Cette fic est écrite dans le cadre de la 135ème nuit écriture du FoF (Forum Francophone) pour le thème "Boue". Le FoF est un forum regroupant tous les francophones de ffnet où l'on peut discuter, demander de l'aide ou s'amuser entre nous. Le lien se trouve dans mes favoris. Rejoignez-nous !
Note de l'auteur : J'entame un recueil (qui vient de crier "Encore un" ?) où regrouper l'un des arcs de Yu-Gi-Oh qui a le plus fait battre mon coeur étant enfant : L'amitié si particulière entre Yugi et Joey. J'espère que ça vous plaira !
- Fais gaffe à où tu marches, morveux !
La voix d'un élève de terminale avait claqué en même temps que le coup de poing dans son dos qui le fit chuter dans l'herbe du lycée. Yugi avait eu beau se crisper dès qu'il avait entendu parler l'élève qu'il n'avait même pas frôlé, le choc se répercuta en une vague dans tout son corps et il resta étendu par terre une seconde pour tenter d'appréhender la douleur.
- C'est bien garde le nez dans la boue, c'est ta vraie place !
Une semelle s'appuya sur l'arrière de son crâne, lui écrasant le visage plus profondément dans l'herbe et la terre humides et le dissuadant d'essayer de se relever pour l'instant. Il était habitué à ces attaques, à ces humiliations incessantes. Il savait qu'elles n'avaient rien de personnel, que le lycée était divisé entre ceux qui brutalisaient et ceux qui étaient brutalisés. Mais il avait à peine récupéré de la journée de la veille, déjà beaucoup trop riche en émotions. En l'espace de quelques heures, Joey et Tristan avaient jeté une pièce de son puzzle du millénium à l'eau, réduisant à néant ses chances de le reconstruire, il les avait vus être passés à tabac par une brute qui semblait déterminée à les tuer, il était intervenu et avait encaissé les coups jusqu'à ce qu'il se lasse d'eux trois, il avait récupéré la pièce du puzzle que Joey avait été repêcher. Il aurait pu supporter cette nouvelle attaque encore une fois si, le matin même, il ne s'était pas réveillé avec le corps en miettes et en étant déjà épuisé par les coups et les humiliations incessantes qui rythmaient le quotidien du lycée. La pression sur son cou se relâcha et il amorça un mouvement pour relever la tête avant qu'un coup de pied ne le fauche dans le ventre.
- On t'a dit de rester par terre !
Le coup le fit basculer sur le côté et il eut juste le temps de voir le garçon s'apprêter à le frapper à nouveau. Il referma les yeux et attendit le choc.
- Ne le touche pas ! rugit une voix.
Le coup ne vint pas. Il rouvrit prudemment les yeux et reconnut Tristan et Joey qui s'étaient interposés entre la bande de terminales et lui. Après qu'ils eurent assommés deux d'entre eux, les autres détalèrent en vitesse et Tristan surveilla qu'ils ne revenaient pas pendant que Joey s'accroupissait à côté de lui.
- Ça va Yugi ?
Yugi acquiesça d'un hochement de tête, encore sonné. Leur intervention avait achevé de le déboussoler. Il avait cru qu'ils étaient quittes hier soir, après que Joey lui ait rendu la pièce du puzzle, qu'est-ce qui les avait motivés à intervenir aujourd'hui ?
- Viens, souffla Joey, t'es dans un sale état.
Son esprit était encore trop dans le brouillard pour qu'il réponde quoi que ce soit ou ne cherche à protester. Il laissa Joey l'aider à se relever et l'emmener vers les bâtiments. Il percevait vaguement les murmures surpris ou moqueurs des autres élèves devant son visage couvert de boue, d'herbe et d'égratignures mais devinait que la présence de Joey et Tristan les faisait taire rapidement. La sonnerie retentit au moment où ils atteignaient les couloirs et Tristan déclara :
- Occupe-toi de lui, je trouve quelque chose pour justifier votre absence auprès des profs.
- OK merci.
Le brouillard dans sa tête s'accentua au fur et à mesure que le bras de Joey autour de ses épaules le faisait marcher en le maintenant fermement debout et il perdit rapidement toute notion de ce qu'ils faisaient et de la direction qu'ils prenaient. Une sensation délicieusement fraîche passa sur son front et il soupira longuement de soulagement, la fraîcheur l'aidant à retrouver ses esprits. Il était dans les toilettes du lycée, désertes maintenant que les cours avaient repris, et Joey l'avait fait asseoir sur un tabouret à côté des lavabos avant d'entreprendre de nettoyer son visage avec une serviette – probablement sortie de son sac de sport ouvert à côté de lui – imbibée d'eau fraîche. Joey recommença l'opération jusqu'à l'avoir complètement débarrassé de la boue collée à son visage mais celui-ci ne parut pas rassuré pour autant.
- Tu as pas mal d'égratignures, et avec la terre qu'il y avait par-dessus tu risques d'avoir besoin de désinfectant, constata-t-il avec une moue ennuyée. Tu te sens d'attaque pour remarcher jusqu'à l'infirmerie ?
- Non, souffla-t-il. S'il te plaît, pas l'infirmerie.
- Tu en as besoin…
- Non. La dernière chose dont j'ai besoin c'est qu'ils préviennent mon grand-père de ce qu'il s'est passé et ils le feront forcément. S'il te plaît…
Joey parut surpris mais ennuyé par sa réponse et il finit par lui demander :
- Ils ne t'ont pas frappé à la tête ?
- Non je te le jure.
- OK. Calme-toi c'est bon, je t'y emmène pas, le rassura Joey. Mais attends…
Joey s'empara d'un paquet de mouchoirs qu'il mouilla avant de nettoyer le plus soigneusement possible les plaies de Yugi et finit par déclarer :
- Ça devrait faire l'affaire au moins jusqu'à ce soir. Ça va mieux ?
- Oui, beaucoup mieux. Merci… D'être intervenu et… Du reste.
- Arrête, je pourrais faire ça tous les jours sans jamais qu'on soit quittes pour ton intervention d'hier soir. Je n'aurai même pas été là aujourd'hui sans toi. C'est normal, vraiment. Ces types te tombent souvent dessus ?
- Ça dépend des jours. Des personnes aussi, c'est pas toujours eux.
Joey soupira d'agacement et Yugi se demanda un instant s'il allait lui demander la liste de toutes les personnes pour qu'il puisse leur régler leur compte. Au lieu de ça, il reprit :
- Je vais te laisser mon numéro. Appelle-moi si tu as un souci, d'accord ?
- OK. Merci, vraiment.
- Je t'en prie. Ça sert à ça les amis.
Ils avaient continué à discuter un moment mais cette dernière phrase resta dans la tête de Yugi. Des amis. Un ami, qui lui avait promis d'être là pour lui.
Le soir, après avoir dîné, il remonta dans sa chambre et rouvrit la boite du puzzle du millénium. Il n'était plus loin de l'avoir fini et, après y avoir passé une heure, il s'apprêtait à poser la dernière pièce. Des années auparavant, quand son grand-père le lui avait offert, il lui avait dit de faire un vœu au moment où il finirait de l'assembler. Depuis tout ce temps, il se disait qu'il ferait le vœu d'avoir des amis. Mais ce vœu s'était déjà réalisé aujourd'hui, avant qu'il n'ait fini le puzzle. Il réfléchit quelques secondes avant de penser, aussi fort qu'il le pouvait, en posant la dernière pièce du puzzle du millénium : Je voudrais le courage et l'assurance qu'il me manque pour être à mon tour capable d'aider mes amis quand ils en auront besoin.
En espérant que ça vous ait plu !
N'oubliez pas que seules les reviews permettent de savoir ce que vous en avez pensé !
