SWEET BLOOD - carriejack03
Traduction : Miss Cactus
Chapitre 10
Furihata se réveilla au milieu de la nuit à cause d'un frisson lui remontant le long de l'échine. Son cœur battait si fort qu'il avait peur qu'il s'échappe de sa poitrine, son corps tremblait comme s'il était sur une chaise électrique et il n'arrivait pas à calmer sa respiration frénétique.
Pensant qu'il avait besoin d'un verre d'eau pour se calmer, il ouvrit la porte de sa chambre et commença à bailler lorsque deux mains froides vinrent encercler son torse, le piégeant dans une étreinte mortelle. Son visage atterrit dans le torse de la personne en face de lui et il en eut le souffle coupé. Le corps contre lequel il était était chaud, mais cette étreinte était glaciale. Il n'y avait pas une once d'affection et il put entendre son cœur rater un battement. Quelque chose lui disait que bouger était une mauvaise idée. Son corps était pris au piège et il était incapable de simplement cligner des yeux. Ses yeux étaient tellement écarquillés qu'il en avait mal.
Cette froideur était familière. Furihata en avait rêvé plusieurs fois, trop pour compter, toujours terrorisé par ses souvenirs. C'était comme si les ténèbres l'enlaçaient – il ne ressentait plus rien, comme si chaque moment heureux ou triste de sa vie avaient été effacés par cette étreinte, ne laissant dans son cœur qu'un vide qu'il n'était pas sûr de pouvoir remplir un jour.
Les bras autour de son corps se resserrèrent et un menton vint se poser sur le haut de son crâne, comme si on cherchait à le réconforter, mais Furihata se sentait plus comme une proie avec qui on jouait avant sa mort.
- Kise-kun... chuchota-t-il, sa voix étouffée par le T-shirt du garçon, mais ce fut suffisant pour qu'il l'entende dans cette maison silencieuse.
- Furihatacchi ! Ça fait si longtemps ! Tu m'as manqué ! s'exclama Kise, un sourire mauvais déformant son beau visage.
Il passa une main dans les cheveux du brun, se détachant un peu de lui pour le laisser respirer. Furihata ne releva cependant pas les yeux. Ce n'était pas qu'il avait trop peur pour bouger, il n'était pas non plus résigné, c'était comme s'il ne voyait pas le blond.
C'était comme s'il n'existait pas.
La colère monta en lui et il attrapa brusquement la tête de Furihata pour l'obliger à lever les yeux. Leurs regards se rencontrèrent, mais Kise n'y vit que de la pitié... ce chihuahua qui ne pouvait même pas se défendre... avait pitié de lui ? Il ne pouvait pas l'accepter.
- Ne me regarda pas comme ça, grogna-t-il en appuyant sur son cou, là où avait été sa blessure.
Il avait pensé qu'il crierait de douleur ou qu'il gémirait en tremblant de peur, mais sa réponse le surprit et, si c'était possible, le rendit plus furieux encore. Furihata ne dit rien, il se contenta de le regarder de ses yeux énigmatiques, son expression ne changeant pas. Pas même un signe de surprise ou d'inconfort.
Il laissa cependant un grognement de douleur lui échapper quand Kise le jeta sur le lit, son dos atterrissant brusquement sur le matelas et sa vision se troubla quand sa tête se cogna contre le bord de son lit. Il n'eut pas le temps de se relever que Kise se trouvait au-dessus de lui, un sourire qu'il ne pouvait que qualifier de fou aux lèvres et ses mains attrapèrent celles de Furihata dans une poigne de fer.
- Je te préférais quand tu criais... tant pis, de toute façon c'est la dernière nuit que tu passeras en vie, chuchota-t-il.
Ses yeux devinrent rouges et Furihata sentit les lèvres froides de Kise contre son cou, comme la première fois qu'il l'avait mordu, mais il était plus... doux ? Oui, doux. Ce n'était pas aussi douloureux, comme si Kise avait appris à être plus gentil. Ou tout du moins, aussi gentil qu'il pouvait l'être, étant donné qu'il venait de lui promettre qu'il allait mourir.
Furihata fixa le plafond et commença à penser, pendant que Kise lui buvait son sang, se disant qu'il allait certainement mourir dans quelques minutes. Il ne s'était écoulé que deux semaines depuis sa conversation avec Midorima et il avait compris que toute les membres de la Génération des Miracles se sentaient coupables à cause d'une chose qu'ils avaient faite à Kise, mais il ne savait toujours pas quoi... Furihata se sentait piégé : il pouvait aller à l'école, voir ses amis, mais quand il rentrait chez lui, il n'était qu'une réserve de sang pour un groupe de vampires et il pouvait pas leur échapper. C'était pour cette raison qu'il s'était récemment mis à penser à Kise. Pourquoi était-il ainsi ? Que s'était-il passé ? Et alors qu'il réfléchissait, d'un autre côté, il continuait penser qu'il n'était pas libre, que son destin était de servir de nourriture pour vampires jusqu'à sa mort et il trouvait l'idée de ne plus jamais se réveiller réconfortante. Il ne voulait pas de ces pensées suicidaires, mais c'était la seule chose qu'il pouvait faire pour leur échapper.
Le dernier jour, il s'était regardé dans le miroir et ne s'était pas reconnu : ses yeux étaient vides, il n'y avait plus rien et les émotions qu'il ressentait ne semblaient même plus réelles. A cet instant, il avait eu une impression de déjà-vu – il avait déjà vu ces yeux. D'une couleur différente et sur un autre visage, mais l'expression était identique. Exactement comme Kise.
Et il avait eu pitié du blond et de lui-même. C'était pour cette raison qu'il ne pouvait rien faire d'autre que regarder Kise tristement quand il était arrivé plus tôt. Dans ses yeux, il se voyait lui-même.
Il revint à lui quand les lèvres contre son cou s'éloignèrent de lui. Il regarda Kise d'un air fatigué en voyant que quelque chose semblait le déranger. Il avait envie de lui demander ce qui n'allait pas, mais il n'avait pas la force de parler.
- Ce n'est pas assez ! Vraiment pas assez ! répéta Kise.
Une goutte de sang tomba sur la joue de Furihata tandis que le blond semblait complètement perdre la tête. Il prit une longue inspiration et sembla se calmer, même s'il tenait le brun avec beaucoup trop de force.
- Je veux te détruire... j'ai besoin de te détruire ! chuchota-t-il, mais il ne semblait pas vouloir le mordre de nouveau.
Puis Furihata comprit ce qu'il voulait dire. Il ne parlait pas du garçon sous lui, mais de quelqu'un bien plus brisé. Kise se parlait à lui-même. A cette personne si fragile que quelqu'un avait réussi à briser.
L'instinct et la logique disparurent de son esprit et le brouillard de désespoir se leva de ses yeux, lui permettant de voir de nouveau le monde. Il avait peur d'être coincé sur son lit, il ne comprenait pas ses mots et il était terriblement inquiet pour lui. Et il avait honte de combien de fois il avait pensé que la mort serait préférable à la vie ces derniers jours. Comment osait-il ? Il y avait tellement de choses qu'il voulait faire, tellement d'endroits qu'il voulait visiter, des gens qu'il voulait rencontrer... il allait tout jeter à la poubelle et pour quoi ? Parce qu'il pensait qu'il valait mieux mourir que de servir de réserve de sang pour six vampires ? Il était certain que d'autres personnes vivaient des situations bien plus horribles et gardaient la tête haute.
Sa dépression était née car il n'avait personne à qui parler, que toute la pression sur ses épaules le détruisait, mais... le visage de Kise et ses mots le firent comprendre que le blond, même s'il ne l'admettrait jamais, avait besoin de lui. Kise était vraiment un miracle.
- Kise-kun... Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
La voix de Furihata était douce, même si son cou le brûlait et il n'était pas en colère. Il le regardait avec des yeux doux et un petit sourire.
Kise sembla comprendre qu'il ne lui demandait pas pourquoi il avait arrêté, mais son histoire, et Furihata fut surpris lorsqu'il posa sa tête sur le torse du brun, sa main lâchant son poignet. Il eut l'impression que des heures s'écoulèrent avant que Kise ne décide d'ouvrir la bouche pour parler.
- Il y a un an... Akashicchi a changé, il est devenu une autre personne. Il n'était plus lui-même, mais comme j'avais peur je n'ai pas osé dire quoi que ce soit. C'était... avant le tournois de cette année-là qu'il m'a parlé de la Génération des Miracles et qu'il m'a dit qu'il voulait que je sois comme eux... que je devienne un vampire...
Kise prit une inspiration tremblante, comme s'il était au bord des larmes. Furihata, ne sachant pas quoi faire, fit ce que son instinct lui dictait et il commença à lui caresser les cheveux, ce qui sembla le calmer puisqu'il continua son histoire.
- Je n'étais pas certain de ce que je voulais faire, tu sais ? Je n'avais jamais entendu parler de vampires avant et j'avais peur, mais...
Sa voix se brisa, mais il continua comme s'il levait un poids de son cœur et Furihata ne savait pas quoi dire pour l'arrêter.
- Mais Akashicchi ne m'a pas laissé le choix... et les autres ont fait ce qu'il leur avait ordonné... ils ont fait de moi un vampire... c'était si douloureux... ils n'ont pas respecté ma décision... et j'ai senti quelque chose se briser en moi, c'était comme si mon humanité disparaissait... mais j'allais bien ! Ça ne m'inquiétait pas... mais on dirait qu'une partie humaine est restée en moi pour me rappeler à quel point j'ai été faible de les laisser faire ce qu'ils voulaient... et je me suis toujours senti coupable de la douleur que je causais autour de moi...
La voix de Kise était de plus en plus faible jusqu'à complètement disparaître. Alors ce qui l'avait brisé c'était d'avoir été trahi par ceux qu'il considérait comme ses amis ? Furihata comprenait que Kise était fragile depuis toujours à cause de la pression entre l'équipe de basket et son travail de mannequin et cet événement avait été ce qui l'avait détruit. Comment... comment la Génération des Miracles avait pu faire une telle chose à quelqu'un qu'ils aimaient ?
Furihata sentit sa poitrine être mouillée et il comprit que Kise pleurait. Il semblait qu'il avait eu besoin de dire son histoire à quelqu'un. Il l'avait cachée pendant si longtemps que toutes ses émotions semblaient ressurgir et le submerger.
- Kise-kun... tu n'as rien fait de mal, ne pleure pas.
Furihata l'enlaça, ne sachant pas quoi faire d'autre. Avait-il peur de lui ? Absolument. Perdait-il la tête ? Certainement. Avait-il pitié de lui ? Plus autant, mais il voulait que Kise sèche ses larmes.
Kise releva la tête, les yeux rouges, du sang sur les lèvres et les cheveux dans tous les sens. Il ressemblait à un enfant perdu, mais d'un autre côté Furihata était sûr qu'il n'avait jamais rien vu d'aussi beau. Plus qu'un démon... il ressemblait à un ange déchu.
Le blond leva les mains et les posa sur les joues de Furihata sans jamais quitter ses yeux et commença à se rapprocher de lui. Lentement, leurs lèvres se rapprochèrent et Kise vit que Furihata ne s'éloignait pas.
- Furihatacchi...
Et avec ce dernier soupir, leurs lèvres se rencontrèrent, les connectant d'une étincelle de vie. Tout semblait être à sa place, peu importe s'ils étaient deux garçons ou s'il avait essayé de le tuer plusieurs fois, il était juste Kise. Furihata sentit le goût se son sang, mais ce n'était pas si dégoûtant, c'était même plutôt agréable – peut-être que c'était le goût de Kise. C'était enivrant, comme tout chez lui, Furihata ne pensa pas qu'il en aurait un jour assez et ce n'était qu'un baiser, lèvres contre lèvres, rien de plus.
Ils avaient tous les deux l'impression que des heures s'étaient écoulées, mais après seulement quelques minutes ils se séparèrent sans rien dire. Kise passa les bras autour de la taille de Furihata et les fit rouler de sorte à ce que le brun soit sur lui, son cou blessé ayant déjà arrêté de saigner.
Les doigts de Kise commencèrent à lui caresser les cheveux avec une gentillesse qui n'était pas sienne, mais il ne dit rien, soupirant de plaisir et appréciant les caresses du blond. Il savait que le lendemain matin tout aurait changé, mais pour l'instant ce n'était pas important, pas quand il sentait Kise se détendre et s'endormir lentement.
Ce n'était pas le moment de réfléchir.
