Titre : Le Fil rouge du Destin
Auteur : Lysanea
Disclaimer : aucun personnage ne m'appartient sauf Simon
Pairing et personnages pour ce chapitre : Shura x Angelo, Aphrodite, Simon
Rating : T
Bonjour à vous ! Merci aux fidèles lectrices et commentatrices, grand soutien pour moi !
Fealina07 : Coucou et merci ! Je vais bien, j'espère que toi aussi. En effet le chapitre précédent était long, je m'excuse pour cela. Les notes aussi étaient longues. J'ai coupé celui-ci en deux pour plus de légèreté et de plaisir à lire. Je ne voulais pas trop multiplier l es chapitres, mais j'ai encore des choses à raconter, alors je n'ai pas le choix, je veux que cela reste agréable à lire pour tout le monde. L'histoire se termine et je dois répondre à toutes les questions laissées en suspens, pour chaque couple. J'espère que tu apprécieras !
Mini-Chan : hello ! j'espère que tu pourras te reposer ! et j'espère que tu n'es pas confrontée aux braconniers, tu m'as fait peur à la fin de ta review ! Fais attention à toi surtout ! Pour le reste, merci encore. Les chapitres seront plus courts, j'y veillerai ! Tes chouchoux sont de retour ! Je réponds aux dernières questions les concernant car la fic arrive à sa fin et je ne veux rien laisser en suspens, ni rien bâcler. J'espère que tu apprécieras. Pour ce qui est du deuil et de l'absence, ce n'est pas rare de connaître cela ou de l'avoir connu, quand on a quelques décennies d'existence, chacun ses épreuves et sa façon de les gérer. Je mets effectivement parfois de moi dans mes écrits et dans mes personnages, je leur prête mes épreuves et mes sentiments et si ça les rend plus crédibles et réalistes, tant mieux ! Encore merci à toi et prends soin de toi.
.
.
Le fil rouge du Destin
Chapitre Trente-cinq : Faire une marque sur le monde qui ne peut être effacée.
.
.
Sanctuaire,
Maison du Cancer
Jeudi 6 octobre 1989
.
Cela faisait bien quinze minutes qu'ils étaient réveillés tous les deux, et Angelo n'arrêtait pas de parler.
C'était plus qu'inhabituel.
Le Quatrième gardien ne faisait que deux choses, au réveil, normalement : des câlins, tendres ou coquins, avec un Shura déjà réveillé ou qu'il s'employait à réveiller de la meilleure façon qui fût, et fumer une cigarette.
Si, ce matin-là, l'odeur du tabac emplissait bien déjà la chambre, le babillage inutile du Cancer le faisait tout autant.
Shura finit par se redresser sur un coude pour le regarder, alors qu'il écrasait sa cigarette consumée dans le cendrier sur la table de chevet.
- T'es particulièrement bavard, ce matin, ça te ressemble pas, 'Ge. Qu'est ce qui se passe ?
Angelo enfouit son nez dans le cou de Shura en soufflant bruyamment.
L'élan les emporta tous les deux et remit le Capricorne sur le dos, avec son Cancer contre son torse.
- J'ai envie de te sauter dessus, Shurizo, voilà ce qui se passe ! Sauf que Simon dort à côté… C'est la première fois que tu restes toute la nuit, alors qu'il est là…
- Tu regrettes de m'y avoir autorisé ?
- Pas du tout ! Je déteste dormir sans toi… Mais j'sais pas, c'est sûrement parce qu'il faut pas que j'ai encore plus envie de toi, ce matin, que d'habitude ! Je suis aussi dur qu'une putain de colonne dorique du Parthénon !
- Comme quasiment tous les jours au réveil…
- Nan, c'est pire, ce matin !
- T'as l'impression que c'est plus tendu parce que t'as mis un boxer, alors que d'habitude, tu dors nu comme au jour de ta naissance. T'aurais dû mettre un caleçon, plutôt, ça aurait aidé d'avoir moins de pression.
- Je connais mon corps, Shurizo, ça a rien à voir ! J'te jure, c'est pas comme d'habitude, c'est même carrément un obélisque égyptien !
Par l'intermédiaire d'Aiolia, ils avaient tous eu des nouvelles de Saga et Aioros, qui lui avaient dit avoir été très marqués par la visite des temples égyptiens, les grandes colonnades et les obélisques. Shura avait donc été chercher un livre traitant du sujet à la Bibliothèque du Treizième temple, et avec quelques-uns de leurs camarades, ils avaient regardé à quoi cela correspondait, à quoi cela ressemblait. Sans surprise, Angelo et Milo s'étaient montrés les plus intéressés, le premier, par l'aspect architecture, esthétique et prouesse technique, le second, pour tout ce qui avait très à l'Histoire.
- Quelle différence avec la colonne dorique ? demanda le Capricorne.
- Le granit est plus dur et résistant que le marbre… comme moi, là ! T'imagine même pas… J'te montre pas pour pas te donner envie, mais…
- Inutile, en effet, ce que je vois et devine me suffit, 'Gelo, assura Shura, ses yeux glissant sur le drap tendu. Mais tu sais, la chambre de Simon est loin… Quelques caresses ne devraient pas l'alerter, si tu as besoin que je te soulage de cette tension…
- Hey, me tente surtout pas ! protesta le Cancer en s'écartant et en repoussant difficilement la main de Shura qui avait glissé sous le drap. Même s'il est loin, tu sais bien que je peux parfois avoir des grognements bestiaux, quand je te culbute, et même juste quand tu me… aaarrrhhhgg… grommela-t-il justement, alors que le Capricorne revenait à la charge, sans pitié.
Si bien que le Cancer dût carrément sortir du lit.
- J'vais me doucher, ça vaut mieux… Et interdiction de me suivre !
- Tu comptes m'en empêcher comment ? le provoqua Shura en se levant à son tour.
Angelo se força à ne pas glisser son regard sur son corps presque nu et le fixa dans les yeux.
Il n'eut pas à lutter trop longtemps contre la tentation de le faire, car Shura l'enlaça d'autorité et le poussa à reculons jusqu'à leur salle de bain privée, puis sous la douche, qu'il alluma rapidement.
Alors que l'eau tiède se déversait sur eux, le Dixième gardien plaqua le Quatrième contre les carreaux de faïence froids et se mit à genoux devant lui, lui retirant son boxer au passage pour libérer le fameux obélisque, qui rebondit durement contre les abdos sculptés et contractés.
Il se dressait, effectivement, aussi fièrement que ses modèles gardant n'importe quel temple égyptien, ou d'autres sur certaines places importantes des grandes villes à travers le monde.
- Mords ta main si tu penses que le bruit de la douche n'est pas suffisant, mi amor.
Angelo, qui n'avait plus dit un mot depuis que Shura l'avait enlacé en sortant du lit, s'exécuta et ne tarda pas à enfoncer ses dents dans sa chair jusqu'au sang.
Shura était beaucoup trop doué et dangereux pour son self-contrôle.
Ils quittèrent la douche un long moment plus tard et regagnèrent leur chambre.
- Ça va mieux ? demanda Shura en déposant un baiser sur la joue d'Angelo alors qu'il le dépassait.
- Oui, mais bon… Simon aurait pu venir et nous entendre.
- On l'aurait senti arriver, ´Gelo. Et puis, franchement, tu serais allé le réveiller avec un monstre pareil dans le pantalon ?
- J'me serai soulagé avant, je suis pas taré ! répondit Angelo en commençant à s'habiller.
- Alors, où est le problème ? demanda Shura en faisant de même de son côté.
- Quand c'est toi qui le fais, c'est beaucoup trop bon… Mon cerveau se fait complètement la malle, j'suis plus conscient de rien d'autre que toi. Tu sais très bien que même quand on commence gentiment, ça peut vite devenir plus… passionné. C'est dangereux. J'veux pas l'effrayer, c'est pas forcément compréhensif ni très sain pour un gamin d'entendre les adultes forniquer, encore moins quand c'est rude et entre mecs.
Tout en boutonnant sa chemise noire, Shura fit le tour du lit pour se rapprocher d'Angelo, qui, lui, enfilait un t-shirt rouge à maches très courtes à effet déchiré, qu'il utilisait comme tenue d'(entrainement.
- Tu m'en veux d'avoir pris un risque ?
- Non, parce que c'était pas le cas, le rassura le Quatrième gardien en lui faisant face. T'as géré. Tu m'as géré, comme toujours. Et t'avais tout prévu, ajouta-t-il en lui pinçant le nez.
Shura recula son visage avec un petit rire.
- Je voulais juste que tu te souviennes que tu peux me faire confiance.
- Je l'sais, ça, Shurizo, assura-t-il en prenant sa main pour entrecroiser leurs doigts. C'est juste…
- Que tu ne veux vraiment pas qu'il lui arrive quoi que ce soit, à ton cher élève, compléta-t-il pour lui. Ne t'en fais pas, 'Ge, je n'ai pas plus envie que toi de le choquer, de quelque façon que ce soit.
Ils gagnèrent la cuisine en poursuivant leur discussion.
- Évidemment, Saga te fait confiance, tu voudrais pas le décevoir.
Shura prit le visage d'Angelo en coupe entre ses mains.
- Je ne veux pas TE décevoir en priorité, Àngel.
Le Cancer soupira, puis embrassa son Capricorne avec une tendresse qu'il ne témoignait qu'à lui de cette façon.
Car il y avait une autre personne à qui il témoignait une autre forme de tendresse, plus subtile et moins démonstrative, mais tout aussi touchante : Simon, évidemment.
Les deux hommes se détachèrent lentement car justement, ils sentirent le petit garçon approcher.
Il se présenta à l'entrée de la cuisine, les yeux baissés.
- Bonjour, Maître Angelo, bonjour Shura ! Je peux venir ?
- Bonjour, Simon, répondit le Capricorne. Bien sûr, entre. Tu vas bien ?
L'enfant leva alors les yeux vers eux et leur fit un grand sourire.
- Oui, merci !
Marine avait beaucoup insisté sur le fait qu'il devait toujours s'approcher d'eux les yeux baissés quand ils étaient dans une pièce chez eux et demander avant de les rejoindre, pour être sûr qu'ils ne faisaient pas quelque chose qu'un enfant de son âge ne devait pas voir.
Comme tout le monde, elle avait d'abord pensé qu'Angelo ne ferait pas grand cas de l'enfant et de la nécessité de le préserver de certaines visions d'un couple, et d'hommes, de surcroît, et avait jugé bon de donner des consignes à Simon, pour aider Shura dans sa mission de résistance, de cadrage et de protection.
Mais étonnement, le Cancer s'était finalement révélé le plus protecteur des deux, à ce sujet.
Cependant, Simon avait gardé les directives données en tête et les avait transformés en habitude.
Il y obéissait scrupuleusement, comme cela lui avait été appris à l'orphelinat.
Il n'avait jamais été de ces enfants plus curieux qu'obéissants qui enfreignaient les règles.
- Assis-toi, gamin, lui dit Angelo en tirant la chaise à côté de lui. Bien dormi ?
- Oui, Maître Angelo ! Et vous ?
- Ouais, et bien réveillé, aussi... grommela-t-il en jetant un œil à Shura qui lui sourit. Comme d'hab' pour le petit dej', lait et céréales ? se reprit-il ensuite. Où tu veux que Shura te fasse un chocolat ?
- Je veux bien le chocolat de Shura, s'il vous plaît, c'est trop bon !
- Ça marche, sourit Shura en passant sa main dans les cheveux de Simon qui venait de s'installer. Je n'ai pas fait de churros, ce matin, parce que comme vous avez tous bien travaillé hier, j'ai prévu de vous en préparer pour le goûter, avec du chocolat.
- Trop bien ! Merci beaucoup, Shura !
- Mais ne dis rien, lui intima Angelo. Certains vont être intenables, sinon… Oh, puis après tout, ce n'est pas moi qui m'en occupe, aujourd'hui, je m'en fous un peu…
- C'est gentil pour Aiolia, fit remarquer Shura en terminant de préparer le chocolat qu'il laissa chauffer dans la casserole.
- Il a l'habitude, le Chaton.
- Je dois garder le secret, alors ? demanda Simon, un peu perdu.
- Ça ira, gamin. De toute façon, je t'embarque avec moi, aujourd'hui, tu verras pas tes copains avant le goûter, le rassura le Cancer.
C'est vrai ? s'enthousiasma-t-il. On va où, Maitre Angelo ?
- Pas la peine de sourire comme ça, on va pas se promener !
- Oui, je sais, Maître Angelo, je suis juste content que vous m'entraîniez encore aujourd'hui ! Et vous m'emmenez avec vous quelque part, en plus ! Oh, réalisa-t-il soudain, on va aux Enfers…
Cette idée lui avait fait perdre le sourire.
Il n'avait pas peur, mais il n'était pas très à l'aise au Puits des Morts.
C'était plus que normal.
Angelo lui apprenait à s'habituer à cette sensation de malaise.
A terme, le Chevalier du Cancer devait s'y sentir presque comme chez lui.
Au moins, trouver logique de s'y rendre, ne pas se poser de question quand il devait le faire, l'avoir intégré comme une arme contre ses ennemis et ne jamais hésiter à les y envoyer.
Et il devait surtout maîtriser ses émotions pour ne jamais perdre le contrôle, car le Puits des Morts était régi par des lois différentes, celles du Royaume souterrain.
Un vivant n'y serait jamais logiquement le bienvenu, il devait s'imposer et se contrôler, ne jamais douter de la légitimité de sa présence et du pouvoir qu'il détenait en ces lieux.
Sinon, il se ferait dévorer et ne reverrait jamais la surface de la Terre.
- Non, on reste à la surface. Mais ce ne sera pas de tout repos non plus, P'tit crabe. Alors prends des forces, lui dit-il en lui servant un verre de jus d'orange.
- Oui, Maître Angelo, merci, répondit-il, le sourire retrouvé.
Shura lui donna également sa tasse de chocolat chaud, lui rappelant de faire attention à ne pas se brûler.
Puis, il coupa les feux et prit place avec eux en déposant une belle omelette elle aussi bien chaude, déjà découpée pour que chacun put se servir. Une panière de petits pains au sésame tout fumant qu'il venait de réchauffer au four termina de garnir la table du petit-déjeuner.
Pendant qu'Angelo lui servait son café au lait, il commença à préparer des tartines pour le maître et l'élève, alternant beurre-miel et beurre confiture.
Lui, il avait son pain à la tomate, au désespoir d'Angelo qui lui jetait toujours un regard noir, quand il le voyait sur la table du petit déjeuner. Et ce, malgré les années, et depuis la première fois où il l'avait entendu réclamer des tomates à 6h du matin pour leur premier petit déjeuner au Sanctuaire, alors qu'ils avaient six ans.
Shion avait toujours veillé à ce que les enfants et peut-être futurs Chevaliers n'aient pas leurs habitudes brusquement rompues en arrivant en Grèce.
Cela passait notamment par l'alimentation.
Ceux qui avaient eu la chance d'en avoir eu une régulière avaient ainsi pu la retrouver, même déracinés, proposée avec des produits et plats locaux pour une assimilation et une intégration en douceur.
D'autres, comme Angelo qui s'était nourri comme il avait pu, comme on le lui avait permis, avaient juste apprécié la diversité et l'abondance de la nourriture proposée.
Mais les tomates au petit déjeuner, jamais !
Peut-être s'y serait-il essayé, si cela n'avait pas été une tradition espagnole…
Enfin, rien n'était moins sûr…
Car en grandissant et se liant avec Shura, même si le jeu des oppositions et de la compétition avait continué entre l'Italien et l'Espagnol, Angelo avait quand même accepté de goûter certaines spécialités et d'en manger régulièrement…
Mais cela devait toujours venir de Shura.
Ce devait être le chorizo préparé par Shura, son chocolat, ses churros.
Et son pain à la tomate.
Mais celui-ci, à partir de 11h30, uniquement.
Avant cette heure-là, il le regardait de travers, mais dès cette limite passée, il pouvait en dévorer une dizaine, car il adorait vraiment cela, en vérité.
- J'aime trop ton chocolat, Shura, soupira l'enfant, le nez dans sa tasse. Ça me rappelle un peu le chocolat du goûter à l'orphelinat, surtout avec la crème dessus. Mais le tien on dirait qu'il y a aussi de la crème dedans, quand on le boit, ça fait ne grosse moustache !
- C'est clair que c'est plus à manger qu'a boire, le chocolat espagnol ! ricana Angelo en essuyant justement la lèvre supérieure de Simon avec son pouce.
- On met un ingrédient qu'on appelle fécule de maïs, c'est un peu comme de la farine, pour épaissir le lait, expliqua Shura.
- De la farine comme pour faire un gâteau ?
- Oui, ou du pain.
- Je te dis, gamin, à boire et à manger !
- C'est parce que chez moi, en Espagne, on prend le petit-déjeuner très tôt, mais on ne mange pas avant 14h ou même 15h, parfois, ensuite. Il faut tenir.
- Mais pourquoi si tard ? Moi j'ai déjà faim à 11h !
- On est habitué comme ça. J'ai grandi ici, mais j'ai gardé certaines habitudes de mon pays, surtout la nourriture. Comme un peu tout le monde, d'ailleurs. Enfin, sauf les grecs d'origine, bien sûr. C'est une façon d'avoir un peu de notre pays natal ici, avec nous. Donc moi, de l'Espagne. Ce chocolat, je le faisais plutôt pour le goûter, pour Angelo et Aphrodite et moi, quand c'était possible.
- T'en buvais pas le matin, même petit, quand t'étais ici ? Personne t'en faisait ?
- Le chocolat qu'on nous servait ici, quand on était enfant, c'était juste du lait au chocolat. Après, on s'est vite mis au café au lait ou au café frappé. Mais avant cela, la première fois que j'ai pu rentrer en Espagne voir mes parents, deux ou trois ans après mon départ, ma mère m'a refait ce xocolata desfeta avec des churros pour le petit-déjeuner. Alors, j'ai appris la recette avec elle et à mon retour, j'en ai refait. On avait eu nos armures, on vivait dans nos Temples, on se débrouillait tout seul, désormais, alors, je pouvais cuisiner ce que je voulais !
- Wouah ! Tu as trop de la chance, Maitre Angelo, c'est trop bien d'avoir un ami espagnol !
Shura pouffa dans sa tasse de café, alors qu'Angelo grimaçait au dessus de la sienne.
Mais il sourit rapidement et posa sa main sur le bras de Shura.
- J'ai la chance de l'avoir, lui.
Ils échangèrent un bref regard en souriant, avant de reprendre leur repas.
Simon avait baissé les yeux par pudeur, mais il souriait aussi.
Par jeu et provocation, Shura attrapa une tartine recouverte de coulis de tomate bien frais et croqua dedans en tendant son visage vers Angelo.
- Tu le penses toujours, ´Ge ?
-Stronzo (enfoiré)… répondit Angelo en le fusillant du regard. Cherche pas, tu te débarrasseras pas de moi comme ça.
- T'aimes pas les tomates, Maitre Angelo ?
- Pas au petit dej', non. C'est une hérésie.
Simon fronça les sourcils.
- Une quoi ?
- Une hérésie. C'est comme un péché.
- Oh… d'accord… C'est interdit, alors ?
- Ça n'en est pas un, Simon, on a le droit de manger ce qu'on veut, quand on veut, tant que ce n'est pas dangereux pour la santé. expliqua Shura. Mais pour Angelo qui adore les tomates, les manger dès le matin, ce n'est pas bien.
- Mais au contraire, quand on aime quelque chose, on veut le manger tout de suite, des qu'on se réveille, non ?
- La vérité sort de la bouche des enfants, triompha Shura.
- On t'a pas demandé ton avis, gamin ! grommela le Cancer.
- Pardon, Maitre Angelo…
Simon avait rentré la tête si profondément dans ses épaules qu'on ne voyait plus son cou.
Angelo pouvait devenir très impressionnant pour un enfant, dès lors qu'il grognait ou élevait un peu sa voix déjà rocailleuse et puissante.
Sous le regard désapprobateur de Shura, le Cancer soupira et tapota maladroitement la tête du petit garçon.
- C'est bon, détends-toi. Et finis de manger, on va pas tarder à partir.
- Oui, Maitre Angelo, acquiesça-t-il en croquant dans une tartine.
Angelo se leva pour débarrasser sa place car il avait fini.
- Tu veux que je prépare quelque chose pour votre journée ? lui proposa Shura en terminant son omelette. De l'eau, de quoi grignoter ou des sandwichs ?
- On ne va pas s'encombrer. Je vais l'emmener du côté de Parnon, on redescendra à Vamvakou pour déjeuner chez le vieux Takis, il sera pas étonné de nous voir débarquer dans nos tenues d'entrainement, et il sera surtout content de voir du monde. (1)
Shura haussa un sourcil;
- Takis ?
- Oui, le vieux Kostas !
- Tu veux parler de Kostakis ?
- Qui d'autre ?
- Cela aurait pu être Panagiotakis, c'est bien pour les différencier qu'on appelle le premier Kostas, plutôt que Takis.
- Sauf que le second, c'est pas le genre à t'inviter à sa table, si t'as pas prévenu trois mois avant et que tu te ramènes pas avec une bouteille de vin et une autre d'huile d'olive. Et de la féta, un tonneau entier, s'il est de mauvais poil.
- Certes, reconnut Shura avec un petit dourir, amusé. Dans ce cas, prends quand même des gourdes pour la matinée, c'est plus prudent.
- Si, mamma, le taquina-t-il en déposant un baiser sur sa joue.
- Et prends quelques pommes pour Kostas, il adore celles de nos vergers.
- On en a plus beaucoup, Shurizo, fit remarquer Angelo en désignant la corbeille où quatre belles pommes rouges tenaient compagnie à une belle grappe de raisins, une poire et une grenade.
- Prends tout ce qui reste, j'irai cueillir d'autres fruits dans la journée, j'aurais le temps. On a plein de petites choses à faire, Aiolia et moi, ce matin, un peu partout sur le Domaine, je m'en occuperai en passant.
Le Cancer prit un sac en tissus et y glissa le contenu de la corbeille.
- Tu veux un fruit, gamin ?
- Non, merci, Maître Angelo. J'ai fini ! lui dit-il encore en se levant.
Il débarrassa sa place comme on le lui avait appris, mais quand il voulut aussi aider pour tout ranger, Angelo l'arrêta.
- Laisse ça et va te brosser les dents, puis t'habiller. T'as encore deux tenues d'entraînement propres, normalement, dans ton armoire. Prends la plus chaude, et la complète, avec les protections renforcées en cuir, coudes, genoux, plastron.
- D'accord, Maitre Angelo.
Simon fila suivre les instructions données, laissant les deux hommes terminer de ranger.
- Il n'a pas parlé de son ami Elrik, fit remarquer Shura.
- Non, pourtant il a eu plein d'occasion de l'évoquer. C'est la deuxième ou troisième fois que je suis avec lui et qu'il ne prononce même pas son nom, alors qu'avant, c'était au moins une phrase sur deux. Tu crois qu'ils se sont disputés ?
- Quand est-ce qu'il l'a appelé pour la dernière fois ?
- Je crois que ça remonte à trois semaines, un mois, réfléchit rapidement Angelo, tout en remplissant les gourdes. Faudrait redemander à Aioros.
- Et si on demandait à Kiki s'il sait quelque chose, plutôt ?
- Bonne idée, tiens ! Tu veux bien l'appeler, toi ? Si j'essaie d'entrer en contact télépathique avec lui, Mu va me griller les neurones.
- T'exagère, 'Ge. Il ne t'a jamais empêché de l'approcher, tu lui parles tout à fait normalement.
- Quand il est dans le coin, je suis pas serein. Il me surveille comme si j'allais lui faire du mal.
- Il sait très bien que ce ne sera jamais le cas.
Angelo s'adossa contre le frigo en croisant les bras.
- Sauf qu'il me regarde à travers le passé, Shurizo. Quand je suis avec Kiki, c'est pas Angelo qu'il voit. Tu le sais très bien.
- Mais il n'intervient pas, répliqua Shura en se rapprochant de lui pour prendre sa main. C'est donc qu'il te voit aussi tel que tu es, aujourd'hui, corazon. Et il finira par ne voir plus que ça, plus que toi, Angelo. D'autant plus qu'il y a Aphrodite, désormais. Et qu'il t'a quasiment pardonné, à l'anniversaire de Shaka.
- Ouais, j'compte bien sur ´Dite et sa relation avec lui pour que ça se confirme et se voit concrètement, ce qui n'est pas encore vraiment le cas, malgré ce qui s'est passé à la soirée.
- Il a déjà fait un grand pas, en te disant que Kiki t'appréciait beaucoup.
- J'vais pas prendre mes aises pour autant. Donc, en attendant que quelques autres pas suivent, tu veux bien… demanda-t-il en tapotant sur sa tempe de son index. J'voudrais avoir quelques notions de ce qui se passe, avant de partir avec Simon. J'arriverais mieux à aborder le sujet avec lui, si j'ai une petite idée de ce qui ne va pas.
Shura hocha la tête et contacta Kiki, gardant le lien ouvert pour permettre à Angelo de participer. L'apprenti Bélier leur répondit immédiatement.*
.
*Est-ce que tu sais si Simon s'est disputé avec son ami Elrik, la dernière fois qu'ils se sont parlés au téléphone ?* demanda Shura après de rapides salutations et prises de nouvelles.
*Non.
Non quoi ?* intervint Angelo.
*Non, ils se sont pas disputés ! Enfin, il m'a pas dit ça !
Et que t'a-t-il dit ? Est-ce que tout va bien ?* relança Shura. *On a remarqué qu'il ne parle plus beaucoup de lui.
Oh ça, c'est parce que… ah, je sais pas si je peux vous dire !* s'interrompît Kiki. *Il me fait confiance !
On veut juste l'aider, Kiki*, assura Shura.
*Toi aussi, non ?* insista Angelo.
Un silence, puis…
*Bon… Mais vous dites pas que c'est moi qui vous aie parlé ! Dites que c'est le cosmos ou je sais pas, il peut encore y croire !
Promis.
Maintenant, parle.
En fait, Elrik lui manque vraiment beaucoup, c'est très dur pour Simon. Au début, ça allait, mais là, il a vraiment mal, il m'a dit. Physiquement, quoi. Il s'isole parfois pour pleurer, je l'ai vu. Il pleure et il se tient le ventre.*
Shura et Angelo échangèrent un regard un peu surpris.
*Mais pourquoi il ne nous en parle pas ?* demanda le Quatrième gardien.
*Parce qu'il ne veut pas déranger. Et il a dit que de toute façon, il doit s'habituer à ce qu'ils soient séparés. Je crois que c'est pour ça qu'il parle moins de lui.
Il essaie de l'oublier ?* s'étonna Shura.
*Ah ça non, il a dit qu'il y arriverait jamais ! Mais je sais pas, il pense que s'il pense moins à lui et parle moins de lui, ça fera moins mal. Je lui ai dit que ça marcherait pas. J'ai bien essayé, moi, quand Maitre Mu… J'ai essayé, quand vous êtes tous… Enfin voilà, je sais que ça marche pas. Penser moins aux gens qu'on aime, c'est pas possible, c'est juste se mentir, je lui ai dit, à Simon. Et le cœur, il aime pas le mensonge, alors ça fait encore plus mal, au final. Mais il écoute pas. Peut-être que vous, il vous écoutera, mais je pouvais rien dire ! Mais j'aurais fini par le dire à Maitre Mu. Il aurait deviné que je m'inquiète, il devine tout ! Il me jette déjà des regards « je sais Kiki ». J'aurais pas tenu longtemps. Mais à vous, je pouvais pas !
On ne t'en veut pas, Kiki,* le rassura Shura. *Merci de nous avoir parlé.
J'ai rien dit !
Non, tu n'as rien dit.
Que dalle !* assura Angelo.
*Bonne journée à toi, Kiki.
À vous aussi !
Au fait, Simon passe la journée avec Angelo, ne le cherchez pas.
D'accord ! Il doit être trop content ! À plus tard !*
.
Le lien se ferma, et Simon arriva justement.
- Je suis prêt, Maitre Angelo !
- Montre tes crocs pour voir, P'tit crabe…
Le dos bien droit et les mains croisées derrière, Simon fit son plus grand sourire.
Mais il ne montait pas jusqu'à ses yeux.
Les deux Chevaliers observèrent le jeune garçon en tenue d'entraînement qui se tenait dans l'encadrement de la porte.
Il n'avait plus grand chose à voir avec l'enfant perdu qui était arrivé au Sanctuaire, quelques mois plus tôt.
Il avait grandi, comme si son cosmos, en s'éveillant, avait accéléré sa croissance.
Il se tenait plus droit, était un peu plus musclé, forcément. Son regard était toujours aussi doux et triste qu'à son arrivée, mais pourtant, entre temps, la tristesse avait disparu.
Elle était revenue hanter ses yeux, mais elle était différente, plus douloureuse, et ils en connaissaient désormais la raison.
- Bien. Commence à descendre, et va saluer les Chevaliers qui sont présents chez eux. Je te rejoins devant le Premier.
- Oui, Maitre Angelo. À plus tard, Shura, et merci encore pour le chocolat ! Bonne journée !
- A toi aussi, Simon. Travaille bien.
Le petit garçon parti, les deux hommes gagnèrent la salle de bain pour se brosser les dents, à leur tour.
- Ça va aller ? demanda Shura, une fois ceci fait. Tu veux que je te rejoigne dans la journée pour qu'on lui parle ensemble ? Ou tu veux demander à Marine ?
- Je devrais pouvoir m'en sortir. Au pire, reste ouvert, que je puisse t'avoir avec moi ici, lui demanda-t-il en posant un index sur son front.
- Je suis toujours avec toi, tu le sais bien.
Angelo prit sa main et embrassa sa paume.
- Oui, évidemment. À plus tard, Shurizo mio.
- À plus tard, 'Ge. Bonne journée.
- A toi aussi. Je t'aime, ajouta-t-il après une courte pause.
Shura sourit et l'embrassa doucement.
- Je t'aime aussi. Allez, file.
Malgré le temps qui passait, ils étaient encore parfois un peu gênés par les déclarations d'amour spontanées comme celles-ci. Ils n'avaient aucun mal à se le dire pour se taquiner, ou dans leurs moments intimes, mais de cette façon-là, c'était différent.
Après un dernier regard clairement amoureux, Angelo quitta ses appartements.
Shura retourna à la cuisine pour s'occuper de la vaisselle, un petit sourire s'attardant sur ses lèvres, puis il rentra chez lui pour se préparer pour sa journée.
Alors qu'il rangeait un peu son salon au passage, même s'il n'en avait pas réellement besoin, et qu'il replaçait un livre à sa place dans sa bibliothèque, ses yeux glissèrent sur un dos de cuir vieilli, sans titre ni aucune inscription, qui ne lui dit rien, de prime abord.
Intrigué, il s'en saisit, et le reconnut alors immédiatement, une fois en main : c'était un album photos.
Il était plutôt mince, ils n'en avaient pas fait beaucoup.
Après avoir jeté un œil à sa montre et jugeant qu'il pouvait s'accorder encore cinq minutes avant de rejoindre Aiolia, avec qu'il devait s'occuper de certaines tâches ce matin-là, il l'ouvrit.
La nostalgie le prit immédiatement, alors qu'il découvrait les premiers clichés.
Ils étaient si jeunes, et pourtant, ils avaient une expression terriblement adulte que des enfants de huit-dix ans n'auraient jamais dû aborder.
Alors qu'il tournait une nouvelle page, une enveloppe glissa, et il la rattrapa avant qu'elle ne touchât terre, avec ses incroyables réflexes de ninja, comme lui disaient souvent Seiya et Shiryu.
L'écriture sèche et hachée d'Angelo traçait les lettres de son nom, ce qui l'étonna, car il l'appelait très rarement ainsi.
Et surtout, il ne lui avait jamais écrit aucun courrier de leurs deux vies réunies.
Il rangea l'album photo et alla s'asseoir sur le canapé, tournant et retournant l'enveloppe.
Elle avait l'air d'être là depuis un moment, mais comment en être sûr ?
Il suffisait de l'ouvrir, en vérité…
Mais Shura avait un drôle de pressentiment.
Il ne voulait pas déranger ni perturber Angelo, alors qu'il était avec Simon.
Il se tourna donc vers l'autre personne à laquelle il ne pouvait que penser.
.
*´Di ? Tu as une minute ?*
Cinq secondes de silence, puis le lien s'établit.
*Oui, mon Shu ? Salut !
Salut. Je ne te dérange pas ?
Non, du tout. Je suis en train de descendre, je sors juste du Onzième. C'est vraiment dingue, quand Milo n'y est pas, je retrouve presque le froid du peu d'hivers en Suède que j'ai affronté, enfant ! J'ai la chair de poule !
C'est vrai qu'on sent la différence. Tu arrives chez moi, donc ?
Oui. Tu veux que j'accélère, tu as besoin de moi ?
Si t'as le temps, je veux bien que tu me rejoignes à la maison.
J'arrive. *
En effet, Aphrodite ne tarda pas à frapper et entrer directement, avant de retrouver Shura dans son salon.
- Que se passe-t-il ? lui demanda-t-il après l'avoir embrassé. Tu me sembles préoccupé, même si ton cosmos ne laisse rien filtrer.
- J'ai trouvé ça dans mon album photos, expliqua Shura en lui tendant l'enveloppe.
Le Douzième gardien s'assît auprès de son ami, son regard allant de l'objet à celui de ce dernier.
Il l'a pris ensuite.
- C'est une lettre d'Angelo…
- Il t'en a parlé ? Tu sais de quand elle date ? Ce qu'elle contient ?
Aphrodite reposa l'enveloppe sur les genoux de Shura.
- Je pensais que tu l'avais trouvé dès notre retour à la vie. Et j'avoue avoir oublié son existence, c'est sûrement pourquoi je ne vous ai jamais posé de question à son sujet.
- Alors, tu sais ce que c'est.
- Oui, bien sûr, Angelo m'en a parlé. Il m'a dit que si je survivais, je devais m'assurer que tu la trouves.
- Si tu survivais… à quoi ? demanda-t-il, même s'il pensait déjà connaître la réponse.
- A la Bataille des Douze Maisons. Je ne sais pas quand il te l'a écrit, mais il l'a déposé peu avant l'arrivée des Bronzes. Tu te souviens, on est passé te voir, tu nous as engueulé parce qu'on aurait déjà dû être à notre poste.
- J'en avais surtout après Angelo, parce qu'on s'était déjà tout dit, d'après moi, comme il était resté un peu chez moi après notre Réunion générale d'avant la Bataille. Et toi, tu as détourné mon attention, m'obligeant à me concentrer sur toi.
- Oui, et de cette façon, il a pu glisser l'enveloppe avec sa télékinésie, tout en te cachant la bibliothèque de son corps, alors que je te faisais face et te racontais tout et n'importe quoi.
- D'accord, j'ai le contexte. Tu sais ce qu'elle contient ?
Aphrodite inclina la tête.
- C'était très important pour lui que tu l'aies. Il me l'a fait lire pour que je comprenne cela. Mais ce n'est pas à moi de t'en révéler le contenu.
- Tu penses que je dois la lire ? Ou vaut-il mieux que je lui en parle, avant ?
- Je ne suis pas certain qu'il voudrait que tu la lises aujourd'hui, mon Shu. Par fierté, peut-être… Hey ! protesta Aphrodite en le voyant ouvrir l'enveloppe. C'est pas moi qui t'aie dit de le faire !
- Non, c'est ma décision. J'en assumerai les conséquences, ne t'en fais pas. Je ne suis même pas obligé de mentionner ta présence, ´Di. Après tout, elle m'est adressée, c'est logique que je l'ouvre.
- Pourtant, tu ne l'as pas fait directement.
- J'ai senti qu'il y avait quelque chose d'étrange. Je voulais juste avoir des précisions.
- D'accord. Tu veux que je te laisse tranquille pour la lire ?
- Tu ne me déranges pas. Tu peux aussi la redécouvrir avec moi, si tu veux.
Le Douzième gardien hocha la tête et posa son menton sur l'épaule du Dixième, alors qu'il dépliait le bout de papier couverte sur les deux faces d'une encore bleue qui renvoya Shura à la couleur des yeux d'Angelo.
Hey, Shurizo…
Je sais pas comment commencer, tu sais bien, écrire, c'est pas mon truc. Alors je vais juste dire ce que j'ai à dire, ok ? ´fin, écrire. Comme on dit chez moi, parla come mangi !
Cette nuit, j'ai fait un rêve. ´fin, un cauchemar, plutôt. Je t'en ai parlé, après la Réunion générale au Treizième, avant la bagarre. J'avais disparu, et t'étais complètement paniqué. T'as demandé de l'aide aux autres pour me retrouver, mais personne n'en avait quoi que ce soit à foutre. Pourtant, te voir paniquer, c'était quand même jamais arrivé, ça aurait dû les alerter. Mais rien. Indifférence totale pour mon sort.
Quand j'me suis réveillé, j'ai été pris d'une espèce d'angoisse bizarre, j'avais cette question en tête qui tournait « qu'est-ce que je vais laisser derrière moi, quand j'aurais cassé ma pipe ? Si je survis pas à cette journée, de quoi on se rappellera à mon sujet ? » La réponse était évidente : que du mauvais. Que j'étais un monstre sans cœur qui a mérité son sort. Et en vérité, Shurizo, j'en ai rien à faire de ce que les gens penseront quand j'serai redevenu poussière d'étoiles. ´fin plutôt cendres grisâtres. J'ai pris mes coups, j'ai partagé tout ce que j'ai fait avec vous deux. J'ai jamais été parfait, loin de là, mais toi non plus, objectivement. Même si tu l'es, à mes yeux. C'est pour ça que tu vois, si j'en ai rien à carrer de ce que les autres penseront, c'est pas le cas de toi… Quand je pense à toi, j'me dis que t'as tout fait pour que je laisse une trace différente. Et si ça a pas marché pour les autres, ça a marché pour Aphrodite et toi. T'as fait en sorte que je te laisse derrière des raisons de vous manquer, de te manquer. J'ai été un bon ami pour vous deux, hein, à ma façon un peu tordue ? Je vous ai protégé. Je vous ai aimé. Je t'ai aimé. Je t'aime. Je peux le dire au présent parce que même crevé, je sais que cet amour disparaîtra pas. Toi et moi, ce qui nous lie, c'est gravé dans nos âmes. J'le sais, parce que tu vois, je t'ai aimé dès les premières secondes. Toi aussi, Shurizo. Mais on avait que six ans ! Des gamins ont pas ce genre de sentiments, ils comprennent même pas ce que c'est, l'amour ! Surtout moi, hein ! Mais il se passe bien un truc, pourtant, et tu sais ce que c'est : c'est deux âmes-sœurs qui se retrouvent, et qui marquent suffisamment leurs nouvelles incarnations pour ne plus jamais se perdre. T'imaginais pas que je pouvais penser ce genre de trucs, hein ? C'est à cause de toi. Ce que tu me fais ressentir depuis toujours. Je suis fort et même un peu matcho, mais en vrai, j'suis un peu sensible aussi. Ouais, je t'aurais jamais dit ça de notre vivant. Mais si tu lis ça, c'est que je suis passé de l'autre côté et pas toi. Y a une justice en ce monde, finalement.
Shura, Shurizo mio, tout ce blabla, c'est juste pour te dire que maintenant que je suis plus là, je te demanderai de faire un dernier truc pour moi. Encore, je sais. Je t'en avais aussi parlé, la dernière fois qu'on s'est vu, avant de prendre nos postes. Je veux juste que t'oublie tout le mal que j'ai fait. Que tu retiennes juste le peu que j'ai fait de bien, avec ´Dite et toi. Et quand tu te sentiras seul, pense à ça, pense à moi, oublie tout le reste. Si tu te sens vide, remplis ce trou du souvenir de moi, de celui que j'étais avec toi : Angelo, 'Gelo, 'Ge, rital de merde... Enterre Deathmask bien profond. Oublie toute la douleur que t'as appris à si bien cacher, toutes ces années, surtout quand ´Dite et moi, on se roulait dans la fange… Tu le sais, que c'était pas pour te blesser, au contraire, c'était pour m'empêcher de faire plus de mal, encore. Et te perdre définitivement. Même si j'ai cru que c'était déjà le cas, le jour où ´Dite et moi, on est venu te parler, après qu'on ait baisé (rature) que ce soit arrivé la première fois. Tu te tenais là, droit comme une colonne dorique, le visage fermé et les bras croisés, le regard sombre, le visage impassible. Tu savais déjà, bien sûr, mais on devait prononcer les mots. Tu les as écoutés sortir de nos bouches traîtresses. T'as répondu « Bien, si c'est ce dont vous avez besoin. Respectez-vous, simplement. Et veillez à rester discrets, pour le bien du Sanctuaire. » T'as fait demi-tour sans attendre et t'es parti, j'pouvais pas détacher mes yeux de toi, ton dos droit et ta démarche militaire, quand tu t'éloignais. T'essayais de nous l'cacher, mais ton cosmos flamboyait, comme si t'avais poussé ta vie à son paroxysme pour pas sombrer. C'est ce jour-là que t'as pété le Rocher du Capricorne. Des générations de Dixième gardien s'y étaient entraînés avant toi, il portait la trace de nombreux coups d'Excalibur, quand elle portait même pas encore son nom, dont les tiens. Des entailles plus ou moins profondes, depuis des siècles, des morceaux arrachés, même. Et toi, ce jour-là, tu l'as coupé en deux. Net. Si net qu'il ne s'est pas brisé ni effondré, les deux moitiés se sont simplement légèrement détachées l'une de l'autre. Un peu comme le tout qu'on formait, tous les trois, avant ça ? J'sais pas. Mais t'as cette poésie en toi, Shurizo, alors pourquoi pas ?
´fin oublie tout ça, ok, et tout ce que j'ai fait de mal dans ma vie et dans la tienne, s'il te plaît. Tu feras ça pour moi ? Je sais que tu m'as déjà tout pardonné. Tu le fais toujours… je l'ai jamais mérité. Je t'ai jamais mérité.
J'espère que tu me survivras longtemps. On se retrouvera dans une autre vie, ça se trouve, si mon âme n'est pas en train de brûler aux Enfers à l'heure où tu lis ça. Et j'espère alors que j'serai quelqu'un dont tu pourras être fier. Que tu pourras aimer. Que je pourrais te laisser aimer. Je crois pas en grand-chose, tu le sais, mais ça, j'ai envie d'y croire.
Merci de m'avoir aimé de la seule façon qui nous était possible, envers et contre tout.
Sois heureux, même sans moi, surtout sans moi.
Hasta pronto, mi estrella.
Angelo
,
- C'est de l'espagnol, à la fin, non ? murmura Aphrodite pour ne pas trop brusquer Shura.
- À bientôt, mon étoile, traduisit Shura sur le même ton, la gorge nouée d'émotion contenue, en repliant la lettre.
- Je savais qu'il avait une part de romantisme, tout au fond de lui, même à l'époque. Qu'il ne pouvait exprimer qu'avec toi. Pour toi.
Shura remit le courrier dans l'enveloppe, toujours très ému, mais intériorisant tout, comme toujours.
Le bras qu'Aphrodite était passé autour de ses épaules et sa tête contre la sienne lui faisaient un bien fou.
- Merci d'être resté, 'Di.
- C'est normal, idiot. Tu vas lui en parler ? Évidemment, c'est moi l'idiot, pour le coup, de poser une telle question !
- On ne se cache rien. Je ne pense pas qu'on aura une grande discussion à ce sujet, de toute façon. Ce qu'il dit là, j'en connaissais une partie, déjà, et l'autre, il me l'a plus ou moins confié, ces deux dernières années, surtout depuis qu'on est ensemble.
- Vous y avez tous deux fait allusion plusieurs fois, cela m'intrigue. De quoi avez-vous parlé, lors de ce fameux moment après la Réunion ? Je me souviens avoir perçu votre émotion à chacun, mais je n'ai jamais pu vous interroger à ce sujet. Ensuite, j'ai oublié.
- Cela n'a pas duré longtemps, commença Shura, avant de replonger dans ses souvenirs.
.
Flashback
Le Sanctuaire
Maison du Capricorne
Mars 1987
.
Alors qu'il gagnait ses appartements après s'être séparé du groupe, Shura sentit Deathmask lui emboîter le pas.
- Qu'est-ce que tu fais, on doit se préparer, lui demanda-t-il sans s'arrêter.
- On est pas à cinq minutes. près.
- Les ennemis du Sanctuaire sont en chemin.
- Et c'est p'tet la dernière fois qu'on cause.
Le Capricorne tiqua à cette réflexion anormale du Cancer, toujours si sûr de lui et de la victoire.
Il avait encore hurlé pendant le rassemblement au Treizième qu'il allait réduire les traîtres en charpie et exposer leurs visages dans la meilleure partie de son hall, avec une place d'honneur pour la fausse Athéna.
Aussi, préféra-t-il le laisser entrer chez lui.
- Qu'est ce qui te prend ? On ne peut pas perdre, on se bat pour la justice, rappela-t-il en refermant la porte de ses appartements. Tu doutes ?
Le Quatrième gardien se dirigea vers la fenêtre pour regarder au-dehors, alors que le Dixième ôtait sa cape et son casque.
- J'ai fait un rêve, cte nuit.
- Un rêve ?
- Ouais. Je disparaissais et t'étais terrifié. T'allais voir les autres pour qu'on me cherche et qu'on essaie de me retrouver, mais personne n'en avait rien à foutre. Alors, quand j'me suis réveillé ce matin, j'me suis demandé ce que je laisserai derrière, quand je crèverai la gueule ouverte.
- Elle doit pas être longue, ta liste.
- Ça dépend si tu parles de bonnes choses ou de cadavres, répondit le Cancer en le rejoignant au milieu du salon.
- Angelo…
- Ça, par exemple. T'es le seul à m'appeler comme ça.
- Le seul que t'autorises à le faire, avec ´Di, mais il t'appelle jamais autrement qu'Angie, en privé.
- Ouais… Pas sûr que quelqu'un d'autre aurait envie de m'appeler comme ça, de toute façon, grimaça-t-il.
- Il faudrait déjà qu'ils connaissent ton nom, répliqua Shura en s'appuyant contre le dossier de son canapé. Shion et Aioros ne sont plus, Aiolia a sûrement oublié. A l'exception de Saga, tu ne l'as jamais dit qu'à Aphrodite et moi.
- Rien à foutre des autres.
- J'avais compris.
Le Cancer balaya la pièce du regard, puis revint le fixer dans celui du Capricorne, face à lui, les bras croisés, patient et attentif avec lui, comme toujours.
- Si j'y restes et que tu te sens seul, faudra que tu penses à moi, Shurizo. Et quand tu penseras à moi, fais-le en en utilisant mon prénom. Oublie Deathmask et tout le mal que j'ai fait, ok ?
- Pourquoi tu me dis tout ça à moi ?
- A qui tu veux que j'dises ce genre de trucs ?
- Encore une fois, la liste est longue de personnes à qui tu pourrais présenter des excuses.
- C'est pas ce que j'suis en train de faire, là !
- Alors c'est quoi, 'Ge ? Qu'est-ce que tu fais ici, alors que tu devrais déjà être dans ton Temple ?
- Je voulais juste te dire que…
Le Quatrième gardien s'interrompt, leva la main vers Shura, puis la ramena finalement vers lui et se frotta vigoureusement le crâne.
- T'es le seul qui m'a donné des raisons de te manquer. Alors si tu me survis, vis, mais m'oublie pas, oublie juste le mal que j'ai fait. Et commence par ne pas te faire descendre. J'te l'interdis.
- C'est aussi valable pour toi. Allez, rentre chez toi, maintenant, lui dit Shura en posant sa man sur son épaule. On se verra ce soir ou demain matin, quand tout sera fini.
Le Capricorne, quelque peu ébranlé par les mots et l'attitude de son ami, le raccompagna jusqu'à la porte.
- Ouais, je les laisserai pas passer, je leur permettrai pas d'arriver jusqu'à toi, Shurizo, jamais de la vie.
- Ne t'inquiète pas, si tu tombes, je prendrais le relais et Aphrodite après moi, si je succombe a mon tour. Notre Pope sera protégé.
- Y a que vous deux qui m'importez ! Le monde peut bien s'effondrer, s'il reste que nous trois, ça me suffira largement... Ce serait même un putain de paradis, pour moi !
- Arrête de dire des inepties, le sermonna Shura en ouvrant sa porte. Il n'est plus temps pour ce genre de discours. Dépêche-toi de regagner ton poste. A demain, Angelo.
- A demain, Shurizo.
Leur accolade fut rapide.
Ils se regardèrent ensuite longuement, gravant les traits de leurs visages et leurs expressions dans leurs esprits et leurs mémoires.
Juste au cas où ce serait la dernière fois…
C'était étrange de penser à cela, alors qu'ils avaient l'assurance de triompher, pourtant.
Ils avaient surtout chacun, à cet instant, des mots au bord du cœur, au bord des lèvres, au fond des yeux et de l'âme qu'ils s'interdisaient de prononcer autant qu'ils se refusaient à les lire et les comprendre, chez l'autre.
Shura détourna les yeux en même temps qu´Angelo faisait face au couloir menant au hall du Dixième temple.
Il n'éloigna sans un regard en arrière, même lorsqu'il sentit finalement les yeux de Shura posés intensément sur son dos, qui accompagnèrent sa sortie jusqu'à la dernière seconde.
.
Fin du flashback
.
- Il voulait vraiment partir sans avoir le regret de ne pas t'avoir dit certaines choses, même s´il n´a pas dit le principal ailleurs que dans cette lettre.
- En effet. C´est pourquoi nous n´aurons sûrement pas une longue discussion au sujet du contenu de cette lettre qui ne m'est pas totalement inconnu. Je veux juste le remercier d'avoir eu cette attention pour moi. De m'avoir laissé quelque chose, au cas où. D'avoir eu cette certitude que je survivrai, aussi. Je n'ai pas eu les mêmes égards pour lui.
- Ton pragmatisme légendaire a pris le pas sur ton romantisme somme toutes très discret, analysa Aphrodite avec justesse. Mais oui, c´est un fait, tu croyais en la justice de notre cause, enfin, celle du Grand pope, persuadé que nos ennemis étaient le Mal incarné qui se présentait à notre porte et que nous ne pouvions que triompher de Lui, alors qu´en vérité, il était déjà bien installé dans nos murs. Angie, lui, croyait en toi, mon Shu. Il croyait dur comme fer que tu t'en sortirais, soit parce qu´il ne voulait pas imaginer un monde où tu aurais péri, soit simplement par foi en toi et tes capacités. Et tu aurais survécu, si tu n'avais pas pris cette décision de protéger Shiryu en te délestant de Capri.
- Je devais le faire. Heureusement que j'ai ouvert les yeux, même au dernier moment. Survivre dans ces conditions, je n'aurais pas pu. Faire face à Athéna, vivre dans un monde sans Angelo, alors que ces quelques heures sans sa présence étaient déjà tellement douloureuses et avaient crée un vide insondable… Et sans toi, non plus, même si, à ce moment-là, j'espérais fortement que tu nous survives… c'eût été un véritable cauchemar d'être le seul survivant de notre trio.
- C'est ce que j'ai dit à Angie, ce jour-là. Que si l'un de nous devait y rester, ce serait horrible. Il valait mieux qu'on parte ou qu'on survive tous les trois. J'étais anéanti par vos disparitions, j'ai même pensé à vous rejoindre, je l'avoue, mais je devais me battre jusqu'au bout pour protéger Saga. Pourtant, j'ai été soulagé d'y rester, surtout après un si beau combat contre Shun.
- Je le suis qu'on soit revenu tous les trois, assura Shura en tapotant le genou d'Aphrodite.
- Tu es celui qui méritais le plus cette seconde chance, mon Shu.
- Elle n'aurait eu aucun sens sans Angelo. Et elle n'aurait pas été complète sans toi.
Les deux amis s'accordèrent une étreinte.
- Je m'étonne qu'Angelo ne t'en ait pas parlé, ou qu'il ne l'ait pas récupéré, depuis deux ans, s'interrogea Aphrodite, entourant encore les épaules de Shura de son bras.
- J'ai complètement réorganisé ma bibliothèque, peu de temps après notre retour. Il ne se souvenait peut-être plus qu'il l'avait glissé dans l'album photo, puisqu'il était de dos, quand il l'a fait avec son pouvoir. Il est rarement seul chez moi, je ne crois pas lui avoir offert beaucoup d'occasions.
- Ceci expliquerait cela. C'est impossible qu'il ait oublié une telle chose.
- Je te dirai ce qu'il sera sorti de notre petite discussion, quand on l'aura eu.
- Je compte sur toi, mon Shu ! lui dit Aphrodite en se levant. Je serai bien resté comme ça à te câliner toute la matinée, mais j'ai à faire. Sauf si tu as encore besoin de moi, ou juste envie de compagnie, quelqu'un pourra me remplacer pour faire la classe, ce matin.
- Je vais bien, merci, ˆDi, répondit-il, debout à son tour. Et il est l'heure aussi pour moi de rejoindre Aiolia. Tu étais toi-même en route, je t'ai arrêté au passage, j'espère ne pas t'avoir mis en retard.
- J'ai pris un peu d'avance pour passer un peu de temps avec Mu avant de rejoindre l'école.
- Je suis désolé, j'ai contrarié tes plans.
- Mais non, ne t'inquiète pas ! le rassura-t-il avec un grand sourire. Je l'ai prévenu, c'est le principal. Et il me reste encore un peu de temps.
- Alors allons-y. Je vais juste ranger cette lettre jusqu'à ce soir. Angelo passe la journée avec Simon et ne devrait donc pas rentrer avant plusieurs heures, mais on ne sait jamais, je ne dois pas la laisser à vue.
- Tu fais bien. Et je prends note que Simon sera absent, ce matin.
- C'est un cours d'anglais, Angelo a jugé qu'il pouvait s'en passer.
- Il est parfaitement bilingue, mais sa présence est appréciée, car il peut aider ses camarades. Enfin, passons pour cette fois. Je me doute qu'ils ne sont pas partis faire les magasins.
- Non, ils sont au Mon Parnon pour la journée, expliqua Shura, tout en allant glisser l'enveloppe entre deux livres, dans sa bibliothèque.
- Oh ! s'exclama Aphrodite, j'imagine que Simon se dira, en rentrant ce soir, qu'il aurait bien préféré deux heures d'anglais avec moi ! Quoi que, vu comme il adore son Maître, rien n'est moins sûr...
Shura se contenta d'hocher la tête.
Les deux amis quittèrent ensuite le Dixième temple et entreprirent la descente du Grand escalier d'un bon pas, discutant de tout et de rien, Aphrodite essayant de changer les idées de Shura.
Et il y arriva assez rapidement, comme toujours.
Lorsqu'il le laissa au Cinquième temple où Aiolia l'attendait, son regard sombre était de nouveau bien ancré dans le présent…
.
.
A suivre…
Notes
Mon Parnon et village de Vamvakou : village montagneux d'une centaine d'habitants (dans les années 80, moins à ce jour) situé sur le Mont Parnon, dans le Péloponnèse, à quelques heures d'Athènes. Cette chaîne de montagnes, parallèle à la mer, sépare la Laconie de l'Arcadie, proche de Sparte. Son point culminant, Megali Touria, a une hauteur de 1940 m.
Merci d'avoir lu ce chapitre, la suite directe au prochain, car je ne voulais pas publier un gros pavé après le précédent chapitre bien conséquent.
Cela rallonge la fic en nombre de chapitres, mais c'est préférable à des parties indigestes.
La fin arrive vraiment, encore quelques chapitres avant le terminus !
Bonne continuation à vous, à dimanche prochain pour la prochaine publication.
Prenez soin de vous et de vos proches.
Lysanea
.
