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Sur la route
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Harry avait longuement scruté la route poussiéreuse s'étendant sous ses yeux. Droite ? Gauche ? Droite ? Gauche ? Il avait finalement pris une décision, une destination choisie au hasard sans trop savoir où elle le mènerait.
Il ne savait pas combien de temps il pourrait marcher ainsi : à chaque pas, sa jambe se rappelait cruellement à lui.
Depuis qu'»elle« lui avait retiré tous les effets bénéfiques de l'alcool qui coulait dans son sang, il se sentait misérable. Pitoyable. Et son unique désir était de retrouver le soulagement psychologique qu'un bon Whisky pur feu saurait lui apporter.
Harry gratta négligemment sa barbe mal taillée ; Il avait tenté de se rappeler quels livres Hermione avait bien pu lui offrir (puisque ceux-ci avaient visiblement influencé ou même inspiré la créature…), cependant, il devait admettre sa propre négligence : il s'était contenté de les ranger dans son étagère, sans même les ouvrir ou s'y intéresser.
Alors que la nuit commençait à s'installer, il entendit soudain le trot régulier d'un cheval derrière lui. Il se retourna et, en effet, un attelage se dirigeait droit vers lui.
Harry agita les bras dans sa direction, criant : « S'il vous plaît ! Arrêtez-vous ! »
La charrette, remplie de foin, était conduite par un homme âgé accompagné de sa fille.
Le père observa Harry avec méfiance et ce dernier comprit qu'il devait paraître louche, seul et dépenaillé, à la tombée de la nuit, sur un chemin de campagne.
Il essaya de se composer un visage avenant.
La fille, en revanche, sembla plus ouverte : « Mon pauvre ami ! Que vous est-il arrivé ? Des voyous vous auraient attaqués ? »
Harry pensa que cette excuse était parfaite. Il expliqua qu'en effet, il s'était fait agresser quelques heures plus tôt et que tous ses effets personnels avaient été volés. Il se retrouvait désormais perdu, sans rien sur lui.
La fille prit un air horrifié : « Oh mon dieu ! Mais quelle catastrophe ! Où allez-vous donc ? Montez, on peut peut-être vous avancer ? »
Harry ne se fit pas prier et grimpa derrière, dans le foin.
Il expliqua qu'il se rendait à Londres. La fille se retourna, choquée : « À Londres ! Mais vous êtes si loin ! Il vous faudra plusieurs jours pour y retourner ! Nous venons de Little Hangleton, peut-être pourrions-nous vous déposer à l'auberge ? »
Harry les remercia chaleureusement.
Le nom de Little Hangleton lui disait vaguement quelque chose, mais il n'arrivait pas à remettre le doigt sur son souvenir.
La charrette avançait lentement sur la route de campagne et une conversation animée s'engagea entre la fille et Harry. Celui-ci expliqua qu'il n'avait pas vu de charrette tirée par un cheval depuis longtemps. La fille pouffa de rire : « C'est normal, si vous venez de Londres ! Là-bas, tout le monde doit avoir une voiture. Mais ici, à la campagne, seuls les riches peuvent se permettre ces excentricités ! Pour nous, un cheval est cent fois plus efficace et moins couteux ! »
Harry sentit que quelque chose ne tournait pas rond : « Excusez-moi... les voyous de tout à l'heure ont dû me frapper un peu trop fort... pourriez-vous me rappeler la date du jour ? »
La fille prit un air inquiet : « Bien sûr, Monsieur, nous sommes le 27 juin. »
Harry demanda presque dans un murmure : « 27 juin de quelle année ? »
« 1956, Monsieur. Vous êtes certain que tout va bien ? Vous êtes tout pâle. »
La réponse accentua le malaise croissant chez Harry. Il tenta de masquer son trouble en remerciant la jeune femme d'un sourire forcé.
