TW : viol


On était dimanche.

Drago ignorait s'il était tenu de travailler le dimanche.

Dans le doute, après avoir été réveillé par l'embrasement des torches du couloir, il s'était levé, lavé, habillé, avait fait son lit au carré, puis il s'était installé derrière sa table basse en fixant le linteau de la porte. Il avait rapidement eu sa réponse : La lumière blanche, le « cling » caractéristique. Il se leva, sortit de sa cellule et alla poser sa main sur le métal rougeoyant.

Dans la cuisine, il prit son temps, prétendant remplir son bloc-notes avec attention, mais ses yeux parcoururent les lieux avec avidité, à la recherche d'une bouteille, d'un bocal, d'un verre accessible…

Au bout de quelques minutes, il remarqua un détenu s'approcher en essuyant ses mains grasses dans son tablier sale. Le type était grand, maigre, avec des cheveux fin et châtains que la transpiration et les vapeurs des fourneaux avaient collés sur son crâne.

« T'es le fils Malfoy, pas vrai ? demanda-t-il en s'arrêtant.

– En effet. Et tu es … ?

– Ackerley. »

Les choses ne se présentaient pas trop mal. Drago s'apprêtait à lui demander son aide et son prix, mais Ackerley reprit la parole :

« Paraît que tu fais le même bruit qu'une Couinesouris en sucre, quand on te touche aux bons endroits. »

Drago avait ouvert la bouche pour parler. Il la referma, puis l'ouvrit de nouveau :

« Je suppose que ça restera une rumeur si tu ne veux pas contrarier mon père. »

Ackerley regarda théâtralement autours de lui, mima la surprise, puis répondit :

« J'vois ton papa nulle part, Malfoy. »

Drago sentit le duvet de ses bras se dresser. Du coin de l'œil, il vit deux détenus supplémentaires s'approcher.

« Ça ne veut pas dire qu'il n'est pas là, tenta de menacer Drago. Il a des yeux partout. Et surtout une bonne mémoire… »

Ackerley sourit méchamment à Drago. L'un des deux comparses se posta à ses côtés. Le second s'accola au mur et contempla sa proie en se léchant les lèvres.

« Il sait aussi récompenser ses amis », acheva Drago d'un ton calme.

Un silence pesant suivit ces paroles. La plupart des prisonniers poursuivaient leurs tâches, mais les quatre hommes rassemblés près de la porte s'étudiaient attentivement. Du coin de l'œil, Drago vit les chariots de service se mettre en mouvement.

« Je dis, commença le détenu contre le mur, que Papa Malfoy sera intéressé par n'importe quelles nouvelles de son fils. Qu'elles soient bonnes ou mauvaises.

– Vas-y alors, ricana Ackerley. Fais couiner celui-ci, et je me charge de porter les nouvelles au daron.

– Messieurs, intervint Drago en saisissant son chariot, je vous laisse en débattre. Je dois malheureusement rejoindre la Major Mullan, et elle déteste attendre. » Et il se hâta de quitter les lieux en emportant tout son attirail. Aucun des prisonniers ne s'opposa à son départ, le nom de Mullan agissant comme un talisman de protection.

A l'abris de son couloir, Drago se détendit. Les choses auraient pu plus mal se passer. Il eut été préférable qu'elles se passent mieux. Rien de nouveau en somme.

Alors qu'il montait les étages, une impression désagréable d'oublier quelque chose d'important l'assaillit… Il parcourut des yeux son bloc note, vérifia la présence de son chariot, et des ustensiles de ménage, de son tablier… Il sortit de l'ascenseur en se mordillant les lèvres, suivit les chariots jusqu'à la porte du Directeur, et se figea d'épouvante.

« Demain, je compte bien profiter enfin de ton cul, et j'aurais pas le temps pour les préliminaires. Prépare-toi avant de venir. »

Il avait complètement oublié la menace et le conseil de Potter. Il aurait dû passer un moment, ce matin-là, à se masturber, à étirer les muscles de son sphincter, à les lubrifier avec de la salive.

Il entendit les trois sonnettes d'or tinter en cœur. Il fixa la porte devant lui avec effroi.

Rien.

Se pouvait-il que Potter fasse la grasse matinée ? On était dimanche, après tout !

Un bruit sur sa droite le fit sursauter. Il vit la Surveillante Mullan ouvrir une porte et s'écarter pour laisser passer le chariot qui s'était arrêté devant ses appartements. Elle regarda son petit déjeuner lui passer sous le nez, puis leva les yeux et croisa le regard de Drago.

Celui-ci se détourna aussitôt. Il frappa nerveusement à la porte et attendit.

Rien.

Mullan sortit alors dans le couloir et commença à marcher vers lui. Elle portait des vêtements d'intérieur. Une espèce de vieille jaquette de laine brune qui lui conférait une aura encore plus sombre que son uniforme.

Enfin, la porte s'ouvrit. Drago s'engouffra dans les appartements du Directeur en vitesse, cognant dans le chariot ensorcelé. Il vit à peine Potter s'écarter, l'air surpris.

Essoufflé, le cœur battant à tout rompre, Drago tâcha de se calmer, et réalisa qu'il était tombé de Charybde en Scylla. Il se retourna lentement et contempla l'homme qui lui faisait face. Harry Potter avait refermé la porte et semblait attendre des explications. Drago n'en avait pas.

Nerveusement, il se détourna et commença à dresser la table. Il entendit un soupir, puis des pas se rapprocher, disparaître – le Directeur s'est-il arrêté ou était-ce le tapis qui avalait les bruits ? – et enfin il sentit une présence dans son dos et l'haleine chaude d'un homme sur son épaule. Il frissonna.

« Tu as fait ce que je t'avais demandé, Malfoy ? »

Drago hésita, puis hocha la tête. La question était suffisamment vague pour qu'il puisse prétendre ne pas avoir compris.

« Tu as pensé à moi ? » Potter se plaqua contre son dos, parcourut son ventre, puis son torse d'une caresse possessive.

Drago hocha maladroitement les épaules.

« Moi, j'ai pas arrêté de penser à toi », chuchota Potter à son oreille en frottant son bassin contre les fesses du prisonnier. L'érection aurait été perceptible à travers une armure.

Drago pencha nerveusement la tête sur le côté, afin de laisser un plus large accès à son cou. Potter gémit, et y enfouit son visage pour embrasser et mordiller sa peau. L'une de ses mains parcourut à nouveau le torse et le ventre de Drago pour s'arrêter au niveau de l'aine. Elle saisit un sexe complètement amorphe, et se figea.

Potter redressa la tête.

« T'as un problème, ou je te fais juste aucun effet ? »

Drago regarda par-dessus son épaule, et fut étonné de constater que Potter semblait sincèrement surpris. Difficile pour autant d'éprouver de la pitié.

« Tu ne me fais juste aucun effet », répondit-il d'un ton neutre.

Un ange passa.

L'expression de Potter passa de l'ahurissement à la rage. Ses gestes se firent violents. Il agrippa les épaules de Drago comme s'il avait eu des serres, et le retourna d'un coup face à lui. « Tu commences sérieusement à m'énerver, Malfoy ! » Il le poussa brutalement contre la table, provocant la chute du verre de jus de citrouille, le fit basculer sur le dos, et remonta sa robe d'un grand geste rageur.

Drago sentit ses dents s'entrechoquer sous le premier coup et son crâne claquer lors du deuxième. Il grimaça et se tâta le cuir chevelu pour évaluer les dégâts. Ses doigts trouvèrent la blessure, mais pas de sang.

Déjà, Potter lui avait ôté son caleçon. D'une main, il appuyait sur le ventre de Drago pour l'empêcher de s'enfuir, de l'autre, il déboutonnait son pantalon.

Drago redressa maladroitement les jambes. Il espéra que le moment passerait vite, mais pressentait le contraire. Il ferma doucement les yeux. Au moins, ce viol-là était-il mérité : Il s'était retrouvé dépourvu devant les cuisiniers, ne s'étant pas attendu à leurs menaces Il n'avait rien fait, non plus, pour mériter l'ire de la Surveillante Major, et la panique l'avait saisi. Mais à cet instant, il connaissait son erreur et en acceptait pleinement les conséquences. C'était presque rassurant de savoir qu'il était capable de provoquer volontairement tant de colère.

Il poussa un cri lors de la pénétration, puis se mordit les avant-bras pour essayer de conserver le silence pendant le reste de la torture. Potter s'acharna pendant ce qui lui sembla des heures, probablement trop hors de lui pour constater que Drago avait menti. Une autre victoire, si l'on considérait bien les choses. Il lui griffait les hanches en s'y agrippant fermement, faisait grincer l'antique table d'acajou sous ses mouvements bestiaux, et poussait des grognements primaires et effrayants.

Quand il se vida enfin en lui, Drago crut en avoir fini, mais Potter le retint, le retourna comme s'il ne pesait rien, et remit aussitôt le couvert dans une autre position. Cette fois, ce furent les cuisses de Drago qui cognèrent douloureusement les bords de la table, et il sut qu'il en aurait des hématomes pendant plusieurs jours.

Une nouvelle fois, Potter éjacula, donna encore quelques coups, comme s'il espérait retrouver sa vigueur, puis abandonna et s'arracha du prisonnier. Celui-ci étouffa un cri. Il se sentit glisser et se retrouva sur les genoux, tremblant, se retenant difficilement au bois vernis. Il vit Potter quitter rageusement les lieux en direction de la salle de bain.

Drago reprit doucement son souffle et ses esprits. Il vérifia d'un coup d'œil que le chariot de service était encore là, et que l'heure fatidique n'était pas dépassée. Il n'osa pas s'éloigner de là où il avait été abandonné. Il réalisa que sa posture avachie pouvait être considérée comme insolente, et se redressa donc aussi dignement que possible, en réajustant sa robe.

Quand Potter revint enfin au salon, c'était comme si rien n'était arrivé, et Drago se tenait prêt à toute éventualité. Le Directeur arracha sa cape d'un porte-manteau, et sortit de ses appartements en claquant la porte.

Drago attendit quelques secondes avant de se laisser tomber sur une chaise. Il se frotta le visage en ricanant doucement. A ses pieds, le jus de citrouille finissait d'imbiber le tapis. Il était improbable qu'il perde son travail suite à cette histoire : Certes, il avait mis le Directeur en rage, mais sa provocation l'avait également excité comme jamais il ne semblait l'avoir été. Selon toute logique, Potter tiendrait à revoir à Malfoy pour le faire souffrir. Très bien.

Drago regarda d'un air absent le petit déjeuné disposé devant lui. Cela faisait maintenant deux jours qu'il n'avait rien mangé. Il saisit le bol de porridge et en engloutit la moitié avant de se précipiter aux toilettes pour vomir.

Logique, avec un estomac vide. Il se rinça la bouche à l'eau du robinet, puis retourna au salon où il se força à avaler trois cuillerées. Il rebroussa chemin vers la salle de bain afin de récurer les toilettes et qu'il n'y subsiste aucune trace de vomi. De retour au salon, trois nouvelles cuillerées. Saupoudrer le tapis de lessive en poudre, laisser agir. Direction la chambre. Faire le lit, ramasser le linge sale. Salon. Trois cuillerées. Frotter.

Ainsi, en prenant son temps, Drago parvint à finir le bol. Quand le chariot magique lui annonça qu'il était temps de quitter les lieux, il s'estima satisfait du travail effectué sur le tapis. Il compléta ses documents dans le monte-charge, inscrivit « lessivage tapis salon » dans la case « utilisation exceptionnelle » de la catégorie « lessive ».

Arrivé dans son couloir, il pressa le pas pour doubler la file de chariots, appuya sa main sur la barre de fer rouge, et pénétra dans les cuisines avec quelques précieuses secondes d'avance. Il raccrocha son tablier et son bloc-notes, abandonna son chariot dans son coin, et se précipita hors de la pièce alors que les portes étaient sur le point de se fermer. Les cuisiniers avaient à peine eu le temps de réagir.

Il regagna sa cellule, se lava une nouvelle fois, puis s'allongea dans son lit et ferma les yeux.

Le temps passait affreusement lentement.

Drago s'était réveillé aussi épuisé qu'il s'était endormi. Pour s'occuper, il avait poursuivi l'œuvre du mystérieux détenu qui l'avait précédé, et s'était mis en tête de combler, avec du papier-toilettes humide, les fissures, crevasses et trous qui parsemaient le mur du fond de sa cellule. Il avait longtemps hésité, comparé les risques et les avantages d'utiliser les feuilles de son unique rouleau pour cette tâche secondaire. L'ennui avait pesé dans la balance plus qu'il n'aurait dû.

Sa tâche terminée, il s'était mis en tête de décrasser les anneaux de fers incrustés dans le mur gauche. Pour bien faire, il lui faudrait voler des produits ménagers le lendemain. Pour le moment, il avait pu les dépoussiérer avec sa chaussette dédiée au ménage, puis s'était fabriqué une sorte de pâte abrasive en mélangeant de la poudre de roche et du savon. Il avait frotté les anneaux à mains nues, et s'était arrêté quand ses jointures s'étaient mises à saigner.

Le repas du soir était en cours de préparation, mais il lui restait encore plus de trois heures à tuer en attendant l'extinction des feux. Les chariots ensorcelés n'étaient pas encore partis de la cuisine.

Il était assis sur son lit.

Ça l'agaçait prodigieusement d'utiliser son lit comme une chaise : Il avait l'impression de manquer de respect à son mobilier ainsi qu'au menuisier qui l'avait créé pour un usage spécifique.

Mais s'asseoir sur le sol, derrière sa table basse, était pour le moment trop douloureux. C'était le lit ou les toilettes. Malfoy avait décidé qu'il utiliserait son lit en largeur, uniquement pour s'asseoir, et en longueur, pour dormir. C'était une espèce de compromis.

Un bruit de porte grinçante le tira de ses pensées. C'était la première fois que son couloir n'était pas réglé comme une horloge et lui laissait entendre ce son.

Il entendit des pas. Plus lourds que ceux de Potter, mais moins rapides que ceux de Mullan. Quand leur responsable se présenta devant ses barreaux, Drago se glaça d'effroi.

« C'est ici que tu te cachais, ma Salope ? »


Et après vous avoir présenté Harry comme ayant des remords, je balance ça...

J'aimerais vous dire que maintenant que l'impardonnable a été commis, les choses ne peuvent qu'aller en s'améliorant, mais je préfère être honnête et vous avouer qu'il y aura encore un passage bien glauque avant qu'on puisse entamer la reconstruction de Drago et tenter de construire un truc un peu plus sain entre les protagonistes...

Je précise également que ça ne sera tout de même pas de la guimauve gentille ou l'on pardonne par amour. On n'est clairement pas dans le "viol conjugal is ok"...

Mais bon, on va éviter de trop spoiler, n'est-ce pas ?

Quand j'ai écrit le chapitre 2, avec les insultes à répétition de Waren, j'avais l'impression d'en faire un peu trop, et j'avais même jugé utile de rajouter le paragraphe hyper redondant pour confirmer "oui oui, il se répète, il utilises toujours la même insulte, c'est pas juste un tic d'écriture"... Quand j'ai écrit celui-là, je suis revenue sur le 2 pour rajouter encore une ou deux itérations du mot. Je voulais vraiment qu'en lisant la dernière ligne, on comprenne immédiatement qui est là et ce que ça risque d'impliquer.
(Bon, au final, pour les lecteurs normaux qui suivent plusieurs fanfic en même temps, je ne suis pas sure que ça marche XD... Mais dîtes moi quand-même si c'est le cas ! )