Je prenais petit à petite conscience, face contre terre, le nez cassé et bouché par l'agglomération de mon sang. Je puisais dans mes toutes dernières forces pour m'adosser contre le mur humide de ma prison. Pour seule compagnie, le clapotis régulier des gouttes d'eau s'infiltre dans ma cellule. Je fouillais dans mes poches, bingo ! Il me restait une clope à moitié consommée et une allumette.
Alors que je profitais de ce dernier plaisir, la porte de ma cellule s'ouvre brutalement : une armoire à glace, épaule large se dressa devant moi. Le visage couvert de cicatrices et burinée par le soleil et le vent. Une épaisse chevelure noire coupée court coiffée en arrière avec des yeux gris bleu perçants. Vêtu d'une simple chemise à manches retroussées et vieux bleu de travail.
- L'English, ramène tes fesses fissa, le patron veut encore te causer ! beugla-t-il agacé de faire le sale boulot.
Il avait bien choisi leur moment. J'écrasai le reste de mon mégot de cigarette contre une des pierres rongées par la moisissure.
- Bouge toi ! hurla-t-il à nouveau. On n'a pas toute la soirée !
On me traîna hors de ma cellule, direction le bureau du grand patron désireux de discuter à nouveau avec moi. Ainsi, on me conduit de nouveau devant celui qu'on avait baptisé « La Carlingue », Henri Lafont. Il étalait fièrement son opulente réussite par des goûts douteux en matière de décoration. L'erreur d'une jeune fortune nouvellement construite. Je les haïssais !
Il se tenait là devant moi, engoncé dans un costume de soirée blanc très chic, fier et confiant, il m'observa longuement tout en laissant son cigare se consommer lentement.
- Vous nous avez donné du fil à retour Lieutenant, commencé-t-il enfin.
- De quoi parles-tu ? feiniais-je alors qu'un de ces gros bras s'approchet de la chaise où je me trouveis
- Oh non, Lieutenant, ne rejouons à ces jeux stupides, déclare-t-il tout en se versant un verre de Cognac. Ne tournez pas autour du pot, voulez-vous bien ? vous m'avez fait perdre un temps précieux. Alors arrêtez de jouer au plus idiot, voulez-vous bien ?
- Vous faites erreur, je vous le répète encore, mentis-je.
- Corinne Luchaire et ma femme adorée organisent une soirée dans mon hôtel particulier en ce moment même. Il serait mal poli de ma part des faire attendre plus longtemps. Si vous n'êtes pas décidé à parler, peut-être que cette charmante demoiselle le fera.
Il glissa sous mes yeux une photo de…non, ce n'était pas possible. Le ciel me tombait sur la tête. Je sentais mon cœur s'emballer d'un coup. Plus aucune de mes pensées n'arrivait à se mettre en ordre. Les salauds ! Ils avaient réussi à m'atteindre.
- Vous connaissez cette jeune femme, non, ne le niez pas ? Vous ne la trouvez pas charmante, Monsieur Danos ? questionna monsieur Lafont, un sourire lubrifiant aux lèvres.
Son collègue Ramassa la photo posée juste devant, il émet une série de sifflement abjecte.
- Oh ! Une Indochinoise ! s'écria-t-il en regardant la photo sous toutes les coutures possibles. Lucien n'a arrêté de louer les prouesses de filles ces.
- Quelles démarches ? réclama immédiatement Lafont.
- Oh quelle était particulièrement souple et docile au lit, capable de performance qu'une française ne peut égaler, affirmea Danos proche de mon oreille pour être que j'entendais chacune une de ses paroles alors que j'enfonçais mes ongles qu'il restait dans ma chaise.
- Voyez vous donc ça, s'en étonna La Carlingue, un nouveau verre à la main. Bon, Lieutenant si nous arrêtons ce petit jeu-là, où vous feignez l'ignorance de votre présence ici, vous voulez bien ? Sinon, votre charmante petite Chinoise aura une désagréable visite demain matin.
Était ce qu'on appelait être au dos du mur ? Cependant, je n'avais pas encore dit mon dernier mot. Un excès de confiance serait ma perte et si je devais tomber autant les entraîner dans ma chute. Et pour ça, je jouerais la montre.
- Bien…soupirais-je. Que voulez-vous savoir s'exactement ?
- Pour commencer, déclinez votre identité réelle, exigea Henri Lafont ayant encore un verre à la main.
- Mon prénom complet est : Sir Felix James William Calum Graham de Vanily héritier du domaine de Graham de Vanily dans le Northumberland. Né le 23 juillet 1905 à Londres. Je suis lieutenant dans la Royal Air Force.
-Parfait ! j'apprécie mon interlocuteur. Danos, préviens ma femme que je serai sûrement absente de notre soirée. Explique-lui qu'un imprévue me retient au bureau.
- Comme vous voulez patron.
Nous étions plus que tout les deux dans son bureau. Mon regard se porte sur une série de tableau. Mon dieu tous ces œuvres… Le Repos du Guerrier … Le Chemin du Retour… Je comprimais ma rage.
- Magnifique n'est-il pas ? Un merveilleux cadeau du gouvernement d'occupation en remerciant de tous mes services rendus à la société, expliqua longuement Lafont.
- Vous êtes une ordure… marmonnais-je.
- Vous dites, lieutenant ? Je crois ne pas bien avoir entendu ? insista-ti,l la mine sévère alors qu'il quittait son fauteuil.
- VOUS ETES UNE ORDURE ! m'égosillais-je à en faire trembler les murs. VOUS…VOUS ETES AUX ALLEMAND CE QUE LES DEMI-MONDAINE SONT AVEC MOI, AGGENOU A QUEMENDER !
Il quitta sa chaise, ouvre la porte de son bureau et fit signer à son molosse de revenir à l'intérieur.
- Notre cher ami à besoin d'une nouvelle démonstration, veux-tu le ramener au sous-sol ? ordonna froidement Lafont sans même d'adresser le moindre regard
- D'accord, patron.
Il noua brutalement une cagoule autour de mon visage, m'asphyxiant à moitié avec une clé de contention pour m'empêcher de me débattre. Cela me permet de perdre partiellement la connaissance. Quand on me retira enfin la cagoule, trois hommes me dévisageaient, cigarette au bec, un débardeur taché de sang et le visage rouge d'alcool. Ils se partageaient une bouteille de vinasse bon marché qu'ils buvaient au goulot. Sur la table à côté d'une machine à écrire se trouvait un vieux jeu de carte et une dizaine de billets de francs. L'un d'eux avait encore une paire carte qu'il jeta violement.
- Qu'est-ce qu'il ya encore, Abel ? Il veut quoi, le grand manitou ? bougonna un des trois.
- Que vous rappeliez à ce monsieur deux trois règles de la bienséance et de la politesse, expliqua suintement l'armoire à glace.
- Commentaire sur doit s'y prendre ? interrogea celui qui tenait la bouteille de vin.
- N'y aller pas trop fort, le patron veut encore avoir une longue conservation avec lui, ajoutéa-t-il.
L'un déchira le reste ma chemise avec couteau en disant avec un grand sourire malicieux : « De façon, il n'aura plus besoin de ça. » Sur ma plaque violemment contre un chevalet sanglant, attachant mes pieds et mes poings. Henri Lafont refit son apparition, ses chaussures claquant contre le carrelage, il écrasa sa cigarette longuement sur le dos de ma main m'arrachant un râle de douleur.
- Connaissez-vous le nom de choses, officier Graham de Vanily ? s'amusait-t-il. Non ? Et pourtant, je suis sûr que vous avez du déjà vu.
- Des Prügelbock, grognais-je entre mes lèvres.
- C'est exact et vous avez à quoi elle sert ? me redemanda-t-il en concevant d'écraser la cigarette de son souffrir sous la plainte de mes pieds s'étant laissé des mes mains.
- Oui… je sais.
- Très bien, alors vous n'avez plus qu'à compter, applaudissait alors qu'il tirait l'une des chaises de la pièce pendant que ses subalternes faisaient claquer les nerfs de bœuf.
La douleur était indescriptible, tenir pour elle, tenir pour eux !
