Bonjour à toutes !
Comme promis il y a quelques jours, à l'occasion du début de mes vacances, voici un nouvel OS sur notre couple préféré ! =)
Une petite histoire qui me trottait dans la tête depuis quelques temps, et qui rappellera à certains les longues dissertations que l'on faisait au lycée, ainsi que la question inévitable que l'on se posait après toutes ces pages noircies à l'encre : est-ce que le prof lit vraiment tout ça ? Je trouvais que le sujet se transposait très bien à ce couple ! La romance y est très très légère, tout juste suggérée, navrée pour les amateurs de baisers et d'étreintes enflammées ! x)
Bonne lecture à vous, j'attends vos avis à la fin de cet OS ! ;)
- Je suis certain que non !
- Et moi je t'assure que si !
- Attend Hermione, soyons sérieux deux minutes. Nous sommes une cinquantaine d'élèves par année, et il y a sept années. Huit avec la notre, en plus ! Tu imagines un peu ? S'ils devaient réellement lire tout ceci !?
- Mais enfin Ron ce sont des professeurs ! Évidemment qu'ils lisent tout ceci ! Harry explique-lui toi, moi je n'en peux plus !
Le pauvre Harry, qui se remettait déjà tant bien que mal de sa semaine de cours, des deux heures de révisions que venait de leur imposer leur meilleure amie, à Ron et à lui, et regrettait déjà de devoir se lever aux aurores le lendemain pour son entraînement de Quidditch, avait lancé un regard désemparé à la meilleure amie en question, navré de ne pouvoir lui apporter le soutien qu'elle lui demandait.
Il détestait se retrouver ainsi mêlé aux querelles de ses deux amis, et même s'il devait avouer qu'Hermione avait souvent raison, eh bien…
- Désolé Hermione mais… je dois dire que je suis plutôt de l'avis de Ron, pour le coup.
- Ah ! Merci Harry ! Depuis le temps que je m'évertue à le lui répéter ! S'était exclamé le rouquin, victorieux.
Le Survivant, qui avait survécu au plus maléfique mage noir de l'histoire sorcière, s'était ratatiné sous le regard incandescent de la petite brunette, et d'aucun aurait pensé, en le voyant redouter ainsi le courroux de cette sorcière pourtant pas bien impressionnante, que cela avait été une chance qu'il ait dû affronter Lord Voldemort et non Hermione Granger lors de la bataille finale, quelques mois plus tôt. Nul doute que l'issue en aurait été bien différente, le cas échéant.
- D'accord. Donc toi aussi tu penses que toute l'équipe pédagogique de Poudlard est payée à ne rien faire, en fait ? Avait-elle rétorqué, sarcastique.
Harry avait retenu une grimace. Quand Hermione commençait à jouer de l'ironie, ce n'était jamais bon signe.
- Non, bien-sûr que non, avait-il tenté dans une vaine tentative de calmer le jeu. C'est juste que… Ron a raison. Huit fois cinquante, cela fait un sacré paquet de…
- Quatre-cent copies ! Avait claironné le cadet Weasley, victorieux, ayant profité du temps de parole de son meilleur ami pour réaliser le calcul, pourtant pas compliqué.
Hermione lui avait jeté un regard polaire, histoire de lui faire comprendre ce qu'elle pensait de ses prouesses en mathématiques.
- Cela fait trois cent quatre-vingt-quatorze, pour être exacte, avait-elle répliqué, acide. Quoi, vous n'avez jamais eu la curiosité de compter combien d'élèves nous sommes ici ? Avait-elle demandé en avisant le regard éberlué de ses deux comparses.
Elle avait soupiré, sidérée de ce manque flagrant d'intérêt pour tout ce qui concernait la vie au château. La preuve ! Cela faisait presque vingt minutes qu'ils étaient sortis de la Grande Salle, et ce débat entamé pendant le dîner n'était toujours pas fini.
- Peu importe, cela fait quand même beaucoup trop ! Tu imagines un peu la quantité de parchemin que cela représente à lire, si chaque professeur donnait même ne serait-ce que vingt centimètres de devoir à rendre à chaque élève ?
- Tout le monde n'a pas la même phobie de la lecture que toi, Ron ! Et ce n'est clairement pas une raison pour rendre moins que ce qui est demandé !
Harry avait observé la sorcière tempêter face à eux, près du feu de cheminée de la salle commune de Gryffondor, en songeant avec envie à son lit qui l'attendait, et dans lequel il avait passé bien trop peu de temps la nuit précédente, et en passerait aussi peu la nuit suivante. Pourquoi diable avait-il fallu qu'il fasse des pieds et des mains pour réserver le terrain de Quidditch le lendemain, déjà ? Ah, oui, pour mettre Malfoy hors de lui !
- Hermione, ne te fâche pas, avait-il donc encore tenté, dans l'espoir de pouvoir rejoindre son dortoir plus rapidement. On dit juste qu'il est probable qu'ils ne lisent pas réellement tout ce que l'on écrit. Cela n'a rien de personnel, et je suis certain que cela ne les empêche pas d'apprécier ton travail à sa juste valeur.
Voilà, ça c'était bien trouvé. Félicitations, Harry ! De la tempérance, un appel au calme, une pointe de relativisme, et un joli compliment en prime ! Dis donc, il s'améliorait vraiment dans l'art et la manière de parler aux filles, et de désamorcer la grenade Hermione Granger, qui semblait définitivement encline à se plonger corps et âme dans ses cours, à présent que la guerre était bel et bien terminée. Non pas que cela le dérangeait, au passage. Disons simplement qu'il aurait préféré qu'elle ne les incluse pas dans sa course effrénée à la perfection scolaire.
Face à lui, la jeune femme avait froncé les sourcils, passablement agacée de s'entendre dire qu'elle ne devait pas se fâcher. Puis elle avait affiché l'expression sceptique de celle qui connaissait par cœur les méthodes de ses amis pour tenter de l'amadouer, avant de rougir malgré elle devant les louanges de son ami. Elle s'était radoucie. Un peu.
- De toute façon, je ne vous crois pas, avait-elle néanmoins asséné avec superbe. Vous êtes tous les deux parfaitement bien placés pour savoir qu'ils corrigent les fautes d'orthographe, non ? C'est bien qu'ils lisent ce que vous écrivez !
Harry avait retenu un soupir, exaspéré, et avait été tenté d'acquiescer dans la seule idée d'avoir enfin la paix et de pouvoir aller se coucher, mais c'était sans compter Ron et son manque évident de pragmatisme. Cela ne servait à rien de tenir tête à Hermione quand elle était convaincue d'avoir raison. Surtout lorsque cela concernait les résultats scolaires.
- Tu parles, ils ont tous des plumes Lis-Tes-Ratures, avait marmonné le rouquin.
- Ron ! Vraiment, tu les prends pour des fainéants ou quoi ? S'était insurgée la brunette, et Harry avait eu envie de pleurer à l'idée de ses heures de sommeil qui s'amenuisaient.
- S'il vous plaît, est-ce qu'on ne pourrait pas remettre cette conversation à demain ? avait-il suggéré d'une voix lasse.
Peine perdue ! Ses deux meilleurs amis, qui avaient fait une brève trêve dans leurs chamailleries incessantes durant les quelques mois _ que dire ! Semaines ! _ où ils étaient sortis ensemble durant l'été suivant la bataille finale, avaient repris de plus belle leurs querelles depuis leur rupture à l'amiable. Tant et si bien que Harry en venait à se demander si le réel motif de leur rupture n'était pas celui-ci. Peut être que cela leur manquait trop de se prendre ainsi la tête pour rien, et d'empêcher leur meilleur ami d'aller dormir alors que ses paupières se fermaient presque toutes seules ? Peut-être se vengeaient-ils de toutes les heures de sommeil qu'il leur avait fait perdre, pendant toutes ces années à les traîner avec lui dans ses aventures périlleuses ?
- Bon écoute Hermione tu n'as qu'à faire le test ! Avait finalement explosé le brun, exaspéré.
Ses deux amis s'étaient tus soudainement pour se tourner vers lui comme un seul homme, sidérés.
- Pardon ?
Harry avait rougi, un peu embarrassé de s'être ainsi emporté. Mais c'est qu'il était fatigué, lui, bon sang ! On voyait bien qu'Hermione ne connaissait rien au Quidditch, pour se montrer ainsi sans pitié une veille d'entraînement !
- Eh bien, oui…, avait-il repris d'une voix moins assurée à présent qu'elle le fixait avec un regard qui n'avait rien à envié à celui de Minerva McGonagall dans ses meilleurs jours. Après tout, c'est toi qui rends toujours le plus de centimètres de parchemin. Tu n'as qu'à glisser un mot ou une phrase qui n'a rien à faire dans le texte, et nous verrons s'ils le remarquent.
- Tu rigoles j'espère ? Avait vivement demandé la jeune femme après une seconde de silence stupéfait.
- Eh bien, je…
- Mais non, c'est brillant comme idée ! S'était exclamé Ron, soudain exalté. Cela sera l'occasion de savoir qui a raison !
Hermione avait froncé les sourcils et secoué la tête, clairement réticente. De toute évidence, elle n'était pas prête à mettre en péril la série de O qu'elle avait commencée en début d'année pour s'assurer du bien fondé du professionnalisme de leurs professeurs.
- Pourquoi moi, et pas vous, déjà ? Vous seriez plus à même d'écrire des bêtises dans vos…
- Justement, avait repris Harry avec entrain, décidant de jouer le tout pour le tout.
Son lit, par Merlin ! Il voulait son lit !
- Nous écrivons tellement de bêtises que cela passerait inaperçu. Alors que toi, nul doute que cela les interpellera suffisamment pour qu'ils y fassent attention !
- Oui et puis, comme tu n'as toujours que des O, il y a de fortes chances pour que, précisément, ce soit tes copies qu'ils lisent le moins, avait ajouté Ron, enfonçant le clou dans l'orgueil déjà bien entamé de la jeune femme. Comme ils savent que tu rends toujours des devoirs parfaits, ils ne doivent même plus prendre la peine de les lire !
Pour un peu, Harry aurait embrassé le rouquin ! L'argument avait fait mouche, et il avait vu l'hésitation d'Hermione prendre le chemin inverse, en faveur d'une potentielle possibilité de se prêter à l'expérience.
- Écoute, tu n'as qu'à essayer sur un devoir simple, sans trop de risque, pour commencer. Avec Binn's, par exemple. S'il y en a bien un qui ne doit pas prendre la peine de lire nos copies, c'est bien lui !
Lorsque Hermione avait de nouveau relevé la tête vers eux, après avoir pris quelques secondes de réflexion en contemplant le feu qui brûlait dans l'âtre de la cheminée, elle avait enfin eu cette expression déterminée qu'Harry connaissait bien. Celle qui signifiait qu'il allait enfin pouvoir aller profiter de la douceur de ses draps !
- D'accord. Je testerai sur le prochain devoir d'histoire.
OoOoO
Lorsque Hermione était rentrée dans la salle commune avec son devoir de métamorphose, quelques semaines plus tard, elle était partagée entre l'envie de hurler et celle, plus pernicieuse, de pleurer. Pour la première fois de sa vie, elle avait presque été déçue d'obtenir un Optimal, c'était dire ! Déçue aussi de Minerva McGonagall, qu'elle considérait pourtant depuis des années comme un modèle de vertu et de professionnalisme, une sorcière exemplaire, talentueuse et rigoureuse, et… et qui avait annoté sa copie d'un très gentil « Contenu pertinent et syntaxe fluide, comme toujours. Continuez ainsi ».
Dépitée, la Gryffondor avait rangé sa copie avec ses autres devoirs de l'année en cours, dans son bureau. Avec amertume, elle avait considéré les rouleaux de parchemin qui s'entassaient là. Les devoirs des dernières semaines. Tous surmontés d'un Optimal et d'une mention élogieuse sur la qualité de son travail, la justesse de sa syntaxe ou la pertinence de ses réflexions. Des années durant ces compliments l'avaient gonflée de fierté, d'orgueil et d'un sentiment d'accomplissement sans précédent.
A présent qu'elle savait ce qu'il en était réellement, il n'y avait plus que déception, découragement et sentiment de trahison.
Car dans chacun de ces devoirs, elle avait glissé un mot, voire même une phrase entière, pour les derniers d'entre eux, qui n'avait rien à voir avec le sujet demandé.
Et aucun de ses professeurs ne l'avait remarqué.
Autant dire que Harry et Ron avaient bien ri de sa mine déconfite lorsque, à l'issue de sa première expérience avec un devoir du professeur Binn's, quelques semaines plus tôt, l'ectoplasme lui avait rendu sa copie sans un mot. Elle avait mis cela sur le compte de l'état de décrépitude avancé du fantôme, qui après tout n'était guère plus capable de sentiment ou de réaction humaine depuis longtemps. Elle avait donc réitéré l'expérience, quelques jours plus tard, avec un devoir de botanique. Là encore sans réaction.
Face aux remarques moqueuses de ses deux amis, elle avait persévéré, s'aventurant à glisser quelques mots dissonants dans ses copies d'arithmancie, d'astronomie, et même de DCFM. En vain. Personne n'avait rien remarqué.
Même Minerva McGonagall, professeur parmi les professeurs, n'avait pas relevé.
Hermione avait senti tout un monde d'admiration et de respect s'effondrer.
Quelques semaines après le début de cette expérience pour la moins décevante, il ne restait qu'une seule matière où elle n'avait pas osé tenter la supercherie. A dire vrai, elle avait espéré ne pas en arriver à cette extrémité pour prouver à Harry et à Ron qu'ils avaient tord. C'est que, elle avait toujours mis un point d'honneur à briller dans cette spécialité plus que dans une autre. Par fierté, des années plus tôt, histoire de montrer à cet enseignant qu'elle était capable malgré les remarques acerbes dont il l'accablait constamment. Et puis, plus récemment, depuis quelques mois… parce qu'elle ne voulait pas le décevoir. Elle rêvait même de l'impressionner, même si elle s'était fait une raison sur ce point.
« Toutes ces années à perdre ton temps à peaufiner tes devoirs alors que tu aurais pu flâner avec nous ! ».
Hermione avait serré les poings et la mâchoire au souvenir de cette remarque moqueuse qu'avait prononcée Ron juste après le dernier cours de métamorphose, en début d'après midi. Harry avait fait preuve de plus de tact, et avait simplement esquissé un sourire timide, quand son meilleur ami ne s'était pas privé de rire franchement de l'air atterré de la jeune femme.
Nom d'un chat noir, elle n'allait quand même pas laisser Ron avoir le dernier mot, si ? Briser tous ses rêves d'une vie régie par la rigueur, le travail et la droiture d'esprit ?!
Non. Définitivement non.
Avec une grande inspiration, Hermione s'était assise à son bureau et avait sorti d'un tiroir le rouleau de parchemin déjà bien rempli, qu'elle devait rendre pour la semaine suivante au professeur le plus strict et le plus taciturne que Poudlard avait jamais compté.
Aux grands maux les grands remèdes, par Gryffondor !
Tous ses espoirs reposaient sur lui, et alors qu'elle réfléchissait à ce qu'elle allait bien pouvoir écrire, elle avait réalisé qu'elle redoutait autant qu'il lise les quelques mots qu'elle ajouterait, que l'inverse, car alors elle ne doutait pas que l'admiration et, oserait-elle le dire, le béguin qu'elle lui vouait, s'estomperaient aussi tôt. Son admiration pour Minerva venait déjà de baisser drastiquement en quelques heures à peine. Et, concernant Severus Rogue, car c'était bien de lui dont il s'agissait, il y avait effectivement béguin, malheureusement.
Elle n'aurait su dire tout à fait quand, ni comment ou pourquoi, mais elle se trouvait tout à fait attirée par cet homme. Il avait un magnétisme tout à fait envoûtant, une fois qu'on le connaissait suffisamment pour ne plus en être terrifiée, ce qui était son cas, après toutes ces années à le côtoyer en classe. Et puis, les révélations le concernant suite à la bataille finale avaient changé son opinion concernant ce sorcier acariâtre et acerbe. Elle le voyait dorénavant plus humain, plus sensible, doté de valeurs dont elle ne l'aurait jamais cru pourvu. Ajoutée à cela sa grande intelligence, qui constituait, aux yeux de la jeune intellectuelle qu'elle était, sa qualité première, et Severus Rogue lui apparaissait comme un homme tout à fait désirable.
Bref, elle avait le béguin pour le directeur de Serpentard. Pour ce regard sombre et intransigeant, vif et intelligent, encadré par ces mèches sombres dans lesquelles, au paroxysme de ses rêveries, quand il lui arrivait de laisser traîner un œil sur lui lorsqu'elle finissait un devoir avant les autres, elle rêvait de glisser ses doigts. Il fallait dire, pour sa défense, que depuis la fin du conflit qui avait déchiré le monde sorcier, l'alchimiste avait cessé de survivre plus que de vivre. Sans aller jusqu'à dire qu'il faisait attention à lui, ce changement de nuance, bien que subtil, dans son mode de vie, faisait toute la différence. Et suffisait à accélérer le souffle d'Hermione quand il se penchait sur ses potions pour en vérifier la réalisation.
Que dire alors, qui ne soit pas ridicule si jamais il avait eu le malheur de le lire, mais de suffisamment dissonant dans sa rédaction pour attirer son attention ? Les idées tourbillonnaient déjà dans l'esprit de la demoiselle, qui les traitait et les rejetait les unes après les autres. Celle, excitante et persistance, de noter une petite allusion à ce qu'elle ressentait pour lui, ne cessait de revenir en boucle. Elle l'avait ignorée plusieurs fois, s'empêchant de réellement l'envisager. Mais son inconscient persistait, revenant à la charge avec chaque fois de nouveaux arguments pour appuyer son idée.
Il y avait peu de chance qu'il la lise, au vu du reste de l'expérience. Et puis, ça n'était pas ridicule. Au fond, cela serait même flatteur pour lui, non ? Et si jamais il la lisait, il y avait peut-être une chance, même infime, pour qu'il la remarque enfin… Si ce n'était pas le cas, elle pourrait toujours mettre cette bévue sur le compte d'un moment d'égarement, ou d'une poussée d'hormones incontrôlable, ce qui ne serait pas moins crédible qu'une autre excuse. Avec la présence au château des huitièmes années, jamais les professeurs n'avaient eu autant à faire la chasse aux couples que depuis le début de l'année scolaire.
Prenant une profonde inspiration, la main tremblante, choisissant ses mots avec soin, Hermione s'était emparée de sa plume.
OoOoO
L'attente avait été interminable et pourtant, Severus Rogue était, de tous les enseignants du château, celui qui corrigeait le plus vite les innombrables rouleaux de parchemin qu'il réclamait sans cesse à ses victimes _ ou étudiants. Jamais, depuis huit ans qu'elle fréquentait sa salle de classe, Hermione n'avait trouvé si longs les jours qui avaient séparé le ramassage des devoirs de leur rendu, corrigés et annotés.
Quoique, à la réflexion, long n'était peut-être pas le bon terme. Lorsque, une semaine plus tard, elle avait aperçu le pile de rouleaux de parchemins sur le bureau du directeur de Serpentard, l'air lui avait manqué, et sa gorge s'était asséchée tout à fait. « Déjà ? » avait-elle songé, soudain en proie à une angoisse saisissante.
Rogue avait, comme à son habitude, dispensé son cours avant de rendre les devoirs, histoire de s'épargner les lamentations et les pleurs qui, même en huitième année, submergeaient parfois les élèves abonnés aux T et aux D, ou victimes de ses commentaires lapidaires. Cette fois n'avait pas fait exception, si bien qu'Hermione avait eu à endurer deux heures de cours dans une attente insoutenable, mêlée d'une appréhension qui l'avait fait se raidir chaque fois que le Serpentard était passé près d'elle dans les rangs, ou que son regard noir d'encre s'était posé sur elle.
Toutefois, elle avait dû se rendre à l'évidence, une heure après que le cours ait commencé. L'attitude du professeur de potions n'avait pas changé. Il avait dispensé son cours théorique sans se montrer ni plus ni moins sarcastique qu'à son habitude, avait refusé de répéter aux élèves qui étaient trop longs à copier sa dictée, et avait même accablé Hermione d'un commentaire sarcastique quand elle n'avait pas levé la main à l'une de ses questions, trop angoissée à l'idée de prendre la parole alors qu'il avait peut-être lu ce qu'elle avait écrit dans son devoir.
- Personne pour me dire de quel organe est issu le liquide explosif chez les éruptifs ?
Il avait balayé du regard la dizaine d'étudiants assis devant lui, puisque parmi le peu de huitièmes années que comptait leur promotion, et la poignée d'élèves que le maître des potions avait acceptée de reprendre en cours, ils n'étaient guère plus que cela à fréquenter encore sa salle de classe.
Comme personne ne se portait volontaire pour répondre, le regard du Serpentard avait, par défaut, glissé jusqu'à elle. Hermione s'était fait violence pour ne pas se ratatiner sous son regard onyx et avait baissé les yeux en rougissant.
- Notre Miss-Je-Sais-Tout internationale aurait-elle perdu sa langue ? A moins que vous ne souffriez d'une tendinite du bras, après toutes ces années à vous entêter à vouloir avoir réponse à tout, avait-il dit de son habituelle voix tranchante.
- Non je…, avait-elle répondu en rougissant, honteuse. Il est sécrété par une glande holocrine située à la base de…
- ...De la corne, et reliée directement à celle-ci par un canal à sens unique permettant aux éruptifs de remplir une cible avec la substance. Il aurait été judicieux de répondre à la question au moment où elle a été posée, Miss Granger, et non de façon intempestive sans même demander à prendre la parole. Vous pourrez prévenir vos camarades que votre maison perdra cinq points à cause de votre impertinence.
Si Hermione s'était recroquevillée sur sa chaise, dépitée de cette injustice flagrante et de la mauvaise foi évidence de son professeur, au moins cela l'avait-il rassurée dans le fait qu'il n'avait sans doute pas lu sa copie jusqu'au bout. Severus Rogue était fidèle à lui-même. Partial, déloyal et désobligeant. Nul doute qu'il n'avait pas remarqué la phrase qu'elle avait glissé dans son devoir.
C'est un peu plus assurée qu'elle avait donc passé la fin du cours, prenant cette fois le parti de lever la main pour répondre aux questions suivantes, mais le Serpentard l'avait ignorée, évidemment, et ne lui avait jamais donné l'occasion d'apporter une bonne réponse.
Par Gryffondor, comment diable pouvait-elle avoir développé un quelconque béguin pour un homme aussi exaspérant ?
Puis, quelques minutes avant la sonnerie libérant les élèves, il avait regagné son bureau, pour s'emparer du premier rouleau de parchemin sur la pile posée là, et avait commencé la distribution des devoirs récupérés la semaine précédente. Hermione avait retenu son souffle, même si elle s'était convaincue que, comme tous ses collègues avant lui, il n'avait rien remarqué.
Il n'y avait que dix noms, et Hermione s'était fait la réflexion que ce n'était vraiment pas de chance pour elle que sa copie soit dans les trois dernières à être distribuée. Pas de chance… Ou une coïncidence vraiment étonnante, vue les circonstances. La Gryffondor avait senti ses mains se mettre à trembler sous son pupitre.
Trois copies, donc. Théodore Nott avait eu un E, ce qui ne l'avait guère surprise. Théodore avait toujours été bon élève.
Deux copies. Padma avait grimacé à l'annonce du D, mais avait vite masqué sa déception lorsque Rogue lui avait tendu son rouleau de parchemin, qu'elle avait fourré dans son sac sans attendre.
Une copie. Par Merlin, elle allait tourner de l'œil !
Hermione était assise au premier rang, soit deux rangées devant Padma. Son cœur s'était emballé alors que les pas du professeur résonnaient dans l'allée tandis qu'il remontait vers elle.
« S'il vous plaît, s'il vous plaît », avait-elle prié en silence, sans trop savoir si elle souhaitait qu'il ait lu la phrase dissonante, ou l'inverse.
- Vous pouvez y aller, avait annoncé la voix sévère du Serpentard alors même qu'il n'était pas encore parvenu au premier rang.
Ce n'est qu'à ce moment précis que la Gryffondor avait réalisé qu'elle avait fermé les yeux, redoutant le pire, car elle les avait vivement rouverts à ces mots, étonnée. Comment ça, « ils pouvaient y aller » ? Et sa copie ?
Ses camarades ne s'étaient pas fait prier, pour leur part, et le raclement des chaises et des affaires rangées prestement avait vite envahi la salle de classe. Alors même que, sidérée, la jeune femme se retournait vivement vers le second rang pour s'assurer que leur professeur était sérieux, elle avait plongé toute entière dans le regard noir d'encre du Serpentard qui l'observait en silence, debout, immobile à deux pas de son pupitre. Hermione s'était figée. Son cœur avait loupé un battement.
Par Merlin !
- Pas vous, Granger, avait-il dit dans un murmure lorsque le regard de la jeune femme avait croisé le sien.
Les yeux d'Hermione s'étaient agrandis d'angoisse, et elle avait senti ses joues s'échauffer soudain. Mortifiée, la jeune femme avait baissé les yeux, et attendu que ses camarades de classe débarrassent le plancher, songeant un instant à s'enfuir à leur suite, histoire de ne pas subir l'humiliation qui l'attendait.
Elle n'était pas certaine de réussir à ne pas pleurer, pour le coup. A cette seule idée, elle sentait même déjà ses yeux commencer à la brûler, c'était dire !
Du coin de l'œil, elle avait noté le regard inquiet et étonné que lui avait lancé Padma juste avant de sortir, et avait songé avec culpabilité qu'elle aurait peut-être dû se montrer plus aimable avec la jeune femme au cours de ses années d'étude. Elle était gentille, Padma. Nonobstant ce goût trop prononcé pour les commérages et les ragots en tout genre, la Serdaigle était somme toute bien sympathique. Avec un peu de chance, elle transmettrait ses amitiés à Harry et Ron, qu'elle n'était pas certaine de revoir en vie et…
- Miss Granger.
La voix sèche comme un coup de fouet de Severus Rogue avait vivement ramené Hermione au moment présent. Elle avait sursauté et relevé les yeux vers son professeur, qui l'observait de la même façon qu'un serpent qui se demandait de quelle façon il allait dévorer la souris qu'on venait de déposer dans son terrarium. Non pas qu'Hermione ait déjà assisté à un nourrissage de serpent, d'ailleurs, mais elle s'imaginait bien la chose ainsi.
- J'imagine que vous n'êtes pas sans savoir pourquoi vous êtes encore ici, et non auprès de vos petits camarades, avait-il dit de sa plus belle voix doucereuse.
Depuis quelques mois qu'elle avait pris conscience de son attirance saugrenue pour son enseignant de potions, Hermione prenait un plaisir tout particulier à savourer le son de sa voix quand il parlait ainsi, de ce ton bas et calme, et pourtant dangereusement menaçant, puisqu'il précédait en général l'annonce d'une punition sans précédent ou d'une retenue mémorable. Ce jour-là, toutefois, elle avait réalisé que cette voix qu'elle trouvait en temps normal tout à fait séduisante, l'était beaucoup moins lorsque c'était elle qui en faisait les frais.
Risquant un coup d'œil vers le Serpentard, elle avait aperçu le parchemin de son devoir entre les mains de son enseignant. S'il lui restait encore un doute sur le motif de sa présence face à lui, il n'en était plus rien, à présent. Les doigts longs et fins du sorcier avaient pianoté le long du rouleau parcheminé, et l'esprit définitivement alangui d'Hermione s'était imaginé un instant quel effet cela pourrait lui procurer, si ces jolies mains habiles s'étaient perdues sur elle plutôt que sur son devoir.
Prenant conscience du cours de ses pensées, alors même qu'elle se trouvait dans une situation plus que délicate, elle avait vivement baissé les yeux vers le sol irrégulier du cachot où se déroulait le cours, rougissant davantage. Quelle idiote, vraiment ! Mais quelle idiote ! Et dire que tout le monde pensait que c'était elle le cerveau le plus intelligent de Poudlard ! Mais quelle idée !
- Oui, Monsieur, avait-elle répondu, tête basse.
Il y avait eu un silence. Un long silence de plusieurs secondes, pendant lequel seules la respiration lente et profonde du Serpentard et celle, plus erratique, de la Gryffondor, s'étaient faites entendre. Hermione ne savait pas ce qui était le pire, à ce stade. Qu'il reprenne la parole, ou qu'il persiste dans ce silence assourdissant ?
- De la part de n'importe qui d'autre ici, je n'aurais pas pris la peine de m'attarder sur ce genre de plaisanterie de mauvais goût, avait-il finalement repris alors qu'elle craignait de ne pas réussir à garder son sang-froid plus longtemps. Mais je dois avouer que je suis curieux d'entendre ce que vous avez à dire pour votre défense, vous dont le parcours scolaire est le seul à ne pas ressembler à une longue et triste agonie.
Il avait marqué une pause, une courte pause, comme il faisait souvent, histoire de s'assurer de l'assimilation de ses mots dans l'esprit de sa proie. En général, Hermione trouvait cela du plus bel effet. Cette fois, cependant, cette seconde de silence avant le reste de sa sentence avait tiré un frisson glacé à la demoiselle.
En face d'elle, les doigts avaient cessé de pianoter sur le rouleau de parchemin incriminé.
- Alors je vais vous donner une ultime chance de vous expliquer, avant de vous annoncer que vous passerez le reste de la semaine en retenue à récurer les chaudrons avec les premières années sous la surveillance de notre cher concierge.
Elle n'avait pas eu besoin de lever les yeux vers lui pour se figurer le sourire sarcastique qui avait dû étirer ses lèvres à l'énoncé de cette punition à venir, et qui avait dû s'accentuer encore lorsqu'il avait sans doute remarquer son dépit soudain, puisqu'elle n'avait rien fait pour le cacher. Par Merlin, huit ans à tout faire pour être première de sa promotion pour finir par se faire coller dans les derniers mois qu'elle passait au château ! Son ego n'allait jamais s'en remettre, c'était certain !
- Je vous écoute, Miss Granger, l'avait-il invitée à répondre, ironique comme jamais.
Au point où elle en était, Hermione n'avait plus grand-chose à perdre, si ce n'est avoir l'air plus ridicule encore qu'elle ne l'était, ce qui n'était déjà pas rien. Qu'y avait-il de pire que de se faire ainsi humilier par et devant l'homme sur qui elle fantasmait depuis la rentrée passée ? Là tout de suite, elle n'avait rien trouvé de correspondant. Alors, puisqu'elle n'avait pas été envoyée à Gryffondor pour rien, et qu'elle n'était pas du genre à ne pas assumer ses erreurs, elle avait finalement relevé la tête, pour planter son regard noisette dans celui, interrogatif et narquois, de son professeur. Elle s'était félicitée de voir transparaître dans les orbes onyx un éclat surpris lorsqu'il avait réalisé qu'elle ne cherchait pas à nier, ni à supplier sa clémence. Au moins conserverait-elle ce peu de dignité là.
- C'était un pari, Monsieur. Afin de savoir si vous lisiez vraiment l'intégralité de nos devoirs.
Cette fois, le Serpentard n'avait pu cacher son étonnement. Ses sourcils sombres s'étaient haussés avec ahurissement, avant de s'arquer dans une expression dubitative évidente alors qu'il la dévisageait avec stupeur, semblant se demander si elle se payait sa tête ou non. Hermione avait soutenu son regard sans faillir, même si ses jambes n'en menaient pas large sous elle et risquaient, à tout moment, de ne plus réussir à la porter.
Jugeant finalement qu'elle n'avait là aucune raison de lui servir pareil mensonge, surtout que cette justification n'était clairement pas le plus intelligent des prétextes qu'elle aurait pu lui fournir, Severus Rogue avait finalement tordu ses lèvres dans l'un de ces sourires suffisants qu'elle détestait tout à fait, pour le coup. Il était tellement plus séduisant quand il se départait de ces expressions méprisantes et condescendantes. Lorsqu'il abordait un point particulièrement complexe d'une préparation compliquée, par exemple, sans réussir à masquer tout à fait l'engouement que cela suscitait chez lui. Ou lorsqu'il était plongé dans la réalisation d'une mixture délicate, tandis que ses élèves étaient censés plancher sur un TP alambiqué. Hermione adorait l'observer en douce dans ces moments-là, où il était trop concentré pour conserver suffisamment ce masque froid et acrimonieux qu'il portait en toutes autres circonstances.
- De mieux en mieux, Miss Granger, avait-il susurré avec sarcasme. N'avez-vous donc pas suffisamment de travail, pour perdre ainsi votre temps avec ce genre d'idée stupide ?
Elle avait tiqué au mot « stupide », évidemment, même si elle ne l'avait clairement pas volé. Il avait raison, bien-sûr. Elle ne manquait pas de devoirs et de cours à réviser, si elle voulait pouvoir prétendre à obtenir ses ASPICS à la fin de l'année et ainsi rejoindre le cursus de droit du ministère de la magie. Et nul doute que son idée avait été réellement stupide. Encore une fois, elle avait fait montre de trop d'orgueil. Si elle s'était contentée de ses O habituels sans se poser de questions, elle ne se serait pas retrouvée dans cette situation délicate, qui non seulement risquait de nuire à son bulletin scolaire, mais aussi de réduire à néant le peu d'estime que lui vouait le sorcier qui lui faisait face.
- Si, Monsieur.
Il l'avait de nouveau considérée quelques secondes en silence, sans doute un peu déçu de sa docilité à encaisser les remarques désobligeantes et du peu de réaction que celles-ci occasionnaient.
- Vous serez ravie d'apprendre que votre petite expérience a été concluante, avait-il repris finalement, d'une voix plus dédaigneuse encore. Vous aurez un D, Miss Granger. Pour Désolant, comme votre conduite. Seulement parce que le reste de la copie était pertinent, auquel cas vous vous en seriez tirée avec un T et croyez-moi, cela aurait été un plaisir de vous assigner le premier de votre cursus scolaire.
Mortifiée, humiliée, Hermione avait baissé la tête, acceptant sa sentence avec humilité. Ses yeux la brûlaient de nouveau. Elle l'avait bien cherché, après tout. Soudain, l'idée de pouvoir annoncer à Ron qu'il s'était trompé concernant les professeurs de Poudlard, du moins l'un d'entre eux, ne lui semblait plus si réjouissante.
- Merci, Professeur, avait-elle néanmoins soufflé, les yeux toujours rivés vers le sol, alors qu'il se détournait déjà, jugeant le sujet clos.
Il s'était figé à ces mots, à mi-chemin entre le premier rang et son bureau, et s'était retourné à demi vers elle, interloqué.
- Comment ça, « merci » ? Avait-il vivement demandé d'une voix tranchante.
De toute évidence, il pensait qu'elle se payait sa tête. Mince alors, elle allait vraiment finir par le mettre en rogne, en plus de se le mettre à dos définitivement !
Hermione avait relevé son regard vers le sien, soutenant sans faillir, cette fois, les yeux sombres et perçants posés sur elle.
- C'est que, l'expérience n'avait pas été concluante, jusqu'ici, avait-elle avoué dans un murmure, un peu honteuse de confesser dans le même temps que ce n'était pas la première fois qu'elle s'adonnait à ce genre « d'idée stupide ».
Le directeur de Serpentard s'était retourné tout à fait vers elle, cette fois, les sourcils froncés et l'expression clairement méfiante. Il était revenu sur ses pas, l'écrasant presque de son aura impérieuse. Hermione avait retenu un tremblement compulsif.
- Pardon ? Avait-il demandé, et sa voix dangereusement basse avait de nouveau fait chavirer le cœur de la Gryffondor.
- Vous êtes le premier à vous en rendre compte, et donc à lire réellement ce que j'écris, j'imagine, avait-elle expliqué avec une pointe d'amertume sur les derniers mots.
Il y avait eu un silence stupéfait, pendant lequel sans doute le Serpentard assimilait les conséquences de ce qu'elle venait de dire.
- Vous avez essayé avec tous les professeurs ? Avait-il demandé sans pouvoir cacher tout à fait son ahurissement.
- Oui, Monsieur.
- Avec Filius ? Et Minerva aussi ?
- Aucun d'eux ne s'en ait rendu compte, avait-elle affirmé en soutenant son regard, afin qu'il comprenne qu'elle ne mentait pas.
Il avait pris quelques secondes pour réfléchir à cette réponse, avant de considérer la jeune femme d'un œil critique. Puis ses lèvres s'étaient ourlées d'un rictus dédaigneux.
- Ils n'ont juste pas osé vous le dire, j'imagine.
- Permettez-moi d'en douter, Monsieur, avait-elle murmuré sans pouvoir dissimuler le dépit que cette prise de conscience avait suscité chez elle au fil des semaines.
Il avait de nouveau gardé le silence une minute, songeur, et son visage s'était défait de ce masque froid et méprisant l'espace de quelques instants, alors qu'il était plongé dans ses pensées. Hermione n'avait osé piper mot, attendant le verdict, le jugement, n'importe quoi. Finalement, contre toute attente, l'esquisse d'un sourire en coin avait brièvement étiré les lèvres fines du Serpentard. Rien qu'une seconde. Si Hermione avait esquissé un battement de cil au même moment, sans doute l'aurait-elle loupé. Au lieu de cela, son cœur s'était mis à tambouriner plus fort dans sa poitrine alors qu'elle profitait pleinement du spectacle de voir Severus Rogue se fendre d'un tel sourire juste devant elle.
- Je vois…, avait-il repris finalement, et elle aurait juré qu'une pointe d'amusement perçait dans sa voix. Vous pouvez disposer, Granger.
Sans doute s'était-elle attendue à autre chose, à présent qu'il avait eu l'explication de texte de son comportement un brin insolent, car elle avait senti la déception l'envahir à cette injonction à quitter les lieux. Bon, elle aurait au moins eu le plaisir de le voir au naturel un bref instant, et d'admirer ce pas-tout-à-fait sourire qu'elle ne reverrait sans doute jamais avant son départ de l'école, avait-elle songé avec tristesse en fermant son sac de cours.
- Miss Granger, une dernière chose, l'avait-il rappelée alors qu'elle se dirigeait vers la sortie de la salle de classe.
Toujours debout près du premier rang, il avait braqué son regard d'encre sur elle lorsqu'elle s'était retournée vers lui, le cœur battant.
- Ce que vous avez écrit..., avait-il repris, et pour la première fois de sa vie Hermione avait vu Severus Rogue hésiter. Cela faisait-il aussi parti du pari ?
Le cœur de la jeune femme avait réellement loupé un battement, cette fois, et son souffle s'était bloqué dans sa gorge tandis qu'elle dévisageait le directeur de Serpentard avec effarement. Contre toute attente, il n'y avait plus ni raillerie ni sarcasme dans ces yeux noirs posés sur elle, et Hermione avait senti une chaleur soudaine envahir son bas-ventre, ainsi qu'un espoir soudain monter dans sa poitrine.
Par Gryffondor !
- Non, Monsieur, avait-elle répondu dans un murmure. Je… Je le pense vraiment, avait-elle ajouté dans un souffle en baissant les yeux, incapable de le regarder en face pour cet aveu.
Elle avait attendu, tremblante, de vives protestations. Un sarcasme plus corrosif que jamais, un rire sec et cassant, ou l'annonce d'une retenue supplémentaire. Peut-être même une injonction à ne plus se présenter en cours, ce qui aurait constitué un véritable cauchemar pour la jeune femme, privée ainsi de la possibilité de passer ses ASPICS en potions, et de ces heures à pouvoir contempler son professeur en douce.
Mais rien n'était venu.
Hermione avait risqué un nouveau regard vers le sorcier, pour réaliser qu'il l'observait toujours avec un mélange de sidération et de bouleversement évident, à croire qu'il s'était attendu à tout, sauf à cet aveu franc et sans ambages. Alors que quelques secondes plus tôt elle se désespérait de ne jamais le revoir sans son éternel masque d'impassibilité, celui-ci était de nouveau tombé, mis à mal par l'étonnement et, peut-être, l'émoi, qu'avaient suscité ses derniers mots, ce dont elle ne se serait jamais douté. C'est que, elle savait bien que Severus Rogue avait un cœur et, sans doute aussi, des sentiments comme tout le monde. Mais il les cachait plutôt bien, en temps normal, si bien que rien ne semblait jamais l'atteindre.
Il avait brièvement détourné son regard, le temps de reprendre contenance. Lorsqu'il avait de nouveau posé ses yeux sur elle, il était de nouveau redevenu hermétique, même si elle aurait juré qu'un éclat plus doux illuminait la noirceur de ses iris sombres.
- Vous pouvez y aller, Miss Granger, avait-il réitéré.
Hermione ne s'était pas faite priée, trop chamboulée également pour s'attarder plus longtemps près de cet homme qui venait, une fois de plus, de mettre son cœur sans dessus-dessous.
Elle venait de poser sa main sur la poignée de la porte lorsqu'un détail l'avait toutefois fait se figer de nouveau. Prenant son courage à deux mains, elle s'était de nouveau tournée vers le Serpentard, qui entre temps avait regagné son bureau pour préparer son prochain cours.
- Monsieur ? L'avait-elle timidement interpellé, mais dans le silence des cachots, il ne lui en avait pas fallu plus pour qu'il se retourne vivement vers elle, l'air interrogateur et avec un brin… d'appréhension ?
Par tous les Saints, était-elle réellement parvenue à déstabiliser Severus Rogue à ce point ? Avec une si courte phrase, et de si simples mots ?
- Je… Je n'ai pas récupéré ma copie, avait-elle poursuivi, intimidée par l'intensité de son regard onyx braqué sur elle.
Il avait baissé les yeux vers le rouleau de parchemin qu'il tenait toujours entre ses mains, comme s'il avait seulement alors remarqué qu'il avait oublié de le lui rendre. Il l'avait fixé un instant en silence, et bien qu'il se tenait à l'autre bout de la pièce, à présent, Hermione avait cru voir un nouveau sourire en coin étirer la commissure de ses lèvres. Décidément, cette entrevue était surréaliste.
- Je vais prendre le temps de la relire, Miss Granger. Avec un peu de chance, il se pourrait que je revois votre note à la hausse, tout compte fait.
Il avait relevé la tête vers elle, plongeant de nouveau son regard dans le sien, et Hermione s'était sentie fondre sous ces yeux d'obsidienne si étincelants. Le souffle court, elle avait pris le temps d'observer son professeur _ de vraiment l'observer, cette fois, loin des regards en douce qu'elle lui lançait au détour d'un TP ou d'un cours magistral. Sa silhouette haute et élancée, qui dégageait pourtant une aura écrasante d'autorité et de pouvoir, et dont la seule proximité suffisait à lui faire perdre le fil de ses pensées. Ses cheveux sombres qui retombaient sur ses épaules comme le plumage soyeux d'un corbeau, dont quelques mèches venaient obscurcir son regard tout aussi noir, adoucissant les traits de son visage taillé à la serpe, que beaucoup trouvaient trop sec et trop angulaire, mais qui lui conférait pourtant une masculinité certaine.
Avait-elle le béguin pour cet homme-là ?
Assurément, oui. Un peu plus que cela, même.
Avec hésitation, Hermione s'était risquée à lui adresser un sourire. Timide, mais un sourire quand même. Le premier qu'elle lui adressait depuis qu'elle le connaissait, à y bien penser. S'il lui avait rendu, cela avait été tellement discret qu'elle avait cru le deviner, mais cela n'avait en rien diminué l'allégresse qui avait envahi son cœur aux derniers mots qu'il avait prononcés.
- Bonne journée, Professeur Rogue, l'avait-elle salué avant de sortir, pour de bon cette fois.
- A vous aussi, Miss Granger.
Hermione s'était éloignée dans le couloir d'un pas léger et bondissant, inconsciente du regard sombre qui l'avait suivie jusqu'à ce qu'elle disparaisse à l'angle du couloir, et du demi-sourire qui avait persisté sur les lèvres du directeur de Serpentard.
Le sourire radieux qui avait fleuri sur les lèvres de la jeune femme, lui, était plein et entier, à la hauteur du sentiment de béatitude qui gonflait son cœur exalté. Non seulement elle allait se faire un plaisir d'annoncer à Ron qu'au moins l'un de leurs professeurs lisait véritablement leurs devoirs, peu importe leur longueur, mais en plus, il ne l'avait pas déçue. Mieux encore, il avait été le seul à y prêter véritablement attention, la confortant dans son idée qu'il n'était pas que l'enseignant aigri et partial qu'il laissait paraître.
Et, pour couronner le tout, elle le lui avait enfin dit ! Enfin écrit, pour être exacte. Elle se fichait bien du moyen, en réalité. Seul comptait le résultat et à présent, Severus Rogue savait puisque, quelques jours plus tôt, après avoir rassemblé son courage, Hermione s'était emparée de sa plus belle plume pour apposer quelques mots dissonants dans son devoir de potions.
« Je vous trouve un charme fou ».
J'espère que cette petite histoire vous a plu et permis de passer un agréable moment ! N'hésitez pas à me laisser vos impressions dans un petit commentaire, c'est toujours un plaisir d'avoir vos retours =)
A très bientôt pour d'autres histoires Snamione ;)
