récemment inquiète.
Je n'étais pas prête à lui annoncer.
House la regarda invariablement, intrigué par cet aveu inattendu. Le silence qu'il s'appliqua à ne pas faire taire suffit à décider la jeune femme d'en dire davantage.
Je voulais être sûre. Avoua-t-elle dans un murmure qui ne pouvait vouloir dire qu'une chose.
Tu pensais… que tu aurais pu le perdre ?
Sa question la fit serrer ses paupières l'une contre l'autre. Dans le même temps, sa tête s'inclina vers le bas et un soupir lui échappa. Peine et lassitude s'en faisaient ressentir. Le médecin était comme estomaqué, incapable de faire le moindre geste envers elle ; physiquement et verbalement parlant. Il ne saisissait pas vraiment le sens de tout ça. Pourquoi cela lui faisait-il peur ? Enfin, la question n'était pas très bien formulée. Évidemment qu'elle avait une certaine inquiétude vis-à-vis de ça, comme n'importe quelle femme sur le point de donner la vie. Il le concevait amplement. Mais selon lui il y avait autre chose.
Sans le vouloir, certains souvenirs refirent surface. C'est à cet instant que la difficulté prit tout son sens. Incontrôlable, un frisson se propagea dans l'ensemble de son corps, descendant le long de son échine dans une abominable lenteur. Le ressenti était exécrable. La diffusion insoutenable.
Elle ne vit rien venir, s'immergeant entièrement dans cette enveloppe de pensées les plus vastes, comme le papillon dans sa chrysalide. House se tenait là, à seulement quelques centimètres d'elle. Il pouvait même percevoir son rythme cardiaque qui s'accélérait au fur et à mesure qu'il pouvait sentir son souffle s'abattre sur sa propre peau. Impartialement, il hésita quelques instants à réaliser concrètement sa pensée. Faite d'une envie irrécusable trouvant son origine dans un semblant d'humanité parce qu'il ignorait l'existence de cette dernière, cette pensée lui traversa l'esprit de la même manière qu'un coup de génie lors d'un différentiel. Elle lui donna l'impression qu'il était à deux doigts de frôler le malaise, mais - dans son cas - une belle lipothymie ne faisait pas partie des choses dites ''acceptables'' pour Gregory House. Non, tout cela était stupide. Néanmoins il sentait bien cette légère touche amère qui venait de se plaquer contre son palais, forçant l'instant d'après une déglutition dont il se serait volontiers passé.
Sa main se tendit vers elle, tremblante parfois bien qu'imperceptiblement. Elle s'ancra sur son épaule droite, reconnaissant bien là sa fine ossature sous l'acrylique de son gilet couleur prune. À cet instant, Cuddy releva la tête, le regard s'amarrant comme instinctivement au sien. Celui-ci l'ébranla à la fois d'une crainte pas des plus inattendues et d'une infime tendresse mélancolique. Un sentiment étrange.
Il ne te fera plus de mal, Lisa. Laissa-t-il échapper de sa bouche, tel un souffle tant le timbre de sa voix n'était que murmure.
À l'instant même où ses mots lui parvinrent, elle réalisa qu'il avait compris d'où provenait son inquiétude. Elle se sentit faible tout d'un coup. Il paraissait si fort, si avenant vis-à-vis d'elle. Une enfant terrorisée, voilà ce à quoi elle se comparait. Terrifiée par une chose qu'elle n'arrivait à décrire mais dont elle savait qu'il fallait se méfier.
Un pas en avant digne de celui d'un bambin de par sa faible importance et il se retrouva contre elle, les bras enlacés dans le milieu de son dos. Elle ne bougea pas. Stoïque ou paralysée, elle sembla toutefois apprécier son étreinte. Il se voulait réconfortant, alors que lui-même manquait de savoir-faire dans ce domaine. Tant pis. Pour une fois il allait faire un effort, bien que ce n'était pas non plus une première. Il le devait, pour elle. De plus en plus, il la sentit se détendre lorsque - sur une faible distance - il appuya son pouce le long de ses vertèbres dorsales dans un mouvement de va-et-vient vertical. Sa respiration se cala sur la sienne, calme et profonde. Il imaginait qu'elle avait fermé les yeux, se laissant bercer par le sentiment de sécurité qu'il s'appliquait à lui offrir. L'odeur qui se dégageait de ses boucles brunes lui arracha un geignement ténu. Indépendamment de sa volonté, il repensa à cet être pernicieux. Sa prise sur elle se fit alors plus franche. Même éloigné de la jeune femme, cet abrupt personnage continuait à lui nuire. Évidemment qu'elle avait eu peur de perdre le bébé ; le choc post-traumatique de son agression avait eu de quoi être effrayant. Et pourtant, tous deux étaient conscients que rien n'était encore gagné…
Au bout de quelques minutes, les deux médecins se détachèrent l'un de l'autre. Le contact entre eux était toujours présent. Il la regarda, amoureusement. Le revers des doigts de sa main droite caressa sa joue, douce et chaude à la fois. Sans plus d'explication, ses lèvres frôlèrent celles de sa compagne. Farouche, elle répondit néanmoins à son initiative. Là où les choses se compliquèrent, c'est lorsque la main gauche de House se faufila sous son pull. Il n'avait cependant rien fait de déplacé. Non, la lenteur de ses doigts caressant la peau de sa hanche n'était pas ce qui avait causé le refus de Cuddy. C'était plutôt ce que ce geste impliquait qui l'avait induite à le repousser. Maintenant mal à l'aise, elle le regarda nerveusement. Lui était gêné.
Tu sais très bien ce que je t'ai dit à ce propos.
Le néphrologue baissa un instant la tête, se rappelant très bien qu'elle n'était pas prête à entamer une relation avec lui. Il ne savait pas réellement ce qu'il devait répondre à ça. Et puis, ébranlé par bien des sentiments qu'il avait à son égard, les mots lui vinrent comme naturellement.
Je sais, mais… je t'aime.
Les yeux désormais pétillants, Cuddy ne put s'empêcher d'esquisser un sourire tant elle était touchée. Elle était radieuse, il s'en rendait compte.
Je sais. Admit-elle non sans que ses joues ne se mettent à rosir. Excuse-moi…
De quoi tu t'excuses ?
Ce fut à son tour de baisser la tête. Elle se mordit promptement la lèvre. Il lui coûtait de dire ça parce qu'elle s'en voulait beaucoup concernant l'effet que cela pouvait avoir sur le diagnosticien, mais elle lui en fit tout de même part.
Tu essais d'être là, tu te montres gentil avec moi… Et moi je trouve le moyen de repousser toutes les marques d'affection que tu peux me faire alors que je sais à quel point il t'est difficile d'exprimer tes sentiments.
House la regarda attentivement, sans ciller, sans avoir l'idée de penser à autre chose. Il était quelque peu scotché, abasourdi par sa déclaration. Il réalisa alors qu'elle avait pleinement conscience des efforts qu'il faisait pour s'ouvrir à elle. Il en était profondément touché. Mais sa nature introvertie et réservée ne lui permit pas de le lui avouer.
Tu n'as pas à t'excuser pour ça, je comprends très bien. Se contenta-t-il de la rassurer. Je n'attends rien de toi. Je ne vais pas te forcer à aller plus loin alors que ce n'est pas ce que tu souhaites pour le moment.
La jeune femme ne le quitta pas une seconde des yeux, emplie d'un sentiment qu'elle ne put traduire autrement que par un regard. Ce dernier, pénétrant et d'un gris-bleu électrique qu'il n'avait perçu que trop rarement, le foudroya en une fraction de seconde.
Il m'arrive parfois d'oublier ce garçon que j'ai connu à la Fac…
Sa fine main venait de se poser contre sa joue râpeuse. S'en était-il seulement rendu compte ? Quoiqu'il en soit, le message était passé.
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En cette matinée du 3 Novembre, Lisa Cuddy se trouvait sur la route pour Philadelphie. 45 miles* la séparaient de sa petite sœur, ce qui signifiait bien peu pour elle. Après tout le pays était immense. Cette distance était faible comparativement à la superficie de ces Terres. L'autoradio débitait son lot d'informations quotidiennes. Météo, faits divers, flash info… Tout était évoqué - même brièvement - durant la faible unité de temps accordée au présentateur. Un carambolage aux abords du New Brunswick, un braquage à mains armées dans le Queens… Que cela pouvait être stressant ! Les mains fermement accrochées au volant, la jeune femme essaya de se concentrer sur la route. Il y avait à peine dix minutes qu'elle avait bifurqué sur l'I-95, et cette dernière lui donnait déjà l'impression d'absorber toutes ses pensées. Elle n'aimait pas spécialement les routes toutes droites, et même si celle-ci ne l'était pas constamment elle préférait rester prudente. C'est pour cette raison que lorsque la musique reprit elle préféra ne pas tripoter les boutons de la radio. Tant pis, elle supporterait la voix de ce rappeur bien qu'elle abhorrait ce style de musique.
Il était dix heures trente quatre lorsqu'elle gara sa Lexus sur Crefeld Street, au 7816. À présent devant la demeure de sa cadette, Lisa ne descendit pas tout de suite de voiture et observa les environs. Située dans le Nord-Ouest de la ville, il y avait là une banlieue tranquille et à l'atmosphère qui ne lui déplaisait pas. Lorsqu'elle lui rendait visite - ce qui arrivait peut-être deux fois par an - , elle ne restait chez sa sœur jamais plus d'un week-end. Néanmoins, à chaque fois qu'elle franchissait le seuil de cette porte, elle avait ce sentiment d'apaisement qui l'envahissait et savait que ce n'était pas uniquement dû au fait qu'il s'agissait d'un membre de sa famille. Un soupir lui échappa au moment où elle quitta ses pensées, reportant son attention sur la rue qui se trouvait être à peine fréquentée. Elle avait eu besoin de changer d'air, et la conversation qu'elle devait avoir en tête-à-tête avec sa sœur avait été le prétexte qu'elle avait sciemment présenté à House de façon dissimulée. Quoiqu'il pouvait très bien faire le rapprochement en dépit du fait que sa présence dans l'État de Pennsylvanie s'expliquait de manière tout à fait rationnelle.
La jeune femme quitta l'habitacle de sa voiture pour se diriger vers l'arrière de celle-ci. L'air frais la piqua et sa main gauche se refermant sur le col de son long manteau chocolat. Sur le trottoir d'en face jonché de gazon en bordure, une adolescente dévala la rue en rollers, tenant en laisse le Bearded Collie qui semblait prendre plaisir à tracter sa jeune maîtresse pour la faire avancer plus vite. Lisa ouvrit le coffre, sortant une valise à roulettes violette prune. Elle se prit deux minutes, rien que pour détailler cette maison qui lui faisait face. Faite de pierres joliment façonnées et d'une charpente blanc vanille, elle lui trouvait un certain charme. Esthétiquement cette maison lui plaisait et elle en avait déjà fait la remarque à ses propriétaires. Elle s'engagea ensuite dans la petite allée menant jusqu'à la porte d'entrée. Sa main se leva et vint frapper contre le bois d'un vert sapin, conférant à cette demeure - et ce de façon plutôt étrange et inhabituel - autant de mystère que de classe. Quelques secondes plus tard, qui ne lui laissèrent pas le temps de constituer ne serait-ce qu'un tiers des explications qu'elle allait devoir apporter à sa sœur, la porte s'ouvrit et Julia l'accueillit, le visage fendu d'un énorme sourire.
Oh, Lisa, comme je suis contente de te voir !
Sans lui laisser le temps de quoi que ce soit, la jeune femme aux cheveux un peu plus clairs lui sauta dessus, l'enlaçant sans retenue. Avec sa main dans son dos et son bras droit passé par-dessus son épaule et dont la main rejoignait sa jumelle opposée, Lisa resta clouée sur place, incapable de faire le moindre mouvement. Elle lâcha alors la poignée de sa valise - laquelle s'échoua lourdement sur le ciment grisâtre - et répondit à l'accolade de sa cadette.
Moi aussi, Julia.
Comme elle put, l'endocrinologue se dégagea légèrement et lui embrassa de manière appuyée la joue gauche. Elle la sentit pousser un soupir de satisfaction, et elle l'imagina fermer les yeux au même moment. Julia apprécia ce geste simple qu'elle savait pourtant profond. Elle savait que son aînée avait parfois un peu de mal avec l'expression de ses sentiments, à l'inverse d'elle qui éprouvait une certaine facilité dans ce domaine. Peut-être était-ce dû à l'amour que leur mère lui avait porté ; ce même amour qu'elle n'avait pas su, pas voulu ou pas pu manifester de la même façon envers sa fille aînée…
Viens, entre. Il ne fait pas très chaud dehors.
Et c'était peu de le dire ; la gelée matinale avait été évitée de peu. Elle reprit donc sa valise en main et pénétra dans l'intérieur de la demeure, reconnaissant une fois encore le goût prononcé que sa sœur avait pour l'art. C'était un des points que les deux femmes avaient en commun. Le hall, dont les murs tiraient sur le beige crème, se prolongeait par un couloir asymétrique de la même teinte. Une fois passé la porte d'entrée, il suffisait de faire trois pas en avant pour faire face à un somptueux couché de soleil digne d'une douce romance, un moment à partager à deux ou bien à contempler seul comme le plus aigri des loups solitaires. Les points de vues se défendaient. Elle resta un instant sans bouger, le regard perdu dans cette belle ligne où se côtoyaient le chatoiement magnétique de l'astre et le calme mystérieux de l'océan. La peinture - datant semble-t-il de l'année 1981 - avait pris vie dans ce groupe d'îles portugaises appelées les Açores. La dernière fois que la jeune femme était entrée dans cette maison elle n'y était pas. Julia avait dû l'acquérir dans les six derniers mois, pensa-t-elle.
Il est beau, n'est-ce pas ? Fit Julia à l'intention de son aînée qui semblait s'être perdue dans le graphisme du tableau.
Lisa sortit de sa contemplation, adressant un sourire de connivence à sa cadette qui la regardait avec douceur.
Ses affaires maintenant déposées dans la chambre d'amis, l'endocrinologue avait rejoint sa sœur dans le salon. Les deux jeunes femmes se regardèrent un court instant, avant que la plus jeune ne brise le silence qui s'était installé.
Tu veux boire quelque chose ? J'ai une cafetière pleine de café qui nous attend si tu veux.
C'est gentil mais… si tu avais autre chose que du café j'aimerais autant.
Julia esquissa un rapide sourire.
Toi et ton thé… Je dois en avoir une boîte quelque part.
Et elle partit dans la cuisine, la laissant seule au milieu de cette pièce qu'elle trouvait à son goût. Sa main gauche s'égara dans l'épaisseur de sa chevelure. Son regard avait divagué un court moment avant de se poser et de rester fixé à un autre tableau, un qu'elle connaissait bien cette fois. Ladite toile représentait une jeune fille légèrement de dos. La chaleur de l'été lui avait permis de porter un débardeur. Elle chevauchait un cheval de robe baie et, à en juger par le type d'harnachement utilisé, elle pratiquait l'équitation western. Ses longs cheveux châtains étaient rassemblés en une queue de cheval et leurs mouvements étaient aussi inertes que ceux des crins de sa monture. Ses pupilles s'attardèrent ensuite sur les quelques taches rouges qui dansaient ci et là dans ce qui représentait l'étendue d'herbes d'un pré. Elle se souvint des coquelicots qui n'étaient pas rares dans les champs. Leur grand-mère les appelait ''les joyaux de la belle saison''. Un doux souvenir l'envahit, la saisissant jusqu'au plus profond d'elle-même.
Je me souviens encore de cette journée comme si c'était hier. Déclara Lisa alors que Julia revenait tout juste de la cuisine, cafetière, théière et tasses disposées sur le plateau qu'elle portait.
Tu avais décidé d'entrer en Fac de médecine. Papa et maman n'y voyaient pas d'inconvénients. Et puis un beau matin tu as reçu un courrier de l'Université du Michigan annonçant que tu étais prise dans leur établissement. Je me souviens encore de l'euphorie qui t'avait habité à ce moment-là ! Elle fit une pause et posa le plateau sur la table. Quelques jours plus tard, nous sommes allées passer quelques temps chez papy et mamy. Ce fut nos dernières vacances d'été passées ensemble. Julia servit le liquide ambré dans une tasse à soucoupe, laissant au thé faire des ''plip-plop'' lorsque celui-ci s'écoula du fin goulot de la théière pour venir s'unifier au fond de la tasse. Tu avais passé une bonne partie de ton temps à prendre des photos. Tu disais que tu voulais nous ''emmener'' avec toi là-bas.
La jolie brune se retourna vers le tableau de 50x40. Un doux sourire vint étirer ses lèvres, le regard toujours solidement scrutateur. Leurs grands-parents possédaient une ferme. Il y avait longtemps qu'il n'y avait plus de bétail mais ils avaient encore quelques chevaux, la grande passion du grand-père paternel. Depuis leur plus tendre enfance, Lisa et Julia côtoyaient ces équidés quand d'autres enfants partaient en balade avec leur chien. Leur père leur avait appris à monter ; toute une aventure. Bien des fois, Arlène l'avait réprimandé quant aux chutes que les fillettes faisaient parfois. Heureusement son mari avait toujours trouvé les bons mots pour la rassurer, ce qui faisait le plus grand bonheur des filles.
Avec une touche de mélancolie, elle en ferma les yeux pour en apprécier d'autant plus le souvenir. C'était une bien belle époque.
J'ai pris cette photo sans que tu ne t'en sois aperçue. Lâcha-t-elle dans l'air plat de la pièce, et elle se retourna vers son interlocutrice. Quelques mois plus tard, papa a trouvé le polaroïd qui s'était égaré de mon agenda. Je me souviens qu'il l'a regardé, les yeux brillants, et il m'a dit : « Je t'emprunte cette photographie. Je viens subitement d'avoir une idée ». Tu avais seize ans lorsque j'ai pris cette photo, et l'année d'après papa t'offrait ce tableau. Une parfaite reproduction artistique de ce souvenir de l'été 1986 passé à Skowhegan.
La jolie brune retint le liquide lacrymal qui menaçait de déborder de ses paupières. Ses souvenirs étaient quasi intacts ; elle se surprit à le constater.
Il me manque. Avoua la jeune femme, assise sur le canapé de velours bleu pastel qui se fondait sensiblement bien dans le décor du salon.
Moi aussi, Julia. Moi aussi…
Lisa actionna le mouvement de ses jambes et rejoignit sa cadette. Elle s'assit à sa gauche et toutes deux prirent une gorgée de leur breuvage. Et puis, une chose frappa l'esprit de l'endocrinologue.
Où sont les enfants ?
Oh, Glenn les a emmené avec lui. Ils sont allés faire un tour en ville. Je suppose qu'il a pensé que ce serait une bonne chose de nous laisser un peu seules toutes les deux.
Et comment ! Il ne pouvait y avoir meilleure idée que celle-ci, pensa-t-elle.
Mais dis-moi, tu m'as dit au téléphone que tu devais me parler de quelque chose, et te connaissant il s'agit de quelque chose d'important. Je l'ai senti dans ta voix. Alors, raconte ?
Oui, euh… Eh bien… Cuddy hésita. Comment annoncer une nouvelle dont elle avait fini par en abandonner l'idée ? Je… Je suis enceinte.
Julia reposa la tasse qu'elle venait à peine de reprendre dans sa main. Elle la regarda, les yeux ronds de surprise, pétillants de joie.
Oh, Lisa, comme je suis contente pour toi ! S'exclama-t-elle avec entrain.
Et elle l'enlaça une nouvelle fois, embrassant sa joue avec autant d'enthousiasme que la première fois, si ce n'est plus.
Je me disais bien aussi qu'il y avait quelque chose de changé chez toi. Et ça fait combien de temps ? Demanda-t-elle toute excitée.
Ça fera cinq mois dans trois semaines.
Cinq mois ?! S'écria-t-elle involontairement, ayant bien du mal à contrôler ses émotions. Et tu nous a caché ça pendant tout ce temps !
Je sais, oui. La jeune femme resta silencieuse quelques secondes, le regard bas. Je voulais être sûre, tu comprends ?
Julia la regarda, prise d'un profond élan d'affection. Elle lui sourit et acquiesça d'un long battement de paupières.
Et… qui est le père ? S'enquit-elle prudemment, voyant l'expression de son visage changer en une fraction de seconde.
C'est House.
C'était sorti d'une traite, sans la moindre réflexion avancée. Julia regarda son aînée de manière absolument ébahie. Lisa avait entièrement conscience de sa réaction, cependant elle ne put changer l'expression de son visage. Elle en était tout aussi bien exaspérée qu'amusée.
Gregory House ? Le House qui t'a rendu malheureuse à la Fac ?
Je ne pensais pas que tu aurais retenu son prénom. Fit Lisa avec un sourire froid, ignorant sciemment la dernière chose qu'elle avait dite.
En même temps tu as tellement parlé de lui, c'est pas étonnant. Et donc, vous êtes ensemble ? Enchaîna-t-elle, désireuse de connaître un bout de la vie privée de sa sœur. Elle qui n'en disait jamais grand-chose…
C'est compliqué.
Simple, court. Ça devrait lui suffire. Sauf que Julia ne s'en contenta pas.
Oh, ne me dis pas qu'il a rompu avec toi parce que tu es tombée enceinte !
Faut toujours que tu imagines le pire… Dit-elle d'une voix exsangue.
Vu le personnage, il y a de quoi.
Elle continua de la scruter, comme si un quelconque élément de réponse allait lui être dévoiler de manière tout à fait spectaculaire.
Ça n'a rien à voir avec ça. Avoua-t-elle enfin, sentant sa cadette être sur le point de s'évanouir à cause d'une attente un peu trop longue, d'un suspense jugé insoutenable. Au contraire, il n'a jamais été contre ma grossesse. Le problème c'est qu'il est assez réticent à l'idée de devoir jouer son rôle de père.
Réticent ! S'écria soudainement la plus jeune. Non mais enfin, Lisa, ce n'est quand même pas…
Je t'en prie, Julia, s'il te plaît.
Sa cadette la regarda, l'air plus embarrassé que jamais.
Oui, excuse-moi. Je réagi de manière hystérique alors que c'est toi qui est inondée d'hormones… Je suis désolée.
Elles se mirent à rire pendant un moment. Ce n'était pas un fou rire mais cela leur fit du bien à toutes les deux. Il est vrai que la tournure que les choses venaient de prendre était pour le moins ironique.
Je l'aime. Dit-elle en brisant l'omerta, un peu rêveuse. Et je veux ce bébé. J'espère juste qu'on trouvera une solution lui et moi.
Julia ne la perdit pas des yeux, noyée dans le regard verdâtre de sa sœur et touchée par la déclaration que celle-ci venait de faire sur ses propres sentiments. Ses mains vinrent enserrer celles de son aînée.
Je te le souhaite, Lisa. Et j'espère que tu ne te trompes pas.
TBC…
* 45 miles correspondent grosso modo à 72km
- Le lieu de résidence de Julia n'est pas une adresse bidon. Je sais pas, je la vois bien vivre dans un tel quartier, dans une maison comme celle-ci.
- Le tableau représentant la jeune fille à cheval ne sort pas de mon imagination. Si ça vous intéresse, rendez-vous sur le site Etsy et tapez dans la barre de recherche : lorsque nothing else matters (désolé mais le lien ne voulait pas apparaître..)
…
Voilà, un chapitre de plus posté pour donner vie à cette histoire que j'ai formellement décidé de poursuivre. Je me doute que toute cette attente doit vous frustrer plus qu'autre chose, auquel cas il n'est pas impossible que certains d'entre vous se mettent - volontairement ou non - à délaisser cette fic, si ce n'est pas déjà fait. Est-ce que je peux vous en vouloir ? Non. Je peux tout à fait le comprendre. Et puis si vous n'allez pas jusqu'au bout de cette histoire avec moi, alors peut-être est-ce parce que je n'ai pas su vous captiver suffisamment. Car après tout, les longues fictions comme celles-ci ne sont peut-être pas faites pour moi. Mais dans tous les cas je continuerai d'écrire, jusqu'à ce que je n'ai plus aucune inspiration pour continuer de faire vivre House et Cuddy sous ma plume.
Un grand merci à ceux qui continuent de me suivre. Vous êtes fidèles, et je vous en remercie grandement.
- Kisses to you and see you soon -
