Résumé: Après leur retour de Colibita et devant le recul de Severus, Harry provoque une conversation indispensable: chacun exprime ses attentes et ses inquiétudes, et en particulier que son objectif final reste de pouvoir refaire l'amour avec Severus. S'ensuit une relation charnelle impétueuse au cours de laquelle Harry embrasse son vampire à bouche perdue. Severus, un peu déboussolé, rejoint Lucius pour évacuer son désir et lui confie ses craintes de perdre le contrôle de lui-même dans un moment d'égarement avec Harry.
Bonne lecture!
.
.
Malgré – ou peut-être grâce à – toutes ces confessions de part et d'autre, les jours qui suivirent furent bien plus légers et tranquilles, et Lucius, bien qu'il fût débordé de travail en raison de l'inauguration imminente de la nouvelle aile de son musée, prenait plaisir à vivre dans ce calme. La menace de Vladimir rôdait peut-être quelque part, à l'extérieur, mais au sein du Manoir régnait plutôt une harmonie chaleureuse qu'il savourait de tout son cœur.
Et puis, non sans un profond amusement mêlé de tendresse, Lucius observait Severus et Harry évoluer l'un autour de l'autre et c'était un vrai régal à contempler.
Harry semblait avoir compris qu'il ne servait à rien de pousser son vampire dans ses retranchements, ni de brûler les étapes pour se rapprocher de lui. Faute d'y assister, Lucius ne savait pas comment se déroulaient les morsures depuis la « grande discussion » entre le vampire et son calice, mais il aurait parié une de ses nouvelles acquisitions pour le musée, qu'elles étaient plutôt calmes et bien moins « sexuelles » que ce qu'avait pu lui décrire Severus.
En revanche, Harry excellait dans le rapprochement subtil et les petits gestes du quotidien. Une façon de s'adresser à son vampire, de lui sourire, de le regarder… Une main qui caresse plus qu'elle n'effleure l'épaule en passant près de lui; se coller contre lui dans le canapé de la salle de cinéma; l'inviter à venir jeter un œil sur ses potions et à donner son avis… Il lui proposait une partie de billard, ou bien de venir se coucher avec eux le soir, juste pour le plaisir de se câliner ensemble… Il l'embrassait à son tour – sur la joue, mais il l'embrassait tout de même – quand Aria faisait un bisou au vampire avant de repartir chez ses mères ou avant d'aller se coucher… Il allait même jusqu'à proposer à Severus de l'accompagner à ses entraînements de quidditch plutôt que de se cacher pour surveiller ses arrières…
C'était mignon, tendre et délicat, et une fois ou deux, Lucius eut même l'impression que Severus rougissait légèrement devant ces mots ou ces attentions. Harry avait cette manière simple et évidente de toujours mettre son vampire au cœur de sa vie qui démontrait mieux que tout son attachement.
.
Severus, lui, une fois qu'il eût vidé son sac, parut libéré de ses inquiétudes. Lucius avait pu entendre le fond de ses angoisses et sa peur d'être à nouveau violent avec son calice, ou même de le blesser, et le simple fait d'avoir pu exprimer sa détresse semblait l'avoir apaisé. Severus savait quelles étaient ses craintes fondamentales, il savait ce qu'il cherchait à fuir et pourquoi, et cela lui permettait d'envisager le reste plus sereinement.
À partir du moment où Harry avait affirmé l'aboutissement vers lequel ils tendaient, à partir du moment où cette aspiration avait été posée entre eux par des mots, clairs et sans faux-fuyants, les gestes de son calice n'étaient plus vus comme une menace, comme un risque de dérapage, mais davantage comme un pas de plus sur ce chemin qu'ils parcouraient ensemble. Une étreinte ou une caresse, même un baiser sur la joue, restaient anodins par rapport à ce « faire l'amour ensemble, comme avant » qui se situait tout au bout du chemin, et Severus réapprenait à savourer toutes ces petites attentions du quotidien qui le menaçaient bien moins qu'une « pénétration » à laquelle aspirait son calice.
Bien sûr, la perspective finale de lui faire l'amour l'effrayait encore, mais elle paraissait lointaine, presque floue, et elle prenait lentement la couleur d'un idéal, d'un vœu pieux et non pas d'un danger. Harry le laissait s'habituer à l'idée, il était moins pressant, il en plaisantait ouvertement pour le taquiner, et ce rêve, interdit depuis des mois, apparaissait de plus en plus comme un fantasme sulfureux qui se concrétiserait un jour.
Les morsures, elles aussi, s'étaient apaisées. Comme il l'avait promis, Severus ne fuyait plus, ni ne se servait de la présence de Lucius pour faire jouer le tabou et calmer les ardeurs de Harry. Il était là chaque soir, jour après jour, pour prendre sa ration de plaisir et de parfum de son calice, pour savourer sa confiance et son abandon entre ses bras. Et Harry avait lui aussi calmé le jeu : il ne les déshabillait plus à l'aide de sa magie, ils ne finissaient plus allongés sur un lit ou l'un sur l'autre… mais il était d'une tendresse désarmante et ses « Bonne nuit » quand il montait se coucher après la morsure s'étaient transformés en baisers si émouvants qu'il en repartait parfois les larmes aux yeux.
Et dans ces moments-là, Severus se prenait à regretter de ne pas pouvoir – ou vouloir – l'accompagner dans le lit conjugal.
.
oooooo
.
– Et si je mets cette chemise avec ce pantalon ? suggéra Harry en portant les deux cintres, l'un à hauteur de son torse et l'autre de ses hanches.
Devant le miroir en pied du dressing, l'ensemble lui plaisait bien mais il grimaça en songeant que cela paraîtrait peut-être un peu trop simple à côté de la tenue de Lucius. Et à présent qu'il était son mari, et compte tenu du nombre de photos sur lesquelles il allait apparaître, il se devait d'être à la hauteur de la prestance légendaire des Malfoy.
– Ou avec ce pantalon et une veste un peu cintrée… ?
Dans la salle de bains attenante, Harry entendit Lucius soupirer et il aurait mis sa main au feu qu'il venait de lever les yeux au ciel.
Avec la même précision méthodique et implacable qu'il appliquait autrefois à ses dossiers ministériels, Lucius achevait de se préparer et, bien qu'il soit arrivé après lui, Harry gageait qu'il serait prêt à partir avant lui. Peut-être aussi qu'il n'y mettait pas beaucoup du sien. Ce n'était pas que cette soirée d'inauguration l'ennuyait, pas du tout… Il était toujours avide de partager les passions de son mari et de découvrir ce qu'il aimait, mais tout ce côté officiel… toutes ces personnalités à saluer, ces photographes, ces ronds-de-jambe aux ronds-de-cuir du Ministère et à l'aristocratie sorcière, ces politesses abrutissantes… tout ça lui tapait sur les nerfs.
Il ne rêvait que d'une visite en petit comité, avec Severus, et Mark et Håkon, comme quand ils allaient à Paris, ou bien juste tous les trois, discrètement, après la fermeture des musées comme cela leur était déjà arrivé à Orsay. Un moment intime, savoureux, où Lucius pouvait patiemment lui expliquer les choix du peintre, les courants artistiques et tous les petits détails qu'il ne voyait jamais…
Là, il devait endurer l'inauguration en grandes pompes suivie d'une visite en cortège et d'une réception mondaine jusqu'à point d'heure. Et impossible de s'échapper en douce avant la fin, même en prétextant devoir nourrir Severus. Quelque chose lui disait que Lucius n'admettrait jamais cet argument-là et c'était bien dommage.
Harry soupira devant le miroir, indécis quant au choix de sa tenue. Au moins, il était déjà lavé, ce qui n'était pas si mal. Et vaguement coiffé. Il ne lui restait plus qu'à trouver une tenue un peu plus appropriée pour cette soirée qu'un boxer vert émeraude assorti de chaussettes noires.
– Oh, bon sang ! marmonna Lucius en faisait irruption dans le dressing. On doit partir dans cinq minutes ! Tu comptes y aller comme ça ?!
Avec un sourire contrit, Harry agita légèrement le pantalon et la chemise qu'il tenait encore contre lui pour bien montrer qu'il en était tout de même au stade de l'habillage, malgré son indécision.
Lucius jeta un œil aux vêtements qu'il avait sortis, lui prit les deux cintres des mains pour les reposer au hasard dans la penderie et sans aucune hésitation, il attrapa une chemise et un costume sorcier qu'il lui colla entre les mains.
– Mets ça. Et dépêche-toi !
Harry gloussa devant l'impatience de son mari et s'empressa de défaire les boutons de la chemise pour l'enfiler. De mémoire, il avait porté ce costume lors du mariage de Mandy et Francis Dorléans, deux ans plus tôt, et il se souvenait que Lucius adorait ce tissu gris anthracite légèrement moiré et la coupe de la veste plutôt flatteuse pour sa silhouette.
Il s'habilla rapidement tandis que Lucius patientait à l'entrée du dressing, comme s'il lui barrait la route pour éviter qu'il ne s'échappe. Évidemment, l'aristocrate était déjà fin prêt, impeccable de la tête aux pieds, le moindre cheveu lissé et rentré dans une natte parfaite, retenue par un ruban de soie noire tout aussi parfaitement noué, sans un seul faux pli sur sa tenue, jusqu'aux chaussures d'une propreté irréprochable et cirées à la perfection.
Le sourire aux lèvres, Harry s'admira une seconde dans le miroir et apprécia en silence la façon dont les couleurs de leurs costumes se répondaient : gris anthracite pour lui et gris clair pour Lucius, assorti à ses yeux d'orage… Ils étaient magnifiques.
– Et Severus ? fit-il en songeant à son vampire qu'il n'avait pas vu depuis au moins deux heures.
– Il était déjà prêt quand je suis rentré.
Lucius ouvrit quelques tiroirs sur la gauche du dressing et en tira un carré de tissu rouge bordeaux qu'il glissa harmonieusement dans la pochette de la veste.
– Tu es sûr que ça va avec le costume ?
– Tout à fait. Et ça ira parfaitement bien avec la couleur des lèvres de Severus !
Surpris, Harry éclata de rire avant d'enlacer son mari et de l'embrasser voluptueusement.
– Ne me décoiffe pas ! gronda Lucius. Vous me rendez chèvre tous les deux. À vous tourner autour sans qu'il ne se passe rien, moi ça me donne envie de vous sauter dessus sans attendre. Ou de te coller dans l'antichambre !
– C'est pour ça que tu grognes depuis ce matin ? gloussa Harry. Moi qui croyais que c'était le stress de l'inauguration… Ce soir, si tu es sage, tu auras le droit de me sauter dessus.
– À l'heure où on va rentrer ?! marmonna Lucius en le guidant vers la porte de la chambre d'une main dans le dos. Tu auras juste envie de nourrir Severus et d'aller te coucher !
Harry s'arrêta brusquement et repoussa doucement son mari pour le coller contre le mur.
– En fait, tu es jaloux, sourit-il en mordillant le lobe de son oreille. Parce que tu voudrais me mordre toi aussi, ou parce que tu voudrais qu'il te morde… ?
Lucius l'écarta sans ménagement d'un geste du bras.
– Ne dis pas n'importe quoi, bougonna-t-il en secouant la tête. C'est juste cette ambiance de luxure non consommée qui me tape sur le système. Couchez ensemble, bon sang, qu'on en finisse !
.
oooooo
.
Ce devait être le stress, malgré tout, qui avait tant fait grogner Lucius un peu plus tôt car à présent qu'il était dans le feu de l'action, un large sourire illuminait son visage. Il avait gardé cet air toujours hautain et suffisant qu'il arborait en public – peut-être un peu plus que d'habitude, d'ailleurs, puisque aujourd'hui il était le centre de l'attention –, mais si on le connaissait bien, on pouvait sentir que sa joie et sa satisfaction étaient sincères et non pas feintes pour les circonstances.
Après une dernière entrevue rapide et fébrile avec le directeur technique du musée et James Lincoln, le directeur de la fondation Malfoy; après être sûr que toutes les installations des œuvres étaient bien parfaites, que les éclairages étaient réglés au millimètre et que tout était en ordre; Blaise était allé arracher Lucius à ces considérations matérielles pour procéder à l'inauguration proprement dite.
Devant un parterre d'invités renommés, sous les applaudissements et les flashs des photographes, Lucius avait coupé d'un sortilège élégant le fameux ruban rouge qui barrait l'accès à la nouvelle aile du musée. Le cortège de personnalités s'était alors mis en branle à la suite de l'aristocrate pour admirer les nouvelles œuvres exposées.
Parmi tout ce beau monde qui errait à présent dans les galeries, Harry ne connaissait presque personne. Il avait bien évidemment serré bon nombre de mains, eut un sourire aimable pour chacun et quelques mots de politesse pour ceux qui lui avaient été présentés; il avait reconnu le Ministre, certaines personnes qu'on lui avait désignées comme des artistes de renom ou bien quelques têtes connues de l'aristocratie sorcière qu'il avait côtoyées à d'autres occasions, et en premier lieu à son mariage, les Parkinson, les Nott ou la fameuse Lady Selwyn qui, on ne savait comment, avait déjà une coupe de champagne à la main, mais toute cette parade élégante et un peu prétentieuse ne lui inspirait pas grand-chose.
Heureusement, il y avait toujours le clan Malfoy : Draco et Daphnée, bien sûr, venus sans leurs enfants, mais aussi Matthieu et Charlie, en qualité de gendre et « beau-gendre » de Lucius. Et puis Blaise… accaparé par le groupe principal en tant que bras droit de l'aristocrate pour cette occasion. De fait, il était connu que le marchand d'art avait négocié pour le compte de Lucius bon nombre de ces nouvelles œuvres et il semblait en tirer un agréable moment de gloire.
En souriant devant l'élégance désinvolte et le verbe parfois trop libre de Blaise, Harry tourna la tête à la recherche du dernier des Malfoy : son vampire. Drapé dans sa cape noire, Severus se trouvait un peu plus loin, discutant avec deux autres personnes, le visage étrangement éclairé par la lumière bleue et or d'un tableau de Van Gogh qui faisait ressortir le contraste de ses lèvres carmins sur sa peau pâle. Après un coup d'œil amusé à la pochette bordeaux de son propre costume et en songeant que Lucius avait eu diablement raison, Harry reconnut Sebastiaan, qui ricanait bassement avec son vampire et qu'il avait salué un peu plus tôt, et de façon plus surprenante, d'Alagnac, qui lui n'était pas venu le saluer, sans doute pour éviter les conflits… De ce trio particulier émanait une aura veloutée de puissance et de danger qui le fit frissonner mais qui lui donna diablement envie de s'approcher. La main de Lucius dans son dos, cependant, l'incita à faire quelques pas pour s'éloigner vers l'œuvre suivante.
.
.
À présent que les invités se concentraient davantage sur les petits fours, le champagne et les conversations mondaines, Harry se sentait un peu plus libre de ses faits et gestes. Même Lucius avait troqué la suffisance habituelle de son personnage de représentation pour une attitude plus simple et plus sincère avec les quelques personnalités qui lui étaient proches et surtout avec eux. Quelques instants plus tôt, Harry l'avait même entendu rire à un mot de Severus et ce n'était pas chose fréquente en dehors du cercle intime de leur famille élargie.
Après avoir refusé une coupe de champagne que lui proposait un serveur, il s'approcha du petit groupe composé de ses deux « conjoints », de Blaise et de Sebastiaan. D'Alagnac avait disparu depuis un moment sans que Harry ne l'ait vu partir, et quelque part, cette absence le soulageait. Il ne voulait pas de la moindre aspérité qui puisse se mettre entre lui et son vampire.
Les quatre hommes devant lui déambulaient tranquillement dans la galerie, chacun magnifique et plein de prestance à sa manière. Blaise avec sa peau noire et veloutée et son costume vert sombre, Lucius avec ses cheveux d'or et son élégance lumineuse… Même Sebastiaan, d'un physique plus quelconque et avec son léger embonpoint, semblait ce soir d'une distinction toute aristocratique. Et puis Severus…
Severus drapé de noir et dont le visage pâle ressortait comme une lune sur un ciel d'encre, dont le charme soyeux glissait sur tous les convives dans le but de s'assurer une tranquillité solitaire, et dont la beauté semblait plus profonde et plus ténébreuse que jamais. Severus qui était le seul à ne pas avoir une coupe de champagne à la main, et rien qu'à la pensée de ce que buvait son vampire, Harry sentit de longs fourmillements parcourir son ventre. Mais ce soir, il s'était « promis » à Lucius et la morsure ne serait que rapide.
Les quatre hommes s'arrêtèrent devant une série de grandes affiches encadrées, des dessins de femmes toutes en courbes, en vêtements fluides et en ornements floraux qui représentaient de toute évidence les quatre saisons. (1)
– Tu avais le Printemps depuis des années, je crois, expliquait Blaise tandis que Harry les rejoignait enfin. J'ai obtenu l'Automne et l'Hiver sur un coup de chance et le plus dur a été de racheter l'Été au collectionneur qui le possédait pour compléter la série. Ça a été des mois de bataille et de dîners au restaurant pour le convaincre !
– Je n'imagine même pas la fortune que tu as dépensée pour les obtenir, ricana Severus à l'adresse de son mari.
– Oh, pas tant que ça, minimisa Lucius avant d'ironiser. En tout cas, bien moins que le Van Gogh qui se trouve là-bas… Mais j'ai dû revendre le Monet de l'ancienne chambre de Harry.
– Quoi ?! s'écria-t-il. Mais. Pourquoi tu as fait ça ?! J'y tenais moi à ce tableau !
Devant son presque cri de surprise et d'indignation, de nombreux visages s'étaient tournés vers lui, et en particulier ceux de ses « conjoints », ornés de sourires narquois.
– Je croyais que tu ne l'aimais pas, ricana discrètement Lucius. Tu l'as même traité de « vieille croûte », un jour…
Sans aucune discrétion, Blaise se mit à rire au souvenir de ce quiproquo pendant lequel Harry avait avoué qu'il avait failli se débarrasser du tableau de maître pour refaire la décoration de sa chambre.
– Mais j'y tenais quand même ! murmura Harry d'un ton empressé auprès de son mari. Il représentait… beaucoup de choses. Mon arrivée au Manoir, et… nos débuts…
Sa voix s'était perdue dans un chuchotement ému, un peu triste, mais rapidement, Lucius glissa un bras autour de sa taille pour l'attirer vers lui et l'embrasser sur la tempe .
– Mais non, je ne l'ai pas vendu ! Je ne me séparerais pas d'un Monet pour un Mucha !
Puis, plus doucement, il sourit en murmurant à son oreille :
– Tes souvenirs sont à leur place, Trésor…
Est-ce que c'était le soulagement de cette nouvelle, ou bien l'attitude de son mari, le petit nom tendre, la reconnaissance implicite que ce tableau avait de l'importance pour lui, pour eux, dans leur histoire… mais Harry fut touché et presque ému par ce baiser et ces paroles, ce qui n'échappa pas au regard sombre et chaud de son vampire.
– Espèce de Poufsouffle, ricana-t-il doucement.
En tournant la tête, Harry plongea dans ce regard suave et beaucoup trop envoûtant pour son propre bien. D'un simple clin d'œil et d'un sourire, Severus était capable de drainer son émotion pour l'emmener vers une espèce de densité obscure, voluptueuse et onirique.
– Suceur de sang ! grimaça Harry devant l'ironie de son vampire.
Contre toute attente, Severus éclata allègrement de rire.
– Qui s'en plaint ? ronronna-t-il en le fixant de son regard rougeoyant.
.
.
D'un geste brusque, Harry attrapa le poignet de son vampire et l'attira à sa suite à l'angle d'un couloir. Juste là où il avait repéré un peu plus tôt une porte de service qu'il déverrouilla d'une volute de magie. Il jeta un dernier regard aux alentours : Lucius était en grande conversation avec Daphnée devant le Van Gogh et Blaise et Draco plaisantaient ensemble un peu plus loin. Personne ne les observait.
Il poussa Severus dans le couloir sombre qui s'éloignait sous leurs yeux et referma la porte derrière eux. Avec un sortilège pour parer à toute éventualité.
– Harry ? Qu'est-ce qui te prend ?!
Il grogna pour toute réponse. Au moins une heure qu'il y songeait, depuis ce regard de braise de son vampire, avec cette idée qui tournait en boucle dans sa tête et dans le creux de son ventre comme une obsession. Une heure à sourire pour maintenir les apparences, pour préserver les faux-semblants, tout en passant et repassant devant cette porte close et interdite qui prenait lentement des allures de saint des saints. Une heure à résister à l'attrait sulfureux de l'aura de son vampire qui serpentait autour de sa silhouette sombre pour se garantir une paix royale, mais qui l'attirait lui comme un papillon de nuit vers l'éclat d'une lumière.
– Harry ?!
En soupirant, il colla son vampire contre la cloison fragile qui remua légèrement sous le choc de leurs deux corps plaqués l'un contre l'autre. Son torse contre le torse de Severus, son front brûlant contre son front glacé, leurs respirations qui les soulevaient pour les écarter à peine avant de les laisser se rejoindre dans un souffle de soulagement.
– Tu le sais, n'est-ce pas, que ton aura a toujours un certain effet sur moi… ? Je ne peux pas croire que tu ne l'aies pas fait exprès.
Dans les réceptions mondaines et dès qu'il y avait un peu de public, Severus libérait toujours un peu son aura, mais jamais à ce point. Jamais en le laissant aussi vibrant, jamais en lui retournant les sens de cette façon, jamais en le transformant en une sorte de chose pantelante qui se liquéfiait de désir.
Harry ferma les yeux pour se contenir. Est-ce qu'il était tellement en manque de sexe ? Ou même de morsure ? Ses mains s'immiscèrent entre eux, se faufilant sous la veste de son vampire pour aller se poser sur son torse, pour toucher ses épaules, ses pectoraux, pour glisser le long de ses côtes, pour ramper sur sa taille.
– J'oublie toujours que tu es le plus réceptif de tous, murmura Severus dont les bras l'avaient doucement étreint sans pour autant faire preuve d'ambiguïté. Mais quoi que tu veuilles, ou dont tu aies envie, on ne fera rien ici.
Rien, non, parce qu'il n'était pas question de gâcher le retour du désir de la chair entre eux par des endroits sordides, des gestes maladroits ou l'urgence d'être découverts. Rien qui ne puisse salir ce qui un jour serait précieux, inestimable et presque sacré.
En attendant, il se contenterait de rêver en lisant les livres que lui avait prêtés Mihai sur les relations entre calices et vampires, et d'attendre que Severus soit prêt à le toucher.
– Tu peux au moins me mordre, soupira Harry.
Juste un quickie derrière une porte close… En réalité, il avait au moins autant envie d'un baiser que d'une morsure, mais la morsure représentait leur lien de façon plus aiguë.
Et quand Severus le mordit avec une lenteur exquise, Harry l'étreignit en se cramponnant à sa veste avec une force telle qu'elle garderait certainement l'empreinte déformée de ses doigts.
.
.
En levant légèrement son verre, Harry salua Blaise qui venait vers lui pour cette petite conversation en tête-à-tête qu'ils n'avaient pas encore eu le temps d'avoir. Il lui offrit un large sourire sincère et ils s'avancèrent de quelques pas pour s'éloigner des oreilles trop proches. Le cocktail d'après l'inauguration touchait à sa fin mais les invités s'attardaient tant qu'il y avait encore quelques bouteilles de champagne à vider.
– Alors, satisfait ? l'interrogea Harry en trinquant de son jus de fruit contre le cosmopolitan de Blaise. L'exposition est un succès, tout le monde ne jure plus que par ton expertise dans le milieu de l'art moldu et même le Ministre t'a proposé de gérer les collections du Ministère…
– Et tu ne sais pas le meilleur ! gloussa Blaise avec un sourire plein de fierté. Quelqu'un ici m'a proposé de racheter un Dalí pour une somme relativement ridicule. Ces sorciers qui ne connaissent pas la valeur des tableaux qu'ils possèdent… Mais Lucius, lui, est excité comme une puce !
Harry se permit de rire discrètement tant l'image publique de son mari s'accordait mal avec cette expression, mais il imaginait bien à quel point il devait être enthousiaste et impatient à la fois.
– Et toi, comment tu vas ? fit-il une fois redevenu sérieux. J'imagine que toute cette période avant l'inauguration a été intense et épuisante…
– Certes, acquiesça Blaise avec un geste désinvolte. Mais c'est un challenge tellement excitant ! L'inauguration côté moldu a lieu le week-end prochain et après je souffle jusqu'aux fêtes de Noël et même jusqu'à l'année prochaine.
– Tu l'auras bien mérité… Alicia n'a pas voulu t'accompagner, ce soir, ou bien elle travaillait ?
Blaise gloussa brusquement avec un sourire entendu.
– Elle ne travaillait pas mais tu sais bien que toutes ces mondanités, ce n'est pas son truc. Elle est sortie danser je ne sais où… Et elle rentrera je ne sais quand !
– Ça va toujours bien entre vous ? fit Harry avec une pointe d'inquiétude.
– Oui, très bien, sourit Blaise avec un signe obligeant de la tête. Merci de t'inquiéter pour nous…
– Oh, ça va ! gloussa Harry, vaguement embarrassé.
Le fonctionnement du couple entre Blaise et Alicia lui semblait toujours un peu incompréhensible, entre une grande complicité privée et une liberté publique absolue, mais surtout ils se vouaient une confiance inconditionnelle qui forçait l'admiration.
– Et toi, comment tu vas ? lui demanda Blaise avec un sourire en coin. Tu as l'air parfaitement heureux, et tout le monde a remarqué le petit baiser de Lucius tout à l'heure…
– Je suis parfaitement heureux, confirma Harry.
– … sans compter ce petit moment où tu as disparu avec Severus derrière une porte close.
Un grand frisson d'adrénaline parcourut Harry des pieds à la tête, accélérant brusquement son cœur, tandis que son regard fouillait le sourire complice de Blaise. Tant pis, le mal était fait. Mais il laissa malgré tout échapper une grimace désappointée.
– Et tout le monde l'a remarqué aussi ?
– Non. Vous avez été plutôt discrets… En réalité, je vous ai seulement vus sortir, chacun votre tour… et Severus avait l'air de s'être remis une couche de rouge à lèvres.
Harry serra les dents pour s'empêcher de réagir mais il ne put sans doute pas s'abstenir d'un sourire retenu qui fit sourire Blaise un peu plus largement.
– Je suis parfaitement heureux, répéta-t-il pour effacer son trouble.
– Ça se voit, affirma Blaise. Et c'est un vrai bonheur de vous voir comme ça… Quand Severus est revenu de Roumanie, cet été, tout le monde a été… effaré de votre relation. Alors qu'aujourd'hui, vous avez l'air plus proches que jamais.
Harry grimaça à nouveau, parce que le mot effaré faisait mal, et parce qu'il mesurait aujourd'hui à quel point tout cela avait inquiété l'ensemble de leur cercle familial. Mais ce qui comptait vraiment était ce qu'ils étaient devenus : plus proches que jamais. Et la justesse des mots de Blaise le percuta de plein fouet.
.
.
Quand ils rentrèrent au Manoir, une petite demi-heure plus tard, Severus sur leurs talons, Harry sentit poindre la difficile séparation d'avec son vampire. Il accrocha machinalement sa veste sur un cintre tandis que Lucius se débarrassait de son manteau et de ses chaussures mais ses pensées étaient déjà ailleurs, dans les compromissions et les regrets.
Dans un idéal rêvé et fantasmé, il aurait voulu que Severus vienne se coucher avec eux, prolonger cette soirée tous les trois et ne pas l'interrompre abruptement par une séparation pour la nuit, mais il s'était plus ou moins engagé auprès de Lucius à se donner à lui ce soir… Et il avait grand besoin de s'envoyer en l'air pour éponger sa frustration.
Mais Harry ne voulait pas du simple regard de Severus sur eux dans ces moments-là, et il n'était pas encore assez avancé dans sa relation avec son vampire pour l'inviter à partager ce moment avec eux.
Severus ne faisait pas tant de manières, et il avait sans doute compris son intention depuis longtemps, peut-être même depuis la morsure au musée derrière une porte close, car les mots qu'il adressait à son mari sonnaient comme une conclusion sur cette journée particulière.
Enfin, quand ils se furent embrassés pour se souhaiter bonne nuit, Harry s'approcha de son vampire, tout prêt de son corps immense, et accrocha d'une main le revers de sa veste.
– Je monte avec Luce, avoua-t-il comme s'il se justifiait de son comportement par un semblant d'excuse.
Avec un regard doux et serein, Severus se contenta de sourire de ses lèvres carmins qui le fascinaient tellement. Tellement que Harry se redressa pour venir poser ses lèvres sur les siennes et l'embrasser doucement.
– Bonne nuit…
.
.
À peine la porte de la chambre refermée derrière eux, Lucius lança un sortilège d'insonorisation puis jeta sa baguette sur le lit. Il se débarrassa prestement de la veste de son costume puis entreprit de défaire les boutons de sa chemise qui échoua bientôt sur un fauteuil. Il était déjà torse nu et en chaussettes sur le tapis moelleux que Harry se tenait encore dans l'entrée de la chambre, troublé, indécis sur ses gestes, et passait une main incertaine dans ses cheveux.
– Et alors ? Qu'est-ce que c'était que ce petit baiser ? gloussa Lucius en tournant vers lui un sourire amusé et presque réjoui.
– Mmhh, grogna Harry. Severus a bien dû te dire ce qui s'est passé entre nous à Colibita et dans la chambre d'hôtel…
En quelques pas furtifs, Lucius fut dans son dos, les bras autour de son torse, et ses mains faisaient lentement glisser sa veste le long de ses épaules avant de défaire un à un les boutons de sa chemise.
– Oui, il m'en a parlé…, avoua l'aristocrate avec son souffle dans son cou. Mais il n'est pas rentré dans les détails…
Harry ne savait pas vraiment s'il devait en être soulagé ou bien regretter que Lucius ne soit pas davantage au courant pour pouvoir en parler avec lui.
Avec beaucoup de douceur, les mains de son mari parcouraient son torse et son ventre en de longues caresses, chaudes, brûlantes, si vivantes par rapport à la peau glacée de son vampire. Puis, très lentement, Lucius le retourna pour lui faire face et le poussa à s'adosser contre le mur.
– En revanche, je n'ai pas bien compris…
Contre le torse de Harry battait le cœur de son mari, ses cheveux longs chatouillaient sa peau, sa chaleur irradiait comme un incendie de désir.
– … si c'était de simples petits baisers…
Lucius appuya ses lèvres contre les siennes à peine une seconde.
– … ou bien de vrais baisers, comme ça…
Les lèvres de Lucius se firent plus joueuses, dansant avec les siennes, s'attrapant et se relâchant tandis qu'il souriait de plus en plus.
– … ou bien comme ça…
Cette fois, une langue espiègle franchit ses lèvres ouvertes pour venir caresser la sienne et Harry ferma les yeux en gémissant dans le baiser. Il ne savait plus qui il avait envie d'embrasser mais il rêvait en tout cas que ce baiser et ces caresses sur son corps débouchent sur quelque chose de plus… approfondi.
– Tout ça à la fois, marmonna-t-il en ceinturant la taille de Lucius pour coller leur bassin l'un contre l'autre. Bon sang, amène-toi. Et baise-moi comme tu aurais envie de le baiser.
.
ooOOoo
.
Les jours qui suivirent s'écoulèrent plus calmement au Manoir. Maintenant que l'inauguration principale était passée, Lucius était enjoué, presque effervescent, et la perspective d'obtenir le Dalí négocié par Blaise l'excitait comme un enfant devant un sapin de Noël. Cette aubaine inespérée et le fait que l'accueil de sa collection – et la réception mondaine – se soient très bien passés le laissaient de très bonne humeur et totalement satisfait.
Severus, lui, grogna en découvrant les journaux du lendemain. Lucius bien évidemment, Blaise, mais aussi Harry et lui y étaient abondamment mentionnés. Les journalistes parlaient de cette sortie à trois relativement rare, de leur élégance, de l'originalité de leur couple, on rappelait leur histoire, la démission de Lucius, sa propre transformation en vampire et le récent mariage de Harry et de l'aristocrate…
Mais ce qui chiffonnait surtout Severus, c'était tous les petits détails sur leur évidente complicité mentionnés dans les articles : les sourires pleins de connivence et les échanges à voix basse pour se protéger des oreilles indiscrètes, le baiser de Lucius sur la tempe de Harry en l'attrapant par la taille, les rires que l'on ressentait même sur les photos, et surtout l'une d'entre elles qui le montrait face à face avec son calice, et ce regard qu'ils échangeaient, éblouissant de sentiments et presque de ferveur.
Comme après le mariage, ces photos démontraient à quel point ils s'entendaient à merveille et à quel point tous les tourments de sa transformation étaient derrière eux. Même pour les apparences, même en s'efforçant de faire semblant, on ne pouvait pas feindre un regard comme celui-là et tous les sentiments qu'il dévoilait à leur insu… Et pour lui qui rêvait plutôt de discrétion pour ne pas raviver les humeurs sadiques et manipulatrices de Vladimir, ces photos, aussi extraordinaires de beauté soient-elles, étaient un pur échec.
Harry dut le comprendre car, comme il l'avait promis, il accepta sans rechigner le portoloin d'urgence que Severus lui confia.
.
.
Il l'accepta peut-être aussi parce que, bien qu'il ne l'ait pas prévu comme ça, ce moment fut extrêmement symbolique. Un peu désuet et ridicule aussi, il faut bien le dire, mais dans l'esprit de son calice, ce fut l'émotion qui prima tout le reste.
Ils se tenaient dans la Bibliothèque ce soir-là, Harry assis dans le canapé comme il l'en avait prié et Severus vint s'asseoir à côté de lui, assez près pour que leurs genoux soient sur le point de s'effleurer. Harry était intrigué par ce préambule qui ne ressemblait pas à une morsure, mais plutôt à une conversation sérieuse que rien n'était venu annoncer de prime abord.
– Tu te souviens, commença Severus, que je t'avais parlé de portoloin d'urgence, en cas de problème…
Harry hocha simplement la tête, le visage neutre et dénué de toute expression. Mais lorsque Severus sortit le petit écrin de velours noir de sa poche, il vit nettement le coin des lèvres de son calice se relever. Fichus gobelins qui n'avaient rien trouvé de mieux qu'une boîte à bijoux pour contenir un bijou !
Il n'avait pas eu l'intention que ça ressemble à quelque chose comme offrir une alliance, ou pire, à une demande en mariage, mais entre leurs positions côte à côte, le moment un peu solennel et la bague en or blanc qui luisait doucement dans son écrin, l'analogie était flagrante. Il ne lui restait plus qu'à mettre un genou à terre pour que le sourire de son calice ne devienne encore plus malicieux.
– C'est donc un portoloin ? fit Harry d'une voix amusée avec l'intention visible de couper court à l'émotion ou au malaise qui aurait pu naître.
Severus grommela son acquiescement avant d'expliquer :
– Je voulais un objet qui soit discret et que tu puisses porter en permanence sans éveiller les soupçons. Il suffira de l'effleurer volontairement avec ta magie pour qu'il se déclenche…
Harry hocha la tête puis regarda ses mains qui portaient déjà deux alliances : celle de son union avec Severus sur l'annulaire toujours un peu tordu de sa main gauche, et celle de son mariage avec Lucius à son annulaire droit. Il avait fini par retirer sa bague de fiançailles pour ne pas avoir l'air d'une vieille précieuse avec des bagues à tous les doigts, mais pour la tranquillité d'esprit de tout le monde, il voulait bien faire un effort. Restait à savoir à quel doigt elle lui irait le mieux…
Doucement, précieusement, il prit la bague dans son écrin et l'approcha de son majeur gauche, avant d'être interrompu par son vampire.
– Non. Tu vas retirer celle-ci, fit-il en désignant l'alliance en argent qui datait de leur cérémonie d'union. Et tu vas mettre le portoloin à la place. Elles sont presque identiques, les gens n'y verront aucune différence.
Harry se mordit la lèvre, contrarié de devoir retirer ce symbole auquel il tenait profondément. Depuis presque un an, cette alliance faisait partie de sa vie, partie de lui, et même si une autre bague devait remplacer sa place vacante, ce n'était pas pareil. Lui, il voyait la différence; même si le bijou était tout aussi beau, il savait la différence de symbole, la différence d'intention… et cela le dérangeait. Il retira pourtant son alliance en argent, la posa sur la table basse à côté de l'écrin, et puis, pris d'une impulsion soudaine, il tendit sa main vierge vers son vampire.
– Si je dois l'enlever… alors, c'est toi qui dois me mettre la nouvelle, osa-t-il avec un sourire délicieux.
Severus eut un temps d'arrêt, bien conscient de l'enjeu symbolique, et il fut parcouru d'un long frisson à la fois glacé et voluptueux. Du bout des doigts, il prit cette nouvelle alliance façonnée par la magie des gobelins, il prit la main de Harry dans le creux de sa main et, comme devant un autel, comme devant un mage de cérémonie, il la glissa lentement le long de son doigt fragile.
Le silence était assourdissant, il lui semblait même que son calice retenait son souffle, mais les battements de son cœur, en revanche, étaient aussi affolés et étourdissants qu'une cavalcade de chevaux. La chaleur de sa main rayonnait dans la sienne, sa peau était souple, sa paume presque moite de l'émotion de ce moment, et Harry souriait, d'un sourire discret et formidable à la fois, le même qu'il avait eu face à Lucius devant le mage de cérémonie, et sa magie irradiait une pure félicité.
Quand la bague fut enfin à son doigt, bijou argenté scintillant sur sa peau dorée, il leva la main devant ses yeux et la contempla quelques instants.
– Elle est en or blanc, expliqua Severus pour meubler ce moment trop étrange. Au moins maintenant, quand tu me toucheras, ça ne me brûlera plus…
Devant ces mots, Harry se souvint brusquement de la marque que son vampire portait toujours à l'annulaire, depuis qu'il avait porté l'alliance quelques jours dans le pavillon chinois, quand il l'avait jetée à ses pieds. Et il comprit avec effarement que depuis ce moment-là, à chaque fois qu'il touchait, qu'il caressait, qu'il masturbait Severus de sa main gauche, l'argent de la bague réagissait à la nature de son vampire et le brûlait farouchement.
– Pourquoi tu ne m'as… ?
Par fierté, sans doute. Par refus de céder à cette humiliation, pour ne pas supplier, pour ne pas paraître amoindri ou affecté par la moindre broutille… Mais le regard de Severus défendait toute insinuation en ce sens.
– Je croyais que tu aimais les plaisirs un peu piquants, glissa Harry avec un sourire licencieux.
Devant cette volte-face de son calice, Severus se mit à sourire à son tour, surpris et amusé.
– Et je constate que tu n'as pas dit non au fait que je continue à te toucher, le taquina Harry.
Avant que la moindre ébauche de réponse ou de sarcasme ne se forme dans son esprit, Severus avait déjà son calice assis sur les genoux, ses bras autour de son cou et l'espace entre eux se réduisait lentement.
– … Mais après la bague au doigt et avant tout le reste, il y a déjà le baiser, non… ?
Et le baiser fut long et langoureux, à la hauteur de ce moment qui n'aurait jamais lieu devant un mage de cérémonie mais qui venait d'exister pour eux seuls.
.
.
(1) Les quatre saisons, Alfons Mucha, 1896.
Merci à tous de votre lecture. J'espère que ce chapitre vous a plu, malgré sa brièveté.
La semaine prochaine, leur relation progresse encore, tout doucement...
Au plaisir
La vieille aux chats
