Hermione, ça la rend chèvre. Il est 15h. Les troisièmes années, décidément, n'ont pas appris les tables de multiplication. C'est fou comme des élèves volontaires pour l'arithmancie peuvent être nuls et aussi peu déterminés à apprendre un truc aussi bête que des tables de multiplication. On est mercredi. Et par Alceste ! Severus fait comme si de rien n'était. Ça l'énerve. Elle veut bien lui laisser du temps. Mais à ce moment-là, il arrête de faire comme si de rien ne s'était passé. C'est pas Merlin possible !
Elle regarde Jefferson compter sur ses doigts. Elle leur a donné deux exercices à faire. Ça aurait dû être fait en 15 minutes. Ça fait 23 minutes qu'ils râlent parce qu'ils n'ont pas eu le temps de finir. En même temps, si personne ne connaît ses tables de multiplication dans cette classe, ça ne risque pas d'avancer. Le mois dernier, ils ont surtout fait de la théorie, mais une fois qu'il faut revenir aux cas plus pratiques, ils oublient tout.
Elle soupire, tapote sa baguette sur la table. Le bruit attire quelques regards, mais l'inertie des élèves est palpable. Hermione se demande si elle parle dans le vide, si ses mots se perdent dans l'air épais de l'ennui et de l'incompréhension. Ça bouillonne en elle, cette frustration. Severus, avec son air indifférent, ça la rend folle. Elle veut bien comprendre, elle veut bien être patiente, mais il faut qu'il arrête de faire l'ignorant, le détaché. C'est comme un affront silencieux, une gifle de nonchalance.
Un élève lève timidement la main. Elle lève les yeux, essaye de ne pas laisser transparaître son exaspération. « Oui, Monsieur Jefferson ? »
« Professeur, euh, on peut avoir plus de temps pour finir ? »
Elle prend une profonde inspiration. « Non, Monsieur Jefferson. Vous devez apprendre vos tables de multiplication. C'est la B.A BA. Sans ça, on ne peut pas avancer. »
Il baisse la main, retourne à ses doigts, sa calculatrice humaine défaillante. Elle pense à lui, encore, toujours. Non pas Jefferson, Severus.
Ce qu'il a dit, ce qu'il n'a pas dit.
Elle jette un coup d'œil à l'horloge. Encore dix minutes. Dix minutes de calvaire avant la fin de ce cours.
Elle a reçu un hibou de Ginny qui lui demande comment elle va s'habiller pour samedi soir. On est mercredi, elle s'en fout. Elle s'en occupera samedi vers 17h. Ce n'est pas quelque chose qui intéresse Hermione ça. Oui, elle avait bien aimé que les garçons se rendent compte qu'elle était une fille en quatrième année. Aujourd'hui, elle s'en fiche. Elle n'a jamais été portée sur l'art. La musique, le cinéma, la peinture, le théâtre, la littérature… Dans les livres, elle cherche la connaissance, pas le style. Autant vous dire qu'elle n'a jamais fini un recueil de poésie.
Elle a essayé de s'intéresser à la mode, un petit peu, pour ne pas être trop en marge. Bon, elle a surtout appris l'histoire de la mode, mais elle n'est pas douée pour associer des pièces. Et elle n'aime pas ça. Hermione, elle aime ce qui est fonctionnel, pratique, commode. Elle ne veut pas que ça lui demande trop d'effort et qu'elle en ait pour son argent. Donc elle mettra, comme à toutes les réceptions depuis trois ans, une robe qu'elle avait achetée pour les mondanités liées à son poste au ministère, avec un châle et la broche de sa mère. Sans doute.
De toute façon, elle n'a pas grand-chose ici. Alors ce sera ça ou un bon vieux jean avec un pull de Noël. Mais si elle faisait ça, elle pourrait être sûre de se retrouver dans la sorcière hebdo, à la rubrique : "Le ridicule ne tue pas". Elle y a déjà été et ça ne l'intéresse pas.
Hermione soupire, regarde l'horloge. L'heure avance à peine, les minutes s'éternisent. Minerva parle, parle, ce n'est pas très intéressant. Elle passe aux heures de colle de la semaine. Elle n'en donne pas. Elle est tranquille de ce côté, elle ne pense pas qu'on n'apprenne de ses erreurs en récurant des chaudrons ou en nettoyant des cages. Et puis, elle gère une option à partir de la troisième année, elle a moins d'élèves. Et ceux qui sont là ont choisi de l'être. L'arithmancie n'est pas du tout populaire. Elle serait professeure de soin aux créatures magiques, là il y aurait plus de débordements, plus d'élèves, plus de dérapages. Elle ne gère qu'une petite poignée de niche. Et surtout des têtes de classe, pas très chahutantes.
Elle jette un œil à Pénélope, elle dessine dans son calepin, une espèce de cheval, peut-être autre chose, Penelope ne dessine pas bien. Ah bah, elle vient de gribouiller sur le cheval. À sa droite, Stern note tout ce que dit Minerva. Pour quoi faire ? Il faut qu'elle arrête d'essayer de comprendre Stern.
Elle lève la tête, Sybill la fixe. Elle la regarde droit dans les yeux. De ses grands yeux globuleux, agrandis par ses loupes de lunettes. Harry trouve qu'elle ressemble à une mante religieuse, à cet instant, elle a l'impression d'être observée par une poule. Sybill penche la tête brusquement, mais la fixe droit dans les yeux. Sybill lui fait peur. Elle se lève d'un coup, tout le monde la regarde.
Sybill, ah la pauvre Sybill, se met à trembler, oui à trembler comme feuille en tempête, sa voix monte, aiguë, saccadée : « Natrix natrix, quand la lune se lèvera, recevra ce que la reine sans tête a laissé. Lampropeltis, gare à toi ! » Et voilà qu'elle se rassoit, secouée de partout, échevelée, un vrai spectacle.
Hermione la regarde, les sourcils froncés, un air dubitatif peint sur son visage. Les paroles de Sybill, elles résonnent, étranges, perturbantes, comme un écho venu de loin, trop loin pour être compris. Minerva, elle, lève un sourcil, perplexe, et elle continue, comme si de rien n'était, habituée.
Mais les mots, ces mots de Sybill, ils tournent, tournent en boucle dans la tête d'Hermione. « Natrix natrix, Lampropeltis...* » Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Mystère, grand mystère ! Elle jette un regard à Severus, le trouve qui lève les yeux au ciel, un regard désabusé, fatigué. Il est persuadé, persudé que si Sybill se donne en spectacle avec ses transes, c'est pour faire l'intéressante, jouer la carte de l'énigmatique.
Et puis, la plupart du temps, personne, absolument personne, ne comprend quoi que ce soit à ce que déblatère cette vieille folle. Hermione, elle, jette un œil autour, Stern réécrit mot pour mot la prophétie de Sybil. Ah, le ridicule, il ne tue pas, sorcière Hebdo à raison.
John étend ses jambes en salle des profs, ces très longues jambes. C'est le problème d'être en histoire de la magie, les copies sont longues et il en donne trop. Il devrait vraiment changer de vocation. Il pense sérieusement à mettre une taille maximum, pas le droit à plus d'un mètre de parchemin. Cette question fait débat au sein des professeurs. Severus pense qu'il y a peu de choses qu'on puisse expliquer de façon concise et efficace quand on sait être concis et efficace. Remus et Penelope sont neutres, Minerva et Hermione catégoriquement contre, car le diable et les subtilités se cachent dans les détails. John trouve qu'elles sont juste susceptibles car si on avait mis cette règle durant leurs études, elles en auraient pâti. John replonge sa plume dans son encrier et raye huit lignes sur la copie de Benjamin. Il est très con ce gamin et, comme beaucoup de gens très cons, il se croit plus intelligent qu'il ne l'est. Il n'a rien compris à la septième guerre des elfes et commence à parler de guerre économique, parce qu'il confond avec la quatrième guerre des lutins. Comme tous les crétins.
John adore son travail mais il aime l'explication, trouver des explications, des raisons. Lire que les sorciers sont la « race » la plus élevée car ils ont dominé les gobelins, c'est un ; stupide. Deux ; pas très original. Et assez surprenant, ce genre de discours, il ne le lit pas dans les copies des Serpentard. Un peu tout de même, mais pas plus que les Gryffondor ou les Poufsouffle.
Non, sérieusement, il faudrait que les Serdaigles arrêtent de se croire les meilleurs de l'univers. Déjà parce que le bleu, c'est banal, que leur aigle, ça fait très IIIe Reich, et qu'en plus, ils se la pètent. John déteste les gens qui se la pètent. John, depuis quatre minutes, déteste tous les Serdaigle. Dans quinze minutes, ce sera les Poufsouffle. C'est chacun son tour. Et c'est très superficiel comme colère, c'est quelque chose de défoulatoire, de misanthropie ciblée et temporaire. Chacun son tour.
Il se gratte la tête, reprend la copie de Benjamin. Les mots dansent devant ses yeux, les phrases s'embrouillent. Il n'a rien compris, ce gamin. Il a écrit pour écrire, sans rien saisir de l'essentiel. John soupire, raye encore quelques lignes. Pourquoi s'entêter à faire de longues dissertations si c'est pour dire des inepties ? Ferme ta gueule Benjamin, vraiment.
Il regarde autour de lui, Severus, impassible, une pile de parchemins devant lui. Remus, un sourire aux lèvres, lisant une lettre de ses élèves.
Soudain Stern entre. Stern, c'est pas un homme gracieux, il n'est pas moche, c'est un vieux beau qui fait trop de manières. John l'a trouvé attirant la première fois qu'il est entré dans le bureau de Minerva, les cheveux gominés, le costume trois pièces. Puis il s'est mis à parler. Et là, plus du tout attirant. Il veut se donner un air qu'il n'a pas, et c'est assez maladroit, mais pas d'une maladresse touchante, ou bien si, mais une maladresse touchant le ridicule. Il en fait trop et pas assez à la fois.
Simeon replace sa veste, avance d'un pas assuré vers Severus. « Dites-moi cher collègue. » dit-il, et ce "cher" sonne terriblement ironique. Simeon, s'il le pouvait, aurait fait virer Severus depuis qu'il est devenu professeur. Il parle dans son dos, crée de fausses rumeurs, très peu crédibles, mais il les crée. « J'ai appris que c'était vous qui remettiez le prix de potion cette année ? »
« Grande déduction, Stern, que voulez-vous ? » répond Severus, sans lever les yeux de ses parchemins.
Remus, un sourire en coin, marmonne en reposant une de ses lettres : « Le prix de potion, peut-être.
— Le jour où je me concentrerai sur mes dons en potion, je suis certain que vous serez ravi de me le remettre, mais…
— Prévenez-moi alors à l'avance, il faudrait que je reçoive un quatrième Boleyn l'année précédant votre exploit, ça demande beaucoup de travail pour moi. »
Stern, exaspéré, soupire : « Oui, oui, mais je me demandais pourquoi cette année encore, je n'avais pas reçu d'invitation. »
Severus lève enfin les yeux, froid, incisif : « Stern ? Êtes-vous journaliste ? Êtes-vous titulaire d'un Boleyn ou en avez-vous déjà été nommé pour en recevoir ? Êtes-vous détenteur d'un Ordre de Merlin ? Êtes-vous membre du Magenmagot ? Faites-vous partie des Aurors ? Ou bien êtes-vous marié à l'une des catégories pré-évoquées ? »
Stern, déstabilisé mais cherchant à garder contenance, répond avec une once de défi dans la voix : « Non, mais j'aurais cru que par fraternité vous y inviteriez vos collègues et amis ? »
John intervient : « Fraternité ? C'est par fraternité que tu as dit à des sixième années que Severus volait de l'argent dans les caisses de Poudlard ? »
Stern, ce poseur, ce faiseur, toujours à se mettre en avant, à chercher à briller, à manipuler. John a du mal avec ce genre de personnes. Trop de superficialité, trop de faux-semblants. Il préfère l'authenticité, même brute, même rugueuse.
Mais l'autre couillon, lui, ne se démonte pas, tente une dernière pirouette : « C'était une plaisanterie, John, tu le sais bien. »
Glacial, Severus, claque : « J'ai adoré le contrôle fiscal qui a suivi, vraiment désopilant. Et maintenant, si tu veux bien, j'ai du travail. »
Stern, piqué au vif, s'efforce de sourire, mais son visage trahit son agacement. Il redresse son costume, lisse une mèche de cheveux, jette un dernier regard autour de lui et quitte la salle d'un pas précipité. La porte claque.
« Il a un culot ce gars… » Remus lance ça, un brin amusé, un brin exaspéré.
Severus, sans lever les yeux, rétorque d'un ton sec : « Les cons, ça osent tout.
— T'as fini ton discours au fait ? »
— Je ne vais pas en faire. Je vais me pointer, remercier, dire le nom du nouveau titulaire et me carapater. »
Remus, moqueur, se rappelle : « Dans mes souvenirs, tu aimais bien faire tes petits effets, "Je peux leur apprendre à mettre la gloire en bouteille et à distiller la grandeur, et même à enfermer la mort dans un flacon."
— Ça, c'est pour impressionner les premières années et les motiver. Les potions, ce n'est pas que de la tambouille.
— Donc pas de grand discours avec des capes qui volent et des portes qui claquent ? »
Severus soupire, l'air las : « Je verrai. Pour l'instant, j'ai la tête prise à autre chose. Les dernières fois, j'ai fait un petit laïus, mais je préfère la sobriété cette fois.
— Surtout qu'avec l'enquête du Chicaneur, Biggins va tout faire pour te faire couler avec lui. »
Surpris Remus répond à John : « Son histoire d'agression sexuelle ? Il ne peut s'en prendre qu'à lui-même. Je ne vois pas où est le problème pour Severus.
John explique, le ton grave : « Biggins est attaqué par le Magenmagot par un projet de loi mené par Severus, et deux mois plus tard, le Chicaneur ressort son affaire d'agression sur collaborateur parlementaire ? Même s'il n'est pas responsable, Biggins va tout faire pour le faire tomber avec lui. »
Le Serpentard avec une pointe de sarcasme marmonne : « Je suis tellement contrôlé par le fisc ou les Aurors depuis dix ans, je veux bien savoir ce qu'il va pouvoir trouver.
— Ce n'est pas une raison pour tendre le bâton. Remets le prix, bois un verre et casse-toi. »
Severus, un sourire ironique aux lèvres : « Oh oui, maître. Tout de suite, maître.
— Tu penses que c'est la rumeur de Stern qui t'a provoqué un contrôle fiscal ? Remus demande, intrigué.
— Non, je pense qu'il a lancé la rumeur et m'a dénoncé au fisc en même temps. Il n'y a que ça qui ait pris. Après, pour ce qu'i trouver… Severus répond, détaché.
— Tu as des petites économies.
— Oui, mais pas dues à de la fraude fiscale. Ce sont surtout des retombées de brevets de potions. Pour le parlement, c'est un comptable qui gère. À moins d'aller chercher des poux au comptable du Magenmagot… Le fisc est déterminé mais pas stupide. »
Remus lève la tête, ses yeux pétillants de curiosité. « Je me suis toujours demandé, mais en tant que Mangemort, vous étiez payé ? » demande-t-il, penché en avant, les coudes sur la table.
Severus, assis droit, les bras croisés, esquisse un sourire amer. « Non. Tu gagnes un réseau, c'est comme les grands complots. Tu gagnes un réseau qui peut te permettre de gagner de l'argent. » Il parle d'une voix posée, mais son regard trahit une amertume profonde.
Remus, toujours curieux, insiste. « Et toi, tu en as récupéré quoi ? » Ses doigts tapotent légèrement la table, un tic nerveux.
« Des ennuis. Beaucoup d'ennuis. » Il détourne le regard, fixant un point invisible sur le mur.
John, adossé à sa chaise, les bras croisés sur la poitrine, intervient, un brin provocateur. « Il doit bien y avoir, dans tout ce tas de racisme et de misère intellectuelle, un moment où tu t'es dit "ah tiens, ça, c'était pas mal". » Son ton est léger, mais ses yeux scrutent Severus avec intensité.
Severus, un sourire ironique aux lèvres, lève légèrement les épaules. « La nourriture. Les banquets. Quand tu conspirais avec des truands aristocrates, ça projetait d'assassiner des gens en mangeant des ortolans et en buvant du thé dans de la porcelaine de Chine ou de France. » Il énonce cela comme une évidence, ses doigts jouant distraitement avec une plume sur la table.
Remus, les sourcils froncés, demande, déçu. « C'est tout ? » Il se penche en avant, comme s'il espérait plus de révélations.
Severus, pensif, regarde ses mains. « Hum, pas avec le premier cercle, je n'en faisais pas encore partie. Mais il est arrivé, fortuitement, que lors de raids durant la première guerre, il y ait de l'argent qu'on se partageait. » Il relève les yeux, ses traits marqués par une fatigue qu'il ne cherche même plus à cacher.
Pour John, c'est clair. Severus, au début, n'était qu'une petite main. La misère, la précarité, ça pousse à tout. Voldemort, en cultivant un attachement sectaire, exploitait cette dynamique : les petites mains croyaient en l'idéologie mais profitaient également des bénéfices matériels. En revanche, le premier cercle, constitué d'aristocrates, adhérait à une idéologie pure et élitiste. Pour eux, voler aurait sali l'idéal de pureté. Les aristocrates du premier cercle, eux, avaient déjà tout. Pas besoin de se salir les mains pour quelques gallions de plus. Une fois dans le premier cercle, Severus a cessé. Le mimétisme de classe, voilà. Il fallait s'adapter, montrer qu'il était des leurs. Les aristocrates, c'est pas des voleurs de bas étage. Severus a suivi le mouvement, pour être accepté. L'élites, ça impose ses règles.
John, remarque les changements subtils dans la posture de Severus. Son dos légèrement plus droit, ses mains crispées. Remus, les yeux pétillants d'intérêt, relance. « Beaucoup ? »
Severus, les lèvres pincées, répond sans détour. « Non. Mais à 19 ans, quand tu vis dans une chambre de bonne et qu'il faut que tu finances ton apprentissage et ta licence moldue, les potions vendues sous le manteau allée des Embrumes, ça ne suffit pas. Et avec dix gallions trouvés sous un matelas, tu as l'impression de devenir Crésus. » Sa voix est empreinte de nostalgie amère, ses mains jouent avec la plume sur la table.
Remus, toujours avide de détails, continue. « Vous partagiez ? »
Severus, un sourire ironique étirant ses lèvres, hoche la tête. « Oh oui, on a des valeurs. Entre truands, les bénéfices, ça se partage. La réclusion, ça s'additionne. » Son ton est tranchant, sarcastique, ses yeux fixés sur Remus avec une intensité glaciale. Mais Remus il bronche pas, il est habitué. Remus, toujours curieux, lance une nouvelle question. « En tout, tu sais combien tu as volé ? » Severus, pensif, joue avec sa plume, puis répond d'un ton détaché. « Oh, c'est vraiment pas le pire de mes délits, mais je dirais peut-être 150 gallions, peut-être. » Il lève les yeux vers Remus, son visage impassible.
John hausse les sourcils, surpris. « Ah ça va, je m'attendais à plus. » Il recule légèrement, s'adossant à sa chaise, un sourire amusé aux lèvres.
Remus acquiesce, un léger sourire ironique sur les lèvres. « Moi aussi. » Il croise les bras sur sa poitrine, un regard presque défiant.
John, qui écoute attentivement, intervient, appuyé sur la table, les mains croisées. « Ça fait 1100 livres à peu près, c'est un salaire minimum moldu. »
Severus hoche la tête. « La vie est moins chère chez les moldus. » Il se redresse, les épaules légèrement tendues.
Remus, les yeux plissés, demande, le ton intrigué. « Et le fisc n'a pas trouvé de trace ? » Il se penche à nouveau en avant, les coudes sur les genoux.
Severus secoue légèrement la tête. « Il n'est pas remonté assez loin, et puis ces 150 gallions, éparpillés sur trois ans, en petite monnaie. Rien n'est passé par Gringotts. C'était surtout pour payer de la nourriture chez les moldus. Difficilement traçable. » Il tapote doucement la table avec ses doigts, comme pour ponctuer ses paroles.
John, admiratif, murmure en se redressant. « Malin. » Il incline légèrement la tête, un sourire approbateur sur le visage.
— Si tu veux de vrais conseils pour détourner de l'argent, contacte Filius, il s'y connaît bien.
Remus sourit. « Je confirme. »
John écarquille les yeux. « Flitwick ? Il détourne de l'argent ? »
Severus hoche la tête. « Oh, nous ne révélerons pas ses larcins, mais disons qu'il connaît tous les rouages. Ce filou ne s'est jamais trop fait embêter par Ombrage grâce à ça. Il lui faisait ses relevés d'imposition et il avait la paix. »
John secoue la tête, perplexe. « Mais c'est l'argent qu'aurait dû percevoir le ministère. Ombrage n'a rien dit ? »
Remus hausse les épaules. « Elle n'y avait pas trop d'intérêt. Filius n'était pas une menace, il n'était pas élevé dans l'ordre officiellement. Pour elle, c'était un pauvre petit gobelin inoffensif. Et je la cite : "ce que Cornelius ignore ne peut pas lui faire de tort". »
John éclate de rire. « Un gobelin bardé de médailles de duel et qui a un Boleyn. »
Severus, avec un sourire en coin. « Oui, bah elle est con, ce n'est pas une nouvelle. »
Remus acquiesce. « Elle ne t'a pas trop embêté toi, Ombrage ? »
Severus, réfléchissant un instant. « Comparativement aux autres, non. Avec Filius, comme nous étions modérément chahutés, on avait un pari, celui qui l'embêtait le plus remportait une jarre remplie de pièces collectées toute l'année avec la meilleure blague à Ombrage. »
John se redresse, curieux. « Tu l'as remportée ? »
Severus, avec un sourire satisfait. « Évidemment, mais j'ai reversé la moitié aux jumeaux Weasley, leur départ était assez innovant et méritait un petit coup de pouce. »
Remus, surpris. « Tu as financé leurs farces et attrapes ? »
Il hausse les épaules. « De toute façon, ils se barraient de Poudlard, ils n'étaient plus mon problème. »
Severus et John font leur ronde. Ils tournent un peu en rond, il n'y a pas grand monde ce soir. Les couloirs sont déserts, le château endormi. Ils marchent dans un silence tranquille, leurs pas résonnant doucement sur les dalles de pierre. John se met à siffler, les mains dans les poches, un air léger sur les lèvres. Severus lui lance un regard réprobateur, les sourcils froncés. John s'en moque, il continue de siffler, insouciant.
C'est finalement un portrait qui lui dit de se taire, un vieil homme austère au visage sévère. John hausse les épaules, un sourire en coin, et leur fait un doigt d'honneur. Severus secoue la tête, un soupir exaspéré.
« T'es fêlé, ils vont rapporter à Minerva, tu vas encore avoir des problèmes. »
John éclate de rire, sans se soucier des conséquences. « Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière. »
Severus, un sourire en coin, rétorque : « Et les conneries, c'est comme les impôts, on finit par les payer.
— Je suis canadien, pas imposable.»
Severus ne peut s'empêcher de sourire.
Ils continuent leur ronde, John sifflotant à nouveau, Severus toujours aussi vigilant. John se perd dans ses pensées, se demande ce que cela fait d'être aussi rigide, aussi sévère que Severus. Il se demande si son collègue a jamais su ce que c'était de lâcher prise, de se laisser aller.
Ils passent devant une série de portraits endormis, leurs occupants ne bougeant pas d'un cil. John regarde Severus du coin de l'œil, essaie de comprendre cet homme complexe, ce mélange de froideur et de loyauté. Severus, droit comme un i, avance d'un pas mesuré, ses yeux scrutant chaque recoin du couloir.
John repense à leur conversation plus de tantôt, à cette humanité qui transparaissait malgré tout. Il voit en Severus un survivant. Lui, il est plus léger, plus insouciant, il connait pas la guerre. C'est d'ailleurs pour ça qu'il l'étudie.
Ils tournent à un coin, arrivent devant la salle commune des Serpentard. Severus s'arrête, écoute un instant, puis reprend sa marche. John le suit, toujours sifflotant, ses pensées vagabondant. Severus, malgré son apparente dureté, est un compagnon de ronde fiable. Ils n'ont pas besoin de beaucoup de mots, la compréhension est tacite. John sait que même si les méthodes diffèrent, l'objectif est le même.
« Je me demandais, comment ça se fait que toi, qui mets la loyauté au-dessus de tout, tu sois agent double. Il n'y a pas que Voldemort que tu aies trahi. Indirectement, tu as trahi la plupart de tes amis. En fait, tous. Lucius, Lily... » John marche à côté de Severus, les mains dans son dos, son regard scrutant les ombres des couloirs.
Il ne répond pas immédiatement, ses yeux fixés droit devant lui. Il sait que la question est légitime, que la réponse est complexe. Il jette un coup d'œil à John, son visage impassible. « Et Regulus en partie. » ajoute-t-il enfin, sa voix basse, presque un murmure.
John hoche la tête, attendant une réponse plus approfondie. « Oui, donc comment ça se fait ? »
S'il avait été tout à fait honnête, Severus aurait répondu que c'est parce que personne ne lui a été qu'il essaie de l'être. Mais c'est trop de franchise pour une conversation. Après tout, la parole a été donnée à l'homme pour déguiser sa pensée. « Le meilleur moyen de renverser un gouvernement, c'est d'en faire partie. Et où il y a un traité, il y a un canif. » Il dit cela d'une voix détachée, presque mécanique.
John secoue la tête, insatisfait. « Ce n'est pas une réponse. »
Severus s'arrête, regarde John droit dans les yeux. « Je n'ai jamais abandonné une secte avant qu'elle ne se fût abandonnée elle-même. »
John fronce les sourcils. « Ce n'est pas la réponse que j'attends. »
Severus serre les dents, son regard devient plus sombre. « Tu n'en auras pas d'autres. » Il reprend sa marche, le dos droit, les pas mesurés.
John soupire, résigné.
Le silence retombe, lourd, seulement troublé par le bruit de leurs pas sur le sol de pierre. John réfléchit à la loyauté, à la trahison, à ce que cela signifie vraiment pour Severus. Il se demande s'il est possible de concilier les deux, de rester loyal tout en jouant un double jeu.
Ils tournent au coin d'un couloir, les portraits murmurent à leur passage.
Severus, lui, reste silencieux, perdu dans ses pensées. Il sait que ses réponses ne satisfont pas John, mais il ne peut offrir plus. Ce n'est pas Remus, ce n'est pas Hermione. John est un homme qui rit de tout, qui ne prend rien au sérieux. Rien n'est grave avec John. Tout n'est que légèreté, leurs conversations. Et Severus suppose que leur relation aussi. John n'est pas un gros bavard. Et on ne sait jamais ce qu'il pense vraiment.
John est insaisissable, un esprit libre qui flotte d'un sujet à l'autre sans jamais s'ancrer. Il parle avec une nonchalance désarmante, comme si le monde était un grand théâtre et lui, un spectateur amusé. Severus trouve cela à la fois fascinant et frustrant. John ne montre jamais ses véritables sentiments, il effleure les sujets, les aborde avec cette légèreté exaspérante.
C'est plus simple avec Rebecca, elle est plus maladroite, elle laisse passer des choses. Et elle les dit, elle en dit même souvent trop. Avec John, c'est différent. Il est comme un miroir déformant, reflétant tout et rien à la fois. Il conte l'histoire comme une suite d'anecdotes, comme s'il ne parlait pas d'êtres vivants. Un gobelin est un elfe, un elfe est un sombral, un sombral est un homme, un homme est une plante verte. Tout ça compte de la même manière pour lui. Alors soit tout compte, ou rien ne compte. Il n'y a aucune hiérarchisation chez John.
John, avec son attitude désinvolte, met Severus mal à l'aise. Il ne sait jamais sur quel pied danser avec lui. Cette insouciance, cette manière de tout aborder avec un sourire, de ne rien prendre au sérieux, déstabilise Severus. Pour lui, la vie est une série de choix graves, de décisions lourdes de conséquences. Comment peut-on vivre avec tant de légèreté ?
Pourtant, malgré cette incompréhension, Severus a une forme de respect pour John. Cette capacité à rester léger, à ne pas se laisser abattre, c'est une force à sa manière. Alors il observe, il écoute, et il essaie de comprendre, même si cela semble parfois hors de portée.
« Je m'interroge sur ta loyauté, vois-tu… » John laisse sa phrase en suspend dans l'air.
Severus soupire, agacé, les sourcils froncés. « Oh, quelle originalité… »
John ne se laisse pas démonter, un sourire en coin, les mains toujours dans les poches. « Car j'en aurais besoin, vois-tu… »
Severus lève les yeux au ciel, sarcastique, croisant les bras. « Je te préviens, je ne me tatouerai pas pour toi. Les tatouages, pourquoi pas mais seulement quand c'est voulu. »
John éclate de rire, ses yeux pétillant de malice. Il se penche légèrement en avant, accentuant la plaisanterie. « Puisque tu en parles, j'apprécierais que tu inscrives sur ton autre bras les dates de l'indépendance canadienne. Puis O Canadaaaa… »
Severus lui lance un regard noir, ses lèvres se pincent. John continue de rire, insouciant, aimant provoquer Severus, le faire sortir de ses gonds, même si c'est juste un peu. C'est un jeu pour lui, un moyen de briser cette façade de glace.
« Si tu essaies de réveiller le château, continue… » Severus avertit, sa voix grave résonnant dans le couloir désert.
John hausse les épaules, toujours souriant, et jette un coup d'œil autour de lui. Il aime cette dynamique entre eux, ce mélange de sérieux et de légèreté. Severus, avec son attitude rigide, son besoin de contrôle, et lui, avec sa nonchalance. Il sait que Severus ne le comprend pas, et c'est ce qui rend leur relation intéressante.
« Et surtout, j'aimerais que tu sois mon témoin. » John laisse traîner la phrase, un sourire énigmatique aux lèvres.
Severus arque un sourcil, sceptique. « Témoin de quoi ? Si Minerva te chope à hurler dans le château, je te laisse seul avec cette furie. »
John rit doucement, secouant la tête. « Bon, bah, je demanderai à Remus d'être mon témoin de mariage. »
Severus, surpris, arrête de marcher un instant, le fixant. « Mariage ? »
John continue de marcher, les épaules détendues. « Oui, mariage. Je me marie. Avec Rebecca. Ça fait six mois que tu le sais. »
Severus reprend sa marche, le regard perçant, tentant de déceler la vérité derrière les paroles légères de John. « Et tu as pensé à tout ça en criant dans les couloirs ? » demande-t-il, une pointe d'ironie dans la voix.
John hausse les épaules, un sourire malicieux toujours présent. « Pourquoi pas ? Je n'ai que des amies femmes, à part toi et Neville. »
Severus secoue la tête, mi-amusé, mi-agacé. « Eh bien, prends Londubat. »
John rit doucement. « Primo : Déjà fait, mais pour un mariage magique, il faut deux témoins masculins. Deuxio : ça fait plusieurs semaines qu'il attend que je te demande. Troizio : je suis beaucoup trop heureux que vous deviez travailler ensemble pour m'organiser un enterrement de jeune sorcier.
Severus lève les yeux au ciel, exaspéré. « Quand bien même j'accepterais, ce qui n'est pas le cas, tu as 56 ans. Tu n'es pas un jeune sorcier. »
— Je suis jeune si je le décide. Et l'espérance de vie d'un sorcier est de 125 ans en moyenne. Au Canada. Chez vous, ça tombe comme des mouches car vous vous faites la guerre tout le temps. Mais chez nous, c'est 125 ans. Ce qui fait que, rapporté à un moldu, c'est comme si j'avais 33 ans et des brouettes… »
Severus, sceptique, croise les bras. « Avec ton calcul, je n'aurais même pas trente ans. Bonjour la fiabilité. »
John rit plus fort, un éclat de malice dans les yeux. « Tu t'en donnerais 240 si on t'écoutait. Tu n'es même pas à la moitié de ta vie que tu réfléchis comme un croulant. Souris, montre tes belles dents, mets des jeans, couche, tu es jeune, et tu es mon jeune témoin, tout fringant. »
Severus ne peut s'empêcher de sourire légèrement, malgré lui. John a cette capacité à le faire sortir de sa zone de confort, à le pousser à voir les choses sous un angle différent. Ils continuent de marcher.
« Je n'ai pas dit que j'acceptais.
— Tu n'as pas dit non plus que tu refusais. »
John sourit plus largement, il a gagné.
Elle est passée il y a trois heures, s'absorbant dans Passion Potion. Ça faisait bien deux mois qu'elle n'avait pas franchi le seuil pour ça. L'atmosphère, lourde, bizarre. Severus, lui, ne capte pas ce qu'elle trame. Quand elle avance d'un pas vers lui, paf, elle en recule de deux. C'est comme si elle jouait à tester les frontières, à tâter le terrain, et ça, il ne peut pas supporter. Il déteste être mis à l'épreuve, alors il reste planté là, immobile. Pourtant, au fond, il brûlerait de faire ces pas. Mais faut bien que quelqu'un garde la tête froide. Il ne peut pas se permettre de faire un pas sans penser aux conséquences. Il les connaît trop bien, les conséquences.
Il oublie trop souvent qu'Hermione, c'est une Gryffondor pure et dure, même si elle tente de le cacher. Elle reste bien trop audacieuse pour son bien à lui. Ah, il a vu comment elle s'est installée à côté de lui. Il n'est pas aveugle. Il donnerait tout pour céder. Mais Hermione a trente ans, elle cherche rien de sérieux, et certainement pas avec lui. Il est juste là pour passer le temps, avant qu'elle retourne avec Nott, ou qu'elle en trouve un autre. Il ne doit pas flancher.
Il ne pense pas qu'elle joue avec lui de manière intentionnelle, elle est bien trop sincère pour ça. Mais ce n'est pas parce que c'est inconscient que ça n'existe pas réellement. Severus, plongé dans ses pensées, ressasse chaque geste, chaque mot échangé. Hermione, avec ses questions, ses regards en coin, semble chercher quelque chose chez lui. Mais quoi ? Une approbation, une reconnaissance ? Il n'en sait rien. Et ça le perturbe.
La soirée s'étire, le silence du château l'enveloppe. Severus se demande si Hermione mesure seulement à quel point elle le trouble. Elle, avec son énergie, son obstination, sa curiosité sans borne. Lui, avec ses retenues, ses blessures, ses défenses dressées hautes et solides. Il se lève, fait les cent pas devant sa bouilloire. Il réfléchit à tout ça, à ce qu'il pourrait dire ou faire. Mais chaque option semble mener à une impasse. Il n'aime pas cette incertitude, cette vulnérabilité. Il préfère le contrôle, la maîtrise. Mais Hermione, elle a ce don de tout chambouler, de tout remettre en question.
Il est là, devant la fenêtre, scrutant le parc englouti dans la nuit. Il doit tenir bon, ne pas succomber à cette tentation qui le harcèle. Pour son bien à lui, pour leur bien à tous les deux. Cette part de Severus, paternaliste, qui agit et pense pour tout le reste de son être, parce que là, en cet instant précis, il ne sait que faire de cette Hermione, allongée, endormie sur son canapé. Oh, ce n'est pas la première fois qu'elle s'y endort. Mais cette fois, c'est différent, c'est plus dur de la laisser là, sur ce canapé. Severus déplace une tasse de tisane et quelques magazines pour s'asseoir sur la table basse. Les coudes sur les genoux, la tête entre les mains. Il l'observe dormir, tranquille, belle.
Il pense, si seulement il pouvait lâcher prise, peut-être qu'elle accepterait de se réveiller à ses côtés le matin. Si seulement il pouvait, il remettrait cette mèche rebelle qui barre son visage. Tant de "si". Il lutte avec ces pensées, ces envies. Chaque fois, il désire la transporter dans son lit, prendre le canapé lui-même. Mais chaque fois, il y a un pas à franchir. Est-il prêt à le faire ?
Car Hermione, elle, n'a jamais franchi le seuil de sa chambre. Personne ne pénètre dans cet espace, sauf Ruby une fois, mais il n'avait pas le choix, cloué au lit, physiquement incapable de se lever. C'était il y a neuf ans. Depuis, nul autre que lui n'y entre, même pas les elfes pour faire le ménage. C'est lui qui s'en charge.
Il soupire, ses doigts massant ses tempes. La tentation est forte, immense, de la prendre dans ses bras, de la déposer doucement sur son lit, de sentir cette proximité qu'il s'interdit constamment. Il observe les traits détendus d'Hermione, son souffle régulier. Elle semble si paisible, si loin de ses propres tumultes.
Il se redresse, les yeux fixés sur Hermione. Il ne peut pas, il ne doit pas. Les conséquences seraient trop lourdes, trop douloureuses. Il ne veut pas risquer de briser ce fragile équilibre.
Il se redresse enfin, déroulant lentement chaque muscle pour ne pas troubler son sommeil. Avec délicatesse, il ajuste la couverture sur elle, s'assurant qu'elle reste au chaud. Puis, il se dirige vers sa chambre, lançant un dernier regard à Hermione, paisible sur le canapé. Severus entre dans sa chambre, referme doucement la porte derrière lui, isolant ses tourments de ses responsabilités.
Rapidement, il enfile sa chemise de pyjama, retire son pantalon, ses chaussures, ses chaussettes avec une mécanique presque automatique. Devant le miroir, il se brosse les dents avec vigueur, une énergie presque violente. Lorsqu'il crache le dentifrice, un filet de sang se mêle à la pâte blanche et à sa bave dans l'évier. Il s'allonge ensuite sur son lit, les yeux fixés au plafond où les ombres dansent en silence. Les pensées tourbillonnent dans son esprit, un chaos silencieux, mais au fond de lui, il sait qu'il a fait le bon choix.
Demain, ils continueront, comme toujours, avec ce non-dit pesant entre eux, cette tension palpable. Mais ce soir, il a choisi la prudence, le respect de leurs limites mutuelles. Severus ferme les yeux.
« Oh et puis merde. » Il se lève, décidé, et part chercher Hermione. Merde. Il avance dans son salon, elle dort toujours, paisiblement. Comment va-t-il s'y prendre ? Il retire doucement la couverture, grimace du nez. Il est plus habitué au Levicorpus, mais il doute qu'elle apprécie d'être suspendue par les pieds. Il réfléchit une minute. Il glisse une main derrière ses genoux, une autre dans son dos. Ça, ce sont des zones « acceptables », rien de déplacé. Il la soulève, elle n'est pas bien lourde, il faut dire qu'elle n'est pas bien grande non plus.
Elle grimace, remue légèrement. Severus se fige. Est-ce qu'il doit la lâcher ? Il ne peut pas la lâcher par terre. Il ne bouge pas, son cœur battant plus vite. « Qu'est-ce qu'tu fais ? » elle marmonne, encore à moitié endormie. Est-ce qu'elle est pleinement réveillée ? Il ne peut pas la lâcher ici et se réfugier dans sa chambre. Il attend.
« 'Vrus ? » Elle a toujours les yeux fermés mais elle semble consciente. « Je vais t'installer à un endroit plus confortable. » Il lève les yeux et regarde dans le vide, attendant une réponse qui ne vient pas. La tête d'Hermione se déplace contre son bras. Il attend, immobile. Ça dure peut-être une minute, une éternité pour ses bras qui commencent à tirer.
Il se déplace sans vraiment lever les jambes, faisant le moindre mouvement brusque. Le temps qu'il se déplace, la seule chose qu'on entend, c'est le bruit de la paume des pieds de Severus contre le parquet. Il avance lentement, chaque pas mesuré, s'efforçant de ne pas la réveiller complètement. La chaleur de son corps contre le sien est troublante, il faut que ça s'arrête vite. Il arrive enfin devant la porte de sa chambre.
Il pousse la porte avec précaution d'un coup de pied, entre dans la pièce sombre. Il s'approche du lit, se penche doucement pour déposer Hermione sur les draps frais. Elle se recroqueville légèrement, ses traits se détendent à nouveau.
Severus la regarde, ses pensées tournent. Il ajuste la couverture sur elle. Il recule, observe cette scène presque irréelle. Hermione, dans son lit, dans sa chambre. Une partie de lui veut rester. Il sort de la chambre.
« C'est fini les conneries, oui ? » se dit il en s'installant sur le canapé.
* Je vous laisse chercher
