Tout d'abord, un IMMENSE merci à HydrusMaelstrom qui a bien voulu être ma bêta, qui supporte si patiemment mes états d'âme, qui me suit et me soutient, qui me laisse ses petits commentaires qui remplissent mon cœur de joie et de bonheur ! J'avoue que si j'arrive à continuer OUAT, c'est grâce à elle !
Je vais rester courte pour ce début de chapitre, je m'appesantirai plus longtemps à la fin : déjà, désolée (pour les rares qui lisent) d'avoir mis aussi longtemps à publier le nouveau chapitre ! Et ensuite, et surtout, laissez des commentaires SVP ! (par pitié !) Si vous lisez ici, c'est que vous avez lu le reste, donc que vous suivez un peu cette histoire. Et vraiment, sans commentaire, c'est comme parler dans le vide : c'est déprimant, et on n'a pas envie de continuer. (si mes états d'âme vous intéressent, rdv à la fin ! Mais s'il-vous-plait… mettez-moi un petit mot, que je sache si je parle au vide ou à des gens qui existent ailleurs que dans ma tête ^^')
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¤¤¤¤ - Chapitre 9 - ¤¤¤¤
PINOCCHIO
PART 1/2 : "GEPPETTO"
Lorsque Blaise se réveilla dans sa chambre ce matin-là, il était d'excellente humeur. Les carreaux à sa fenêtre n'étaient pas nettoyés, son drap était un peu trop rêche, un ressort manquait à son matelas, il y avait de la poussière partout, une toile d'araignée se trouvait juste au-dessus de son lit, il n'y avait pas de bougies de rechange dans ses tiroirs, son miroir était tâché de vieillesse… Avalon était bien loin… Et pourtant, il était ravi !
D'un bond, il sauta hors de son lit, et utilisa l'eau froide de la vasque pour faire un brin de toilette. Pas besoin d'attendre l'eau chaude des domestiques, il n'était même pas certain d'y avoir droit. Ils devaient déjà tous s'affoler pour satisfaire les moindres requêtes du Roi Arthur et de la Reine Elsa, ils n'allaient pas s'occuper d'un pirate. Petite consolation : le "simple" chevalier Lancelot n'était pas non plus leur priorité.
Il enfila une chemise et un sous-vêtement qu'il trouva dans une penderie - une vraie, non animée - récupéra ses braies lâches et confortables, revêtit son précieux caban bleu nuit, et sifflota en passant la porte de sa chambre. Et comme prévu, plus il avançait vers les quartiers de Draco et Potter, plus il voyait des miroirs à main, plumeaux, cintres, bassines et portemanteaux s'activer. Pour faire des économies, le Roi Adam avait certainement dû réduire les effectifs de son château, surchargeant ses gens de corvées lorsque de telles personnalités étaient invitées.
Guilleret, il franchit le seuil de la petite salle-à-manger qu'un repose-pied eut l'amabilité de lui indiquer, et trouva Belle assise en bout de table, en grande conversation avec le Duc Lumière et… une pendule ?
« Capitaine Sinbad ! le salua-t-elle en souriant. Vous êtes le premier. Asseyez-vous, je vous en prie. »
Même au réveil et sans maquillage, Hermione "Weasel" était sublime. Elle avait un teint de pêche, un visage fin, de belles lèvres rouges pulpeuses, de pétillants yeux cuivrés, de longs cils noirs, un petit nez retroussé, de longues boucles brunes brillantes qui coulaient sur ses épaules, un cou élancé et gracile, des clavicules bien dessinées… C'était elle qu'il mourait d'envie de déguster en guise de petit déjeuner ! Et sa jolie robe bleu majorelle n'appelait qu'à être retirée.
« Enchanté, noble invité ! salua l'homme-comtoise en s'inclinant si bassement que ses aiguilles touchèrent la nappe blanche. Je suis le Duc Big Ben. Navré de ne point avoir eu l'honneur de vous rencontrer lors de votre arrivée !
- Alors c'est toi, le comptable, sourit Blaise en s'installant à la droite de la maîtresse de maison. Je m'attendais à un boulier. T'as raté ta vocation, mec ! T'aurais été plus à ton aise comme "horloger".
- Pardon ?
- Bonjour. »
Neville arriva, et sembla lui aussi avoir préféré retrouver la commodité de son pantalon de toile, qui avait pourtant connu des jours meilleurs. Il prit la chaise à gauche de Hermione, tout en laissant un fauteuil d'écart, certainement pour son roi. Qui arriva peu de temps après. Avec son insupportable tête à moitié peignée de Potter.
« Il n'a pas été aisé de m'esquiver, s'amusa-t-il après les avoir tous salué. Vos serviteurs sont très zélés ! J'y serai encore si je n'avais pas coupé court à toutes leurs charmantes attentions. Je ne vais tout de même pas porter une couronne toute la journée ! »
À la surprise générale, il tira le siège à côté de Sinbad, face à Lancelot. Le pirate se demanda pourquoi il le collait, avant de comprendre que sa stupide politesse l'obligeait à laisser la meilleure place, près de la maîtresse de maison, à la reine. C'était ridicule ! D'autant plus qu'il aurait aimé avoir son petit prince près de lui pour être entouré des plus belles plantes.
Les présentations reprirent, le pendule développant des trésors d'obséquiosité envers le Roi Arthur. Les dessertes s'activèrent en tous sens, un grand bougeoir passa les plats à trois fourchettes et une louche, qui les déposèrent au centre de la table. Les assiettes sautèrent toutes seules devant eux, et une grande cuillère en argent clinquant s'avança d'un air conquérant pour lever les cloches et couvres-plat. Le doux fumé du bacon grillé et des œufs brouillés se répandit dans l'air. Une grosse carafe, suivie d'une troupe de petites tasses sautillantes et gloussantes, dont Zip, vint devant chacun d'eux pour leur proposer son café bien chaud. Blaise avait l'impression d'être à la table d'un théâtre-restaurant, et se retenait d'applaudir leur prestation pittoresque.
« La Reine Elsa n'est pas encore réveillée ? s'enquit Belle auprès de Lumière, la mine inquiète. J'espère qu'il… qu'"elle" n'est pas malade ? Je l'ai obligée à veiller bien tard, hier soir, et la fatigue du voyage aurait pu la rendre plus sensible à la fraîcheur des soirées ?
- Elle a été la première levée, rit le chandelier en faisant un clin d'œil à Arthur, compatissant. Mais je crois que notre chère Madame Ward et la dame d'honneur de sa Majesté ne s'entendent pas très bien. Et nos domestiques sont… "zélés", comme l'a si bien souligné le roi. Je crains que la Reine d'Avalon ait de plus grandes difficultés pour… "s'esquiver", elle aussi.
- Nous devons leur en toucher un mot, gronda Hermione en fronçant les sourcils. Nous ne pouvons continuer à importuner des Altesses Royales sous prétexte d'être trop heureux de les recevoir.
- J'y vais. »
Tous bondirent à l'entente de cette voix grave et profonde : la Bête ! Ils n'avaient pas vu la porte s'ouvrir silencieusement et la silhouette imposante se découper dans l'embrasure. Cependant, aussitôt l'eurent-ils aperçu, aussitôt la créature se volatilisa. Belle pâlit violemment, apeurée par la confrontation qui s'apprêtait à avoir lieu dans les étages.
« Je vais… commença Lumière.
- Non, l'arrêta Harry d'un geste impérieux. Laissez. Tout va bien se passer.
- Mais… hésita la brune.
- J'ai dit : tout ira bien. »
La jeune femme resta interdite, abasourdie par la nouvelle autorité royale de son ami. Elle le dévisagea comme si elle le voyait pour la première fois.
« Eh oui, soupira dramatiquement Blaise en sirotant son café. Je te présente ton vrai pote Potter : un bel enculé. Et je confirme : il est toujours comme ça. T'as vu ce qu'on a dû subir pendant un mois ?! »
Au lieu d'être offusqué, Arthur ricana. Il semblait sincèrement amusé par la blague pourtant insultante, et Neville souffla en levant les yeux au ciel, blasé. Par ces échanges simples, ils ne se rendirent pas compte qu'ils dévoilaient la profondeur de leur relation, construite au fil du mois passé ensemble. Et ils ne virent pas le sourire attendri qui s'esquissa furtivement sur les lèvres de Belle.
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Draco se pinça le nez de contrariété, fatigué par la dispute entre Audhild et l'armoire… Sa journée avait pourtant si bien commencé : par un bon bain chaud et savonneux dans lequel il avait failli se rendormir. Puis, tout était parti en vrille. Les brosses et les peignes s'étaient pris pour mission de coiffer sa longue chevelure, et ne cessaient de se cogner entre eux, entraînant des chamailleries et lui tirant désagréablement le crâne. Une petite éponge avait eu le malheur de lui proposer gentiment d'oindre sa peau d'une huile à la camomille, idéale pour son épiderme délicat et ses cheveux blonds, ce qui scandalisa un carré de soie, qui clama que seule la calophylle convenait mieux à une reine partant à l'aventure. Un petit pot de crème hydratante vint s'en mêler, et ce fût le début de la débandade.
Et ce n'était rien comparé au moment où il retourna dans sa chambre, sans massage ni huile ni crème, les cheveux encore emmêlés, et un simple peignoir de satin sur les épaules. Il avait été accueilli par des vêtements volant en tous sens, et les cris outrés de Madame Ward face aux tenues d'Arendelle que sa dame de compagnie avait apportées. La brune ne se laissa pas démonter par le gros meuble, et se mit à critiquer vertement les robes de la camériste, en utilisant des termes imagés que le blond n'aurait jamais cru entendre de la bouche de cette fille de comte. Des pinceaux et poudriers vinrent s'enquérir de la mise en beauté voulue par la reine, et s'offusquèrent en voyant ses soins à moitié accomplis. Ils allèrent immédiatement demander des comptes à leurs collègues "incompétents", et crièrent haut et fort qu'ils n'avaient jamais cru un jour assister à pareil outrage.
Elsa en avait eu assez, et avait pris le premier démêloir non animé qui lui tomba sous la main… et déchanta très vite. En tant que Draco Malfoy, il n'avait eu qu'à s'occuper d'une coupe courte, très facile à entretenir. En tant qu'Elsa Camlann, il n'avait jamais tenu une brosse de sa vie… L'entreprise se révéla bien plus périlleuse qu'escompté : à chaque nœud démêlé, un autre se créait, l'obligeant à passer mèche par mèche sur toute la longueur… Le voyant faire, les objets de toilettes furent encore plus choqués, et les décibels grimpèrent en volume.
Draco abandonna très vite cette besogne qu'il jugeait finalement trop ardue, surtout dans la cacophonie ambiante. Il venait de reposer son ustensile, un mal de tête montant au cerveau, et portait ses doigts à son visage pour se pincer le nez… Il s'apprêtait à intervenir. Sa magie circulait dangereusement sous sa peau, une couche de gel commença à envahir le miroir de la coiffeuse paniquée…
Quand la porte de sa suite s'ouvrit à la volée et claqua contre le mur. Tout le monde bondit, le cœur au bord des lèvres, et le silence revint d'un coup… La Bête se tenait dans l'encadrement, dardant son regard plein de colère sur chaque "personne" présente… sauf le blond. Celui-ci l'observait, les yeux écarquillés : il était la dernière personne qu'il pensait voir débarquer… et à l'improviste !
« Vous me faites honte ! hurla-t-il à la cantonade, faisant se recroqueviller de terreur les objets tremblants. Nous attendons tous la reine dans le petit salon, et je vous retrouve à vous chamailler devant elle ?! Si vous n'êtes plus capables de faire preuve de bienséance, je me passerai de vos services ! Qu'elle soit prête dans la demi-heure, ou vous ne remettrez plus les pieds au château ! »
Et il referma le battant si violemment que le linteau craqua. Quelques poussières de plâtre du plafond tombèrent lentement dans le silence pesant de la chambre, les bibelots figés d'effroi…
« C'est possible ! s'exclama tout à coup Audhild, au grand étonnement de sa souveraine. Vous, la brosse rose, finissez de lisser ses cheveux. L'éponge, passez lui cette huile de calophylle. Le tissu en soie, la camomille sur les mains et les pointes des cheveux. Le pot, demandez à un de vos collègues de vous aider à appliquer la crème sur son visage. Les autres peignes, sortez tout le nécessaire pour la coiffure. Le valet de nuit, disposez les bijoux bien en vue, que nous puissions les choisir. Les pinceaux, préparez le maquillage, je m'en occuperai. Madame Ward, nous allons partir en quête d'un pantalon qui nous satisfera toutes les deux, et conviendra parfaitement à ma reine. Au travail ! »
Après les disputes, ce fût le branle-bas de combat. Tous obéirent sans poser de question, et s'appliquèrent à respecter consciencieusement les consignes. La menace du Roi Adam avait fait son effet. Draco suspecta le monarque de ne jamais donner de second avertissement avant d'appliquer la sentence.
Mais surtout, Elsa était stupéfait par sa dame : elle avait toujours été si sage et docile, jamais un mot plus haut que l'autre, presque… "transparente". C'était comme s'il la voyait pour la première fois. D'où lui venaient donc ses talents de meneuse ? Il était époustouflé !
Voyant chiffon et spongiaire se précipiter vers lui, le blond se remit face à la glace, et prit son mal en patience. Il n'avait toujours pas réussi à s'habituer à être pomponné. Même lorsqu'il était jeune et coquet, ses elfes de maison ne décidaient pas de ses vêtements à sa place, ni n'appliquaient les onguents sur sa peau. Résigné, il laissa son esprit vagabonder.
Il n'avait pas du tout apprécié l'intervention de "Weasel"… Certes, il avait remis de l'ordre dans ce chaos de plus en plus énervant. Cependant cela l'avait aussi obligé à faire face à sa propre inertie : il aurait dû interférer plus tôt ! Trop coutumier de ses quatre demoiselles d'honneur professionnelles qui le connaissaient si bien, et de ses domestiques habiles et qualifiés, il n'avait jamais pensé devoir un jour recadrer ses serviteurs. Ceux d'ici n'avaient reçu personne durant une longue période, et n'avaient pas pu travailler après leur transformation. L'arrivée d'une reine avait été un grand chamboulement pour eux. Il n'aurait pas dû laisser les événements s'enliser à ce point. Adam le jugeait certainement faible et incompétent. C'était si vexant !
Et le roi n'avait pas daigné lui accorder un seul regard ! Draco en aurait rougi de honte s'il ne faisait pas déjà tout son possible pour rester de marbre. À ses yeux, il n'était qu'une poupée que ses domestiques préparaient. Il méritait moins son attention que des objets ! Il était entré dans la chambre d'une souveraine sans prévenir, sans s'annoncer, et juste pour crier ! C'était insultant !
Malfoy serra les poings, conscient que sa colère grandissante ne ferait que le desservir. Sa magie ne devait pas sortir. Pas au milieu de ces pauvres babioles déjà assez effrayées comme ça. Il avait eu la bêtise de croire que le rouquin avait décidé de se montrer courtois, et était durement ramené à la réalité : ils ne pourraient jamais s'entendre.
Soit. Si les choses devaient demeurer ainsi, il agirait de même. Les négociations du traité commercial s'annonçaient sanguinaires.
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Lorsqu'Elsa les rejoignit vingt minutes plus tard, il était simplement vêtu d'une veste ocre et de chausses sarcelle. Ses bijoux étaient discrets, son maquillage très léger, et sa coiffure n'était qu'une longue natte se balançant jusqu'à ses hanches. Pourtant, Hermione le trouva toujours aussi beau… et peut-être "un peu" agacé.
Elle partagea un regard entendu avec Lumière, qui lui avait promis de mieux gérer les serviteurs. Toute cette histoire était de sa faute : le Roi Adam lui avait ordonné de préparer un festin pour faire pardonner son absence de la veille, ce qui avait ravi Belle, mais avait aussi empêché le Grand Chambellan d'organiser la domesticité. Celui-ci avait cru que tout se passerait bien, et avait omis le facteur "arrivée d'une reine" dans ses prévisions... Et surtout, personne n'aurait imaginé que le Roi Adam s'en mêlerait !
Draco s'installa sur la chaise libre à gauche de la brune, et répondit laconiquement aux fourchettes et carafes pour être servi. Les plats avaient été maintenus au chaud en attendant son arrivée, les autres invités ayant terminé de se restaurer. En bonne hôte, seule Hermione avait patienté, et demanda à avoir ses œufs pour manger en compagnie de la souveraine.
« C'était si terrible que ça ? questionna Blaise, peu soucieux de titiller la rage froide de Malfoy. "Weasel" est passé, non ?
- Il est venu, a crié, et est reparti », asséna sèchement le blond.
La jeune femme se prit la tête entre les mains, Lumière et Big Ben grimaçèrent, Neville ouvrit de grands yeux, et Harry soupira. Seul Blaise sourit, amusé.
« Une vraie bête. Mais je m'attendais à pire en le voyant pas revenir.
- Je vous supplie de bien vouloir pardonner notre roi, tenta la pendule en enchaînant les courbettes. Il est juste… très maladroit ! Il n'a pas conscience de… »
L'horloge se tut d'un coup, crucifié par le regard noir que lui jeta la monarque. Et Potter songea qu'il n'avait pas vu "l'ancien Malfoy" depuis bien longtemps. Ron avait le don de faire resurgir sa part sombre. Il espéra qu'il ne s'agissait effectivement que d'une nouvelle maladresse : il avait cru que laisser Ron régler le "conflit domestique" lui donnerait l'occasion de marquer un bon point. Erreur…
« Bon ! s'exclama abruptement Zabini en posant les mains sur la table. C'est super tout ça, mais c'est quand qu'on cause ? J'ai des trucs à vous dire.
- Je pensais que nous pourrions attendre Adam, au cas… hésita Hermione.
- Il devrait déjà être là, coupa Arthur. Nous ne pouvons nous permettre d'attendre son bon vouloir. »
Belle ne put que hocher la tête, contrite, et demanda à tous les objets animés de les laisser seuls. Heureusement, la vaisselle d'Elsa et la brune étaient inertes, leur permettant de finir leur repas. Lumière les salua bien bas, pendant que Big Ben enchaînait d'autres révérences inutiles tout en reculant, ce qui obligea le chandelier à l'empoigner pour l'empêcher de tomber une fois arrivés au bord de la table.
« Hindbad a eu une idée de génie hier, attaqua directement Sinbad dès que la porte fut fermée. Faut qu'on appâte la fée pour la faire sortir ! Comme ça, plus besoin de chercher sa tanière !
- Es-tu fou ? siffla de suite Draco. Nous savons qu'elle est puissante et tu veux la provoquer ? T'es-tu pris de l'envie soudaine de devenir un tricorne ?
- On a qu'à brandir la fleur à paillettes de Titania dès qu'on la verra.
- Et tu crois que ça suffira ?!
- Même si cela pouvait fonctionner, quel est ton plan ? demanda Harry en croisant les mains devant son menton, l'air préoccupé. Nous ne savons rien d'elle. Qu'est-ce qui pourrait l'attirer ?
- Pour ce point, j'ai peut-être une piste, intervint Neville. En me promenant dans les jardins, j'ai vu votre grand if. »
Tous écoutaient attentivement le récit de Lancelot, et son expérience étrange avec les arilles magiques de l'arbre. Il passa sous silence la conversation qu'il avait surprise et l'objet réel de ses réflexions, mais relata précisément ce qui s'était produit, l'état déplorable du tronc, et ses conclusions après analyses.
« Votre soirée à tous deux a été fructueuse, ne put s'empêcher de faire remarquer Potter.
- Je n'avais jamais vu l'état de cet if, pâlit Hermione en portant les doigts à ses lèvres, frappée. Je le vois pourtant depuis le balcon de la salle de réception où je vais souvent. Je ne me promène jamais dans ces alentours : les chemins y sont à peine praticables.
- Vous ne savez pas ce qui arrive dans votre propre domaine ? reprocha le blond. Pourquoi laisser le parc dans un tel abandon ? La malédiction n'empêche pas vos gens de travailler : où sont vos jardiniers ?
- Pour renflouer les caisses, le Roi Adam a été contraint de se séparer d'une grande partie de sa domesticité, expliqua Belle, mortifiée. Ils ne sont plus assez nombreux pour entretenir toute cette surface, et se concentrent sur la réhabilitation d'une partie seulement… à l'opposé de l'if.
- Vous devez pourtant savoir que cet arbre est magique, non ? ajouta Arthur. D'où vient-il ?
- Il faudra le demander à Adam ou à Lumière, répondit la jeune femme. Même si je me suis beaucoup renseignée sur ce palais et ce Royaume, je ne suis là que depuis une dizaine de jours. Et je n'ai rien lu à ce sujet.
- On va peut-être un peu trop vite, là, bougonna Sinbad en jouant avec sa fourchette. Rien ne nous dit que c'est bel et bien la fée.
- Un arbre magique qui s'est fait prélevé de son écorce plusieurs fois, dont la dernière remonte à environ deux mois ? contra Lancelot. Ne vois-tu pas le rapprochement ?
- T'es parti du principe que la donzelle est venue régulièrement en ville. Mais on a pas de preuve, juste des suppositions. On peut pas se permettre de tout miser là-dessus.
- Alors que proposes-tu ? Prendre une carte en espérant avoir une illumination ?
- Neville n'a pas tort, fit le roi. C'est notre seule piste. Si tu parviens à nous proposer mieux… Tu vas venir avec moi, Zabini. Nous irons interroger les habitants en ville au sujet de la fée déguisée en vieille dame. Peut-être tes pirates ont-ils appris quelque chose durant la nuit ? Pendant ce temps, Hermione s'aidera de Lumière pour retracer l'historique de cet arbre dans les archives. Et Lancelot pourrait faire des recherches plus approfondies avec ses connaissances de botaniste ?
- Je l'accompagnerai, décida Draco en posant ses couverts. Il est possible que je dispose d'une quelconque sensibilité à la magie, due à mes gènes elfiques.
- Des gènes elf… quoi ? hoqueta Belle, les yeux écarquillés.
- Ah, il est vrai que Potter a eu la "délicatesse" de ne pas te révéler cette donnée… personnelle. Pour une fois ! Effectivement Grang… "Weasel"... Un de mes ancêtres lointains était un elfe. D'où mes pouvoirs, que je ne maîtrise pas. D'où notre recherche de cette fée, afin de m'apprendre à mieux gérer cet aspect de ma personne. Satisfaite ? »
Hermione fût incapable de répondre, l'information avait de grandes difficultés à atteindre son cerveau. Et puis, les pièces d'un gigantesque puzzle se mirent en place dans son esprit, composant plus précisément le motif de Malfoy : le fait qu'il soit génétiquement l'héritier légitime du trône, prouvé par ses iris métalliques, et qu'il possède malgré tout une magie qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait démontré avant lui ; sa beauté surnaturelle et ses charmes magnétiques ; ce petit "quelque chose" d'étrange et de fascinant qu'elle ne parvenait pas à définir… Tout s'expliquait ! Et pourtant, un dernier détail la dérangeait… Comme un morceau manquant dans ce casse-tête géant.
Tout à coup, la porte s'ouvrit, les faisant à nouveau sursauter. Derechef, la Bête. Elsa se renfrogna et personne ne souffla mot, trop stupéfaits par son fardeau : Ron portait de nombreux rouleaux de parchemins, et les jeta tous sur la table sans donner explication.
« Des cartes, grogna-t-il. J'ai cru comprendre que vous en aviez besoin. »
Puis, il se gratta derrière les cornes, l'air… "gêné" ou "indécis" ? Il sembla prendre une décision : il se redressa, pivota sèchement vers Harry, et s'inclina légèrement.
« Veuillez me pardonner de ne point avoir pu vous recevoir correctement, hier soir, grommela-t-il, clairement réticent. J'ai fait mander un grand banquet ce soir pour m'excuser. En attendant, voici ce que vous vouliez. Il m'a fallu beaucoup de temps pour les trouver. Autre chose ? »
Aux yeux de tous, il n'avait pas du tout envie d'être là, debout face à eux, et encore moins de faire pénitence. Hermione voyait qu'il faisait des efforts, mais Harry fronçait les sourcils, et Malfoy détournait le visage, fermé… Ce n'était pas assez !
« Merci, Ron, sourit-elle, embarrassée. Souhaiterais-tu te joindre à nous ? Nous sommes entre nous, et…
- J'ai d'autres priorités, trancha-t-il d'une voix un peu trop forte. Si vous n'avez rien d'autre à me demander, nous nous reverrons ce soir. »
Il partit dans la seconde, et claqua violemment la porte derrière lui.
Elle ne savait plus quoi faire ! La conversation avec leur meilleur ami n'avait pas porté les fruits qu'elle espérait. Et il avait si ouvertement ignoré la Reine d'Avalon qu'elle en avait des sueurs froides ! Sa fausse contrition n'avait rien arrangé, et son comportement pouvait passer pour une nouvelle offense… Lentement, elle leva le visage vers le blond, dans l'espoir d'y lire un peu d'indulgence. Cependant, ce fût Blaise qui attira son regard en empoignant un des rouleaux pour l'ouvrir.
« Bordel ! rit-il en déroulant un second parchemin. J'avais juste demandé une seule mappe, pas la cartographie complète de toutes les régions du pays ! Il a pas chômé, le bougre ! Potter ! appela-t-il en se tournant vers le brun dans un grand sourire moqueur. Vu que t'as décrété faire équipe avec moi, j'espère que t'aimes la paperasse ! »
De toute sa vie, elle n'aurait jamais cru que le soutien tant recherché viendrait de Zabini.
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Neville se faisait aider de plusieurs jardiniers sécateurs et cisailles pour tracer un chemin vers l'if, et ainsi permettre à la Reine d'Avalon d'avancer sans craindre d'abîmer ses vêtements. Il ne s'était pas posé de question et avait pris cette précaution instinctivement, comme les codes de la chevalerie l'obligeaient. Un instant, il songea qu'il ne devrait pas agir si diligemment pour Malfoy. L'instant d'après, il regardait son visage d'ange et ne voyait plus que sa noble "cousine" de cœur.
Ce dilemme intérieur était très perturbant, et il savait que cela ne durerait pas. Car il sentait peu à peu l'image du gamin arrogant s'effacer au profit de la fillette rieuse avec laquelle il avait joué étant enfant. Peut-être n'était-ce pas plus mal : les bons souvenirs remplaçaient les mauvais, et l'aidaient à apprécier le blond pourtant toujours aussi orgueilleux. Lancelot prenait peu à peu le pas sur Neville. Et cela ne le dérangeait pas vraiment.
« Le voici. »
Draco, absorbé par les énormes et magnifiques roses rouges qui l'entouraient, reporta son attention sur lui. Et vers le grand arbre au milieu de son étendue d'herbe. Londubat n'avait pas exagéré : l'amputation de ses branches et la lacération du tronc faisaient peine à voir, même pour un néophyte. Malgré tout, cela ne semblait pas entraver sa pousse. Il demeurait fier et verdoyant sous le soleil, étendant sa ramure au plus haut pour profiter de ses rayons.
Il s'approcha, fasciné par sa majesté, et dépassa le chevalier et les serviteurs. Il y avait quelque chose qui l'intriguait… et l'attirait. Avec révérence, il s'avança jusqu'à l'écorce fendue, frôlant au passage ses douces épines du bout des doigts en une caresse légère.
Le blond n'arrivait pas à déterminer si cet arbre possédait une forme d'intelligence, ou s'il était simplement le réceptacle d'un puissant pouvoir. Il ressentait bel et bien sa force : il percevait sa vigueur pulser dans sa sève comme un violent cours d'eau, et une aura magnétique l'entourer tel un cocon. Le sentiment de bien-être et de confiance qu'il diffusait était si fort ! Il était étonnant que Londubat ait réussi à s'extraire de son emprise.
« Tu sens quelque chose ? lui demanda le chevalier en le rejoignant, méfiant.
- Oui… Mais cela ne va pas nous avancer à grand-chose… J'ignore totalement l'origine de ceci ou son effet… J'ai simplement confirmation que je suis capable de ressentir la magie en présence de celle-ci.
- C'est un bon début, sourit Lancelot, se voulant rassurant. Crois-tu pouvoir retrouver le bois prélevé si tu prenais une brindille de cet arbre ? Un peu comme une boussole…
- Bien sûr que non. Me prends-tu pour un niffleur ? cracha Draco, froissé. Je dois me tenir très près pour discerner son essence, et il s'agit de l'arbre lui-même ! Qu'est-ce que ce sera avec les morceaux du tronc découpés ?
- Alors tu dois entraîner ce sixième sens, assura Neville, la mine pensive. Ce don pourrait se révéler très utile pour la suite de notre aventure. Tu pourrais nous prévenir de nombreux pièges, et…
- N'est-ce pas le balcon où Belle et moi avions discuté, hier soir ? »
Le sang de Du Lac déserta son visage. Avait-il sincèrement pensé que Malfoy ne remarquerait rien ?... Il devait trouver une parade, un argument, une justification… Mais il ne savait pas mentir !
« Alors tu espionnes les conversations, maintenant ? fit froidement Elsa, le regard dédaigneux. La chevalerie n'est plus ce qu'elle était…
- Je te jure que c'était un hasard ! paniqua le fautif. J'ai fait mon possible pour ne rien écouter, je te le promets ! Dès que j'ai entendu vos voix, j'ai voulu partir ! Et puis je me suis retrouvé sous cet arbre, et…
- Je te crois.
- …et ensuite… Hein ? s'interrompit Lancelot, stupéfait par le calme du Serpentard.
- Je te crois, répéta le blond en souriant d'un air mesquin. Je te faisais marcher. "Lancelot Du Lac" n'aurait jamais songé une seconde à écouter aux portes, ce serait indigne de sa personne. C'est tellement facile de te faire perdre tes moyens. Comment résister ?
- Tu es vraiment… commença à grommeler le Gryffondor.
- Mais je suis curieux, le coupa Draco. Qu'as-tu entendu, au juste ? Et surtout : qu'en as-tu pensé ? Cela nous permettrait de déterminer le déclencheur de la magie de cet arbre, et ce qu'il fait. »
Après avoir tant pâli, le chevalier se mit à rougir. Que pouvait-il répondre ? Il n'allait tout de même pas avouer avoir pensé au divorce de son roi, afin que celui-ci convole avec Malfoy et libère la Reine Guenièvre. Le Serpentard n'avait même pas l'air de se rendre compte des sentiments de plus en plus présents de Harry à son égard ! Lui-même ne pouvait déterminer s'il s'agissait plus que de simple désir charnel… Et son ami ne semblait pas décidé à faire le premier pas… Ce qui était plus sage. Tout ceci ne pouvait pas se produire ! C'était impossible ! Et…
« Lancelot… »
Neville le regarda, surpris, et suivit ce qu'il lui indiquait de l'index, en hauteur. Une grappe de fruits luminescents descendait pour s'approcher de lui, juste au-dessus de sa tête ! Un peu plus loin, il entendit les jardiniers s'agiter. Ils se tenaient à l'écart, soucieux de ne pas les importuner, et n'avaient apparemment pas été informés de la nature féerique de l'arbre.
« Maintenant, tu vas me dire à quoi tu pensais, insista Elsa, intrigué.
- C'est juste… hésita-t-il, de plus en plus embarrassé. C'est seulement… Je pensais à Guenièvre », lâcha-t-il finalement.
Draco plissa les yeux, pas du tout convaincu. Il n'y avait aucun lien entre la conversation qu'il avait eue avec Hermione la veille et la Reine de Loegrie. Le blond s'apprêtait à rétorquer, mais Du Lac ne lui en laissa pas l'occasion.
« Tu connais la Légende Arthurienne et mon rôle dans celle-ci. Tu sais ce que j'éprouve pour elle… Et… avec les souvenirs qui resurgissent petit à petit, j'ai commencé à… réellement l'aimer… sans l'avoir rencontrée… C'est étrange, je me souviens parfaitement d'elle, sans parvenir à me représenter son visage… Pourtant, je peux t'affirmer sans l'ombre d'un doute que je suis fou d'elle… Et les mots de Belle m'y ont fait penser… à elle et à notre amour impossible. »
Neville n'osait pas regarder vers Malfoy. Il n'avait pas prévu de lui avouer sa faiblesse. Une tare qui l'obligeait à trahir son roi… C'était plus fort que lui.
« Je vois… Peut-être que l'if répond aux sentiments amoureux ?
- Je ne suis pas sûr. Que cela soit hier ou aujourd'hui, à chaque fois que je me mets à espérer une fin… moins "tragique", je me surprend à vouloir abandonner. Comme si… j'acceptais cette fatalité… Je ne sais pas ce que cela signifie, mais cet arbre semble vouloir nous empêcher de lutter contre le destin. Et nous faire revenir dans le droit chemin… »
Ils demeurèrent pensifs quelques instants, reculant pour ne pas avoir à subir la résignation forcée de l'if. Ils n'avaient aucune idée de ce que tout cela pouvait bien signifier, ni pourquoi la fée s'était procurée un morceau de cette essence si singulière. Et sans en comprendre la raison, Draco se dit que tout ceci n'était pas bien méchant. Était-ce l'influence de la plante, ou un réel pressentiment ? Il ne pouvait le dire…
Un couinement suraiguë leur parvint, ainsi qu'un battement d'ailes. Dans le ciel, la reine reconnut la silhouette de Hugin portant un chargement. Il lui fallut attendre qu'il soit plus près avant de distinguer Ratatosk entre ses serres. Le corbeau blanc lâcha l'animal au-dessus des mains tendues de Lancelot, et vint se poser en douceur sur l'épaule de la souveraine. L'écureuil glapit plus fort, grimpa sur le torse du chevalier et lui plaqua un parchemin sur le nez. Neville recula la tête, interloqué, tout en récupérant le papier.
« De quoi s'agit-il ? s'enquit Elsa, curieux, en grattant le poitrail du volatile bienheureux.
- J'ai confié à notre petit ami roux la mission de trouver une trace du passage de la fée en ville, expliqua-t-il en regardant le butin de la bestiole, dubitatif. J'étais sûr qu'elle n'était pas passée inaperçue. Mais je ne m'attendais pas à ce qu'il revienne si vite. Ni que Hugin s'en mêlerait… Où était-il, d'ailleurs ? demanda-t-il en reportant son attention sur l'oiseau. Nous ne l'avons plus revu depuis notre arrivée.
- Il a dormi dans ma chambre, cette nuit. C'est lui qui m'a réveillé tôt ce matin en tapant sur la fenêtre pour sortir. Kristoff m'avait prévenu que son frère et lui aiment se reposer dans le luxe, mais préfèrent rester dehors dès qu'ils ont l'œil ouvert. J'imagine qu'il a trouvé son confrère pendant son escapade et l'a aidé à nous retrouver plus vite. Alors ? Qu'a donc découvert notre astucieux chapardeur ?
- C'est… hésita Neville avant de tendre la feuille à la reine. Je ne sais pas quoi en penser. »
Draco non plus… Il fronça les sourcils en observant le croquis d'un petit pantin de bois et ses différentes annotations. Le tracé était sûr, l'esthétique démontrait le talent certain de l'artiste… Pourtant, il n'y avait aucune composition ou mise en scène, et les détails ne concernaient en rien le dessin. Plutôt une future réalisation concrète de l'objet.
« Cela ressemble à l'ébauche d'un artisan, conclut-il, sceptique. Mais je ne vois aucune magie dans le procédé… Ce sera juste une très jolie marionnette. »
Ratatosk siffla d'un air méchant, et Hugin pinça le doigt du blond qui poussa un cri de douleur.
« Ils n'ont pas l'air d'être de ton avis, rit Londubat.
- Je vois ça, pesta Elsa en rendant l'étude au chevalier, comme si cela pouvait lui éviter d'être à nouveau la cible de l'ire des deux animaux. Nous devrions confier ce document à Blaise et Potter : puisqu'ils iront en ville, ils pourront retrouver l'auteur de l'ouvrage et l'interroger. Nous ne découvrirons rien de plus ici. Allons plutôt faire des recherches sur la magie des arbres dans la bibliothèque. »
Lancelot acquiesça, et ils rebroussèrent chemin vers le château, corbeau et écureuil toujours sur leurs épaules.
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Harry avait toujours détesté la paperasse et regrettait d'avoir suggéré de faire équipe avec Zabini… Il avait voulu apprendre à mieux le connaître et peut-être provoquer un moyen de lui revaloir son sauvetage de la veille. Idée pourrie…
« Tu espères quoi en regardant toutes ces cartes ? ne put-il s'empêcher de demander en rejetant un troisième parchemin pour en prendre un autre. Un panneau lumineux avec une flèche où il serait écrit "la fée est là" ?
- J'ai toujours eu un don avec la cartographie, répondit laconiquement le métis en étudiant un chemin de forêt. C'est le secret de ma réussite. Je m'en souviens toujours parfaitement, et j'en ai une belle collection dans les placards de ma cabine. J'y appose des notes, corrige certaines trajectoires, révèle des emplacements cachés… et je revends des copies de ces petits trésors quand le besoin s'en fait sentir. Ou plus exactement : je les troque contre des renseignements utiles. Les repreneurs sont légions !
- Le Roi Adam ne te laissera jamais griffonner sur les siens.
- Il y a trois options, s'amusa le pirate d'un air malicieux. Premièrement, je peux lui en voler une, il s'en rendra compte que plusieurs jours plus tard, et avec un peu de chance, on aura déjà filé. Deuxièmement, je demande à notre douce Reine Elsa de me négocier celles qui m'intéressent lors de votre petite discussion politique à venir. Il pourra pas lui refuser ce ridicule don.
- Malfoy n'acceptera jamais : ce serait lui retirer un levier dans les pourparlers.
- La balance pèse totalement en sa faveur, ça fera pas une grande différence. Ou alors, je peux aussi te le demander, à toi. Mais la troisième option est ma préférée : maintenant que j'ai tout sous les yeux, je peux sélectionner les meilleurs plans et me les procurer d'une autre manière. Il doit bien y avoir un marchand spécialisé en ville. Les copier serait un peu long, mais ça peut aussi se faire.
- Admettons… Cela ne répond pas à ma question initiale. À part te permettre de bien t'orienter, je ne vois pas ce que tu vas pouvoir en retirer.
- T'as dit le mot clef : l'orientation ! Quand on cherche quelque chose dans une zone aussi vaste, savoir se repérer est la base. Tu comptais embaucher un guide, peut-être ?
- Alors tu te proposes d'être le nôtre ? Juste en regardant ces schémas ?
- Ça me fait pas peur, argua Blaise en haussant les épaules, plein de mépris. Je fais ça tout le temps, et je m'en sors plutôt bien. Bon, je te l'accorde, en général je m'occupe de cartes maritimes. Mais ça doit pas être bien différent. »
Arthur sourit. Instinctivement, il croyait le flibustier et était impatient de découvrir à quel point sa mémoire des lieux était infaillible. Il n'avait pas soupçonné un tel talent chez cet homme, compétence probablement issue de son personnage de conte. Cela allait se révéler très utile durant leurs aventures, et il rangea précieusement cette information dans un coin de son esprit.
Cependant, il ne voyait pas ce que lui, pouvait apporter à cette étude. Il voyait les dessins de routes, de champs, de villes et villages défiler, et se sentait incapable de se souvenir des détails une fois sur place. La réalité était toujours bien différente. Il préférait se diriger avec des points de repère concrets, ou en ayant la topographie adéquate sous les yeux.
Alors il choisit plutôt de s'intéresser aux noms, et s'amusa des sonorités étranges ou du lien sémantique avec l'univers de la faune et la flore. La "vallée de la Pâquerette", la "montagne du Loup Gris", le "village Primevère", la "forêt de la Licorne", la "plage Anémone"… Le "sentier de la Pensée" accrocha son regard, sans pour autant mener à un endroit notable. Il savait pourtant que cette fleur existait naturellement, toutes n'étaient pas des "pensées d'amour", comme celle de Titania… Et puis il y avait la "route des Ronces", qui lui faisait penser au conte de la Belle au Bois Dormant d'où venait Hermione. Effectivement, cette artère principale semblait relier ce pays… Il y avait trop de fleurs ou d'animaux dans les contes de fées : chacun de ces noms pouvait évoquer un récit quelconque.
La porte s'ouvrit quelque temps plus tard sur Elsa et Lancelot, accompagnés du corbeau blanc et de l'écureuil.
« J'espère que vos recherches ont été plus fructueuses que les nôtres, s'enquit-il en premier, heureux de pouvoir soulager ses pupilles fatiguées.
- Évidemment, rétorqua le blond. Mais je dois reconnaître que la plus importante trouvaille nous a été apportée par Ratatosk. »
Le rongeur se redressa fièrement, son petit museau pointant bien haut. Grognon, Sinbad se redressa et croisa les bras en attendant le fin mot de l'histoire. Draco et Neville s'installèrent, et commencèrent à raconter. L'évocation vague de Guenièvre fit rougir le chevalier qui n'osa pas regarder vers son roi, et Arthur fronça les sourcils sans émettre le moindre son. L'homme marié et suzerain du chevalier était outré, mais l'ami compatissait… et Harry ne savait pas comment réagir. Voyant leur personnalité à tous se fondre dans leur protagoniste, il ne parvenait plus à déterminer si Neville serait capable de le trahir ou non… et ne voulait pas le savoir.
Heureusement, le sujet changea très vite, et il dût cesser d'y réfléchir pour suivre le récit. Puis, arriva le butin du mini maraudeur.
« Un pantin de bois ?! hoqueta Harry en arrachant le croquis des mains d'un Londubat stupéfait. Mais c'est… c'est… Mais oui !
- Tu fais une attaque, Potter ? rit Blaise.
- C'est Pinocchio ! s'exclama-t-il, son sourire allant jusqu'aux oreilles. Il s'agit d'un conte où un vieil artisan déplore de ne pas avoir d'enfant et décide de se le fabriquer lui-même. Il sculpte une marionnette dans un bout de bois et va se coucher. Pendant la nuit, la fée bleue…
- Une fée ?! s'écria Draco.
- Oui, il y a des tas de fées dans les "contes de fées". La fée bleue, donc, pleine de compassion, décide d'enchanter sa création afin de lui donner vie : Pinocchio !
- Quelle est la probabilité pour qu'on tombe sur une gonzesse différente en cherchant des indices pour en trouver une ? grommela Blaise en se frottant le visage. Et pourquoi faudrait encore que ce soit ce sale rat qui comprenne tout avant nous ?! Merde ! C'est pas parce qu'il nous déterre un gribouillis qu'il faut tout de suite en déduire une nouvelle fable ! Y a aucun lien, à part celui que ce mariole veut bien nous donner !
- Si tu cherches encore à être défiguré, continue comme ça, sourit Malfoy en voyant l'écureuil et le corbeau grogner. Et tu oublies le bois : un pantin vivant fait dans une bûche, et un arbre magique dont on a prélevé une partie du tronc… La coïncidence est trop belle. Du Lac a eu un bon flair en nous aiguillant sur cette piste… et en envoyant Ratatosk en mission.
- Harry ? appela timidement Neville en observant son ami fouiller dans le tas de parchemins devant lui. Que fais-tu ?
- J'aurais dû y penser, maugréa Arthur en regardant rapidement chaque papier. Je me disais bien que c'était étrange… Mais il y avait tellement d'autres rapprochements à faire un peu partout… La voilà ! »
Il étala une carte au centre de la table, et pointa une forêt du doigt : le "bois Monstro".
« Elle est là ! déclara-t-il, sûr de lui. Ce nom est une figure importante du conte, c'est forcément ici que nous devons aller ! Il s'agit normalement d'une baleine qui avale l'artisan, mais ce doit encore être une variante métaphorique quelconque. Nous ne sommes plus à ça près.
- L'appellation n'est pas très rassurante, grimaça le blond en déchiffrant le mot. Une "baleine" ? Ce lieu est pourtant loin des côtes… Est-ce le "méchant" de l'histoire ?
- Pas vraiment… Je vous raconterai. En combien de temps pourrions-nous nous y rendre ?
- À cheval, je dirais entre une heure et demi et deux heures, réfléchit Sinbad en mesurant les distances avec son pouce. C'est pas loin, ça peut se faire dans la journée. Mais on peut pas y aller à l'aveugle comme ça : même si la zone de recherches est réduite, le bois est grand. Et puis on sait que sa chaumière est protégée par des sorts. Comment tu veux la trouver ?
- C'est là que l'idée de ton quartier-maître va nous servir, sourit Potter, excité comme une puce. Nous allons l'obliger à se révéler en utilisant un appât… reste encore à savoir lequel. Assez de ces cartes ! déclara-t-il en enfilant sa jaquette qu'il avait posée sur le dossier de sa chaise. Nous avons ce que nous voulons. À présent, il est temps d'aller interroger les habitants.
- Quoi ? hoqueta Zabini. Attends, j'ai pas…
- Nous devons trouver Geppetto, le menuisier, le coupa-t-il avec autorité. Voulez-vous vous joindre à nous ? proposa-t-il à Elsa et Lancelot, surpris.
- Non merci, répondit le blond, se reprenant plus rapidement. Nous avons encore des recherches à faire au château.
- Comme vous voulez. Dépêche-toi, Zabini. »
Harry s'éloigna à grands pas, et sortit de la pièce sans se retourner. Le pirate resta comme deux ronds de flan cinq secondes, avant de se lever précipitamment pour le suivre, attrapant son caban et le plan dans le mouvement.
« Putain ! Tu fais chier, Potter ! » cria-t-il dans le couloir.
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Après deux heures, Belle et Lumière dénichèrent enfin ce qu'ils cherchaient. Le Grand Chambellan n'avait aucun souvenir de l'arbre en particulier, et personne n'avait conscience de sa magie. Aussi loin qu'il se souvienne, l'if avait toujours été là.
Fière de sa trouvaille, Hermione partit à la recherche de ses invités, pendant que le chandelier décida de rejoindre Big Ben. Mais ils ne se trouvaient plus dans le petit salon. Elle prit le chemin de la salle de réception et alla sur le balcon… personne aux abords de l'arbre féerique. En désespoir de cause, elle se dirigea vers la pièce qu'elle affectionnait le plus, dans l'idée d'au moins approfondir ses investigations.
« Neville ? Malfoy ? »
Dans la grande bibliothèque, le blond lisait un ouvrage dans un fauteuil moelleux, et le chevalier feuilletait le sien sur le rebord de la fenêtre. Tout autour, des piles de livres attendaient d'être ouverts.
Ils levèrent les yeux à son arrivée. Draco se contenta de la saluer mollement avant de se replonger dans son grimoire. En revanche, Lancelot se leva et accueillit la jeune brune en souriant. Il l'emmena un peu à l'écart pour lui faire un résumé de toutes leurs découvertes sans déranger la reine.
« Pinocchio ?! s'exclama-t-elle, ébahie. Mais c'est… Alors Geppetto serait un habitant d'Églanteria ? Je ne l'ai pourtant jamais croisé ! Ni même entendu parler de lui !
- Tu ne peux pas connaître tous les citadins de la capitale, la rassura Londubat. C'est une grande ville. Et puis, tu n'es là que depuis peu, et Ron n'a jamais entendu un seul conte de fée moldus… En fait, toi et Harry êtes les seuls à pouvoir les identifier.
- Tout de même… C'est incroyable ! Cela signifie-t-il que la fée serait… la fée bleue ?!
- Qu'a-t-elle de si spécial ?
- Elle est… une étoile. L'"étoile du soir"… En astronomie, il s'agit de la planète Vénus. Dans l'histoire, elle est très gentille, et aide Pinocchio malgré toutes les erreurs qu'il commet. Et s'il se comporte de manière bonne et altruiste, elle promet de le transformer en vrai petit garçon. C'est une morale typique afin que les enfants moldus restent sages : si tu es méchant, tu ne seras qu'un vilain pantin de bois à qui il arrivera bien des malheurs, mais si tu es aimable et serviable, alors tu mérites d'être… "traité en humain".
- Je vois le genre, intervint Draco, en levant le nez de son ouvrage. Cela n'est pas bien différent de ce qui vous arrive. Un mauvais comportement entraîne une apparence inhumaine. Cependant, l'espoir demeure avec une mise à l'épreuve, permettant de retrouver une figure plus ordinaire et une fin heureuse. Que de bons sentiments !
- Beaucoup de contes sont ainsi, confirma Belle en rejoignant Elsa, suivie de Du Lac. Pourtant, je n'aurai jamais fait le rapprochement entre la fée de la Belle et la Bête, et celle de Pinocchio. La première cherche à punir, et l'autre offre un don là où il n'y a rien.
- Mais l'objectif est toujours d'encourager l'abnégation, précisa Lancelot. Comme les principes de chevalerie.
- Il est vrai… De mon côté, Lumière et moi avons trouvé l'origine de l'if. »
Et la brune narra sa découverte.
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Blaise bisquait en suivant son insupportable binôme qui dévalait la Grand Rue d'un pas rapide. Il n'avait pas eu le temps de bien étudier la carte qui les intéressait. Par chance, il avait eu la présence d'esprit de la prendre avec lui, et comptait bien la garder indéfiniment. Parmi toutes les options qu'il avait balancé à Potter, il choisissait la première, la plus simple, la plus digne d'un pirate : le vol.
Le Gryffondor voulut s'arrêter devant une échoppe, mais le flibustier lui agrippa le bras pour l'obliger à poursuivre la route.
« Que fais-tu ? Nous devrons bien nous arrêter quelque part pour commencer à…
- Pas besoin, le coupa Zabini, de mauvaise humeur. Mes pirates ont passé toute la nuit à picoler avec les babioles du coin : ils auront sûrement toutes les infos qu'on veut. »
Arthur ne répliqua pas, et obtempéra. Il était curieux de savoir comment la malédiction avait été perçue par les marins. C'était également un bon moyen pour déterminer à quel point ces hommes pouvaient glaner des renseignements, et ainsi servir d'espions à la solde du "Chat Botté". Même si celui-ci était aux ordres de la Reine d'Avalon, il avait bien l'intention de le recruter pour son propre pays… dans le dos d'Elsa, naturellement.
Un peu de vaisselle jonchait le pavé aux abords du port, et deux ou trois meubles ronflaient bruyamment. Leur fête avait dû se terminer bien tard dans la nuit… ou tôt le matin. Tout était calme. Mouettes et goélands venaient picorer le restant de nourriture de cette soirée arrosée, et deux volatiles n'avaient plus l'air de marcher bien droit. Effectivement, des tonneaux de cervoises, bières et hydromel étaient grands ouverts, l'un d'eux renversé.
« Wow… siffla Blaise. J'aurais dû rester. Ça a dû être mémorable !
- Les citadins ont passé ces deux derniers mois sans voir personne, contraints de se cacher dès qu'un étranger apparaissait. Ils ont dû évacuer toute leur frustration cette nuit.
- On s'en fout. J'espère que Hindbad a prévu le coup et a obligé un ou deux matelots à garder la tête claire pour monter la garde. J'aime pas savoir mon bâtiment sans surveillance ! »
Sinbad se précipita sur le pont de son navire, à la recherche de son quartier-maître. Harry le suivit sans se presser. Il sourit tranquillement en imaginant la scène qui avait dû se dérouler cette nuit : apparemment, une fois la malédiction comprise et acceptée, pirates et citoyens s'étaient entendus comme larron en foire.
Cela lui confirmait la possibilité de faire officiellement de Rosa un pays d'objets animés. Ron ne devait plus cacher la réalité, la survie de son Royaume en dépendait. Le commerce à l'international devait reprendre, de même que les visites diplomatiques, les passages, et surtout le tourisme ! Car le monde entier voudrait voir cette magie de ses propres yeux ! Ce simple fait pouvait remplir les porte-monnaie de manière plutôt conséquente. Il y avait un va-tout à jouer, et le Roi Adam passait à côté… par honte.
Parce qu'il ne s'agissait que de cela. Ses gens désiraient probablement retrouver leurs véritables apparences, cependant aucun n'avait protesté ou monté de rébellion. Au contraire, ils obéissaient toujours à leur monarque et croyaient en lui. Ce qui était le signe d'une confiance aveugle et qu'il était un bon souverain aimé de la population. Les réticences de son ami ne provenaient que de sa fierté bafouée, de son propre physique de bête, et du déshonneur qu'il avait fait subir à son peuple à cause… d'un simple coup de sang. Comme la Reine Elsa, en somme.
Mis au pied du mur, ils n'avaient pas supporté la "goutte de trop" et avaient perdu leurs moyens. Autant l'un que l'autre. Les deux ne s'aimaient pas, et se ressemblaient pourtant plus qu'ils le soupçonnaient… Ces têtes de mule allaient être difficiles à réconcilier.
« Hindy ! hurla la voix de Blaise à l'intérieur du navire, vers l'endroit où se trouvait la cuisine. C'est quoi ce bordel ?! Qu'est-ce que t'as foutu ?! Y a personne de quart !
- Gueule pas comme un putois ! rétorqua un grognement rauque. J't'en foutrais, des quarts ! T'as peur de quoi ? Qu'des glingues et agobilles viennent chiper l'bateau ?! J'mâche d'la sciure sucrée et poivrée, et y vient m'brailler dans les esgourdes !
- Il y a pas que des gentilles breloques qui trainent dans le coin ! Je te rappelle qu'on cherche une bougresse de fée ! Elle sait peut-être déjà qu'on est là, et si elle veut nous mettre des bâtons dans les roues, tu lui tends une putain de perche !
- L'a pas b'soin d'ça, la belle ! On f'rait quoi, contre c'te gueuse ? Que dalle ! Voilà c'qu'on f'rait ! Et pis j'ai prévu si y a un malandrin qui traine. Amin a pas bu. L'est trop petiot, j'lui ai pas permis.
- Et il est où ?!
- J'suis là ! »
Harry se retourna en entendant la voix du mousse derrière lui. L'enfant sauta depuis les gréements, un bilboquet dans une main et une poupée de chiffon sur l'épaule, et courut vers l'habitacle. Plus haut, un ensemble d'arrosoir, hochet, tasse, ou cubes à empiler observaient depuis la vigie. Visiblement, le benjamin des pirates s'était créé une bande d'amis.
Le roi les rejoignit dans la cuisine. Trois pirates dormaient à poings fermés, au sol ou affalés sur des chaises. Le vieux quartier-maître avait le teint cireux, une tasse de café fumant dans la main, et un regard noir braqué sur son jeunot de capitaine. L'adolescent aux cheveux carotte déposa les deux jouets sur la table, où la demoiselle en tissu alla se trouver un verre renversé pour s'asseoir, et le jeu d'adresse vint se placer près d'elle. Avisant la bouilloire sur le feu, Arthur décida de servir un peu de caféine pour tout le monde.
« J'gaffe pour arçonner au b'soin, chef, rassura le rouquin. Y a gnient et bigore.
- C'est bien, petit, le félicita Blaise en lui frottant le crâne. T'es le seul qui tient la route, ici. Pas comme cette bande de soiffards bons à jeter aux ordures !
- J'te rebave comment t'as fini à Bagdad ?! T'avais tellement d'vent dans les voiles qu'j'ai dû t'ramasser dans l'caniveau, l'arsouille ! Alors viens pas faire l'malin !
- Le bâtiment était gardé, cette nuit-là ! Et… !
- Et l'est aussi ce jour ! Le p'tit 'Min fait du bon taf, m'emboucane pas ! T'fais l'louftingue ! Zyeute donc ! T'laisses un du Gotha nous charger ! s'énerva-t-il en montrant Harry remplir les tasses. T'peux être confus comme un r'nard qu'une poule aurait pris !
- C'est bon ! ragea Zabini en prenant la carafe des mains de Potter pour servir à sa place. Décuve donc, le branquignol ! J'espère au moins que t'as chopé des infos croustillantes à nous mettre sous la dent, pendant que tu buvais comme un trou !
- Tu m'prends pour un bleu ? Évidemment, chameau ! Mais pas sûr qu'ça t'tire l'œil. Y sont tous engantés pour leur roi qu'est en odeur d'sainteté. Et si c'était cotelard au début d'être dev'nu barda et bastringues, y s'sont amarinés en double et voient l'bon côté. Y en a même qui en profitent et prévoient des niches au prochain métèque qui point'ra sa truffe.
- Vous parlez de Truffandec ? questionna le bilboquet en s'approchant par petits sauts. Il est zamais à court d'idées ! On l'aime bien, y fait touzours le zouave.
- Et auriez-vous entendu parler d'un certain Pinocchio ? demanda Arthur en s'asseyant sur un siège pour déguster son café.
- Le garçon de Monsieur Geppetto ? s'enquit la poupée en dévisageant le roi, inconscient de son statut. Il est bizarre… Avant la malédiction, il était déjà un jouet. Maman m'a dit d'être gentille avec lui, mais je l'aime pas.
- Ah bon ? Pourquoi ça ?
- Il est méchant… Lui et Lucignolo se moquent de moi et ils me tirent les cheveux !
- Z'est pas comme Truffandec, renchérit le jeu d'adresse. Z'est pas des blagues zentilles. Une fois, ze les ai vu zeter des cailloux zur des canards !
- Des petits merdeux, donc, conclut Blaise. Mais si ce Pinocchio était déjà un pantin de bois ambulant, comment a agi le sortilège sur lui ?
- On sait pas, répondit la marionnette en chiffon. On l'a pas revu depuis la fête de "Belle Amour". Le matin, je les ai vus tous les deux se chuchoter à l'oreille. Depuis, pas de nouvelle. Moi, je suis bien contente ! Ils viennent plus m'embêter ! Mais Monsieur Geppetto, il est tout triste… Les gens lui amènent à manger de temps en temps pour le consoler.
- Et l'autre marmot ? Luci-machin. Tout le monde s'en fout de lui ?
- Il a pas de parent. Ni de frère ou de sœur. Il vit à l'orphelinat de la Roseraie, au Sud de la ville. Là-bas, ils s'inquiètent aussi, mais ils ont pas le temps de le chercher. Il y a beaucoup d'autres enfants. Et des plus gentils.
- Où se situe la boutique de ce Monsieur Geppetto ? interrogea Potter.
- Dans la rue de l'Épine Dorée, répondit le bilboquet. Z'est la rue des artizans. Mais y travaille pu. L'est trop çagrin pour za.
- Vous v'lez fouinarder l'fiston du vieux, chef ? s'étonna Amin.
- Ça sent pas bon, grommela Hindbad en fusillant son capitaine des yeux. Une bûche qui gigote toute seule sans malédiction, ça pue la magie noire… C'est un aut'e coup d'la carabosse ?
- Tout juste, sourit Sinbad avant de finir sa tasse cul sec. On a du pain sur la planche, Sire. Allons-y. »
Harry s'assombrit, le regard perdu dans le vague, et hocha la tête. Il l'imita en terminant sa boisson d'une traite, et reposa son récipient en se levant. Puis, ils saluèrent pirates et enfants, promettant de revenir promptement leur donner des nouvelles.
Le second continua à fixer intensément le commandant qui s'esquiva pour fuir son œil mauvais, conscient qu'il cherchait encore à le mettre en garde contre la magie. Blaise ne voulait pas entendre ses remontrances une seconde fois : il connaissait les risques, et n'était pas plus enthousiaste que le vieux briscard… Mais il n'avait pas le choix. Il avait promis de protéger le Roi Arthur et la Reine Elsa, et commençait à mesurer le poids de son pacte… « Bordel ! Je veux pas la voir cette putain de fée ! »
« Tu m'expliques pourquoi la fée récupère sa connerie de bois si l'arlequin est déjà fabriqué ? cracha-t-il de retour sur les quais, loin des oreilles indiscrètes.
- C'est justement la question que je me posais… »
Le métis vitupéra en grommelant des borborygmes incompréhensibles, quelques insultes transparaissant dans son marmonnement. Son quartier-maître avait raison : ça puait !
Ils n'eurent pas à chercher longtemps avant de trouver l'échoppe du menuisier : une jolie petite entrée en bois sculpté de rosiers, parfaite vitrine du talent proposé en ce lieu, au milieu d'un large mur décrépi sans fenêtre. Sans surprise, un gros panneau "fermé" était placardé sur la porte, et Harry toqua sans conviction…
« C'est fermé ! » gronda une voix à l'intérieur.
Les deux visiteurs échangèrent un regard surpris, une étincelle d'espoir dans les pupilles : l'homme était bien présent, et s'il répondait, c'était que son affliction ne l'avait pas encore poussé à s'isoler totalement du reste du monde. Arthur décida de ne pas y aller par quatre chemins, et d'offrir à ce père accablé la seule chose qu'il désirait.
« Nous venons vous aider à retrouver votre fils, Pinocchio ! »
Un grand fracas retentit, comme si dans la précipitation, l'artisan renversait son atelier entier et se prenait les pieds dans tous ses outils. Et deux secondes après, le battant s'ouvrit à la volée sur… un pantin de bois "adulte" ?
« Pinocchio ?! Vous savez où il se trouve ? Il va bien ? Que lui est-il arrivé ?! Pourquoi est-il parti ?!
- Calmez-vous, monsieur, temporisa le Gryffondor. Nous ne pouvons pas répondre à vos questions pour le moment, nous souhaitons simplement vous parler.
- Me parler ? s'assombrit la marionnette, entre la colère et la déception. Si vous ne pouvez rien m'apprendre sur mon fils, je n'ai rien à vous dire !
- S'il-vous-plaît, monsieur… Nous…
- Vous êtes les étrangers arrivés hier, n'est-ce pas ? Ça vous amuse de voir des meubles et des objets bouger, pas vrai ? Je ne sais pas pourquoi notre bon roi a accepté de vous recevoir, mais je ne vous laisserais pas vous divertir de mon malheur ! Retournez au château et laissez-moi en paix ! »
La porte allait claquer sur leurs nez, quand Sinbad planta in extremis son pied dans l'ouverture.
« Hey, le vieux ! T'es sourd ? On t'a dit qu'on vient t'aider à retrouver ton gamin fugueur ! Si c'est comme ça que t'accueilles les bons samaritains, pas étonnant qu'il soit toujours dans la nature ! Alors tu vas gentiment nous laisser entrer et nous déballer toute ton histoire ! Vu ?
- Qui êtes-vous ?! suffoqua l'homme qui aurait eu le visage empourpré par la rage s'il était fait de chair et de sang. Pourquoi ça vous intéresse ?! Je n'ai pas de quoi vous payer !
- Nous ne demandons rien, tenta Harry. Nous voulons seulement…
- On t'a pas dit ? coupa le pirate en souriant de toutes ses dents. Lui, c'est le Roi Arthur. Si son nom te dit quelque chose, tu sais qu'il accourt dès qu'il entend parler d'un miséreux dans le besoin. De mon point de vue, c'est pathétique. Mais ça arrange bien tes affaires, toi, pas vrai ? »
Le visage sculpté prit un air ébahi et ouvrit de nombreuses fois le trou qui lui servait de bouche avant de s'incliner si maladroitement qu'il manqua de se cogner la tête contre le chambranle. Il semblait indécis, et se demandait probablement si ces importuns ne se moquaient pas de lui en le prenant pour un vieillard prêt à croire n'importe quoi. Cependant, dans le doute, il ne voulait pas froisser une majesté. Et après de longues secondes d'hésitation, il écarta la porte pour les laisser passer.
Le Gryffondor jeta un regard courroucé au flibustier goguenard. Il n'avait pas voulu embarrasser l'homme en dévoilant son identité. Tant pis… « Quand le vin est tiré, il faut le boire », se dit-il. Il se résigna et lui emboîta le pas.
L'atelier était un chaos de bric-à-brac poussiéreux, rempli de copeaux et de sciure de bois. Trois fenêtres contre le mur opposé donnaient sur un joli petit jardin, et apportaient la lumière nécessaire à son art. Cà et là, des ouvrages plus ou moins achevés reposaient sur les étagères, ou étaient entreposés dans un coin depuis un bon moment, comme en témoignait la couche de particules qui s'était déposée sur eux. Seule une sphère presque ronde demeurait bien propre sur l'établi, pourtant encore trop grossière pour pouvoir reconnaître l'objet en cours d'élaboration.
Geppetto alla justement vers elle et caressa distraitement sa surface en leur proposant un thé. Puis, il se dirigea de l'autre côté d'une arche, hors de leur vue. Peut-être la cuisine ? Il leur cria de s'asseoir, mais ni l'un ni l'autre ne virent de fauteuil ou de chaise… Alors Blaise posa les fesses directement sur la table, et Harry préféra rester poliment debout, afin de laisser l'unique tabouret à leur hôte.
« C'est quoi ce truc ? questionna Zabini dès que le pantin de bois revint avec un plateau, pointant l'œuvre inachevée à côté de lui.
- C'est pour Pinocchio… répondit tristement le menuisier en éloignant l'ébauche du pirate pour le mettre hors d'atteinte. Mais depuis qu'il est parti… Je…
- Et si vous nous racontiez tout depuis le début ? proposa Potter en prenant le thé que lui tendait l'homme. Comment en êtes-vous venu à fabriquer cette marionnette ?
- Ça remonte à si loin… soupira-t-il en s'asseyant sur le tabouret, l'air fatigué. J'ai toujours voulu avoir un enfant. Mais ma femme est morte jeune d'une fausse couche, et je l'aimais tellement que je n'ai pas voulu me remarier. Les années ont passé, et mon seul regret est de ne jamais avoir pu être père. Et puis un jour, il y a… deux ans, je crois… une vieille dame a frappé à ma porte et m'a commandé un pantin taille réel. "Pas plus grand qu'un bambin de six ans" m'a-t-elle dit. Elle m'a fourni le bois, en exigeant qu'il soit fait dans celui-ci, et m'a donné une étrange rose bleue… Je n'avais jamais vu une fleur de cette couleur : elle était intense et scintillante. Elle a demandé qu'à la fin du travail, je mette cette plante à l'intérieur de ma création, à l'endroit du cœur. C'était une requête singulière, mais elle m'a grassement payé en avance, je me voyais mal refuser. Alors je me suis mis à la tâche.
« Ça a duré longtemps. À l'époque, je ne savais pas pourquoi cette commande m'obnubilait. J'en rêvais la nuit et je me réveillais parfois pour continuer. J'étais incapable de me rendormir. Il y a eu de nombreux essais, des ratés ou des brouillons grossiers que je précisais au fur et à mesure. Je n'avais jamais autant produit d'ébauches avant d'attaquer le projet final, et tous mes autres ouvrages avaient été mis en pause, tellement j'étais concentré sur celui-là.
« Et puis, le moment venu, j'ai enfin utilisé le bois de la vieille dame et commencé le vrai fantoche. Je m'en souviens comme si c'était hier… Mon cœur battait si fort ! Chacun de mes gestes était étudié et millimétré. J'y mettais tout mon amour. Mais j'avais vu trop grand, et la matière première a fini par me manquer. Le corps était terminé, il ne manquait plus que la tête ! Je ne savais pas comment contacter cette dame : je ne l'avais jamais vue auparavant, et elle n'était pas repassée depuis… Je ne suis pas assez riche pour me procurer une essence devenue aussi rare que celle qu'elle m'a confiée. Alors, j'ai pris la liberté de tailler dans un morceau d'érable prévu pour une autre commande…
- Quelle était la matière fournie par la vieille femme ? s'enquit Arthur.
- De l'if. Un très bon bois pour la sculpture, mais plutôt difficile à trouver tant il est demandé. Et pour le visage, je ne voulais pas utiliser du piètre et du commun. Et dès que j'ai posé la rose brillante et refermé le boîtier, ma création s'est animée ! J'ai d'abord paniqué, et puis… Elle a parlé. Elle m'a dit "papa"... J'ai pleuré de joie.
« Le temps passait et je redoutais le jour où ma cliente allait venir réclamer son dû. Chaque jour, je jouais avec mon petit Pinocchio. Je l'avais nommé dès les premières heures. C'était le nom de l'enfant que nous aurions dû avoir, ma défunte femme et moi. Je lui apprenais à lire et à écrire, lui montrais mon métier, réparais ses petits bobos quand il se taillait la main avec un de mes outils, ou se brûlait le bras en découvrant le feu dans la cheminée. Mais l'acheteuse n'est jamais revenue…
« Alors, après trois mois d'attente où j'interdisais à Pinocchio de sortir, de peur de croiser la vieille dame, j'ai fini par l'amener au marché avec moi. Tout le monde était abasourdi ! J'ai raconté mon histoire à tous les passants qui me posaient des questions, j'ai laissé mon petit garçon s'amuser avec d'autres jeunes de son âge… ou du moins, de ce qui devait être son âge.
« Et j'ai alors appris l'impensable : la femme était une habituée, en ville. Elle passait toutes les semaines chez la fleuriste pour lui acheter des roses "Belle Amour". Et justement, elle lui avait raconté comment elle avait rendu un homme heureux en lui offrant le fils qu'il avait toujours rêvé avoir. À ce moment-là, mon amie ne l'avait pas cru : sa cliente était bien trop âgée pour enfanter. Mais après mon récit, nous avons tous deux compris qu'elle parlait de moi ! J'ai encore pleuré de bonheur de savoir que Pinocchio ne me serait jamais enlevé. C'était certain : cette noble dame était une magicienne déguisée ! Ma chère fleuriste et moi en étions persuadés !
« Ce jour-là, nous avons passé tout l'après-midi dehors, à flâner dans les rues ou à s'amuser d'un rien, comme seuls les enfants le peuvent. Toute la semaine, je l'emmenais partout avec moi, et lui montrais tous les endroits que je connaissais… Je ne voulais pas qu'il se perde, si jamais il quittait mon champ de vision. Toute la ville a fini par apprendre son existence, et tous se montrèrent curieux. Savoir qu'il était connu me rassurait : s'il ne retrouvait plus son chemin, une bonne âme finirait par lui indiquer la bonne direction.
- Vous avez plus revu la vieille ? demanda Blaise.
- Jamais. Mais mon amie fleuriste l'a recroisé et lui a parlé de nous. La dame s'est montrée satisfaite, et a révélé sous cape qu'elle était la fée de l'étoile du soir. Une fée ! Vous rendez-vous compte ?! Elle a dit avoir simplement voulu récompenser ma gentillesse et mon dur labeur. Il est vrai que j'aide toujours mes concitoyens quand je le peux, sans demander rémunération. Ils ne me donnent que ce qu'ils peuvent, et cela me convient. C'est aussi pour cela que je suis si pauvre en or… mais si riche en amitié. Si j'ai besoin d'aide, je sais que je peux compter sur mes voisins.
- Déplorable… soupira le flibustier en levant les yeux au plafond.
- Tout le monde n'est pas pirate, comme toi, sourit Arthur. Continuez, monsieur. Que s'est-il passé ensuite ?
- Ensuite ? Et bien… J'ai dû inscrire Pinocchio à l'école.
- Hein ? s'étonna Sinbad. Pour quoi faire ?
- C'est mon ami le libraire qui me l'a conseillé. Et il avait raison : l'apprentissage que je pouvais lui fournir était limité, et si je voulais que Pinocchio ait toutes ses chances dans la vie, il devait être instruit par des professionnels, sur de nombreux sujets, dont certains que je ne connais probablement pas. En tant que marionnette de bois, il partait déjà dans la vie avec un sacré handicap. Je voulais que toutes les portes s'ouvrent pour lui… Alors je l'ai présenté à l'institutrice qui l'a tout de suite adoré. C'est qu'il est malin mon petit Pinocchio, il a parfaitement su comment la charmer avec sa candeur.
- Cela ne s'est pas passé comme prévu, n'est-ce pas ? fit Harry d'un air contrit.
- Pas vraiment… C'est là-bas qu'il a rencontré ce morveux de Lucignolo. Bien sûr, je plains ce gamin qui a été abandonné par ses parents avant même son premier anniversaire. Mais c'est un petit filou ! De la mauvaise graine, voilà ce que c'est ! Pinocchio n'a rien voulu entendre. Et il s'est mis à faire des bêtises. Du vol à l'étalage, de mauvaises farces… J'avais beau le punir, rien ne parvenait à lui faire entendre raison. Je ne savais plus quoi faire…
« Et puis, il y a un peu plus de deux mois, le jour de la grande fête de "Belle Amour", la vieille dame a de nouveau toqué à ma porte. La fleuriste lui avait parlé de mes déboires, et elle m'a expliqué que mon malheur venait de l'essence que j'avais choisie pour sculpter la tête. Elle m'a longuement gourmandé pour mon erreur. Heureusement, elle s'était procuré un peu d'if pour corriger cette bêtise, et m'a promis que tout rentrerait dans l'ordre une fois que mon fils porterait son nouveau visage.
- Et le jour même, il a fugué avec son pote, et il y a eu la malédiction, termina Blaise.
- Oui… Je ne sais même pas où chercher. Personne ne les a vu s'enfuir durant les festivités. Il y avait foule, et il était facile de passer inaperçu… Je n'ai plus le cœur à travailler. Tous les matins, je me lève en espérant le trouver dans la cuisine, à attendre que je prenne mon café pour discuter. Dès que j'entends un bruit, j'accours en pensant que c'est lui qui revient… Quelle ironie qu'il ne soit plus là juste au moment où je suis devenu comme lui : un pantin de bois.
- Nous allons le retrouver, affirma Arthur en reposant sa tasse vide. Le mieux que vous ayez à faire serait de lui terminer cette tête avant son retour. Ainsi, vous pourrez l'en coiffer dès que vous le verrez, et tout redeviendra comme avant.
- Vous… Vous en êtes sûr ? murmura Geppetto, les yeux brillants. Vous en êtes certains ? Vous me le ramènerez ?
- Je vous le promets.
- Oh merci ! Merci ! »
L'artisan fondit en larmes. Il fût sur le point de se mettre à genoux devant le roi quand celui-ci l'en empêcha en lui prenant les épaules pour le maintenir sur le tabouret. Blaise roula des yeux, écoeuré par toute cette niaiserie et ces bons sentiments… Même si le vieillard l'avait peut-être un peu ému… un tout petit peu.
Après ces effusions, et une fois le menuisier remis de son émoi, ils quittèrent l'échoppe pour regagner le château. Le père éploré les observa depuis le seuil de sa porte, l'œil encore humide, et ne rentra pas tant qu'ils n'eurent pas tourné au coin de la rue.
« T'es vraiment un putain de crétin de Gryffondor ! s'emporta Zabini dès qu'ils furent hors de vue. T'as conscience qu'on a aucune idée de l'endroit où se trouve ce… boui-boui ! Et toi tu fais des promesses ?! On est censé chercher la fée pour Draco ! Pas retrouver tous les fugueurs du coin !
- Je ne partirai pas tant que je n'aurais pas ramené Pinocchio à Geppetto.
- Que… ! T'es… ! Fais chier ! »
Le pirate accéléra le pas, fulminant sous le rire d'Arthur.
[===]
Miss Samovar avait fait préparer un grand panier-repas pour cinq personnes. Belle l'avait prévenue qu'elle et leurs invités s'apprêtaient à faire une… "escapade" dès que possible, et ne reviendraient que le soir. Ils déjeuneraient donc à l'extérieur ce midi.
Fière de son initiative et des encas froids qui les attendraient au moment de partir, Hermione revint dans la bibliothèque où Neville et Malfoy poursuivaient leur lecture pour approfondir le sujet… ou pas.
« Je te dis que le noisetier aurait été une meilleure idée ! protesta Draco en tapant l'index sur le guéridon. "Sagesse" et "enseignement" ! Cela aurait évité toutes les bêtises de ce mannequin de bois !
- Mais symboliquement, le sapin fonctionne mieux ! rouspéta Londubat en croisant les bras. "Le lien entre esprit et matière" ! "L'espoir de la lumière contre les ténèbres", "la vie sur la mort" !
- Tu parles ! Encore une merveilleuse idée de Gryffondors ! Le problème n'aurait pas été réglé ! Tiens, Potter ! Tu tombes bien ! »
La brune pivota pour voir son ami entrer derrière elle, en compagnie de Zabini. Tous deux regardaient la scène avec de grands yeux étonnés.
« Entre le noisetier et un sapin, lequel préfères-tu ?
- Euh… le noisetier ?
- Tu vois ! s'exclama la reine en se retournant vers Lancelot d'un air victorieux. Même ton roi est d'accord avec moi ! Il remonte dans mon estime.
- Tu ne lui as même pas expliqué de quoi il s'agissait ! s'offusqua le chevalier. En plus, tu as insisté sur le premier pour augmenter tes chances !
- Mauvais perdant.
- Tricheur ! Déjà gamine, tu étais comme ça ! Pendant nos batailles de boules de neige, tu utilisais tes pouvoirs pour m'en envoyer plus !
- Je ne vois pas de quoi tu parles. »
Hermione aurait tant aimé que Ron soit présent pour voir ce spectacle. Neville et Malfoy se chamaillant pour… des broutilles. Ils semblaient… intimes. Comme s'ils se connaissaient depuis de très longues années. Ce qui était le cas, d'une certaine manière. Mais pas ainsi.
Soudain, Harry se racla la gorge, et alla s'installer avec eux pour les questionner sur le sujet de leur discorde. La jeune femme l'observa. Quelque chose dans son comportement ou son expression l'intriguait. Elle plissa les yeux, et remarqua finalement les discrètes tentatives de son ami pour accaparer l'attention du blond. Il le regardait plus souvent que Neville, le corps légèrement tourné vers le blond, le genou près du sien. Ou trouvait le moyen de l'effleurer ou d'agiter les bras dès que les yeux d'argent n'étaient plus sur lui. Tout cela en moins d'une minute ! Elle retint un rire. Vraiment ? Il était jaloux ?
« Ça s'amuse bien, on dirait, grommela Zabini en se plaçant à côté d'elle. Vous avez bossé un peu, au moins ?
- Naturellement ! Et nous sommes prêts pour partir vers le Bois Monstro. J'ai même prévu de quoi se sustenter sur la route.
- "Nous" ? Tu nous accompagnes ?
- Cela me semblait évident. Harry n'est jamais parti à l'aventure sans moi.
- Et "Weasel", compléta le métis. Il vient avec nous, lui aussi ? »
Elle se renfrogna, piquée. Il avait mis le doigt sur ce qui la chagrinait le plus : l'absence de Ron dans leur enquête. Leur invincible trio était encore une fois éclaté, ce qui ternissait ce retour aux sources qui l'excitait tant…
« Vous l'avez pas revu depuis ce matin, pas vrai ? Dommage pour lui ! ajouta-t-il d'un ton désinvolte en s'étirant. Il loupe un sacré truc ! Sérieux : si tu veux tester un autre mec en attendant que le tien se rappelle qu'il a une femme merveilleuse, fais-moi signe. Allez, ramène-toi, on a chopé des tas d'infos ! »
Blaise rejoignit le groupe, mettant fin au débat, et Hermione se mordit les lèvres. Les avances du pirate étaient peu subtiles, voire même vulgaires, mais faisaient un bien fou à son orgueil blessé de femme. Elle n'aimait pas cela, et se devait pourtant de reconnaître qu'elle était… "flattée".
Que Ron soit transformé en bête ne la dérangeait pas. À part pour les activités… "physiques et intimes" d'un couple, où il s'agissait d'un vrai problème. Cependant, la question ne se posait même pas puisque son mari ne la regardait plus. Avec lui, elle était devenue une indésirable : jamais écoutée, toujours grondée, à marcher sur des œufs pour l'approcher sans l'énerver, à réfléchir longuement à ses paroles pour ne pas l'offenser… Il la faisait se sentir comme la prisonnière qu'elle était dans ce monde. Pas sa femme dans la réalité.
Depuis l'arrivée de ce groupe hétérogène entre lions et serpents qui s'entendaient bien mieux que dans ses rêves les plus fous, elle se sentait revivre. Non seulement elle voyait tout ce en quoi elle avait cru se concrétiser sous ses yeux : l'entraide et les liens se souder entre anciens ennemis, exactement ce qu'avait souhaité le Ministre de la Magie. Mais en plus, elle pouvait enfin se rendre utile, agir et être estimée ! Elle n'était plus l'invitée maladroite qui prenait trop de place, mais une alliée de poids dans une quête. L'objectif de tout ceci était encore un peu flou, mais elle ne doutait pas de son importance capitale.
Et puis, un séduisant pirate lui faisait du "rentre dedans", alliant remarques sans équivoque et regards explicites. Ce qui aurait pu la scandaliser. Pourtant, elle n'avait pas l'impression d'être un simple morceau de viande avec lui : il continuait à la traiter avec égards, et lui parlait d'égal à égale. De plus, Zabini était un très bel homme ! Dans d'autres circonstances, elle se serait probablement laissée tenter. Son franc-parler était rafraîchissant. Et même grossiers, ses compliments n'en étaient que plus efficaces. Elle savait qu'elle était belle dans ce monde, mais dans les yeux du beau métis, elle le sentait vraiment. Elle avait de nouveau l'impression d'être une femme qu'un homme pourrait aimer.
« Hermione ? appela Harry. Tu viens ? »
Elle se secoua et sourit. Oui, elle faisait à nouveau partie d'un groupe. Elle avait encore des péripéties à vivre et des vies à sauver. Ces années à aider son ami à lutter contre Voldemort lui manquaient plus qu'elle voulait bien l'admettre. Et si elle pouvait revivre le frisson de l'aventure durant quelques mois, juste une dernière fois, elle ne laisserait pas passer sa chance ! Tant pis pour Ron !
[===]
« De l'érable… soupira Draco en se massant la tempe. Quel idiot ! Il n'aurait pas pu trouver pire. D'après nos recherches, ce bois répand le besoin d'indépendance et de liberté. Et pour faire la tête, en plus.
- Il y a des propriétés magiques dans la matière, du coup ? demanda Blaise en se penchant vers le blond.
- Seulement certaines. De ce que nous avons compris, l'arbre doit être ancien et emprunt de magie féerique pour véhiculer sa puissance, même coupé. Mais une fois transmise, elle peut éveiller la nature d'une autre essence : comme l'érable dont s'est servi Geppetto. D'où ses malheurs…
- C'est donc pour cela que la fée ne pouvait pas s'approvisionner sur un autre if… réfléchit Harry. Ces conditions ne doivent pas être souvent réunies… Et que transmet ce végétal ?
- "L'éternité" et le "cycle de la vie", répondit Neville. "L'acceptation de ce qui est et doit être", comme la mort. Nous pensons que la fée a cherché à favoriser un caractère docile pour le pantin, tout en lui permettant de grandir et d'évoluer malgré sa nature… et bien de "bois mort". Un cycle de vie, c'est naître, devenir adulte, et mourir… Comme un réel humain.
- Un "vrai petit garçon", renchérit Hermione. Mais si Geppetto a utilisé un autre bois, il est possible que l'effet voulu ait été altéré. J'étais à des lieues d'imaginer que Pinocchio avait déjà été créé ! Et pourtant, l'erreur de l'artisan explique le prélèvement d'il y a deux mois… Mieux encore : en apprenant cette bévue, elle a été contrainte de retourner prendre un peu d'if dans notre parc. Peut-être même voulait-elle s'assurer que tout se déroulerait selon ses plans, cette fois-ci ? Ce qui l'a amené à toquer à la porte du château…
- Mais pourquoi ? interrogea Draco. À quoi s'attendait-elle ? Si une inconnue venait se présenter devant mon palais pour le gîte et le couvert, tous mes gardes la refouleraient en lui riant au nez ! Ose me dire le contraire, Arthur !
- Je suis forcé de le reconnaître, grimaça Potter. Ce n'est pas l'image ou le message que je souhaite transmettre, pourtant je ne pourrais pas me permettre de recueillir toutes les âmes cherchant refuge. Si un jour nous recevons un manant au château, il faut nous attendre à voir une foule se présenter à nos portes dès le lendemain. Malgré toute la générosité du monde, ce n'est pas gérable. N'importe quel monarque aurait agi comme le Roi Adam… les moqueries en moins, j'imagine. C'est peut-être cela, le souci ?
- Allô ?! On s'égare ! rappela Blaise en claquant des doigts devant tout le monde, comme pour les réveiller. L'if ! Qui l'a planté ?! Qu'est-ce qu'il fout là, alors que personne sait qu'il est magique ?!
- Cela, c'est ma partie, s'enorgueillit Belle en se redressant. Après maintes recherches, Lumière et moi avons fini par trouver le premier document attestant de la présence de cet arbre dans les jardins : un simple compte-rendu d'entretien des paysagistes engagés par le roi de cette époque. Aucun écrit ne renseigne sur sa plantation ! Et pourtant, nous avons ces informations pour chaque rosier ou bosquet du parc… Mais pas cet if !
- Alors quoi ? s'impatienta le pirate. Il est sorti de nulle part ?
- Exactement. Même si un jardinier avait voulu introduire cet if de son propre chef, le souverain aurait dû ratifier cette démarche sur un papier, sous peine de le détruire. Depuis des temps immémoriaux, tout ce qui touche à la végétation est d'une importance capitale pour Rosa, inutile de vous en expliquer la raison puisque ce Royaume ne prospère que grâce à la culture des fleurs. Alors le parc royal se doit d'être une vitrine de la nation, et les espèces qui s'y trouvent sont savamment sélectionnées. Pourtant, l'état des lieux précédent témoignait d'une zone herbeuse simple. Deux jours plus tard, les botanistes parlaient d'un jeune arbre ! Et le monarque, loin de s'en étonner, a choisi de faire comme si de rien n'était. Il a laissé cette pousse telle quelle, sans prendre la peine d'expliquer sa présence ou même de l'officialiser… Ce qui est hautement improbable !
- Si c'est une "vitrine" du pays, "Weasel" a géré en laissant ses jardins à l'abandon, fit remarquer Sinbad dans un rire moqueur.
- Ce n'est pas le sujet, intervint Draco en levant la main pour arrêter Hermione qui s'apprêtait à répliquer. L'if est un arbre à croissance très lente, et tu as mentionné "une pousse"... À quand remonte l'écrit que vous avez découvert ?
- J'allais y venir, fit la jeune femme en jetant un regard mauvais au pirate. La date coïncide avec la création de la rose "Belle Amour", il y a mille ans. »
Un long silence répondit à cette information. Aucun d'entre eux n'avait besoin de se concerter pour comprendre le lien évident entre la plantation d'un if féerique et l'apparition miraculeuse de la rose à l'origine même du nom du Royaume : la fée, encore et toujours.
« Ça vit si longtemps que ça, ces bestioles ? demanda le métis, le teint cireux.
- Elle est une étoile, répondit le blond en insistant bien sur le dernier mot. Autant te dire que sa longévité est proche de l'immortalité. Mille ans ne représente rien pour elle, à peine quelques heures pour des mortels comme nous. Je ne sais même pas qui, entre Titania et elle, est la plus ancienne…
- Bordel… souffla Blaise en fixant Potter, yeux écarquillés. T'as couché avec un dinosaure !
- Peu importe ! s'écria subitement Harry, les joues d'un intense rose incarnat en voyant son amie brune froncer les sourcils. Il nous reste un seul détail à régler : l'appât. Comment allons-nous faire sortir cette fée bleue de sa tanière ? »
Nouveau silence…
« J'ai peut-être une idée, fit timidement Hermione au bout de plusieurs secondes. Mais j'ai bien peur que cela ne vous plaise pas beaucoup…
- Oh, et bien dans ce cas, on veut pas savoir, minauda Zabini d'une voix niaise, avant de devenir agressif. Accouche, Granger ! Balance ton coup de génie, qu'on puisse enfin se mettre en route ! J'en ai ras-le-cul de papoter, là !
- Surveille ton langage, pirate ! gronda Neville d'un air menaçant.
- Il s'agit d'une simple supposition, ajouta la jeune femme, comme pour s'excuser. Nous ne sommes pas obligés de… Enfin, si vous avez une autre suggestion, alors… C'est juste que… Étant une créature féerique, j'ai pensé qu'elle serait intriguée de sentir une magie similaire à la sienne… »
Quelques secondes passèrent, pendant lesquelles chacun enregistra la proposition et ses conséquences.
« Hors de question ! trancha très vite Arthur, le regard dur.
- Si tu crois que je vais vous laisser utiliser mon pote pour affriander un fossile capable de transformer tout un pays en objets, tu te fourres le doigt dans l'œil jusqu'au coude ! Personne ne touche à mon petit prince ! Vu ?!
- Cela ne me plait pas non plus, renchérit Lancelot. Nous ne pouvons pas nous permettre de faire courir le moindre risque à la Reine d'Avalon ! Pas alors que…
- Avez-vous une meilleure idée ? coupa Draco d'une voix forte pour couvrir leurs protestations. Vous vous drapez dans votre dignité mal placée sans prendre la peine d'y réfléchir sérieusement ! Nous avons déjà convenu que nous ne pouvons pas sillonner le Bois Monstro au hasard, particulièrement en sachant que la fée a protégé son habitation de multiples sortilèges : un équivalent du "Repousse-Moldu" est à prévoir, ce qui nous empêcherait même d'espérer trouver la chaumière par chance. Et je ne suis pas assez habitué à percevoir la magie pour nous guider vers son logement. Nous n'avons pas le choix : il nous faut la faire venir à nous ! Et l'idée de Belle est notre unique option !
- Je ne te laisserai pas te mettre en danger ! grogna Harry, bouillant de colère.
- Et que comptes-tu faire pour m'en empêcher ? le provoqua Malfoy d'un air hautain.
- T'es sérieux ?! s'écria Blaise en se levant d'un bond. Tu veux te pointer là-bas et lancer un sort de gel sur les arbres pour enrager une putain de Carabosse surpuissante ?! Parce que c'est sa piaule, la forêt ! N'importe qui piquerait une crise si on défonce sa baraque !
- Je n'irais pas jusque là, tenta-t-il de le rassurer. Un peu de frimas sur l'herbe ne devrait pas causer trop de dégâts.
- On est en putain d'été, bordel ! Bien sûr que ça va tout bousiller ! T'es une connerie de dérèglement climatique à toi tout seul ! Ton propre Royaume a eu un mal de chien pour rattraper les ravages de ton salopard d'hiver !
- Mais le peuple féerique a tout remis en ordre. La fée bleue aussi pourra faire…
- Sauras-tu te contrôler ? contra Neville, le visage inquiet. Peux-tu assurer que ta glace n'envahira pas plus de végétation que nécessaire ?
- Je… hésita Elsa, de moins en moins confiant. Il me faut essayer.
- C'est de la folie ! insista Arthur. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre que tu t'entraînes, cela pourrait durer des semaines ! Et même si tu y parvenais, nous n'avons aucune arme pour lutter contre la magie d'une fée de cette envergure ! Nous ne pourrons pas assurer ta sécurité ! Ta survie et ton bien-être sont primordiaux pour notre quête, cette manœuvre pourrait la mettre en péril !
- Et que proposes-tu à la place ?! s'agaça Draco. Te promener dans le bois en appelant la fée ? Je suis certain qu'elle arrivera la bouche en cœur, et t'invitera à boire le thé chez elle. Soyons honnêtes : c'est notre seule chance ! Nous savions que ce ne serait pas une partie de plaisir. Nous avons décidé ensemble de parcourir le monde à la recherche des plus puissants mages et fées existants afin qu'ils puissent m'instruire. Pensiez-vous qu'ils seraient tous ravis de nous recevoir et de me livrer leurs secrets ? Nous n'allons tout de même pas abandonner à la première difficulté ! Si vous refusez de me laisser prendre des risques, autant rentrer chez nous tout de suite ! Ce n'est pas en restant sagement assis, à attendre que d'autres agissent à ma place, que je progresserais ! Je dois essayer ! Je dois mériter leurs enseignements ! Et si je devais avoir peur à chaque fois qu'il est question d'user de ma glace, il est inutile de continuer ! »
Harry serra dents et poings, un hurlement de rage dans la gorge, prêt à franchir ses lèvres. Mais il se retint… Le blond avait raison, et pourtant… il ne pouvait pas l'accepter. Savoir que la reine risquait de s'attirer les foudres d'une magicienne millénaire le révulsait. Et il y avait pire… Car encore une fois, les mots de Tracassin résonnaient dans son esprit, tel un petit diable sur son épaule.
« Comme Excalibur. »
Il se prit le visage dans les mains, tentant de faire taire cette voix venue tout droit des Enfers.
« Inutile sans le bras de son monarque pour la brandir. »
Il ne voulait pas se servir de Draco ! Ces mots n'avaient aucun sens ! Il était un être humain, avec sa propre volonté ! Il dirigeait le plus grand Royaume de ce monde d'une main de maître ! Et s'ils avaient choisi de voyager dans cet univers, c'était pour lui permettre d'être plus autonome ! Pas le rendre plus fort comme on chargerait un artefact de magie pour le manipuler ensuite !
« Planté dans son rocher, attendant que son roi veuille bien prendre la peine de l'utiliser. »
Pourquoi avait-il l'impression de voir s'accomplir cette tragique prémonition ? Il n'était pas le héros et Malfoy n'était pas une arme ! Cependant, il voulait servir de leurre, quitte à devenir la cible des attaques… Ce n'était pas son rôle ! Il était la reine, bordel ! Il devait demeurer en sécurité pendant que les autres avançaient en première ligne ! Pas lui ! Il était bien trop important !
« Pourquoi ? demanda-t-il au bout d'un moment, accrochant ses prunelles vertes dans l'argent. Pourquoi ressens-tu subitement l'envie de te mettre en danger ? En tant que Serpentard, tu aurais dû chercher n'importe quel argument pour éviter cette situation. »
L'assurance d'Elsa s'éteignit brutalement. Il se dandina sur son fauteuil, comme pris la main dans le sac. Et Arthur perdit tout espoir de le convaincre de changer d'avis, glacé jusqu'au sang. Quelque part, il comprenait… il savait !
« Je sens ma magie bouillonner… expliqua le blond en cherchant ses mots. Je… Moi non plus je n'ai pas envie d'appliquer ce plan. Je ne suis pas plus rassuré que vous, et l'idée d'utiliser mes pouvoirs m'inquiète autant que d'imaginer provoquer l'ire d'une fée. Pourtant… je sais que c'est ce que nous devons faire. Non seulement nous n'avons pas d'autre option, mais ma glace le réclame. Si je ne la fais pas sortir, elle finira par… "exploser"… C'est comme si… J'étais "fait" pour ça, d'une certaine manière… »
« Un bien sans volonté propre. »
Harry retint de justesse le gémissement qui lui tordait le ventre. Que pouvait-il répondre ? Comment argumenter ? Si la terrible glace de la reine menaçait de répandre une nouvelle malédiction d'Hiver Éternel, ils n'avaient plus aucun moyen de lutter. Il avait beau y réfléchir, il ne voyait pas comment esquiver la main du destin qui semblait cruellement vouloir les remettre dans le chemin qu'elle avait tracé pour eux. Chacun, à leur manière, n'était que les pantins de cette divine comédie.
« Une parfaite poupée de porcelaine. »
« Très bien… fit-il sans conviction. Mettons-nous en route.
- Quoi ?! s'écria Blaise. T'es sérieux ?! Tu veux vraiment que…
- Que veux-tu faire ?! s'époumona Potter, laissant sortir toute sa rage et sa frustration. Elsa l'a dit : sa magie risque d'exploser s'il ne s'en sert pas ! Autant l'utiliser à bon escient tant qu'il en est encore temps ! Mais je te préviens, Malfoy, ajouta-t-il en se tournant vers le blond interloqué. Je compte bien rester près de toi à chaque instant ! Alors tu as intérêt à bien canaliser ton pouvoir pour ne pas me congeler sur place ! Et ce n'est pas négociable ! »
S'il ne pouvait rien faire pour empêcher le blond d'être le jouet de sa magie, du destin, de Tracassin ou de n'importe qui d'autre, il ne le laisserait pas affronter le péril seul ! Une épée manipulée demeurait toujours proche de son utilisateur. Si cela pouvait limiter les dégâts, il acceptait son rôle : il serait le bras qui soutiendrait Draco. Et quitte à parer les coups à sa place. Il ne le laisserait jamais se briser. Jamais !
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NOTES DE L'AUTEUR :
Si vous lisez encore mes chapitres, je tiens déjà à vous remercier chaleureusement. J'ai une pensée émue à mes rares reviewers du début qui ont rempli mon cœur de joie, mais qui n'ont probablement pas continué de lire cette histoire puisque je n'ai plus de nouvelles… Évidemment, les emails fluctuants de n'aident pas (si vous passez par là, regardez vos messages perso ? rien que pour mes réponses à vos reviews ?).
En fait, j'aimerai surtout comprendre. Hydrus m'a signalé que mes chapitres étaient beaucoup trop longs, ça prend trop de temps à la lecture (et moi, je dois produire beaucoup plus pour publier), et elle m'a très justement encouragé à les découper. Voilà pourquoi vous avez une "Part1 : Geppetto" pour Pinocchio. Il y aura une "Part2 : La Fée Bleue".
Je vais aussi publier toutes les deux semaines, maintenant. Tout simplement parce que… bah… autant vous dire que recevoir zéro review depuis 2 chapitres (sauf Maelstrom), ça démotive à FOND. J'ai vraiment l'impression d'écrire dans le vide (et je ne pense pas que je suis la seule dans ce cas).
Alors du coup, j'aimerai comprendre… Si vous lisez ceci, c'est que l'histoire vous accroche un minimum pour la poursuivre ? Où se situe donc mon problème ? L'histoire ne plait pas tant que ça ? L'univers est beaucoup trop perché alors que vous voulez du HP et du drarry uniquement ? Ce sont les chapitres trop longs ? Le drarry trop long à arriver (je l'ai rapproché, d'ailleurs. Il arrive bientôt) ? L'écriture ? Les personnages qui sont pas tout à fait comme ils sont dans les livres ?... Je sais que cet appel à savoir peut être à double tranchant : ne pas recevoir de réponses et/ou recevoir des réponses qui font mal. Mais bon bah je crois que je préfère avoir au moins un indice quelque part ^^'... Et j'ai aussi conscience de faire ma kalimero avec cette note (et j'aime pas ça… je risque de supprimer cette note au bout d'un moment)…
Petit moment "je raconte ma life" : Je viens à peine de revenir sur ce site que j'avais quitté il y à 10 ans. Et je me souviens qu'à l'époque, j'en avais marre de lire un peu toujours la même chose, et j'avais envie d'un truc nouveau : d'où OUAT. Je n'avais pas conscience que le fandom avait changé, je suis restée dans mon état d'esprit de l'époque. Je me suis mise dans une niche, totalement inconsciente que je suis. J'aurais dû faire plus simple en revenant. À l'époque, les reviews étaient bien moins rares (j'ai eu cette confirmation en intégrant un serveur discord spécial fanfic HP : Potterfictions. Je vous invite à le rejoindre si ça vous intéresse).
Arriver dans ce serveur spécial fanfic m'a fait beaucoup me remettre en question, et m'a surtout énormément appris. Les gens sont adorables, il y a beaucoup de bienveillance. Je crois que j'ai progressé de fou (que ce soit en écriture ou dans ma tête) grâce à eux tous. Puis il y a eu le Mois des Fiertés (encore en cours actuellement - une petite histoire à thème à pondre par jour pour le mois de Juin, je les publie au fur et à mesure). Ça me prend beaucoup de temps par jour (temps où j'écris peu de OUAT) mais m'a permis de me rassurer, quelque part. Et d'expérimenter des choses.
Bref… Je vais arrêter de m'appesantir. Je faisais de grosses notes pour expliquer là où je voulais en venir dans mes chapitres, voir si ça avait marché ou non, montrer que les idées n'étaient pas gratuites mais avaient un sens. C'était plus intéressant que cette espèce de boulgiboulga type "ouin ouin" que je déteste. Mais je me sens démunie. Je sais plus quoi faire pour avoir des réponses et savoir ce qui va pas. Je laisserai pas cette note, je la supprimerai, à terme.
Si vous lisez jusqu'ici, s'il-vous-plaît, laissez un petit mot. Pas besoin de plus que deux trois mots, si ça vous embête trop. J'ai juste besoin, quelque part, de savoir qu'il y a des gens de l'autre côté. Que je parle pas dans le vide. Et si cette histoire vous plaît, sachez que vos commentaires m'influent beaucoup. Pas forcément sur ce qui est prévu, mais sur la mise en scène et ce sur quoi je dois appuyer le récit ou non (comme la décision de rapprocher le drarry qui devait mettre plus de temps à arriver, à la base. Ils étaient quand même ennemis, dans les livres !)
Et bon bah… Si l'histoire vous donne pas envie de laisser un mot, dites-moi au moins la raison ? Que je comprenne pourquoi ? Que je sache si je fais que de la merde ou s'il y a une autre raison quelconque ?...
Désolée pour ce moment d'auto-apitoiement (sérieux, je suppr cette note nulle dans une ou deux semaines…).
J'espère vous lire. À bientôt.
Ashu
