Merci encore à tous de vos reviews, de vos follows, et même juste de vos lectures ! J'ai découvert l'onglet stats du site, et je m'amuse comme une folle de voir les chiffres évoluer de façon pas du tout logique X,D

ChatGPT me dit qu'il faut en moyenne 30 min pour lire ce chapitre ! En espérant que vous trouviez le temps ! (et un peu de plaisir XD)

Yuishifuji : Alors non, Drago n'est pas comme les autres XD Concernant la petite gaule du matin (tu m'as fait rire XD), il a surement connu ça dans sa jeunesse, mais depuis qu'il est arrivé à Azkaban, sa sexualité a été un peu mise à l'épreuve...
Je pense qu'il y a toujours un peu de l'auteur dans chacun de ses persos... J'ai un coté très Drago dans le côté maniaque et qui recherche un peu maladivement la validation des autres... Mais j'ai aussi un côté Harry dans le côté bordélique (oui, les deux peuvent être compatibles), je-m'en-foutiste, et trompe-la-mort (et amie des bêtes)... J'ai aussi tendance, comme Harry, à ne pas bien maîtriser mes émotions, à m'emporter, et à surprendre des gens qui me voyaient comme qqun de calme et pas prise de tête... Il y a même probablement un peu du lucius en moi... Pour le coup, je préfère ne pas trop y penser ^^'
Merci pour tes encouragements !

Diri-chan : merci :D oui, ça va se débloquer, en tout cas, je persévère dans ce sens !


Harry fit craquer ses doigts puis étira ses bras au-dessus de sa tête jusqu'à entendre ses épaules claquer à leur tour. Il se détendit ensuite la nuque et sourit.

Il était seul dans la salle de réunion que les Majors venaient de quitter après leur entrevue quotidienne habituelle. Cette tâche ressemblait de moins en moins à un calvaire… Il faut dire qu'il commençait à apprécier les personnalités troubles des deux Surveillants.

Runcorn en voulait toujours à Harry d'avoir emprunté son apparence, il y a des années de cela pour s'infiltrer au Ministère de la Magie. Il ne s'agissait cependant plus d'un ressentiment réel, mais plutôt d'une petite rancune teintée de honte que ni l'un ni l'autre n'évoquait, d'un accord commun et tacite. Runcorn était un homme simple et facile à comprendre : Il considérait l'ensemble du personnel pénitentiaire comme ses protégés, et tous, vieux comme jeunes, idiots, violents, efficaces ou géniaux, méritaient son dévouement absolu. Il était prêt à n'importe quoi pour chacun d'entre eux, et n'était resté en poste, après le licenciement de Waren, Sparvus et Northfield qu'avec la certitude que sa présence était nécessaire pour servir de tampon entre ceux qui restaient et le caractère imprévisible du grand Harry Potter. Il était une espèce de mère poule qui se fichait royalement de balancer les détenus sous le troll, tant que sa couvée restait à l'abri. Il travaillait d'arrache-pied à maintenir une cohésion entre les gardiens, n'oubliait jamais un anniversaire, et était leur meilleur avocat quand il s'agissait de réclamer une augmentation, un aménagement des horaires, ou une indulgence suite à un comportement limite.

Et des comportements limites, il y en avait eu. Aucun prisonnier, Merlin en soit loué, n'avait connu un traitement comparable à celui de Malfoy. En revanche, les doloris lancés à tour de bras pour le vol d'un morceau de pain ou pour un regard trop appuyé avaient été monnaie courante. Une demi-douzaine des Surveillants avaient clairement avoué avoir intégré l'équipe dans le but de se venger des Mangemorts qui s'en étaient pris à eux ou à leur famille… Et Harry était mal placé pour les blâmer… Pas après ce qu'il avait fait à Malfoy…

Malfoy…

Il était cependant parvenu, négociation après négociation, à restreindre l'autorisation des Sortilèges Impardonnables aux trois corridors renfermant les détenus les plus dangereux, et à soumettre leur utilisation à une réglementation précise : Situation d'urgence absolue, danger de mort, collègue en danger, vol de baguette… Tous les Surveillants avaient accepté de signer le document qui restreignait ainsi leurs pouvoirs.

Petit à petit, les choses s'amélioraient.

Mullan était une autre paire de manches. Elle n'était pas loin de haïr les hommes. Tous les hommes. Moins elle fréquentait les prisonniers ou ses collègues masculins, mieux elle se portait. Elle n'appréciait pas non plus son travail. Ça aurait été un défaut dans n'importe quelle profession, mais dans l'environnement toxique d'Azkaban, il était rassurant d'avoir à ses côtés cette femme robuste qui n'éprouvait aucune passion pour la domination. Elle avait été la première à signer le document sus-invoqué, et était rapidement devenue la principale alliée de Harry sur toutes les questions liées au traitement des prisonniers, en particulier en ce qui concernait les détenus Non-Humains du corridor 1. En outre, elle était douée. Exceptionnellement douée. Sur le plan des capacités intellectuelles ou magiques, elle rappelait Hermione. La raison pour laquelle elle était venue s'enterrer à Azkaban était un mystère. Plusieurs fois, Harry avait essayé de creuser la question, mais elle lui adressait alors le regard méprisant qu'elle réservait aux mâles, et il changeait aussitôt de sujet.

Mullan s'était cependant considérablement adoucie depuis la prise de service de Malfoy qui gérait désormais à sa place les commandes, les courriers administratifs, l'archivage, le budget…

Malfoy…

Harry fit tourner le fond de café froid dans son mug…

Malheureusement, il ne pouvait pas rester tranquillement là, à penser à Malfoy : il fallait travailler. Il s'étira à nouveau, puis sortit de la salle de réunion. Johnson l'attendait, adossé au mur. Harry le salua, puis ils se mirent en route en bavardant tranquillement.

Harry appréciait sincèrement Julius Johnson. Il ne pouvait pas s'empêcher de penser à un brave gamin, à chaque fois qu'il le voyait, et bien que le Surveillant soit plus âgé que lui de deux ans. C'était sa façon de parler sans arrêt de sa vieille maman, comme il l'appelait : Une ancienne Auror particulièrement douée, aujourd'hui retraitée, qui avait tout quitté pour assurer seule l'éducation de son fils unique, le pauvre gamin étant quasiment Cracmol et n'ayant pas été accepté à Poudlard. C'était pour elle qu'il avait absolument voulu devenir fonctionnaire. Sans diplôme et presque sans magie, il n'avait été accepté nulle part, si ce n'est au pénitencier d'Azkaban, où à l'époque, les candidatures ne se bousculaient pas. Avec les deux Majors, il faisait partie des rares Gardiens à, Harry était sûr et certain, n'avoir jamais touché Malfoy. Il avait pourtant été admis au poste de Surveillant en même temps que Northfield, à qui le détenu avait été offert en pâture. Johnson, cependant, avait eu la présence d'esprit de refuser de participer à la « fête ». Harry avait osé l'interroger, et Johnson avait répondu, effaré : « Oh, là, là, vous n'y pensez pas, Monsieur Potter. Pas moi. D'abord, je préfère les femmes, et puis, quand je pense à ce que ma vieille maman en dirait… Non, non, non, chez moi, on ne fait pas ça avec des inconnus… »

On ne fait pas ça avec des inconnus. Johnson n'avait pas eu l'air de considérer qu'il puisse s'agir d'un viol. Et bon sang, il était vrai que Malfoy se plaignait si peu, acceptait tant sans montrer d'embarras et, au final, avait cette façon de se relever dignement pour se recoiffer calmement en semblant attendre la suite des opérations… On pouvait douter de lui avoir fait du mal. Harry en avait douté. Il continuait parfois à douter.

Malfoy…

Harry et Johnson s'arrêtèrent dans le sas menant au corridor 3. Le Surveillant se tût enfin, et ouvrit grand les yeux pour observer son Directeur qui baissa la tête et ferma les yeux, gêné. Depuis des années, il avait droit à ce regard admiratif de la part de parfaits étrangers ou d'anciens camarades. La gêne avait fini par laisser place à l'agacement et à la colère… Ceci dit, Johnson était tellement sincère – un air de Colin Crivey – qu'il était impossible de lui reprocher quoi que ce soit. Et puis ce n'était pas Celui qui a Vaincu que le gamin admirait, mais Celui qui a reçu l'Approbation de ma Vieille Maman. Un titre neuf dont Harry n'avait pas encore eu le temps de se lasser.

Il se concentra.

D'abord, il fallait abandonner Harry et revêtir le rôle de Harry Potter, le Survivant. Il redressa les épaules et fit adopter à sa respiration un rythme lent et sûr de lui.

Ensuite il pensa aux conseils de Vissarion pour contrôler ses débordements magiques : Rassembler ses forces juste-là, sous la gorge, à mi-chemin du cerveau et du cœur, là où on peut les invoquer ou les révoquer d'un mot. Elles étaient immenses, encore une fois. Glacées. Avides. Elles désiraient sortir. Il sentit le reste de son corps se réchauffer immédiatement, privé de cette masse sirupeuse de magie concentrée.

Enfin, il se rappela les conseils plus terre-à-terre de sa psy, Madame Kathleen :

Inspirer. Expirer.

Remplacer les « il faut » et les « je dois » par des « j'ai besoin » :

J'ai besoin d'être rassuré. J'ai besoin de calme chez les détenus pour me rassurer.

La dédramatisation :

Si j'échoue, ce ne sera que temporaire. Ça ne sera pas grave. Nous trouverons une autre solution.

Accepter l'inévitable :

Je ne suis pas un héros. J'ai le droit d'échouer.

Inspirer. Expirer.

Harry releva la tête et adressa un hochement de tête décidé au Surveillant qui l'accompagnait. Il ouvrit d'un grand geste les portes du sas, et sans perdre un instant, remonta à grandes enjambées le couloir. Le vacarme était assourdissant. Les insultes et les moqueries pleuvaient. Certains détenus se mirent à frapper leurs barreaux. On leur jeta des pierres déchaussées des murs, que Harry repoussa sans peine, sans un mot, sans un geste, d'un simple Protego informulé. La magie était là, sous sa gorge, et un soupir suffisait à la faire sortir. On leur cracha au visage. Heureusement, le sort les protégea tout deux.

Le pauvre Johnson aurait bien eu du mal à se défendre seul.

Au hasard, Harry lança quelques Petrificus Totalus, afin d'instaurer la crainte sur son passage. Le résultat fut mitigé : Certains prisonniers reculèrent et se calmèrent effectivement, mais d'autres hurlèrent de plus belle pour combler le manque.

On avait prévenu Harry : Quand ce genre de colère grondait, l'étape suivante consistait pour les détenus à mettre le feu à leurs matelas. Ensuite venait un temps de calme, puis, quand on pensait les choses apaisées, une émeute éclatait, au réfectoire ou dans les douches, là où les Surveillants risquaient leur vie.

La solution : Endoloris pour calmer tout ce petit monde, puis faire un ou deux exemples avec des traitements plus imaginatifs.

Harry avait laissé cette grogne enfler… C'était un risque, mais il fallait absolument tester de nouvelles techniques d'incarcération, et bien que l'idée soit collective, c'était à lui de gérer. Le matin même, il avait privé les détenus du corridor 3 de petit déjeuner, et avait laissé fuiter le bruit que c'était une précaution prise à cause de leur colère… La veille, ils étaient simplement passés en dernier, et cette fois-ci, n'avaient reçu aucune information.

Il n'y avait pas besoin d'être Merlin pour se rendre compte que la cohésion des détenus du corridor 3 était trop parfaite pour être due à un ras-le-bol général. Non, l'ensemble des Mangemorts n'était en fait qu'un seul homme, Lucius Malfoy, capable de décréter un mouvement social afin d'obtenir ce qu'il désirait.

Quand Harry arriva en vue de sa cellule, il lança à l'avance un Alohomora combiné à un sort d'artifice, le tout englobé par un sortilège de déclenchement tactile. Rien de bien compliqué, mais l'effet était suffisamment spectaculaire pour impressionner la plupart des Sorciers : Dès qu'il posa la main sur la poignée de la lourde grille métallique, des éclairs jaillirent, un bruit de tonnerre se fit entendre, la serrure fut immédiatement déverrouillée, et Harry put pénétrer la cellule.

Il avait été assez rapide pour que Lucius ait à peine le temps de le voir débarquer.

Harry s'installa aussitôt dans l'exubérant fauteuil que le Sang-Pur était parvenu à s'offrir. Quand il s'y été affalé la fois précédente, avec ses vêtements trempés d'eau de mer, l'homme avait blêmit, et Harry s'était sentit à deux doigts de lui faire avoir une attaque cardiaque. Il aurait été dommage de se priver de ce spectacle… Il tendit négligemment ses jambes devant lui, croisant les chevilles, et posa confortablement ses avant-bras sur les accoudoirs rembourrés, tenant sa baguette entre des doigts faussement détendus.

Johnson vint se placer à ses côtés.

Lucius Malfoy avait probablement été occupé à lire la Gazette dans son lit. Il avait eu le temps de se lever et de poser le journal sur la table de nuit, mais désormais qu'il était debout, il semblait hésiter sur la posture la plus aristocratique à adopter.

Macnair et Rockwood l'observaient, attendant silencieusement de l'imiter ou d'obéir à ses ordres.

Finalement, Lucius leur adressa un signe de tête discret et les deux hommes se rassirent sur l'un des lits bas. L'aristocrate resta donc seul, debout, au milieu de la pièce, et sembla considérer qu'en adoptant une certaine posture, il parviendrait à remplir l'espace et à se rendre maître des lieux.

Une posture qui rappelait douloureusement Malfoy. L'autre Malfoy.

« Monsieur Potter, salua-t-il avec froideur.

– Pardon ? » Harry fit mine de tendre l'oreille et d'avoir mal entendu.

Cette minuscule petite impertinence suffit à faire étinceler de haine les yeux gris du prisonnier. Son expression ne changea pas d'un iota, mais Harry avait appris à focaliser son attention sur les minuscules contractions et autres micro-expressions sur le visage de Malfoy, et il se targuait désormais d'être capable d'en remarquer une bonne partie. Les interpréter était plus compliqué. Mais ce dissimulateur-là était moins complexe à analyser.

Harry attendit quelques secondes avant de marmonner :

« Par Merlin, quel vacarme… J'ignore comment vous supportez cela, Lucius. Assurdiato. »

Aussitôt, le silence tomba sur le corridor, tandis que les détenus continuaient de s'égosiller sans émettre un son, ou de frapper des barreaux devenus muets.

Les yeux gris passèrent une seconde sur la baguette de houx et brulèrent d'envie. Puis ils revinrent se planter dans le regard de Harry qui lui adressa un sourire insolent.

« Vous disiez ? »

L'homme plissa les yeux, hésita un instant, pesant le pour et le contre à soulever cette minuscule marque d'irrespect. Puis, comme Harry l'avait prédit, il décida probablement que le Directeur d'Azkaban méritait que l'on passe outre son impertinence.

Il hocha poliment la tête et dit avec calme :

« Je ne faisais que vous saluer, Monsieur Potter. C'est un plaisir de vous voir faire comme chez vous, et je suis contrit que le volume sonore ne soit pas à votre convenance. Malheureusement, la colère enfle, et je ne peux rien contre cela…

– Si vous n'y pouvez rien, peut-être que je devrais m'adresser à quelqu'un d'autre. Johnson, pensez-vous que les détenus accepteraient d'élire un représentant pour m'expliquer leurs revendications ? Tout cela me dépasse tellement… »

Johnson bégaya un moment, surpris d'être pris à partie, puis annonça enfin, visiblement gêné :

« Et bien je pense que Monsieur Malfoy est probablement celui qu'ils désigneraient… Mais évidemment, je peux organiser un vote… Voulez-vous que…

– Oui, mais plus tard. Je ne suis pas seulement venu travailler. C'est toujours un plaisir de bavarder avec un Malfoy. Comment vous portez-vous, Lucius ? »

Lucius Malfoy serrait les mâchoires à chaque fois que Harry l'appelait par son prénom. Une autre délicieuse impolitesse. En outre, il était de plus en plus difficile pour Harry d'appeler le père et le fils par le même nom.

« Monsieur Potter, ne pensez-vous pas qu'il est temps de faire cesser ce petit numéro ? Je ne peux certes rien pour faire cesser le mécontentement, mais il m'est possible de vous faire part des revendications des détenus.

– Je suis tout ouïe.

– Nous exigeons d'être informés sur cette affaire de Détraqueurs. »

L'homme attendit une réponse qui ne vint pas… Quand le silence devint si pesant que Johnson se mit à piétiner sur place pour pouvoir discrètement apercevoir le visage de Harry, ce dernier prit enfin la parole :

« Je doute qu'il s'agisse là de votre seule revendication, Lucius. Exposez moi l'ensemble de vos griefs, afin que je puisse juger s'il est pertinent d'exaucer tous vos souhaits, ou bien aucun…

– Il serait plus judicieux de se pencher sur chacune de nos requêtes, une par une.

– Je ne le pense pas. Pour ma part, je ne me satisferai pas d'une demi-quiétude. Vous feriez mieux de vous habituer, je ne compte pas changer cette habitude. Poursuivez. »

Le prisonnier respira calmement, mais les ailes de son nez frémirent d'indignation. Harry fit patiemment tourner sa baguette entre ses mains.

« Nous exigeons d'être tenus informés des raisons de chaque confinement exceptionnel. Nous exigeons de retrouver notre horaire en ce qui concerne les services au réfectoire. Nous exigeons le retour parmi nous de notre camarade, Drago Malfoy, mon fils. Enfin, nous exigeons la mise à pied de cet incapable », il désigna sans le regarder Johnson, « et la prise en charge de notre corridor par un Surveillant compétant. Nous proposons Keylan Lloyd. »

Le silence revint. Les détenus semblaient s'être lassés de hurler dans le vide et s'étaient calmés. Harry leva son sort en s'accompagnant d'un mouvement de baguette inutile, et on put entendre quelques toussotements, grincements, et autres bruits de pas.

Harry poussa un soupir théâtral avant de répondre :

« Vous me décevez, Lucius. Je vous ai dit que j'accepterai vos revendications dans leur ensemble, ou bien aucune. Nous avons déjà discuté de Drago, et j'ai été très clair sur le sujet. Vous ne récupérerez de lui que ce que je vous en laisserai au final, et uniquement quand je me serais lassé de sa présence. Si vous vous obstinez à le réclamer, vous n'obtiendrez donc rien de moi. Demandez-moi autre chose. »

Lucius Malfoy se redressa, jeta un coup d'œil vers ses deux codétenus, et sans hésitation, comme s'il avait déjà de toute façon réfléchi à cette éventualité, il déclara :

« Nous exigeons que l'un de nous puisse rejoindre l'équipe titulaire des cuisiniers. Nous proposons Augustus Rockwood. »

Harry se souvint de ce qui avait échappé à Malfoy, des semaines plus tôt : « Un sadique comme Waren, ou Sparvus, ou Rockwood, ou… » Rockwood était arrivé en troisième position. Un élément intéressant. Surprenant que le poste titulaire doive échoir à Rockwood alors que Macnair avait suffi pour celui de remplaçant. Un nouveau sujet de réflexion. La première fois qu'il avait parlé à Lucius, Drago avait quasiment été la seule de ses revendications. La deuxième fois, il avait insisté moins longtemps. Cette fois-ci, pas du tout. Toujours intéressant.

Harry se leva, et fit rouler son épaule, qui l'élançait un peu depuis son réveil. Il savait toutefois que ce désagrément était dû à la tête de Malfoy, qui l'avait utilisée comme oreiller, et c'était donc une douleur étrangement agréable, et légèrement excitante.

« C'est mieux, déclara-t-il. Ceci-dit, je refuse. »

Il se dirigea vers la porte, toujours ouverte. Johnson le suivit.

« Pardon ?!

– Lucius », dit-il d'une voix forte, perceptible à plusieurs cellules à la ronde, alors qu'il se trouvait à nouveau dans le couloir. « Le Surveillant Brigadier Johnson a toute ma confiance. Je ne doute pas une seconde qu'il soit capable de maintenir l'ordre ici. Si ses méthodes ne vous conviennent pas, je me chargerai personnellement de vous faire obéir. Et je doute que vous apprécierez davantage. » Deux ou trois nouveau Petrificus Totalus, pour donner un aperçu. Il entendit une masse chuter sur le sol à quelques mètres de lui, mais ne détourna pas le regard, malgré les exclamations surprises ou inquiètes des codétenus des victimes.

Johnson écarquilla les yeux, mais garda le silence.

« Ah j'oubliais… » Harry sortit de sa poche un poing serré qu'il tendit dans la cellule. Il écarta les doigts et une vingtaine de pièces d'argent et de bronze tombèrent sur le sol en tintant et en rebondissant. « Votre fils m'a presque supplié de vous transmettre ceci. Et vous savez à quel point il est difficile de lui résister. »

Les yeux de l'Aristocrate brulèrent de haine, et Harry se demanda s'il s'abaisserait à ramasser l'argent par terre ou s'il ordonnerait et ses larbins de le faire à sa place. Il sortit de sa poche une dernière pièce – d'or, cette fois – et l'envoya d'une pichenette vers le prisonnier qui l'attrapa au vol.

« Celle-ci est de ma part. Pour le divertissement. »

Il verrouilla la cellule d'un informulé et s'éloigna. Presque aussitôt, les cris reprirent.

Toutefois, une nouvelle chanson s'était ajoutée au désordre : Ça et là, des cris ne cherchaient pas à insulter mais à attirer son attention. Harry s'immobilisa devant une cellule que lui avait indiqué Johnson plus tôt. L'homme qui l'avait interpellé, un brun au long visage pâle, parut surpris d'être parvenu à faire s'arrêter le Directeur d'Azkaban, et il recula nerveusement.

« Monsieur ? demanda poliment Harry.

– Dolohov, Monsieur. Antonin Dolohov. »

Dolohov était celui qui avait assassiné Gideon et Fabian Prewett, les frères de Moly Weasley. Par principe, Harry ne pouvait faire confiance à cet individu. Mais il était aussi un Mangemort respecté. Enfermé pour la troisième fois à Azkaban, il était connu, reconnu, une vraie légende parmi les prisonniers. L'un des rares à ne pas avoir perdu la tête quand les Détraqueurs hantaient encore ce lieu. Le meilleur candidat pour devenir un rival digne de Lucius Malfoy, du moins, c'est ce que Johnson avait laissé sous-entendre.

« Monsieur Dolohov, répéta Harry. Vous m'avez interpelé ? Je me suis trompé ?

– Non, Monsieur, je… » Le détenu jeta un coup d'œil nerveux autour de lui, comme pour guetter une approbation, mais les seuls à croiser son regard semblaient aussi surpris que lui que le Survivant lui adresse la parole. « Monsieur, nous avons entendu dire que… Que des travaux de réhabilitation allaient avoir lieu dans le château, et que des détenus seraient autorisés à y participer… Nous… Nous aimerions tous connaître les modalités de… »

Harry haussa les sourcils. Non, il n'avait pas prévu d'engager des détenus pour construire les fortifications. Ce n'était par ailleurs pas une si mauvaise idée…

« Malheureusement, Monsieur Dolohov, le Surveillant Brigadier Johnson m'a convaincu qu'il serait un peu trop hasardeux d'admettre un détenu du corridor 3 sur le chantier… Vous pouvez nous comprendre, je présume ? »

Harry n'ajouta rien, mais pouvait voir les rouages s'activer sous le crâne de Dolohov tandis qu'il observait Johnson, se demandant probablement comment retourner l'opinion du Surveillant.

« Je comprends, articula péniblement Dolohov, mais sachez que… Que nous… Peut-être que nous pourrions… »

Malheureusement, le type avait moins d'aisance et de charisme que Lucius Malfoy… Il était pourtant absolument nécessaire de diviser les détenus, et pour cela, indispensable qu'il prenne confiance en lui. Harry l'avait pris de court. Une erreur.

« Monsieur Dolohov, je suis désolé de ne pas pouvoir poursuivre cette conversation avec vous. Je ne supporte plus ce raffut. J'ai toutefois convenu avec Johnson de revenir demain, et nous aurons peut-être l'occasion de parler dans de meilleures conditions, bien que le confinement extraordinaire de votre corridor soit amené à se poursuivre… Bonne journée, Monsieur Dolohov. Messieurs. » Harry salua les codétenus de l'homme et reprit sa route, suivi par le Surveillant Brigadier.

Les cris s'étaient un peu atténués. Plus personne ne tapait sur les barreaux ou ne crachait sur leur passage. Harry lança de nouveau une série de Petrificus Totalus au hasard, réduisant encore le vacarme et faisant reculer les hommes, qui ignoraient qui ce qui déclenchait le phénomène.

De retour à l'abri du sas de sécurité, Harry laissa échapper un immense soupir…

« Monsieur Potter… Je veux dire, Monsieur le Directeur, se reprit Johnson, vous savez, je comprendrais que vous décidiez de nommer un autre de mes collègues au poste de Surveillant Brigadier… Vous savez, je ne…

– Combien de temps avant que les choses dégénèrent, Johnson ?

– Et bien… Avant que vous n'interveniez, j'aurais dit dans la journée… Mais maintenant, je ne sais pas… Je pense que Dolohov pourrait temporiser les choses. Ils jugeront plus intéressant de pouvoir avoir un travail plutôt que d'obtenir les informations que Malfoy a réclamé… Mais honnêtement, c'est surtout celui qui parviendra à vous faire renoncer au confinement, ou vous poussera à réviser votre jugement sur les horaires du réfectoire qui…

– Vous voyez Johnson ? Vous êtes observateur et intelligent. Je vous répète ce que j'ai dit à Lucius : J'ai tout à fait confiance en vous et en votre capacité à gérer les choses ici. Avec ou sans magie. »

L'homme cligna des yeux, visiblement touché.

« Nous devrons discuter de cette affaire de travaux, avoua Harry en reprenant la route. Je n'avais pas prévu ça… Qu'en pensez-vous ?

– Et bien, je ne sais pas si mon opinion sur le sujet est pertinente, mais…

– Elle l'est, et je vous écoute…

– Et bien ma vieille maman dit toujours que… »

Oui, Harry se sentait capable d'améliorer les choses ici. Un peu de manipulation, un peu de menaces, une certaine dose d'improvisation, pas mal de roublardise, et l'aide de personne qui lui faisaient confiance et à qui il pouvait faire confiance. Johnson avait probablement quelques talents cachés, comme Mullan, ou Runcorn, ou Shesh, ou tous les autres. Comme Luna, ou Neville, ou Molly. Quand on accordait un peu d'attention ou d'encouragements aux gens, ils révélaient tous tellement plus que ce qu'ils paraissaient…

Comme Malfoy.

Malfoy…

Harry sourit.

Peu importait d'où partaient ses pensées, quelle route elles empruntaient, invariablement, elles échouaient sur Malfoy. Malfoy et ses problèmes, Malfoy et son travail, Malfoy et ses exubérantes attitudes, Malfoy et ses secrets…

Malfoy était à la fois une bénédiction et une inépuisable source de frustrations.

En ce qui concernait le travail, il n'y avait pas à débattre : Malfoy abattait en quelques heures ce que lui aurait mis des jours à accomplir. Malfoy organisait les choses de façon logique et claire, rédigeait des comptes-rendus et des résumés si limpides que Harry n'avait plus besoin de s'arracher les cheveux à décrypter les fastidieuses documentations envoyées par le Ministère ou les institutions.

Malfoy répondait à son courrier à sa place, ou prenait des décisions pour lui sans lui demander son avis. Et c'était étonnamment agréable.

Hermione et Mullan avaient toujours respecté Harry et son opinion, et lui demandaient ce qu'il pensait de tout ce qui le concernait. Malfoy ne s'embarrassait pas de cela : A deux ou trois occasions, il l'avait vu jeter à la corbeille des liasses de parchemins sans la moindre hésitation. Abasourdi, Harry avait attendu que le prisonnier ait le dos tourné pour récupérer les documents et les parcourir des yeux, et il avait constaté l'effectif inintérêt de ceux-ci : Demandes de stages, demandes d'interviews, invitations à des galas, à des vernissages, propositions de collaborations invraisemblables… Des documents que Hermione ou Mullan l'auraient laissé lire, en attendant même qu'il en ait l'envie, avant de donner leur avis, puis de l'aiguiller dans sa prise de décision à y répondre ou non, et sur quel ton. Une corvée, et une abominable perte de temps et d'énergie.

Plus étonnant, Harry s'était mis à s'intéresser à toutes ces futilités politiques. Il trouvait toujours les mondanités inintéressantes et épuisantes, il n'en voyait pas l'intérêt… Mais il avait lu les réponses que Malfoy adressait aux différentes personnalités ou organismes : Lesquels méritaient la Contre-Plume qui sous-entendait que « Monsieur Potter » avait personnellement pris le temps de répondre, lesquels avaient droit à l'impersonnel « Monsieur Potter m'a chargé de vous transmettre… », et lesquels, enfin, ne méritaient pas mieux que « L'équipe de Monsieur Potter vous informe que… » C'était un exercice bien loin des préoccupations de Harry, mais c'était Drago Malfoy qui s'y employait, et ceci suffisait à napper la pratique d'une aura fascinante.

Il avait eu peur que par snobisme, Malfoy n'accorde aucun intérêt à certains organismes qui lui tenaient à cœur, tels que le Chicaneur, la Ligue de Protection des Loups-Garous, ou la Société d'Aide à la Libération des Elfes, mais Malfoy le connaissait bien, et ce genre de documents se retrouvaient systématiquement dans la pile « non important, mais à étudier » de Malfoy. Quand Harry déplaçait un courrier de ce tas vers celui des courriers importants auxquels répondre, alors Malfoy le remarquait, s'en souvenait, et adaptait ensuite sa technique de tri avec cette nouvelle variable.

Oui, en ce qui concernait le travail, Malfoy était un cadeau du ciel.

En revanche, en qui concernait leurs relations… Malfoy était un vrai Sombral : insaisissable, incompréhensible, un vrai mystère… Mais comme un Sombral, également fascinant et attirant. Harry aurait donné n'importe quoi pour avoir un secrétaire doué dans le genre de Drago Malfoy afin de lui expliquer le fonctionnement de la personnalité de type Drago Malfoy.

Malfoy se dévoilait peu à peu, et il était à mille lieues de tout ce que Harry pensait savoir de lui :

Il pensait Malfoy arrogant. Malfoy était pétri d'insécurités.

Il pensait Malfoy orgueilleux. Malfoy était prêt à toutes les humiliations pour des récompenses qui paraissaient aberrantes à Harry. Il ne se remettait toujours pas de ce qu'il avait été prêt à subir pour pouvoir jouir d'une cellule froide, souterraine et isolée.

Il pensait Malfoy autocentré. Malfoy se fichait de ce qui lui arrivait. Malfoy n'avait que les intérêts de son père à cœur. Harry avait découvert l'identité de certains de ses violeurs parmi les gardiens, et avait prononcé leurs noms au cours de discussions pour observer sa réaction. Malfoy dissimulait sans sourciller toute la répulsion qu'ils lui inspiraient, et les défendait même ardemment quand il estimait qu'ils avaient raison.

Il pensait Malfoy matérialiste. Malfoy l'était dans un sens : Donnez-lui une paire de lacets, et il s'admirait les godasses pendant des heures, comme un gamin à qui on vient d'offrir son premier balai ! Mais laissez traîner une pièce d'or, une Main de la Gloire, une Baguette Magique ou un médaillon enchanté, et il rangeait sagement l'objet à sa place, après l'avoir dument dépoussiéré. Parce que Malfoy était aussi un étonnant maniaque de la propreté et du rangement.

Il pensait Malfoy froussard. Malfoy avait affronté un Détraqueur avec lui, sans baguette, pour une raison qui lui échappait totalement. Malfoy continuait de fréquenter les cuisines où, Harry le savait, Harry le sentait, Malfoy n'avait que des ennemis. Il y trouvait forcément son compte, mais comment ?

Il pensait Malfoy mauvais… Harry lui avait montré ce qu'il pouvait y avoir de pire en lui. Il en tremblait encore… Et Malfoy semblait vouloir le pardonner.

Semblait…

Mais Harry se méfiait toujours du détenu… Comment lui faire confiance, par ailleurs, avec tout ce qui s'était passé entre eux ? Et puis Harry se souvenait parfaitement des mots qu'il avait prononcés quand il lui avait fait part de son souhait de voir leur relation s'améliorer : « Ne t'en fais pas, je vais jouer la comédie, prétendre que j'ai changé d'avis. D'ici une semaine, tu auras oublié cette conversation. »

Les chances que Malfoy soit en train de jouer la comédie, de le manipuler, de ne lui donner que ce qu'il pensait que Harry désirait… Ces chances étaient élevées. Gargantuesques, même.

Alors Harry avait commencé à laisser une liberté totale au prisonnier. Qu'il puisse aller où il veut, fréquenter qui il désirait, réclamer tout ce qui lui passait par la tête ! Et qu'il commette une erreur, une seule erreur, afin que Harry puisse enfin savoir la vérité. Pourvu qu'il tente de s'enfuir, pourvu qu'il commande un artéfact de Magie Noire, pourvu qu'il lui vole sa baguette ! Alors au moins, Harry serait fixé…

Malfoy n'avait fait aucune erreur.

Par Merlin, Harry lui avait laissé les commandes de son balai, puis avait plongé dans l'eau ! N'importe qui se serait enfui… Bon, peut-être la peur aurait pu le clouer sur place, la crainte d'être rattrapé… Mais Malfoy était resté même quand le Détraqueur avait surgi… Ce n'était donc pas ce sentiment-là qui l'avait empêché de saisir sa chance.

Le Détraqueur… Quand le Détraqueur avait débarqué, les choses avaient été évidentes pendant un instant : Malfoy était responsable, Malfoy était un Mage Noir, Malfoy méritait tout ce qu'il avait subi… Pendant un instant seulement. Ensuite, il avait plongé son regard dans les yeux du prisonnier, et réalisé que même le pire des Voldemort n'aurait pas mérité le sort qu'avait connu Drago Malfoy… Pendant quelques secondes, Malfoy avait été incapable de revêtir son masque inexpressif de victime consentante et Harry avait réalisé que…

Et puis parfois, Harry priait pour que Malfoy ne fasse jamais d'erreur, ne saisisse jamais l'occasion de le trahir ou de s'enfuir… Pourvu qu'il soit sincère, pourvu qu'ils puissent…

C'était certains gestes qu'il avait, certaines attitudes : Sa façon de se recoiffer avec lenteur… Son ton quand il prononçait « Pottah » avec sa voix traînante. Son rire aussi, quand Harry parvenait à le surprendre et à faire sauter temporairement sa carapace de petit Bourgeois prétentieux... Et puis la façon dont il se tapotait les lèvres des doigts quand il réfléchissait… La manière dont il se redressait, après avoir ramassé le courrier, un quelconque objet par terre, ou quand il sortait un objet d'un placard bas… Il se dépliait doucement, de bas en haut, tendant d'abord les jambes, redressant la taille, le buste, les épaules, et enfin la tête… On ne pouvait s'empêcher de le parcourir des yeux…

Oui, la façon dont Malfoy mouvait son corps l'obsédait et le rendait fou de désir… Les choses étaient plus simples quand il n'avait pas à se soucier que le prisonnier soit consentant ou non… Aujourd'hui, tout était si compliqué. A ses remords s'ajoutait le fait qu'il savait qu'il ne serait jamais satisfait de leur relation :

Si Malfoy se donnait à lui, malgré ce par quoi ils étaient passé, cela signifiait qu'il n'était pas sincère. On ne pouvait pas pardonner et passer outre ces choses-là…

S'il s'y refusait… Ce serait affreux. Mieux pour Malfoy, mais un poignard dans le cœur pour Harry.

S'il continuait à hésiter ainsi… C'était égoïste, mais s'il continuait à hésiter, alors Harry pourrait s'en satisfaire, peut-être éternellement. S'ils pouvaient continuer à flirter, à se réciter des poèmes d'amour stupides, à bavarder et à rire ensemble… Tout était compliqué, mais c'était aussi la solution la plus agréable…

Harry faisait toujours attention à prendre son repas du midi à cheval sur deux horaires, afin d'avoir l'occasion de discuter à la fois avec les Surveillants qui entraient en service et ceux qui en sortaient. Au début, sa présence avait intimidé le personnel, et peu avaient osé lui parler. Pendant quelques temps, ensuite, il avait été considéré comme « le patron », et les discussions n'avaient traité que du travail. Harry avait franchement hésité à déjeuner seul afin de s'accorder au moins une pause dans la journée… Puis, peu à peu, les esprits s'étaient détendus. C'était surtout grâce à Runcorn, qui avait tout fait pour humaniser les Surveillants à ses yeux : « Je suppose que vous avez déjà entendu parler la fille de Hitchin, Monsieur le Directeur ? Non ? Hitchin, montre-lui donc la photo, on sait tous que tu en meurs d'envie ! Elle vient d'intégrer Poudlard, et elle est déjà premier violon de la chorale, une jolie gamine… » Peu à peu, Ils s'étaient ouverts à lui, et il s'était ouvert à eux.

Ils avaient découvert sa bisexualité.

Jusqu'ici, personne dans le monde magique, à l'exception de Hermione et Ginny n'avaient été au courant : Harry faisait déjà trop régulièrement la Une des tabloïds, et il avait refusé que sa vie amoureuse ou sexuelle soit jetée en pâture aux curieux… Il n'avait connu que des aventures brèves, voir sans lendemain, avec des Moldus, et son secret avait été préservé…

Mais Malfoy avait eu raison : A Azkaban, sa réputation de Marie-Couche-toi-là était presque supérieure à la renommée du Survivant, et tous avaient deviné qu'il s'envoyait le détenu entre deux dossiers.

Et ça n'avait semblé choquer personne. Il y avait bien eu quelques regards égrillards, quelques sous-entendus salaces, mais dans l'ensemble, l'affaire semblait n'avoir aucun intérêt. Harry s'était attendu à ce que certains vendent l'information aux journaux, mais rien n'avait paru.

Il avait fini par comprendre qu'à leurs yeux, Malfoy était tellement « fait pour ça » qu'entretenir une liaison avec lui ne signifiait rien : Il était suffisamment androgyne pour qu'on puisse coucher avec lui sans craindre d'être associé à une sexualité ou à une autre. Il était suffisamment consentant pour qu'une relation avec lui soit considérée comme plus proche de la prostitution que du viol. « Un échange de bons procédés » même, avaient osé expliquer quelques-uns.

Cette après-midi-là, Harry avait trois rendez-vous de prévu : Deux entretiens d'embauche en présentiel, et une rencontre avec un Magizoologiste marin Irlandais par Cheminette.

Concernant les entretiens, les lettres de motivation étaient passées au crible une première fois par Malfoy. Ensuite Runcorn s'occupait d'un questionnaire de motivation par poudre de Cheminette. Harry prenait enfin la peine de rencontrer les candidats en personne, une fois les dossiers non sérieux ou trop opportunistes éliminés. A la fin de chaque entretien, Harry demandait aux candidats s'ils acceptaient de passer le test de Legilimancie de Mullan. Ils avaient le droit de refuser, bien évidemment… Mais ils recevaient désormais tant de candidatures que Harry pouvait se permettre de faire la fine bouche. Ils n'acceptaient désormais plus personne qui ne vienne par esprit de revanche sur les Mangemorts.

Il était un peu plus de 15h30 quand Harry se rendit enfin dans « le hangar » : Une ancienne salle de bal dont le plafond avait été arraché lors de la seconde Grande Évasion d'Azkaban. Une plaque de tôle ondulée le remplaçait désormais, créant une atmosphère étrange, à mi-chemin entre l'usine industrielle et la salle de réception. Des chauves-souris vivaient là-haut, se nourrissant de Merlin seul savait quoi. On disait qu'à l'instar des perroquets et des corbeaux, elles étaient capables d'écouter et de reproduire la voix humaine.

C'était ici que les cours journaliers de Patronus avaient lieu. Tous participaient, tous faisaient des efforts. Tous ne réussissaient pas. Harry passait entre les rangs, relevant ici une baguette, modifiant une posture, corrigeant une prononciation… Runcorn, évidemment, aidait : Il s'occupait très peu de l'aspect technique à proprement parler, mais ses encouragements tranquilles et ses tapes dans le dos à la moindre fumée argentée motivaient les élèves autant que les conseils de Harry.

Il repéra dans un coin Keylan Lloyd, un Surveillant affecté au minuscule corridor 1, destiné aux détenus Non-Humains. L'homme que Lucius Malfoy avait proposé comme remplaçant de Johnson. Harry ne s'était jamais franchement méfié du bonhomme : Un type marrant, extraverti, facile à vivre… Un ancien joueur de Quidditch professionnel avec qui Harry avait donc facilement sympathisé… Mais s'il plaisait à Lucius, alors il cachait peut-être quelque chose. Ça, ou bien Lucius tenait à créer une scission entre les Surveillants, comme Harry souhaitait en créer une entre les détenus.

Harry se dirigea vers lui et l'aida à desserrer sa prise sur sa baguette.

« N'imaginez pas que vous teniez une arme, Lloyd. Pensez plutôt qu'il s'agit de votre souvenir précieux, et que vous ne voulez pas l'abimer. Voilà, comme ça… Allez-y ?

Spero Patronum ! »

Rien ne se passa.

« A quel souvenir pensiez vous ?

– Ah… Au jour où notre équipe est entrée en ligue Européenne… Je sais, ça ne semble pas grand-chose, mais cela faisait plus de 60 ans que…

– En effet, ce ne sera pas suffisant. Avez-vous des proches que vous aimez ? Une épouse, des enfants ? Non ? Vos parents peut-être ? Eux alors, ou sinon, vos coéquipiers de l'époque. Concentrez-vous plutôt sur la fierté qu'ils ont ressenti ce jour-là. Sur les émotions que vous avez partagées ensemble. Recommencez. »

Il récita à nouveau la formule plusieurs fois. Quand Harry fut convaincu qu'il était suffisamment concentré sur ce souvenir, il agita discrètement sa baguette et invoqua un sortilège de Legilimancie à voix basse en profitant du vacarme ambiant pour dissimuler ses mots. Il était très loin d'être doué. Ce n'était pas un problème de puissance ou de volonté : Certaines pratiques magiques venaient naturellement à certains, et seraient à jamais inaccessibles à d'autres… Mais Severus Rogue avait finalement été un bon Professeur, en tout cas pas pire que Vissarion Kenaran, et Madame Kathleen l'avait aidé à trouver le bon état d'esprit : Si sa cible était suffisamment concentrée, alors…

Harry vit le balai de Lloyd percuter celui de son partenaire dans une accolade virile, puis tous les autres membres de l'équipe les rejoindre dans les airs. Un amas de joie et d'émotion… Les yeux brillants, la brusque concrétisation d'un rêve commun…

Puis il vit ce qu'il s'était ensuite passé dans les vestiaires.

Harry recula, avec une violente envie de vomir et un besoin irrépressible de frapper quelqu'un ou quelque chose, une nécessité de détruire. Il retint la Magie. Heureusement qu'il l'avait enchaînée dans sa gorge, ce matin-là. Sans ça, elle se serait échappée sans demander son reste. Le froid aurait été polaire, il y aurait eu des malaises. Une vague était toutefois montée de ses entrailles, rajoutant à la masse qu'il s'efforçait de contrôler.

« Monsieur Po… » Lloyd ne finit pas sa phrase. Il écarquilla les yeux devant lui, puis son visage se ferma d'un coup.

Il avait compris. Il savait qu'il savait. Lloyd ne tarderait pas à démissionner.

Harry se déplaça au hasard, le cœur au bord des lèvres, en prétextant examiner les différentes performances.

Moïrine NiDaïre se tenait toujours le ventre quand elle tentait d'invoquer un Patronus. Elle non plus n'y parviendrait jamais. Le souvenir était fort et beau, mais le bébé n'avait jamais vu le jour, et il y avait peu de chance qu'elle parvienne à surmonter ce traumatisme. Difficile pour autant de remplacer ce souvenir par un autre…

Wihelma Welbert, en revanche, avait fait de rapides progrès, bien que les Surveillantes aient moins souvent l'occasion de participer aux cours que leurs homologues masculins. Sa posture était parfaite, son visage décidé. Elle prononça la formule une énième fois, et lâcha sa baguette de surprise quand un ours argenté et majestueux apparut au milieu de la salle. L'apparition n'avait pas eu le temps de disparaître que son époux et collègue, Medwin, l'avait saisie dans ses bras pour la faire tournoyer joyeusement, dans un grand éclat de rire. Lui-même y était parvenu la veille. Ils avaient fait apparaître le même animal. Comme à chaque fois que quelqu'un parvenait à enfin invoquer un Patronus corporel, tous se jetèrent sur la sorcière rousse pour la féliciter, l'enlacer, ou lui demander comment elle avait fait…

Son regard croisa celui de Harry, qui lui adressa un hochement de tête en guise de bravo. Il ne se sentait pas encore capable de parler sans laisser échapper un flot de magie agressive.

Ils étaient trois à ne pas s'être joints au rassemblement : Lui-même, Lloyd qui dans son coin, contemplait le spectacle avec une jalousie malsaine, maintenant qu'il savait avoir été découvert, et Johnson assis au sol, dont les yeux exprimaient une autre sorte de jalousie, plus admirative et mélancolique.

C'est vers lui que Harry se dirigea. S'asseoir par terre était un peu ridicule : Peu de chance qu'en cas de combat ou d'apparition d'un Détraqueur, le Surveillant ait le temps de s'installer en tailleurs et de saisir sa baguette à deux mains… Mais c'était une idée de Runcorn, et ça semblait au moins aider le gamin à se détendre : Il était rapidement parvenu à émettre une épaisse fumée argentée autour de lui.

Harry adressa un signe de tête encourageant au Surveillant qui ferma les yeux, se concentra en serrant sa baguette contre sa poitrine, et articula « Spero Patronum » d'une voix décidée… A nouveau, un épais nuage brillant s'éleva.

« C'est très bien, Johnson, articula Harry. Restez concentré, mais essayez de détendre vos épaules… » Les épaules, et tout le reste, en fait. Le pauvre était tendu et crispé à l'extrême.

Après quelques minutes, il abandonna et ouvrit à nouveau des yeux…

« Je suis désolé, Monsieur Potter… Je pense que ce sort est vraiment hors de ma portée.

– Je ne pense pas, Johnson, Vous avez déjà bien progressé. Avec ce sort, ce n'est pas la puissance magique qui compte, mais la force de votre volonté et de votre souvenir heureux. Cette fumée n'a pas l'air de grand-chose, et elle ne permet pas de combattre un Détraqueur, mais elle est suffisante pour vous protéger, vous et ceux que vous aimez…

– Ah, je ne crois pas que ma vieille maman aurait besoin de mon aide pour se protéger contre un Détraqueur… C'est elle qui prendrait les choses en main… »

Les entraînements avaient repris. Un petit cercle s'était formé autour de Wihelma qui expliquait comment elle était parvenue à son but. C'était toujours un peu les mêmes mots, mais parfois, une intonation ou un détail particuliers permettaient de déclencher quelque chose dans l'esprit d'un autre élève, et alors un effet domino se mettait en branle.

Oui, ici, loin du Ministère, loin de la renommée qu'il avait, Harry se sentait utile… Il n'avait presque pas décidé de venir, mais il avait l'impression d'avoir fait un choix en restant. Peut-être le seul choix véritable de sa vie. Peut-être le seul choix où on ne l'avait pas prévenu : « Fais ce que tu veux. Mais sache que des milliers de vies sont en jeu… »

Il ne lui manquait presque rien.

Ils lui manquaient tous tellement…

Ron, Hermione, Teddy, les Weasley, Hagrid… Cela faisait des mois qu'il n'avait pas vu Hagrid… Qu'il ne lui avait même pas écrit…

A 16h, Harry finissait sa journée de travail. C'était tôt, mais c'était nécessaire. De toute façon, il commençait tôt sa journée de travail, il n'avait pas de weekend, et puis le soleil se couchait si vite ici…

Il souhaita une bonne soirée à tous, félicita encore Welbert, informa Johnson qu'il pouvait venir le déranger à tout instant si les choses ne se passaient pas comme prévu dans le corridor 3… Puis il grimpa les étages.

Devant sa porte, il hésita un moment :

S'il est parti, alors j'ai ma réponse.

S'il est encore là, alors… Alors, il sera là…

Harry poussa la porte.


Voici donc le Big Harry Potter's Point of View Chapter. Je vous avoue que mon côté maniaque a bien souffert quand je l'ai vu se rallonger et se rallonger, et dépasser allégrement la limite de mots par chapitre que je m'étais imposée... Difficile pour autant de le couper en deux, parce que ça aurait fait une première partie où il ne se passe franchement rien, Harry ne faisant que réfléchir en buvant son ptit café X,D Mais bon, ce chapitre est particulier puisqu'on change de point de vue, et je me suis forcée à admettre qu'il pouvait donc aussi être particulier dans son nombre de mots.
En espérant que ce ne fut pas trop indigeste !