Projets et sursis
Harry s'agita doucement alors qu'il se réveillait doucement.
-Doucement, seigneur Harry, souffla Dobby en s'approchant de son ami.
Depuis que le brun était devenu pleinement un elfe noir, l'elfe de maison s'était fait assez discret, dans la dimension des elfes comme dans celle des humains. Il avait appris de nombreuses informations et de nouvelles capacités, découvert de nouvelles contrées et surtout, observé son monde qui se transformait.
-Bonjour Dobby, salua Harry en baillant.
-Plutôt bonsoir, sourit Dobby. Comment vous sentez-vous ?
-Comme si le magicobus m'était passé dessus, grimaça Harry. Qu'est-ce qui s'est passé ?
-Maître Ric vous a examiné et il semblerait que la disparition de Voldemort ait eu un impact sur vous, répondit Dobby.
-Comment ça ? fit Harry en fronçant des sourcils
-Même si vous étiez humain au moment où il vous a pris votre sang, ce vol a visiblement eu des répercussions au moment de sa mort, une sorte d'écho, expliqua Dobby. Cela a perturbé votre magie qui vous a plongé dans le sommeil.
-Et maintenant ? demanda Harry
-Elle est plus stable mais cela ne vous empêche pas de prendre un maximum de repos, gronda Dobby.
-Je n'ai même pas la force de protester, capitula Harry en se renfonçant dans son lit.
-Attendez, ne vous rendormez pas tout de suite, vous devez manger un peu, prévint Dobby.
Il installa un nouvel oreiller dans son dos puis l'aider à boire un verre de jus de fruits frais avant de faire venir une assiette avec des aliments faciles à digérer.
-Combien de temps je suis resté inconscient ? demanda Harry entre deux bouchées
-Neuf jours, renseigna Dobby. Cela n'a pas inquiété maître Ric mais maître Laze et dame Kali, si.
-J'ai l'impression que rien ne l'étonne, celui-là, bougonna Harry. Est-ce que tu sais quelque chose sur ce qui s'est passé après la bataille de Godric's Hollow ?
-A part que c'est un véritable chantier maintenant ? ricana une voix
Ric entra dans la chambre.
-Bonjour Dobby, salua Ric.
-Seigneur Ric, s'inclina Dobby.
-Permets-moi de lui donner des nouvelles du monde extérieur, fit Ric.
-Je vous laisse en discuter, fit Dobby avant de s'éclipser.
-Comment te sens-tu ? demanda Ric en s'installant dans le fauteuil proche
-Complètement HS, avoua Harry. Je ne pensais pas que la bataille aurait été aussi dure.
-Elle ne l'était pas, réfuta Ric. Nous avons dû faire face à quelques … complications.
-Ah bon ? s'étonna Harry
-Laisse-moi te raconter, sourit Ric.
Flash-Back
-Personne ne sera plus puissant que lord Voldemort, cracha Voldemort. Abattez-les !
Le chaos se déchaîna.
Harry et Ric grincèrent des dents quand ils entendirent les hurlements des membres de l'Ordre du Phénix s'indigner de ne pas pouvoir se battre et ce, malgré les barrières de protection. Préférant laisser ces imbéciles qui ne savaient même tenir leur baguette du bon côté, ils se concentrèrent sur Voldemort et ses sbires. Ils savaient qu'avec les différentes vagues d'arrestation et de procès menés, la majorité des mangemorts ne pouvait pas le suivre dans sa folie et donc, qu'ils auraient en face d'eux des mercenaires d'un niveau infiniment plus élevé que les pauvres hères qui composaient les rangs de Voldemort.
Mais peu importait puisqu'ils n'allaient pas en ressortir vivants, au mieux.
Même en sachant qu'ils étaient entourés d'alliés, Harry savait qu'il ne devait pas montrer toutes ses capacités. La Senestre, qui était à ses côtés, avait les mêmes restrictions et ne comptait pas se dévoiler. Très vite, le sang se mit à couler, autant du côté de la Senestre et de ses alliés que de celui des « mangemorts ». Personne n'était dupe – c'est-à-dire croyait sur les ordres de Dumbledore que des sorts de stupéfixion suffiraient pour neutraliser des adversaires coriaces – et les sorts utilisés étaient particulièrement sales, à défaut d'autres termes. Membres arrachés, tympans éclatés, fractures multiples … tout était fait pour que l'adversaire ne puisse pas continuer le combat avant un très long moment.
Si la Senestre était éparpillée sur tout le champ de bataille, Harry n'était pas surpris de savoir des membres de la Dextre autour de lui. Severus, Sirius, Tom et Narcissa avaient tenu à participer à la bataille et s'étaient donnés pour mission d'être la garde rapprochée d'Harry. Ils avaient même dû se battre avec les aurors internationaux chargés de cette mission et le jeune homme avait donné sa préférence aux premiers. Le brun savait que les aurors seraient plus efficaces à neutraliser les alliés les plus puissants de Dumbledore qui devait initialement venir mais réduire à néant le premier cercle des mangemorts serait plus dans leurs cordes.
Ne voulant pas laisser les choses traîner, Harry ne tarda pas à se diriger vers Voldemort et la Dextre – moins Lucius, qui était resté en arrière pour protéger les Dragons et leurs alliés – lui emboîta le pas. Ric, Laze et Garrick ne tardèrent pas à les entourer et à empêcher les mercenaires de porter secours à Voldemort. Ce dernier utilisa ses sorts les plus puissants au fur et à mesure qu'il comprenait qu'il n'aurait pas d'aide.
-Un problème, Voldemort ? ricana Harry
-Tu ne perds rien pour attendre, grinça Voldemort. Je suis le plus fort !
-Et pourtant, tu t'es senti menacé quand tu as appris que je comptais augmenter mes forces, sourit Harry. Tu as peur d'un gamin de dix-sept ans, Voldemort ?
-La prophétie … fit Voldemort.
-Est-ce que ça t'a été confirmé par un unspeaker ? coupa Harry après avoir évité un sort en plein visage. C'est pourtant la seule manière de savoir si elle est vraie ou non. Et dans notre cas, elle est fausse de la première à la dernière lettre. Je soupçonne même que ce soit Dumbledore qui l'ait créée.
Voldemort se troubla.
-Impossible ! cracha Voldemort. Dumbledore …
-Tu as pourtant eu des unspeaker sous tes ordres, non ? coupa Harry
-Et ? fit Voldemort
-Visiblement, tu as manqué la leçon sur l'identification des prophéties, ricana l'elfe noir en évitant les attaques. Une prophétie doit répondre à plusieurs critères et la première veut que le ou la voyante voit son pouvoir reconnu. Or, est-ce que tu savais que Sybille Trelawney n'a jamais été reconnue comme voyante ?
-Tu mens ! siffla Voldemort
-Tu ne t'es jamais demandé pourquoi tu n'as jamais réussi à me tuer, même enfant ? pointa Harry. Alors que la prophétie dit que l'un ne peut pas vivre sans l'autre ?
-Je …
Voldemort ne put continuer. Harry avait pu l'approcher d'assez près pour lui planter l'épée de Ric qu'il avait enfoncé dans la gueule du basilic quelques années plus tôt. Imbibé du venin du serpent, la moindre blessure faite avec garantissait inévitablement la mort. En sachant que le brun l'avait planté en plein cœur, son adversaire n'avait aucune chance.
Voldemort tomba à genoux, foudroyé par la surprise. Harry recula d'un pas et d'un coup sec, retira son épée. A la plus grande horreur des spectateurs, avec la lame vint le cœur qu'on croyait inexistant du monstre qui avait terrorisé le pays pendant des années.
Mais cette fois, il ne se releva pas.
Fin Flash-Back
-Tu n'as sûrement pas fait le lien mais mon épée n'a pas été forgée par les gobelins, expliqua Ric. Elle est elfique et se nourrit de la magie de son porteur et des coups qu'elle reçoit.
-Je ne m'en suis pas aperçu, avoua Harry.
-Quand tu as transpercé Voldemort, tu as sûrement insufflé toute ta rage, ta haine et ta frustration dans ce coup fatal, expliqua Ric. Ça a créé une explosion magique que tu as pris de plein fouet.
-Et ceux qui combattaient autour de moi ? s'inquiéta Harry
-Remercie ta magie, sourit Ric. Elle a protégé tes alliés et ils s'en sont sortis avec seulement deux jours de coma. Ils se reposent encore, ils n'ont pas ta condition physique et encore moins la mienne.
-Vantard, souffla Harry.
-Ce n'est que la vérité, s'indigna faussement Ric.
-C'est ça, grogna Harry.
-Bois, au lieu de dire des bêtises, fit Ric.
Le brun obéit et une onde de bien-être l'envahit.
-Est-ce que j'ai envie de savoir ce que tu m'as donné ? souffla Harry
-Pas vraiment, assura Ric. Je vais me contenter de te donner le programme des prochains jours. Laze et Garrick se sont proposés de surveiller les mouvements de Dumbledore. Pendant ce temps, tu vas prendre le temps de guérir et de te reposer.
-Mais … protesta Harry.
-Je te déconseille d'aller à l'encontre de cet ordre, prévint Ric. Ou sinon, je te laisse entre les mains de Kali.
Harry frissonna. La shaman en mode guérisseuse pouvait se montrer pire qu'en mode professeur.
-J'ai également ordre de mon cher et tendre de rester à tes côtés, bougonna Ric. Il m'a fait remarquer que Voldemort était ton premier meurtre volontaire.
Harry écarquilla des yeux. Car oui, Laze avait raison, sur toutes les personnes à qui il a donné la mort, Voldemort était le seul dont il l'avait réellement voulu.
-Laze a aimé la manière dont mon cher descendant Nolan s'est occupé de Fin Arcana quand il a quitté sa famille, expliqua Ric. Il exige que tu aies une … thérapie, ou quelque chose comme ça.
-On n'a pas vraiment le temps pour ça, grogna Harry.
-Laze veut qu'on le prenne, soupira Ric. Il pense que Dumbledore utilisera toutes tes failles, dont la culpabilité que tu pourrais ressentir au fait d'avoir tué volontairement.
-Mais … protesta Harry.
-Laze veut être sûr que tu acceptes totalement ce que tu as fait, avec ses bons côtés comme les mauvais, coupa Ric. Ce n'est pas dans notre nature, je le concède, mais cette thérapie pourrait aider à ta stabilité, surtout en sachant que tu sais que tu es un elfe noir que depuis peu.
-Tu penses qu'il n'a pas tort ? comprit Harry
-Disons que ce qu'il demande n'est pas dénué de sens mais j'avais d'autres raisons, fit Ric. C'est ma fille Luba qui a établi le protocole de transformation des elfes noirs. Elle avait trop souvent vu des enfants se faire consumer par leur magie parce que pris en charge trop tôt ou trop tard. Si j'ai attentivement surveillé la tienne, c'est parce que je connais ce protocole sur le bout des doigts. Si j'avais dû m'y fier, j'aurais dû en conclure que tu serais consumé par ta magie. Une transformation se prépare pendant plusieurs années, tu n'as eu qu'un an. Le principe de la thérapie était de te faire accepter que tu aies dû tuer pour ta survie, mais je pense qu'en ayant été élevé en tant qu'humain puis en tant que sorcier, tu devrais accepter d'être en fait un elfe noir avec des gènes de lamia.
Harry sourit malgré lui. Avec tout ce qui lui était tombé dessus, il aurait presque pu oublier que le don du fourchelangue ne venait pas de Voldemort mais initialement du sang de lamia de son père et que si sa mère n'avait pas été kidnappé enfant et envoyée dans la dimension des humains, il aurait dû vivre dans un monde raciste, cacher sa nature toute sa vie et pousser ses enfants à en faire de même pour ne pas être exécuté. Il était également vrai qu'il ne s'était jamais arrêté pour y réfléchir vraiment mais il devait s'avouer qu'il n'y avait jamais accordé d'importance.
-Je pense qu'il n'y a pas grand-chose à dire, déclara Harry en haussant des épaules. Mais si Laze y tient, je le ferai.
-Merci pour lui, tu te doutes que je ne suis pas vraiment en position de lui refuser quoi que ce soit, grimaça Ric.
-Est-ce que tu sais qui aura la charge de la thérapie ? demanda Harry
-Ton humble serviteur, soupira Ric. Le nombre de personnes au courant de tout est très réduit, tu t'en doute. Ou sinon, Melia Arcana. Mais cela voudrait dire que tu devrais retourner régulièrement dans l'autre dimension et même moi je l'évite.
-Pourquoi ? s'étonna Harry
-Le passage affecte beaucoup la magie, expliqua Ric. A chaque fois qu'on passe, elle se déstabilise et on peut y perdre la vie.
-Mais … et moi ? Le jour de mes dix-sept ans ? s'étonna Harry
-Dans un sens, nous avons fait un pari qui a payé, avoua Ric. Mais Nolan et moi ne pouvions pas faire autrement. Les rares elfes noirs qui ont eu leur transformation dans une autre dimension sont devenus fous et ont créé des catastrophes. Nous devions t'emmener, nous n'avions pas le choix.
-D'accord … souffla Harry. Si je résume, tu vas être mon psy à partir de maintenant ?
-Oui, fit Ric, l'air ennuyé. Rassure-moi, tu ne veux pas commencer maintenant ?
-Non, ricana Harry. Je préfère dormir.
-Dors, petit descendant, sourit Ric.
§§§§§
-Bienvenue au manoir Prince, mademoiselle Granger, s'inclina Constantin.
-Merci beaucoup, sourit Hermione. C'est toujours un plaisir.
-Par ici, indiqua Constantin. Lord Jeremiah s'est retiré dans son bureau.
Avant de quitter l'école, Laze avait fourni à Hermione assez de potions pour tenir tout l'été. Cela lui avait permis, une fois chez elle, de constituer sereinement un stock d'urgence puis de retourner en France pour faire un bilan de la dégradation de son état.
Début août, Jeremiah l'avait convoqué pour la présenter à son héritier. La brune se doutait de la raison de cet empressement : deux jours plus tôt, Voldemort avait été définitivement défait à Godric's Hollow, sur le lieu même de sa première chute. Avec l'arrivée programmée de son héritier, il y aurait plus de sollicitations pour une union maintenant que le maître d'une bonne moitié des chefs de famille des partis à marier n'était plus.
Pour l'occasion, Hermione avait revêtu une robe d'été moldue qui la mettait à son avantage dans un unique but : que Severus Snape, ou désormais Seth Prince, ne la voie plus comme une élève mais comme une femme. Elle n'aurait que très peu l'occasion d'attirer le regard d'un homme, autant qu'elle en profite !
-Mademoiselle Granger, salua Jeremiah.
-Lord Prince, répondit Hermione.
-Prenez place, je vous prie, pria Jeremiah. Du thé ?
-Avec plaisir, sourit Hermione.
Une fois chacun servi et Constantin sorti, les choses sérieuses commencèrent.
-J'imagine que vous lisez les nouvelles, lança Jeremiah.
-C'est le cas, confirma Hermione. La pression s'est significativement allégée pour toutes les personnes qui étaient sous sa coupe, vous ne croyez pas ?
-C'est certain, sourit Jeremiah. Vous savez donc pourquoi vous êtes ici.
-J'ai une hypothèse, fit Hermione. Vous souhaitez mettre votre héritier en sécurité en annonçant qu'il a une Mère de Lignée. Ainsi, pendant que toutes les familles se mettent à la recherche de la sorcière sang pur qui a accepté, son propre descendant aura le temps d'être conçu voire, avec un peu de chance, d'être né.
-Il est dommage que vous nous quittiez si tôt, se désola Jeremiah.
-Espérons alors que votre descendant accepte votre proposition et que l'enfant qui naitra héritera de mon esprit, fit Hermione en haussant des épaules. Selon mes parents, vous allez au-devant de sacrées surprises.
-Nous verrons bien, fit Jeremiah. Bien, vous n'aurez pas à parler, je me charge de tout.
-Ça ne me rassure pas vraiment, lâcha Hermione.
Ils terminèrent tranquillement leur thé puis se rendirent sur la terrasse où Hermione se figea.
La jeune femme n'avait rarement vu son professeur autrement que portant sa lourde robe noire ou des tenues similaires. Elle n'avait jamais eu l'occasion de le voir détendu ou du moins, hors du regard scrutateur du monde sorcier et de Dumbledore et honnêtement, elle ne l'aurait jamais cru si attirant. Pas spécialement beau mais un charisme qui ferait sûrement soulever les foules, avec ses airs qui invitaient aux mystères … et au défi de le voir s'adoucir pour toute personne voulant le séduire.
Quand elle se rendit compte du tournant de ses pensées, Hermione rougit et s'avança vers Jeremiah qui attirait l'attention de Severus.
-Par Salazar ! siffla Severus. Me détestez-vous à ce point pour vouloir me coller dans les pattes la Miss Je Sais Tout du trio d'or ?
Hermione se rebiffa.
-Ne vous inquiétez surtout pas, cracha Hermione. Vous n'aurez qu'à me supporter qu'un an ou deux, le temps que je vous fournisse votre fichu héritier, et après je disparaîtrai.
-Vous, Gryffondor, vous oseriez abandonner votre enfant ? railla Severus
-Je n'aurais pas le choix puisque je vais mourir, renifla Hermione.
Severus fut déstabilisé.
-Pardon ? balbutia Severus
-En plus de vous comporter en parfait connard et abruti fini, je ne vous savais pas sourd non plus, siffla Hermione. Vous cumulez, je trouve, ce qui est dommage avec la disparition de Voldemort. Après, je ne devais pas m'attendre à mieux : vous avez été assez stupide pour croire que la femme que vous aimiez vous reviendrait si vous vous alliez à une secte qui tuait toutes les personnes qui avaient les mêmes origines qu'elle. Et dire que vous vous plaigniez de l'arrogance de James Potter, vous ne valez pas mieux …
Jeremiah sourit. La jeune femme savait taper où ça faisait mal et en plus, elle ne se laissait pas marcher sur les pieds. Quel dommage qu'elle n'en ait plus pour longtemps à vivre … mais peu importe, les prochaines semaines allaient être fascinantes.
Severus se pinça le nez, exaspéré. Bien sûr, il avait entendu ce que la jeune femme venait de dire mais il ne comprenait pas.
-Bon, asseyons-nous et soyez plus claire, mademoiselle Granger, souffla Severus. Ce serait un comble si on se fie à la longueur de tous vos devoirs.
-Vous n'avez qu'à vous en prendre à vous-même, renvoya Hermione. Vous avez voulu rester vague dans vos intitulés de devoirs, assumez les conséquences.
Tous s'installèrent et Jeremiah sourit intérieurement : le match promettait d'être explosif !
-Qu'est-ce que c'est que cette histoire comme quoi vous allez mourir ? pesta Severus
-Vous savez, tout le monde meure un jour, persifla Hermione. Même notre père Fouettard s'y est cassé les dents. La preuve, il y a perdu son nez dans le processus.
Severus leva les yeux au ciel.
-Et avec les détails ? insista Severus
-Je suis mourante, annonça Hermione.
-Vous n'avez pas l'air d'être malade, fit remarquer Severus.
-Pas besoin de me traîner dans un lit pour ça, renifla Hermione. Avant que vous ne vous posiez la question, je le sais depuis mes quinze ans, non, c'est incurable et oui, j'ai un traitement palliatif qui m'aide beaucoup. Oh, et bien entendu, ce ne sont pas des médicomages britanniques qui ont posé le diagnostic.
Severus souffla d'exaspération.
-Soit, grinça Severus. Cela ne m'explique pas ce que vous faites ici.
-Visiblement, pas pour jouer aux cartes, lâcha Hermione.
-Granger ! tonna Severus, comme lorsqu'ils étaient encore à Poudlard en tant que professeur et élève
-Oui, monsieur ? répondit Hermione, sourire aux lèvres
Severus sentit que ça ne valait pas la peine de s'énerver et observa attentivement la brune. S'il avait toujours détesté son comportement de Miss Je Sais Tout, il ne pouvait que reconnaître sa mémoire qui lui faisait retenir tout ce qu'elle lisait puis son intelligence pour exploiter les informations engrangées. Comme toutes les personnes concentrées sur ses études, elle avait appris assez tard comment se mettre en valeur et avait donc créé la surprise au bal du tournoi des trois sorciers en dévoilant ce qu'elle allait devenir dans les prochaines années. A son corps défendant, il devait reconnaître que les années suivantes, elle était de plus en plus femme et adulte, troublant les plus âgés dont lui, quand il n'était pas en train de maintenir une haine factice envers les Gryffondor. Dans un coin de son esprit, il l'admirait car elle était l'une des rares à avoir refusé de se couler dans le moule des nés de moldus voulant s'intégrer dans le monde sorcier britannique. Elle avait toujours refusé de s'aplatir et de mendier sa place au sein de la communauté en se faisant épouser par un né de sorcier, place qu'aurait sûrement voulu occuper Ronald Weasley. La longueur de ses devoirs montrait également qu'elle ne s'arrêtait pas aux cours dispensés par Poudlard et ce qu'il était réellement possible d'apprendre. D'ailleurs, sur ce point, il ne serait pas étonnant qu'elle ait compris que la Grande Bretagne sorcière était la risée du monde magique pour son niveau scolaire catastrophique. En tant que née de moldus, elle n'était pas formatée par la société sorcière pour être l'archétype de la sorcière, effacée et obéissante, mais elle avait son caractère bien à elle et les arguments pour l'assumer. Intellectuellement parlant, elle était un défi et une stimulation constante car on pouvait parler de tout avec elle. Et, s'il voulait être honnête, même si elle ne répondait pas aux canons de beauté classique, il lui trouvait un certain charme pour lequel il ne serait pas contre retourner dans sa couche …
Severus se calma et prit place pour commencer la véritable discussion.
-Laissez-moi résumer, fit Severus. Vous souhaitez devenir la Mère de Lignée du clan Prince et vous allez mourir. Quel est le lien exact ?
-D'ici quelques années, je vais mourir, déclara Hermione. Comme je vous l'ai dit, c'est incurable, mais je prends un traitement qui me permet de tenir un peu plus longtemps. En me sachant condamnée, je ne peux pas prétendre à une vie classique, tomber amoureuse, emménager avec quelqu'un, fonder une famille, etc. sans infliger à ma mort précoce la douleur de la perte à tous mes proches. Mais ce n'est pas pour autant que je veux renoncer à des choses qui me tiennent à cœur. Le mariage ne m'intéresse pas spécialement, dans le sens où je ne pourrais pas pleinement en profiter, en revanche, avoir des enfants, si. L'avantage de la Mère de Lignée est que je pourrais juger de visu du foyer dans lequel je laisserai mon ou mes enfants. Si, en plus, je peux toujours rendre visite à mes amis et eux de même, je serais comblée.
-Quels avantages je tirerai de cette situation ? demanda Severus
-Le brassage génétique et magique, répondit simplement Hermione. La majorité des nés de moldus sont sensibilisés à la consanguinité, même implicitement. Alors découvrir toute une communauté qui le prône sans jamais le remettre en cause n'apporte que des questions incrédules sur sa viabilité. Mieux, même en notant que les sangs purs produisaient de plus en plus de cracmols et d'handicapés mentaux comme physiques ou que les sorciers les plus puissants de leur époque sont des sangs mêlés comme Voldemort, Dumbledore, Harry ou vous, ils ne se remettent pas en question et refusent de le faire. Quand vous serez officiellement héritier Prince ou même, lord Prince, la société exigera que vous épousiez une sang pur bien sur tous les rapports mais gangrénée par la consanguinité, affaiblissant la lignée Prince. Or, si je deviens Mère de Lignée, vous n'aurez pas à vous encombrer d'une épouse que vous n'aimerez pas ou qui n'attendra de vous que des choses incompatibles avec votre caractère ou votre mode de vie, vous aurez votre mot à dire sur l'éducation des enfants conçus et ils ne seront pas aussi faibles que les plus purs des sangs purs.
-Mais pourquoi vous ? insista Severus
-Parce que malgré tout ce que vous êtes et vous avez fait, en tant que Severus Snape comme en tant que Seth Prince, vous n'aurez jamais totalement le respect qui vous est dû, fit doucement Hermione. Je sais exactement qui vous êtes et même si honnêtement, si je n'étais pas mourante, jamais je n'aurais imaginé avoir une histoire avec vous, je veux librement rembourser la dette que le monde sorcier a envers vous pour tous les sacrifices auxquels vous avez consenti pour nous libérer de Voldemort.
-C'est un beau geste, reconnut Severus. Mais … moi ?
-Est-ce si incroyable ? rit Hermione. Vous avez tous les avantages et moi le seul qui m'importe.
-Je suis maître de potions, je peux parfaitement trouver un remède à votre maladie, proposa Severus.
-Mais je ne suis pas malade, sourit tristement Hermione. Je vais mourir empoisonnée.
-Comment ça ? sursauta presque Severus
-Je fais une réaction allergique à l'un des ingrédients composant l'une des plus puissantes potions de contrôle, expliqua Hermione. Le temps qu'on s'en rende compte, il était trop tard, j'en avais pris une dose mortelle. Aidé de ma magie, mon traitement réduit cet ingrédient qui entre dans mon organisme. Il y a quelques semaines, j'ai fait un bilan et il me donne au maximum cinq années à vivre si je ne m'agite pas trop. Période qui sera réduite de moitié au moins si je tombe enceinte.
Plus que toutes ces explications, ce fut le regard serein et apaisé de la jeune femme qui le décida. Quitte à supporter cette Miss Je Sais Tout et tout ce qui allait avec, il était prêt à accorder le dernier vœu de la brune et même plus encore.
-J'accepte, fit Severus.
