Author Note: Enfin! Je l'ai enfin terminé! Je n'en voyais pas la fin, mais d'un autre côté j'en étais ravie. car il s'agit comme vous le savez, du dernier chapitre de cette histoire. J'espère que vous l'apprécierez autant que j'ai aimé l'écrire.

Je pensais qu'il serait plus court que les autres, et au final c'est peut être le plus long...

La fin du chapitre tente de donner une ouverture vers la continuité du manga. J'espère avoir réussi à effectuer la transition vers les nouveaux chapitres de Yana.

L'épilogue sera court. Voir très court comparé à ce chapitre. Simplement parce qu'il n'y a plus rien à dire. Mais je veux clôturer convenablement cette histoire et une chose me tient à coeur pour cela soit fait. C'est pourquoi j'ai besoin de cet épilogue même si la fin de ce chapitre serait sans doute suffisant.

Pour les ciseaux... j'avoue que j'ai modifié leur utilité, normalement ils devaient avoir une place plus grande. Mais si j'avais fait cela, j'aurai du écrire au moins un ou deux chapitres de plus, voir repartir dans une autre petite aventure. Ce que je ne voulais pas. Cette histoire doit prendre fin. Leur influence est donc réduite par rapport à mon idée initiale.

Je pense m'être éloignée quelques peu de la personnalité des personnages mais pouvais-je faire autrement au final? Le dernier chapitre m'a pourtant conforté dans la relation entre Ciel et Sebastian et a adoucit ma culpabilité. Mais ce sera à vous de juger si ce qui se passe entre eux dans ce chapitre est crédible ou non...

Je tiens à remercier toutes les personnes qui m'envoient des commentaires, auxquels j'adore répondre et remercie également les personnes qui m'envoient des reviews auquel je ne peux malheureusement pas répondre car ils ne sont pas inscrits. Mais sachez que je suis très très touchée par votre confiance et votre enthousiasme pour cette histoire et le fait que vous me pardonniez d'être aussi longue à publier. Merci aussi pour vos encouragements dont j'ai souvent besoin.

Autre petite chose: pour ce chapitre, je ne me place pas en discours omniscient mais en direct, du point de vue de Ciel à la première personne du singulier. Question de facilité, car Ciel et Sebastian laisse transparaître très peu de choses, c'était plus facile pour moi d'écrire le texte en étant dans la tête d'un des deux personnages. Et j'ai choisi Ciel parce que soyons honnête... je ne sais pas du tout ce qui se passe dans le cerveau d'un démon!

Bonne lecture!


Ciel POV

Il me fit presque de la peine, alors qu'il se tenait à genoux devant moi. Le poison qui avait couru dans ses veines l'empêchait de se tenir convenablement debout. Sa peau écaillée et son visage encore boursoufflé le rendaient presque hideux. Je l'avais trouvé plutôt beau garçon malgré sa chair reptilienne disgracieuse. Quand il prononça mon «nom», un filet de bave coula le long de son menton. Évidemment, dire «Smile» avec tant de haine avec cette bouche engourdie lui était sans doute difficile.

Je me souvenais avoir eu peur de ses serpents, et de m'être caché derrière une caisse de bois à son approche, effrayé qu'il ne me trouve trainant près des tentes interdites. Et maintenant, il gisait misérablement à mes pieds, incapable de se lever.

À la nuit noire, mon majordome avait pénétré dans la Newgate prison pour infiltrer le poison dans les veines de notre «assassin», le plongeant dans un sommeil semblable à la mort. Au matin, un médecin vint constater le décès et les deux piqures sur son bras ressemblaient trop à celle d'un serpent pour que les causes de la mort puissent être discutées. Des rumeurs avaient fini par envahir la prison, racontant l'histoire du serpent qui avait donné la mort à son maître pour lui éviter la sentence de la Reine. Des commis avaient emmené le corps jusqu'à l'entreprise de pompe funèbre d'Undertaker, qui l'avait gardé au chaud jusqu'à l'arrivée de Sebastian.

Undertaker venait de partir. Il avait, semblait-il, insisté pour aider Sebastian à transporter au manoir le cercueil dans lequel Snake gisait endormi. Cela ne semblait pas ravir mon serviteur, qui paraissait presque contrarié par la présence du croque-mort.

«À bientôt Jeune Comte» me susurra-t-il à l'oreille de sa voix trainante, en me glissant sa main dans les creux des épaules. Je détestais cela. Son visage était trop près du mien et ce geste me laissait toujours une sensation glacée qui se propageait dans mon dos, pour s'insinuer désagréablement dans mon ventre. Mais ce qui me surprit fut le regard que Sebastian lui lança, un mélange de colère et de dégoût.

À son départ, il n'avait pas fallu longtemps à Snake pour reprendre connaissance, mais un certain temps pour pouvoir remuer son corps. Le poison, un mélange inconnu concocté par Sebastian, composé de digoxine et d'autres mélanges plus dangereux, rendait les battements de cœur si peu puissants qu'ils devenaient inaudibles, juste assez forts pour envoyer de l'oxygène au cerveau.

Au début, il tortillait son corps maigre, lançant des regards frénétiques de droite à gauche. Quand il fut capable de bouger, il s'extirpa du cercueil. Je le regardais manœuvrer maladroitement pour passer aux dessus des panneaux de bois, poser les mains au sol et faire glisser ses jambes encore paralysées. Il y mettait de la force et sa volonté m'impressionna. Mais après tout, il avait passé sa vie à tenter de survivre. Il avait sans doute connu bien pire. J'en avais rencontré, des pauvres diables de l'East End. Je savais que la plupart des enfants de ses quartiers ne dépassaient pas l'âge de cinq ans et que les parents, quand ils en avaient, préféraient boire leur maigre salaire plutôt que de nourrir leur progéniture. Avec ses difformités, il avait sans doute été emporté dans un de ses cirques où on exhiber des monstres dans les villages sous les regards et les rires malveillants des badauds. Il s'était sorti de cette vie et j'avais replongé ce garçon dans un désespoir qu'il avait tenté de fuir.

Quand les yeux de Snake purent se concentrer sur les traits de mon visage et qu'il me reconnut ainsi que Sebastian, il tomba en arrière, plaquant son dos contre le panneau du cercueil, effrayé. Des sifflements se firent entendre. De là où je me tenais, je pouvais apercevoir les serpents, dont Sebastian avait noué le corps et qui gigotaient encore dans le cercueil.

« Du calme. Nous ne te voulons aucun mal.» La douceur de ma propre voix me surprit. J'y ajoutais donc une pointe d'autorité. «Nous t'avons fait évader de prison, et si tu coopères, il ne t'arrivera rien.»

«Pourquoi m'avoir épargné, gloussa-t-il, en me regarda fixement, les yeux brulants de haine.

«Tu as pénétré dans ma propriété. Tu t'es rendu coupable de meurtre dans mon manoir et tu as tenté de m'assassiner. Pourquoi ?»

- C'est à moi que tu oses demander pourquoi?» Il avait crié et sa voix résonnait sur les murs, claire et puissante, trop forte pour son état. Je cachais ma surprise et l'écoutai. « Je n'ai pas assez de mots pour te dire ce que tu as détruit. C'est toi qui es venu dans notre cirque, c'est toi qui es rentré sur notre territoire. Quand tu t'es introduit dans la tente principale, mes amis ont disparu! Je savais qu'ils me cachaient quelque chose... Mais ils étaient sa famille! Tu n'avais pas le droit de me les enlever, tu n'aurais pas dû t'immiscer entre nous.»

- J'ai obéi à la Reine qui est également ta souveraine, lui répondis-je d'une voix ferme. Crois-tu que je peux désobéir à Sa Majesté? Je suis venu sur ses ordres pour enquêter sur des enlèvements d'enfants, des enlèvements perpétrés par tes amis! Nous nous sommes introduits dans votre cirque dans le but de les confondre.

- Des voleurs d'enfants?... Non, je ne te crois pas... c'est impossible...

- Que tu le croies ou non, c'est la vérité.

- Qu'en sais-tu! Et même si cela est vrai, pourquoi les avoir tués toi! Sans procès, sans qu'ils aient pu se défendre, sans que j'aie pu leur dire au revoir...» Sa voix s'étrangla dans sa gorge, et des larmes coulèrent sur ses joues. «Tu m'as pris mes amis, tu as pris ma famille! Aujourd'hui, je n'ai plus rien et c'est de ta faute! Je ne te pardonnerai jamais!

Je me mordis la langue, luttant contre la colère qui montait en moi en vagues furieuses. J'aurais tant voulu lui lancer mille mots d'horreur pour qu'il comprenne l'absurdité de sa tristesse. «Ta «famille» n'enlevait pas seulement des enfants. Ils les mettaient dans les mains d'un des hommes les plus abjects que cette terre ait pu engendrer. Un monstre qui s'amusait d'eux comme s'ils étaient des pantins désarticulés, bons à illustrer ses fantasmes les plus abominables jusqu'à plonger des couteaux dans leur poitrine fragile et faire de leurs os polis des membres chirurgicaux souples pour que ses fils, voleurs d'enfants, puissent parader dans leur cirque de malheur! Et tu penses que je suis un monstre? Toi qui, de ville en ville, accompagnais le carnaval de la mort!»

Mais je retins le flot de paroles qui menaçaient de couler de ma bouche. Sa tristesse réveillait une blessure que je n'avais jamais pu guérir. Son visage, où transparaissait cette colère insoutenable mêlée d'un chagrin écrasant, je l'avais déjà vu. Je l'avais même porté, ce visage de désespoir et de haine. J'avais hurlé mon désir de vengeance, comme Snake, et Doll avant lui. Et comme moi, il ne pourrait abandonner sa haine et elle finirait par le consumer.

«Tuer? m'enquis-je, feignant l'étonnement. Quelqu'un t'a donc dit qu'ils étaient morts?»

Il me regarda, surpris, et malgré sa réticence à vouloir interpréter mes paroles, je discernais au fond de ses yeux l'envie de me croire et d'espérer que ses amis n'avaient pas disparu.

- Que veux-tu dire?

- Nous ne sommes pas parvenus à les arrêter. Ils ont disparu lorsque mon identité a été dévoilée. Je n'ai donc pas pu achever notre affaire. Ils n'auraient pas dû s'enfuir ainsi, sans que nous ayons pu savoir s'ils étaient coupables ou non. Leur fuite vaut pour un aveu pour Sa Majesté.

- Non... je... je suis persuadé qu'ils sont innocents.

Ah! Une ouverture dans cette conversation hasardeuse, la ruse prenait forme.

C'est ce que je pense aussi. Et nous devrons prouver cela quand nous les retrouverons.

Mais le type... celui qui avait les cheveux rouges, il a dit que vous les aviez tués... Il a dit que Black était un démon...

- Comment peux-tu faire confiance à ce genre de personne? N'as-tu pas d'yeux pour voir quel genre d'individu il est? Tu t'es fait berner, le démon c'était lui! Tu as décidément le don pour choisir tes amis.»

Je pesais sur chacun de mes mots, désireux de profiter de son égarement. «La première fois que je l'ai rencontré, c'était au13 Miller's Court, dans le quartier de Whitechapel, alors que j'enquêtais sur l'affaire Jack l'Éventreur à la demande de la Reine. Quand nous sommes entrés dans la chambre de Mary Jane Kelly, il avait terminé de dépecer la jeune femme, dispersant ses organes un peu partout dans la pièce. Je doute qu'un homme qui aime autant la couleur du sang soit digne de confiance.

- Comment puis-je te croire?

Décidément la persuasion ne marchait pas. L'agacement montait en moi, et le calme apparent de ma stature me surprit moi-même. Sur le ton de la raison, je repris ma tirade d'une voix monotone et claire.

« J'aurais pu te laisser dans ta cellule. J'aurais pu t'abandonner à ton sort. Sais-tu qu'à la Newgate Prison, John Berry fait des merveilles en tant que bourreau. Il calcule si médiocrement le poids du supplicié et la longueur de la corde qu'il arrive que la chute décapite le condamné. Si tu veux te retrouver entre ses mains d'alcoolique et ne faire que prier qu'il ne se trompe dans ses chiffres avant de te passer la corde au cou, je peux toujours te faire ramener en prison. »

Mes paroles l'avaient touché, il semblait terrifié.

«Ne me fais pas regretter la compassion que j'ai éprouvée envers toi.» Lui dis-je avec une voix douce qui tinta étrangement à mes propres oreilles. « Sers-t'en pour passer à autre chose.

- Je n'ai nulle part où aller... » Il ne me regardait plus. La tête baissait, ses cheveux couvraient ses yeux tristes. « Au cirque il n'y a plus personne qui m'attend.

- Tu peux rester ici.»

Je le pensais, mais je savais d'où avait pu me venir cette idée. Je sentis le regard de Sebastian dans mon dos, désapprobateur, mais je poursuivais malgré tout.

«Comme je te l'ai dit, nous n'avons pas pu résoudre l'affaire de tes amis, mais nous sommes toujours à leur poursuite. Rester auprès de nous te permettra de les revoir plus rapidement. Et si je réussis à prouver leur innocence, tu pourras partir avec eux. En attendant, je te paierai, tu auras un emploi respectable de valet, au service d'une des familles les plus illustres de l'Angleterre.» Je m'approchais de lui, et à ma surprise, les serpents qui glissaient sur lui ne sifflèrent pas contre moi, preuve que leur maître n'éprouvait aucune répugnance à mon approche. J'entendis Sebastian m'appeler, m'insufflant la prudence. Mais je ne l'écoutai pas.

«Acceptes-tu ma demande Snake?»

Je tendis la main, m'inclinant légèrement. Après une courte hésitation où il plongea son regard dans le mien, cherchant le mensonge que je dissimulais si bien, il me tendit la sienne, et plaça ses doigts encore glacés, dans les miens.

«Bien, concluais-je en m'éloignant. Je dois parler avec Sebastian, ensuite il t'emmènera dans ta nouvelle chambre et te présentera ensuite aux autres serviteurs. Bienvenue dans le Manoir des Phantomhives. »

Je sortis par la porte que Sebastian ouvrait sur mon passage. Quand elle fut close, il parla : « Vous savez que je ne peux pas mentir, jeune Maître. »

C'était sans doute sa façon de m'exprimer son désaccord face à mon mensonge, lui qui ne pouvait que rare me montrer d'irrespect ou contredire mes décisions. C'était ce qu'impliquait son esthétisme de majordome, n'est-ce pas ?

- Si tu t'accroches à un mensonge assez longtemps il finit par devenir vrai, dis-je sans le regarder. Bien sûr pour toi, c'est une conception très humaine des choses. Alors je te demanderai simplement de te taire à propos de ce qui s'est passé. Occupe-toi de lui maintenant. Tu as beaucoup à faire.

- Bien, Jeune Maître.»


Le gramophone grinçait douloureusement dans le salon. Lizzie me l'avait apporté de Londres, à Noël dernier. Personne n'avait pensé l'utiliser jusqu'à ce qu'il attire l'attention de mes serviteurs qui, pour on ne sait quelle raison, avaient aujourd'hui l'âme curieuse et désiraient entendre la musique sortir de cette invention si récente. Malheureusement, Finni qui n'avait pas compris le principe du gramophone et essayait de le faire tourner le plus vite possible, écrasant les notes gravées sur le disque phonographique.

Après un certain temps de ce son insoutenable, alors qu'une migraine épouvantable menaçait de m'anéantir, Sebastian avait remplacé le garçon et retrouvé le rythme de la musique, une nocturne. C'était de Chopin, j'en reconnus enfin les clameurs douces et mélancoliques.

Calmé, je massais légèrement mes tempes pour adoucir mon mal de tête, puis je posais mes yeux sur le classeur de carmin rouge placé devant moi.

Un peu plus tôt dans la matinée, j'avais sorti de ma table de nuit les feuillets qu'Arthur m'avait laissés et je les avais mis dans ce classeur rouge pour éviter que des yeux curieux ne puissent en voir le contenu avant que j'aie eu l'occasion de les lire. Avant de sortir, j'avais vérifié que les ciseaux se trouvaient toujours sous mon oreiller, où était leur place à présent, non loin de mon révolver. J'apprenais la prudence, contre le monde réel et surnaturel.

Assis dans un fauteuil de velours, maintenant que la musique du salon ne me meurtrissait plus les oreilles, j'ouvris le portefeuille cramoisi posé sur l'échiquier sans pièces à jouer et j'entrepris la lecture des feuillets.

Dès le début de ma lecture, une révélation s'imposa à moi. Je détestais ces pages. Je haïssais chaque mot couché sur le papier froid. J'avais commencé à parcourir ce «drame» - comme son auteur avait si arbitrairement voulu le nommer - simplement pour découvrir des secrets qui m'avaient échappé. Quelques détails que je n'avais pas saisis alors que j'étais inconscient, ou quelques paroles qui n'avaient pas su retenir mon attention. C'était tout ce que je désirais trouver dans ses pages.

Oh des secrets j'en apprenais, cela était certain. Et je savais maintenant le danger que pouvait représenter une faux de la mort, aussi petite soit-elle dans les mains de la mauvaise personne... Et j'aurais dû en rester là. Mais pour ma plus grande honte, je ne pouvais pas me détacher de ma sombre lecture et chaque mot résonnait en moi en cris confus. Il avait du talent, cela était évident. À sa façon de décrire ces jours sombres, il était clair qu'il avait la plume d'un génie et ce qui était pitoyable c'est qu'il ignorait totalement son potentiel extraordinaire.

Mais je détestais ce que je lisais, car il n'avait rien omis ni rien passé sous silence comme la décence l'aurait sans doute voulu. Je sentais le rouge me monter aux joues et une chaleur plus honteuse m'échauffer bien plus bas lorsqu'il étalait sur du papier froid une passion qui n'aurait jamais dû être dévoilée par une plume impudique.

Je ne devrais pas lire cela. Je ne voulais pas savoir ce que l'on ressentait au contact de ma peau ni à la douceur de mes cheveux, qu'on décrive ma sensualité ou qu'on loue mes caresses. J'aurais voulu que l'humiliation me tue, mais elle n'en fit rien, et mes yeux continuaient de parcourir avidement les phrases inconvenantes. Il écrivait comme il parlait. Sans décorum, artifice ou étiquette, avec une honnêteté déconcertante.

Mais ce qui me troubla davantage, c'était la description de la coquille vide que je formais le jour où je crus que j'avais perdu Sebastian.

Les mots lourds sonnaient dans ma poitrine. Désespoir ? Tristesse ? Folie ? Comment osait-il ?

Mes doigts se crispaient sur le papier et je finis par déchirer des pages entières de fureur. Ce qui attira les regards inquiets de mes serviteurs et la suspicion de Sebastian qui me regardait fixement sans perdre le rythme imposé par le gramophone.

Je n'en avais cure. Je serrais toujours les morceaux déchirés dans mes doigts qui devenaient blancs.

Ses mots… Ses mots qui formaient le miroir de mon désespoir, alors que je le croyais mort, m'étaient insupportables et m'avilissaient jusqu'à me dégoûter. Et je sentais des larmes de colère me monter aux yeux.

Je voulais la vengeance, et pour cela je voulais Sebastian. Mon avidité, c'était de désirer l'avoir à moi, à mes côtés. Je n'étais pas ingrat ni présomptueux. Je savais que sans Sebastian, mon existence n'aurait pas eu plus de sens que celle des pauvres diables enfermés dans des cages que nous avions fait bruler sans pitié, car je les savais perdus. Tout cela je le savais et ma propre fragilité m'écœurait et justifiait tous les efforts que j'employais pour la cacher. Mais en découvrir la description, sous le regard et les mots d'un autre, était une insulte, plus dégradante que me réveiller le corps recouvert du sang d'un démon. Ne suis-je donc rien sans Sebastian ?

J'en avais assez. D'un pas brusque, je sortis du salon, le portefeuille de maroquin rouge sous le bras, ignorant les regards qui me suivaient. Je traversais le hall où j'exposais mes peintures et autres œuvres de collection dont je m'étais fièrement fait acquéreur. J'ouvris la porte du petit salon, traversant la pièce et je m'avançais jusqu'à la cheminée pour jeta les feuillets dans la braise ardente. À peine le papier se mit-il à bruler qu'un sanglot s'échappa de mes lèvres et je plaquais ma main sur ma bouche pour en étouffer d'autres. Aucune larme sur mes joues, mais mon cœur se comprimait douloureusement dans un étau ardent. Mes mains ne lâchaient pas le rebord de l'âtre, de peur que je ne glisse à genoux. Les crépitements des pages qui se consumaient résonnaient à mes oreilles. La colère s'éteignit soudain remplacée par cette tristesse qui devenait commune, mais n'en était pas moins insupportable.

Qu'essayais-je de faire disparaître ainsi dans le feu ? Je ne me croyais pas si lâche, et pourtant les flammes qui noircissaient pages, effaçant chaque mot, m'assombrissaient l'âme. Alors que les feuilles se transformaient en cendre, je me permis un instant de penser à ce dont je m'interdisais depuis ces derniers jours.

Avais-je aimé les paroles d'Arthur, avais-je tremblé au contact de ses lèvres et ses mains sur moi ? Oui, je l'avais aimé cette passion brulante et humide, inconnue à ma peau, si nouvelle et dévorante. Ces mots qu'il susurrait si parfaitement à mon oreille, les caresses qui avaient plus d'innocence que je n'en avais connu moi-même. J'avais tant aimé tout cela, que j'avais compris que cela n'était plus pour moi. J'avais le don de refuser le bonheur qu'on m'offrait.

Les demandes d'Arthur pour m'emmenaient loin de tout m'avait fait sourire, ses déclarations, ses caresses, sa passion pour moi, tout cela avait réveillé une tendresse romantique qui m'avait été inconnue, mais je ne l'avais pas moins trouvé futile. Oh oui je voulais qu'il vive, celui qui m'aimait tant, mais la vérité, c'était que son amour m'avait blessée avec une cruauté qu'il ne pouvait imaginer. Et plus cruels encore avaient été les mots prononcés par Sebastian, des mots que je n'aurais pas su comprendre si Arthur ne les avait pas prononcés avant lui. Il prenait un tout autre sens dans la bouche du démon. Ils perdaient toute légèreté et tout espoir, un goût de mort.

Tout cela ne faisait que révéler ce que je savais déjà. Si je n'avais pas connu ce mois fatidique, si tout ne m'avait pas été brutalement arraché si jeune, j'aurais pu connaître l'insouciance de Soma... j'aurais pu aimer Arthur.

Mais la souffrance avait si profondément souillé mon être que l'amour, quelle qu'en soit la beauté m'était inaccessible.

On ne pouvait faire cela à un enfant. Il ne comprendrait pas. Il ne pourrait plus jamais comprendre. Assassiner sa famille, l'enfermer en le traitant comme une bête, en l'affamant et en l'humiliant, puis le préparer à être sacrifié sur un autel devant un public masqué au sourire mauvais et au rire sinistre. Même sauvé, cet être ne comprendra jamais qu'on lui parle d'amour. Il ne saura pas apprécier des lèvres si douces contre les siennes.

Aurais-je pu expliquer à Arthur qu'une partie de moi était restée dans une cage puante et que je revivais des instants d'horreur, même dans les journées les plus ensoleillées et les plus apaisantes, qu'une odeur de souillure me collait à la peau et que malgré ma stature noble je portais dans mon cœur les stigmates de tortures inhumaines? Pouvais-je lui expliquer que seule la voix de celui qui serait mon bourreau me rappelait encore et encore qu'il en avait arraché les barreaux rouillés? Que sortant d'une brume noire, il était apparu devant moi, m'écorchant cruellement un œil, pour devenir mon cavalier noir?

Et aujourd'hui, les mots de ce démon, même à la saveur des plus amères, valaient plus que la douceur des siens.

Je me redressais, époussetant ma veste et m'éloignant de l'âtre. Ma place était dans l'ombre depuis longtemps. Et je n'avais jamais eu le goût des regrets. Ces pages appartenaient aux flammes. Et cela était mieux ainsi.

Je sortis du petit salon, prenant garde à mon apparence avant de franchir la porte et je repassais le couloir où s'étalaient mes peintures. Une d'elles attira mon regard et je m'attardais devant ce tableau si célèbre et si lugubre qui représentait une jeune fille, sur le point de se noyer. L'Ophélie de Millais, l'œuvre qu'Abberline avait si bien reconnue lorsqu'il était venu m'apporter le pot-de-vin pour l'affaire Jack l'Éventreur. Cela me paraissait avoir eu lieu il y avait une éternité...

L'artiste avait parfaitement représentant la tragique héroïne de Shakespeare, de la pièce « Hamlet ». Rendue folle de douleur lorsqu'elle apprit que son grand amour avait feint de l'aimer et avait tué son propre père, elle s'était noyée dans la rivière. Une magnifique peinture à l'égal de la pièce que j'appréciais tout particulièrement. J'aimais Hamlet. J'aimais sans doute me dire que je lui ressemblais, lui dont toute la vie était tournée vers la vengeance.

Mais alors pourquoi la pièce maîtresse qui ornait mes murs représentait-elle la belle Ophélie ?

« Ophélie perdue parmi les flots, quelle œuvre magnifique!»

Je sursautai, me tournant vers l'homme qui avait interrompu mes pensées. À ma grande surprise, Lau se tenait à mes côtés, admirant l'œuvre devant laquelle je m'étais arrêté.

- Vous n'êtes pas parti ?

- Ah non, je me sens bien ici. Cette fête a été une véritable réussite.

Malgré moi, j'haussais un sourcil, étonné que les heures sombres passées dans ce manoir aient pu à ce point enchanter mon partenaire d'affaires.

- Elle est finie, vous pouvez rentrer chez vous.

Il grimaça.

- Le problème dès que je vous quitte cher Comte, c'est que je redoute toujours de manquer un moment des plus intéressants. »

J'émis un claquement sec de la langue, lui signifiant par cela que ma patience ne serait pas grande aujourd'hui et je crus que cela pourrait l'inciter à me laisser seul, mais m'ignorant, il continua : « Hamlet savait qu'il ferait souffrir sa belle Ophélie, dit-il, ses yeux sombres parcourant les lignes du tableau. « Mais il a préféré la vengeance à son bonheur. J'ai du mal à imaginer sa douleur lorsqu'il a découvert qu'on enterrait son amour, qui de surcroit s'était suicidé de chagrin par sa faute. Vous les anglais, vous avez véritablement le goût du drame.

- C'est la folie qui a entrainé la mort d'Ophélie, non le désir de vengeance d'Hamlet, répondis-je avec plus de dureté que je ne pensais mettre dans mes mots. Si elle avait été plus forte ou si simplement elle avait compris qu'il se battait pour une cause plus grande qu'eux-mêmes, elle n'aurait pas sombré dans la folie.

- Croyez-vous? Peut-être. Mais ce n'est pas ce qu'a pensé Hamlet devant la tombe de son amour. Après tout, il savait bien qu'il entrainerait dans sa chute toutes les personnes qui lui étaient chères.

- Aurait-il dû hésiter ? murmurais-je tristement. Mais il me sembla que je ne parlais plus d'Hamlet.

- Oh non ! Cela nous aurait privés d'une splendide tragédie. Mais tant de vies détruites pour une vengeance… Son dernier soupir devait avoir un goût de regret.

- Ou une saveur de victoire. C'est en chef vainqueur que son cadavre fut exposé au peuple.

- Certes nous glorifions Hamlet. Mais plus que cela, nous pleurons tous la Belle Ophélie. Regardez, on voit bien qu'elle chante encore, elle serre dans sa main, les fleurs qu'elle cueillait pour s'en faire une couronne. La pauvre enfant ne se rend pas compte que ses vêtements gorgés d'eau deviennent trop lourds et l'entrainent vers le fond. Regardez, elle ne sait pas qu'elle est en train de se noyer.

- Assez.

Je détournais les yeux du tableau, de même que je tournais le dos à Lau. Je me sentais triste. Je savais que ses mots n'avaient pour but que de me tester, que ses tristes paroles n'étaient prononcées que pour qu'il puisse à sa guise déchiffrer les émotions qui se cachaient dans mes yeux et sur mon visage. Il en était toujours ainsi avec lui. Mais je n'avais pas la force de feindre l'indifférence à cette heure. Et sans le fuir, je préférais m'éloigner.

Je retournais donc au salon, et le son de ses pas résonnait derrière moi, me suivait. Je soupirais, mais me résolut à supporter sa présence.

Le gramophone jouait toujours. Un instant, je regardais Sebastian tourner la manivelle de la machine, dans un rythme régulier, accompagnant chaque note du disque comme s'il les jouait lui-même. Nos regards se croisèrent, mais je détournais rapidement les yeux. Dans notre société, les serviteurs sont des êtres silencieux qui ne méritent et ne reçoivent le regard de leur maître que lorsque nous désirons leur faire exécuter un ordre ou une demande. Attarder mes yeux sur Sebastian passerait pour de l'inconvenance. La distance policée qui nous avait toujours accompagnées depuis trois ans déjà avait repris sa place au milieu de nous. Tous les mots échangés et événements vécus, rien n'avait été entaillé le vernis de notre relation. Les choses étaient telles qu'elles devaient l'être et pourtant un goût de gâchis s'attachait à mes lèvres, qui avaient, il y avait peu, effleuré les siennes. Au fond, je le détestais, car il en avait trop dit. J'aurais aimé que mon cœur s'endurcisse encore jusqu'à perdre le goût de toute chose, et devienne insensible, comme le sien… Mais le rythme des battements dans ma poitrine avait changé, se faisant plus pressant et plus douloureux.

Je sentis Lau me dépasser et souffler, presque à mon oreille.

« Bénies soient les ténèbres, elles sont retombées sur nous. »

Je tressaillis. Je connaissais ces vers et malgré moi je les aimais.

Alors que je le regardais, immobile, Lau ouvrit le buffet et prit une bouteille au liquide à la couleur ocre dilué, ainsi que deux verres. Comment ce chinois de malheur pouvait-il bien savoir où trouver les liqueurs et le cristal dans mon propre manoir ?

Je le lui demandais. Il ne me répondit pas, mais esquissa le plus insupportable des sourires avant de me tendre un verre.

Abandonnant toute chance de réponse de sa part, je le pris, le huma et grimaça.

« Il ne s'agit que d'un verre de brandy, Comte, dit-il dans un rire léger. Je doute que cela ne vous fasse trop tourner la tête. Et si j'en juge par la sensualité nouvelle qui semble accompagne vos pas, je dirai que vous n'êtes plus tout à fait un innocent. »

Je restais un instant stupéfait, mais me ressaisit rapidement. J'observais Lau qui lui ne me regardait pas, et j'essayais de savoir ce qu'il impliquait par ses paroles. Mais je ne vis rien. Il porta son verre devant moi, et me demanda de trinquer, ce que je fis et porta le brandy à mes lèvres. Le liquide s'engouffra dans ma bouche et j'eus du mal à ne pas le recracher sachant que Lau me regardait. Digne, je laissais l'alcool couler dans ma gorge sans esquisser de moue de dégoût.

Lau s'assit devant l'échiquier, faisant signe à Sebastian de nous apporter les pièces à jouer. Mon majordome attendit mon approbation que je lui offrais d'un lascif mouvement de la main, avant de m'installer dans le fauteuil, face à Lau. Le jeu était sans doute ce dont j'avais besoin de toute façon.

Sebastian apporta le coffret contenant les pièces de bois lustré. Nous prîmes les pions, et bien sûr je choisis les noirs.

Comme la règle l'exigeait, je laissais mon compagnon de jeu détenant les pièces blanches le soin de commencer. Il opta pour un pion simple, ce qui ne révélait rien pour la suite du jeu, même si je le savais bon adversaire. Je fis de même et attendis son prochain coup. Il posa ses doigts sur le cavalier blanc et, tout en le déplaçant au-dessus des pions, il dit : « Cet homme, cet écrivain, il était vraiment intéressant. Quelqu'un de bien… Vous l'avez sans doute remarqué ?»

Si j'avais eu des doutes, maintenant je détenais des certitudes. Lau savait, mais je n'en éprouvais pas vraiment de honte et je ne désirais pas m'attarder sur ce qu'il avait vu ou pensé deviner. Peu m'importait son opinion. Cela me détournait du jeu.

- Me parler ainsi de lui… Est-ce votre nouvelle tactique pour me déconcentrer ? m'enquis-je, jouant à mon tour.

- Voyons Comte, je ne fais que penser à haute voix, dit-il dans un sourire faussement repenti. Mais inutile de vous dire qu'il ne serait pas bon de garder un homme tel que lui dans nos fréquentations. Sa conscience et sa bonne morale risqueraient de déteindre sur nous et alors nous serions perdus. »

Je l'ignorais, portant à ma bouche l'alcool qui coulait dans ma gorge, la brulant. Je toussais. Lau fut sur le point de rire, mais mon regard lui intima de se taire.

« Au fait, j'ai cru apercevoir un nouveau serviteur dans vos rangs ?» Il ne me regardait pas, captivé par le jeu, et bougea son pion. «Un homme que je connais bien, car je l'ai moi-même empoisonné récemment.» C'était à mon tour de jouer et je l'ignorais donc, mais il continua: « il est aussi mêlé à une sombre affaire qui a failli vous couter la vie et a blessé mortellement votre majordome. Je ne pensais pas que vous pourriez ainsi pardonner à un homme d'avoir ainsi mis en danger une personne qui vous est si proche… à moins que ce garçon n'ait pas été le principal tueur dans cette affaire…

- Essayez-vous de me délayer la langue ? demandai-je, finalement agacé, me demandant où déplacer mon fou.

- Oh non, je préfère que vous me disiez juste que ce qu'il faut pour ne pas risquer que votre majordome vienne me faire taire. Je pensais simplement que Sebastian détenait une place qu'on ne peut lui ravir… Mais peut-être personne n'est-il irremplaçable pour vous ? Après tout vous avez baissé votre garde devant un jeune écrivain qui nous est si étranger… Je vous l'avoue, Comte. Je suis un peu jaloux... Quoiqu'il en soit, j'espère que vous m'inviterez à d'autres réceptions tout aussi intéressantes.»

Un frisson me parcourut. Ses paroles me mettaient mal à l'aise, son regard également. Mais je ne sus si cela était réel ou le résultat de mon esprit embrumait. Je sentis l'alcool chauffer mon visage, et m'engourdir.

- Pourquoi vous attacher à moi Lau ? lui demandai-je, sincère. Vous n'êtes pas le seul homme de la pègre que je paie pour contrôler le territoire. Mais vous êtes le seul qui restait ainsi à mes côtés.

- J'aime ce qui est éphémère. Et vous l'êtes plus que tout autre chose. Je sens que si je ne garde pas mes yeux posés sur vous, vous pourriez disparaître et m'échapper. C'est l'effet que vous produisez, jeune Comte. On a envie de vous protéger et de vous faire mal.

- Charmant... Ainsi pour le moment vous me protégez, mais quand je devrais m'occuper de vos établissements d'opium, vous me ferez du mal?

- Ce n'est pas une nouveauté. » Il déplaça une nouvelle pièce, menaçant mon fou. « Je règne sur le monde souterrain grâce à vos pots-de-vin et au pouvoir que vous m'avez donné pour réguler la population étrangère dans l'East End. Il serait dommage qu'une si belle collaboration s'arrête.

- Je ne ferai pas de sentiments Lau. » dis-je en lui prenant un de ses points avec ma tour. « Je vous ai lancé assez d'avertissements pour que vous soyez prêt à vous confronter au courroux de la Reine. Lorsque l'ordre sera donné, je n'hésiterai pas...

- Quel ennui, j'aurais dû savoir que vous aviez l'alcool triste. Mais n'êtes-vous pas fatigué de tout cela Jeune Comte, » soupira-t-il soudain, sa voix adoucie. Il montra nonchalamment le plateau et continua : « Le nombre de vos amis s'amenuise, vous le remarquez sans doute. Vous risquez de vous retrouver seul face à nous tous, les rats des bas-fonds et nous n'aurons pas plus de pitié pour vous que vous en aurez pour nous.» La douceur de sa voix contrastée avec la dureté de ses mots, et son regard restait tendre. « Croyez-le ou non, cela... me rend triste.»

Il se pencha au-dessus du plateau et porta sa main à mon visage, comme il l'avait fait quelques mois plus tôt, un geste importun que je ne rejetais pas.

« Je ne serais jamais seul Lau, lui dis-je. Sebastian sera toujours à mes côtés.

- Ah oui j'aime vous l'entendre dire. » Ses doigts quittèrent mon visage. « C'est ce que je croyais aussi, mais à l'époque je le croyais « invincible ». Les récents événements nous ont prouvé que non. » Il prit sa reine et la fit tourner lentement dans les airs au-dessus du plateau tout en disant : « Vous étiez si adorable ce jour-là. Si fragile. J'aurais aimé vous prendre moi-même dans mes bras, mais j'ai pensé que cela serait inconvenant. D'autres n'ont pas eu ce scrupule...» Je plissais les yeux et serrais les poings, furieux, mais il continua: «Je vous conseille de rester auprès de votre majordome, Comte Phantomhive.

De vilains loups rôdent dans les bois et ils aiment par-dessus tous dévorer les petits enfants trop téméraires. »

Avec sa Reine, il prit ma tour et en me regardant dans les yeux, il murmura « Echec ».

Surpris, j'étouffais ma colère, portant mes yeux sur le jeu. Comment ce coup avait-il pu passer ? Cette partie semblait m'échapper depuis quelques minutes déjà. Le jeu était diablement compliqué, mais je ne parvenais pas à comprendre pourquoi mes tactiques restaient en défaut. Amer, je déclarai :

- Je n'hésiterai pas Lau, et je ne reculerai devant rien pour arriver à mes fins. » Je bougeai à mon tour mon pion, protégeant mon roi avec ma reine, faisant reculer l'adversaire, sans pour autant être à l'abri d'une attaque à venir. « Prenez cela comme un avertissement et n'oubliez pas qui je suis. »

«Et comme la belle Ophélie, vous oublierez d'arrêter de chanter, avant de vous noyer, sourit-il, la malice vivace dans ses yeux. Mais dites-moi Jeune Comte, remarquez-vous que, depuis le début de la partie, vous n'avez pas utilisé l'un de vos cavaliers ? Auriez-vous peur qu'il ne lui arrive malheur si vous le lancez à la poursuite de mon roi? »

Je me figeais à ses mots, et regardais l'échiquier. Je vis du coin de l'œil Sebastian s'y intéressait également, s'approchant imperceptiblement du plateau de jeu, sans doute intrigué par ces paroles. Et le constat fut des plus consternants : Un de mes cavaliers noirs restait au côté de mon roi. Je n'y avais pas touché...

Ma pièce maîtresse, le pion qui passe par-dessus les autres, qui peut enchainer des tactiques élaborées, celui qui peut me faire gagner la partie… Je ne l'avais pas utilisé !

J'ouvris la bouche, mais ne trouvant rien à dire, je restais inerte. La présence de Sebastian à mes côtés alourdissait mon égarement et je n'osais le regarder.

Je levais les yeux vers Lau. Il me regardait, une mine des plus sérieux obscurcissait ses traits.

«Vous devriez vous ressaisir Comte, » dit-il lentement et je compris ce que mon partenaire voulait dire.

Je n'étais pas moi-même, c'était ce que Lau avait voulu me dire depuis le début. Et c'était dangereux, pour lui comme pour moi. Il était venu m'avertir.

Je portais mes doigts à mes yeux et je les trouvais glacés. J'en recouvris mes paupières tentant de m'éclaircir les idées. L'absurdité de la situation me pesait, mais je ne savais que faire de ce poids. Mon esprit s'embrouilla et je finis par rire de ma faiblesse.

Je me reversais en arrière, collant mon dos au dossier de velours, hautain, et je fixais un œil amusé sur Lau.

« Pardonnez-moi, dis-je enfin, je suis épuisé et j'avoue ne pas avoir été à la hauteur pour cette première partie du jeu. Mais continuons ! »

Je me penchai sur l'échiquier, fixant toujours mon adversaire, je pris le cavalier noir, et le déplaçai.


La lune perçait derrière des nuages sombres, projetant une timide lumière dans ma chambre qui jusque-là n'était éclairée que par le feu de la cheminée. Je me tenais près de l'âtre, en chemise de nuit, appréciant la chaleur qui échauffait mes jambes nues.

Admirant les flammes, je serrais dans ma main le cavalier noir, l'écrasant dans mes doigts, incapable de le briser par la force de mes phalanges. Mais je l'avais déjà cassé, cette pièce d'échec. Dans ma colère, je l'avais fracassé, réduit en morceaux, en la jetant contre un mur. Mais elle était là, immaculée, entre mes doigts.

J'avais fait échec et mat contre Lau. Pouvait-il en être autrement ? Une fois que la victoire était devenue ma seule obsession durant la partie, elle était devenue mienne avant même que son roi ne tombe. Mais elle était amère, cette gloire d'une bataille si mal commencée.

En repensant à cette partie, j'avais eu maintes occasions d'utiliser ce cavalier, mais je ne l'avais pas fait. J'avais beau m'interroger sur les raisons de cet « oubli », je ne parvenais pas à en appréhender toute la complexité. Quelques bribes venaient à mon esprit, mais je n'en aimais pas la saveur.

J'entendis qu'on frappait à ma porte, mais je ne donnais pas l'autorisation d'entrée, sachant que Sebastian en prenait toujours l'initiative, même si je ne lui en donnais pas l'ordre. C'est ce qu'il fit. J'entendais ses pas feutrés résonner sur la moquette, le bruit désagréable du chariot à roulette et le cliquetis de la vaisselle qu'il y avait sans doute déposé.

« Jeune maître ? »

Je ne répondais pas. Alors il poursuivit : « Vous n'avez pas souhaité dîner, mais je me suis permis de vous apporter de quoi vous sustenter. »

Je daignais lancer un regard au chariot, et ne put m'empêcher de sourire tristement : « Du lait chaud ? C'est donc là ta solution à tous mes maux. Comme le soir de notre rencontre, comme la nuit où Madame Red est morte… Tu me fais un lait chaud comme un enfant, et tu espères que je ferais de beaux rêves, pour m'éveiller le lendemain, rétabli, débarrassé de toutes les cicatrices de la veille.

- Je ne prétends pas vous guérir de vos cicatrices, non. Je fais juste en sorte qu'elles deviennent supportables. C'est là mon rôle de majordome.

Je me détournais :

- Ce n'est pas si simple aujourd'hui. Nous sommes faillibles. Toi et moi. Et je n'aime pas cela. Cette histoire nous a montré nos faiblesses. J'avais pourtant l'illusion que nous étions invincibles… mais tu pourrais perdre, murmurai-je.

- Si vous me demandez de gagner, je gagnerai.

- Ce ne sont que des mots ! William Spears a raison. Les paroles d'un démon sont…

- Elles sont devenues vraies le jour où vous m'avez donné mon nom. Et depuis trois ans, je m'efforce de respecter notre contrat. Avec tout mon respect, Jeune Maître, si vous cherchez les faiblesses qui nous empoisonnent, interrogez votre comportement de ces derniers jours.

- Tu oses…

- Pourquoi avoir risqué votre vie? Pourquoi être venu mon secours.

Parce que Grell gagnait,… parce qu'il aurait pu te détruire… pensais-je.

- Simplement parce que j'avais encore besoin de toi.

- Mentir vous est si facile. C'est un véritable don chez vous. J'aimerais que cela soit vrai, et si cela peut vous aider, je ferai comme si je le croyais. Mais à l'avenir, sachez seulement ceci. Vous devriez garder votre compassion pour un être qui saura l'apprécier ou simplement la comprendre…

- De la compassion ? Je crachais ces mots comme s'ils étaient un poison. Je lui fis face, le regard amer.

- C'est toi ! Tu le sais ? dis-je avec un sourire triste en lui montrant la pièce de bois, le cavalier noir. Mais il ne me répondit pas. « Oui, tu sais que c'est toi. » Ma voix était douce, douloureuse. « Lau a raison. Malgré moi, durant cette partie d'échecs, je t'ai ménagé. Je t'ai épargné. De crainte qu'un de ses fous blancs ne déchire ta poitrine. Et c'était stupide, car sans toi, je ne peux pas gagner ! Je devrais pouvoir user de toi à ma guise. Je devrais être capable de te regarder souffrir sans remords. Je devrais pouvoir te jeter dans le feu, là maintenant, si je le désire. Je ne dois pas regretter de voir ton corps être consumé par les flammes. Parce que pour moi tu n'es qu'un pion !

J'avais crié. Et je sentis que je tremblais, mais peu importait, je devais parler, le silence ne faisait que m'empoisonner.

« Mais ce n'est pas aussi simple. Ça ne l'est plus. Et c'est de ta faute ! Si je doute maintenant c'est à cause de toi. »

- Alors c'est de moi que vient la faille ? Vous rejetez vos propres faiblesses sur ma personne ?» Il semblait en colère maintenant, et j'en éprouvais de la satisfaction. Enfin une émotion sur ce visage. Je ne supportais pas son attitude si composée, si «professionnelle», alors que mes nerfs étaient à vif, et que je ne portais plus aucun masque.

« Me crois-tu fait de pierre ? Pensais-tu que tes paroles ne rencontreraient aucun écho dans ma poitrine. Que je sortirai indemne de cette histoire, aussi immaculée que toi, qui après tout cela, ne garde aucun stigmate ? Mais je suis humain Sebastian ! Je ressens, je vis. J'ai beau essayer d'être aussi glacial que toi, je suis humain ! Tes mots m'abrutissent, je ne supporte plus ces battements dans ma poitrine, et j'ai encore ton goût sur mes lèvres ! Tout est si confus. Je suis tellement désorientée que j'en ai la nausée. Et je ne sais pas comment les choses ont pu s'envenimer à ce point, mais je veux que cela s'arrête Sebastian !

- Alors, jetez ce pion dans le feu.

- Pardon ?

- Vous voulez que cela s'arrête n'est-ce pas ? Alors, jetez ce pion dans le feu. Maintenant. » Il s'approchait de moi, et bientôt il fut si proche qu'il me dominait totalement. Je sentis la chaleur qui émanait de son corps, plus intense que celle d'un être humain, enivrante. Aucune senteur pourtant, sa peau n'avait pas de parfum, comme s'il était une ombre sans consistance. Oui une ombre, qui étendait son aura sur moi, m'enveloppant. Malgré la passion dans ses yeux, sa voix était basse et claire : « N'hésitez pas, souffla-t-il. Car moi, je n'hésiterai pas. Croyez bien que quand le moment sera venu, je serai celui qui vous s'arrachera à ce monde. Je n'aurai pas de pitié.»

Je soutenais son regard, aspirant les mots cruels et ses yeux me paraissaient contredire ses paroles. Il me sembla que leur éclat était plus triste.

Posant ses mains sur mes épaules, il me tourna, me manœuvra pour que je fasse face aux flammes. Je sentis ses doigts gantés glisser le long de mon bras, et couvrirent ma main qui tenait le cavalier noir. Dans un mouvement brusque, il me força à lâcher le cavalier noir dans les flammes. Je soupirais quand je regardais les flammes lécher les contours de la pièce noire, avant de l'engloutir, propageant une angoisse diffuse dans mon corps que seule la véritable présence de mon majordome à mes côtés parvenait à soulager . La main de Sebastian se ferma sur mon poignet et je sentis son autre bras glisser autour de mon corps, s'enrouler autour de ma poitrine, pour me ramener doucement contre lui. Je ne rejetais pas cette proximité, mes yeux regardaient toujours mon cavalier noir qui périssait dans les flammes. La voix de Sebastian me parut irréelle lorsque je la perçus : «Je n'ai encore jamais dévoré une personne que je… Je suis sûr que vous serez délicieux. »

Je sentis soudain la chaleur monter à mes joues, et le feu de l'âtre n'en était pas la cause. Peut-être Lau avait-il raison, mes désirs n'avaient plus rien d'innocent. Je le savais depuis quelques jours maintenant. La façon dont mes yeux parcouraient son visage, s'attardaient sur ses lèvres, trahissait cette convoitise, cette avidité qui s'insinuait en vagues furieuses en moi, s'engouffrait dans le creux de mon ventre pour tomber vilement plus bas.

À cet instant, c'était moi qui désirais le «dévorer».

- Tu sais, ce que je veux de toi?

Il ne répondit pas, mais je sentis sa respiration s'accélérer contre mon dos. Il savait ce que je désirais et je n'en avais plus honte. Je ne voulais pas même penser à quel point cet acte pouvait être abject et infâme. C'est ce que je désirais.

- Je veux boucler la boucle. Fais ce que je te demande. Juste cette fois. Juste cette fois pour que je n'aie plus à imaginer... Je n'ai pas le goût des regrets. Et demain, je veux que tout redevienne comme avant. Mais cette nuit...

Ma voix s'éteignit. Il était des mots que je ne pouvais prononcer, qui me ruineraient.

Je me tournai et le regardai, osant affronter ses yeux dont l'éclat restait incertain, hésitant. Je tremblai à la vue de son visage si parfait, comme si je le découvrais pour la première fois.

Je tendis une main vers lui et effleurais sa chemise, puis je pressais sur la blessure qui n'existait sans doute plus ou du moins je l'espérais. Je remontais en le frôlant jusqu'à ses lèvres dont je dessinais les contours du bout de mes doigts tremblant. Il se pencha vers moi, lentement, mais de manière si soudaine que je pris peur un instant et je reculai, voulant lui échapper. Mais ses mains enserrèrent mes hanches dans un étau puissant et je ne pus échapper à sa bouche de réclamer la mienne. Mon cœur se serra si fort qu'il me fit mal et craignant que ce moment ne s'arrête trop tôt, j'enfermais son visage entre mes doigts et me soulevais sur la pointe des pieds, répondant à son baiser. L'emprise sur mes côtés fut relâchée et je sentis ses mains glisser dans mon dos, m'encercler et me tirer vers lui. Mes pieds touchaient à peine le sol maintenant et je frissonnais quand il caressa ma lèvre inférieure du bout de sa langue. J'entrouvris les lèvres et il intensifia le baiser, envahissant ma bouche, me forçant à pencher la tête pour le recevoir. Sous la fièvre de sa passion, je me mis à penser qu'il avait désiré cette éteinte autant que moi. Mais malgré mon désir et le délice de ses caresses, je manquais d'air et je le repoussai, brisant le baiser. Je n'eus pas le temps de reprendre mon souffle.

Avec sa force stupéfiante, il m'entraina jusqu'au lit, si vite que j'en restais désorienté, surpris de sentir soudain la douceur des draps contre ma peau et son corps écraser le mien. Les rideaux du lit à baldaquin se refermèrent sur nous, sans que nous ne les touchions et j'entendis le cliquetis de la serrure de ma porte, qui se fermait. La peur m'envahit soudain devant cette prouesse surnaturelle de Sebastian, me rappelant que celui qui m'engourdissait par ses caresses était un démon, à qui j'avais demandé pour une nuit d'être mon amant. Et alors qu'il désirait le devenir, je perdais tout courage. Il ne remarqua pas mon égarement, et quand il posa à nouveau les lèvres sur ma peau, je m'enfuyais, m'élevant sur les coussins jusqu'à la tête du lit, le repoussant presque. D'abord surpris, il attrapa ma cheville et m'empêcha de fuir davantage. J'attrapai sa main pour qu'il me lâche quand je sentis ses doigts se poser sur ma joue et leur pression pour que je rencontre son regard.

Ses yeux étaient tendres et rassurants. Je me demandais si son apparence pouvait me trahir alors que je l'avais privé du droit de mentir. Pourtant, je mourrai d'envie de me laisser berner par cette douceur même si celle-ci n'était que feinte.

«Jeune Maître» souffla-t-il à mon oreille avec une douceur que je n'avais jamais entendu résonner dans le timbre policé de sa voix.

S'étant assuré de ma défaite à ses bras, il tira sur mes chevilles, me ramenant plus bas sur le lit, et couvrit mon corps du sien, s'insérant entre mes cuisses.

Je l'enfermais entre mes jambes, caressais ses hanches de mes genoux, faisant glisser mes pieds sur les draps de soie. Il était brulant et j'étouffais. Ses lèvres voyageaient de ma tempe à ma mâchoire, s'attardant sur mes joues, et contournant ma bouche. J'aurais voulu qu'il m'embrasse, mais je ne lui demandais pas. Mes doigts glissaient sur sa chemise, en défaisant maladroitement les boutons. Quand le vêtement fut ouvert, je le repoussais sur ses bras, laissant le tissu glisser jusqu'à la cassure de ses coudes et je reportais mes mains sur ses épaules maintenant nues dont je savourais enfin la douceur. Sa poitrine se gonflait, écrasait la mienne. Il me serrait si fort que j'avais peur qu'il ne me brise. Sa bouche était maintenant sur ma gorge et je réprimais un hoquet de plaisir lorsque je le sentis à la fois embrasser et mordiller ma chair. Ses doigts glissaient le long de mes jambes, caressant et pinçant tendrement mes cuisses, repoussant plus haut ma chemise encombrante. Je me sentis durcir contre lui, mais ma peau rencontrait encore la rudesse de la toile de son pantalon. Je soupirais, et fit glisser une main entre nos corps, cherchant la boucle de sa ceinture. Mais Sebastian repoussa mes doigts, abandonnant ma gorge, il se redressa, le regard fiévreux posé sur moi. Mon ivresse s'intensifia à la vue de son apparence décomposée, ses cheveux désordonnés et son torse dénudé, si bien qu'envouté je tendis les bras pour le ramener contre moi. Mais à nouveau, il me repoussa, plaça ses mains sous mes genoux, et remonta mes jambes, me renversant sur le lit.

Instinctivement, je fermai les yeux et me laissai faire, alors qu'il écartait mes cuisses. Je connaissais ce passage indigne dont j'avais lu les détails dans quelques poèmes honteux de Verlaine et quelques proses d'Oscar Wilde. Ma pudeur m'insufflait de garder les paupières closes. Par sa douceur, l'expérience ne me déplut pas. Mon cœur s'accéléra quand je sentis ses doigts en moi. Je respirais profondément, laissant chaque sensation nouvelle infiltrer chacun de mes sens. La douleur et le picotement et son autre main qui se serrait toujours dans le creux de mon genou à demi replié, ses murmures dans le creux de mon oreille que je n'écoutais plus, les mouvements de ses doigts. Je serrais les dents à m'en faire souffrir la mâchoire, refusant que des soupirs ne glissent de mes lèvres.

Quand il se retira, je gardais les yeux fermés, je le sentis remuer sur le lit, chercher dans ma commode, pour ensuite revenir contre moi. J'entendis la boucle de sa ceinture, des vêtements qu'on ouvrait. L'instant d'après, ces mains caressaient mes jambes, les levant et les écartant. Il se pencha et je soupirai quand je le sentis se presser contre moi, humide et dure entre mes cuisses.

À sa première poussée, je me sentis transpercé et une douleur atroce crispa tout mon corps alors que mon cri était étouffé par les lèvres qu'il plaqua brutalement sur les miennes. Je le repoussais, me tortillant pour me libérer de cette étreinte qui se transformait en torture. Et même si mes plaintes étaient étouffées par sa bouche, mes paupières fermement closes et plissées ne purent empêcher les larmes de glisser de mes yeux, s'engouffrant dans le creux de mes oreilles. Ses lèvres quittèrent les miennes et je me retrouvais haletant, mes mains poussaient toujours sur ses épaules. Malgré tout je ne pouvais me résoudre à lui demander de se retirer. C'eut été un échec. À ce moment pourtant, j'aurais préféré qu'il le fasse. Je l'entendais susurrer à mon oreille, me rassurant, me disant de respirer, que la douleur était normale et qu'elle s'évanouirait bientôt, mais je ne lui répondais que par des sanglots à demi-étouffés. Je n'étais que le jouet de cette souffrance blanche qui me paralysait. Je sentis ses doigts repousser les cheveux sur mon front pour y appliquer ses lèvres. Je ne pensais pas que cette tendresse puisse m'apporter un quelconque réconfort. Il me sembla que je respirais mieux pourtant. Que la souffrance se diluait et que je parvenais doucement à m'habituer à sa présence en moi. Car je le réalisais : il était en moi, profondément insinué en moi. Il était en train de me faire l'amour…

Il sentit sans doute la pression de mes doigts qui le rejetaient, se relâchait, car il bougea, se retirant doucement puis s'engouffra à nouveau entre mes cuisses.

La douleur encore, perçante! Je me mordis la lèvre, crispant mes doigts sur ses épaules, enfonçant mes ongles dans sa chair. Mais je ne le repoussais plus. Il posa encore ses lèvres sur mon front, y déposer quelques baisers. Une nouvelle poussée, et encore une autre. Mais au beau milieu de la souffrance, les sensations laissaient lentement place à un plaisir sourd, incertain, mais délicieux.

Quand mes gémissements derrière mes lèvres closes furent plus de délices que de douleur, j'ouvris enfin les yeux et le vis. Il me regardait lui aussi et je soutenais son regard embrumé et fiévreux. J'admirais sa beauté alors qu'il me pénétrait avec douceur, savoureux cette sensualité affirmée et virile que je n'aurais peut-être jamais. Ses bras puissants qui me serraient si fort. Ses lèvres rougies par notre baiser. Les faibles et insignifiantes rides qui apparaissaient sur son front alors qu'il se concentrait sur le plaisir qu'il désirait me donner. Il rapprocha son visage, ses cheveux et son souffle frôlèrent mes joues. Je laissais mes mains frôler sur sa peau et je nouais mes poignets derrière son cou, glissant mes doigts dans ses cheveux. J'écartai davantage les jambes pour le recevoir. Ses poussées se firent plus violentes et je l'étreignais sans honte, alors que des picotements de plaisir envahissaient tout mon corps, s'intensifiaient, m'engourdissaient. J'entendis un gémissement roc et le souffle chaud de Sebastian contre mon visage. Le plaisir se fit plus fort, et je ne parvenais plus à retenir les soupirs qui s'échappaient de mes lèvres. Je me redressais un peu, désirant attraper ses lèvres. Il se recula hors de ma portée, me gardant plaquer sur le lit, un sourire joueur sur la bouche que je désirais tant embrasser. A demi-vexé, j'essayais à nouveau, tirant sur mes bras qui encerclaient encore sa nuque, mais il esquiva à nouveau mon baiser, m'assenant un coup de hanche plus brutal qui m'ôta toute volonté. Je criais de plaisir alors qu'une onde d'extase se propageait dans tout mon corps, m'aveuglant. J'entendis son rire doux, et il m'embrassa enfin.

Alors qu'il cajolait ma langue de la sienne, les coups devinrent plus intenses, plus profonds, paralysant tout mon corps de plaisir. Je gémissais mon extase contre ses lèvres, glissant mes doigts dans ses cheveux, le tirant vers le lit pour qu'il s'insinue davantage en moi. Rien n'existait plus à part cet endroit où nos deux corps se rejoignaient, s'unissaient dans un plaisir brulant et abominable. Mes jambes qui l'encerclaient, étaient humides et glissaient contre sa peau. Je les écartais encore et encore, tentant d'imposer mes talons contre ses cuisses, pour le pousser vers moi. Il me pénétrait encore lorsqu'il prit mon membre dans sa main, et je criais, me cambrais, augmentant le contact, en extase sous la pression de son poing serré sur mon sexe. Alors qu'il me massait avec douceur, j'essaie de supporter le rythme insoutenable qu'il imposait à nos ébats, mais je n'y parvenais pas. Chaque mouvement de mes hanches pour rencontrer les siennes était dépassé par ses pénétrations. Un rythme inhumain pour un homme qui ne ressentait pas la fatigue alors que j'haletais pour rester conscient dans l'extase, désarticulé et tremblant.

Il se redressa soudain, presque à genoux, m'abandonnant et ses mains passaient sous mes hanches, me soulevaient de sorte que seuls mes pieds et épaules restaient sur le matelas et il prit dans cette position indécente dont l'angle particulier m'arracha une litanie de cris. Vainement, je cherchais de mes doigts des appuis sur lesquels m'accrocher, serrer ou tirer. Je tordais les draps, balançait ma tête alors qu'il m'arrachait toute lucidité à chacun de ces va-et-vient insupportables à l'intérieur de mon corps. Les gouttes de sueur glissaient le long de ma peau endolorie et enflammée. Mes cheveux collaient à mon visage, et de ma gorge s'élevait des plaintes indécentes, une litanie de supplique pour qu'il me pénètre plus fort, plus vite. Je ne pouvais me lasser de ses caresses qui enflammaient ma peau, me possédaient, m'aveuglaient.

Mais mes yeux embrumés se posèrent soudain sur son visage, alors qu'il me regardait avec une passion tout à fait différente de la mienne, calculée, possessive... froide!

Malgré ses propres soupirs de délice, je compris que le plaisir qu'il ressentait n'était rien comparé au mien, ou du moins qu'il ne pouvait l'apprécier à la même mesure, car les goûts de notre espèce n'avaient pas d'intérêt pour lui. La colère se mêla à ma passion. Comment pouvais-je être de feu quand lui restait presque de glace. Il aimait ce qu'il me faisait parce qu'il appréciait mes soupirs, mon manque de contrôle, cet abandon de mon être pour son étreinte. Il aimait mes cris pour lui. Mais je voulais le voir s'embraser, ressentir l'extase qu'il me procurait à cet instant. Je ne voulais pas être le pantin qui ressentait toute la passion et l'agonie!

Une idée me vient. Une idée folle, sacrilège. Mais je m'y abandonnais.

Il vit le changement dans mon œil qui le scrutait, et parut curieux, presque inquiet, sans pour autant arrêter de me prendre.

Un sourire malicieux se dessina sur mes lèvres. Je glissai mes doigts sous l'oreille, le jaugeant, hautain, reprenant le contrôle de mon corps, essayant d'annihiler le plaisir qui m'étouffait mon esprit.

Je trouvai enfin ce que je cherchai et quand je parlai, je ne reconnus pas la voix qui s'échappait de ma gorge, si profonde, enrouée.

« C'est mon âme que tu désires n'est-ce pas? » et ma voix était claire et dédaigneuse, malgré le fait qu'il me pénétrait encore avec force.

Je savourai un instant l'incompréhension sur son visage, puis aussi vite que j'en fusse capable, je sortis de dessous l'oreiller, les ciseaux que j'appliquais contre ma peau.

«Ciel !»

Je piquais, juste au-dessous de mon oreille, une piqure insignifiante, mais d'où s'échappait déjà, je le sentais, une ligne de sang qui coulait sur mon cou. Lâchant les ciseaux, je ne sais où je tendis une main vers lui, lui demande d'approcher. Il me regardait, l'œil sombre, presque à genoux sur les draps, toujours profondément planté en moi, et ses mains crispées sur mes hanches à m'en faire mal. Il avait cessé de me prendre, mais je sentais son sexe gonflé et les battements de son cœur qui résonnaient dans le membre enfoncé en moi. Sa poitrine se gonflait et je voyais la colère mêlée de désir assombrir ses traits.

«Viens, soufflai-je en le tirant vers moi. Goute-moi.»

Mais il résistait et je crus voir la fureur briller dans ses yeux.

«Je t'ai dit d'approcher Sebastian!». Sachant qu'il n'avait pas le choix, il se pencha légèrement vers moi, m'arrachant un soupir quand je sentis sa pénétration s'intensifier alors qu'il s'appuyait davantage contre mon corps. Je passais mes doigts sur ma gorge et les sentant humides je les appliquai sur ses lèvres. Il y passa sa langue. Ses yeux devinrent cuivres, puis rouges, l'iris et la pupille se rétrécir, devenant félines et menaçantes. Ses ongles s'allongèrent et s'enfoncèrent dans ma chair, ses doigts écrasaient mes os, alors qu'un gémissement roc et presque animal s'échappait de ses lèvres et je me surpris à avoir peur.

Avant que je ne puisse le repousser, il se rejeta sur moi, enfouissant son visage contre mon cou et je le sentis embrasser et lécher ma gorge.

Il me pénétrait avec plus de force encore qu'auparavant, et je criais, de terreur et de délectation, alors qu'il ravageait mon corps, me tordant, ne se souciant plus si mes plaintes étaient de plaisir ou de douleur et je crus perdre conscience sous ses assauts presque sauvages. Je me sentais sali, bafoué, mais libre, sujet à mes sensations les plus refoulées et perverses, alors que je le serrais contre moi. Mes yeux vitreux ne parvenaient plus à le distinguer dans la faible lumière, mais le peu que je perçus m'effraya sans atténuer mon plaisir qui enflait à chaque coup de hanches. Un instant, il me sembla l'étreindre dans sa vraie forme, noire et affreuse, et l'instant d'après il était lui-même. Il se métamorphosait de l'un à l'autre, sans relâcher son étreinte, sans cesser de me prendre avec force. Je ne tiendrai plus longtemps, je le savais, alors qu'il m'écrasait, m'embrasant chaque centimètre de ma peau. Ma vision se troublait encore, mon corps se crispa soudain et le serrais brutalement contre moi, déchirant sa peau de mes ongles alors la jouissance m'envahissait en vagues brulantes de plaisir et de douleur, me paralysant dans une extase blanche, alors que je criais son nom en litanie, avant que sa bouche ne recouvrant la mienne pendant que je me répandais contre son ventre et le mien.

À travers le voile qui troublait mon regard, je vis Sebastian tendre la main vers le chandelier, attraper la flamme d'une bougie et l'intensifier, comme le soir où je lui avais demandé de bruler le manoir. Mais quand la flamme fut vive et intense, je crus le voir l'avaler, l'engouffrer dans sa gorge. Après cet étrange rituel, il se pencha vers moi. Sa langue devint un tisonnier ardent qu'il posa sur ma gorge sanglante, et une douleur atroce me parcourut, intense et cruelle; et mon hurlement me meurtrit les oreilles alors que j'écorchais de mes ongles le dos de Sebastian. La souffrance s'estompa aussi vite qu'elle était venue, me laissant tremblant et haletant, et je relâchais mon étreinte sur mon démon. À moitié somnolant, mes paupières se voulurent plus s'ouvrir et je me sentis sur le point de sombrer. Je le sentis un instant repousser les cheveux qui coulaient à mon front pour y déposer ses lèvres encore brulantes. C'est ainsi que je m'endormis.

Je m'éveillais en pleine nuit, et un étrange sentiment de réconfort m'envahit alors que mes paupières s'ouvraient pour dévoiler les étoiles, première vision à mon réveil en cette heure d'ébène. Un goût me surprit, le goût de mon propre sang sur mes lèvres.

Je vis Sebastian assis sur le rebord de mon lit. Il avait remis sa chemise, mais elle n'était pas boutonnée. Le regard pensif, perdu dans le vide, il faisait tourner dans ses doigts les ciseaux de shinigami, «C'est un cadeau.» Ma voix était enrouée, et je raclai légèrement ma gorge endolorie. Il se tourna vers moi, semblant curieux et froid à la fois. «Arthur, expliquai-je. En échange de la vie de Snake.»

Je le vis acquiescer puis détourner le regard. Son visage semblait soucieux, crispé. Et je me doutais de la cause de sa colère.

«Si tu as quelque chose à dire, dis-le.

- Cela ne se reproduira jamais. C'était stupide et dangereux. Personne ne sait comment ces choses réagissent ou quels sont leurs véritables pouvoirs. Les humains sont vraiment...

- Je ne risquais rien, il suffit de bruler la plaie et c'est ce que tu as fait, rétorquai-je sèchement, ne souhaitant pas être réprimandé à mon réveil ni entendre ses critiques sur les humains. Je savais ce que je faisais. Quand la faux tranche, le sang contient le liquide qui entoure l'âme c'est pourquoi...

- Cela ne m'intéresse pas ! Ce n'est pas un jeu cette fois! Je sais pourquoi vous avez fait cela. Mais contrairement à vous, je n'ai pas besoin de grignoter en attendant l'heure du dîner !

Je faillis rire à cette phrase de si mauvais goût, mais le regard furieux qu'il me lança me glaça dans mon élan. Il était en colère. Non parce que l'expérience lui avait déplu. Je savais qu'il avait ressenti du plaisir à la saveur de ce sang infecté. C'était mon impétuosité inconsciente et ma volonté de me mettre en danger pour lui qui l'exaspérait. J'aperçus la bassine d'eau qui reposait sur ma table de nuit, un tissu humide taché de sang sur son rebord.

Je portai mes doigts à ma gorge et je gémis doucement au contact de mes doigts froids sur la brulure. Sebastian se pencha sur moi, écartant ma main et observa ma blessure.

«Cela ne devrait pas s'infecter. Je doute que vous aurez une cicatrice visible.

- Mais ça fait mal.

- Que cela vous serve de leçon.

Vexé, je repoussais sa main, ce qui le fit sourire. Mais rapidement son visage s'assombrit.

« C'est votre âme que je veux. Plus que tout. Cela ne changera jamais.»

- Cela je le sais déjà. Pourquoi essaies-tu de m'en convaincre ?

Il ne me répondit pas, et se détourna de moi, fixant son regard dans le vide, absent.

- J'ai faim, lui dis-je enfin.

- Moi aussi.

Je pouffais légèrement. Elle était délicieuse, cette perfidie qui nous liait si étroitement l'un à l'autre.

Il se leva et je le suivais du regard alors qu'il s'approchait du chariot resté près de la porte. Il plaça sa main sur la théière remplie de lait, et une seconde après la vapeur sortait de l'embout de porcelaine. Il remplit une tasse de lait chaud, y versa du miel et me l'apporta. Et je l'acceptais. Il restait à m'observer tandis que je buvais, semblant essayer de résoudre une énigme intérieure dont je ne savais rien.

«Dormez, me dit-il en reprenant la tasse vide et en ramenant les couvertures sous mon menton. Sinon, vous serez insupportable toute la journée.»

Je le désirai encore. Je le sentais. Mais cela suffisait. Au lever du jour, tout redeviendrait comme avant. C'était ce que je souhaitais réellement. Cette nuit était la conclusion de cette aventure et alors que je m'en remémorai les souvenirs, je laissais chaque partiel de douleur me transpercer la peau pour reformer un puzzle lugubre à l'intérieur de ma poitrine, sombre, mais rassurant. Cela faisait moins mal, à présent..

Il sortit, me laissant seul.

À travers la fenêtre, l'aube naissait doucement, et il me sembla déjà que ma tristesse de ses derniers jours s'apaisait avec les premiers de ce soleil que j'avais tant espéré.


À 9h00, comme à son habitude, Sebastian vint me réveiller, me vêtir et me porter mon petit déjeuner.

À son entrée, je cherchai dans sa posture, une gêne ou toute autre impression de regret de la nuit écoulée. Mais je n'en vis aucune, ce qui conforta ma propre condition. À mon réveil, une étrange sensation de soulagement m'avait envahi, comme si je me retrouvai à nouveau. Je n'avais pas de remords, et mes yeux se tournaient à nouveau vers l'avenir, vers mon but. J'avais l'impression d'être sorti d'une longue maladie et d'avoir vécu des illusions produit par ma fièvre. Mon cynisme avait repris sa place dans ma poitrine et imposait son rythme à mon cœur. Calme, froid et indifférent. Sebastian le sentit sans doute, car il semblait particulièrement satisfait de mes réactions. Ce qui m'agaça quelque peu sans que je lui montre.

Après mes leçons, que j'avais négligées depuis quelques jours, de français, de piano, et d'économie... Sebastian m'avertit que le déjeuner ne saurait tarder. En me rendant dans la salle à manger, je traversais le grand salon, et m'attardais devant l'échiquier. A ma grande surprise, les quatre lignes, blanches et noires semblaient complètes. Je m'approchais, fronçant les sourcils et je constatais en effet qu'aucun pion ne manquait: le cavalier noir que j'avais fait péri dans les flammes, trônait au côté roi.

«Monsieur, le déjeuner est servi, dit Sebastian, me sortant de ma transe. Je me tournai vers lui, et lui offris mon sourire, le sournois et entendu, celui que j'avais oublié. Et il s'inclina devant moi, avant d'ouvrir la porte de la salle à manger. Je ne lui demandai pas comme il avait fait. Je ne pourrais sans doute pas comprendre.

Je fus surpris de voir deux couverts à ma table et encore plus de voir Lau attablé, prêt à engloutir le déjeuner que Sebastian avait préparé.

«Pour l'amour du Ciel, n'êtes-vous toujours pas rentré chez vous?

- Mais bien sûr que si! Je suis revenu ce matin!

- Je vous ai déjà dit de ne pas vous inviter chez moi de la sorte!

- Mais vous m'avez invité!

- Mais pas du tout!

- Bien sûr que si! Par lettre ! Il y a quelques jours!

- ...Pour une seule soirée! Celle que j'organisais pour l'hôte de la Reine!

- Qui s'est étendue sur plusieurs jours, pour les circonstances que nous connaissons, de sorte que je n'ai pas été informé de la date limite à votre hospitalité!

- J'abandonne..!

Résigné, je m'assis à table, plaçai ma serviette sur mes genoux et planta furieusement ma fourchette dans la salade de gésier au chèvre chaud, imaginant que c'était les joues du chinois.

«Je vous rassure, Comte, je ne suis pas venu pour rien.

- Vraiment...

- Je veux vous parler d'une chose intéressante. Avez-vous lu votre journal du jour?

- Non.

- Alors, faites donc pendant que nous déjeunons et après je vous expliquerais quelque chose qui pourrait vous intéresser... Connaissez-vous la société secrète Aurora?


16 avril, au jour du départ...

Mes bagages étaient prêts. Sebastian avait disposé près de mon lit, deux grandes malles ridiculeusement pleines. Mais connaissant Elisabeth, Sebastian avait sans doute fait en sorte de prendre une tenue de chaque couleur pour chaque jour de voyage afin que je puisse m'accorder avec la garde-robe de ma future fiancée.

Trois semaines de traversée en bateau jusqu'à New York... et moi qui avais tellement de travail. Cette nouvelle affaire ne devrait pas prendre trop de temps...

Mais le voyage serait long et je me résolus à prendre un livre et je ne fus pas long pour le choisir. Avant de le placer dans ma valise, je l'ouvris, parcourant les pages si familières. J'en lus le titre. Passant le doigt sur les caractères d'imprimerie, je souris tristement avant de cacher sous mes chemises, mon exemplaire du Beeton Christmas annual 1889, dans lequel je relirai inlassablement « Une étude en rouge » par Arthur Conan Doyle.

Fin du Chapitre 13

Vous connaissez la suite…


Voilà... Je suis un peu triste je vous l'avoue mais il me reste encore l'épilogue...

Quelques explications peut-être?

Ciel et Sebastian:

Très difficile à écrire, simplement parce que chaque acte sensuel que j'écrivais me donnait l'impression de trahir leur relation. Pourtant je ne regrette pas. J'ai pensé à un moment bannir une relation sexuelle entre eux, un peu par lâcheté car écrire ce passage me semblait particulièrement difficile, mais j'avais trop fait languir les lecteurs (et moi-même d'ailleurs!) pour leur refuser ce moment...

Pour le sang de Ciel et les ciseaux

Nous en avions parlé. Sebastian ne désire pas faire l'amour. Il ressent les mêmes sensations pendant l'acte que les humains, mais ce n'est pas cela qui le fait «vibrer» ou s'abandonner.

L'idée des ciseaux qui ouvre la chair et l'âme offre une ouverture car comme le dit William, le sang qui coule, sombre, contient aussi un liquide qui entoure l'âme.

Je ne sais pas si vous avez tous vu la saison 2, mais dans un des épisodes, Claude goûte au sang de Ciel et c'est à ce moment-là qu'il désire avoir l'âme du garçon. Donc un peu de la saveur de l'âme se trouve dans le sang.

Cependant je ne voulais pas que ce soit aussi simple, Sebastian est un démon pas un vampire (j'adore les légendes de vampires surtout d'Anne Rice mais en ce moment on entend tout est n'importe quoi, même des vampires qui brillent au soleil.. y'en a un marre...). Je ne veux pas qu'il lui prenne l'envie de prendre le sang de Ciel toutes les semaines et que Ciel lui donne constamment. Je voulais que ce soit plus difficile. Déjà parce qu'il leur faut une arme spéciale, c'est à dire une faux de la mort qui déchire le corps et l'âme, mais également que la blessure soit difficile à guérir voir même très douloureuse pour que ce soit un don d'une seul nuit. Ainsi Ciel ne va pas s'amuser à se couper tous les soirs sachant qu'il doit se faire bruler au fer rouge pour se soigner... (ça calme!). Dans ces cas là il y réfléchit à deux fois... et c'est ce que je voulais. Je n'imagine pas les deux personnages amoureux et faisant l'amour quand cela leur prend l'envie. Donc c'est leur unique fois.

Ciel et Arthur:

J'aime penser qu'Arthur tiendra toujours une place particulière dans le coeur de Ciel même s'il ne l'avouera jamais.

Ciel, Hamlet et Ophélie:
Je pense que Ciel est à la fois Hamlet et Ophélie et Ophélie représente la part de lui même qui souffre et dont la santé mentale est en balance. alors qu'Hamlet s'accroche à sa vengeance de toutes ses forces peu importe les sacrifices à venir... Il est les deux personnages à la fois et il s'en rend compte. Mais à la fin de cette histoire il lui faut devenir Hamlet et oublier qu'il pourrait être Ophélie.
Dans le manga il doit le savoir quelques peu car il a vraiment ce tableau (Ophélie de Millais) dans sa galerie, celui qu'Abberline reconnait.

Lau

Il m'a beaucoup servit dans cette histoire car il rappelle à Ciel sa position et ses devoirs, le fait qu'il peut être en danger à tout moment et qu'il ne doit pas se montrer faible devant quiconque. De plus je ne sais pas ce que pense Lau, mais c'est un personnage obscure qui a une relation très particulière avec Ciel. Dans l'affaire Jack l'éventreur, il lui touche le visage (j'avoue que je ne sais plus si c'est dans le manga ou l'anime) et Ciel se laisse faire sans montrer d'émotion mais j'ai toujours trouvé ce geste très particulier et intime... J'aimerai beaucoup savoir ce que Lau a en tête, ce qu'il désire de Ciel, et à quel moment il le trahira à son tour... si cela arrive un jour...

Pour le «passage» entre Ciel et Snake

Snake sait que Sebastian est surnaturel, même s'il ne pense plus que c'est un démon. On en revient donc au manga, car dans le chapitre 55, Sebastian tue les zombies dans la cave sous le regard choqué de Snake (alors que Ciel couvre les yeux de Lizzy). Je ne trahis donc pas trop le manga...

Le bourreau...

John Berry était l'exécuteur principal des basses œuvres en Angleterre à l'époque. La peine capitale se faisait par pendaison. Le but des calculs effectués par le bourreau était de faire en sorte que la chute brise les cervicales. Il devait donc faire des calculs qui incluaient le poids du condamné et la longueur de la corde. S'il se trompait dans un sens ou dans l'autre, soit le condamné s'étranglait lentement (ce qui n'était pas le but) soit la chute décapitait le condamné. Dans le cas de John Berry, il lui est arrivé plusieurs cas tragiques, qui illustrent les deux situations... La boisson n'a pas arrangé les choses. Les bavures ou accidents du bourreau n'étaient pas passés sous silence et la population savait si une exécution s'était mal passée, car même si les exécutions n'étaient plus publiques, une foule s'amassait devant les prisons le jour de la condamnation. Donc le peuple sait ce qui se passe dans les murs de la prison, et Ciel insiste sur des faits connus pour effrayer Snake qui est surement au courant. Pas de thriller à la télé à l'époque donc le peuple aimait les détails cruels de ce genre...

Pour savoir cela j'ai regardé tout un documentaire sur les exécutions capitales en Angleterre... ça m'a bien calmé... Mais pour l'histoire c'était parfait!


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