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Gashi.
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/Note de l'auteur au cazou : cette fiction ne traite absolument pas de l'actualité politique actuelle mais d'un univers fictif basé sur quelques faits historiques des années 1950.
Au moins, il ne pleuvait plus. C'était déjà ça de pris. Harry se retint de justesse au tronc d'un arbre alors que son pied glissait dans la boue. Est-ce qu'ils n'auraient pas pu attendre encore un jour ou deux, que la terre finisse totalement d'absorber les mètres cube d'eau qui étaient tombés, avant d'aller crapahuter dans les bois ?
Il voyait Tom loin devant, avancer à grandes enjambées, comme s'il n'était pas soumis à la même gravité que lui. C'était un foutu elfe ou quoi ? Comme s'il savait qu'Harry était en train de le maudire intérieurement, il se retourna, impatient, la carte à la main : « Monsieur Potter, mettez-y un peu de bonne volonté. J'aimerai faire plus de 10 mètres avant que la nuit ne tombe. »
« Sale petit con prétentieux. » maugréa Harry alors que son autre pied partait, sans le reste de son corps, un mètre plus loin et se retrouvait coincé dans une motte de boue tenace. Il réussit finalement à le libérer, avec force injures et un bruit de succion désagréable, au prix de sa chaussure qui resta, elle, enlisée. Un corbeau, posé sur une branche un peu plus haut émis un croassement singulier et Harry eut la nette impression qu'il était en train de se foutre de lui.
« C'est une putain de blague. » Grogna-t-il en clopinant sur une jambe, ignorant l'animal. Au même moment, Tom, toujours plusieurs mètres devant lui, s'impatienta à nouveau de son rythme lent. « Avancez par pitié ! Nous n'avons pas toute la journée ! », lança-t-il d'un ton impérieux, agitant sa carte d'un geste exaspéré.
Harry l'aurait crucifié sur place. Il lui fit un geste obscène de la main et cria : « Je vous rappelle que je ne voulais pas venir, au départ. C'est vous qui avez insisté ! » Il grimaça, se demandant si Tom avait seulement une once de considération pour les difficultés auxquelles il était confronté.
Alors qu'Harry venait juste de récupérer sa chaussure avec difficulté et tentait de la remettre sur son pied, Tom leva les yeux au ciel, exaspéré, et fit demi-tour d'un geste brusque. D'un mouvement agacé de sa baguette, il lança un sort qui frappa Harry à la poitrine.
Ce dernier sentit une étrange légèreté envahir son corps alors qu'il reposait son pied à terre. À sa grande surprise, le sol était ferme et solide sous lui, comme s'il marchait sur un chemin pavé bien entretenu.
Ses yeux s'écarquillèrent alors qu'il réalisait ce qui venait de se passer : « Sérieusement ? Vous comptiez me laisser galérer combien de temps comme ça ? »
Tom se contenta de lui lancer un regard froid et reprit sa marche, comme si de rien n'était. Harry secoua la tête en le pointant du doigt : « Vous connaissiez un sort pour ça ! Moi qui me demandais pourquoi vous ne glissiez pas tous les trois mètres comme moi. »
La voix de Tom siffla, tranchante, entre les arbres : « C'est un sortilège de troisième année. Merlin ! Je commence à comprendre pourquoi on vous appelait le 'survivant' ! Avec si peu de connaissances, tout le monde devait être très étonné de vous voir en vie si longtemps. »
Harry ouvrit et referma la bouche comme un poisson hors de l'eau. Quel culot ! Peut-être aurait-il pu apprendre plus de choses si un abrutit de mage noir n'avait pas cherché, toutes les cinq minutes, à le tuer ! Il sentit ses doigts s'enrouler autour de sa baguette. Et peut-être qu'on ne l'aurait pas non plus appelé : « Le survivant » s'il n'avait pas échappé à la mort alors qu'il était bébé !
Il tendit sa baguette en direction du dos de Tom et celui-ci se retourna brusquement : « Je vous le déconseille, Potter. »
« Sans rire ! » Grinça Harry qui commençait à en avoir plein le dos de cette balade en forêt forcée. Et le sort partit d'un coup, frôlant de justesse Tom et explosant sur un rocher à ses côtés. Quand la fumée se dissipa, Tom se tourna vers lui avec fureur : « Sérieusement, Potter ? Un canard ? »
L'oiseau, ébouriffé secoua ses plumes, donnant l'impression d'être profondément offensé par sa transformation soudaine. Puis, d'un coup d'aile puissant, il prit son envol dans un nuage de plumes, laissant derrière lui un sillage de cancanements indignés.
Les deux sorciers restèrent immobiles, stupéfaits, alors que le canard s'éloignait rapidement dans le ciel.
« Vous aviez visiblement le temps d'apprendre toute une palette de sortilèges plus stupides les uns que les autres ! »
« Je me disais juste que cet animal vous irait bien. » Lança Harry d'un ton moqueur, toute colère retombée.
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Ils retournèrent ainsi, durant une semaine, les bois de Gashi, quadrillant méthodiquement la carte et le terrain, mètre par mètre, sans rien trouver. « À ce rythme, on ne découvrira jamais le diadème avant Nouvel An. » pensa Harry qui sentait le froid de décembre s'infiltrer dans ses os.
Les deux hommes s'étaient divisé le travail, se séparant de plus en plus, parcourant le plus de kilomètres possibles. Le bracelet que Tom avait offert (imposé ?) à Harry s'avérait bien utile et les deux sorciers finissaient systématiquement par se retrouver lorsque le soleil déclinait. Ils passaient donc leurs journées partagées entre ces excursions en forêt et du sexe ininterrompu en soirée. Et Harry commençait doucement mais surement à sentir le poids de ses bientôt trente ans peser sur ses épaules. Il était en train de se dire qu'il faudrait peut-être ralentir sur le rythme (de l'un ou de l'autre, même si il avait sa préférence...) quand il sentit une présence derrière lui.
Ce n'était pas Tom. L'aura était trop imposante et brutale et il se méfia immédiatement. Sans rien laisser paraître, il continua d'avancer, d'un pas serein, vers le premier arbre à sa portée.
Une fois à couvert, il lança rapidement un sort de bouclier autour de lui, se préparant à toute éventualité. Les pas lourds se rapprochèrent, accompagnés de jurons dans une langue slave. Un sortilège explosa à côté de lui : ok, ce n'étaient donc clairement pas des amis.
Harry répliqua sans attendre en lançant à l'aveuglette : 'Sectum Sempra !'. Par chance, le sort de découpe atteignit sa cible : les pas de son poursuivant ralentirent, ce qui donna à Harry un bref répit pour renforcer son bouclier et sortir de sa cachette pour mieux cibler son adversaire.
Face à lui se dressait un homme imposant, une véritable montagne de muscles et de force brute. Harry se rappela les descriptions des soldats russes que Zamir leur avait données.
Putain.
Un nouveau sort explosa sur son bouclier, mais celui-ci tint bon.
Harry vit avec surprise des runes sanglantes s'illuminer sur la peau de son adversaire. C'était une magie qu'il n'avait jamais rencontrée auparavant, voilà qui devenait intéressant. Sans perdre de temps, il lança un sort de désorientation mais le Russe contre-attaqua avec rapidité et Harry dû reculer sous le choc de l'impact.
Il esquiva un nouveau sort de justesse en sautant sur le côté et sentit une chaleur intense frôler sa peau. Le combat devint un ballet chaotique de sorts et de contre-sorts.
Le soldat utilisait sa magie runique avec une maîtrise impressionnante, créant des projectiles élémentaires à partir de simples gestes de sa main ensanglantée, mais Harry savait que c'était lui, le plus puissant des deux. Il sentit l'adrénaline monter en lui, son esprit s'aiguisant alors qu'il cherchait la faille dans la défense de son adversaire et enchaîna, pour gagner un peu de temps, quelques sorts de désarmement et de désorientation.
Quand il fut certain de ce qu'il voulait faire, il restreignit son bouclier au stricte minimum (à savoir sa main qui tenait sa baguette : nécessaire et vital dans ces conditions) et, d'un mouvement rapide, saisit une branche épaisse à ses pieds et y concentra une bonne dose de sa magie avant de la projeter violemment en direction du soldat.
La branche fendit l'air avec une force brutale, sifflant comme un projectile lancé à pleine vitesse. Pris au dépourvu, l'homme fut tenté de l'éviter mais son corps lourd et le sol glissant ne furent pas du même avis : il fut heurté de plein fouet dans un craquement sec et son corps massif se trouva projeté à terre dans un bruit sourd.
Il tenta désespérément de se relever, mais Harry ne lui laissa aucun répit. Il bondit vers lui, lançant un 'Incarcerous Maxima' et le sort s'enroula autour du prisonnier, maintenant fermement immobilisé.
Harry se tenait debout, le souffle court, observant son adversaire vaincu avec curiosité : non, pas un soldat. Plutôt un mercenaire. L'homme releva ses yeux clairs sur lui et grimaça un sourire ensanglanté : « Tu combats avec férocité, mais tu ne fais pas le poids contre trois d'entre nous. » grogna-t-il avec un fort accent.
« Fait chier ! » Jura Harry en se retournant subitement. Mais c'était trop tard. Il sentit une vive douleur déchirer son bras alors qu'une estafilade sanglante ouvrait sa peau en deux.
Il roula derrière un arbre et s'adossa contre son tronc pour y trouver protection. Il vit deux autres sorciers, tout aussi solides que le premier, le braquer de leur baguette. Merde.
La douleur brûlante irradiait de son bras et le sang perlait le long de sa peau, mais il avait connu pire. Avec une grimace de détermination, il se redressa derrière l'arbre qui lui servait de rempart et le contourna, faisant face à ses deux nouveaux adversaires.
Il était peut-être temps d'arrêter de jouer. Visiblement, vu le peu d'entrain que ces trois gaillards mettaient pour l'attaquer, ils devaient clairement le sous-estimer, le prendre pour un citadin qui n'avait jamais combattu.
Parfait, c'était la meilleure configuration.
Harry, après la guerre, s'était promis de ne plus jamais tuer d'être vivant. Mais rien n'empêchait de les envoyer pour de longs mois à l'hôpital, n'est-ce pas ?
L'un des mercenaires tendit une main large comme une brique vers Harry : « Nous ne ferons pas de mal à toi. Juste nous donner tout ce que tu trouves ici. Bon accord. Pas de blessé. Pas de mort. »
Harry leur sourit et les deux hommes reculèrent d'un pas. Quelle bande d'enfoirés. C'était bien beau de chercher la paix quand on était les premiers à attaquer. Sans perdre un instant, il concentra sa magie en lui et celle-ci réagit au quart de tour, comme si elle avait attendu ça depuis des siècles. Un étrange brouillard dense commença à s'étendre de ses pieds, léchant le sol jusqu'à ses adversaires. Harry tourna distraitement sa baguette entre ses doigts et un immense flash lumineux éclaira la forêt. Quand les yeux des mercenaires se réhabituèrent à la luminosité ambiante, Harry avait disparu et le brouillard avait pris des propensions inquiétantes. Quelques flammèches, qu'ils n'avaient pas invoquées, flottaient au-dessus de leur tête. Ils essayèrent de les chasser, mais elles se contentèrent de virevolter un peu plus haut, hors de portée.
Un craquement sinistre retentit et plusieurs arbres se resserrèrent sur les deux hommes, leur bloquant toute retraite.
Leurs yeux scrutèrent fébrilement les environs, cherchant la moindre trace de leur adversaire invisible.
« Где он ? » demanda le premier mercenaire d'une voix rauque, ses yeux tentant perçant le brouillard avec méfiance. Harry ne comprit pas, mais il se douta qu'ils devaient le chercher.
« Я не знаю, но он не может быть далеко. » répondit l'autre d'une voix sèche, ses mains serrées autour de sa baguette avec hargne.
Ils échangèrent un regard chargé de tension, se lançant des consignes muettes du menton. Leurs sens étaient en alerte maximale, prêts à réagir à la moindre indication de la présence de leur adversaire.
Le premier type fit un geste de la main, indiquant à son compagnon de couvrir leur arrière. Ils commencèrent à avancer prudemment, leurs pas feutrés sur le sol humide de la forêt, chaque bruit de feuille froissée éveillant leur attention.
Un trait rouge fusa vers eux et entailla la joue du plus grand. Le second mis un genou à terre et désigna du doigt les flammèches qui flottaient au-dessus d'eux. Ils étaient loin d'être stupides et avaient parfaitement compris que ce sort permettait à Harry de les repérer plus facilement dans le brouillard.
L'homme resté debout posa sa main sur l'épaule de son compagnon et des runes rougeoyantes apparurent sur sa peau : quelques secondes plus tard, des constellations lumineuses éclairaient tout le champ de bataille.
Harry en profita pour lancer un nouveau sort dans leur direction mais le sort s'écrasa sur le bouclier que l'un deux venait de déployer. Le second répondit immédiatement, se fiant à la direction d'où venait le sort pour traquer Harry. Mais ce dernier était constamment mobile, se déplaçant habilement d'arbre en arbre, ne s'attardant que le temps d'un sort au même endroit. Il les harcelait sans s'arrêter. Son but n'était pas de les toucher, mais de troubler leurs sens, de briser leur volonté.
L'homme qui avait posé un genou à terre traça rapidement dans l'humus quelques signes et une pluie de projectiles fusa dans les airs en cercles concentriques. Des pierres et des branches sifflaient à travers l'air, dans l'espoir de toucher leur cible invisible.
Harry sourit, c'était ingénieux, mais pas suffisamment pour lui. Un craquement retentit et les deux mercenaires se retournèrent de concert, lâchant tous leurs sorts les plus dévastateurs en direction du bruit. Bien entendu, Harry n'y était pas. Alors que les hommes étaient momentanément distraits, il saisit sa chance. Il bondit de derrière un arbre, lançant un sort de Déflagration qui explosa sur le bouclier, le fissurant et laissant ses adversaires à découvert. Le temps qu'ils se retournent et un éclair rouge éblouissant traversait le brouillard, les frappant de plein fouet. L'un des hommes fut projeté en arrière, hurlant de douleur alors que des flammes s'enroulaient autour de lui.
Le deuxième mercenaire, réalisant que la menace se tenait devant lui, tenta de déployer un nouveau bouclier protecteur. Mais l'attaque l'avait déstabilisé et il était trop lent. Des éclairs tourbillonnèrent autour d'Harry et, quand il les envoya, ils frappèrent avec une force implacable.
Harry se redressa, le souffle court. Ses deux adversaires étaient à terre, KO, mais il avait l'impression d'oublier quelque chose. Cela lui revint soudainement en mémoire quand une baguette se posa sur sa nuque.
Il esquissa un sourire crispé : évidemment, le troisième type. Il l'avait ligoté, mais il restait un militaire entraîné et ça n'avait pas été suffisant. Harry mollissait.
« J'admire le combat. – dit la voix rauque dans son dos – Dommage que tu es dans autre camps. Tu es vraiment bon combattant. Mais je dois tuer quand même. Vraiment dommage. »
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