77Hildegard : XD faut pas croire, moi aussi, parfois, j'ai envie de le charier mon Drago !

holybleu : Roh, j'ai trouvé ça trop cool de re-suivre ta progression, chapitre par chapitre, surtout sur cette partie bien down... Merci pour tes commentaires


Ce matin-là, Drago se réveilla une nouvelle fois avant Potter.

Encore une fois, la respiration chaude et moite dans sa nuque, l'impression diffuse d'étouffer… Encore une fois, il avait tenté de fuir pendant la nuit : L'une de ses jambes pendait dans le vide, et sans les bras et les jambes de Potter lourdement enroulés autour de son corps, il serait peut-être complètement tombé du lit.

Encore une fois, ce n'était pas totalement désagréable. Difficile à dire. Il fallait y réfléchir.

Il remua légèrement, ramena sa jambe engourdie sur le matelas en serrant les dents pour ne pas gémir de douleur, et se dandina pour reculer vers lui et donner un peu moins l'impression que sa présence le gênait ou le dégoutait.

Malheureusement, ses mouvements suffirent à tirer le dormeur du sommeil, et ce dernier marmonna son nom, encore à demi-endormi…

Drago se figea. Cette fois, hors de question de fuir, érection matinale ou non.

Quelles autres réactions possibles s'offraient à lui ?

Il écarquilla les yeux et sentit sa respiration s'emballer. Il savait ce qu'il ne devait pas faire, mais n'avait aucune idée de ce qu'il lui fallait faire…

Évidemment, c'est à ce moment qu'il sentit le tissu du jogging de Potter commencer à se tendre contre ses fesses. Il sentit une longue inspiration contre sa nuque… Puis un juron, et Potter s'éloigna d'un coup en le lâchant.

« Désolé, Malfoy, gémit-il. Je te jure que ça arrive quand je suis encore endormi ! »

Drago tourna la tête pour le regarder par-dessus son épaule. Il s'était rallongé sur le ventre, avait enfoui son visage dans le creux entre les oreillers, et n'ayant pas réussi à extraire complètement son bras de sous le visage de Drago, celui-ci était tordu dans une position visiblement inconfortable.

Ne sachant pas trop que répondre – une nouvelle fois, leurs comportements l'un envers l'autre étaient bêtement désynchronisés – Drago se redressa pour récupérer la couette qu'il avait envoyé valser pendant la nuit, et après avoir assisté à un nouveau quiproquo – Potter se redressa en panique en pensant que Drago s'enfuyait encore – il se recoucha sur le côté pour l'observer.

On ne voyait pas grand-chose de son visage caché dans les oreillers et dissimulé par les cheveux emmêlés : Une oreille, le début de la mâchoire, un coin de sourcil… Et pourtant, ce bref aperçu suffit à Drago pour découvrir quelque chose de nouveau. Il tendit la main pour s'en assurer, toucha la petite portion de peau entre l'oreille et le menton, et sentit, sous ses doigts, les minuscules picots rêches d'une barbe non rasée.

Potter tourna légèrement la tête afin de pouvoir ouvrir un œil et le regarder.

« Quand je suis devenu épis-pousseur, ma barbe a arrêté de pousser, expliqua Drago, sentant qu'on attendait une explication de sa part.

– Ah. Je m'étais posé la question. T'as la peau tellement lisse… » Potter dégagea finalement son bras pour lui caresser la joue à son tour. « Bon, sauf ici… » ajouta-t-il finalement quand ses doigts rencontrèrent les dents externes qui déformaient le visage de Drago.

Ce dernier fronça les sourcils un moment. Il n'appréciait pas que Potter lui rappelle sa laideur. D'un autre côté, il n'aurait pas aimé non plus l'hypocrisie qui aurait consisté à prétendre que son visage était parfaitement doux et lisse…

« Et le reste de ton corps ? demanda Potter.

– Quoi, le reste de mon corps ?

– Je sais pas : Ton torse, tes jambes… T'es vraiment pas très poilu.

– Je suis juste blond, Potter. Le reste de mon corps a une pilosité parfaitement normale pour quelqu'un de ma carnation, expliqua Drago, légèrement vexé.

– T'as de la chance. Parfois, je me donne l'impression d'être un gorille », ricana Potter.

Ils restèrent un moment à bavarder au lit jusqu'à ce que la montre moldue sonne et que Potter ne se lève en grommelant. Il partit se doucher en premier tandis que Drago faisait le lit et dressait la table, puis il l'aida de nouveau à protéger sa main dans un plastique et à se déshabiller avant de le laisser se laver seul pendant qu'il se rasait.

Quand ils s'installèrent prendre leur petit déjeuner, Drago l'interrogea :

« Tu as déjà essayé de laisser vraiment pousser ?

– Ma barbe ? Oui, on avait fait un pari un mois sans rasage au Ministère, se rappela Potter en souriant joyeusement. Je dois avoir la photo là-dedans, ajouta-t-il en désignant les deux albums exposés dans la bibliothèque.

– Et alors ? demanda Drago en souriant.

– Et alors, ça ne me va pas du tout. Ça me vieillit de 10 ans.

– Ce n'est pas si mal de paraître un peu plus vieux… Surtout si tu veux que les gens arrêtent de te considérer comme le brave petit Survivant.

– Je sais pas… Je pense que ça me fait juste bizarre de paraître plus vieux que mon père sur les photos. »

Drago se mordit la langue. Il n'avait pas prévu que cette discussion puisse rappeler de mauvais souvenirs à son interlocuteur. Lui-même eut une pensée pour son père, et sut qu'à nouveau, il ne finirait pas son bol de porridge ce matin-là…

Il demanda tout de même, à voix douce :

« Quel âge exactement avaient tes parents quand ils ont été tués ?

– 21 ans. »

Potter n'avait donc que quelques mois de moins que l'âge auquel ses parents avaient perdu la vie. Pas besoin de consulter un guérisseur pour comprendre d'où pouvaient venir ses pulsions suicidaires : Il était évident que le petit garçon orphelin avait peur de perdre ses parents une seconde fois…

Potter lui sourit doucement, comme pour le rassurer sur le fait que la discussion ne le mettait pas mal à l'aise, et qu'il pouvait continuer à l'interroger… Peut-être même pour l'encourager à continuer. Difficile à dire.

« Je suppose… hésita Drago. J'imagine que ça doit être compliqué pour toi de te dire que… Qu'à notre âge, ils avaient déjà accompli l'acte le plus important de leur vie en te mettant au monde… »

Potter cligna plusieurs fois des yeux. Il répondit d'un air légèrement troublé :

« Je pense que le plus compliqué, c'est de me dire que s'ils n'avaient pas accompli cet acte-là, ils seraient encore en vie. »

La culpabilité. C'était évident. Ce n'était pas à Drago de le rassurer sur un tel sujet, mais rester silencieux aurait été criminel.

« Ou pas. Ils faisaient tout de même parti de l'Ordre. Ils avaient tout de même choisi un camp. Ils se seraient tout de même battus. Les si n'avancent à rien. Ce qui est certain, c'est que même en sachant tout ce qu'ils avaient à perdre, ils ont choisi de te donner naissance. Tu ne penses pas qu'à leur place, tu aurais fait la même chose ? »

Potter resta silencieux un moment, puis poussa un soufflement nasal amusé.

« Pour quelqu'un qui critique autant la méthode moldue, annonça-t-il avec un sourire moqueur, tu ferais un bon psy.

– Et bien j'imagine qu'à force de vivre sans baguette magique, j'ai dû m'adapter. »

Potter but son café en silence, et Drago crut que la discussion se terminerait là, mais ce ne fut pas le cas.

« Quand je vois les gens de mon âge, reprit Potter sans le regarder, j'ai l'impression d'être un gamin. Ils sont tous casés, font un boulot qui leur plait, ils ont réussi à oublier tout ce par quoi on est passé… Ils vont de l'avant. Je me dis qu'à mon âge, mes parents aussi savaient ce qu'ils faisaient, ce qu'ils voulaient, ils savaient pourquoi ils se battaient… Je suis le seul à être aussi perdu. »

La voix de Potter s'était-elle brisée un instant ? Drago n'en était pas sûr.

« Tu n'es pas le seul.

– Hm.

– Tu n'es pas le seul. »

Les yeux verts étaient-ils plus brillants qu'ils ne l'étaient habituellement ? Difficile à dire avec les lunettes, les cheveux en bataille, et le regard fuyant vers la bibliothèque et les albums photos.

Drago se leva, repoussa le bras de Potter qui menait à nouveau son mug de café à ses lèvres, s'assit sur ses genoux et l'enlaça. Il n'avait jamais adopté cette posture. Il n'avait jamais essayé de rassurer ainsi qui que ce soit, mais il n'eut pas besoin de réfléchir à ses gestes ou à la façon dont il fallait positionner ses bras, ou s'il était opportun de lui caresser doucement les cheveux, si c'était une bonne idée de lui embrasser doucement le front, si c'était à lui de murmurer encore « Tu n'es pas le seul » : Il fit tout cela naturellement, sans se poser de question. Il voulait simplement être là pour Potter, qui l'avait déjà enlacé de nombreuses fois et à qui il n'avait jamais rendu la pareille.

Ils restèrent longtemps dans cette position. Drago n'était pas certain que Potter en ait réellement besoin, mais de toute évidence, ça lui faisait du bien.

Au bout d'un moment, Potter inspira profondément, puis annonça tranquillement :

« Si tu restes assis sur mes cuisses comme ça, Malfoy, il ne faudra pas t'étonner si je bande à nouveau »

Drago afficha un rictus par-dessus le crâne qu'il câlinait doucement. Potter cherchait à se donner une contenance en plaisantant…

Mais ils pouvaient être deux à jouer à ce jeu-là.

Drago répéta une nouvelle fois « Tu n'es pas le seul », et aussitôt, Potter s'agita sous l'effet d'un fou-rire. Drago ricana sans le lâcher, et bien que les vibrations provoquées pour les soubresauts de Potter soient une torture pour ses fesses encore douloureuses.

Drago n'était pas le seul à avoir besoin de Potter et à craindre son départ. Lui-même l'avait dit. Il avait pleuré à l'infirmerie pour le retenir. Il avait été le premier à réclamer sa présence, le premier à insister pour prolonger le temps qu'ils passaient ensemble.

Potter était aussi brisé que lui.

Avant de le laisser se lever et partir, Drago lui maintint le visage des deux mains et l'embrassa doucement. Sa mâchoire l'empêchait toujours de profiter d'un vrai baiser, mais le simple fait de sentir les lèvres de Potter contre les siennes semblait un baume apaisant.

Drago y repensait en laissant son regard vaguement errer sur les oiseaux du balcon. Il se sentait plus perdu que jamais. Il aurait aimé pouvoir aider Potter. Ce dernier avait besoin de lui, mais que faire ? Il n'était pas assez résistant pour porter leurs souffrances à tous les deux…

Et puis, une petite voix égoïste dans sa tête lui faisait remarquer que cela arrangerait ses affaires si Potter n'allait jamais mieux et continuait de souhaiter sa présence à jamais.

Drago voulait plus que tout faire taire cette voix, mais le simple fait de trop y penser le faisait culpabiliser : pendant qu'il s'apitoyait sur son sort, il ne s'occupait pas de celui de Potter.

Un crissement le fit baisser les yeux, et il s'aperçut, affligé, que pour la troisième fois de la journée, la plume à Papote avait soigneusement effectué son travail et retranscrit parfaitement ce qu'il avait en tête :

« … aussi trouverez-vous, joints à ce courrier, un plan de financement qui que fait Potter à cette heure ? Potter, un plan de financement, Harry Potter, bientôt Harry Potter financé par Harry Potter, ce n'est pas vraiment un vert habituel, certainement pas un vert menthe, plutôt un vert émeraude ? Harry Potter, longues mains, jolis ongles, il m'a demandé de le tuer. Deux fois. Attendre. Ne pas y penser. Pour voyager à travers ses yeux. Quatre ou cinq fois. Il a besoin de moi autant que j'ai besoin de lui autant qu'il a besoin de moi, que j'ai besoin de lui, besoin de moi, de lui… Qu'est-ce que… Et merde, stupide plume, c'est la troisième fois que »

« Stop », ordonna Drago. La plume se coucha immédiatement, et Drago leva le visage vers le plafond, profondément agacé par son manque de concentration. Non seulement il perdait du temps, mais le texte noir sur blanc prouvait à quel point ses pensées étaient superficielles et décousues.

Pour la troisième fois de la journée, il chiffonna le parchemin avec aigreur et alla le faire disparaître dans les flammes de la cheminée.

Ce soir-là, après leur repas, Potter ne proposa pas à Drago de passer la nuit sur place ou de retourner à sa cellule. Il acheva de changer le bandage de sa main, puis resta silencieux et immobile, l'observant de ses yeux verts et attentifs.

Drago ne savait pas non plus quoi dire. De sa main gauche – celle qui avait subi le plus d'outrages au fil des années, celle dont l'auriculaire flexible lui avait servi de défouloir – il triturait la main droite, difforme, et rendue plus difforme encore par l'épais bandage et par la gelée verte qui laissait encore apercevoir des bulles gluantes et répugnantes… Le bandage enveloppant rendait l'opération difficile.

Au bout d'un moment, quand le silence devint insoutenable, Drago marmonna, gêné, peu sûr de lui et sans oser regarder son interlocuteur :

« J'imagine que tu attends que j'aborde le sujet de moi-même… »

Potter ricana : « De quel sujet parle-t-on, Malfoy ?

– Tu sais que je peux simplement retourner à ma cellule sans même te souhaiter une bonne nuit. Il me reste encore une once de fierté.

– Une once ? Y-aurait-il eu une réforme des mesures de poids à propos de laquelle on ne m'a pas mis au courant ?

– Tu ne me facilites pas la tâche, Potter », grinça Drago en lui accordant tout de même un mince sourire agacé.

Le Directeur ne répondit pas, souriant, lui, de toutes ses dents parfaites et blanches, tellement régulières qu'elles avaient probablement servi de modèle pour réaliser les statues de Michel-Ange.

« J'aimerais donner une nouvelle chance au fait de lire dans un lit, prétendit Drago.

– Et bien tu as un lit et une lampe dans ta cellule. Veux-tu que je te prête un bouquin ? » le taquina Potter en retour.

Drago fit mine de se vexer et prit la direction de la porte avant que Potter n'éclate de rire, ne le rattrape et le supplie enfin, comme il se devait, de rester dormir sur place.

L'expérience fut plus simple et un peu plus intéressante que lors de leur premier essai, bien que tourner les pages avec une seule main s'avéra être une nouvelle épreuve : Drago avait à ses côtés un Sorcier élevé parmi les moldus, et pouvait l'interroger à chaque mot inconnu. L'ADN et les analyses génétiques le passionnèrent, mais Potter lui proposa rapidement de commander un nouveau livre moldu sur le sujet, ses connaissances en la matière n'étant clairement pas assez poussées pour répondre à toutes les questions du Sang-Pur.

Quand ils fermèrent leurs livres et éteignirent leurs lampes de chevet, Potter l'interrogea :

« Alors, ton jugement sur la lecture dans un lit ?

– Je pense que je vais avoir besoin d'un troisième test pour être sûr de moi, annonça Drago en s'enfonçant dans son oreiller et en fermant les yeux.

– Et bien, on pourrait se prévoir ça après-demain. »

Drago mit quelques secondes à froncer les sourcils, puis à tourner la tête pour le regarder.

« Pourquoi après-demain ?

– J'ai quelque chose de prévu demain soir », prétendit Potter.

Drago ne supporterait pas de devoir s'abaisser à rejouer la scène de la soirée une seconde fois.

« Très bien, prétendit-il en tournant le dos à Potter.

– Tu ne me demandes pas quoi ? »

Il sentit un bras se glisser sous son oreiller et un corps chaud se lover contre son dos.

« Non, ça ne m'intéresse pas.

– Je comptais passer la soirée à improviser des poèmes sur la beauté de tes yeux. »

Drago sourit dans le noir. « Très bien, répéta-t-il. J'imagine que tu auras besoin d'une muse pour cela ?

– Oui, s'il te plait.

– J'essayerai de me libérer alors. »

Le corps de Potter était lourd et toujours aussi brûlant. Drago ferma les yeux. Après réflexion, la sensation était douce et réconfortante.


En me relisant, j'ai bien conscience qu'il ne se passe pas grand-chose dans ce chapitre... C'est beaucoup de trucs installés pour la suite ou du chitchat mignon pour dire que leur relation se stabilise... C'est un peu le soucis que j'ai quand j'écris de façon chronologique sans préparer un plan béton à l'avance... Typiquement, ce chapitre aurait pu / du être fusionné avec le suivant pour avoir quelque chose d'utile