1991 fut indiscutablement une année chargée en événements pour la Grande-Bretagne magique, le plus frappant et le plus mémorable étant sans le moindre doute la disparition de Viola Potter, la Survivante qui était devenue la Disparue pour tous les foyers sorciers d'Angleterre.

La réaction générale de fureur et d'indignation provenait davantage de la fierté blessée que de l'affection : Viola Potter était une icône nationale pour la populace sorcière, pas leur propre fille. Qui plus est, son absence totale d'apparitions publiques ne contribuait pas à l'humaniser proprement dans le cœur du public : celui-ci pouvait déplorer son sort par principe – elle était après tout une petite fille impossible à retrouver – mais n'en pensait pas moins « Oh, c'est bête quand ça arrive. Voyons, je faisais quoi déjà ? ».

Le fait que Dumbledore – le vieux sage qui venait de prouver sa faillibilité humaine donc intolérable par cette colossale bévue – ait contribué à cette disparition n'avait fait que jeter de l'huile sur le feu et poussé une grande partie des électeurs à exiger sa démission immédiate de ses postes politiques – comment pouvait-on faire confiance à un homme capable de pareille négligence, après tout ?

Le vieil homme s'était donc retrouvé isolé à Poudlard, avec James Potter sur le dos – parce que celui-ci avait bien l'intention de tenir à l'œil le vieux croûton, histoire de s'assurer qu'il ne leur ferait pas une autre bourde monumentale dans le dos.

En rétrospective, cette décision fut plutôt salutaire pour la jeune Ginevra Weasley en 1992, lorsque la fillette se retrouva possédée par un journal intime ensorcelé dont l'objectif majeur était de réveiller un Basilic dissimulé dans la légendaire Chambre des Secrets afin de le lancer contre l'école, ou plutôt ceux de ses élèves au sang assez impur pour mériter une condamnation à mort via rencontre oculaire – c'est à dire personne, mais allez donc raisonner un raciste endurci.

James Potter n'étant pas né de la dernière pluie – quoi que raconte le Maître des Potions du château – avait réussi à identifier la menace en un intervalle de temps moyennement raisonnable, ceci étant dû à sa formation d'Auror. Hélas, ces talents ne suffirent pas à le préserver d'une vilaine blessure reçue tandis qu'il abattait le Basilic – la créature étant tout bonnement trop dangereuse pour vivre – l'obligeant à quitter le poste de Professeur de Défense afin de pouvoir récupérer en paix.

Afin de le remplacer pendant le restant de l'année scolaire, Dumbledore opta pour engager Gilderoy Lockhart, lequel prouva son incompétence totale pour ce qui concernait l'enseignement en l'espace d'une seule leçon. Qui plus est, de nombreuses incohérences dans la bibliographie détaillant ses nombreux exploits poussèrent une coalition de Serdaigles – menée par une jeune sorcière d'origine chinoise dénommée Sue Li – à s'adresser au Bureau des Aurors pour une enquête approfondie. Ladite enquête démontra que Lockhart n'avait en réalité commis aucun des triomphes qu'il revendiquait, s'attribuant ceux d'autrui après les avoir rendus incapables de dévoiler la vérité en leur appliquant un sortilège d'amnésie.

Le souci du sortilège d'amnésie étant de causer de graves problèmes mentaux lors d'une utilisation mal calculée, Gilderoy Lockhart se vit accusé de destruction aggravée de la psyché d'autrui sur pas moins de quinze personnes, dont cinq avec conséquences irréversibles, s'attirant la condamnation à perpétuité à Azkaban. Personne ne jugea cette peine excessive.

Comme il ne pouvait évidemment pas reprendre le poste de Professeur de Défense, Remus Lupin se décida à accepter le poste durant l'année scolaire 1993-1994, sur encouragement de James Potter et Sirius Black désireux de voir leur ami trouver un emploi stable. Son statut de loup-garou fut malheureusement exposé au grand jour par une troisième année de Serpentard répondant au nom Pansy Parkinson, l'obligeant à démissionner sous peine d'être renvoyé sans ménagement par le Conseil d'Administration de l'école.

1993 marqua aussi l'entrée à Poudlard des jumeaux Potter, et si le jeune Daniel alla à Gryffondor – à la surprise de personne – sa jumelle Daisy se retrouva à Serpentard – à l'effarement général.

Que de détermination, s'était en effet émerveillé le Choixpeau, quelle volonté admirable ! Godric serait fier de t'accueillir dans sa maison, c'est si rare de trouver une sorcière ou un sorcier qui décide de se lancer dans une Quête, a priori une aussi noble que retrouver ta sœur perdue. Helga aussi admirerait ta loyauté, ta capacité à travailler sans relâche pour parvenir à tes fins. Mais non, tu ne laisses rien t'arrêter, tu es prête à tous les stratagèmes, n'est-ce pas ? Et réussir là où Dumbledore lui-même a échoué, très ambitieux… Oui, je crois que mieux vaut pour toi la maison des serpents.

Une Potter à Serpentard – la sœur de la Survivante dans la maison des adeptes des Ténèbres – ne pouvait manquer de causer des remous virulents dans la société sorcière. La Gazette s'en donna à cœur joie, et la jeune fille passa l'intégralité de sa première année scolaire dans un certain isolement – si l'on excepte la compagnie de Luna Lovegood, seconde année de Serdaigle dont la réputation d'excentricité n'était plus à faire.

Tous parents aimants qu'étaient les Potters, voir leur fille porter le vert et l'argent – les couleurs traditionnellement attribuées aux sorciers tournant mal – plutôt que le rouge et or eut pour effet de refroidir de manière certaine leur relation avec leur cadette. Ajoutant à cela le fait qu'aucune piste ni même nouvelle n'avait été trouvée depuis l'ouverture de l'enquête sur la disparition de leur aînée, l'année marqua un déclin accusé pour ce qui était de vivre agréablement en tant que membre de la famille.

Lorsque débuta l'année 1994 et le Tournoi des Trois Sorciers – ressuscité par un Dumbledore essayant désespérément de regagner un peu de son crédit politique et de la bonne volonté du public – la situation ne s'était guère amélioré, et Daisy Potter passa nettement plus de temps en compagnie des invités scandinaves de Durmstrang ou européens de Beauxbâtons qu'avec ses propres condisciples, ce qui fut loin d'échapper aux observateurs avertis.

Dès la première tâche, la société magique anglaise se fit rappeler pour quelle raison le Tournoi des Trois Sorciers avait été prohibé lorsque le dragon Vert Gallois que devait affronter le champion de Poudlard Cedric Diggory parvint à se libérer de ses entraves et à faire s'écrouler les gradins des spectateurs, résultant en une quarantaine de blessés encore mineurs. Il n'y eut aucun mort à déplorer, mais ce fut très juste.

La seconde tâche également faillit tourner au drame lorsque la jeune semi-Vélane Gabrielle Delacour – choisie comme otage que sa sœur devait aller chercher sous les eaux du lac Noir – fit une mauvaise réaction au milieu aquatique dans lequel elle avait été plongée, conséquence naturelle quand une créature magique de nature feu se retrouve exposée à son élément opposée. Les sirènes avaient ramené l'enfant sur la berge en se rendant compte du risque très réel de décès sous leur garde, mais l'incident n'en marqua pas moins les mémoires, plus particulièrement celle du père, plutôt bien placé dans le Ministère français.

Dans l'ensemble, ce fut un soulagement quand la troisième tâche s'acheva sur la victoire in extremis de Poudlard, lorsque Cedric Diggory parvint à arracher le trophée des mains de Viktor Krum, et ce sans que personne parmi les champions ou les spectateurs ne finisse mutilé ou mort.

Néanmoins, les représentants étrangers assistant au spectacle reportèrent le manque de sécurité ainsi que la gêne occasionnée au public – vraiment, poirauter une heure au bord d'un lac dans le froid, on pouvait trouver meilleures façons de perdre son temps – et ne manquèrent pas de faire savoir à Durmstrang et Beauxbâtons que si le Tournoi des Trois Sorciers devait vraiment redevenir une tradition scolaire, mieux valait que ce soit une tradition scolaire correctement encadrée pour assurer que tout le monde passerait un bon moment.

Aucune des deux académies ne protesta là-dessus.