Cet OS a été écrit dans le cadre du Romantaspic du serveur Potterfictions (rejoignez nous : /862aSNBDk6), un défi d'écriture centré sur la romance (plus ou moins smutty).

Mes contraintes pour ce texte ont été les suivantes :
- Les personnages tirés au sort (pas forcément un pairing) : Teddy Lupin
- Le prompt tiré au sort : Ils partagent le même moyen de transport (bus, portoloin cheminette, etc) tous les jours mais ne se sont jamais parlés. Trouvez un moyen pour les forcer à communiquer.
- Les objets à utiliser dans mon texte : Serviette / Lunettes de soleil / Chaussettes
Horloge / Glace à l'eau / Fourchette
Bougie / Bol / Bouteille de soda

Merci à mes betas Genny237 et Sweet_Aglae pour leur relecture, et à Akhmaleone et Pouik pour toute l'organisation de l'évènement ! :)


C'était un lundi comme un autre. Teddy franchit l'entrée du Magicobus, le cœur prêt à exploser. Les nuages encore bordés de nuit cédèrent la place au mobilier dépareillé caractéristique, le silence fatigué du matin se brisa devant le bourdonnement des discussions. Teddy se dissolut, comme un sucre dans du café, comme une étoile dans l'aube, comme l'absurdité de son existence face à la beauté absolue qui se tenait, là-bas, tranquillement assise sur son pouf.

Elle hantait ses pensées, ses rêves, ses souvenirs, et pourtant, Teddy était incapable de visualiser son visage quand elle n'était pas là. Il ne pouvait qu'effleurer les marques qu'elle avait laissées sur son âme, les contours du trou béant qu'elle avait creusé dans sa poitrine, les seules preuves de son improbable passage sur cette Terre.

Alors, quand il posait ses yeux sur elle, l'esprit de Teddy se tordait, se distendait, tentait d'appréhender l'indicible, pour comprendre l'impensable. Puis, se brisait.

Il y avait une discontinuité. L'espace d'un instant, Teddy mourait pour renaître dans un monde impossible, aux couleurs chatoyantes, aux émotions vivides et au soleil aveuglant. Il y avait du feu dans ses veines, des larmes dans sa gorge, un arc-en-ciel dans son cœur. Elle était la beauté à l'état pur, la vraie, celle qui réparait l'âme et lui donnait des ailes.

Teddy avait douze ans quand il l'avait vue pour la première fois, lors de sa deuxième rentrée à Poudlard. Il avait déjà été amoureux, avant ; pourtant, rien ne l'avait préparé aux hauteurs vertigineuses et aux chutes à couper le souffle, à l'intensité inhumaine de sa vie intérieure et au vide lancinant qui l'entrecoupait quand elle n'était pas là. Il y avait un avant et un après avoir rencontré l'amour.

Ils ne s'étaient jamais parlé. Elle était à Serpentard, lui, à Poufsouffle. Ils n'avaient jamais été affectés en binômes, ils n'avaient pas d'amis en commun, et Teddy l'avait contemplée de loin. Il s'était inspiré d'elle, il s'était nourri de la beauté qui habitait chacun de ses gestes, comme guidés par une entité supérieure qui lui aurait insufflé une grâce hors de ce monde. Jamais Teddy ne s'était senti aussi vivant qu'écorché vif, scié entre l'évidence et l'impuissance. Jamais Teddy n'aurait pu imaginer vivre autrement.

Après avoir quitté Poudlard, Teddy était au plus bas. Il ne la voyait plus. Il avait perdu l'envie de se lever le matin, et la capacité à trouver des choses belles. Il avait continué, malgré tout, et elle s'était effacée, petit à petit, de sa mémoire de mortel, incapable de contenir son souvenir. Il avait trouvé du travail au Département des Mystères, où il étudiait le mécanisme de transformation des loups-garous. Il avait participé aux réunions de famille au Terrier, il avait bu des Bièraubeurres en terrasse avec ses collègues et des whiskys Pur Feu chez Victoire, il avait commencé à voir un psychomage et la vie, finalement, avait suivi son cours.

Jusqu'à ce matin, trois ans plus tard, où il l'avait revue dans le Magicobus.

Lucy Parkinson, tranquillement assise sur son pouf, comme si le monde n'avait pas soudain muté en un univers fantastique à l'air rare, aux reliefs acérés et à l'herbe grasse parsemée de fleurs. Comme si Teddy ne s'était pas pétrifié, plongé dans une dimension de lui-même qu'il n'avait jamais pensé pouvoir explorer à nouveau.

Elle n'avait pas changé : inaltérable, immuable, éternelle. Et Teddy, avait-il réalisé, l'était aussi.

Les jours, puis les mois s'étaient écoulés. Chaque matin, Teddy se réveillait débordant d'énergie, quittait son appartement à la hâte, et appelait le Magicobus, le cœur prêt à exploser. La vie pulsait à nouveau dans son corps, et il accueillait avec délices cette part de lui qu'il avait oubliée, ses tempêtes d'émotions contradictoires, ses chemins de pensée tortueux et sa sensibilité douloureuse aux moindres détails du monde qui l'entourait. C'était une vie intense et difficile, une douce torture de chaque instant, et Teddy ne voyait pas de meilleure définition du bonheur.

C'était un lundi comme un autre, et Teddy franchit l'entrée du Magicobus.

Il allait la voir.


Le Magicobus était bondé.

C'était le lundi 1er septembre, et la totalité de la population sorcière semblait s'être donné rendez-vous dans le moyen de transport le plus populaire des sorciers : les parents qui avaient pris leur matinée pour emmener leurs enfants au Poudlard Express, les élèves de Poudlard surexcités à l'idée de retrouver leurs amis, les travailleurs qui revenaient de vacances, les habitués qui levaient les yeux au ciel. L'habitacle était saturé d'interjections joyeuses ou impatientes, des parfums floraux et musqués de ceux qui s'étaient apprêtés et d'une chaleur presque humide émanée des nombreux corps qui se pressaient les uns contre les autres.

L'humeur de Teddy s'assombrit aussitôt. Son trajet du matin était le moment le plus important de sa journée, et il avait pris l'habitude de le passer sur son fauteuil préféré, à l'opposé du coin des poufs, à contempler le paysage par la fenêtre en écoutant de la musique (comme le poète torturé qu'il était). C'était son rituel. Il ne la voyait que de loin, mais c'était suffisant. C'était assez pour faire exactement la même chose le lendemain.

Aujourd'hui, c'était impossible.

Teddy se fraya un chemin à travers la foule, et tenta de se ménager un espace à l'abri des agressions sonores et corporelles, à coups de petits sortilèges du bout de sa baguette magique. C'était peine perdue, malheureusement, et il se retrouva pressé au milieu de la masse grouillante des clients, sans siège, ni même de point d'ancrage pour ne pas tomber quand le Magicobus repartir-

BANG !

Teddy vacilla et agita maladroitement les bras pour garder son équilibre, balloté dans tous les sens par ses voisins d'infortune et par les à-coups du Magicobus. La chute était inéluctable, mais Teddy sentit une poigne ferme le tirer par l'épaule et le ramener en arrière. L'élan le précipita en position assise, les fesses posées en sécurité sur un pouf. Il leva les yeux et crut à nouveau tomber dans le vide.

« Attention, tu risques d'écraser un gamin, ce serait dommage », sourit Lucy Parkinson.

Teddy entrouvrit la bouche, dans un réflexe louablement social qui consistait à remercier de manière tout à fait naturelle une personne qui venait de vous empêcher de vous éclater la gueule. Toutefois, ses paroles furent étouffées par un grondement dans ses entrailles, un écho d'une force colossale qui poussa dans sa poitrine, transperça son cœur et finit par éclore au fond de sa gorge.

Teddy éclata de rire.

Elle était si belle, si drôle. Il n'y avait pas de mot pour décrire l'ivresse qui imbibait chacune des cellules de Teddy, pas de pensée pour effleurer l'idée absurde qu'elle venait de l'attraper par l'épaule, de lui parler, de lui faire une blague. Pas de justice pour son ironie délicieuse ni pour son sourire moqueur.

Alors, Teddy reprit son souffle, et hocha la tête en direction de Lucy. C'était le mieux qu'il pouvait faire.

Lucy souriait toujours quand elle détourna le regard.


Teddy avait réfléchi toute la journée. Enfin, réfléchir était un grand mot ; il s'était repassé la scène, encore et encore, jusqu'à ce que de la bouillie informe qu'étaient devenus ses souvenirs surdigérés, il ne reste qu'une idée, lancinante, tranchante de certitude : il voulait que ça recommence.

Il voulait lui parler à nouveau, s'abreuver encore au son de sa voix, rire avec elle, et ne jamais s'arrêter.

Il le voulait tellement qu'il était terrifié.

Il avait passé son adolescence à l'aimer en secret. Il avait vécu la moitié de sa vie dans sa tête, à la poursuite d'une silhouette dont il n'était même pas capable d'esquisser les contours, à défaut d'avoir pu la contempler autant qu'il l'aurait voulu — toute la vie. Les rêves étaient un sanctuaire au sein duquel il n'était pas condamné à la regarder de loin ; et parfois, quand il était triste, et qu'il n'en pouvait plus, il avait regretté de se réveiller le matin. La réalité était trop belle et trop dangereuse pour lui.

Mais Teddy avait grandi. Il avait quitté le monde des rêves en même temps que celui de l'enfance, et il avait appris à vivre. Lucy Parkinson lui avait parlé, elle lui avait souri !

Il voulait la réalité, maintenant.

C'était terrorisant.

Teddy se retourna dans son lit. Les divers scénarios qu'il s'imaginait habituellement pour s'endormir étaient teintés de danger, comme si, maintenant qu'il avait pris la décision de se rapprocher d'elle, ils pouvaient se réaliser à tout moment. Il n'arrivait pas à envisager une tentative crédible, et encore moins à prédire sa réaction. Ce n'était plus un jeu dans le fond de sa tête, il n'aurait pas d'approche alternative, pas de deuxième chance pour inventer un nouveau cours des évènements. La gorge de Teddy se serra.

Il voulait tellement être près d'elle. Il pouvait tout donner pour elle. Il pouvait être la personne qu'elle voulait, n'importe qui. Un mec ou une meuf, blond ou brun, grand ou petit, sérieux ou drôle, rassurant ou moqueur, il savait s'adapter. Il pouvait être ce dont elle avait besoin à chaque instant. Il devait seulement savoir ce qu'elle voulait.

Teddy se redressa d'un coup. Il avait une idée.


C'était un mardi un peu spécial, car, aujourd'hui, Ethan Blake entrait pour la première fois dans le Magicobus. Il jeta un sourire éclatant à Stan Rocade qui lui rendit sa monnaie d'un air sombre — pas du matin, probablement, le pauvre bougre. Ou peut-être un peu jaloux ?

En même temps, Ethan était purement canon. Teddy avait pris soin de peaufiner son identité du jour, grâce à ses dons de métamorphomage, et il n'était pas peu fier de son travail : des pommettes dessinées, des yeux doux comme la nuit, des cheveux soyeux comme un vent d'été. Il avait rajouté des petites taches de rousseur çà et là, et saupoudré des rougeurs adorables sur ses joues. De loin, de près, Ethan était à se damner.

Comme il fallait bien commencer quelque part, Ethan était un stéréotype masculin : grand, sportif, il serait aussi avenant et séducteur. Teddy avait complété la panoplie de son personnage par une tenue moldue décontractée, assortie d'une serviette de sport passée derrière sa nuque et de lunettes de soleil posées sur son nez. La touche finale : Ethan Blake, le nom idéal pour un beau gosse populaire et probablement capitaine de son équipe de Quidditch. Parfait.

Teddy avait décidé de faire des expériences : après tout, les réponses n'allaient pas venir toutes seules. Avant de se confronter à la réalité, il avait besoin d'informations de première main sur les goûts de Lucy. Si elle aimait Ethan Blake, Teddy aurait une idée du genre de personne qu'il devrait être pour lui plaire (il ne garderait pas le nom, par contre, c'était juste pour la déco). Si elle ne l'aimait pas, alors il ferait d'autres tests.

Teddy prit une inspiration, et s'avança dans le Magicobus. Il avait adopté la démarche des gens qui savaient où ils allaient, très au fait que personne ne les en empêcherait. Ethan avait confiance en lui, il avait conscience de ses qualités, et il savait les mettre en avant.

Teddy-Ethan prit place sur un pouf, en face de Lucy Parkinson. Il avait les mains qui tremblaient, mais affichait un sourire sûr. Ethan en avait vu d'autres, ce bourreau des cœurs, et il n'allait pas y aller par quatre chemins.

« Salut, est-ce que t'aurais l'heure ? » demanda Teddy-Ethan, en enlevant négligemment ses lunettes de soleil.

Lucy Parkinson releva les yeux de l'écran de son téléphone, et haussa un sourcil. Puis, sans émettre le moindre son, elle eut un mouvement de tête en direction de l'horloge géante suspendue au-dessus de la cabine du conducteur, derrière elle, juste en face d'Ethan. Teddy-Ethan suivit son regard, et se gratta machinalement la nuque en offrant à Lucy un sourire gêné (ultra-craquant, Teddy s'était entraîné dans le miroir) :

« Bien vu, accorda-t-il avec un petit rire. Désolé pour le dérangement. »

Lucy haussa les épaules.

« C'est pas moi la plus dérangée, lâcha-t-elle d'un ton badin.

— Parce que je suis stupide ? rigola Teddy-Ethan, ravi d'avoir entamé la discussion.

— Parce que c'est suicidaire de casser les couilles aux gens de bon matin. »

Aïe. Un peu mérité.

Ethan était peut-être un peu casse-couilles, mais il était avant tout un gentleman. Son rôle venait facilement à Teddy, pas parce qu'il aimait particulièrement être séducteur, mais parce qu'il avait appris très tôt à bien se faire voir. C'était indispensable pour un orphelin à moitié loup-garou, autant que pour le filleul de Celui-qui-a-vaincu. Ethan était un garçon gentil, sans histoires, pas vicieux pour un sou. Il incarnait un idéal que Teddy avait longtemps tenté d'atteindre, autrefois : être une personne que tout le monde aimait.

Ce n'était pas son genre de se morfondre alors qu'il avait été pris en flagrant délit d'un manque navrant de subtilité.

Teddy-Ethan s'éclaircit la gorge pour s'excuser à nouveau.

« Je rigole, détends-toi », coupa Lucy avant qu'il ait pu prononcer le moindre mot. Un petit sourire s'était dessiné au coin de ses lèvres. « J'ai bien le droit de me foutre de toi, moi aussi ? Ou c'est réservé aux beaux gosses en chaleur ? »

Teddy secoua la tête, amusé, et surtout soulagé.

« Y'a plus de respect pour les traditions ancestrales des beaux gosses », soupira-t-il en posant ses lunettes de soleil à mi-hauteur sur son nez, dans une caricature de son personnage qu'il espéra réussie. Il poussa le vice jusqu'à invoquer quelques étincelles du bout de sa baguette, pour accompagner la blancheur de son sourire, et accentuer la blague. Ethan, ce mec parfait, pratiquait l'humour et l'autodérision, c'était évident.

Lucy émit un son à mi-chemin entre un rire, une toux et un reniflement. Puis, elle se leva.

« Ravie d'avoir fait ta connaissance, euh… ?

— Ethan. Ethan Blake », répondit Teddy avec un sourire étincelant.

Lucy pinça les lèvres pendant une longue seconde, comme si elle était sur le point d'exploser de rire ou de s'effondrer en sanglots, avant de hocher la tête.

« Ethan Blake, répéta-t-elle avec un léger trémolo dans la voix. D'accord. » Elle prit une grande inspiration. « Eh ben c'était super. C'est mon arrêt, bonne journée ! »

Elle lui fit un léger signe de la main, et sortit du bus à l'arrêt du Ministère de la Magie.

C'était l'arrêt de Teddy, aussi, mais il ne la suivit pas. Il devait repasser chez lui pour reprendre son apparence avant d'aller au travail.


C'était un mercredi comme un autre, à ceci près que Teddy ne s'éveilla pas en sursaut, prêt à se pomponner pour aller prendre le Magicobus. Lorsque Teddy émergea, ce jour-là, il était pensif.

Il ne savait pas quelle conclusion tirer de son expérience de la veille. Teddy-Ethan avait été volontairement peu subtil dans le but d'entamer une discussion, et cela avait fonctionné. Teddy avait eu peur d'avoir insulté Lucy dans son intelligence, mais elle avait surtout eu l'air d'avoir apprécié de se moquer de lui en guise de vengeance. Il avait même la nette impression qu'elle avait beaucoup ri à ses dépens. De l'avis de Teddy, ils étaient quittes, et la discussion avait eu un impact plutôt neutre.

La conclusion ne venait pas. Devait-il ressembler à Ethan pour plaire à Lucy ?

Ethan était fait pour plaire à tout le monde, mais Teddy avait appris depuis longtemps que c'était une quête sans fin, vouée à l'échec. Peut-être que pour plaire à Lucy, pour vraiment lui plaire, il fallait faire un choix plus osé, moins consensuel. Après tout, les Serpentard n'étaient pas connus pour être des gens lisses et politiquement corrects.

Teddy s'échappa des draps, pris d'une inspiration soudaine.

Teddy-Emily entra dans le Magicobus, et toisa sans pitié les personnes qui la fixaient jusqu'à ce qu'elles baissent la tête. Puis, elle s'avança dans l'allée, en prenant soin de claquer ses talons à chaque pas, jusqu'à se laisser tomber sans grâce sur un pouf au hasard. Elle n'accorda plus un regard aux idiots qui n'avaient rien de mieux à faire que de continuer à l'observer, et sortit son petit-déjeuner de son sac : une glace à l'eau, un bol de céréales et un soda.

Teddy était enthousiaste à l'idée de jouer le rôle d'Emily (il avait choisi un prénom au hasard, ce n'était qu'une considération bassement matérielle pour son personnage). Son unique but, contrairement à Ethan Blake, était d'emmerder le monde. Elle était du genre à prendre son petit-déj dans le bus, à verser son soda dans son bol de céréales, à manger sa glace avec une fourchette, puis à dévisager les gens qui la regardaient en leur faisant des grimaces, juste pour instiller ce sentiment subtil et vicieux, la gêne — et ce, sans pour autant pratiquer des actes ouvertement répréhensibles. Emily jouait avec les limites et tordait les conventions. Elle était inspirée d'une part de Teddy qui était en guerre contre le monde, et surtout contre sa famille.

Les Potter étaient une famille parfaite. Un papa, une maman, deux garçons et une fille. Un héros de guerre et sa princesse, le chef des Aurors et une Poursuiveuse professionnelle, un mari et une femme unis par les liens sacrés du bien commun. Tous deux avaient élevé au rang d'art la discipline qui consistait à afficher le même sourire sur une photo de famille que sur la une du journal. Ethan Blake n'était pas un hasard, il était un Potter jusqu'au bout des ongles, autant que James, Albus ou Lily. Il était Teddy tel qu'il aurait voulu être, pour ne pas être le filleul dont on ne savait pas quoi faire, le vestige du passé qui rappelait aux héros le poids de leurs échecs et des morts qu'ils n'avaient pas su empêcher.

Emily était Teddy tel que sa famille ne voulait pas qu'il soit, une enfant imparfaite, fière de ses défauts et de son humanité. Elle revendiquait le droit d'être bien vivante, d'exister comme une preuve indéniable de l'injustice de ce monde, des gens bien qui mouraient et des gens moins bien qui restaient là malgré tout. Teddy était persuadé que Harry, quelque part, comme beaucoup d'hypocrites, aurait bien aimé s'autoriser à être un Harry-Emily.

Teddy-Emily lécha sa fourchette d'un geste suggestif, qui aurait fait pâlir d'horreur Ginny Potter. Elle rangea les restes de son petit-déjeuner dans son sac et émit un rot sonore. Puis, elle sortit un miroir de sa poche et, à l'aide de sa baguette, corrigea son trait d'eye-liner. Elle arrangea ses cheveux violets coiffés en pétard et enfin, une fois satisfaite de son apparence, poussa un soupir ennuyé.

Teddy-Emily releva la tête, et tomba sur le regard pensif de Lucy Parkinson.

« Tu veux ma photo ? » demanda Teddy-Emily.

Lucy eut un petit rire.

« Je veux bien, répondit-elle sans se démonter. J'ai jamais vu quelqu'un capable de refaire son liner dans le Magicobus. » Elle se rapprocha en posant ses coudes sur ses genoux, pas rebutée le moins du monde par les manières d'Emily. « J'peux avoir une notice avec la photo ? »

Teddy n'était pas surpris outre mesure par la tournure des évènements. De tous les personnages qu'il pouvait jouer, Emily était peut-être celle qui ressemblait le plus à la Lucy qu'il avait vue toutes ces années — c'était sans doute pour cette raison qu'il l'aimait autant. Le compliment lui alla droit au cœur, et il laissa une bouffée de joie se répandre dans sa poitrine.

« Pas de problème », sourit Teddy-Emily.

C'était une plaisanterie, à la base, mais Lucy ne l'entendait pas de cette oreille. Elle se rapprocha de Teddy-Emily, passa un bras derrière ses épaules et tendit son téléphone à l'envers devant elles. « Bouge pas », intima-t-elle avant de prendre la photo et de reprendre sa place. « Parfait ! » s'exclama-t-elle, puis elle tendit son téléphone à Teddy-Emily pour qu'elle puisse voir leur selfie.

Teddy était stupéfait. Il n'eut pas le temps d'assimiler ce qu'il voyait que Lucy reprenait son téléphone pour lui tendre à nouveau une seconde plus tard, ouvert cette fois sur la page des contacts.

« Pour que tu m'envoies la notice », expliqua-t-elle avec un sourire entendu.

D'un geste automatique, Teddy rentra son numéro sous le nom d'« Emily », et rendit son téléphone à Lucy.

« Trop cool, remercia-t-elle. Je t'ai envoyé un message, moi c'est Lucy. À la prochaine ! »

Un signe de la main plus tard, et elle était descendue du Magicobus à l'arrêt du Ministère. Teddy laissa échapper un gémissement et se prit la tête dans les mains, sans plus de considération pour son bel eye-liner. Dans sa tête, une seule pensée tournait en boucle : AAAAAAAAAAAAHHHHH !


C'était un jeudi qui s'annonçait mal.

Notamment à cause d'un problème essentiel, une complication qui touchait tous les humains, au moins une fois dans leur vie : la panne de réveil. Les Moldus étaient des génies qui avaient révolutionné la technologie sorcière, sans aucun doute. Des putain de génies du mal.

Teddy s'éveilla en sursaut aux premières lueurs du jour, qui ne pointaient d'habitude que lorsqu'il quittait son appartement. Le cœur battant la chamade, il invoqua l'heure d'un sortilège. Il poussa un juron et se précipita hors de son lit.

Il n'était pas question de manquer le Magicobus. Teddy voulait encore parler à Lucy, et il n'avait que quelques minutes avant qu'elle ne descende au Ministère. Il n'avait pas eu le temps de se préparer ni de réfléchir à son personnage du jour, alors il remit son choix à plus tard et enfila à la hâte une robe de sorcièr·e (unisexe). Il dévala les escaliers jusqu'à l'entrée de son immeuble et agita sa baguette.

Une demi-seconde plus tard, le Magicobus déboulait dans un vacarme de tous les diables, et Teddy se métamorphosait en la première personne qui lui passait par la tête : sa cousine Victoire.

Victoire avait le visage constellé de taches de rousseur, des yeux bleu myosotis et des cheveux qui réussissaient l'exploit d'être blond vénitien avec des reflets argentés. Il n'était pas simple pour un Teddy à moitié endormi d'imiter une personne qui avait des racines vélanes, mais elle était le visage le plus familier qu'il avait en tête : Victoire était sa meilleure amie, la seule personne de sa famille en qui il avait confiance. Même avec la tête dans le cul, il pouvait reproduire son visage, sa silhouette et sa voix les yeux fermés.

Par contre, avec la tête dans le cul, il oubliait des détails importants, comme par exemple le fait que Lucy connaissait Victoire.

« Victoire ?! »

La voix tomba comme un couperet, douloureusement familière. Teddy se résolut à interrompre son chemin dans l'allée principale pour se tourner vers Lucy Parkinson, avec la motivation d'un condamné à mort. Il s'assit sur un pouf, en face d'elle, et serra les dents en priant pour ne pas faire de conneries.

« T'as l'air tombée du lit, ma pauvre », nota Lucy avec un regard critique. Elle considéra Teddy de haut en bas et ajouta : « Tu feras gaffe, t'as oublié de mettre des chaussures. »

Horrifié, Teddy constata qu'il était bel et bien en chaussettes. Il s'empressa d'invoquer une paire de bottines quelconques à l'aide d'un informulé.

« Ça fait grave longtemps qu'on s'est pas vues ! » s'exclama Lucy sans s'attarder plus longtemps sur le spectacle pitoyable que lui offrait Teddy sous les traits de sa cousine. « T'es de retour sur Londres ? »

Victoire Weasley avait décidé d'entamer des études supérieures dans le domaine de la mode et de la cosmétique sorcière, dans le pays de sa mère, la France. Elle venait de rentrer en seconde année, et, à l'heure qu'il était, elle devait être en train d'étudier exactement en quoi l'apparence actuelle de Teddy-Victoire (une robe toute simple, pas de maquillage et des chaussettes à motifs de boursouflets) était un sacrilège. Il adressa des excuses muettes à sa cousine, et se promit de ne jamais lui raconter cet épisode à moins de trois bouteilles de whisky Pur Feu dans le crâne.

« Ma rentrée est la semaine prochaine, mentit Teddy avec tout l'aplomb qu'il possédait. Je profite encore un peu des vacances. » Il ne s'agissait plus de faire des expériences pour connaître les préférences romantiques de Lucy, mais de limiter la casse. Il plaqua un grand sourire sur son visage et tenta un bluff : « Et toi, tu deviens quoi en ce moment ? Ça me fait trop plaisir de te voir ! »

Lucy eut un sourire sincère, et Teddy s'applaudit silencieusement. Victoire n'avait qu'un an de moins que Lucy, et si elles n'avaient jamais été amies, elles se connaissaient de loin. Les connaissances qui se retrouvaient après plusieurs années avaient tendance à se montrer bien plus avenantes qu'elles ne l'avaient jamais été pendant la période où elles s'étaient côtoyées.

« Pareil, approuva Lucy. Bah, tu sais, la routine… je bosse à la Justice Magique, j'essaye de choper quelques responsabilités. On verra ce que ça donne dans quelque temps », éluda-t-elle pour conclure.

Teddy avait envie d'en savoir plus. C'était la première fois qu'il avait une vraie discussion avec elle ; il savait qu'elle travaillait au Département de la Justice Magique, mais tout l'intéressait chez Lucy Parkinson, et surtout quand c'était elle qui en parlait.

Une idée terrible lui vint à l'esprit. Après tout ce qu'il avait déjà fait, Teddy n'eut pas la force de la repousser.

« Et côté cœur ? » osa Teddy, avec un sourire mutin qu'il avait emprunté à sa cousine.

Un silence de quelques secondes s'installa, juste assez pour que Teddy regrette son audace, trop peu pour avoir le temps de faire marche arrière.

Lucy soupira, et, contre toute attente, un large sourire s'épanouit sur ses lèvres. Le cœur de Teddy se tordit. Il savait ce que ça signifiait.

« Ouais, y'a quelqu'un, confirma Lucy. Je l'ai vue qu'une fois, mais elle a l'air trop cool. J'ai chopé son numéro hier. »

L'esprit de Teddy devint brumeux, visqueux, incapable de transmettre les informations nécessaires à la compréhension de la situation. Sans instructions supplémentaires de la part de son cerveau, les traits de Teddy-Victoire s'étirèrent automatiquement en un sourire joyeux :

« Oh, trop cool ! J'espère que ça marchera entre vous ! »

Lucy hocha la tête et se leva pour descendre à son arrêt.

« J'espère aussi. En tout cas, ça m'a fait plaisir de te revoir, bon courage pour ta rentrée ! »

Et, comme chaque jour depuis près d'une semaine, Teddy la vit s'éloigner avec un petit geste de la main à son intention.


C'était le pire vendredi qui ait jamais existé, et il n'était même pas sept heures du matin.

Teddy n'avait pas dormi de la nuit. Il n'était pas allé à son travail la veille, et il avait passé les dernières presque vingt-quatre heures à phaser sur son lit, suspendu entre le déni et la lente réalisation qu'il avait merdé.

Lucy Parkinson, la fille qu'il aimait depuis qu'il avait douze ans, avait un crush sur Emily.

Et Emily n'existait même pas.

Emily n'était qu'un rôle que Teddy, le lâche, avait préféré endosser plutôt que d'aller lui parler lui-même. Emily ne répondrait jamais à son message ni ne lui apprendrait comment se maquiller dans le Magicobus. Emily, qui n'avait aucun mal à être elle-même, avait séduit Lucy en trois coups de liner, avant de partir pour toujours.

Car Teddy ne pouvait pas continuer ainsi, n'est-ce pas ? Il ne pouvait pas être Emily, tout comme il ne pouvait pas être Ethan Blake, ou Victoire. Il avait laissé à d'autres personnes le privilège d'adresser la parole à Lucy, de la faire rire, de lui soutirer ses secrets, pendant que lui-même se contentait de la traiter comme un cobaye. Il l'avait piégée. Il lui avait fait miroiter des formes qui n'avaient pas de consistance, pour les lui retirer sans explication.

Teddy se sentait à la fois vide et sale. Les sentiments qui l'avaient guidé toutes ces années étaient souillés par sa bêtise et son égoïsme. Il avait toujours cru que Lucy Parkinson était la clef de cette porte magique qui s'ouvrait en lui quand il constatait l'étendue de sa beauté, mais il avait eu tort. La seule personne qui était responsable du vide, du moche, du triste, c'était lui. Et s'il n'était pas digne de la beauté, alors même Lucy Parkinson, avec ses airs de divinité incarnée, ne pouvait rien faire pour lui.

Alors, Teddy se leva du lit, sans peur au ventre, sans joie au cœur. Plus de dimension secrète, plus de monde fantastique, juste une coquille vide d'émotions, poussée par l'évidence. Il allait tout expliquer à Lucy.

Teddy se prépara, descendit les escaliers, sortit de son immeuble et appela le Magicobus. Il salua Stan Rocade, paya son trajet, et s'avança dans l'allée centrale.

Lucy Parkinson était là, tranquillement assise sur son pouf.

Teddy-Teddy s'assit en face d'elle, et son téléphone vibra dans sa poche.

D'un geste automatique, un peu trop enclin à repousser l'échéance, il consulta la notification. Elle provenait du numéro de Lucy, celui qu'elle avait donné à Emily, et qu'il n'avait même pas enregistré mercredi.

Salut, Teddy :)

Teddy releva brusquement la tête et sa nuque craqua au passage. Lucy le fixait, avec son éternel sourire en coin. Face à son manque de réaction, elle leva un sourcil. Puis, elle saisit à nouveau son téléphone.

Tu préfères Ethan Blake ? Emily ?

Après quelques instants, elle ajouta :

Tu peux pas piquer le nom de ta cousine, tu sais.

Teddy n'avait pas de mots. Alors, Lucy leva les yeux au ciel et prit la parole :

« Eh, fais pas cette tête. » Elle repoussa une mèche qui lui barrait le visage, avant de lui offrir un grand sourire. « Si tu voulais vraiment réussir ton coup, fallait pas utiliser la même baguette toute la semaine. » Sans paraître se rendre compte qu'elle se méprenait sur les raisons de l'humeur de Teddy, elle continua : « Ou juste, fallait pas me prendre pour une débile. »

Il n'y avait pas une once d'agacement sur son visage illuminé par la victoire (et une bonne dose d'auto-suffisance). Lucy était rayonnante de malice, ses yeux étaient plissés et sa langue pointait entre ses dents dans un sourire presque sardonique. Teddy, qui ne comprenait décidément rien à rien, sentit son coeur s'alléger. Les mots lui revinrent :

« Je suis vraiment désolé. »

Lucy lui adressa une grimace d'incompréhension.

« D'avoir essayé de te manipuler », clarifia Teddy. Maintenant qu'il avait ouvert la bouche, il ne pouvait plus s'empêcher de parler. Il y avait une urgence dans sa voix, il avait désespéré de lui adresser la parole pendant très longtemps, pendant des années et enfin, son courage était revenu. « De te soutirer des informations, de me faire passer pour d'autres personnes…

— Personne me manipule. »

La voix avait claqué, tranchante. Comme pour se faire pardonner de l'avoir coupé, Lucy reprit, d'un ton moins brusque, mais toujours aussi moqueur :

« C'est impossible, tu vois bien. » Comme Teddy n'avait pas l'air convaincu, elle leva les yeux au ciel à nouveau et ajouta : « J'vais pas t'en vouloir de m'avoir, quoi, pas blessée ? J'aurais pu être honnête, moi aussi, mais… » Il y eut un trémolo dans sa voix, qu'elle échoua à ne pas transformer en éclat de rire. « Ethan Blake était vraiment parfait. Et après, y'a eu Emily — vraiment, tu me montreras comment tu fais ton liner, parce que c'était impressionnant — et puis après- »

Cette fois, Lucy partit en fou rire. Il lui fallut une bonne minute pour se calmer, sous le regard étonné mais de plus en plus rieur de Teddy.

« Après, reprit-elle en s'essuyant le coin des yeux, t'es littéralement venu avec la gueule de ta cousine ! »

Cette fois, Teddy joignit son rire au sien. Les mots de Lucy étaient plus qu'un baume sur ses insécurités, ils étaient le début d'une histoire qu'il n'avait jamais réussi à écrire. Maintenant, il comprenait pourquoi : c'était le genre d'histoire qui s'écrivait à deux.

« J'ai tellement abusé, putain, jeta Teddy avec dépit en passant ses mains sur son visage pour masquer sa honte. J'avais juste trop peur de te parler, d'être moi-même, je sais pas. »

Lucy fronça les sourcils.

« Mais t'étais toi-même, Teddy. » Elle attendit quelques secondes avant de reprendre, comme pour ménager une attente, et ajouter du poids à ses mots — Teddy la soupçonnait d'avoir un côté théâtral qui rivalisait avec le sien. « Enfin, j'espère, parce que j'ai vu bien des promesses dans les beaux yeux d'Ethan Blake… »

Teddy éclata de rire, un vrai rire, et quelque part en lui, quelque chose se brisa.

Quelque chose de rigide, de cassant, comme des os supplémentaires dans sa cage thoracique, ou des images désincarnées d'Ethan Blake et d'Emily, ou des bouts de verre teinté devant ses yeux, qui se fracassaient en mille morceaux, se réduisaient en poussière, et se dissolvaient en lui. Enfin, Teddy respirait, Teddy riait, et Teddy voyait.

Lucy Parkinson, tranquillement assise sur son pouf, la plus belle personne du monde. Elle aussi, elle existait, elle riait avec lui, et elle le voyait. La scène était la même, et pourtant, elle avait radicalement changé.

Teddy s'approcha de Lucy, en posant ses coudes sur ses genoux, et il lui sembla qu'il n'avait jamais été aussi facile de bouger et de parler, dans ce monde magique qu'il n'avait fait qu'entrevoir jusque là. Il eut un sourire en coin, qu'il lui avait volé :

« Je croyais que t'avais un crush sur Emily ? Qu'est-ce qu'elle dira si tu la laisses tomber pour Ethan Blake ?

— Merde », s'écria Lucy en plaquant une main sur sa bouche, les yeux écarquillés. Elle était décidément une actrice hors pair, pas étonnant que Teddy se soit fait avoir. « Il faut absolument que je lui explique la situation au plus vite. »

Elle saisit son téléphone et tapa frénétiquement sur l'écran. Teddy consulta ses messages :

Salut Emily, ça te dirait qu'on se voit ce weekend ?

Teddy réprima un sourire et répondit :

Désolée Lucy, mais je sors avec Ethan Blake, maintenant. Il est extrêmement beau gosse. Bonne journée.

Lucy releva brusquement la tête et le fusilla du regard.

« Tu peux pas sortir avec toi-même, Lupin. Rendez-vous demain, même heure, dans le Magicobus. »

Lucy Parkinson se leva, et descendit à son arrêt avec un petit signe de main.

Teddy resta là, tranquillement assis sur son pouf, hilare.

C'était peut-être ça, finalement, la définition du bonheur.


Lucy Parkinson avait toujours détesté les transports en commun. Il y avait trop de monde, trop de bruit, trop de potentiel de nuisance à sa tranquillité. Aujourd'hui, pourtant, ce n'était pas le pire, puisque le 1er septembre était passé la veille.

Lucy monta dans le Magicobus, et se prépara à rejoindre son coin préféré, avant de se figer devant le spectacle qui s'offrait à elle.

Ethan Blake était à moitié allongé sur un pouf, en maillot de bain, le torse nu et huilé, des lunettes de soleil sur le nez et une rose entre les dents. Il était entouré de pétales et de bougies en suspension, et un parfum sucré flottait dans l'air. Il avait dû lancer un sortilège, car le coin des poufs était sombre et personne ne semblait avoir remarqué la scène qui se jouait en plein lieu public. Il entrouvrit les lèvres et la rose tomba au sol :

« Toi et moi, ça fait un an qu'on s'est rencontrés, bébé. Il faut fêter ça… »

Le ton suggestif qu'il avait employé acheva de ruiner le self-control de Lucy. Elle explosa de rire et fonça sur Teddy pour le prendre dans ses bras.

« Je t'aime trop, Teddy, putain. »