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Chez lui.

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Harry s'appuya un instant sur sa canne et une décharge de bien-être l'envahi. Il avait fini par céder, bien sûr. Tout le monde finissait toujours par céder à Tom, de toute façon. Il se souvenait du sourire victorieux qui avait fleurit sur les lèvres du sorcier alors qu'il observait Harry approcher. Il n'avait rien dit, mais son air si supérieur avait donné à Harry des envies de meurtre.

Il regarda autour de lui avec attention. Poudlard n'avait pas changé. Les grandes fenêtres du château laissaient filtrer la douce lumière de juillet, projetant des ombres pâles sur le sol en pierre.

Cela faisait bien dix années qu'il n'avait pas remis les pieds à l'école et il fut déçu de constater que le Poudlard de 1956 était la copie conforme de celui des années 1990. Tout semblait comme figé dans le temps. Les couloirs vides et les salles silencieuses résonnaient d'une nostalgie presque embarrassante.

Tom se tourna vers lui : « On se sent chez soi, ici, n'est-ce pas ? »

Harry ne répondit pas, ressentant une nouvelle vague de solitude l'envahir. Il détestait juillet. Plus jeune, il avait toujours redouté cette période car il devait alors retourner « chez lui », dans cette horrible maison qu'on lui avait assignée, chez son oncle et sa tante. Pas une seule fois, il n'avait eu envie d'y retourner. Si on lui avait laissé le choix, il serait resté au château. Il n'aurait pas fait de bruit, se serait contenté d'errer comme un fantôme, mais tout aurait été mieux que Privet Drive.

Harry prit une profonde inspiration pour chasser les pensées sombres qui menaçaient de l'envahir. Il ajusta sa prise sur sa canne, essayant de retrouver une certaine assurance alors qu'il avançait dans le château. Les tableaux semblaient le saluer silencieusement, comme s'ils l'avaient reconnu.

Tom leva les yeux pour admirer la haute voute gothique en pierre : « J'ai toujours adoré cet endroit. »

Et Harry se demanda s'il était possible d'apprécier pleinement Poudlard sans avoir vécu une enfance difficile. Lorsqu'il observait Ron et Hermione, il ne pouvait s'empêcher de remarquer une différence dans la façon dont ils percevaient le château. Certes, ils aimaient l'école, mais leur attachement semblait moins profond que le sien. Ils ne semblaient pas ressentir ce lien viscéral avec chaque pierre, chaque recoin de Poudlard.

Tom, qui avait grandi dans un orphelinat, avait trouvé un foyer à Poudlard.

Harry, maltraité chez les Dursley, avait trouvé un refuge ici.

Et ces expériences difficiles semblaient avoir tissé un lien spécial entre eux et le château. Leurs souvenirs d'enfance étaient marqués par la solitude, la maltraitance, mais aussi par la découverte de cet endroit fabuleux qui les avait accueillis en son sein, comme une mère aimante, quand personne d'autre ne l'avait fait.

C'était leur premier lien, à Tom et lui. Leur première similitude. Leur point d'ancrage. La bouée qui leur avait permis de survivre.

Et Harry était infiniment reconnaissant pour cela.

Puis, ils avaient tous les deux pris un chemin différent et, tandis que Tom évoluait en tyran que le Monde avait connu, Harry, lui, en devenait le sauveur.

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