CHAPITRE 5 : Le supplice du psychopathe
Courage, chevaliers d'Or ! Vous devez traverser les douze maisons du Zodiaque, défendue chacune par un chevalier de Bronze, et cela en moins de six heures, pour sauver Aioros, dont le coeur a été percé d'une flèche !
Shura, resté en retrait, a livré un combat féroce dans la quatrième maison, celle du Loup. Il a été contraint d'inventer une nouvelle attaque pour venir à bout de Nachi.
- Par la Baffe du Capricorne !
De son côté, Aioros, entre la vie et la mort, se fait agresser par Jabu.
- Pourquoi c'est toi qu'Athéna a choisi comme cheval et pas moi ?! se plaint la Licorne.
Et par un miracle vraiment miraculeux, Aioros, le pire archer de tous les temps, est parvenu à tirer sa flèche d'or dans le coeur de Jabu !
Le reste des chevaliers d'Or est en route vers la cinquième maison, celle de l'Hydre. Dohko met en garde ses camarades :
- ... et si on coupe une tête à l'Hydre, deux repoussent.
Masque-de-Mort fait rapidement le calcul dans sa tête : si on coupe une tête, deux repoussent. Ensuite, si on en coupe deux, quatre repoussent. Puis huit. Puis seize. Toujours deux fois plus. Il est donc possible de couper une infinité de têtes ! Motivé comme jamais, le psychopathe accélère le pas et sème ses compagnons.
Le coeur de Masque-de-Mort bat la chamade.
- Béni soit celui qui a créé l'Hydre !
Il grimpe les marches quatre à quatre.
- Grâce à lui, je vais enfin pouvoir garnir ma maison dignement ! Où que je tournerai la tête, je ne verrai que des têtes ! J'ai bien fait de venir !
Les autres chevaliers d'Or, moins motivés que lui, ne peuvent que le regarder s'éloigner, puis disparaître au loin.
Et maintenant, avance rapide ! Retrouvons-les devant l'entrée de la cinquième maison. Ils craignent le pire.
- Pressé comme il l'était, il a sûrement déjà pris la tête du chevalier de l'Hydre, devine Aldébaran.
Aphrodite grimace.
- Que quelqu'un entre cacher le corps, je veux pas voir ça !
- Tu crois que nous on en a envie ? répond Camus.
Shaka hausse les épaules.
- Vous avez qu'à fermer les yeux comme moi si vous voulez pas voir la boucherie !
- Masque-de-Mort est vraiment fou à lier, déclare le Vieux-Maître. D'une manière ou d'une autre, il faudra s'en occuper. Sinon un jour, c'est nos têtes qu'il prendra !
- Bon, et si on entrait ?
Ainsi vient de parler Mû. Les autres lui lancent des regards étranges.
- Me regardez pas comme ça ! Si Masque-de-Mort a déjà tué l'Hydre, il vaut mieux que je récupère son sang avant qu'il ne coagule.
Plein d'appréhension, ils foulent le sol de la cinquième maison et s'y enfoncent. Fausse alerte : l'Hydre est toujours entier et vivant.
- On est arrivés à temps !
Il y a une autre surprise : Masque-de-Mort est torse nu. Dohko pense qu'il a éjecté son armure et prend un air sévère.
- Ne me dis pas que tu as copié la technique de mon disciple !
Peu probable, car Masque-de-Mort a l'air complètement abattu.
- Mon armure ! Elle m'a quitté ! Mais pourquoi ?!
Pour tenter de le comprendre, il faut rembobiner un peu.
...
Quelques instants plus tôt, Masque-de-Mort entrait en toute hâte dans la maison de l'Hydre.
Dès qu'il trouve le chevalier de Bronze, ce dernier se présente.
- Je suis Ichi...
- T'es l'Hydre ou pas ?! le coupe Masque-de-Mort.
- Malpoli !
- Réponds !
- Oui je suis l'Hydre.
Le visage de Masque-de-Mort s'illumine.
- Parfait ! File-moi toutes tes têtes !
Ichi bat plusieurs fois des paupières.
- Pardon ?!
- File-moi ton infinité de têtes !
- De quoi tu parles ?!
- Inutile de faire l'ignorant, je sais tout ! Une fois que je t'aurai coupé la tête, deux autres repousseront !
- Hein ?! Mais c'est quoi, cette histoire ?!
Masque-de-Mort reste songeur un instant.
- Au fait, tes deux têtes qui vont repousser, ce seront les mêmes têtes que la première tête, ou ce seront deux têtes différentes ?
Ichi le fixe de ses yeux noirs avec de plus en plus d'incompréhension. Masque-de-Mort ajoute :
- Moi je préférerais que ce soit des têtes différentes. Tu comprends, ça sert à rien que je décore ma maison avec les mêmes têtes !
- T'as une araignée au plafond ou quoi ?!
- Non, pas des araignées, des têtes ! Mon plafond est tapissé de têtes. Bon, tu réponds à ma question ?
Ichi est trop sidéré par le comportement de son adversaire pour répondre.
- Ne t'inquiète pas, je ne te tuerai pas ! Ce serait tuer la poule aux oeufs d'or ! Ou plutôt, l'hydre aux millions de têtes, je devrais dire ! Ha ! Ha ! Ha !
Comment a-t-on pu laisser un fou pareil devenir chevalier ?! s'estomaque Ichi.
- Maintenant, comme tu m'es sympathique, je vais t'anesthésier avec les Vagues d'Hadès, puis je procéderai au premier "prélèvement". D'accord ?
- NON ! parvient enfin à articuler Ichi.
- Non ? Bah, peu importe que tu sois consentant ou non, c'est de têtes qu'on parle !
Le psychopathe imagine déjà l'entièreté de sa maison recouverte de têtes, à l'intérieur comme à l'extérieur. Le sourire jusqu'aux oreilles, il lève son doigt, prêt à invoquer sa technique. Quand tout à coup, son armure se détache !
- Mais ! Que se passe-t-il ?!
L'armure du Cancer se reforme et puis s'envole au loin.
...
Retour au moment où les autres chevaliers d'Or les trouvent.
- Infinitêtes ! appelle Masque-de-Mort.
Silence.
- Hé, Infinitêtes !
Re-Silence.
- Hydre !
- Oui ? répond Ichi.
- Qu'est-ce que t'as fait à mon armure ?!
- Rien du tout.
- Mais alors, pourquoi ?
- J'en sais rien, mais maintenant, tu es à ma merci !
Ichi lève ses mains et ses griffes. Masque-de-Mort, encore sous le choc, réagira-t-il à temps ?
- On devrait peut-être l'aider ? suggère Aphrodite.
- Tu plaisantes ?! réagit Dohko. S'il meurt, il y aura un serial killer en moins sur Terre ! C'est même l'Hydre qu'on devrait aider !
- Allons, allons, s'en mêle Milo. Tu veux nous faire croire que t'es un saint, toi ?
- Qu'est-ce que Shunrei t'a dit ?! réplique illico le Vieux-Maître, une goutte de sueur perlant à son front.
Un sourire en coin se forme sur le visage du Scorpion.
- Elle nous a tout dit ! affirme Milo.
- Elle était consentante ! se défend Dohko.
- T'as quand même pas couché avec elle ?! craint Aphrodite, choqué.
- C'est pas ma faute ! À chaque fois que je fais un cauchemar, j'ai trop peur de rester seul, alors je lui demande si je peux aller dans son lit. Elle a toujours accepté !
- Vieux pervers !
- Ah non ! s'offusque l'ancien. Je l'ai jamais touchée !
- T'es sûr ?
- Oui, je l'ai presque jamais touchée !
- Presque ?!
- À chaque fois qu'elle m'a dit non, j'ai pas insisté !
- C'est vrai ça ? le sonde Milo, suspicieux.
- Promis juré !
- Tu nous caches encore quelque chose !
- Comment tu sais ?! demande le Vieux-Maître dont la peau vire au violet pâle.
- Parle !
- Eh bien, de temps en temps, je l'obser... veille sur elle à chaque fois qu'elle se déshabille avant d'aller nager.
- Tu t'es rincé l'oeil, ouais !
- Oh ça va ! s'emporte le doyen. Vous auriez fait quoi, à ma place ?
- Là tu marques un point, admet Milo.
- Ah ! triomphe son interlocuteur.
- Toutefois, en plus de deux siècles d'existence, t'as dû faire un tas de trucs pas très catholiques, quand même !
- Ne m'accuse pas sans preuve !
- Milo n'a pas tort, intervient Shaka. Tu n'as sûrement pas été sage deux siècles de suite ! Tout comme il n'y a pas de mal parfait, il n'y a pas de bien parfait non plus. Sauf moi bien sûr !
- Là tu te trompes ! rétorque Dohko.
- Sacrilège ! crie Shaka, courroucé.
Le chevalier de la Balance prend peur.
- Je parlais pas de toi ! (puis ajoutant tout bas) Même si ça aurait pu être le cas.
- Qu'est-ce que t'as dit ?!
- Je disais que je parlais de Masque-de-Mort. Regarde-le, il est le mal parfait !
Pendant leur causette, Ichi s'est approché d'un chevalier du Cancer désemparé.
- Mon armure ! Pourquoi est-elle partie ?
- Où est donc passée l'assurance de celui qui voulait me couper la tête ? Je vais te le faire regretter ! Tu vas goûter à mes griffes empoisonnées !
Soudain, alors que Ichi assène son terrible coup, une pièce d'armure de Bronze s'interpose ! Puis un faible flash de lumière tente en vain de les aveugler. Un objet s'est invité dans leur duel : l'armure du Loup ! Ichi écarquille ses yeux noirs.
- Que fait ici la sublime armure du Loup de mon ami Nachi, membre des illustres chevaliers du Zodiaque ?!
Ladite armure se sépare en morceaux et recouvre le psychopathe. Shura, qui vient enfin de rejoindre ses collègues, assiste aussi à cet événement inattendu. Quant à Dohko, il fait le fier.
- Je vous l'avais dit, que son signe était le Loup !
Maintenant revêtu d'une des prestigieuses armures de Bronze, Masque-de-Mort se sent capable de déplacer des montagnes !
- Pas du tout ! grimace-t-il. Que fait une armure aussi pourrie sur moi ?!
- Comment ?! s'étrangle Ichi, outré. Comment oses-tu insulter une des douze armures les plus convoitées ?!
- En plus, elle ne m'a même pas protégé !
En effet, les griffes d'Ichi ont traversé l'armure du Loup et ont égratigné l'avant-bras de Masque-de-Mort.
- Et y'a même pas de casque !
Car le casque a été transformé en puzzle par Shura lorsqu'il a combattu Nachi.
- Ma tête est sans défense ! s'affole Masque-de-Mort. C'est un cauchemaaaaar !
Il cherche désespérément un moyen d'enlever cette indésirable armure.
- Pourquoi ?! gémit-il. Pourquoi tant de souffrances ?!
- Tu ressens enfin l'effet de mon poison ! ricane Ichi.
- Non c'est pas ça ! Non seulement mon armure me quitte, mais en plus cette daube me recouvre ! ! N'y a-t-il donc aucun moyen d'ôter cette horreur ?!
- Qu'as-tu encore osé dire ?! se raidit Ichi, choqué.
Masque-de-Mort tombe à genoux.
- Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ?!
- Voilà ta punition pour tous tes crimes ! profère Dohko, sentencieux.
Sur ces mots, Masque-de-Mort se jette sur le papy. Alors que tout le monde pensait qu'il essaierait de l'étrangler, il s'agenouille devant lui.
- Oui, pour être à la même hauteur. Dites Vieux-Maître, vous croyez vraiment ce que vous venez de dire ?
Masque-de-Mort n'a pas l'air fâché du tout. Au contraire, il semble vraiment disposé à écouter le chevalier de la Balance.
- Oui fiston. Tu as tué tellement de gens !
- Non, je les héberge chez moi.
- Ils sont morts !
- Non, ils dorment.
- Ils sont morts, je te dis !
- Moi je vous dis qu'ils dorment !
Le Vieux-Maître soupire.
- Tu comprends vraiment rien...
- Aidez-moi, Vieux-Maître ! le prie Masque-de-Mort.
Le psychopathe a les larmes aux yeux. Tout le monde en est bouche bée.
- S'il vous plaît ! Qu'est-ce que je peux faire pour me racheter ? Et si je recollais les têtes que j'ai coupées sur leurs corps ?
- Non seulement ça va être difficile, mais ça ne changerait rien !
- Dites-moi quoi faire ! Je vous en supplie !
- Tu veux à ce point récupérer ton armure, mon garçon ?
- Je veux surtout que cette affreuse armure du Loup me lâche !
- Regrettes-tu sincèrement tes crimes ?
- Quels crimes ? Je vous ai dit que je les hébergeais chez moi !
Le cas de Masque-de-Mort est vraiment incurable ! Dohko change de tactique :
- Jure que tu ne prendras plus jamais la tête de personne !
- C'est la solution ?
- Ça se pourrait. Fais-le.
- Mais j'ai encore tant de murs à décorer !
Le regard du doyen reste de marbre. Masque-de-Mort semble se résigner de plus en plus.
- Bon, je promets de pas prendre de têtes aujourd'hui. Ça devrait suffire.
- Non, tranche papy Dohko, impitoyable.
- D'accord, deux jours. Deux jours sans têtes.
- Non.
- Mais c'est déjà trop pour moi, deux jours !
- Dans ce cas, je ne peux rien pour toi, mon fils.
- Bon d'accord, trois jours. Mais pas plus !
- Ça ne suffira pas.
- Combien de jours, alors ?!
- Tu ne devras plus prendre de têtes de toute ta vie !
Plus de têtes du tout ?! Masque-de-Mort se décompose. Il se prend la tête dans les mains.
- C'est un cauchemar ! Je veux me réveiller !
- Hé ! l'interpelle Ichi. Viens te battre !
Ah, on avait presque oublié l'Hydre !
- Tu as osé insulter la resplendissante armure du Loup. Tu vas le payer de ta vie !
Ichi fonce sur Masque-de-Mort. Ce dernier lui envoie les Vagues d'Hadès et l'Hydre se tient enfin tranquille.
- Fiche-moi la paix toi, je suis pas d'humeur ! Je suis en plein dilemme ! Soit je stoppe ma collection, soit je porte cette armure hideuse pour le reste de ma vie !
Après avoir délibéré dans sa tête...
- Très bien. Je renonce à agrandir ma collection.
Incroyable ! ! ! Le psychopathe a fait un grand pas en avant vers la réhabilitation ! Il se tourne vers le bicentenaire.
- Maintenant, rendez-moi mon armure !
- Moi ?! Pourquoi moi ?!
- C'est le marché qu'on avait conclu !
- Mais non...
- Bon, si tu me rends pas mon armure, j'ai plus besoin de tenir ma promesse !
- Un peu de patience, mon enfant...
- Tu m'énerves ! explose Masque-de-Mort. Maintenant tu me rends mon armure, ou bien je te démonte la tête et je l'accroche près de mes poubelles !
- Mais...
- T'as cinq secondes !
Paniqué, Dohko tente le tout pour le tout. Il pointe sa canne vers les cieux et ordonne sans y croire :
- Que l'armure du Loup cède sa place à celle du Cancer !
Et le miracle a lieu ! Masque-de-Mort se retrouve de nouveau dans son armure. Il rayonne de joie.
- Le cauchemar est enfin terminé !
Il s'approche du corps inerte du chevalier de l'Hydre et pose ses mains autour de son cou.
- Qu'est-ce que tu fais ! As-tu oublié ta promesse ?
- Euh... Je vérifie juste son pouls !
La tentation était forte ! Masque-de-Mort doit se contrôler, sinon l'armure du Loup risque encore de revenir.
Deux minutes plus tard, nos héros font un nouveau sprint dans les escaliers.
- Un marathon, plutôt ! râlent-ils tous.
Parmi eux, Masque-de-Mort est celui qui est le plus contrarié. Les escaliers interminables les irritent tous, mais le psychopathe vient juste de promettre de ne plus étêter personne. Sa passion, la collection de têtes, était sa raison de vivre ! Maintenant, il n'a plus aucune envie de poursuivre la bataille. Il voulait rentrer mais ses collègues, méfiants, ont préféré le garder à l'oeil. Le Vieux-Maître a menacé de faire revenir l'armure de Loup sur lui s'il ne les suivait pas.
- Fais pas cette tête, compatit Aldébaran.
- Fiche-moi la paix, le bovin !
- Il existe des milliers de collections différentes où trouver ton bonheur. Que dirais-tu de devenir philatéliste ?
- Filatéquoi ?!
- Collectionneur de timbres.
- Te fous pas de moi !
- Il y a parfois des visages sur les timbres.
- Des têtes ?! sursaute soudain Masque-de-Mort.
- Oui.
Néanmoins, l'enthousiasme du fou retombe vite.
- Mais ce ne sont pas de vraies têtes...
- Alors, collectionne les masques.
- Ce sont pas de vraies têtes non plus.
- Si. Il paraît que ce sont les visages de vraies têtes.
Les battements du coeur de Masque-de-Mort s'accélèrent.
- Vraiment ?!
- Oui.
- T'es sûr ?
- Certain !
- C'est vrai, Vieux-Maître ? demande Masque-de-Mort.
Aldébaran espère que Dohko va jouer le jeu.
- C'est vrai, affirme le papy en levant les yeux au ciel.
- Vous me racontez pas de bobards, j'espère ?
- Pas du tout ! Je vais te raconter comment est né le premier masque et tu comprendras. Jadis, à une époque très lointaine...
- Ça va, je vous crois sur parole ! l'interrompt vivement Masque-de-Mort.
Évidemment, il est toujours aussi allergique aux légendes de Dohko.
Laissons-les se dégourdir un moment dans les escaliers et allons prendre quelques nouvelles plus bas.
D'abord, faisons escale dans la première maison...
- Ils se foutent vraiment tous de moi ! s'énerve Saori. Pas un seul vétérinaire, pas un seul docteur ne veut venir sauver mon cheval Aioros ! Et le pire est que je viens de le voir, il y a quelques minutes, jouer avec un chevalier à une corne. Aioros n'est donc pas aussi mal en point qu'il voulait me le faire croire !
Avec ses jumelles, elle regarde dans sa direction.
- Et voilà qu'il se repose à nouveau, ce simulateur ! Si je ne me sentais pas en danger à l'extérieur, j'irais le punir sur-le-champ !
À présent, allons voir le blessé de plus près...
- LES blessés ! corrige Jabu, qui a lui aussi une flèche d'or en plein coeur.
- Tiens bon, Jabu ! le soutient Aioros. Je t'en prie, ne meurs pas !
Le chevalier de la Licorne n'en revient pas.
- Mais c'est toi qui m'as tiré dessus !
- Justement ! Tu es le seul témoin de mon seul tir réussi !
- Le seul ?! T'en as jamais réussi un autre ?!
- Non...
- Alors comment t'as fait pour battre le chevalier d'Argent venu te tuer ?
...
Dans un passé récent...
Comme tous les jours, Aioros se rend en forêt pour s'entraîner au tir à l'arc.
- Il y a de moins en moins de promeneurs... constate-t-il.
Il va jusqu'à la limite de la forêt, bordée par une montagne. Il pose une cible contre la paroi, s'éloigne de cinquante mètres et extrait une première flèche en bois de son carquois. Puis il bande son arc, se concentre et tire. La flèche rate la cible de quelques mètres.
- Trop à gauche ! Corrigeons en tirant plus à droite...
La seconde flèche fait aussi bien que la première, mais de l'autre côté.
- Trop à droite ! Il faut que je tire plus à gauche.
Pendant ce temps, Argueti se présente à l'entrée de la forêt. Là, il y a un panneau d'avertissement. Quelqu'un a écrit en grosses lettres rouges : "Attention ! Flèches volantes !" par-dessus "Attention ! Chute de rochers !".
En progressant dans la forêt, Argueti croise des animaux affolés qui s'enfuient.
- Il est en train de s'entraîner, devine-t-il.
Il se concentre sur son ouïe et sa vue. Puis il entend un arc qui se détend et voit une flèche s'envoler.
- Il est par là !
Il court dans la direction d'Aioros. Jusqu'à ce qu'il reçoive une flèche en plein visage.
- Impossible ! s'ébahit-il. Comment a-t-il réussi à me toucher ?!
Argueti essaie de regagner son calme.
- S'il avait vraiment voulu me toucher, il m'aurait raté. C'était donc un accident, analyse-t-il.
Il tâte l'arête de son nez.
- Tout de même, à deux centimètres près, je la recevais dans l'oeil.
Il place sa main devant ses yeux et regarde entre ses doigts pour avancer. Et il finit par trouver Aioros.
- Encore raté ! enrage le Sagittaire, exaspéré.
- Salut ! lui fait signe Argueti.
- Tiens ? Un chevalier !
- Bonjour, je suis Argueti d'Héraclès. Je te cherchais.
- Ah ? Que puis-je faire pour toi ?
Argueti essaie de garder son sérieux tout en répondant :
- Je voudrais apprendre le tir à l'arc. Et comme tu le pratiques souvent, je voulais voir un vrai maître à l'oeuvre !
Aioros se gratte la tête, gêné.
- C'est que je suis pas en forme, aujourd'hui, ment-il.
Car tous les jours, le résultat est le même.
- C'est pas grave. Montre-moi comment on tire.
Aioros tire une nouvelle flèche en bois de son carquois.
- D'accord. D'abord, tu choisis une flèche. Ensuite, tu la poses sur ton arc. Puis tu bandes ton arc, tout en visant la cible. Et enfin, tu tires.
Aioros continue à viser. Il tremble un peu.
- Vas-y, tire ! l'encourage Argueti.
Tac ! Pouf ! La flèche s'abat sur le sol, à mi-distance entre la cible et lui. Argueti prend sur lui pour ne pas se moquer.
- J'ai les doigts crispés, aujourd'hui, ment à nouveau Aioros.
- Oui, oui, je comprends, lui sourit son fan.
- Tu veux essayer ?
Pourquoi pas, décide le chevalier d'Argent. Il suit toutes les recommandations du maître et tire.
- Bien joué ! le félicite Aioros, épaté. C'est remarquable !
- Mais je n'ai eu que le bord de la cible.
Aioros en rêve depuis des lustres.
- Comment t'as fait ? demande-t-il.
- Comme tu as dit. J'ai visé et puis j'ai tiré.
- Aujourd'hui j'y arrive plus, ment à moitié Aioros.
- Essaie encore.
Argueti, prudent, reste derrière Aioros. Quoique, l'endroit le plus sûr quand Aioros tire, c'est devant la cible, réalise-t-il.
Tac ! Le chevalier du Sagittaire abat une feuille innocente.
- J'y arrive plus... se lamente-t-il.
- Aie confiance en toi ! le motive Argueti. Commence par tirer de plus près.
Aioros se place à vingt mètres, puis à dix mètres, puis à cinq mètres. Rien à faire, il rate chaque fois la cible !
Ce chevalier est trop drôle ! se dit Argueti, qui a de plus en plus de mal à se contenir.
- Tu tires en fermant un oeil. Essaie de tirer avec les deux yeux ouverts.
- J'ai déjà essayé, affirme Aioros.
- Alors, essaie en fermant les yeux !
- Aucune chance que ça marche !
- Essaie couché à plat ventre !
- J'ai déjà tout essayé ! se plaint Aioros. Avec des lunettes de soleil, avec des gants de boxe, avec les pieds, en faisant le poirier... Un jour, je me suis même tiré dessus !
Cette fois, Argueti ne tient plus. Il se roule par terre de rire.
- Ha ! Ha ! Ha ! Qu'est-ce qu'il est nul !
- Mais t'es en train de te moquer de moi ?! s'indigne Aioros.
Argueti se calme lentement, puis se relève.
- Je vais te dire la vérité : je voulais vérifier que la "légende Aioros" était vraie, que tu étais bel et bien le pire archer de tous les temps, avant de te tuer.
- Me tuer ? Mais pourquoi ?
- Ordre du Grand Pope ! Comme t'es vraiment nul, je n'aurai aucun mal à t'éliminer !
Le chevalier d'Héraclès déracine un arbre et s'en sert comme bâton pour tenter d'écraser Aioros. Celui-ci évite tous les coups.
- Au moins, tu es rapide ! reconnaît Argueti.
- Assassin !
- Ce sera le cas quand tu seras mort.
- Non, tu as tué cet arbre ! Déforesteur, va ! Ou déforestateur. Enfin, tu me comprends !
Argueti arrête de secouer son arme.
- Non mais je rêve ! s'exclame-t-il. T'as tiré un nombre incalculable de flèches sur cet arbre, et maintenant tu le défends ?!
- Tu détruis la nature. Honte sur toi !
Tout en grognant, Argueti replante l'arbre.
- Puisque c'est comme ça, je vais le briser. Je vais me servir de son tronc comme arme, mais je laisserai la souche.
Alors qu'il se prépare à frapper le végétal sans défense, Aioros fonce vers lui à la vitesse de la lumière. Argueti est décoiffé.
- Il a été si rapide que mon casque s'est envolé ! transpire le chevalier d'Argent.
- Laisse cet arbre tranquille ! le somme Aioros, tout en le menaçant avec son arc.
La menace a l'effet inverse. Argueti est pris d'un rire incontrôlable.
- Je plaisante pas ! l'avertit Aioros.
Argueti répond en hoquetant :
- Tu... Tu comptes me... me tuer avec ta flèche ?
- Oui ! Et pas n'importe quelle flèche. Ma flèche d'or !
- Ha ! Ha ! Ha ! rit Argueti. L'archer le plus nul de tous les temps me menace avec sa flèche ! J'ai peuuuur !
En face de lui, Aioros tente de se montrer persuasif :
- T'es énorme, et à seulement trois mètres de moi. Je ne peux pas te manquer !
Argueti ne perd pas sa bonne humeur.
- Si seulement t'arrêtais de suer et de trembler, on pourrait te prendre au sérieux ! Mais laisse-moi t'aider.
Il fait un pas vers Aioros. Puis un autre.
- Un seul mètre nous sépare, à présent. Mais malgré cela, t'es incapable de me toucher !
- On parie ?!
- Avec plaisir !
- Non on parie pas ! se reprend vivement Aioros.
Nouvel éclat de rire de son adversaire.
- T'as même pas confiance en toi ! C'est comme si tu avais déjà perdu !
- Même si je n'ai qu'une chance sur un million de te toucher, je vais tirer !
Argueti ne semble nullement effrayé. Il attend.
- Je t'aurai prévenu ! dit Aioros en relâchant la corde.
La flèche s'envole à la verticale. Argueti repart dans un fou rire.
- Encore plus nul que je le pensais !
Soudain... BAM ! Un rocher vient de s'abattre sur sa tête. Privé de son casque, il tombe, assommé. C'est la flèche d'Aioros qui a détaché le rocher de la montagne.
Retournons à présent auprès des chevaliers d'Or marathoniens ! Leurs beaux souliers dorés sont bien usés après avoir foulé autant de marches. Sauf ceux de Shaka, car celui-ci continue la montée en lévitation. Il ferme la marche, se contentant d'avancer au même rythme que ses pairs.
Camus, au bord de l'insolation, ralentit et se retrouve à côté du chevalier de la Vierge. Il remarque que ce dernier est en sueur.
- Toi aussi, tu supportes pas le soleil ? compatit le Verseau.
- Si pourquoi ? rétorque Shaka.
- Tu transpires plus que les autres.
Camus réfléchit un instant avant d'émettre une autre hypothèse :
- Ou alors, léviter te fatigue.
Shaka transpire davantage. Il ne peut se permettre de montrer des signes de faiblesses !
- T'as raison, je transpire à cause du soleil ! affirme Shaka. Mais grâce au huitième sens, je récupère aussi vite !
- Vraiment ?
- Bien sûr !
Lorsqu'ils arrivent devant la sixième maison, ils prennent quelques secondes pour souffler. Dohko en profite pour leur annoncer la constellation de leur prochain adversaire. Puis ils entrent.
Après avoir fait quelques mètres à l'intérieur, Saga leur fait signe de s'arrêter.
- Mais j'ai rien fait, moi ! se défend Saga.
- Si ! le contredit Shura.
Saga se montre du doigt.
- C'est pas moi, c'est lui !
- Pourquoi nous arrêtes-tu ? demande Mû.
- Hé, on te cause, réponds ! se secoue Saga.
- Ça va j'suis pas sourd ! se bouscule Saga.
Saga se foudroie du regard en louchant, puis se tourne vers ses camarades.
- Mon septième sens me dit que tout ici n'est qu'illusions. Ne vous fiez pas à vos yeux ! Et je vous parie que la sortie se trouve à l'entrée !
Ses semblables le regardent, interloqués.
- Oui, la sortie est l'entrée, et l'entrée est la sortie ! répète Saga.
Saga et Saga rebroussent chemin.
- J'y vais. Qui m'aime me suive !
Soudain, Saga s'arrête. Bien sûr, puiqu'il ne s'aime pas, il refuse de se suivre !
- Lâche-moi, parasite ! s'engueule le schizo.
Saga est obligé de se traîner lui-même de force pour aller jusqu'à l'entrée. Puis il revient bredouille.
- Saga s'est trompé, constate Dohko. L'entrée était bien l'entrée.
Saga se pointe de nouveau du doigt.
- C'est lui qui s'est trompé, pas moi !
- Non, c'est lui ! insiste-t-il.
Maintenant, ils regardent tous autour d'eux. Aldébaran fait part de ses impressions :
- On dirait qu'à part nous, il n'y a personne.
- Où est le chevalier de Bronze qui défend cette maison ? demande Camus. Est-ce encore un déserteur, comme celui de la troisième maison ?
- Il est là ! crie Saga, désignant soudain un mur de l'index.
- Tu comptes encore nous induire en erreur ?
- Non pour une fois, il a raison, reconnaît Saga. Il est là !
Tout le monde regarde le mur. Celui-ci a pourtant l'air ordinaire.
- Là ! répète Saga.
- Il est là ! s'obstine Saga.
- Là ! Là ! s'acharne Saga.
Milo soupire.
- Y'a personne, idiot !
- Mais si, l'est là ! ! insistent les deux Saga.
- Tu vas voir ! Je vais piquer ce mur, et s'il ne fait pas "aïe", c'est qu'il n'y a personne !
Le chevalier du Scorpion se prépare à attaquer.
- Par l'Aig...
- Bravo, vous m'avez trouvé ! dit le mur.
Un chevalier de Bronze apparaît à l'endroit que désignait Saga.
- Vous voyez ! On vous l'avait dit !
Aior fait un pas vers leur nouvel adversaire.
- Tu t'appelles Léon, c'est cela ?
- Léon ?! Mais non !
- Ah ? T'es pas Léon le Camé ?
- Mais c'est quoi, cette histoire ?!
Le chevalier du Lion se tourne vers celui de la Balance.
- Tu nous avais pourtant dit que notre prochain adversaire serait Léon le Camé !
- Mais non ! Le caméléon !
- C'est pareil !
- Non, petit ! Caméléon en un mot, pas en deux !
- Aaaah ! s'exclame le Lion en se retournant vers le chevalier de Bronze. Il me semblait bien que tu ne pouvais pas t'appeler Léon, et encore moins être camé, avec cette jolie voix !
À la vitesse de la lumière, Aior va se placer à côté de June et passe son bras autour son épaule. Il lui sourit chaleureusement.
- T'inquiète pas, je ne frappe jamais les femmes ! Dis, tu ne voudrais pas ôter ton masque une minute ? Je suis sûr que tu es belle à croquer !
Masque... Masque... Ce mot résonne dans la tête de Masque-de-Mort depuis qu'il l'a vu. Il vient juste d'apprendre que masque = tête ! Il en a la bave aux lèvres.
- Oui, enlève ton masque ! crie-t-il soudain.
- Je lui ai demandé le premier ! proteste Aior.
- Et moi, je l'ai vu le premier !
- Oublie ! De toute façon, toi elle ne t'aimera pas !
- De quoi tu parles ?
- Quand un homme voit le visage d'une femme-chevalier, elle est obligée soit de le tuer, soit de l'aimer. Moi je suis prêt à prendre ce risque !
- Je m'en fous ! Je veux juste sa tê... son masque !
Pendant que le Cancer et le Lion se disputent, les autres débattent de qui va affronter le gardien de la sixième maison.
- Je frappe pas les femmes ! les prévient Mû.
- Moi non plus ! suit Aldébaran.
Et ainsi de suite. Donc, en fait, ils débattent pour savoir qui n'affrontera pas June.
Tout à coup... CLAC ! Son fouet traverse une colonne de part en part.
- Ne me sous-estimez pas parce que je suis une femme !
Il semblerait que le combat soit inévitable...
- Mais pour tout vous dire, j'ai pas envie de me battre contre vous non plus.
Voilà qui arrange tout le monde !
- Sauf contre lui !
June désigne Aphrodite de son fouet. En parlant du chevalier des Poissons, il était resté étrangement silencieux depuis l'apparition de June et affichait un air grave. Quelle histoire y a-t-il entre June et lui ?
- Ça ne vous regarde pas ! tranche Aphrodite. Je vais régler mes comptes avec elle, vous pouvez partir.
Mais il n'obtient que la réaction inverse. Ses collègues, intrigués, décident de rester. À la vitesse de la lumière, ils vont chercher du mobilier dans la maison pour s'installer. Quant à Shaka, il a de nouveau sorti son lotus en or et s'est assis dessus dans sa pose habituelle.
- Allez-y, on vous écoute, les enfants ! les encourage Dohko.
C'est à ce moment précis que le narrateur décrète la fin du chapitre !
- NOOOOOOOON ! ! ! hurlent les spectateurs. Mais quel tortionnaire, celui-là !
Dans le prochain épisode...
June et Aphrodite ont un différend à régler ! Pourquoi ont-ils l'air de se détester autant que Saga et Saga ?
- Tu as détruit ma maison !
- Et toi, tu m'as humilié devant tout le monde !
Puis ils en viennent enfin aux mains !
- Mes roses rouges ne lui font aucun effet !
Les autres chevaliers d'Or se délectent du spectacle.
- Remboursééééés !
Enfin, pas tout à fait...
- C'est si tragique ! Snif... pleure Aldébaran.
Roses contre fouet ! Qui va gagner ? Réponse dans le prochain épisode !
- Et toi, as-tu jadis pressenti la cosmo-anarchie ? invente Seiya.
