Titre : Le Fil rouge du Destin
Auteur : Lysanea
Disclaimer : aucun personnage ne m'appartient
Pairing et personnages pour ce chapitre : Mu x Aphrodite, Aldébaran, Saga x Aioros, Kanon, Angelo x Shura, Aiolia, Shaka, Milo x Camus

Rating : T

Note :
Merci Mini-Chan pour ta review, toujours fidèle au poste ! Tu es donc en Afrique du Sud, incroyable ! J'espère que tout se passe bien pour toi ! Par curiosité, j'ai été regarder ce que pouvait être le « sanctuaire des gros minous de Stanford » (rien à voir avec le Sanctuaire d'Athéna, même s'il compte quelques animaux bien particuliers 😊 !) et wouaw, je dois t'avouer que je t'envie ! J'avais adoré le Parc des Félins, pas trop loin de Paris, ce doit être magique de les voir dans leur environnement naturel, et de s'occuper d'eux. Bravo à toi ! Tu as un cœur immense. Plus je te lis, et plus j'ai envie d'échanger avec toi, tu dois avoir tant de choses à transmettre et à partager, ce doit être tellement enrichissant de parler avec toi ! Sinon, ta review imaginée m'a encore bien fait rire (cacahuète dans un bol XD). Et pour te répondre, l'histoire d'Aiolia et d'Eaque est pure imagination, il n'y a jamais eu aucune interaction entre eux dans le manga ou l'animé. J'avais envie, c'est tout, pour accentuer encore le fait que les Juges sont sadiques (ça, c'est canon au manga, c'est dit plusieurs fois) et corrompus par les Enfers, sauf Rhadamanthe, que je voulais ainsi mettre en lumière, lui et le fait que son amour pour Kanon l'ait préservé. Enfin, pour finir, oui, le ship Hyoga x Shun est très fréquent car beaucoup oublie ou ignore qu'ils sont réellement demi-frère, l'animé ne le précisant pas, au contraire du manga qui le dit explicitement dès le début. Donc petite piqure de rappel de ma part… Merci encore à toi et plein de bonnes ondes pour ta mission en Afrique !

Merci ViMiki pour ton MP, je t'ai répondu, je te souhaite encore une fois bonne chance et plein de courage et d'énergie pour tes études !

Les prochains chapitres étant écrits, la publication sera plus régulière sur les prochaines semaines.

Pour celui-ci, c'est, comme annoncée précédemment, la suite directe.

Bonne lecture !

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Le Fil rouge du Destin.

Chapitre Trente-et-un : Un ami est celui qui vous laisse l'entière liberté d'être vous-même.
(Jim Morrison)

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Le goulot pointa Camus, qui hésita un moment, avant de choisir « vérité ».
Angelo prit lui aussi quelques secondes de réflexion, avant qu'un sourire satisfait ne s'affichât sur son visage.

- Comment toi, un vrai bloc de glace, t'as fait pour comprendre que t'étais tombé amoureux de ton petit Scorpion ?

Le visage de Camus resta un temps impassible, puis un léger sourire affleura sur ses lèvres.

- Bien avant que nous ne devenions amants, Milo me rendait déjà très souvent visite à l'Isba, comme vous avez fini par le savoir. Au cœur de ce monde glacé frisant les -45 a – 55 degrés, parfois, il était brûlant. Je m'étais sérieusement interrogé, à de maintes reprises, sur la capacité du lac gelé à ne pas se briser sous ses pas, ou par sa simple présence, tant il irradiait de chaleur. Un soleil d'été tropical en plein cœur d'un hiver polaire.

Il s'interrompît un court instant pour échanger un tendre regard avec Milo, avant de revenir sur Angelo qui avait posé la question.

Tout le monde écoutait attentivement les confidences si rares de Camus, d'ordinaire tellement pudique sur ses sentiments et son histoire avec Milo…

C'était dommage, d'ailleurs, car il était un excellent conteur, ils adoraient tous l'écouter raconter des pans de sa vie à l'isba, en Sibérie, avec Hyoga et Isaac, notamment. Mais il était bien plus discret sur sa relation amoureuse, même s'il apprenait à s'ouvrir, pas à pas, pour Milo, qu'il s'autorisait déjà un peu plus à regarder avec amour et douceur, voire à le toucher, en public.

- Cette boule de feu et d'énergie, pour qui le froid n'était pas le climat préféré, avait pris la fâcheuse habitude de se glisser dans mon lit pour dormir, poursuivit-il.

- Avec les enfants à côté ? osa demander Shura.

- Isaac et Hyoga dormaient dans le même lit, il n'y avait donc rien d'étrange à ce que Milo partage le mien, dans ma chambre. L'isba n'était pas bien grande. J'avais pourtant effectivement prévu une place pour un autre couchage le long du mur. Mais Milo l'a tout simplement ignoré le premier soir et m'a rejoint sous les couvertures.

- Le contraire nous aurait tous étonné ! rit Aldébaran, approuvé par les autres.

- Je ne l'ai pas été non plus. Et même si j'ai râlé, cette fois-là, reprit Camus, je ne l'ai pas chassé pour autant. Ni les suivantes. Il était le seul dont je supportais la chaleur pourtant étouffante, le seul avec qui cela me faisait du bien d'être si proche. Le seul avec qui je me sentais bien et qui parvenait à me réchauffer, alors que je n'avais encore jamais eu l'impression d'avoir besoin de l'être.

Il était évident qu'il se forçait à ne pas trop regarder son compagnon, mais il finit par craquer et lui jeta un rapide regard, contenant difficilement son émotion à l'évocation de leurs souvenirs communs.

- C'est parce qu'au contact l'un de l'autre, le feu de Milo et ta glace s'équilibrent parfaitement, précisa doucement Saga pour ne pas briser la magie du moment.

- Une âme dont les deux moitiés se sont enfin réunies retrouve l'harmonie, ajouta Aioros en posant sa main sur celle de Saga, à ses côtés.

Camus hocha la tête.

- Cette chaleur, je ne l'ai ensuite éprouvé que pour notre Déesse, à Son contact, lors de mes deux résurrections. Mais je le savais déjà, à l'époque, que c'était de l'amour. Différent de celui que je ressentais pour Isaac, puis Hyoga, évidemment. Mais c'était un sentiment tout aussi fort, celui d'appartenir à une famille. Contrairement à ce que tu penses, Angelo, je connais les sentiments, j'en éprouve depuis toujours, et j'ai toujours mesuré parfaitement les bouleversements que cela peut créer en nous et dans nos vies. C'est la raison pour laquelle je les ai tant combattus, persuadé qu'ils m'affaibliraient et alterneraient mon jugement. J'ai lutté avec plus ou moins de succès. Car il est difficile de résister à une tempête de sable brûlant qui s'abat sur vous. Même les falaises les plus solides finissent par s'éroder à cause du vent.

- Certes, mais tu n'as plus à résister ni à lutter, désormais, fit valoir Saga avec un petit sourire.

- En effet. Mas lâcher prise s'apprend, après tant d'années d'auto-conditionnement. Athéna soit louée, j'ai le meilleur professeur pour se faire, qui s'est trouvé aussi être la meilleure raison au monde, ajouta-t-il en serrant la main de Milo plus fort. Cela répond-il à ta question, Angelo ?

Le Quatrième gardien tendit sa bière pour l'entrechoquer avec le verre de Camus.

- Parfaitement, mon Glaçon ! Je m'attendais à quelques mots et démerde-toi avec, alors je suis plutôt content !

- Moi aussi ! intervint Milo en posant sa tête sur l'épaule de Camus. Merci, amour de ma vie.

Il était resté tranquille pour ne pas interrompre Camus et gâcher ce moment unique de confidences publiques, surtout qu'il savait que son compagnon l'avait fait pour lui. Il avait tellement envie de le serrer fort dans ses bras, à cet instant ! Son corps autant que son cosmos en vibraient.

- Hey, Mister Freeze, fais tourner la bouteille avant que ton Scorpion ne te plante son dard devant tout le monde !

Quelques « Angelo ! » outrés ou amusés s'élevèrent en chœur.

- Oh ! ça va les faux prudes, là…

Le Onzième gardien fit tourner la bouteille sans un mot de plus pour pouvoir clore le sujet.
Elle termina sa course en pointant Kanon.

A peu près tout le monde retint son souffle.

Malgré les explications que Camus avait eu sur le lien d'âmes de Milo et Kanon, sur leur première vie commune, malgré les efforts répétés du cadet des Gémeaux, la tension et le froid entre eux, émanant toujours du Verseau, avaient à peine diminués.

- Action ou vérité ?

Le cadet des Gémeaux n'hésita pas et choisit vérité.

Il offrait ainsi l'occasion au Verseau de lui poser une question qu'il n'avait jamais osé et ne pourrait jamais s'autoriser à lui poser, et qu'il supposait nombreuses.

- Après la Bataille contre Poséidon, quand tu es revenu au Sanctuaire, avais-tu pour but de séduire et manipuler Milo pour réintégrer la Garde dorée ?

Milo, qui avait toujours sa tête sur l'épaule de Camus, se redressa vivement et posa sa main sur son bras.

- Camus, tu ne…

- Laisse, Milo, je comprends sa question, l'interrompit Kanon avec douceur. Non, Camus, ce n'était pas mon but. Je n'avais pas de plan. Je me suis présenté parce que j'étais attiré par le Domaine, par le cosmos d'Athéna. Reconnu ou non, légitime ou non, j'étais le dernier Gémeau en vie, mon âme restait celle d'un Chevalier, bien que souillée. Je voulais m'assurer que Notre Déesse, qui m'avait tant de fois sauvé la vie, allait bien et qu'Elle était suffisamment en sécurité malgré la réduction des effectifs, les disparus, mais aussi, les nombreux blessés. Le fait de rencontrer Milo et ce qui s'est passé ensuite, il te l'a expliqué, ce sont nos âmes qui, privées de leurs moitiés originelles, ont fait en sorte de se retrouver pour s'apporter un peu de réconfort, dans ces moments difficiles que traversaient leurs incarnations actuelles. Ni plus, ni moins. Ma réponse te convient-elle, Camus ?

- Oui. Je te remercie, Kanon.

- Je t'en prie. Et inutile d'attendre une telle occasion, si tu as d'autres questions, je suis disposé à te répondre n'importe quand et sur n'importe quel sujet.

Camus ne répondit rien, alors Kanon prit la bouteille et la fit tourner à son tour.

Le goulot pointa Mu, qui fit le choix de révéler une vérité.
Le cadet des Gémeaux ne fit même pas mine de réfléchir un peu.

- Es-tu facilement tombé amoureux d'Aphrodite ?

- Hey non ! protesta ce dernier.

Mais Mu posa calmement sa main sur la sienne.

- J'ai accepté de jouer, je me plie aux règles. Cela ne me dérange pas de répondre.

Aphrodite se renfrogna.

Il n'était pas certain de vouloir entendre la réponse, car il avait encore un peu peur de ce que pourrait dire Mu.
Il l'entendait déjà expliquer que non, cela n'avait évidemment pas été simple de tomber amoureux de quelqu'un comme lui.

Même s'il l'avait rassuré à de nombreuses reprises et qu'il avait confiance en lui, le Douzième gardien avait encore parfois du mal à réaliser l'amour que lui portait le Premier.

Ils en avaient parlé pas plus tard que la veille, alors que Mu les avait téléportés sur une plage de l'îlot désert de Large Island, dans l'archipel des Grenadines.

Tendrement enlacés dans un fauteuil suspendu extrêmement confortable, ils profitaient d'une fin de journée idyllique face aux eaux mêlées de la Mer des Caraïbes rencontrant l'Océan Atlantique.

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Flash-back

- Je ne pensais vraiment pas que tu pourrais développer ce genre de sentiment à mon égard, un jour.

- Et comment aurait-il pu en être autrement, Alfiye ? Tu es un homme à part. Tu es tellement intéressant et brillant, tu as cet humour un peu caustique que j'apprécie particulièrement, tout comme ce franc-parler que rien ne peut intimider. Sous ta carapace d'être que rien ne peut atteindre, tu caches une sensibilité à fleur de peau qui donne envie de te protéger, même si tu n'en as pas besoin, car tu es incontestablement fort. Et même si ce n'est pas le plus important te concernant, ta beauté est renversante et tu dégages une sensualité folle, encore plus exacerbée dans les moments intimes, et tu en deviens envoûtant. Comment, à force de te fréquenter, aurais-je pu ne pas tomber définitivement et irrémédiablement amoureux de toi ?

Aphrodite, à qui jamais personne n'avait fait de tels compliments, se noya littéralement sous une vague d'émotion, et des larmes perlèrent aux coins de ses yeux qui s'étaient humidifiés au fil des mots de Mu.

- Qui est cette personne que tu décris ? murmura-t-il la gorge nouée. Je ne crois pas la connaître.

- Je t'apprendrai à la voir, à travers mon regard, promit Mu avec un doux sourire qu'Aphrodite sentit contre sa tempe. Mais cet homme n'est nul autre que toi.

- Tu sais que je suis déjà amoureux, tu n'as pas à me séduire davantage.

- Ce n'est pas ce que je fais. Je répondais simplement à ta réflexion.

Aphrodite releva le visage vers celui de Mu.

- Cela veut dire que je n'aurais pas souvent droit à de si jolis mots ? minauda-t-il.

- Je ne sais pas, répondit honnêtement le Bélier en posant un instant son front contre le sien. Je n'ai jamais été aussi amoureux et je n'ai jamais eu de relation longue et sérieuse, avant toi.

- Moi non plus. Angelo ne compte pas, bien évidemment, il n'y a jamais eu qu'une amitié arrangée. Comme nous, au départ, même si la nôtre était beaucoup plus saine.

- Oui. Mais tu as aimé profondément Saga, rappela Mu d'un ton neutre au possible.

Aphrodite recula légèrement pour le regarder dans les yeux.

- Certes. Je ne l'ai jamais regretté, malgré la douleur que cela m'a causé toutes ces années, mais pourtant, aujourd'hui, j'en éprouve tout de même un certain regret : j'aurais voulu que tu sois mon premier amour, Mu, que tout ce qu'on a vécu ces derniers mois ait été ma première véritable expérience amoureuse.

- Cela ne me dérange pas de ne pas avoir été le premier, je préfère plutôt être le dernier.

Aphrodite se mordit la lèvre.

Décidément, Mu savait trouver les mots justes.
Il n'avait peut-être aucune expérience des relations amoureuses, mais son instinct était sûr.

Et il connaissait aussi très bien Aphrodite, désormais.

- Tu penses pouvoir me supporter encore les quelques dix-huit prochaines années qu'il me reste ?

- Oui, répondit le Bélier sans hésiter en posant sa main sur sa joue. Été, automne, hiver et printemps, sous le soleil, la pluie ou la neige, chacun des 365 ou 366 jours de ces prochaines années. Et tu demeureras dans chacun des suivants pour les années où je devrais continuer la route seul dans ton souvenir.

- On dirait presque une demande en mariage ! s'amusa le Douzième gardien pour cacher son trouble.

Mu prit sa main posée sur son torse pour la serrer fort et lui adressa un de ses longs regards intenses dont il avait le secret, et qui pouvait le rendre fébrile en une fraction de seconde.

Avec le peu de distance qui séparait leurs visages, Aphrodite voyait nettement les éclats roses qui irisaient le magnifique vert émeraude de ses yeux, le troublant davantage encore.

- Si c'en était une, Alfiye, et que cela nous était permis, tu l'accepterais ?

- Oui ! assura-t-il avec un grand sourire. Je sais bien que nous ne sommes pas comme les autres…

- C'est-à-dire ?

- On en a déjà parlé… Vu notre première vie et ce que nous étions l'un pour l'autre, alors, ni plus ni moins que des étrangers, presque des ennemis, même, il y a très peu de chances que nos âmes se connaissent déjà ou qu'un fil rouge nous lie, tous les deux.

Mu porta leurs deux mains aux doigts entrecroisés à ses lèvres et embrassa celle d'Aphrodite.

- Ce n'est pas important. Après tout, il faut bien une première fois, un commencement. On peut décider que ce sera ici et maintenant, dans cette vie en suspens que nous tissons ensemble.

Aphrodite hocha la tête.

- C'est vrai. Si nous habitons chacun de ces jours ensemble en les vivant intensément, en nous aimant passionnément, nous marquerons suffisamment nos âmes pour qu'elles aient envie de se retrouver, un jour. Enfin, si la mienne ne brûle pas aux Enfers.

- Vivons de manière à ce que tu puisses les convaincre qu'elle vaut mieux que cela, un jour après l'autre. Je t'y aiderai.

- Merci, tu es un ange, Mu. Je suis déjà un homme meilleur grâce à toi.

- Ce n'est que le début, Alfiye. Je sais que tu as encore beaucoup à offrir autant à ce monde, qu'à moi-même.

Aphrodite posa sa tête sur l'épaule de Mu, le nez contre son cou, et celui-ci le serra contre lui avec tendresse.

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Fin du flash-back

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- Non, répondit Mu, ramenant Aphrodite au moment présent. En le fréquentant régulièrement et en apprenant à le connaître, j'ai découvert un homme différent de celui que j'avais toujours connu de loin. Oui, il a des défauts, comme tout le monde, mais aucun de ceux que je lui reprochais, auparavant. Au contraire, ceux que j'ai découvert, je peux faire avec. Tout comme il gère les miens, car j'en ai aussi. Mais surtout, sa sensibilité et ses nombreuses qualités m'ont profondément touché et en quelques semaines, l'amitié elle aussi très rapidement établie s'est muée en un amour solidement ancré. Cela répond-il à ta question, Kanon ?

- Parfaitement, merci à toi.

Le cadet des Gémeaux échangea un regard avec Aphrodite, et celui-ci hocha la tête, reconnaissant.

Il avait fini par comprendre que Kanon avait posé cette question non pour les mettre dans l'embarras, mais bien pour qu'une fois de plus, il put entendre ces mots de la part de Mu, ces mots dont il avait tant besoin pour être rassuré.

Qu'ils fussent prononcés devant tout le monde les ancraient définitivement dans la réalité.

- N'empêche, tous les deux, vous avez vraiment bien caché votre jeu, jusqu'à ces derniers temps, en tous cas ! souligna Milo en croquant quelques pistaches, l'air de rien.

- Et alors même qu'on avait remarqué que que vous étiez plus proches, ajouta Aiolia, on a mis un moment à se dire que ça pouvait être plus que de l'amitié.

- Et on s'est même pas dit ça, le corrigea Milo, pas avant ces dernières heures. On a évoqué tout à l'heure l'anniversaire de Shun, où on a commencé à avoir des soupçons. C'en étaient pas vraiment, quand on y réfléchit, je te taquinais juste sur le fait que vous sembliez vous être rapprochés. Merveilleux jeu d'acteur, au passage, le coup du "Mu, en couple avec quelqu'un comme moi, quelle hérésie !"

- Je n'ai pas employé ce terme. Et cela ne t'a a pas empêché de sérieusement l'envisager, pour pouvoir me faire une leçon dont je me serai bien passé. Aidé d'Angelo, qui plus est !

- On a simplement essayé de te convaincre que t'avais le droit d'être aimé par quelqu'un de que tu considérais trop bien pour toi, comme Angelo, moi et aussi un peu Saga, avec Aioros.

- Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? demanda le Sagittaire en haussant un sourcil, intrigué. Et surtout quelle idée saugrenue !

- Non, pas tant que ça ! intervint Angelo.

Avant de raconter leur échange de ce soir-là, dont Aphrodite s'était souvenu d'une partie plus tôt dans la soirée.

- Votre appréciation de la situation est totalement erronée, affirma Aioros. Nous ne sommes ni trop bien, ni trop purs, nous vous l'avons dit et répété mille fois. Si vous n'arrivez pas à le concevoir, partez du principe que depuis notre résurrection, les compteurs ont été remis à zéro pour tout le monde. Et personne n'a fait de mal, depuis.

- Peut-être, mais nos âmes ont gardé le souvenir de notre vie passée. On ne pourra donc pas lutter contre ce sentiment, affirma Milo.

- Tant qu'il ne vous empêche pas de vivre votre amour, je dirai que c'est le principal, intervint Aiolia. Même si ce ne doit pas être évident tous les jours.

- Non, mais nous avons tous nos fardeaux à gérer, reconnut Saga. Seulement, grâce à cet amour que nous partageons, nous avons une réelle motivation pour le faire et ne pas tout gâcher.

- C'est vrai, reconnut Aioros. Bien, Mu, reprit-il après un silence entendu, à toi de tourner la bouteille.

Le Bélier s'exécuta et le résultat fut Shura, qui choisit Action.
Il y avait eu assez de confidences pour le moment, surtout que les dernières questions étaient assez indiscrètes.

Par esprit de provocation que peu lui connaissaient, Mu lui demanda de retirer ses habits et de rester en sous-vêtements jusqu'à la fin du jeu.

Angelo lui lança un regard noir, mais ne dit rien.

Il s'installa simplement d'autorité entre les cuisses de Shura, dos contre son torse, pour le cacher le plus possible à la vue des autres.

Ce qui provoqua quelques rires et quelques soupirs d'exaspération.

- Mais on ne saura pas qui pointe la bouteille, si tu te mets comme ça ! fit remarquer Aldébaran.

- Vous aurez qu'à choisir qui vous voulez challenger entre nous deux ! contra Angelo sans bouger, ses bras autour des genoux relevés de son Capricorne.

- Tu es conscient que c'est ridicule ? soupira Aphrodite. On le voit déjà comme ça aux thermes ou à la plage…

- Mais c'est rapide et il y a la vapeur ! Et on va pas souvent à la plage ensemble.

- Nous sommes tous en couple, personne ne regardera particulièrement Shura… même si tu es très agréable à regarder, mon Shu, évidemment !

- Tu vois, Beauté, c'est exactement pour ça que je bougerai pas avant la fin du jeu ! répliqua Angelo. Et ton petit mouton savait exactement ce qu'il faisait en donnant ce gage !

- Et tu continues pourtant de l'appeler « petit mouton », fit remarquer Aphrodite en prenant la main de Mu qui souriait en coin. Je t'avais prévenu que c'était un vrai Bélier…

- Ça va, j'ai compris, merci pour la démo. Mais je le répète, je resterai-là jusqu'à la fin. Tourne la bouteille, Shurizo mio, la discussion est close.

Le Capricorne leva les yeux au plafond, mais ne protesta pas.

Entraînant Angelo avec lui, forcément, il se pencha pour relancer le jeu, puis garda ses bras autour des épaules de son compagnon grognon.

Finalement, le caprice d'Angelo n'était pas une si mauvaise chose, ils étaient très bien dans cette position.
Il pouvait le tenir et le sentir contre lui et même, discrètement, embrasser sa nuque et respirer l'odeur mêlée du tabac et de son shampoing, lorsque ses mèches hirsutes chatouillaient ses narines.

Aldébaran fut désigné pour répondre au prochain défi et il choisit « vérité ».

- As-tu besoin de notre aide pour préparer ta demande en mariage ?

Le Deuxième gardien se frotta l'arrière du crâne, un peu gêné, alors que tout le monde félicitait Shura pour sa question pertinente.

En effet, Aldébaran ne voulait déranger personne, alors il ne leur demandait jamais rien, assurant qu'il se débrouillait très bien seul. Mais ils avaient tous plus ou moins compris qu'un coup de main ne serait pas de trop, ce qu'avait confirmé Mu.

Ils ne voulaient pas s'imposer et heurter la fierté du Taureau, et c'était donc une bonne idée de se servir du jeu pour le lui faire dire.

- Alors… euh… oui, c'est vrai qu'un peu d'aide serait la bienvenue, finit-il par avouer en se frottant l'arrière du crâne. Mais je ne veux pas vous déranger…

- Enfin, Aldé, on est tellement nombreux ! répondit Mu. On peut tous faire quelque chose sans que cela ne nous pose le moindre problème d'emploi du temps. Et quand bien même, tu es notre ami.

- Je peux même t'aider tout seul, intervint Aphrodite, je suis très doué pour ce genre de chose ! Les fleurs, la déco, l'ambiance romantique, les idées, j'ai tout ce qu'il te faut ici, assura-t-il en pointant son index sur son front.

- Doucement, le wedding planner, c'est juste sa demande en mariage ! lui rappela Angelo avec un petit rire.

- Et tu ne sais pas que la demande fait partie du mariage ? répliqua le Douzième gardien. C'est la première étape, l'une des plus importantes, puisqu'elle détermine s'il y aura ou non un mariage, justement ! S'il y a bien un moment où il ne faut pas se louper, c'est bien celui-là ! T'es pas d'accord, Aiolia ?

- Si, bien sûr. Je pourrais te conseiller, si tu veux, Aldé. Je te l'avais déjà proposé plusieurs fois.

- Je sais bien, merci ,Aiolia. Je ne voulais pas t'embêter avec ça.

- Idiot, ça ne me dérange pas du tout, assura-t-il en le poussant du coude, car ils étaient côte à côte dans le cercle.

- En plus, il sera content de te parler de sa propre demande à Marine, il est tellement fier de lui ! ajouta Milo face à eux.

- On est pas au courant, nous, ça s'est passé comment ? voulut savoir Kanon.

- Ce n'est pas à mon tour de répondre, éluda Aiolia en prenant la bouteille pour la tendre à Aldébaran.

- Bah alors, on croyait que t'étais fier de ça ! le taquina Angelo.

- Je suis fier de l'avoir fait, que ça se soit passé exactement comme prévu et qu'elle ait dit oui. Le reste nous appartient. J'accepte de le partager avec Aldé pour l'aider, c'est tout.

- Tu l'as raconté à Milo ! protesta le cadet des Gémeaux. Et je suis sûr qu'Aioros aussi est au courant... donc Saga ! Et sûrement Shaina, pour les détails que seule une meilleure amie connaît.

- Évidemment, ils m'ont aidé à tout préparer. Mais si j'avais voulu que tout le monde soit au courant, j'aurais fait ma demande devant vous.

- T'as fait ça où, d'ailleurs ? demanda Shura. On peut au moins savoir ça ?

Aiolia soupira, puis un sourire éclaira son visage.

- Sur la plage, au niveau de la deuxième crique.

- C'est pas la plus belle, fit remarquer Kanon.

- Pour nous, si, car c'est là que j'ai vu son visage pour la première fois.

Des « oooh » s'élevèrent.

- Alors là, tu ne peux pas ne pas vous raconter ce moment-là ! s'enthousiasma Aphrodite. Ce devait être incroyable ! Marine est tellement jolie, son visage est si doux ! Tu as dû complètement fondre… S'il-te-plaît, Aiolia, dis-nous, fais-nous rêver !

Aphrodite n'étant pas le seul à lui demander, le Lion finit par céder.

- D'accord, d'accord…

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Flash-back

Domaine sacré
Une crique sur la plage
Peu de temps avant le début de la Guerre Sainte

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- Marine.

La jeune Chevalier d'Argent sursauta, se reprit et voulut saisir son masque qu'elle avait posé à côté pour le remettre sur son visage.

Mais il n'était plus là.

Marine n'avait perçu aucun mouvement, ni même le cosmos familier qui se dévoilait enfin à ses sens.
Elle put ainsi sentir la présence du Chevalier du Lion qui s'immobilisa juste derrière elle.

Et son parfum aux notes acidulées et boisées parfaitement équilibrées l'enveloppa totalement, faisant s'accélérer les battements de son cœur.

- Je me suis permis de te l'emprunter.

- Je ne vois pas ce que tu pourrais faire avec, répliqua-t-elle en baissant le plus possible la tête pour cacher son visage. Rends-le-moi, je te prie, Aiolia.

- Je vais le faire, ne t'en fais pas. Mais avant, je suis venu te demander de me regarder dans les yeux. Tu veux bien te lever et me faire face, Marine, s'il-te-plaît ?

- Je ne peux pas, tu connais la règle.

- Si tu le fais, tu devras me tuer ou m'aimer. Je préférerai que tu tombes amoureuse de moi. Mais si tu t'en sens incapable, alors dans ce cas, je préfère mourir : je te laisserai me tuer et m'arracher à ce monde qui n'aura alors plus de sens.

- Mais qu'est-ce que tu racontes, Aiolia ? Tu es un Chevalier d'Or, protecteur d'Athéna et Gardien de la Cinquième Maison du Lion. Tel est le sens de ta vie, tu es né pour cela.

- Pas sans toi à mes côtés.

- Ne te moque pas de moi, je t'en prie ! lui demanda-t-elle en secouant ses belles boucles auburn, ses mains cachant son visage, à présent. Ce n'est vraiment pas le moment ! Et rends-moi mon masque, c'est ridicule de se parler ainsi !

Le jeune homme posa sa main sur l'épaule de son amie.

- Tu as raison, l'heure est grave. Nous sommes à l'aube d'une grande bataille, Marine, tous les signes sont là. Celle pour laquelle la Déesse Athéna nous a fait naître, tu as raison. Maintenant que l'honneur de mon frère Aioros a été rétabli, je suis prêt à mourir. Mais je ne veux pas me lancer dans cette ultime bataille avec des regrets. Si je dois périr, je voudrais avoir vu au moins une fois le visage de celle que j'aime, avant.

- Tu… es sérieux ? murmura-t-elle après un court silence.

- Qu'Athéna et tous les Dieux de l'Olympe soient témoins que je le suis.

- Et si… je ne te plaisais pas ?

- Je n'ai pas besoin de voir ton visage pour savoir que tu es magnifique. Parce que tu l'es intérieurement. Oui, Marine de l'Aigle, tu es déjà l'une des plus belles personnes que je connaisse, en ce monde, à mes yeux.

- Alors, tu n'as pas besoin de voir mon visage. Rends-moi mon masque.

- Si, il le faut, j'ai besoin qu'on se regarde dans les yeux. Accorde-moi cette faveur, je t'en prie. Ce sera peut-être la dernière chose que je te demanderai, dans cette vie.

Marine ne fit aucun mouvement pendant une dizaine de secondes, peut-être, qui parurent une éternité à Aiolia.
Puis, elle ôta les mains de son visage et se leva.

- Tu es sûr de toi, Aiolia ?

- J'aime quand tu prononces mon nom, il y a tant de douceur dans ta voix. Je suis certain que la mlême brille dans tes yeux. Tourne-toi, à présent, s'il-te-plaît, et regarde-moi.

Lentement, Marine s'exécuta.
Mais son regard restait baissé.

C'était impossible le de le regarder sans son masque, elle osait à peine le faire.
Elle l'aimait et l'admirait depuis tant d'années !

Aiolia sourit et posa sa main sur sa joue, aussi rouge que sa tenue d'entraînement, puis chercha ses yeux et les verrouilla aux siens.

- Je ne pouvais qu'avoir raison.

- Idiot prétentieux ! lui dit-elle en retrouvant sa morgue habituelle.

- Quelle moue adorable...

Elle lui donna un coup de poing sur l'épaule et il saisit sa main, qu'il garda précieusement dans la sienne, leurs doigts s'entremêlant naturellement.

Ils échangèrent un long regard, indifférents au monde qui les entourait, au fracas des vagues qui venaient s'écraser sur les rochers autour, les oiseaux qui criaient au-dessus d'eux à la recherche de nourriture...

Il n'y avait plus qu'eux et cet instant suspendu dans le temps, cette pause dans le cours tragique de l'Histoire qui s'écoulait inexorablement.

- Alors, Chevalier de l'Aigle, finit par murmurer le Lion, que décides-tu ? Pour le temps qui nous sera accordé, souhaites-tu me tuer ou m'aimer ?

- Tu le sais déjà, non ? répondit-elle sur le même ton bas. Je ne peux pas te tuer, Aiolia, Chevalier du Lion.

- Alors, tu dois m'aimer.

- Je n'ai jamais eu besoin de règle pour cela.

Le sourire d'Aiolia s'agrandît, alors qu'il réduisait encore la distance entre eux.

- Tu sais, en vérité, voir ton visage n'était en effet pas si important. C'était un prétexte pour t'enlever ton masque. Ce que je voulais surtout faire, c'est cela… expliqua-t-il en comblant le faire écart qui les séparait encore pour poser ses lèvres sur les siennes.

Il ne leur restait que peu de temps avant le branle-bas de combat.
Mais ce temps-là n'appartenait qu'à eux.
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Fin du flash-back

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- C'est tellement romantique, le premier regard droit dans les yeux, le premier baiser, la première union charnelle, aussi, sûrement ! soupira Aphrodite. Et intelligent !

- C'est un beau détournement de mineur, ouais ! Ma ahi !

Inévitablement, Angelo s'était pris un tacle de Shura, un coup de poing d'Aphrodite, un lancer de différents objets de la part de certains autres.

- C'est bon, je rigole !

- Pour ta gouverne, le Crabe, et bien que je n'aie pas à le préciser, sache que Marine et moi avons attendu symboliquement ses dix-huit ans pour notre première fois.

- Quoi, tu vas me dire que t'as été sage pendant presque deux ans ? s'étonna Aphrodite.

- Un an et demi, oui. Et sage est un bien grand mot. Mais vous aurez compris, pas besoin d'entrer dans les détails, ni de faire un dessin !

- Mais t'es un vrai tombeur, le Chaton, ricana Angelo. Je comprends que tu rendais fou les mecs et les nanas, avant. !

- Un tombeur gentleman, précisa Shura.

- J'te reconnais un certain talent ! ajouta encore le Cancer.

- Tu peux, répondit crânement le Lion, en une parfaite représentation de son signe zodiacal. C'est pour ça, Aldé, que tu ne dois pas hésiter à venir me trouver, conclut-il.

- Ou n'importe lequel d'entre nous, ajouta Saga. Même si certains paraissent plus doués que d'autres, visiblement, taquina-t-il Aiolia, qui lui sourit.

- Merci à tous, répondit le Taureau, touché. Je le ferai, promis.

Certains levèrent leur verre ou leur bouteille pour saluer cette résolution.
Celle qui était au centre repartit pour un tour.

Aldébaran demanda « innocemment » à Aioros ce qu'il aimait le plus faire à Saga, surprenant un peu l'assemblée par sa question osée.

Mais une fois que le Sagittaire eut répondu – après qu'Aiolia se fût suffisamment éloigné et bouché les oreilles pour ne surtout rien entendre, et il eut clairement la meilleure idée du siècle au vu de la réaction choquée et des visages rougissants des autres - il précisa qu'il avait plutôt pensé la question d'un point de vue culinaire : que préférait-il lui faire… à manger ?

Cela provoqua hilarité et sifflements car personne n'était dupe, le Taureau n'était pas si innocent et naïf qu'il voulait bien le faire croire. Il savait parfaitement ce qu'il faisait en posant cette question sans plus de précisions, en la coupant volontairement pour créer l'ambiguïté.

Le goulot pointa ensuite sur Saga après le lancer d'Aioros, qui choisit de dire une vérité.

- Pas de triche, les amoureux, interdit de vous mettre d'accord par télépathie ! rappela Aiolia.

Les deux aînés hochèrent la tête, avant de se regarder.

Saga avait toute confiance en Aioros, et celui-ci savait qu'il pouvait tout demander à son Gémeau, car il avait décidé d'être totalement transparent avec ses cadets.

Mais il voulait profiter de cette occasion pour révéler à leurs camarades et frères d'armes un pan de l'histoire récente de Saga qui, d'après lui, était important à connaître.

Il prit sa main qui reposait sur sa cuisse et la serra tendrement.

- Il y a bientôt deux ans maintenant, mon aimé, tu as entrepris la traversée des Douze maisons comme un chemin de croix, discutant et surtout t'excusant auprès de chacun de nous. Nous avons tous plus ou moins échangé sur ce sujet, depuis, nous savons à peu près ce que tu as dit aux uns, aux autres. Mais je suis le seul à connaître la fin de ton parcours. Raconte-le, s'il-te-plaît, je pense qu'il est important pour chacun de savoir cette vérité.

- Cela vous intéresse vraiment ? demanda Saga en embrassant le cercle autour de lui du regard. Personne ne m'a jamais posé de questions à ce sujet.

Tout le monde acquiesça d'un hochement de tête ou bien verbalement, ou les deux.

- C'était par égard et pudeur envers toi, expliqua Mu. Mais nous sommes plusieurs à nous être interrogés, en effet.

- Très bien, dans ce cas…

Il changea de position pour se mettre en tailleur, ramenant sa main enlacée à celle d'Aioros sur ses cuisses, et but une gorgée de son verre de vin, avant de commencer son récit.

- Après avoir quitté Aphrodite et le Douzième temple, je me suis donc rendu au Treizième. Lorsque je suis arrivé à la Salle du trône, elle était vide, mais le rideau au fond était ouvert et je sentais le cosmos d'Athéna qui m'appelait, qui m'attendait. J'ai donc poursuivi ma route jusqu'à son autel. Elle se tenait effectivement là, majestueuse, à l'endroit exact où je suis mort et où Elle-même s'est donnée la mort de ma main pour s'ouvrir le passage vers les Enfers. Cela a été très éprouvant de me retrouver à cet endroit précis.

- On imagine bien, murmura Shura, le menton posé sur l'épaule d'Angelo, lui-même lourdement appuyé en arrière contre lui.

- Surtout que tu venais déjà de traverser les Douze maisons avec tout ce que cela impliquait, ajouta Camus, qui avait lui-même la tête de Milo sur son épaule et a main dans la sienne.

- En effet. Mais Athéna n'a été que bonté et amour, ce qui fut pour moi, à ce moment-là, aussi réconfortant que douloureux. J'avais déjà été éprouvé par toute la bienveillance et la compréhension que vous m'aviez tous témoigné…

Aiolia se racla la gorge.

- Tu as accepté de m'écouter, tu ne m'as pas chassé ni évité, c'était déjà beaucoup, à ce moment-là.

- Certes. Et je t'en ai bien plus voulu du traitement infligé à mon frère, par la suite... Mais passons, excuse-moi de t'avoir interrompu. Continue, je t'en prie.

Saga hocha la tête.

- Dans cet état émotionnel déjà bien fragilisé, face à Notre Déesse, je n'ai pu que m'effondrer à ses pieds. Elle m'a alors immédiatement entouré de ses bras et aux creux de ceux-ci, j'ai pleuré tel un enfant. Les mots d'excuses et les serments se bousculaient sur mes lèvres, pour Elle, pour chacun de vous, le passé, l'avenir, ce que j'avais fait, ce que j'aurais dû faire, ce que je n'avais pas été capable de faire… Ce, jusqu'à ce que je sois suffisamment apaisé par Son cosmos, ses mots et Sa chaleur pour pouvoir me reprendre. Nous avons encore échangé un petit temps, puis, m'étant suffisamment ressaisi, j'ai pu me relever et poursuivre ma route à Sa demande. Et j'ai gagné le Mont Étoilé où m'attendait Shion.

- Comment ? s'étonna Milo en redressant la tête sous la surprise. Tu veux dire que…

- Oui. De la même façon qu'Athéna s'était symboliquement tenue au pied de Son autel où son sang et le mien avaient été versés, Shion m'attendait à l'endroit exact où je l'avais…

La main d'Aioros, qui tenait toujours celle de Saga sur sa cuisse, la pressa avec plus de force, suffisamment pour le faire réagir, aussi, le Gémeau se tourna-t-il vers lui, avant de lui sourire brièvement et de poursuivre en se corrigeant.

- Où le Lémure lui avait ôté la vie.

- C'est hautement symbolique, fit remarquer Camus. Et d'une certaine façon, très courageux de sa part.

- En effet, acquiesça Saga. D'autant plus qu'il me tournait le dos, quand je suis arrivé et m'a salué sans bouger. Comme on ne tourne jamais le dos à un ennemi, c'était là une preuve de confiance supplémentaire qui m'a à nouveau mis à terre et fait fondre en larmes. Alors, seulement, il m'a fait face et m'a rejoint de son pas lent et mesuré, majestueux dans sa tenue de Grand pope mais sans son casque, souriant et ses yeux doux et sans âge posés avec amour, compassion et confiance sur moi. C'était bouleversant.

- J'en ai la chair de poule, frissonna effectivement Aphrodite en se collant à Mu à ses côtés, qui lui prit la main, lui aussi profondément touché.

- Maître Shion est un être exceptionnel, intervint-il d'ailleurs, la voix vibrante d'émotion et de fierté.

- Faut au moins ça pour avoir été Grand Pope à dix-huit ans et pendant plus de 200 ans, ajouta Angelo.

- Et il a rebâti le Domaine à lui seul, rappela Aldébaran.

- Lui aussi t'a pris dans ses bras ? demanda Aiolia, impatient de connaître la suite.

Saga reprit une gorgée de vin, puis sourit.

- Non. Il m'a tendu la main pour me faire me relever, et une fois debout face à lui, il a posé sa main sur mon épaule et m'a simplement dit ces quelques mots que je n'oublierai jamais : « Saga, mon enfant, voici Star Hill, le Mont Étoilé. C'est ici qu'un jour, peut-être, toi aussi, tu viendras lire le Destin du monde et de tes camarades dans les étoiles, pour pouvoir les guider, pour l'amour d'Athéna. »

- Comme si tu ne t'y étais jamais rendu, commenta Shura.

- Et de fait, c'était bien le cas, appuya Aioros.

- Oui, confirma Saga. Enfin, j'étais encore un peu là, à ce moment-là, c'est ce meurtre qui m'a fait basculer complètement. Face à l'horreur et l'ignominie de cet acte sacrilège, mon esprit s'est complètement et violemment rétracté, et le Lémure en a profité pour asseoir définitivement son ascendance sur moi. Puis, quand il s'en est pris à toi, poursuivit-il en se tournant vers Aioros, la voix soudain chargée d'une immense douleur qui toucha tout le monde, que je n'ai pas réussi à totalement l'empêcher de te blesser mortellement, j'ai perdu toute raison de vivre et de me battre.

Aioros embrassa la tempe de Saga pour le soutenir, il savait que ce n'était pas évident pour lui de revenir sur cet épisode tragique de leur histoire.

- Ce n'est pas tout à fait vrai, intervint Mu avec douceur. Tu es resté pour tous nous protéger, Saga. Même moi qui m'étais réfugié à Jamir. Quand Deathmask y a été envoyé par le Lémure, c'était pour tuer Shiryu, pas moi, alors même que j'avais été déclaré ennemi du Sanctuaire.

- Moi, ajouta Aldébaran, j'ai pu lui rendre visite sans jamais avoir été inquiété, même s'il était soi-disant un ennemi. Et tu m'as aussi souvent envoyé au Brésil. J'ai su que c'était toi et pas le Lémure qui m'avait tenu éloigné du Sanctuaire, bien après.

- On a tous des exemples d'actions ou de décisions qui nous ont préservé ou sauvé, assura Aphrodite à son tour. Je n'en évoquerai aucun, mais je suis probablement de ceux à qui tu as évité le pire. J'aurais pu mourir, dans ce Temple et pas qu'une fois.

- J'aurais voulu faire tellement plus, pour chacun de vous. Surtout pour toi, Aiolia.

- Je sais, répondit le Lion. Tu as fait de ton mieux, Saga, et personne d'autre que toi n'aurait pu le faire et tenir si longtemps. J'ai mis le temps à le reconnaître et l'accepter. Mais sans toi, la situation aurait pu être bien pire. Elle l'aurait sûrement été et pas que pour moi, d'ailleurs.

- Assurément, appuya Shura, et d'autres avec lui.

- Alors merci, Saga.

Là aussi, Aiolia parla pour tout le monde, et chacun y alla de son mot, de son hochement de tête et la reconnaissance brillait dans tous les regards.

Saga était toujours aussi peu à l'aise avec les remerciements, surtout lorsqu'ils concernaient cette période.
Aussi, hocha-t-il simplement la tête.

Aioros saisit la bouteille et la lui tendit pour que le jeu reprit et pour passer à autre chose, permettant ainsi à son Gémeau de reprendre contenance.
Saga referma ses doigts sur le verre qui était bien chaud, à force d'être manipulé, et après avoir remercié son si précieux compagnon, il la fit tourner.

Elle s'arrêta sur Aphrodite, qui mit au défi Saga de lui donner un gage embarrassant.
Il le provoqua un peu trop, l'interdisant presque de le ménager et d'être gentil avec lui.

Et ainsi, il se retrouva à devoir supporter durant trois tours d'avoir un œuf cru cassé sur sa tête, qui dégoulinait dans ses cheveux et l'écœurait au plus haut point.

Sa magnifique chevelure était sa plus grande fierté, avec son visage, c'était aussi embarrassant que difficile, pour lui, d'offrir un tel spectacle.

D'autant plus qu'Angelo et Shura s'amusaient à le taquiner en le poussant pour que la masse gluante et gélatineuse se répandit un peu plus d'un côté ou de l'autre.

Fort heureusement, Mu veillait au grain et parvenait le plus souvent à bloquer leur mouvement avant de les voir atteindre leur but.

Mais lorsqu'ils y arrivaient, notamment Angelo qui parvenait, avec sa télékinésie, à faire bouger les mèches engluées, ils récoltaient au passage les pires malédictions toujours plus imagées du Douzième gardien, outré par ce traitement.

Au troisième tour, il n'attendit pas la réponse de Milo qui avait été désigné et fila à la vitesse de la lumière chez lui pour se laver les cheveux.
Mu n'avait même pas eu le temps de lui proposer de le téléporter directement dans sa salle de bains…

Il ne revint que vingt minutes plus tard, ses mèches encore humides répandant un délicieux parfum de fleurs dans la pièce qui en avait bien besoin, même si les fenêtres et la terrasse étaient ouvertes sur l'air frais de la nuit.

A peine se fut-il rassis que la bouteille le pointa.
Encore fort mari de son précédent gage, il préféra opter pour dire une vérité.

- Dis quelque chose que tu n'as jamais dit à quelqu'un, ici.

- C'est une action et une vérité en même temps que tu me donnes, Shaka, protesta Aphrodite. Mais bon… c'est l'occasion, en effet. Car oui, il y a bien une chose que je n'ai pas fait, à laquelle j'ai pensé souvent, mais je ne sais pas, je n'ai pas trouvé le bon moment, je ne voulais pas être indélicat non plus… Aiolia, reprit-il après un court silence en regardant son cadet, je te dois des excuses.

- Pour Aioros ? s'étonna le Lion. C'est déjà fait, depuis longtemps et même si je les ai acceptés avec difficulté, cela fait un moment que je ne vous en veux vraiment plus, à tous les trois.

Aphrodite se tripota nerveusement les mains, jusqu'à ce que Mu les lui prit entre les siennes.
Il le remercia d'un regard et d'un sourire, avant de refaire face à Aiolia.

- Il n'y a pas que pour cela. En vérité, Angelo et moi, nous vous devons des excuses, Aldébaran, Shaka, Milo et Camus, aussi. Nous n'avons pas été là pour vous, mais pire encore, nous avons été très durs et injustes, surtout avec toi, Aiolia. On ne s'est jamais vraiment excusé pour cela.

- On l'a fait, nuança Angelo, mais peut-être pas de la bonne façon. Je dis pas que c'était pas sincère… Mais c'est vrai qu'on a fait ça un peu à la cantonade, ´Dite a raison. On aurait dû vous prendre chacun entre quatre yeux, comme Saga a eu le courage de le faire. J'l'ai fait qu'avec toi, Mu mais avec toi, le Chaton, c'était pas complet. Vous méritiez tous que je vous laisse me cracher dessus ou me frapper, ou juste me dire ce que vous aviez sur le cœur. Vous m'avez accepté et pardonné sans que j'ai réellement eu à faire quoi que ce soit…

- On s'en est remis à la Déesse Athéna qui t'a accordé Son pardon et Sa confiance, répondit Milo. Tu as su gagner les nôtres au fil du temps, par tes actions et ton comportement. Il en va de même pour toi, Aphrodite.

- Ce n'était pas évident, au début, ajouta Shaka. Mais s'accrocher à sa colère, c'est comme boire du poison et attendre que l'objet de notre ire ne meure.

- Ok, Little Bouddha, mais mes valises étaient quand même bien conséquentes, rappela Angelo en grimaçant.

- C'étaient celles de Deathmask, répliqua Aioros.

- Et cet homme est resté aux Enfers, compléta Saga.

- Ce n'était déjà plus lui, devant le Mur des Lamentations, assura à son tour Milo.

- Et il ne reviendra jamais, affirma Shura avec force et détermination.

- Ça non, plutôt crever ! assura Angelo. Enfin bref, merci à tous. Et pardon, Beauté, je me suis incrusté dans ton tour et dans tes excuses.

- Aucun problème. J'avais quasiment fini, de toute façon. Pardon à vous tous pour n'avoir pas été à la hauteur et pour le mal que nous avons fait, directement ou non, et pardon, Aiolia, de nous être parfois acharnés sur toi.

- C'est vrai que j'ai apprécié le fait que vous soyez venus très tôt, tous les trois, vous excuser d'avoir attaqué et… achevé mon frère, cette nuit-là, déjà blessé à mort par le Lémure. Tu t'es senti longtemps coupable, Shura, envers Aioros, envers moi et envers Saga, d'avoir porté le coup final.

- A raison, car je l'ai poursuivi sans relâche et l'ai achevé.

- A tort, le contra fermement Aiolia. Tu avais dix ans, tu obéissais aux ordres en exécutant la Justice pour laquelle tu t'étais engagé et tu étais Destiné. Fin de l'histoire. Mais je n'avais effectivement jamais eu droit à des excuses pour l'enfer que vous m'avez fait subir en me collant cette étiquette de « frère du traître », en montant les gardes contre moi toutes ces années, en distillant méfiance et doutes à mon sujet auprès de tout le monde. Quelque part, ça m'a rendu plus fort, même si je suis sûr que je l'aurais été, d'une façon ou d'une autre, que ce soit dans les brimades ou en ne perdant pas mon grand frère que j'aimais plus que tout au monde. Mais rassurez-vous, en acceptant de vous pardonner pour Aioros, j'avais déjà accepté tout le reste, aussi.

Angelo, Aphrodite et Shura le remercièrent une nouvelle fois.

Mu prit la bouteille pour la confier à Aphrodite.

- C'est à toi, Alfiye.

- Oui, merci…

Il prit le temps de boire un peu dans son verre, car il avait la gorge légèrement nouée, lui aussi, puis fit tournoyer la bouteille qui pointa Kanon.

- Vérité, choisit le cadet des Gémeaux.

- Ça tombe très bien, j'ai une question pour toi, Monsieur je fais tourner la tête aux Dieux.

- Je t'écoute, Aphrodite, répondit-il entre sourire et grimace.

Il fallait s'attendre à tout de la part du Poissons, et la manière dont il l'avait appelé laissait présager le pire.

- Est-ce que… non, si je formule comme ça, tu vas esquiver... As-tu eu une aventure avec Julian Solo, peu après notre retour à la vie ?

Kanon se détendit, cela aurait pu être bien pire.

- « Aventure » est un bien grand mot.

- Tu ne sortais pas avec lui ? s'étonna Aiolia. Il traînait pas mal dans le coin, à un moment donné, en te cherchant précisément dès qu'il avait fini de saluer Athéna et le Grand pope.

- Je pensais aussi que tu l'avais quitté pour Rhadamanthe, ajouta Shura.

Le cadet des Gémeaux secoua la tête de manière négative.

- Nous avons simplement passé une nuit ou deux, ensemble.

- Il était toujours après toi, c'est surprenant qu'il se soit contenté de cela, fit remarquer Mu à son tour. Même en essuyant un refus de ta part, il n'est pas du genre à abandonner.

Des murmures d'approbation parcoururent le groupe.

- Me dis pas que t'as pas assuré au pieu, ricana Angelo.

- Est-ce que c'est même envisageable ? répliqua Kanon, sans vantardise, mais avec assurance et surtout, très sérieusement. Non, c'est simplement qu'Athéna est intervenue.

La surprise fut générale à cette annonce.
Seuls Saga, Aioros et Milo connaissaient l'histoire.

- Tu accepterais de nous raconter ? demanda Shura.

Kanon hocha la tête.

- Julian m'a invité assez rapidement après notre retour, alors même que je n'étais pas encore totalement remis. J'en ai immédiatement référé à Athéna. Ma position ici n'était pas vraiment affirmée, certains de vous se méfiaient encore de moi. Être contacté par l'incarnation de Poséidon ne pouvait rien donner de bon, si je gardais cela secret.

- Tu l'as pourtant fait.

- Auprès de vous, Camus, mais Athéna et Shion ont été mis immédiatement au courant, comme je viens de le dire, se défendit Kanon calmement. Notre Déesse a tout d'abord mis les choses au clair avec Poséidon : Il devait passer par Elle avant de contacter n'importe lequel de Ses Chevaliers. Il s'est défendu en prétextant que c'était une demande de Julian et que Lui dormait, à ce moment-là.

- Mais bien sûr… grimaça Saga.

- Puis, poursuivit Kanon après un échange de regard entendu avec son frère, Elle m'a permis de le rencontrer, si je le souhaitais. C'était effectivement le cas. Il était très insistant, d'une part, et je ne voulais pas qu'il cause de trouble au Domaine, et d'autre part, je voulais entendre ce qu'il avait à me dire, connaître ses intentions envers moi, ou le Domaine.

- Ce ne sont pas les seules raisons, Kanon, intervint Saga.

Son cadet soupira.

- Je voulais aussi pouvoir subir son châtiment, si Poséidon l'exigeait.

- Mais ce qu'il voulait, c'était coucher avec toi.

- Oui, Aphrodite.

- N'y avait-il pas les deux ? demanda Shaka, intrigué par la démarche de l'incarnation de Poséidon. Coucher avec toi par désir, mais aussi, comme une forme de punition par soumission ?

- En effet, tu as vu juste, comme toujours. Poséidon voulait certes m'humilier et me dominer, comme une revanche pour l'avoir manipulé, et le sexe est le meilleur moyen de le faire. Enfin, le seul à sa disposition, dans son état d'éveil et de mi- scellement actuel. Mais Julian avait un réel intérêt pour moi. Il voulait qu'on se fréquente plus assidûment, même sans être dans une relation exclusive, il voulait aussi qu'on sorte, qu'on partage des moments ensemble, car il disait aimer ma compagnie.

- Tu étais prêt à accepter ? demanda Aphrodite.

- Oui, mais pour de mauvaises raisons. C'est pour cela qu'Athéna est intervenue pour mettre fin à cette situation.

- De mauvaises raisons ? releva Mu.

Kanon serra les poings.

- Pour expier ses fautes, répondit Saga à sa place.

- Je comprends qu'Athéna soit intervenue. Tu n'avais pas à subir cela, affirma Aioros, en aucune façon.

- Tu avais encaissé mon attaque avec force et courage, Kanon, les quinze coups et l'Antarès, tu t'es brillamment battu et sacrifié pour Athéna, aux Enfers, tu étais présent, devant le Mur des Lamentations, renforçant le pouvoir de nos cosmos liés, rappela Milo. Tes fautes avaient déjà été expiées, tu faisais partie des nôtres. Sans compter le pardon d'Athéna, le plus précieux d'entre tous.

- Auprès de vous et d'Athéna, oui, mais non auprès du Dieu que j'ai manipulé, ni de ses Marinas que j'ai trahis et dont beaucoup y ont laissé la vie.

- Poséidon a joué sur cette culpabilité et son repentir, poursuivit Saga. Mais Athéna a mis un terme au manège du Dieu des Océans qui se délectait de cette situation. Il n'y a pas eu de troisième rendez-vous pour Kanon et Poséidon, et c'est pour le mieux.

- Mais j'ai revu Julian, encore quelques fois, tint à révéler Kanon. Avec l'accord d'Athéna et de Shion, toujours à son initiative et en toute amitié. Enfin, on flirtait un peu, sans aller trop loin. Pour être honnête, je voulais me sortir Rhadamanthe de la tête, je pensais trop à lui et à ce moment-là, je croyais ne jamais le recroiser.

- C'était sans compter le Destin.

- Oui, mon frère.

- En même temps, votre rencontre aux Enfers, c'était quelque chose, se souvint Aiolia. Même si on était en pleine guerre, on a ressenti ton cosmos brûler comme jamais.

- C'était un peu le but de la manœuvre, rappela Kanon. C'était le seul moyen d'emporter Rhadamanthe avec moi et de le vaincre sans armure, il ne devait pas pouvoir vous rejoindre devant le Mur des Lamentations pour tenter de vous arrêter.

- Fais pas le malin, Nono, le reprit Milo en riant, on ne parle pas que de votre dernier… corps-à-corps orgasmique vers le firmament. Y a eu des étincelles dès le début.

- Tu dis ça parce que je te l'ai raconté, et que t'en as parlé à Aiolia.

- Si je peux me permettre, intervint Shaka, j'ai aussi perçu un embrasement dont je n'étais pas certain de pouvoir comprendre le sens, alors. Je me suis furtivement demandé quel genre de combat pouvait causer une telle excitation au cadet des Gémeaux, mais j'ai préféré me concentrer sur ma recherche de Notre Déesse.

- Voilà, merci Shaka ! s'enthousiasma le Scorpion.

- Oui, merci beaucoup, Shaka, grimaça Kanon. Je ne t'imaginais pas si prompt à poignarder tes aînés dans le dos…

- Je n'aspire qu'à la vérité, se défendit le Sixième gardien avec son air faussement innocent qui fit rire ses camarades. C'est la règle de conduite qui a prévalu tout le temps de mon anniversaire, et qui a encore cours. C'est pour cela que nous avons choisi ce jeu, également, Kanon.

- Tu t'en sors bien, comme toujours ! Enfin bref, pour en revenir à Julian et conclure, je ne sentais même plus l'esprit de Poséidon, quand j'étais avec lui, et je l'appréciais vraiment, je vous l'avoue sans détour. Les premiers temps ici, je me sentais un peu seul et je pouvais me confier à lui. C'était un peu tendu avec Saga, on était un peu maladroit plus que rancuniers, et je n'avais jamais vraiment vécu ici au grand jour, je n'avais pas de liens avec vous, encore, hormis Milo. Le Royaume sous-marin avait été ma maison pendant treize ans. Même si je n'aimais pas celui que j'étais alors, j'adorais l'Océan et ça me manquait.

- C'est pour ça que tu étais souvent sur la plage.

- Oui, Mu. Le calme des abysses est à nul autre pareil. Le Domaine est une véritable fourmilière, et c'était d'autant plus le cas au début, avec les travaux et les réaménagements. Mais heureusement, ce mal-être n'a pas duré, grâce à Milo, notamment, à notre lien gémellaire avec Saga, qui se retissait parfois presque malgré nous. Puis, à chacun d'entre vous qui m'avez progressivement accepté et fait une place. Je l'ai remarqué notamment à la manière dont vous avez réagi à l'annonce de ma relation avec Rhadamanthe, quelques mois seulement après notre retour à la vie. Ce n'était pas évident pour tous, mais vous avez été ouverts et tolérants, à aucun moment méfiant, en tous cas pas à mon égard. Vous nous avez donné notre chance. Et vous avez accueilli Rhadamanthe, ne manquant jamais de l'inviter quand je le suis moi-même... A deux exceptions près.

- Je suis désolé, je t'adore, Kanon, mais entre le faire à contrecœur et m'abstenir, j'ai fait le choix de l'honnêteté, pour cette nouvelle vie, s'excusa Aphrodite.

- Pareil, intervint Angelo entre deux gorgées de bière.

- Sachant qu'il refuserait de toute façon, on pourrait très bien quand même l'inviter, pour te faire plaisir, et pour la symbolique, mais ce serait hypocrite.

- Et risqué ! j'le vois bien, par défi et pour nous emmerder, accepter l'invitation.

- Il en est en effet parfaitement capable, concéda Kanon. Enfin bref, voilà toute l'histoire.

- Désolé que t'aies eu à subir ça de la part de Poséidon, lui dit Aldébaran avec sollicitude.

- Ouais, c'est vraiment moche, ajouta Angelo.

D'autres acquiescèrent.

- Merci à vous. C'est de l'histoire ancienne, et cela n'a pas duré longtemps, fort heureusement. Laissons cela au passé. A moi de tourner la bouteille.

Shaka fut désigné et il opta prudemment pour dire une vérité.

- Détendons un peu l'atmosphère. Shaka, tu as forcément une anecdote drôle ou surprenante sur un de tes rendez-vous à l'extérieur, que tu accepterais de nous partager.

Le Sixième gardien réfléchit.

- J'ai toujours choisi mes partenaires de sorte à n'avoir jamais de surprise. Cependant, je me souviens d'un homme rencontré dans un bar…

- Ça commence souvent comme ça…

- Chut, Angie ! le coupa Aphrodite.

- Désolé, Little Bouddha, continue.

- C'était un bar d'hôtel, je préfère ce genre d'établissement que je trouve plus sûr. et mieux fréquenté.

- Et plus pratique.

Aphrodite frappa encore Angelo, qui s'excusa.

- Certes, approuva cependant Shaka. Nous nous sommes décidés à monter dans la chambre, après avoir discuté et et ayant pu, ainsi, procédé à mes vérifications d'usage. Nous nous sommes déshabillés pour prendre une douche et c'est alors que j'ai été surpris. En plus de ses vêtements, cet homme a retiré de nombreux accessoires.

- Des accessoires ? répéta le Scorpion. De quel genre ?

- A ton avis, Milo ? soupira Aphrodite. Dans ce contexte, ce ne pouvait être que sexuel !

- En effet, confirma Shaka. Je n'en ferai pas la liste, mais ils étaient nombreux, sur son corps et à l'intérieur.

Cette précision en fit grimacer certains, rires d'autres.

- Tu t'es sauvé ? demanda Angelo avec un petit rire.

- J'ai hésité à partir, en effet. A l'évidence, cet homme était très insatisfait, continuellement en recherche de plus de plaisir encore. Je ne voulais pas en rajouter.

- Comment ça, Shaka, tu pensais ne pas pouvoir le satisfaire ? s'étonna Aphrodite.

- Au contraire. Et sachant que je ne passe jamais plus d'une nuit avec le même partenaire, il n'aurait alors plus jamais eu accès au plaisir que je lui aurais donné. Son insatisfaction et sa frustration auraient donc encore augmenté après une nuit avec moi.

Il n'y avait ni vantardise, ni fanfaronnade dans le ton de Shaka, c'était un simple énoncé d'une réalité, d'une évidence à laquelle on ne pouvait que croire.
Ses frères d'armes étaient pour beaucoup estomaqués, bouché bée, impressionnés par l'incroyable confiance en lui de Shaka.

Il donnait presque envie de passer la nuit avec lui rien que pour connaître ce plaisir qu'il disait donner avec une telle assurance, de manière tout à fait naturelle, comme il parlerait d'un simple phénomène météorologique.

- Okay, play boy bourreau des cœurs, reprit Angelo avec un autre petit rire, ça s'est fini comment, cette histoire ? Tu lui as donné l'orgasme de sa vie avant de le laisser retourner à ses jouets ou… ?

- J'ai effectivement passé quelques heures avec lui. D'une part, beaucoup de mes partenaires d'une nuit étaient sûrement déjà dans sa situation, je ne pouvais pas non plus me préoccuper de tout le monde. Ma principale règle était le détachement total. Et d'autre part, s'il devait mourir le lendemain pour une raison ou une autre, il aurait au moins connu un plaisir intense dont il ressentirait encore les sensations, avant de connaître la frustration. Mieux vaut jouir du moment présent.

Aiolia s'étouffa avec sa gorgée de bière au mot choisi par Shaka.
Milo, lui, siffla d'admiration.

- T'es vraiment dangereux, Shaka ! Je ne sais pas si je dois envier ou plaindre tes coups d'un soir.

- Tu veux que je t'aide à faire ton choix ? demanda Camus d'une voix polaire.

La température de la pièce sembla elle aussi chuter de plusieurs degrés.

- Pardon, mon cœur, ce n'était qu'une façon de parler, évidemment ! s'excusa le Scorpion en s'accrochant à son Verseau devenu bloc de glace. Je n'ai rien à envier à qui que ce soit, j'ai tout ce qu'il faut, avec toi !

Camus résista un peu, mais finit par se laisser embrasser sur la joue rapidement.

- Shaka, à toi, indiqua Saga pour relancer le jeu.

Et réchauffer un peu l'atmosphère.

La Vierge s'exécuta.

Et donna pour gage à Milo, justement, de garder dans sa bouche un bâton de réglisse pur, goût qu'il détestait par-dessus tout, pendant les trente-cinq minutes qui suivaient.

Autant dire qu'il offrit à ses camarades les plus affreuses et les plus inventives grimaces possibles, provoquant rires et fous-rires réguliers.

La main de Camus, qu'il serrait fort, était parfois même broyée, mais le Verseau le supportait sans difficulté.
Il n'était déjà plus contrarié par la remarque maladroite de son compagnon impulsif, qui parlait parfois plus vite qu'il ne réfléchissait.

Lorsque, par deux fois encore, la bouteille le désigna, il préféra choisir une vérité, de peur qu'en guise de gage, ses camarades sadiques, hautement amusés par la situation, ne prolongent encore son calvaire.

A la troisième désignation, le temps du gage au réglisse s'était écoulé, et il put ainsi cracher le bâton et le remplacer par une dizaine de bonbons à la menthe, pour répondre au défi de Kanon.

- Je te donne trois noms, tu dois me dire qui tu embrasserais, avec qui tu coucherais, et avec qui tu te marierais, si c'était autorisé par la loi.

- Ok, Nono, balance…

Milo était bien le seul par qui Kanon se laissait appeler ainsi.
Il devait simplement éviter de le faire devant Rhadamanthe, qui n'avait pas du tout apprécié, la première - et unique - fois où il l'avait entendu.

*Même si ce n'était pas son sens premier, ton prénom a fini par définir, métaphoriquement, une règle ou un principe à suivre. Il est beau et précieux, il te correspond parfaitement et ne doit pas être déformé mais au contraire, respécté.*

- Voyons voir… réfléchit rapidement le Gémeau. Mu, Aiolia, et Shaka.

- Alors déjà, je coucherai avec Aiolia, parce que j'aime bien l'idée d'apprendre plein de trucs à un novice.

- Idiot ! protesta le Lion en lui balançant des olives, qu'il esquiva.

- On ne joue pas avec la nourriture, rappela Aioros. Milo, ramasse-les.

- Je sais, je sais, répondit le Scorpion en s'exécutant, aidé par Mu à ses côtés. Pour le reste, reprit-il ensuite, j'aurais pu dire indifféremment l'un ou l'autre, mais je pense que j'embrasserai plutôt Mu et je me marierai avec Shaka, parce que se marier avec Mu, c'est embarquer Kiki. Et par Athéna, même si j'adore ce gosse, Mu, le voir apparaître et disparaître chaque jour d'un coup et parfois au pire moment, ça me rendrait totalement dingue !

Cette réponse fit bien rire tout le monde, y compris Mu.

- D'ailleurs, tu gères comment, Aphrodite ?

- Je n'ai rien à gérer, Mu a toute l'autorité nécessaire pour se faire obéir. Nous n'avons pas encore passé de nuit ensemble au Premier temple, mais je n'ai aucun doute sur le fait qu'il sait déjà quoi faire pour empêcher Kiki de nous surprendre et voir ce qu'il ne devrait pas, à son âge.

- C'est certain, appuya Saga.

- C'est vrai qu'un coup de Cristal Wall ferait l'affaire, réfléchit Milo à voix haute.

- Ça ne servirait à rien, il est transparent ! rappela Aiolia.

- Mais ça ne va pas ! protesta Aphrodite, outré. Vous l'imaginez se fracasser dessus à l'issue de sa téléportation ? Ça pourrait le plonger dans le coma pour des jours !

- Ah, j'avais pas pensé à ça, désolé… s'excusa Milo, tout penaud.

- C'est sûrement parce que tu te l'aies jamais pris dans la tronche, argua Angelo en grimaçant.

- Non, en effet, et je suis bien content de n'avoir jamais eu à t'affronter sérieusement, Mu. Déjà, rien qu'à l'entraînement, quand tu bloques juste mes attaques avec, l'onde de choc est tellement puissante qu'elle me fait presque vaciller sur mes appuis. Et t'es même pas à fond.

- Je suis pourtant bien loin de Maitre Shion, encore, et de nos prédécesseurs.

- Tu te sous-estimes grandement, Mu, répliqua Saga. Seiya et ses compagnons n'auraient eu aucune chance, si tu t'étais dressé contre eux.

- Leurs armures étaient à moitié éteintes, rappela Mu toujours avec cette forte humilité qui le caractérisait.

- Oui. Et en les réparant, tu leur as donné la force et l'impulsion nécessaire pour atteindre le 7e sens, sans lequel ils ne nous auraient pas vaincu, fit remarquer Shura.

Ce n'était pas du tout un reproche, au contraire, il y avait aussi de l'admiration et du respect dans son ton.

- Et si Shion n'était pas intervenu au début de la Guerre sainte, tout aurait été bien différent, poursuivit Saga. Nous aurions réussi à passer, mais au prix d'un combat acharné. Kanon nous aurait ensuite grandement affaibli, à son tour, et Shaka nous aurait achevé.

- Il est heureux que mon Maître ait été là. Même si tout ce qui s'est passé a été douloureux et dramatique pour chacun d'entre nous, il fallait en passer par-là. Pour Athéna.

- Pour Athéna, répétèrent-ils tous en acquiesçant à leur façon.

- Bien, on reprend, décréta Aioros, alors que ses camarades replongeaient dans leurs souvenirs auxquels il était étranger. Milo, à toi.

Après le lancer du Scorpion, Mu se retrouva au centre de l'attention et choisit Vérité.

- Tu n'as jamais été trop bavard, sur tes origines, je peux te poser une question à ce sujet ?

- Je t'en prie.

- On dit parfois que tu descends du peuple de Mu, dont tu porterais le nom et serais le dernier descendant et d'autres fois, que tu es un atlante, le dernier représentant, également. Quelle est la différence entre les deux et qui sont tes ancêtres ?

- Ça fait deux questions.

- Choisis celle à laquelle tu veux répondre, ça m'ira !

Mu lui sourit pour lui montrer qu'il le taquinait, simplement.

- Je vais essayer d'être concis et clair, car l'histoire est longue et complexe. Mu était une civilisation installée dans le Pacifique, plus ancienne que l'Atlantide, qui s'est établie un peu plus tard en Atlantique. Les deux étaient très avancées pour leur époque, elles ont coexisté quelques temps, et ont connu le même Destin. C'était peut-être celui du peuple de Mu qui les a poursuivi sur l'Atlantide. Leur technologie très avancée leur a fait croire qu'ils étaient égaux aux Dieux, par leur intelligence, notamment. C'est alors qu'un cataclysme s'abattît sur l'archipel, la réduisant à néant... une de leurs inventions en aurait été en cause, ou alors les Dieux, se sentant menacés, peut-être. Le peu d'archives récolté n'est pas très précis. Les survivants errèrent quelques temps, puis se retrouvèrent sur l'Atlantide dont ils avaient entendu parlé, le seul endroit digne de les recevoir, car proche d'eux par leur intelligence et leur savoir.

Mu fit une pause, dans un silence religieux.

- Le Peuple de Mu transmit ses connaissances aux Atlantes, qui évoluèrent encore davantage. Vous connaissez l'histoire de l'Atlantide. Après que Zeus les ait puni car ils étaient alors devenus trop arrogants, on perd leur trace, dans l'Histoire. Mais il y a eu des survivants, qui se sont réfugiés dans les montagnes, le plus loin possible de la mer, qui les avait engloutis par deux fois, pour certains. Ils ont alors appris à leurs descendants l'humilité et ils sont devenus un peuple très sage.

- Pourquoi vous êtes vous éteints ?

Mu serra les poings.

- L'arrogance de mes ancêtres était peut être trop élevée pour réellement disparaître… Les survivants et les descendants n'ont jamais voulu mêler leur sang aux autres peuples. Nous n'étions pas assez nombreux pour assurer notre survie au fil des siècles. Le sang de Mu et le sang atlante s'étaient complètement mêlés, créant un peuple à part entière, au nombre réduit. Les unions consanguines auxquelles ils s'astreignaient ont apporté leurs lots de morts et de maladie et au final… les ont décimé. Les derniers atlantes descendants de Mu ont alors fait le choix de cesser ces unions contre nature et accepté de mêler leur sang, mais avec parcimonie. Notre peuple a progressivement décliné au cours des derniers siècles. Il restait une dizaine de descendants purs, au temps de Maitre Shion, il y a deux cent ans. Kiki et moi sommes les derniers de cette ère.

- Mais et Jamir ? demanda Aiolia. Qui y vit ?

- Ce sont les descendants des serviteurs des sangs purs.

- Attends, si vous êtes des descendants des atlantes et de Mu, ça veut dire que vous êtes des sangs purs, Shion, Kiki et toi.

- Oui, Shura.

- Mais vous n'avez aucune maladie ni malformation…

- Les Chevaliers d'Athéna, potentiels ou confirmés, sont un mystère. Nous avons tous été trouvés par notre Maître ou un de ses disciples dans les montagnes de Jamir. Nos parents sont, pour la plupart, inconnus. En tous cas, c'est le cas pour Kiki et moi.

- Alors comment vous savez que votre sang est pur ?

Mu pointa son front.

- Nos deux points de vie roses attestent que nous sommes des descendants des atlantes et de Mu, et que notre sang est pur.

- Vous ne les auriez pas, sinon ? interrogea Kanon. Il y a peut être des métis atlantes qui s'ignorent ? A Jamir, par exemple ?

Mu secoua la tête négativement.

- Non, plus aujourd'hui. Mais cela a effectivement été le cas, par le passé, des relations interdites entre serviteur et sang-pur ont existé. Les enfants nés de ces unions condamnées avaient un seul point de vie. Enfin, Maître Shion pense que cela dépend du degré de sang atlante et de sang de Mu mêlé au sang des serviteurs.

- Mais presque tous les hindous ont un point de vie !

- Milo ! soupira Aphrodite. C'est artificiel, chez eux ! Et ce sont plutôt les femmes qui le portent.

- Tu veux dire que c'est naturel, chez vous, Mu ? s'étonna le Scorpion en rapprochant son visage de celui de Mu, qui se recula par réflexe. C'est pas un dessin ?

- Non mais sérieusement, Milo ? se moqua Aiolia.

- Mais comment je pourrais le savoir !

- Tu as bien vu que ça ne s'effaçait pas sous la pluie ou sous l'eau, t'as déjà vu Mu la tête mouillée ! Ou le front en sueur, après un entraînement, s'essuyer le visage sans que ça parte !

- Je sais pas, Aphrodite, c'était peut être du maquillage waterproof ! Quand on va à la plage avec les filles, elles perdent jamais leurs mascaras ou leurs rouge à lèvres ! regarde, toi, le tien, il tient toujours, non ?

- C'est du gloss protecteur, et j'en remets régulièrement.

- Il n'a pas tout à fait tort, souligna quand même Shura.

- Merci ! En plus, tu dis que ce sont les femmes qui en mettent, mais Shaka, ça t'arrive aussi d'en avoir un, à certaines occasions !

- En effet. Mais il n'a pas la même signification. Mon point symbolise le troisième œil, celui de Shiva, le porte-bonheur et la connaissance.

- Mais Shiva, c'est pas le Dieu bleu qui détruit tout ? demanda Angelo.

- Il détruit pour mieux rebâtir un monde nouveau. Son troisième œil voit le passé, le présent et le futur, mais il est si puissant qu'il pourrait effectivement tout détruire, c'est pourquoi il le garde fermé. Il est aussi dit qu'il l'ouvre et le ferme dans le processus de destruction et de création du monde.

- Comme toi avant un combat majeur, fit remarquer Aioros.

- Oui, plus ou moins.

- Mais pas que ! intervint Aiolia. Je me souviens de certaines périodes où on voyait pas tes yeux pendant des mois !

- Certains gardes pensaient même que tu étais aveugle, se souvint Shura.

- C'est bien que tu les gardes ouvert, désormais, ils sont magnifiques, lui dit Aphrodite.

- Merci, mon ami.

- Et en parlant d'œil, la couleur des yeux de Shion, ça vient de votre sang, aussi ? Ils sont pas un peu roses, les tiens, aussi... demanda Mu en se rapprochant à nouveau très fortement de Mu.

Mais ce fut Aphrodite qui le repoussa, cette fois, d'une main sur son torse.

- On ne t'a jamais appris à respecter l'espace personnel des autres ?

- Attention, 'Dite en mode Piranha, j'suis pas certain que vous ayez envie de voir ça ! s'amusa Angelo.

- Désolé, s'excusa Milo, je posais juste une question. Et j'ai cru voir tes yeux changer de couleur, avec la lumière, je voulais vérifier.

- C'est inutile, je suis disposé à te répondre. Tu as raison, d'une certaine façon. Mais ce serait trop long à expliquer. Si tu veux vraiment avoir plus de détails, Milo, n'hésite pas à venir prendre un verre à la maison, quand tu veux. C'est valable pour tout le monde, je suis prêt à répondre à vos questions.

- J'ai compris le message, Mu, c'est assez pour ce soir. Mais je viendrais chez toi avec plaisir ! accepta Milo. Surtout si c'est pour découvrir cet alcool de riz qui a mis Aldé ko pendant deux jours après son retour de Jamir !

- T'es pas censé y aller pour en apprendre plus sur eux ? se désola Saga.

- Je résiste mieux à l'alcool que lui ! Faut pas croire, c'est un vrai nounours !

Aldébaran attrapa un livre de blagues qui trainait derrière et lui lança avec tellement de force que Milo fut renversé en arrière, le choc lui coupant le souffle.
Il resta un moment étendu sur le dos à rire aux éclats, et tousser, avant de se redresser.

- Cœur et foie de nounours, mais force de taureau, c'est clair ! Allez, Mu, c'est à toi, j'ai plus assez de souffle pour parler, de toute façon ! assura-t-il avant de se rallonger sur le dos.

- Athéna soit louée...

- Qui a parlé ? demanda-t-il en relevant la tête vivement.

- Personne, reprends ton souffle et calme-toi, lui dit Camus en lui faisant reposer sa tête sur le tapis. On peut reprendre.

- Avant de relancer la partie, intervint Saga, je profite que Mu ait abordé ses origines pour vous faire savoir qu'il travaille régulièrement sur les archives et les documents qu'il arrive à récolter, à travers la planète.

- Le Sanctuaire a quelques émissaires sur place, à divers endroits du monde, qui font des recherches à ce sujet, poursuivit Aioros.

- Ce travail a été mené par Shion depuis son premier jour en tant que Grand pope, il y a plus de 200 ans et jusqu'à sa mort tragique. Il a été poursuivi par Dokho, tant bien que mal, et repris par tous les deux, à notre retour à la vie. Mais c'est Mu qui en est depuis le responsable, aidé par Shaka, Aldébaran, Camus et Aphrodite, depuis peu.

- Shion va certainement continuer de fouiner à droite, à gauche, pendant leur tour du monde, une fois qu'ils auront quitté le Domaine, intervint Kanon à son tour. Cette quête lui tient à coeur. C'est un travail colossal de tri et de recoupements, de reconstitutions et de vérifications. Alors n'hésitez pas à donner un coup de main, si vous en avez l'envie et le temps.

- D'autant plus que Mu travaille déjà beaucoup sur les Archives en général, notamment sur les 13 années de chaos qui ont été peu ou mal documentées, indiqua Aioros. Toute aide est donc la bienvenue.

Tout le monde assura l'équipe déjà constituée de leur soutien.

- Juste une question, qui va sûrement me valoir des remarques désobligeantes, mais tant pis ! Kanon, Rhadamanthe pourrait pas filer un coup de main ? Il doit avoir les réponses, lui ! Il connaît sûrement l'Histoire.

- Ce n'est pas idiot, Milo, étant donné qu'il a lui-même fait l'Histoire ! fit remarquer Aiolia.

- Non, c'est impossible, répondit Kanon. Il n'a pas le droit de révéler quoi que ce soit, même à moi. Il n'est pas censé avoir de contact avec les mortels, s'il nous parlait, cela pourrait modifier le cours de l'Histoire. Les Hommes doivent apprendre et découvrir seuls.

- Mais on ne va rien publier !

- Même. Si on garde une trace écrite, quelque part, cela constitue un risque. C'est frustrant, mais c'est ainsi, il faut l'accepter. Notre résurrection est déjà source de perturbations et de grands risques. Ne l'oubliez pas.

- Très bien. Dommage.

Un court silence s'installa.

- Merci pour votre soutien, leur dit alors Mu. Je relance le jeu, prévint-il en faisant tourner la bouteille.

Il demanda alors à Aldébaran de mimer une série de mots ou d'actions qu'il lui communiquait par télépathie.
C'était à mourir de rire et certains faillirent s'étouffer plus d'une fois.

Même les plus sérieux et difficiles à dérider comme Shaka, Shura et Camus, ne retenaient pas leur rire et s'amusaient vraiment, parfois au détriment du Taureau qui prenait le jeu très à cœur et donnait le maximum.

Aldébaran demanda ensuite à Angelo de dire du mal de l'Italie et des Italiens durant deux minutes, et elles furent sûrement parmi les plus longues de la vie du Cancer. Cela lui écorchait tellement la bouche qu'il faisait des grimaces aussi tordues que celles qu'avait fait Milo avec le réglisse dans la bouche.

De nouveaux rires emplirent tout l'espace.

La bouteille tournée par Angelo s'immobilisa sur Camus.

- Action ou vérité, Mister Freeze ?

- Vérité, le Crabe.

Un sourire carnassier étira les lèvres du Cancer rebaptisé.

- Je veux la suite de l'histoire. Raconte-nous ta première fois avec ton Scorpion, en précisant votre âge.

Camus soupira, alors que des « ohooo » s'élevaient de-ci, de-là.

- C'est très personnel.

- Hey, j'te demande pas le nombre de fois que vous l'avez fait ce jour-là, ni les positions, ni qui était au-dessus… sauf si tu veux donner des détails. On veut juste savoir…

- Qui ça « on » ? demanda Aiolia en une touchante tentative de défendre son meilleur ami Milo, qui se frottait l'arrière du crâne nerveusement.

- Arrête un peu, Chaton, vos oreilles ont toutes doublé, voire triplé de volume, pour pas en perdre une miette ! se défendit le Cancer. Donc oui, on veut juste savoir comment le Scorpion a réussi à te mettre le dard dessus… ou plutôt dedans…

- Hey ! protesta Milo.

- C'est juste arrivé, répondit Camus en posant sa main sur la cuisse de son compagnon. Quand l'amour brise la glace, tout devient naturel. C'était la suite logique de notre relation.

- Mais encore ? C'est qu'une moitié de réponse, ça, tu veux que j'aille où, avec ?

- J'ai bien ma petite idée... murmura Aphrodite.

- Si tu me dis d'aller me faire voir chez les Grecs, j'y suis déjà, Beauté !

- T'es surtout trop curieux ! rit Aldébaran.

- On l'est tous, sinon on jouerait pas à ce jeu ! C'est pas comme si on avait eu que cette option, la liste est longue comme mon bras et y a tout ce qui faut sur la table ! Alors, le Glaçon ?

Un nouveau soupir, un échange de regard avec Milo, puis le Saint de glace se lança.

- C'est arrivé un soir, à l'isba. J'avais 15 ans, Milo n'en était pas loin. Nous nous tenions là, tous les deux, Milo parlait comme à son habitude de tout et de rien. Je me sentais bien, parce que cela faisait longtemps qu'on ne s'était pas vu. Et une fois les enfants endormis, tout redevenait incroyablement silencieux quand Milo n'était pas avec nous. J'avais jusque-là toujours apprécié ce silence. Milo m'a appris à aimer son bavardage, son enthousiasme. À aimer sa voix. Je le regardais parler, rire et sourire en participant parfois, mais le plus souvent, j'acquiesçais ou…

- Ou tu grommelais quelques mots, intervint Milo avec tendresse.

- En effet. Et à un moment, ce soir-là, j'ai perdu le fil, jusqu'à ce que je me rende compte que je ne l'entendais plus. Mes yeux étaient toujours fixés sur ses lèvres, qui affichaient un sourire et ne remuaient plus. J'ai relevé les yeux vers les siens. Et on n'a jamais trop su qui avait fait le premier mouvement vers l'autre, mais l'instant d'après, on s'embrassait. Je voulais en rester là, il y avait les enfants qui dormaient dans la mezzanine juste au-dessus. Mais…

- Le Scorpion enflammé t'a sauté dessus, ricana Angelo. Franchement, avec les gamins à côté…

- Hey ! protesta l'accusé.

Mais Camus le calma une seconde fois et contre toute attente, Camus secoua la tête négativement.

- Milo a toujours été très respectueux et attentif envers moi, ne me faisant jamais dévier de mes objectifs, sachant que je tenais à garder une certaine image avec les enfants. Et il a également toujours fait attention à eux, à leur bien-être autant qu'à mon travail avec eux. Cette fois-ci n'a pas échappé à la règle. Ce n'était pas la première fois qu'on s'embrassait, c'était déjà arrivé, hors de l'isba, loin des enfants. Des sortes de baisers volés. Je prétendais ne pas les vouloir, être irrité, je restais froid, mais j'espérais chacun d'eux et j'en étais heureux, à chaque fois. Je le cachais et Milo n'en était jamais fâché. Parce qu'il savait. Mon cœur et mon cosmos n'avaient aucun secret pour lui. Alors il me souriait toujours, sa chaleur contre mon mur de glace.

La main de Milo serrait fort celle de Camus et il souriait, en effet, le regard débordant d'amour et de nostalgie.
Camus ne regardait rien ni personne en particulier, il avait les joues un peu rouges, mais il assumait le fait d'avoir accepté le jeu et ses règles.

- Et donc ? le relança Angelo. Me dis pas je c'est toi qui… Non, sérieusement ? Dis donc, la partie immergée de l'iceberg, c'est pas une légende, hein, c'est vraiment le plus gros morceau qu'on ne voit pas !

- Tais-toi ! lui intima Aphrodite. Laisse-le finir ou on aura jamais la suite !

Mais Camus semblait déterminer à aller au bout de son récit.

Tout le monde l'écoutait religieusement, encore une fois.
Ses confidences étaient rares, alors même que leur couple et leur histoire faisaient rêver et intriguaient chacun.

- Le désir étant très fort entre nous, à ce moment-là, nous avons décidé d'aller nous coucher. J'avais une chambre à l'isba, je vous l'ai expliqué, tout à l'heure...

- Les enfants ne vous ont jamais surpris ? demanda Saga. Hyoga était un peu jeune pour comprendre, mais Isaac ?

- Non, le rassura Camus. Je me suis toujours couché et levé bien avant eux. Et Isaac a disparu peu de temps après.

- Quant à leurs quelques réveils nocturnes, Camus avait un radar, compléta Milo pour l'éloigner du souvenir de son premier disciple. Il sentait les variations de leur cosmos en une fraction de seconde et il était déjà debout au pied de l'échelle menant à la ma mezzanine, attendant de voir une tête dépassée ou un pied prêt à descendre les barreaux.

Cette image fit sourire leurs camarades et ramena Camus à de meilleurs souvenirs.

- Continue, je te prie, l'encouragea Saga. Et pardonne-moi pour l'intervention.

- Aucun problème. Milo a donc rejoint la chambre en premier, et je l'ai suivi une fois assuré que les enfants dormaient bien. Quand j'y suis entré, il avait installé une partie des couvertures sur le sol pour y dormir. Probablement pour qu'on ne fasse pas de bêtises.

- J'aurais passé la pire nuit de ma vie à dormir à tes côtés, alors que je n'arrivais vraiment plus à contenir mon envie de toi. Jusque-là, j'avais réussi tant bien que mal, mais ce fameux soir, je bouillais tellement que j'aurais pu mettre le feu à la Sibérie entière.

Des rires accueillirent son exagération.

- C'est vrai que tu étais brûlant. Je l'ai senti avant même de te rejoindre sous les couvertures.

- Par terre ? Alors que vous aviez un lit confortable ? s'étonna Shura. Je veux dire, pour une première fois…

- La tienne, c'était dans un lit ? grimaça Angelo.

- La nôtre, oui, rappela Shura. Et c'est celle qui compte, puisque la première fois avec la personne qu'on aime vraiment est la plus importante de toutes. Elle efface même toutes les autres.

- Tiens tiens, on ne te savait pas si romantique, ami du Dixième ! le taquina Milo.

- C'est plutôt une question de respect pour son partenaire et pour un moment important. Ce n'est pas parce qu'on est entre hommes qu'on doit être des rustres, non plus, se défendit Shura. Ai-je tort ? Ce n'était pas un moment important pour vous, votre première fois ? Pour ceux qui sont concernés… ajouta-t-il en voyant les diverses réactions autour de lui.

Saga avait pincé les lèvres, Aioros le regardait avec tendresse, sachant que ce sujet était un peu compliqué entre eux. Leur première fois avait été merveilleuse, mais s'était mal finie, quand Saga s'était enfui en le rejetant.

Et leur première expérience n'avait pas été l'un avec l'autre.
Le Sagittaire posa son menton sur l'épaule de l'aîné des Gémeaux.

- Ma première fois avec Saga était parfaite. La deuxième aussi, qui était notre vraie première fois, en vérité, avec un lâcher prise total. Je suis donc d'accord avec toi, Shura. C'est un moment précieux dont il faut chérir le souvenir, alors il ne faut rien négliger.

Tout le monde acquiesça, sauf Shaka, qui ne bougea pas.
Angelo se tourna vers lui.

- Retiens la leçon pour ton moment précieux avec ton Phénix, Little Bouddha !

- Et qui te dis que ce moment n'est pas déjà advenu ?

La mâchoire du Cancer faillit se décrocher.

- Tu plaisantes ?

Shaka fit un sourire énigmatique, avant de se tourner vers le Verseau.

- Tu n'avais pas terminé, Camus. Même si tu t'es lassé de son récit, Angelo, aie au moins le respect de l'écouter jusqu'au bout.

- Hey, j'ai jamais dit que je m'étais lassé ! protesta-t-il. J'veux toujours savoir la suite ! Mais ça me détourne pas de la bombe que tu viens de lâcher !

- En quoi est-ce étonnant, Angie ? demanda Aphrodite. Ils s'aiment depuis deux ans, Ikki est enfin majeur, en tous cas pour la société grecque, depuis un mois, c'était évident que leur relation allait évoluer vers une nouvelle étape, non ? Je n'ai pas dit que c'était le cas, attention, je dis seulement que cela n'aurait rien d'étonnant se ce soit déjà arrivé.

- Certes… Mais donc, vous êtes vraiment en couple, Little Bouddha, tu confirmes, cette fois ? Parce que bon, que vous en pinciez l'un pour l'autre, ça fait un moment qu'on a compris… Mais le pas en avant, je l'ai pas vu venir !

- La bouteille est toujours pointée sur Camus, répondit Shaka. Mais comme je l'ai dit plus tôt, tu es bien capable de faire tes déductions seul, Angelo.

- Ouais, j'avais compris la première fois, merci ! Et j'ai aussi capté que tu te défiles !

- Aucunement. Ce que je peux te dire, c'est que je veux être acteur et non seulement observateur, dans cette vie. Pour approcher au plus près la vérité des relations humaines, je ne dois pas me contenter d'éprouver des sentiments et d'analyser ce qu'ils provoquent en moi. Je compte bien les vivre pleinement.

- C'est on ne peut plus clair ! Mais pourquoi personne n'a l'air surpris ? Me dites pas que j'étais le seul à ne pas savoir, encore ?

- Il n'y a pas eu d'annonce publique, répondit Saga. Mais certains détails ne trompent pas. Et pour ceux qui ne savaient pas encore, ce que vient de nous partager Shaka est assez explicite. Mais nous savons rester discrets… pour la plupart d'entre nous.

- Oui, oui, j'ai compris, là aussi… soupira-t-il. Eh bien, félicitation, Little Bouddha ! Je garde les prochaines questions pour toi, en espérant que le lancer se bouteille jouera en ma faveur… Mais en attendant, ajouta-t-il en se tournant vers Camus, Mister Freeze doit finir son histoire ! Donc, t'as rejoint Milo sous les couvertures, par terre…

- Oui, mais nous n'y sommes pas restés. Je te rejoins aussi là-dessus, Shura, c'est un moment important. Milo partageait cet avis. Il nous a relevé après qu'on se soit à nouveau embrassé, car il était évident que nous n'en resterions pas là, et on a gagné le lit. Mais sur le moment, cela n'aurait rien changé qu'on reste au sol, plus rien n'avait d'importance que nous deux, pour moi. Et c'est ici que s'achève mon récit, car le reste nous appartient.

Le silence retomba, alors que Milo posait sa tête sur l'épaule de Camus. ému par le rappel de ce moment magique.

- J'savais pas qu'il y avait une telle couche de sucre sous la glace, dis donc ! les taquina Angelo. Merci de nous en avoir partagé un peu, Camus.

Quand Angelo était sérieux et sincère, il utilisait les prénoms de ses camarades, plutôt que les surnoms.

Le Verseau hocha simplement la tête.
Milo releva la sienne, déposa un baiser sur sa joue, puis prit la bouteille et la lui mît directement dans les mains.

- A toi, mon cœur.

Malgré toute l'attention fixée sur eux, Camus glissa sa main sur la joue de Milo, combla le faible écart séparant son visage du sien pour déposer un tendre baiser sur ses lèvres, une pression rapide mais non moins appuyée et tendre.

C'était bien la première fois que Camus initiait un tel geste en public, avec tant d'amour dans chacun de ses mouvements.

Milo devint si rouge qu'il provoqua les rires de beaucoup.

- Tu viens de faire cuire un Scorpion, Camus, s'amusa Aldébaran. Combustion spontanée !

- Tu dois être le seul Saint de glace de l'Histoire à avoir réussi l'exploit de brûler un homme d'un simple baiser.

- Je ne suis pas le premier Verseau à avoir succombé à son frère d'armes du Scorpion, rappela Camus. Je pense que nos prédécesseurs avaient aussi ce genre d'échanges… brûlants.

- Je confirme, intervint Mu. Vos Armures ont gardé le souvenir de la passion dévorante mais secrète qui les liait. Dégel parvenait à ralentir le cœur de Kardia qui bouillonnait et consommait lentement sa vie. Et Kardia réchauffait le cœur de glace ralenti de Dégel, le faisant battre à un rythme normal ou plus élevé.

- Nous le savons, Shion nous a transmis le journal que tenait Dégel, leur apprit Camus.

- Même s'ils s'aimaient très fort, c'était plutôt triste, en vérité, murmura Milo.

- En un sens, nous vivons l'histoire qu'ils n'ont eu ni l'autorisation, ni le temps de vivre, lui dit Camus en serrant sa main plus fort, comme un soutien.

- C'est un très bel hommage, affirma Saga.

Camus hocha la tête, puis fit tourner la bouteille pour clore le sujet.
Des « oh » s'élevèrent au résultat.

Le sort donnait l'occasion à Camus de se venger, mais allait-il la saisir ?
Le Quatrième et le Dixième gardiens étant toujours enlacés, il avait le choix.

- Tu défies Angelo ou Shura ? demanda Kanon. Ou les deux, ça peut se faire aussi.

- Action ou vérité, Angelo ? décida le Verseau.

- Hmmm… J'ai pas trop envie que tu me ridiculises pour me faire payer le fait de t'avoir délié la langue par deux fois, je vais dire vérité. Je vois pas ce que tu pourrais me demander qui me mettrait mal à l'aise.

- Angelo, tu ne devrais pas le provoquer, l'avertit Milo.

- C'est sûr, avec toutes les casseroles que tu te trimballes, je ferais moins le malin si j'étais toi, rappela Aiolia.

- Le truc, c'est que moi, je suis prêt à assumer si vous voulez remuer la merde que j'ai chié dans le passé. Mais la gêne et l'ambiance pourrie que ça va créer, je suis pas certain que ce soit une bonne idée pour qu'on continue à se détendre et passer une bonne soirée. Donc, je laisse ça à ton appréciation, le Glaçon !

- Je veux seulement que tu noud dises ce que tu ressens pour Simon.

Le sourcil d'Angelo tressauta, alors que son sourire ironique se fanait.
Shura le sentit clairement se tendre contre lui, aussi resserra-t-il son étreinte autour de ses épaules.

- C'est vicieux, Mister Freeze. Mais ok. Je l'aime bien, Simon, c'est un bon gamin. Il est prometteur.

- Mais encore ?

- Qu'est-ce que tu veux que je te dise de plus ? J'ai répondu ! Je l'aime bien !

- Juste bien ? insista le Onzième gardien. Tu dois dire la vérité, Angelo.

Le Cancer croisa les bras sur son torse.

- C'est bon… J'y suis très attaché, c'est assez évident ! Vous me charriez suffisamment avec ça ! Il me fait me sentir utile, et comme si j'étais quelqu'un de bien et d'admirable.

- Tu l'es pour lui, affirma Aldébaran. Il t'admire et te respecte énormément, il n'y en a que pour toi, aux entraînements.

- C'est sûr que ça doit te faire tout drôle… le taquina Milo.

- Que ça vienne d'un enfant surtout, avoua Angelo très sérieusement et spontanément.

Un silence un peu étrange suivit ses paroles.

Ses mots renvoyaient forcément au souvenir de ce que Deathmask avait fait, à son disciple Mei de la Chevelure de Bérénice, mort bien trop tôt et tragiquement, et à tous les enfants qui avaient péri de sa main.

Tout le monde essaya de chasser ce souvenir et cette pensée, mais elle flottait quand même dans l'air.

L'émotion du Cancer était perceptible, même s'il essayait de la contenir, et cela aida aussi à revenir au présent.
Car c'était un homme totalement différent qui se tenait là, parmi eux, à sa place, avec un cœur humain qui battait pour les autres et était relié aux autres.

Comme un fleuve se retirant après une inondation entraînait des tonnes de déchets et d'objets arrachés aux villes et villages dévastés, le cosmos du Quatrième gardien charriait des émotions aussi diverses que la tristesse, les remords, la culpabilité.

Mais aussi le soulagement et la joie que lui procurait ce lien tissé avec Simon, son élève, un peu noyés au milieu de tous ces sentiments négatifs et pesants.

- Kiki t'aime beaucoup, également.

A l'exception de Shaka et Saga, tous les visages surpris se tournèrent vers Mu.
Mais le Bélier ne dit rien de plus, se contentant de soutenir le regard éberlué d'Angelo, le visage impassible.

Ce n'était pas une absolution totale, mais déjà un premier pas significatif vers le pardon.
La page n'était pas totalement tournée, mais Mu avec le coin de la feuille entre ses doigts et avait amorcé la rotation.

Aphrodite posa sa main sur celle de Mu et la serra fort en remerciement.
Il savait qu'il l'avait fait pour lui, en grande partie, même si pas seulement.

Angelo, lui, hocha simplement la tête, la reconnaissance et la douleur vibrant à présent dans son cosmos.
Oui, être pardonné, même partiellement, était bien plus difficile à supporter pour les repentis que des flopées d'injures.

- Tu as ta réponse, Camus ? demanda Shura pour couper court et délivrer son compagnon du moment suspendu.

- Oui, merci, Angelo.

- De rien… murmura-t-il en allumant une cigarette. Et Mu…

- Tourne la bouteille, le coupa-t-il.

Il n'avait visiblement pas envie d'entendre ses remerciements.
Alors, Angelo n'insista pas et relança le jeu d'une poussée mentale, sans même toucher le cylindre de verre.

Sa main droite tenait sa cigarette et son verre, et l'autre était serrée autour du poignet de Shura, auquel il s'accrochait comme pour ne pas partir à la dérive…

Et si les autres sentaient son cosmos encore vacillant, ils choisirent de l'ignorer, non par indifférence, mais au contraire, par respect et pudeur.

Et confiance aussi, car ils sentaient le cosmos de Shura qui l'entourait, avec autant d'amour et de tendresse qu'il ne le faisait physiquement de son corps, alors qu'il tenait toujours Angelo étroitement serré entre ses jambes et contre son torse, ses bras entourant ses épaules.

Angelo s'en remettait totalement à lui, s'abandonnant dans son étreinte, relâchant les tensions physiques et mentales.

Shura était son ancre, son phare dans la nuit et la tempête, son port d'attache.
Depuis toujours et à jamais.

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A suivre

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Merci d'avoir lu ce chapitre un peu long, j'espère qu'il ne vous a pas ennuyé !
A bientôt pour la suite.
Bonne continuation et bonne semaine :
Lysanea