J'aime sentir le soleil et le vent sur ma peau. J'ai l'impression d'avoir passé une éternité dans l'obscurité avant cette sortie. Je remercie intérieurement Derek d'avoir eu cette idée car je ne sais pas si j'aurais eu le cran de lui demander. Je sais très bien que je peux lui proposer des choses et lui faire part d'envies mais une partie de moi me bloque la plupart du temps. C'est presque un miracle que j'aie pu lui parler de mon cauchemar et oser demander à conduire sa précieuse, si précieuse Camaro pour l'emmener ici. Honnêtement, je ne sais pas ce qui l'a fait accepter. Sa pitié envers moi ? Son envie que je continue de me taire ? Il ne me fuie plus comme avant, lorsque je parlais à tort et à travers. Mais depuis que Peter m'a touché, je… Parler, c'est dur. Qu'importe si c'est pour émettre une remarque ou demander quelque chose, j'ai souvent quelque chose qui me bloque et si je ne prenais pas mon traitement pour l'hyperactivité, j'aurais bien du mal à me contenir, que ce soit au niveau de ma bouche ou de mes gestes. Ma gorge se serre. Si je suis heureux d'être ici, dans cet endroit auquel je tiens avec Derek, quelque chose en moi me fait mal.
Il aime ce que tu n'es pas, me dit une voix dans ma tête. Elle ressemble à celle de Peter. Je ferme les yeux un instant, j'essaie de balayer sa présence dans mon esprit d'un revers de pensée et j'y arrive. Je sens comme un poids s'envoler et même si c'est temporaire, je profite. Je rouvre les yeux, je le regarde, je souris. Parce que même si ma cassure lui plaît, il est là. Même s'il n'aime que mon silence, je ne suis pas seul.
Il a un air étrange collé au visage. On dirait qu'il est surpris, mais ça va plus loin. Je sais que c'est plus que de l'étonnement mais je n'arrive pas à mettre les mots sur ce que ça pourrait être plus précisément. A vrai dire, je m'en fiche. Avec ce qui m'arrive en ce moment, j'essaie d'éviter de me poser trop de questions, je sais que ça ne me réussit pas. La seule fois où j'ai essayé de pousser mes interrogations, je suis parti en vrille. Au fond, je sais que je ne veux pas de tout ça, que le poison de Peter fait tout pour me faire penser comme il le souhaite. Je m'en rends compte et à vrai dire, ça me terrifie. Alors, tant que je suis à peu près lucide, j'en profite. Pour le moment, je suis toujours moi. Une version faiblarde et cassée, mais c'est moi.
- J'allais souvent ici avec mes parents quand j'étais petit, je lâche. La cabane, c'est mon grand-père qui l'avait faite. En soi, le terrain n'est pas vraiment à nous, mais… Personne ne vient jamais. Pourtant, c'est beau, c'est tranquille, c'est… Apaisant.
Mon regard se pose sur l'eau et ses légers clapotis. On voit quelques poissons minuscules faire leur vie dans cet étang à la fois si petit et si grand. Je n'aime pas m'y baigner, mais j'aime le regarder. La vie à l'intérieur semble si calme… Tout l'inverse de la tempête dans ma tête.
- Je voulais venir ici et te montrer cet endroit tant que j'ai encore toute ma tête, je finis par avouer. Je pense pas que ça t'intéresse vraiment, mais je… J'y tiens. J'aime me dire que… J'ai partagé quelque chose avec toi avant de… Disparaître.
Le dernier mot me coût mais en soi… N'est-ce pas la vérité ? Je sais que le poison de Peter me grignote la tête petit à petit. Je sais que le Stiles présent, ce n'est pas toujours moi.
- Stiles, arrête. Tu ne vas pas disparaître.
- Derek, fais pas comme si tu ne t'en étais pas rendu compte, je me moque faussement en esquissant un sourire triste. Tu sais très bien que je suis en train de disparaître pour laisser place à ce… Truc que Peter veut. Je suis lucide, tu sais ? Pour l'instant, en tout cas…
Sa main s'empare de la mienne, mais je ne tourne pas la tête vers lui, par peur de trouver de la pitié dans ses iris si particuliers. Le fait qu'il accepte mon contact comme il l'a fait tout à l'heure et même qu'il l'initie me surprend toujours mais… Je crois que ça me fait du bien. En fait, j'aime ça. Sa main diffuse dans la mienne une chaleur qui, plus que familière, est rassurante. Je n'ai jamais craint Derek, du moins pas consciemment. J'ai confiance en lui, sans doute plus qu'en n'importe qui, même si Jackson commence à rentrer dans mon cercle de confiance. Je suis toujours étonné qu'il prenne lui aussi soin de moi, mais… Je m'y fais. Je commence à avoir l'habitude de le voir matin, midi, soir. Je ne suis pas complètement à l'aise lorsqu'il est là parce que son regard reste insondable. Il se montre peu expressif en ma présence et je crois que c'est voulu, mais j'avoue que ça ne m'aide pas franchement à savoir ce qu'il pense vraiment. Néanmoins, il m'aide à sa manière et ça, je pense que, lobotomisé ou non, je ne l'oublierai jamais. Il m'héberge, me nourrit, me laisse vivre comme si j'étais chez moi et même si je n'ose pas faire grand-chose par peur de le déranger, je dois avouer que ça me soulage. Puis, je n'oublie pas non plus qu'il est venu avec Derek lorsque j'ai fait mon cauchemar, qu'il est resté, lui aussi.
Ce qui me rend triste, c'est que je ne suis pas sûr que Scott en aurait fait autant. On ne peut pas dire qu'il a été d'une grande aide les fois où j'en avais réellement besoin. Je ne lui en veux pas : c'est un alpha, il est très occupé. Toutefois, je ne peux pas m'empêcher de constater que ceux qui sont à mes côtés sont uniquement Derek et Jackson. Les autres ne sont au courant de rien et je ne veux pas que ça change. Ils n'ont pas à savoir tout ça : cette histoire ne doit pas se transformer en chasse à l'homme. Peter ne mérite pas ça. Je me tends. Cette pensée m'est venue naturellement et je n'aime pas ça. Comme toutes les autres. Derek serre ma main, peut-être parce qu'il a senti ma crispation, je n'en sais rien… Mais j'apprécie. Une étrange sensation se répand en moi et un vent de tristesse me submerge.
Très honnêtement, je ne sais pas s'il aurait pu se passer quelque chose entre lui et moi. Si toute cette histoire n'avait pas eu lieu, nous serions-nous rapprochés ? Est-ce que j'aurais pu tenter quelque chose avec lui ? Est-ce que j'aurais eu mes chances ? Derek aime les femmes mais je me dis que, peut-être, j'aurais pu être une exception. Son exception. Je ravale mes regrets. De toute manière, penser à ça ne sert à rien. Je suis fini. D'ici quelques temps, mes pensées ne seront plus les miennes. J'ai déjà du mal à les recentrer… Et pour ça, je me raccroche aux paroles de Derek et Jackson : j'essaie de me convaincre qu'ils ont raison. Que rien n'est de ma faute. Que je n'ai rien voulu de tout ça. Que Peter est un pervers, qu'il ne mérite pas sa deuxième chance. J'essaie de les écouter, vraiment, parce qu'ils ne m'ont jamais fait de mal. Même Jackson. Ils n'ont pas eu de geste déplacé, ne m'ont pas menacé, prennent soin de moi… Je sens avec une trop grande netteté les pansements qui parsèment ma peau, les endroits où je me suis gratté jusqu'au sang – je frissonne – et ce bandage autour des griffures que m'a laissées Peter. Violence. Il agit avec violence, rentre-toi ça dans le crâne, Stiles. Il ne te veut pas du bien. Il veut se faire du bien, là est la nuance.
- Tu ne disparaîtras, Stiles. Ça sera sans doute difficile, mais je ferai tout, tout pour que tu ne deviennes pas son esclave. Tu resteras toi-même. Deaton continue ses recherches, je l'épaule quand je peux, Scott essaie de localiser Peter et Jackson reste avec toi quand je ne le peux pas. Tu n'es pas seul. Tant qu'on sera là, il ne mettra pas la main sur toi et toi, de ton côté, continue de te battre. Ça peut paraître bateau mais il faut que tu continues. Je sais que c'est compliqué, que ta conscience est tiraillée dans les deux sens, mais tu peux y arriver. Je crois en toi, Stiles. Tu vas y arriver.
Mon cœur rate plusieurs battements et ma gorge se noue. Pourquoi ses mots me font-ils tant d'effet ? Pourquoi j'ai l'impression qu'à travers eux, je peux espérer m'en sortir ? Au fond, je sais que ce n'est pas le cas, mais sa voix… Sa voix me caresse, fait ce qu'elle peut pour endormir mes craintes et mon désespoir. Parce que je ne suis pas dupe : je sais que Derek est, de son côté, en train de lentement perdre espoir. Il n'abandonne pas, mais je vois bien qu'il y croit moins. Et pourtant, lorsque je tourne la tête vers lui, sa sincérité me saute aux yeux. S'il ne croit peut-être plus vraiment en ma guérison, je ne peux pas douter du fait qu'il croit réellement en moi. Mon cœur rate un nouveau battement alors que ma gorge se serre un peu plus. Sait-il que ce qu'il me dit est ce que j'ai besoin d'entendre ? Sait-il que malgré ma honte perpétuelle et le poison qui me ronge, sa présence est ce qu'il me faut pour tenir un peu ? Sans lui, j'aurais déjà lâché la bride. J'aurais laissé Peter prendre le contrôle. Mais Derek… S'il reste pour que je me batte contre ma lobotomie, je peux bien continuer d'essayer.
Malgré l'inquiétude et les cernes qui garnissent ses yeux d'un manteau sombre, son visage ne change pas. Il est celui que j'ai toujours connu, cette beauté sauvage qui m'a autant subjuguée que son caractère. Indomptable, taciturne, mais profondément gentil. Derek est bien plus qu'un homme à la plastique avantageuse. Il est tout simplement génial et a tant à donner… Lui-même ne s'en rend pas compte. Il a longtemps vécu seul, dégoûté par les trahisons qu'il a essuyées et qu'il a tout fait pour dépasser. Il a perdu sa famille dans sa quasi-entièreté et voilà que l'un des deux membres qui lui reste se retrouve être un pervers, au sens propre du terme. Et il m'aide moi. Moi, l'hyperactif qui lui en a fait voir de toutes les couleurs. Moi, le bon à rien tout juste doué à faire des recherches. Moi, le pauvre humain dont n'importe qui pourrait se débarrasser d'un revers de main. Il prend soin de moi, fait attention à ce que je mange même si je n'ai pas faim et même si j'essaie souvent de le berner pour éviter d'ingurgiter quoi que ce soit, je sais que ce n'est pas bien. Je sais qu'il fait ça pour moi. Et même si la nourriture me dégoûte parce que je pense très régulièrement à ce qui m'est arrivé, j'essaie de faire des efforts. Et lui, il ne me lâche pas, fait toujours tout pour m'encourager même si mes maigres progrès le désolent. Je ne suis pas aveugle, je vois bien que tout ne lui fait pas plaisir. Que mes efforts ne sont pas suffisants. Et je vais faire de mon mieux pour le contenter, j'en ai vraiment envie. Comment ne pas vouloir continuer avec un tel soutien ? Et surtout…
Comment ne pas l'aimer ? Comment réprimer ces sentiments qui ne me quittent jamais ? Parfois, ils passent au second plan, mais ils sont toujours là. Ce que j'aime ses yeux aux mille couleurs, ses prunelles qui laissent filtrer tellement d'émotions – plus qu'il ne le pense. Ce que j'aime cette barbe de trois jours qu'il raccourcit sans arrêt mais qu'il ne rase jamais. Ce que j'aime ce nez droit contre lequel j'aimerais frotter le mien, dans une pâle imitation de ces bisous esquimaux que je trouve si mignons. Ce que j'aime ces cheveux qui ont l'air si doux au toucher et ces lèvres que dans mes rêves les plus fous j'embrassais avec passion sans savoir réellement si elles sont aussi douces qu'elles en ont l'air.
Ce que j'aime ce courage qu'il a de continuer sa vie en restant digne malgré tout ce qui lui est arrivé. Ce que j'aime ce côté abrupt, cet air grognon qu'il prend souvent pour se donner un genre. Ce que j'aime cette façon qu'il a d'essayer de protéger et de vouloir sauver tout le monde. Lui qui fait semblant de n'accorder de réelle importance à personne nous aime en réalité tous, à sa manière. On est la meute qu'il a perdue, la famille qu'il n'a plus. De l'affection, de l'amour à donner, il en a et il le fait discrètement, juste assez pour qu'on le remarque sans vraiment le savoir complètement. Il donne et fait en sorte de ne pas être remercié car il est si peu habitué à cela qu'il évite les situations qui peuvent le gêner : la vie ne l'a pas épargné, lui non plus. Ses cassures d'hier sont ses fragilités d'aujourd'hui.
Et c'est pour tout ça que je l'aime. Malgré tout ce qui se passe, c'est la seule constance de ma vie en ce moment.
Il y a peu, j'ai pris une décision. Je sais que je vais avoir honte, plus que jamais. Mais cette honte-là est différente de celle que je ressens en permanence. Elle sera saine, si l'on peut dire ça comme ça. Je me dis que quitte à disparaître, autant livrer ce que j'ai sur le cœur avant qu'il ne soit trop tard. Je ne sais pas, j'ai beau vouloir espérer, il y a ce petit quelque chose à l'intérieur de moi qui me fait me dire que ça va mal se passer, un peu comme un mauvais pressentiment. C'est peut-être une question de semaines, de mois, comme cela peut être une question de jour.
Alors tant pis pour la honte, je ne veux pas disparaître de mon propre corps sans lui avoir dit ce que je ressens pour lui. J'en ai besoin. Je sais bien qu'il va me repousser et à vrai dire, je ne chercherai pas à ce qu'il accepte mes sentiments. Tout ce que je veux, c'est lui avouer avant qu'il ne soit trop tard, me libérer de ce fardeau qui m'a valu… Un piège tendu par Peter. Il ne t'a pas piégé. Bien sûr que si. Il a seulement voulu t'aider. Peter ne te veut que du bien. Cette fois, ce n'est pas ma gorge qui se serre, mais mon ventre. C'est ma propre voix que j'entends me souffler ces paroles si… Si… Trompeuses. Stiles, elles sont trompeuses. Peter ne te veut pas du bien. Il a vu quelque chose en toi. Il a vu ton potentiel. Derek ne verra jamais ton potentiel. Mais quel potentiel ? De quoi je…
- Stiles, à quoi tu penses ?
La voix de Derek me sort de mes réflexions. Je cligne des yeux à plusieurs reprises et enfin, je sens sa main serrant la mienne, son autre main sur mon épaule. Il s'est rapproché, un peu. Dans une autre situation, je pense que j'aurais rougi, mais une pression étrange au niveau de mon cœur me glace, tout simplement. J'esquisse comme je peux un sourire plus nerveux qu'autre chose, mais je décide toutefois d'être honnête. Mentalement, je n'ai pas l'énergie de mentir.
- Rien de particulier, juste… Je discute avec moi-même. Non, enfin… Pas de manière volontaire, enfin je veux dire… C'est juste le bordel dans ma tête et avec tout ce qui se passe, j'ai un peu de mal à garder des pensées linéaires.
Il se mord légèrement la lèvre d'un air inquiet. Je décide de le rassurer tout de suite – et en même temps, j'essaie de ne pas passer pour plus boulet que je ne le suis.
- Après ça va, tu sais ? C'est juste… Particulier.
Je sens que ma voix commence à être un peu plus assurée que précédemment et je retiens un soupir de soulagement. Je suis moi, pour l'instant. Peut-être que je suis en train de prendre un peu la confiance, mais… Autant en profiter. C'est difficile pour moi de m'entendre parler, de voir que j'ai du mal à parler sans faire de pause, que je bégaie assez souvent, que j'ai du mal à formuler mes phrases… En somme, je ne peux pas m'exprimer réellement comme je le voudrais et c'est frustrant. Pour être honnête, je ne m'aime pas tel que je suis actuellement. Alors, si je peux ne serait-ce qu'avoir l'illusion de recommencer à être comme avant dans une certaine mesure et tant que je le peux encore… J'esquisse alors un nouveau sourire, juste pour ne pas l'embêter. Pour l'instant, je m'en sors. Et pourtant, il ne me lâche pas : l'une de ses mains est toujours sur mon épaule et l'autre serre toujours la mienne. Pourquoi ? Pourquoi semble-t-il aussi concerné ? Je lutte pour ne pas passer mon doigt sur sa grosse ride d'inquiétude qui lui barre toujours le front.
- Comment c'est, dans ta tête ? Me demande-t-il soudainement.
Je hausse les sourcils et ne cherche pas le moins du monde à cacher ma surprise et à l'intérieur de moi, ma déclaration m'écrase comme un poids, comme si une partie de moi voulait que je parle là, maintenant. Néanmoins, il m'a posé une question et je ne peux décemment pas lui avouer mes sentiments alors qu'autre chose l'intéresse. Je suis surpris qu'il me demande ça mais je vais satisfaire sa curiosité, le reste peut attendre. Ce ne sont pas quelques minutes qui vont changer les choses.
- Comment ça marche, là-dedans ? Me demande-t-il encore, en tapotant ma tempe d'un doigt d'un air à la fois inquiet et fatigué.
- Oh et bien… Pas vraiment différemment de d'habitude. Enfin si, enfin… Au lieu d'être un bordel organisé où je vais toujours me retrouver, ça va juste… Être une baston permanente.
- C'est-à-dire ?
- C'est-à-dire que… Mes pensées vont sans arrêt revenir à Peter et… A tout ça, dis-je en faisant un geste vague de ma main libre. D'un côté je vais me dire qu'il a raison et de l'autre, j'essaie de me dire que c'est pas vrai. D'un côté je me dis qu'il mérite une deuxième chance et que c'est pas quelqu'un de mauvais et de l'autre, je vais juste avoir envie de le virer de ma vie et de fuir le plus loin possible de lui. Et ces deux voix-là, elles parlent tout le temps, ou presque. Parfois ça va se calmer un peu et des fois, une simple petite pensée va faire revenir la voix pro-Peter. Je sais pas si c'est très clair, je… Je suis pas très bon en explications et puis tu vas me prendre pour un taré… Enfin…
- Qu'est-ce qu'elle te dit, cette voix-là ? Continue Derek, sans prendre en compte ma dernière remarque.
Je m'étonne encore.
- Pourquoi ça t'intéresse autant ? Je rétorque d'une voix presque assurée.
- J'ai juste besoin de savoir, me répond-il.
Et je n'insiste pas, par faiblesse sans doute. Lorsque je parle, je pense moins alors sans doute que c'est une bonne chose. Puis, Derek me dit depuis le début de cette histoire que je dois parler, alors pourquoi ne pas le faire ? L'attention qu'il me porte joue aussi beaucoup. Elle détend un peu les nœuds qui se forment dans mon ventre.
- Cette voix-là me dit juste… Que Peter ne veut que mon bien, que c'est pas une mauvaise personne, qu'il n'a jamais voulu me faire du mal, que j'étais pas censé me sentir mal. En fait, elle essaie de me faire me dire que le problème… C'est moi, que j'ai juste… Mal réagi. Pas bien pris la chose.
- Tu sais bien que ce n'est pas le cas, n'est-ce pas ? S'assure-t-il.
- Oui, enfin plus ou moins.
Il se tend, je le sens. Je tente alors de le rassurer comme je le peux, mais sans mentir :
- Je ne suis certain de rien. Je fais des efforts pour me dire que j'y suis pour rien, mais c'est pas facile. Elle insiste beaucoup, tu sais ? Mais t'inquiète pas, Der', je gère.
J'esquisse un sourire un peu moins nerveux. Je veux réellement qu'il arrête de s'inquiéter. Tout va bien. Je tiens le coup pour l'instant et j'essaie de le lui faire comprendre. Alors oui, j'essaie de continuer de me convaincre que je n'y suis pour rien, j'essaie sans arrêt d'étouffer cette voix qui ne devrait pas être là.
Sa main passe de mon épaule à mon avant-bras et il se met à y appliquer de légères caresses, presque distraites. Mon cœur rate un battement.
- Je sais que tu gères, tu gères très bien, Stiles, me dit-il d'une voix un peu rauque. Continue et quand tu sens que tu es fatigué et que tu as du mal à te battre contre cette voix… Rappelle-toi que tu nous as, moi et Jackson. Quand tu fatigues, repose-toi sur nous.
- J'aime pas trop, j'avoue tout de suite d'un air gêné. J'aime pas, déjà que je vous prends pas mal de votre temps, que Jackson me loge, que vous êtes tout le temps là pour moi…
- S'il te plaît, insiste-t-il. Repose-toi sur nous lorsque tu as du mal. Fais-le pour moi, Stiles.
Comment refuser une demande pareille ? Nouveau battement manqué. Au même moment, une douce chaleur se répand dans mon ventre : c'est le rappel doucereux de mes sentiments et du poids de la décision que j'ai prise.
- D'accord, je souffle. Si c'est pour toi alors… Je peux bien faire un effort.
Je ris, de nouveau happé par la nervosité. Je vais parler. Je dois lui dire.
Je détourne le regard, incapable de soutenir ces deux iris bleu-vert qui me transcendent et semblent m'analyser en profondeur. Je ne peux pas le regarder. Dans ma poitrine, mon cœur tambourine rapidement et de plus en plus fort. Maintenant que j'ai satisfait sa curiosité et répondu favorablement à sa demande… Je peux lui avouer, non ?
- Au fait, si je t'ai amené ici, c'est pas pour rien…
C'est un lieu qui compte beaucoup à mes yeux et je ne voulais pas lui avouer mes sentiments n'importe où. J'avais besoin de le faire dans un endroit qui veut dire quelque chose à mes yeux. L'idée, c'est de commencer à partir en beauté, à la Stiles Stilinski. Encore une fois, je ne vais pas chercher à ce qu'il me retourne mes sentiments. Je vais juste me livrer une fois pour toute et ça suffira.
Mais au moment où j'allais à nouveau ouvrir la bouche, une sonnerie de téléphone me coupe. Derek s'excuse et me dit qu'il va raccrocher mais lorsqu'il voit le nom qui s'affiche sur son écran flambant neuf, il décroche sans attendre.
