Les membres de l'équipage de Barbe Noire étaient réunis dans la salle commune du bateau. La soirée touchait à sa fin, tout comme la partie de cartes qu'ils menaient. Le plancher de l'escalier attenant à la salle, aux lattes déteintes et déformées par l'humidité, émit des grincements de plus en plus sonores. C'était Teach qui remontait de la cale, sa silhouette se détoura dans la pénombre de l'ouverture lorsqu'il poussa la porte.
« Regardez ce que j'ai là, fit-il en dévoilant son sourire édenté.
Il tendit un bras, et dans sa paume ouverte où quelques tâches de sang à demi essuyées apparaissaient, reposait un objet sphérique bleu orné d'aspérités violacées.
- Oh oh! s'égaya Doc Q en levant les bras.
Laffitte se mit à applaudir, imité par Burgess qui rit à pleins poumons.
Barbe Noire fit doucement tourner l'objet dans sa paume :
- Puisque je me sens efficace je vais expérimenter la deuxième étape dans la foulée.
- Je veux voir ça ! lança Burgess avec un regard empli d'attentes.»
C'est toute la tablée qui se leva pour suivre le capitaine qui s'en retournait à l'escalier. A mesure que les marches défilaient les commentaires cessaient et c'est dans un silence attentif que l'équipage entra dans la cale. L'espace des geôles se trouvait au fond, à l'opposé de l'escalier, là où la lueur des flammes des lampes à huile ne portait guère. Les vapeurs de combustion d'huile appliquaient des coulis fuligineux aux murs. Il n'y a avait ni plus ni moins que trois cages cubiques collées les unes aux autres. Les planchers et plafonds de ces structures étaient d'acier, les faces latérales garnies de barreaux épais. Dans la geôle du milieu, dont la porte était ouverte, une masse sombre gisait. Ce qui semblait être une silhouette humaine se tenait recroquevillée au fond de la cage de gauche. Teach se dirigea vers l'amas inerte du milieu et le ramassa, il s'agissait d'un grand drap noir, sous lequel poissaient de récentes giclées de sang. Avec le tissu sous le bras et la sphère bleue dans la main, le capitaine passa la porte de gauche, que Laffitte avait déverrouillée. Tous les pirates s'attroupèrent autour de la geôle, leurs visages étaient sérieux et froids, l'homme enfermé à l'intérieur se tortilla comme pour s'éloigner quitte à se tordre contre les barreaux. Barbe Noire s'adressa à lui :
« Comme tu le sais, je mène des recherches sur les fruits du démon depuis un certain temps. Grâce à la contribution de ton camarade de la cellule d'à côté, on en arrive à la dernière étape de l'expérience.
Le capitaine tritura un trousseau à sa ceinture, se saisit d'une clé et la lança au prisonnier.
- Enlève tes menottes et montre nous ton pouvoir, ordonna-t-il.
L'homme ne bougea pas d'un pouce et resta prostré au sol comme s'il avait été sourd.
- ...Allez ! beugla Barbe Noire après quelques secondes.»
L'homme empoigna la clé entre ses doigts rachitiques et tremblotants, puis les menottes en granite marin tombèrent sur le sol froid.
- Bien, maintenant fais nous une démonstration de ton pouvoir.
Il se leva difficilement et entre deux respirations rocailleuses il se concentra pour faire apparaître quelques touffes de mousse sous ses pieds nus. Teach se tourna vers son équipage et désigna les petits végétaux de la main avec une attitude de présentateur de télévision, puis il brandit le globe bleu violacé devant le prisonnier.
« Voici un autre fruit de type logia, c'était celui de ton voisin, qui permet de créer de l'écume. Je vais te le donner et tu devras utiliser simultanément les deux pouvoirs.
Le prisonnier lui jeta un regard empli de terreur. Tout le monde savait qu'il était impossible de posséder plusieurs fruits du démon, et une légende populaire affirmait que s'il advenait d'en ingérer un deuxième le corps du porteur exploserait immédiatement.
- Ne me regarde pas comme ça, sourit Barbe Noire. J'ai trouvé un moyen d'assimiler deux fruits, et tu vas m'aider à le vérifier. Fais de ton mieux et tu seras libéré sur la prochaine île.
-...T...tu mens ! gémit l'homme maigre et enrhumé qui ne comprenait pas pourquoi il s'en sortirait mieux que son camarade de cellule dont le cadavre avait été débarrassé quelques minutes plus tôt.
- Mais non, comme je l'ai dit ce sera la fin de l'expérience, nous n'aurons plus besoin de personne donc tu pourras partir. De toute façon tu n'as pas le choix, autant faire de ton mieux non ? affirma le capitaine d'une voix faussement conciliante.»
Le cobaye resta interdit quelques instants, les yeux embués de larmes et la gorge serrée, puis il finit par hocher la tête. Barbe Noire le félicita et déplia le grand drap qu'il gardait sous son bras. Il l'étendit au-dessus d'eux et le tissu retomba sur leurs silhouettes : il tenait à garder tous ses procédés secrets. L'équipage fixait avec intérêt l'étoffe noire qui séparait leur regard du déroulement de l'expérience. Un hoquet de douleur étouffé se fit entendre puis les pans arrêtèrent de bouger. Soudain la mousse au sol s'étendit jusqu'à couvrir tout le parterre de la cage. Le drap fut soulevé juste assez pour que le capitaine puisse montrer le bras du prisonnier qu'il avait fermement saisi : de petites bulles blanchâtres se formaient autour de la main osseuse de l'homme, dont la surface s'était couverte d'une pellicule aqueuse, et coulaient au bout de ses doigts. Quelques instants plus tard un nouveau râle étouffé retentit et le drap s'affaissa doucement. Teach en ressortit en laissant gésir le corps, celui-ci toujours dissimulé, tandis que les effets des fruits du démon disparurent. Quelqu'un venait d'utiliser deux pouvoirs simultanément.
La salle était silencieuse, chacun contemplait l'évanouissement du miracle qui venait de se produire.
« Eh bien, c'est un succès, souffla Laffitte en fixant le drap de ses grands yeux de chouette lorsque les dernières mousses verdâtres devenaient poussière.
Les autres sortirent de leur torpeur et applaudir en se distribuant quelques accolades.
- C'est toi... qui l'as achevé ? demanda Doc Q.
- Tu pensais qu'il pourrait vraiment partir ? sourit Barbe Noire.
- Non... Juste pour savoir si le processus est mortel... auquel cas ça poserait problème pour toi.
- Pour moi ce sera différent au niveau du processus, et je ne compte pas mourir alors qu'on est en si bon chemin, zehahaha!»
Lorsque les festivités dues à la réussite des recherches sur les fruits se terminèrent, c'est à dire à une heure avancée de la nuit où tout le monde était allé se coucher ou décuvait sur le plancher, Teach se rendit à son bureau pour inscrire un dernier bilan et rangea son carnet dans un tiroir verrouillé. Ce carnet comportait les procédés autour de l'expérience d'assimilation de plusieurs fruits :
Lorsqu'un porteur de fruit meurt, le fruit réapparaît quelque part dans le monde.
Le pouvoir se dissocie du corps au moment de la mort sous forme vaporeuse, un peu comme de la fumée qui sort d'une casserole, par la poitrine. Il s'échappe et va probablement se reconstituer ailleurs sous forme de fruit.
Il est possible de ressentir ce flux en ouvrant le thorax pour y passer une main. Le yami-yami-no-mi me permet d'absorber le pouvoir qui se dégage et ainsi reconstituer le fruit sur place.
Ces nouvelles informations furent notées à l'encre fraîche:
Lorsqu'un porteur de fruit en ingère un deuxième, son corps explose car le poids des malédictions des pouvoirs est trop grand. L'explosion se produit de l'intérieur, vers le cœur. Il est possible d'absorber l'explosion. C'est le même procédé que pour l'extraction de fruit : insérer une main dans le thorax là où la réaction se produit, et activer le pouvoir Black Hole au bon timing.
Le fruit reconstitué a bien été assimilé une fois l'explosion contrée, le cobaye a pu utiliser deux pouvoirs simultanés. Cause de la mort par perforation du thorax, pas par malédiction.
Succès.
Braalaka se focalisait de toutes ses forces sur son pouvoir en posant sa paume sur la tête d'Inu-kun, l'arme vivante de Rakuyou. Ce dernier attendait adossé contre un mur et supervisait l'entraînement de la jeune femme, qui tentait de masquer le haki de l'animal pour empêcher son maître de le détecter.
Les capacités déjà connues de Braalaka étaient son indétectabilité permanente et l'annulation des hakis entrants en contact avec elle. Suite à sa requête d'obtenir de l'aide pour développer son pouvoir, Izo et Rakuyou s'étaient portés volontaires et, dès le lendemain, lorsque leurs temps de pause se synchronisaient, ils lui faisaient faire quelques exercices et étudiaient les résultats pour comprendre le fonctionnement de cet étrange anti-haki.
Après quelques séances condensées au fil de la journée ils avaient découvert deux choses. D'abord, Braalaka pouvait aussi rendre indétectables des créatures pourvues de haki. Elle ne voyait pas son pouvoir à l'œil nu, mais pour l'activer elle s'entraînait à le visualiser mentalement, et elle sentait avoir comme une bulle autour d'elle, une sorte de deuxième enveloppe naturelle qu'elle pouvait modeler en se concentrant. Lorsqu'elle élargissait cette bulle pour englober d'autres personnes, tout le monde à l'intérieur devenait invisible au haki de l'observation. Deuxièmement, l'enveloppe d'anti-haki avait la capacité de siphonner le haki d'une cible, comme un vortex. Elle pouvait non seulement absorber la manifestation d'un haki mais aussi attaquer directement l'utilisateur même s'il ne s'en sert pas. C'est cette capacité d'absorption qui s'était automatiquement activée lorsque Shanks avait envoyé une petite décharge sur elle, et il était possible de l'utiliser consciemment. Cependant, moduler son enveloppe et drainer le haki demandait énormément d'énergie et de concentration à Braalaka. Aussi, Izo avait demandé à la jeune femme de lui serrer la main et l'empêcher d'y revêtir son haki d'armement le plus longtemps possible : pendant 23 secondes ils forcèrent chacun pour imposer leur énergie, puis lorsque Braalaka commença à avoir ma à la tête elle brisa sa concentration, le bras d'Izo put se teinter d'un noir acier. Un peu plus tard ils réessayèrent à distance : l'effort demandé était plus grand, la brune réussit à parer le haki seulement 12 secondes. Izo avait émis l'hypothèse que le anti-haki, tout comme le haki, demandait de l'entraînement pour être maîtrisé, autant sur le plan de la précision que de l'endurance. Donc celui qui s'épuisait en premier et perdait la confrontation serait simplement celui qui avait le moins développé sa capacité.
Cela faisait 2 minutes que Braalaka maintenait sa zone suffisamment bien pour y envelopper le chien, dont elle grattouillait à présent la tête. Rakuyou décida de tendre les bras vers le sol pour faire un équilibre sur les mains, puis traversa la pièce ainsi, la tête à l'envers.
« Hep hep hep, j'arrive à détecter Inu-kun, qu'est-ce que tu fais? lança-il en faisant de petits sauts sur le bout de ses doigts.
- Toi qu'est-ce que tu fais?
- Je te déconcentre.
- C'est mesquin.
- Tu dois maintenir ton pouvoir peu importe ce qui se passe autour.»
Ils avaient convenu de continuer jusqu'à ce que Braalaka commence à avoir le tournis, ce qui marquait la fin de la session. Après ça la jeune femme passait voir Artie pour une auscultation rapide. D'après l'infirmière la sensation de tournoiement semblait causée par une chute de la pression artérielle, et celle-ci se stabilisait avec une dizaine de minutes de repos. Marco partageait cet avis et estimait que ce n'était pas alarmant puisque les mêmes conséquences étaient remarquables lors d'entraînements du haki : l'épuisement total de cette énergie engendre l'évanouissement temporaire, mais ce n'est pas mortel. Ils décidèrent cependant tous à l'unanimité de ne pas pousser l'entraînement jusqu'à ce point en attendant d'en voir un peu plus sur le pouvoir, par mesure de sécurité pour Braalaka.
« Hmpf… Je suis presque certaine que personne n'aura l'idée de faire le poirier pour me déconcentrer…
- Tu as raison, d'habitude pour faire perdre ses capacités à l'ennemi on tape dessus, ricana Rakuyou.
Braalaka leva les yeux au ciel. La tête commençait à lui tourner ; elle s'assit sur le plancher de la salle commune en stoppant son exercice. Inu-kun s'empressa de se jeter sur elle pour jouer, mordillant son pantalon et se roulant contre ses jambes. La brune gloussa et lui fit des chatouilles en retour.
- Quand j'arriverai à activer mon anti-haki pus facilement on pourra essayer ?
- Bien sûr. Tu te débrouilles très bien au combat d'après ce que j'ai vu du tournoi sur l'île, mais avant d'y incorporer ton énergie tu dois pouvoir la maintenir intuitivement, sans t'y « forcer ». Sinon ce sera impossible de tout coordonner, expliqua Rakuyou.
- J'imagine bien, fit-elle en hochant la tête… Ça t'a prit combien de temps à toi, pour y arriver ?
- Moi ? Haha, je ne sais plus trop… Plusieurs semaines peut-être… Mais je m'y prenais avec un style un peu différent du tien. Je m'entraînais jusqu'à l'évanouissement à chaque fois, donc ça me demandait plusieurs jours de repos avant de pouvoir recommencer.
La jeune femme haussa un sourcil amusé, peu surprise par le récit du commandant.
- Tu étais stupide ou personne ne t'a appris à t'entraîner correctement ? plaisanta-t-elle.
- Hm, les deux. Je n'étais pas encore pirate et il n'y avait personne qui savait maîtriser le haki autour de moi… Puis, effectivement, tu as sûrement remarqué que je ne suis pas connu pour être le plus calme et tactique des commandants, fit-il avec sourire malicieux. Mais bon, la manière de découvrir son haki varie beaucoup selon les gens, les personnalités...
- Oui, si ça a fonctionné comme ça c'est que c'était nécessaire pour toi.
- Exactement. En ce qui te concerne, la méthode de faire plusieurs petites sessions dans la journée a l'air de fonctionner. Tu as déjà progressé par rapport à ce matin.
- Ça m'arrange, je me vois mal entrer en hibernation entre chaque entraînement.
- Haha… Il me semble que Vista faisait comme toi quand il développait sa technique du rondo de roses, il allait à la presque limite de sa fatigue dès qu'il le pouvait et ça marchait bien.
La brune plissa les yeux, fouillant dans sa mémoire.
- C'est l'attaque avec les pétales qui volent ?
- Oui.
- Mais… C'est du haki ? Je croyais que c'était de vraies fleurs…
Les lèvres de Rakuyou s'étirèrent et un rictus énigmatique anima son visage.
- Huh, j'ai failli révéler une des techniques de mon collègue…
- Oh allez, il ne nous entend pas de toute façon, fit Braalaka qui voulait définitivement une explication sur cette histoire.
Le torse du commandant s'agita d'un petit rire et il hocha la tête.
- Les pétales sont constitués de haki. Vista est extrêmement fort pour matérialiser son armement sur des supports, et le faire durer quand il s'éloigne. Il charge ses épées de haki, juste par petites couches, donc ça se voit très peu sur la lame. Et quand il frappe il les « détache » et les dirige avec les courants d'air qu'il crée. La couleur grenat vient de la finesse de la matérialisation et des reflets lumineux.
- Ça a l'air impressionnant, s'étonna Braalaka, pensive. Et esthétique, en plus.
- Oui, mais je te déconseille d'essayer de faire un bouquet avec, ça pourrait piquer.
- Je m'en doute bien Rakuyou… soupira-t-elle d'un air faussement exaspéré.
- Avoue que tu viens de penser à ce qu'il se passerait si tu touchais un pétale.
-… Ok j'avoue, je me posais la question.»
Ils discutèrent encore quelques minutes avant de quitter la salle commune. Il était temps pour Rakuyou d'aller se reposer après sa journée de garde et cet entraînement. Braalaka prit un temps pour se servir un verre d'eau et s'appuya contre le plan de travail de la salle, pensive. Elle jeta un regard par les carreaux de la salle ; Marco et Izo étaient en poste sur le pont, en train de bavarder. La jeune femme ouvrit le battant d'une fenêtre et leur demanda s'ils auraient besoin d'elle pour la surveillance de cette nuit, ce à quoi les deux commandants répondirent que non. Ce n'était pas plus mal, le propre état de fatigue de la brune commençant à avancer. Elle pensa donc retourner à sa cabine et s'autoriser une nuit complète de sommeil, mais elle devait d'abord rendre visite à Artie pour vérifier sa tension artérielle, comme elle le lui avait demandé.
Puisque l'infirmière n'était pas dans la salle commune elle devait être dans sa cabine ; Braalaka dévala l'escalier menant aux dortoirs. Soudain elle s'arrêta au niveau des premières portes et tourna la tête vers celle de Barbe Blanche. Tout comme Rakuyou il avait maintenu la navigation la journée et la brune ne l'avait croisé que brièvement pendant une pause repas, elle-même n'étant pas sortie du bâtiment, focalisée sur son entraînement. L'envie lui prise de rendre visite au Yonko comme elle avait l'habitude de le faire durant les derniers soirs à bord du Mobydick, mais après un regard à l'encadrement bas de la porte elle constata qu'il n'y avait aucune lumière qui émanait de l'appartement. Braalaka hésita encore quelques instants et frappa doucement le bois du revers des phalanges, suffisamment pour que le son perce le silence mais pas assez lourdement pour sortir quelqu'un du sommeil. Un froissement de tissu ne tarda pas à se faire entendre et des pas résonnèrent. La porte s'ouvrit doucement sur la cabine plongée dans l'obscurité et le corps de l'Empereur apparut dans l'entrebâillement, éclairé seulement par les lampes du couloir. En levant les yeux vers lui Braalaka remarqua qu'il ne portait pas le long manteau blanc qui couvrait habituellement ses trapèzes et ses épaules massives. Elle pensa qu'elle l'avait effectivement sorti du lit.
« Ah, je suis désolée… Je ne voulais pas vous réveiller… balbutia-t-elle.
- Je ne dormais pas, ne t'excuses pas.»
Barbe Blanche sourit légèrement. Il n'était pas insomniaque, loin de là, même si en tant que pirate il possédait la capacité de se réveiller à la moindre agitation autour de lui. Les courants de la nuit étaient calmes, mais c'était son rôle de capitaine qui le poussait à être en alerte constante. La sécurité de ses fils étant sa priorité, il savait que les nuits qui composeraient le voyage pour récupérer Ace ne seraient pas des plus reposantes. Il s'était donc étendu sur son lit, les yeux clos, à attendre le sommeil tout en écoutant les bruits ambiants avant de comprendre que quelqu'un s'était arrêté devant sa porte. Il avait d'abord imaginé qu'il s'agissait de Marco ou Izo qui venaient lui transmettre des informations, puis l'idée lui traversa l'esprit que cela pouvait être Braalaka, même s'ils n'avaient plus passé de soirées ensemble depuis plusieurs jours. Il avait souri en la découvrant sur le seuil et attendait qu'elle exprime la raison de sa venue, mais elle restait muette et le dévisageait en donnant parfois de furtifs coups d'œils vers ses clavicules. Barbe Blanche haussa un sourcil et son sourire s'étira légèrement plus.
« Hm, vous auriez un peu de temps ? se ressaisit la jeune en réalisant qu'il avait remarqué son moment d'absence.
- Bien sûr. Il y a un soucis ?
- Non… Je voulais juste discuter un peu.
Le Yonko se décala pour la laisser entrer et profita de la lumière prodiguée par le couloir pour saisir une boîte d'allumettes qui traînait sur son bureau, accolé au mur juste à gauche du seuil. Il alluma la mèche d'une lampe à huile posée sur ledit bureau.
- Installe toi, proposa-t-il fermant la porte.
Braalaka saisit une chaise qu'elle emmena vers le centre de la pièce et s'exécuta ; l'Empereur vint s'asseoir sur son matelas, en face d'elle. Il récupéra son manteau qu'il avait déposé à l'extrémité du sommier et le passa sur ses épaules pour pallier la fraîcheur de la pièce qui l'atteignait maintenant qu'il avait quitté ses draps. Il glissa un regard à la brune qui semblait attendre qu'il ait fini, et ajouta d'un air plus sérieux :
- D'ailleurs, je voulais te demander comment se sont passés tes entraînements.
- Plutôt bien, j'ai une sensation de progrès et je délimite mieux mon pouvoir.
- Raconte moi tout.
- Maintenant j'arrive à masquer le haki des autres. Et on suppose que je peux aussi l'absorber à distance, mais c'est ça qui m'épuise le plus.
- Ce sont des capacités vraiment intéressantes… murmura-il en hochant la tête.»
La jeune femme sourit et repensa au pirate du tournoi qui l'avait frappée avec du haki, sans son attaque elle n'aurait peut-être pas encore conscience de ces « capacités ». Une certaine fierté lui réchauffait le cœur d'avoir pu commencer un travail sur cette nouvelle partie d'elle-même, une partie inhérente au monde dans lequel elle se trouvait et qui lui permettait d'y inscrire sa présence. Elle reporta son attention sur le Yonko.
« C'était dans quel contexte la première fois que vous avez utilisé du haki ? demanda-t-elle, curieuse.
L'homme inspira et caressa son menton d'une main, fouillant dans sa mémoire. De longues secondes s'écoulèrent.
- Honnêtement je ne m'en souviens pas.
- Comment c'est possible ? s'étonna Braalaka.
- Je suppose que j'étais trop jeune. J'ai bien quelques réminiscences mais je serais incapable de les classer chronologiquement.
- Trop jeune… Vous aviez quel âge ?
- Hm, 5 ou 6 ans.
- Quoi ?!
Elle écarquilla les yeux. Outre le fait qu'il était difficile d'imaginer cet homme en tant qu'enfant, elle trouvait cela fulgurant que quelqu'un puisse maîtriser son haki de manière si innée alors que d'autres devaient encore s'entraîner à l'âge adulte pour développer les mêmes compétences. L'Empereur ricana doucement, sa voix rauque raisonnant dans son torse.
- C'était quelque chose d'assez simple pour moi, expliqua-t-il en haussa les épaules. Ajoute à ça tous les facteurs qui m'ont poussé à m'en servir vite, et voilà.
- Euh… ça peut se comprendre… Et c'est quoi vos souvenirs de cet âge ? questionna-t-elle d'un ton plus bas, craignant la réponse.
- Des bagarres avec des brigands et parfois quelques déconvenues avec les animaux de l'île.
Braalaka en resta coite, la mine déconfite.
- Ça te surprend autant que ça ?
- O-oui… je trouve ça choquant qu'un enfant soit impliqué dans des situations pareilles, fit-elle en lui lançant un regard désolé.
- C'est un quotidien partagé sur beaucoup d'îles du monde, tu sais. A l'époque Sphinx était vulnérable et il fallait défendre les villages des raids extérieurs. J'ai rapidement compris ma force, donc j'ai pris part.
- Ça ne devait pas être simple comme enfance…
- Hm, oui et non. Hormis les affrontements mes autres souvenirs sont heureux, les habitants de ce pays sont ma première famille, sourit Barbe Blanche.
- Vous n'avez pas connu vos parents ?
- Non, j'étais orphelin.»
La jeune femme hocha doucement la tête et tenta de lui rendre le sourire qu'il lui adressait. Même s'il exposait son enfance avec beaucoup de recul elle se sentait à la fois admirative et attristée à l'écoute d'un tel récit. Barbe Blanche la dévisagea quelques instants avant de demander :
« Et toi, dans quel genre d'environnement as-tu grandi ? Si tu as envie d'en parler, évidemment.
- Bien sûr... Vous vous souvenez de la France sur la carte que j'avais dessinée?
- Oui.
- C'est mon pays natal. Ma mère est française et mon père est originaire de Norvège, un pays beaucoup plus au nord de l'hémisphère. Mon enfance a été assez calme, c'est une région du monde relativement en paix. Le plus gros risque que j'encourais à 6 ans était peut-être de me faire griffer par le chat de la maison, plaisanta-t-elle.
Le Yonko rit doucement et se pencha pour appuyer ses avants bras sur ses genoux, attentif.
- On a vécu en famille jusqu'à ce qu'ils se séparent quand j'avais 11 ou 12 ans, mon père est retourné en Norvège et je suis restée avec ma mère.
- Tu as perdu contact avec ?
- Pas immédiatement, on a un certain nombre de moyens de communications dans mon monde. Mais il y a quelques années je me suis disputée avec lui et j'ai coupé les ponts avec tout ce pan de la famille.
- Il y avait des raisons j'imagine.
- Oui. On ne choisit pas ses géniteurs, souffla-t-elle.
-... J'aime à dire que nous sommes tous des enfants de l'océan, et qu'on peut constituer une famille de ceux qu'on choisit de fréquenter, murmura l'Empereur d'un ton bienveillant.
- J'aime bien cette idée.»
Braalaka eut une pensée pour les différentes personnes avec qui elle avait l'habitude de partager ses journées. Ses amis lui manquaient et elle espéra qu'ils se portaient bien.
Des coups toqués à la porte sortirent les deux interlocuteurs de leur discussion et Barbe Blanche haussa un sourcil.
« Oui ? tonna-t-il.
La poignée s'abaissa et la tête de Marco apparut dans l'embrasure de la porte.
- Yoi, on de…
Le phœnix s'interrompit en remarquant Braalaka, surpris de la voir.
- On devrait arriver demain en milieu de journée si les courants ne changent pas.
Braalaka sourit, plutôt contente d'entendre cette nouvelle. Le voyage se passait certes sans encombres mais cela lui manquait de se déplacer dans un espace plus ouvert et surtout plus lumineux ; l'obscurité marine commençant à la faire se sentir un peu déboussolée.
- D'accord. Je m'occuperai d'accoster. Idéalement il faudrait passer par le quai privé de Neptune, ce sera plus discret que de prendre le port principal.
- Bien reçu. Tu veux que je prévienne Namur ?
- Oui s'il te plaît.
- Ok!»
Le commandant ferma la porte aussi vite qu'il l'avait ouverte, laissant un silence confortable retomber sur la pièce. Barbe Blanche se redressa pour s'étirer, les doigts entrecroisées et les bras tendus vers le plafond ; ses épaules et son dos émirent des craquements audibles qui lui tirèrent un grognement de satisfaction. Il rouvrit les yeux pour les poser sur Braalaka.
« Je repense à ta question de tout à l'heure. Je n'ai plus en mémoire ma première utilisation du haki, mais je peux te raconter celle du fluide royal…
- Oh, dites-moi, fit-elle avec intérêt.
- C'était sur Sphinx, peu de temps avant que je décide de prendre la mer. Je devais avoir 15 ou 16 ans... Un équipage pirate avait accosté l'île de nuit et commençait à incendier la côte, donc j'y suis allé avec d'autres habitants. Le capitaine était une grosse pointure du nouveau monde, je m'en suis rendu compte quand je me suis retrouvé seul contre lui. On s'est battus un moment mais je n'ai pas pu prendre le dessus et j'accumulais de bonnes blessures. J'ai vraiment pensé qu'il allait me tuer, je ne m'étais jamais senti aussi furieux et paniqué à la fois. Mon haki des rois s'est activé sous le coup de l'émotion.
- Wow… Ça devait être un sacré moment…»
L'Empereur hocha la tête, tous les aspects du combat étaient toujours aussi clair dans sa mémoire, même après plus d'une quarantaine d'années. La brune passa une main dans son cou pour se gratter la base de la nuque, pensive. Shanks avait utilisé le fameux fluide royal par deux fois en sa présence et elle y avait résisté sans s'en rendre compte. Cela la laissait un peu sur sa faim, maintenant qu'elle avait conscience de son pouvoir et qu'elle pouvait le perfectionner. Elle se redressa sur sa chaise, la curiosité prenant le pas sur la fatigue.
- Est-ce que je peux m'entraîner avec vous ? J'aimerais voir combien de temps j'arrive à absorber ce type de haki.
- Maintenant ?
- Oui, ça irait ?
- Si on limite la pression des pouvoirs à cette pièce il ne devrait pas y avoir de problèmes avec la bulle, oui.
- Je demandais pour vous, pas pour le bateau, lança Braalaka avec un rictus narquois non dissimulé.
Barbe Blanche écarquilla les yeux de surprise, peu habitué à être provoqué de la sorte. Il reprit rapidement contenance et plissa les paupières pour fixer la brune d'un air faussement sévère, la jaugeant de haut en bas tandis qu'un sourire de tigre étira ses lèvres.
- Tu es bien insolente fillette, ce n'est pas une manière de parler à ses aînés… Debout, ordonna-t-il.
La jeune femme souffla du nez, amusée. Ils se levèrent et se toisèrent encore quelques secondes avant que le Yonko ne reprenne son sérieux.
- Surtout dis moi si il y a un problème.
- Pas de soucis.
Elle attrapa sa chaise et alla la reposer devant le bureau, où elle resta pour instaurer la distance nécessaire à l'exercice.
- Prête ?»
Braalaka prit une profonde inspiration et hocha la tête, concentrée sur le perception de son pouvoir qui affluait autour d'elle, formant comme une fine enveloppe. L'Empereur activa son haki des rois en veillant à le diffuser seulement à travers la chambre, et avec l'intensité minimale, celle qui sert à assommer ou manipuler les gens. Lorsque la brune sentit le haki entrer en contact avec son espace elle attendit quelques instants, tentant de jauger à quel point l'effort serait grand pour batailler contre cette énergie. Elle était certaine que le Yonko avait bien plus de ressources et d'endurance qu'elle, alors elle opta pour une stratégie immédiate : elle se focalisa pour étendre soudainement sa bulle, absorbant tout le haki sur le chemin. Barbe Blanche sourit et renforça significativement l'intensité de son flux, mettant un stop à la progression de l'anti-haki. Des zébrures violacées apparurent par flashs devant Braalaka, qui écarquilla les yeux. La matérialisation de ce fluide était encore plus impressionnante que celle des autres formes, et elle fixait le centre de la pièce où les éclairs pourpres s'arrêtaient net, absorbés par sa barrière invisible. Une fine pellicule de sueur ne tarda pas à se former sur son visage et elle fronça les sourcils de concentration, déployant toute sa force pour se maintenir. Il lui sembla entendre un encouragement de la part l'Empereur par dessus les crépitements des éclairs mais son attention était tout à l'exercice et elle ne distingua pas ses mots. La respiration de la jeune femme se fit plus hachée et elle sentit son pouls battre sous ses tempes avec force, lui procurant une douleur irradiante dans le crâne. La notion du temps était bien relative dans un pareil moment mais elle estimait à 5 ou 6 secondes le temps qu'elle utilisait son pouvoir. C'était clairement moins que pendant les entraînements avec Rakuyou et Izo et elle se borna à tenir au moins 10 secondes. Elle ressentait l'affluence des zébrures d'énergie tout autour de son enveloppe d'anti-haki ; ses mâchoire se crispèrent et elle bloqua sa respiration dans un ultime effort pour les absorber plus vite et agrandir encore son espace. Le Yonko remarqua son augmentation en puissance et réagit en mettant plus d'intensité dans ses propres vagues de haki, refusant de la laisser lui prendre du territoire. La vision de Braalaka se troubla rapidement et elle ne distingua bientôt plus qu'un écran noir. Son équilibre lui fit défaut et la sensation de se tenir debout devint incertaine si bien qu'elle ne sentait plus le positionnement de son propre corps, comme lorsqu'on se relève trop vite après être resté allongé longtemps. Barbe Blanche vit la jeune femme tanguer et stoppa immédiatement son flux de haki et se précipita vers elle, enroulant un bras autour de son buste pour l'amener contre lui et l'empêcher de s'écrouler. Braalaka sentit la poigne de l'Empereur la soutenir et s'y laissa reposer, trop sonnée pour faire quoi que ce soit elle-même. Son crâne lui faisait un mal de chien et elle avait fermé les yeux.
« Braalaka ? appela le Yonko sans la lâcher.
- Hmpf… Ma tête… gémit-elle.
Elle respirait de manière erratique, son corps engourdi tentait de se remettre d'avoir flirté avec sa limite.
- Allonge toi un peu, dit-il en l'emmenant vers son lit.»
Il l'aida à s'installer sur le matelas, la brune s'étendit sur le dos et porta ses mains à son visage pour se masser le front, non sans grimacer et laisser échapper un grognement de douleur.
- Je me permets…»
Barbe Blanche s'assit à côté d'elle et plaça un index contre son cou, sous sa mâchoire ; comme il s'y attendait son pouls tambourinait sous sa peau. Il se focalisa et attendit, prêt à aller chercher Artie ou Marco si ça ne se calmait pas. Plus les secondes s'écoulaient plus il pouvait sentir son rythme cardiaque ralentir et se stabiliser, tout comme sa respiration. L'Empereur retira sa main, soulagé. S'autorisant de nouveau à bouger, Braalaka prit une profonde inspiration et tenta d'ouvrir les yeux. Sa vision était revenue mais tout ce qu'elle distingua était l'amas des lattes du plafond, les nervures ébènes qui ressortaient naturellement du bois semblaient se mouvoir sur elles-même.
« Le plafond bouge… murmura-t-elle en fronçant les sourcils.
Il leva la tête et constata des planches coupées tout à fait droites et montées bien alignées, tout ce qu'il y avait de plus statique.
- Je pense que tu as un peu trop forcé.
- Hm…»
Elle referma les yeux et déplaça ses mains sur ses tempes pour les masser du bout des doigts, un soupir lent s'échappa de ses narines. Un demi-sourire apparut sur le visage de Barbe Blanche, qui se détourna pour s'installer au bord du matelas comme il l'avait fait plus tôt dans la soirée, laissant de la place à la brune pour qu'elle reprenne ses esprits tranquillement.
Il passa leur petit affrontement en revue dans sa mémoire : même s'il n'avait pas utilisé toute la pression qu'il pouvait produire et qu'il avait encore beaucoup de haki en réserve, il avait été impressionné par sa résistance, surtout avec le manque de maîtrise de sa capacité. Bien développé, ce anti-haki serait certainement une compétence redoutable et il ne doutait pas que la brune soit capable de la perfectionner. Il s'était déjà avoué qu'il éprouvait une forme d'admiration pour la jeune femme ; malgré sa situation délicate et les soucis qu'elle traversait elle n'avait jamais cessé de réagir pour trouver des solutions, tout en ayant fait preuve de bienveillante envers l'équipage, en voulant aider. Sa force de caractère et sa constance forçaient son respect. Aussi il aimait sa manière d'être franche avec lui, même s'il savait que sa taille et sa réputation l'avaient impressionnée dans les premiers temps.
Quelques minutes passèrent en silence jusqu'à ce que l'Empereur sente un regard dans son dos. Il tourna doucement la tête pour voir par-dessus son épaule. Braalaka, qui semblait avoir retrouvé un état normal, avait rouvert les yeux et l'observait.
« Comment vous faites tenir votre moustache ?
Barbe Blanche laissa échapper un rire rauque.
- Je me demandais combien de temps tu mettrais avant de me questionner sur ma pilosité. C'est une question d'implantation et d'entretien.
- Même pas un peu de gel ou d'eau sucrée ?
- Non, que du savoir-faire.
La jeune femme afficha un rictus étonné et tendit la main. Le Yonko se pencha jusqu'à ce qu'elle puisse toucher sa moustache, elle posa un doigt au dessus de ses lèvres et le promena le long de la mèche savamment brossée en croissant de lune. La texture était étonnamment douce, elle sentit qu'aucun produit ne la liait.
- Ah oui… Ça vous va bien, concéda-t-elle en retirant sa main.
- Merci, sourit-il plutôt fier. Au fait, ça va mieux ?
- Je crois.
Braalaka se redressa et s'étira avec précaution. Sa tête ne la lançait plus et elle voyait normalement. Elle se porta jusqu'à l'extrémité du matelas et laissa ses pieds toucher le sol. En mettant un peu de poids sur ses jambes elle constata qu'elle ne tremblait pas, alors elle se leva.
- On dirait que c'est passé. Par contre je me sens épuisée.
L'Empereur jeta un œil au réveil sur son chevet, qui indiquait presque une heure du matin.
- Je pense qu'il serait raisonnable de se reposer. La journée de demain sera remplie.
- C'est vrai que vous devez reprendre la barre dans quelques heures ! Je suis désolée, je n'aurais peut-être pas dû rester aussi longtemps…
- Non, ne t'inquiète pas pour ça. C'était un plaisir.
Il se leva pour l'accompagner à la porte.
- Bonne nuit.
- Merci, bonne nuit à vous aussi.»
Ils s'adressèrent un sourire avant de fermer la porte, et Braalaka reprit la direction de ses appartements en retenant un bâillement. Elle entra, et en se retournant pour attraper la poignée son regard se posa sur la porte en face de la sienne, celle d'Artie. Indécise, elle resta figée sur le seuil. Sans doute se ferait-elle enguirlander pour 'avoir eut l'imprudence de ne pas passer voir l'infirmière' après ses entraînements, en particulier après celui qui venait d'avoir lieu ; mais son lit l'appelait suffisamment fort pour qu'elle l'écoute. La jeune femme s'écroula sur son matelas eut à peine le temps de repenser à sa journée qu'elle s'était déjà endormie.
