Chapitre 4 :

David et Emma entrèrent un peu à reculons dans le bureau avant de trouver Regina, lunettes sur les yeux, occupée à remplir un document qui, Emma l'aurait juré, traitait de Killian.

— Mmh ? C'est pour ? Fit-elle sans même prendre le soin de lever les yeux ou d'arrêter d'écrire.

— Regina stp… Supplia presque son frère. C'est important.

Devant le sérieux de David, elle releva la tête et retira ses lunettes.

— Dis-donc, un deuxième mort ?

« Manière très élégante de considérer une chose comme importante » se dit Emma qui au fond était fortement soulagée que David soit venu avec elle.

— Mme Mills, fit Emma de la voix qu'elle voulait la plus mielleuse possible. On peut vous poser quelques questions concernant Robin de Locksley ?

La brune leva des yeux noirs accusateurs vers David qui brandit ses mains juste histoire de s'innocenter.

— Sur Robin, tiens donc ! Eh bien je vous écoute avec une attention toute particulière, Miss Swan.

Emma se racla la gorge et s'assit en face d'elle devant son air dédaigneux qui la suivait des yeux.

— Vous le connaissiez bien non ? Demanda-t-elle bêtement, plus pour débloquer la conversation que pour avoir une réelle réponse.

— Disons que c'était mon employé, sans plus. D'un point de vue sexuel oui je le connaissais très bien, même si j'en ai rapidement fait le tour. Deux fois m'ont suffi.

David souffla devant cette réponse qu'il voyait comme déplacée jusqu'à ce que sa sœur porte à nouveau son attention sur lui.

— Ecoute David, vous êtes venus pour des réponses non ? On ne se doit pas d'être honnête avec la police ? Si tu as un quelconque souci avec tout ça je te suggère de prendre la porte.

— Si Votre Majesté insiste ! Répondit David ironiquement en mimant une révérence juste avant de quitter les lieux. Emma, je retourne au poste !

Emma qui se sentait tout d'un coup honteuse d'avoir fait fuir David commença à se demander à quoi aller bien pouvoir mener cet entretien. Elle a tout d'abord été surprise de la réponse aussi franche de sa supérieure. Visiblement, le sexe n'était pas tabou chez elle et elle n'était pas non plus le moins gênée du monde de faire remarquer les prouesses sexuelles -ou pas- des uns et des autres dès qu'elle en avait l'occasion. Elle se sentit tout de même honteuse de se retrouver seule dans son bureau pendant que son coéquipier avait décidé de lâchement quitter les lieux.

— Je… Euh je suis sincèrement désolée. Dit-elle pour l'amadouer. Je sais que vous préférez que nous travaillions en binôme comme vous me l'avez encore fait remarquer hier mais je ne pensais pas que David partirait.

— Vous voulez dire que vous ne pensiez pas que David viendrait avec vous jusqu'ici ?

— Je… Je ne comprends pas ?

— Ecoutez Miss Swan, comme je vous l'ai déjà dit, mes services fonctionnent vraiment très bien. Nous n'avons pas attendu qu'une petite bourgeoise de NY fasse son apparition pour nous bénir de son savoir.

— Je n'ai jamais dit…

Regina leva la main, l'air sévère, signe de la laisser terminer.

— Je réitère que mes équipes travaillent donc en binôme et que je suis navrée de voir que mon frère se laissera gentiment faire lorsque vous aurez une idée en tête.

— Je n'ai pas eu beaucoup à le convaincre pour venir avec moi.

— Par peur de vous voir morte sans doute ?

La brune sourit sans joie avant de poursuivre.

— Cette enquête est ouverte depuis plusieurs jours maintenant Miss Swan. Si les services de police n'ont pas jugé bon avant votre arrivée de venir m'interroger c'est que cela n'était pas nécessaire. Je sais que David a grand cœur, il vous a donc accompagné et comme vous pouvez le constater, a profité de la première opportunité pour s'enfuir. Cependant, tout ce que je dirai ne sera entendu que par vous. Comment pourrez-vous prouver quoi que ce soit ?

— Pour ça, j'ai lui ! Mon deuxième binôme.

Elle sortit sur le bureau un enregistreur vocal. Regina le fixa quelques secondes des yeux avant de sourire sadiquement.

— Soit, vous êtes donc plus maligne qu'une autre.

— Je n'ai jamais dit que…

— Je me fous de ce que vous pensez de moi ou de mes manières de travailler Miss Swan. Ce qui m'importe c'est qu'aucun élément perturbateur ne vienne entacher le bon déroulement des missions de mes services. Par élément perturbateur j'entends actuellement, vous.

Emma choisit de garder le silence, jusqu'à ce que Mme Mills reprenne d'elle-même.

— Je vous propose un marché, Miss Swan. Pas d'enregistreur vocal et je réponds à toutes vos questions. A la suite de notre entretien je ne veux plus jamais vous voir sortir des rangs. Surtout que David est votre supérieur direct. Il n'a rien à faire sur vos ordres ou recommandations, est-ce clair ?

— Oui, Madame le Maire.

— Très bien, se détendit Regina satisfaite. Je vous écoute.

Elle se racla la gorge, un peu gênée de la tournure que prenaient les évènements.

— Vous savez que sa femme vous a mentionné lors de son audition ?

— Marianne ? Oui sans doute et en quoi cela peut-il m'intéresser ? Cette bonne femme est tout simplement obsédée par moi depuis qu'elle a appris que nous nous étions fréquentés, Robin et moi. Vous ne serez donc pas étonnée de savoir qu'environ toutes les deux semaines elle organise des manifestations presque violentes sur le perron de la mairie pour n'importe laquelle des raisons.

— Elle savait donc pour vous et Robin ?

— Ma foi, qui l'ignore ?

Elle se leva pour se servir un whisky pur à son petit bar non loin de là. D'un mouvement de tête, elle en fit proposition à Emma qui refusa poliment. Elle aurait en réalité volontiers accepté, surtout venant de Mme Mills, pourtant si froide, si elle n'avait pas été en plein dans son service.

— Quand exactement a commencé votre relation ? Demanda Emma sans perdre le fil de ses questions.

Regina s'étouffa avec la gorgée de son verre qu'elle venait d'avaler en se rasseyant à son bureau.

— Notre ?

— Relation.

La brune fit la grimace à la prononciation de ce mot.

— Pour deux scènes de cul bâclées je pense que cette description est beaucoup trop forte Miss Swan.

Emma commençait à s'amuser de la liberté de parole de sa supérieure et décida de ne pas trop s'attarder sur ce point. Elle n'eut pas à le faire d'ailleurs puisque la brune répondit à sa question sans sourciller plus.

— Nous avons couché ensemble pour la première fois l'an passé. La seconde quelques mois après.

— Ça ne s'est pas reproduit ?

— Jusqu'où savez-vous compter Miss Swan ?

Emma haussa les épaules.

— Je ne suis pas allée longtemps à l'école.

— Eh bien non, pour répondre à votre question. Tout d'abord parce qu'il ne valait pas franchement la peine de poursuivre. Et puis parce qu'il est retourné avec sa femme. Je ne fais pas dans les hommes mariés ou casés.

— Très honorable !

— Vous vous moquez ? Parce que ce serait drôlement ironique de votre part !

— Aussi loin que je sache, Mme le Maire, j'ai peut-être eu un ou deux ébats sur mon lieu de travail, mais Killian n'était pas marié, ni casé. Je suis propre.

— Je ne parle pas de cela.

Elle sourit d'un air mesquin avant de poursuivre.

— Vous en saurez plus le moment venu.

Emma décida de ne pas faire attention à ces remarques qui lui paraissaient parfois sans fondement.

— C'est pour ça qu'en grande partie Marianne vous déteste ?

— Sûrement, ou peut-être pas. En fait j'ai bien plus d'ennemis que je n'ai d'amis mais je me contrefous de la vie de Marianne de Locksley et de son défunt mari, paix à son âme quoi qu'il en soit.

— Elle nous a dit qu'elle vous avait vu vous disputer un peu avant son décès. Que s'est-il passé entre vous entre votre dernière sauterie ensemble et ce fameux jour ?

Le visage de Regina se ferma tout d'un coup. Elle n'avait pas l'air d'appréhender la question plus que cela, mais tout cet interrogatoire commençait à l'agacer au plus profond d'elle-même et Emma le sentait.

— Entre ces deux dates ? C'est simple, Robin travaillait pour moi donc comme pour un grand nombre de personnes de cette ville, il me devait des comptes. Je n'étais pas particulièrement plus tendre avec lui qu'avec les autres si vous voyez ce que je veux dire.

— Marianne a dit qu'elle était surprise parce que Robin n'élevait jamais la voix.

Regina sourit d'impatience.

— Dites-moi Swan, pourquoi n'iriez-vous pas jeter un œil vers l'amant que Miss Parfaite avait après que l'on s'était côtoyés, Robin et moi ?

Emma fronça les sourcils.

— Aaaah ! Poursuivit la brune. Elle a dû vous omettre ce détail. S'attaquer à la femme la plus détestée de la ville, c'est bien plus facile.

Devant le silence observé par Emma elle reprit :

— Vous avez encore des questions ?

— Naaan… Soupira-t-elle en balançant le dossier sur le bureau. Mais il est 18h, j'ai fini mon service. Je veux bien un verre.

— Je ne suis pas un bar, Miss Swan ! Si vous le souhaitez, vous vous levez, vous vous servez.

Emma n'en croyait pas ses oreilles. Elle s'attendait à essuyer un refus violent mais au lieu de cela, elle avait même la permission de se servir directement dans la collection personnelle de Mme le Maire. Elle se leva non sans gêne pour aller directement se servir. Lorsqu'elle revint elle se plongea dans les yeux noirs de sa patronne.

— Vous savez, commença-t-elle en goutant son verre, je ne fais pas non plus dans les hommes mariés.

— Je n'en doute pas.

— Alors pourquoi cette allusion, tout à l'heure ?

Regina sourit mais ne répondit pas. Elle contempla simplement Emma qui vidait d'une traite ce qu'il lui restait dans le verre.

— Est-ce que la NYPD épuise ses agents au point qu'ils se boivent des shots de whisky à peine le travail quitté ou c'est une particularité de ma commune ?

— Désolée. C'est vrai que c'est pas très poli tout ça, mais même si ma journée avait été super pourrie, j'aurais retardé l'échéance du retour chez moi.

— Cela ne va pas avec M. Jones ?

Emma s'étonna du comportement de son interlocutrice, même si elle savait parfaitement qu'elle se fichait de son état sentimental et qu'elle avait peut-être posé la question par simple curiosité.

— Difficile à dire ! Répondit-elle simplement.

— Alors quittez-le !

— Je vous demande pardon ?

— Laissez les gens pour qui vous n'avez pas suffisamment d'attaches. Ce sont ces personnes qui vous feront du mal si vous réussissez à avoir des sentiments.

Emma grimaça.

— Vous lui avez dit quoi ? Il paraissait horriblement contrarié tout à l'heure.

— Il s'est pris pour quelqu'un qu'il n'était pas. Le reste est confidentiel et professionnel. Mais vous le lui demanderez, je présume.

Emma hocha la tête et estimant qu'elle avait suffisamment abusé de l'accueil de sa patronne se leva en se dirigeant vers la porte. Elle se retourna sous une dernière pensée qui lui parcouru l'esprit :

— Merci au fait ! Pour le compliment.

— Miss Swan! Soupira Regina maintenant lasse de la voir dans les parages, je ne vous ai jamais fait aucun compliment ce n'est ni aujourd'hui, ni demain que ça va commencer. Vous pouvez disposer.

— Pour le « binôme canon de votre frère », fit-elle en mimant des guillemets de ses mains.

Regina sourit sans gêne apparaissant sur son visage.

— Vous pouvez disposer, Miss Swan.

En rentrant chez elle, Emma pensa à un million de choses à la fois. Est-ce qu'elle avait halluciné ou cette fois-ci Regina avait été bien plus patiente que précédemment ? Serait-il possible qu'elle commence à l'apprécier ? Regina Mills était-elle non seulement capable d'apprécier quelqu'un ?

Elle marcha tellement vite sous ses pensées qu'elle se trouva en un rien de temps devant l'entrée de chez elle. La lumière était allumée. Killian était déjà là, cela ne faisait aucun doute. Il attendait simplement d'arrache-pied que sa compagne rentre pour la persuader de quitter la ville pour une raison qui échappait encore totalement à Emma. Pour en savoir plus, il allait donc falloir qu'elle rentre pour l'écouter parler.

Elle poussa la porte et en moins de temps qu'il n'en fallu pour le dire, Killian était là et la dessaisit de son manteau.

— Emma, ma belle, il faut qu'on discute.

— J'ai cru comprendre Killian. Bon maintenant vas-y explique-moi ce qu'il s'est passé de si horrible pour que tu ne veuilles plus rester ici. Ecoute moi s'il te plait, je vais te laisser tout le loisir de parler après. Nous n'avons pas une tonne de possibilités qui s'offrent à nous. Nous avons eu la chance de pouvoir intégrer cette mairie, et honnêtement Killian tu penses sincèrement que nous avons la capacité de pouvoir réclamer mieux ? Je sais bien que la cybercri ce n'est pas ta tasse de thé, mais Ruby, elle est pas sympa avec toi ? Et puis tu sais Mme Mills m'a dit qu'elle félicitait toujours les agents qui le méritaient, essaie de voir le positif, défonce-toi et tu verras qu'elle te proposera un poste bien mieux dans très peu de temps, vu le flic hors pair que tu es.

— Emma ! Mme Mills m'a proposé que nous… enfin qu'on couche ensemble quoi.

Cette révélation fit l'effet d'un coup de poing dans le ventre de la blonde.

— Elle t'a quoi ?