Un long chap, aujourd'hui : c'est le retour du Harry pov !

Guest : Parfois, en me relisant, je trouve peu d'intérêt aux chapitres tranquilles X,D Mais bon, c'est nécessaire pour dire qu'il n'y a pas QUE du drama !

cattleyahana : Si tu arrives jusqu'ici dans ta lecture, alors clapclapclap et bravo pour ton endurance ! Je te réponds en mp dès que j'ai un moment !

WinnieBolton : That's so sweet ! I guess the google translation is not always perfect (moldu = muggle XP) but i am happy you enjoyed the story despite it ! Thanks a lot for your review ! I hope you will also like the suite !


Ron secoua la tête à l'unisson du Jack Russel spectral à ses côtés, éclaboussant allégrement Harry qui venait juste de se sécher d'un Sicco désormais routinier. Les cheveux roux, assombris par l'eau glacée, se plaquèrent sans élégance sur son visage constellé de taches de rousseur, cachant un œil, tandis qu'un grand sourire bravache illuminait ses traits.

« C'était sympa, prétendit-il. Tu connais vraiment les meilleurs coins pour faire de la plongée. De belles algues, de superbes rochers… Jolies baudroies, toujours ! Mais je me demande si ça ne nous ferait pas du bien d'aller explorer des eaux un peu plus turquoise, la prochaine fois, juste pour changer ?

– Plonger dans des eaux chaudes ?! s'offusqua Harry. Tu n'y penses pas sérieusement ?! Après tout ce qu'on a vécu ensemble, toi et moi… »

Ron éclata de rire sous le regard désabusé de Savage, avant de se lancer son propre Sicco, rendant à sa crinière rousse son épaisseur et son éclat coutumiers.

Harry avait sauvé Ron dans le lac profond de Poudlard, puis Ron lui avait rendu la pareille en venant le secourir dans la mare gelée où ils avaient récupéré l'épée de Gryffondor, et ils étaient restés sur ce match nul confortable. Ici, la mer était à la fois plus profonde et plus glaciale, et à chacune de leurs expéditions communes, ils se vannaient mutuellement en prétendant être celui qui ouvrirait à nouveau le score.

Les plaisanteries étaient la seule alternative à la dépression. Cela faisait une semaine, presque jour pour jour, que le Détraqueur était introuvable. Ça aurait pu passer pour une bonne nouvelle, si chacune de ses périodes de calme n'avait pas été suivie d'une attaque plus brutale et surprenante que la précédente.

« Qu'est-ce qu'on fait, demanda finalement Savage ? On rentre ? Ou bien il y a un autre endroit que tu voudrais vérifier ? »

Harry hésita, tapotant nerveusement le manche de son balai. Ils avaient exploré de fond en comble les trois plus profondes crevasses océaniques de la zone, ils avaient vérifié le dangereux labyrinthe d'icebergs au Nord, ils étaient passés et repassés mille fois dans la zone où il l'avait affronté pour la première fois, ils s'étaient également attardés à chaque endroit où les fonds marins désolants présentaient un quelconque point d'intérêt : Les différentes épaves, la tanière des Krakens, la vaste zone des petits cratères volcaniques… Si le Détraqueur stationnait quelque part, alors c'était de nouveau dans un endroit morne et indissociable du reste des abysses…

Seul Drago avait peut-être une idée de sa localisation précise.

Comme la première fois.

Mais hors de question de l'interroger à ce sujet ! Par Merlin, jamais. Vissarion continuait d'insister régulièrement, mais Harry refusait toujours obstinément que celui-ci soit exploité comme lui-même l'avait été… Il avait tout juste fini par accepter qu'il participe au débat concernant un éventuel ravitaillement par le ferry.

Vissarion n'avait pas été invité. Lui et sa délégation ne souffraient d'aucun problème d'approvisionnement, et Harry commençait à soupçonner que le fabuleux bureau particulier du Grand Elu, qu'il avait d'abord pris pour une reproduction parfaite de celui qu'il avait visité à Rome, était en réalité un Portail de Déplacement Magique donnant véritablement vers l'Italie. Une autre infraction au Code Magique International, d'après Mullan qu'il avait interrogée… Harry s'était gardé l'information dans un coin du crâne, au cas où elle puisse servir.

Vissarion n'avait pas été invité, mais il était tout de même venu. Il était resté debout, à deux pas de Drago, et avait étudié chacun de ses gestes et chacune de ses paroles, comme s'il espérait que le détenu lâche par inadvertance une remarque du genre : « Oh, le ferry ne court pas le moindre risque s'il emprunte sa route habituelle : Le Détraqueur se trouve exactement à 200m au Nord de l'épave du Galion Espagnol, et comme nous le savons tous, il ne détecte ses proies qu'à un demi kilomètre de distance. D'ailleurs, il en a encore pour quatre jours de repos ! Il attaquera mercredi prochain. Vers midi, je pense ? Il a prévu de débarquer précisément entre ces deux gros rochers. »

Drago avait dressé un bilan complet et assommant de leurs réserves, avait montré le résultat de ses calculs selon différents scénarios de restrictions plus ou moins drastiques, puis s'était tu tout le reste de la réunion, refusant même de participer au vote final, soulageant au final Harry, qui avait choisi d'interpréter ce non-choix comme un aveu d'ignorance complète concernant le comportement actuel ou à venir du Détraqueur.

« Harry ? »

Il leva la tête. Il s'était encore perdu dans ses pensées. Ron supportait stoïquement et avec entrain tout ce qu'il lui infligeait. Savage assumait un peu plus sa fatigue et son pessimisme. D'ailleurs, son petit Patronus d'étourneau s'était perché sur son balai et fermait les yeux.

« Rentrons, suggéra Harry. Demain, on se concentrera uniquement la route sur le trajet du ferry, et on vérifiera les boucliers temporaires. »

Une géniale idée de Hermione, légèrement améliorée par Kenaran : Huit petites bulles de protections dressées au milieu des flots, possédant chacune un petit ponton flottant en leur centre, afin d'offrir des abris de fortune s'il venait à attaquer… Elles avaient déjà sauvé quelques vies.

Avant de faire virer son balai en direction de l'île, Harry jeta un œil au large dôme extérieur : Il était invisible, mais on le devinait facilement : Ils étaient des centaines à se tenir immobiles juste à sa lisière, et à attendre patiemment une ouverture pour rejoindre leur « roi ». De l'île, ils étaient invisibles, trop lointains pour qu'on distingue autre chose que des points de la taille d'un moucheron… Mais ici, aussi près de la frontière, on les voyait bien.

Harry frissonna : Malgré toutes ces années, tous ces combats, les Épouvantards continuaient de prendre des formes de Détraqueur devant lui. Il haïssait ces choses encore plus qu'il n'avait haï Voldemort. Ces choses qui semblaient le poursuivre et ne jamais vouloir le laisser en paix.

Ils débarquèrent sur la plage dans une relative indifférence, si ce n'est Hermione qui leur sauta immédiatement au cou.

Le regard de Harry se dirigea aussitôt vers le kiosque gris sous lequel Drago s'abritait la plupart du temps en compagnie de tous ceux qui venaient s'entretenir avec lui, et il fut aussitôt soulagé de le voir, sa peau blanche, ses cheveux d'or pale et sa robe claire semblant illuminer les lieux.

Comme souvent, un petit attroupement s'était formé autour de lui : Parfois des Surveillants, le plus souvent les Surveillantes qu'il attirait comme des mouches, ou bien certains de ses combattants qui venaient profiter d'une tasse de thé ou s'amuser de son attitude coincée ou de ses dernières trouvailles rocambolesques, du genre os de bite et spectacles d'albatros.

Aujourd'hui, c'était les quatre gamins du Maléfistinat qui s'était assis et suivaient avec attention une histoire de jeunesse racontée avec de grands gestes et d'une voix stridente par Madame Johnson – Harry pouvait l'entendre d'ici – puis probablement traduite phrase par phrase en Français par le détenu, à en croire les mouvements de tête réguliers des gamins, de l'un vers l'autre.

Plus le temps passait, et plus son pouvoir de séduction semblait s'étendre.

Même la Selkie, désormais, s'était entichée de lui. Harry n'avait même encore jamais vu le visage humain qu'elle était capable de revêtir, mais elle se montrait à Drago, lui offrait des cadeaux, et ils se maquillaient l'un l'autre comme des copines organisant des soirées pyjama. La peau de Drago était passé de douce mais sèche à incroyablement veloutée. Les dents qui avaient repoussé sur sa pommette formaient désormais un motif presque régulier d'écailles de tortue. Ça n'avait plus rien de laid, même si Harry espérait que celles-ci tombent plus rapidement que les précédentes.

Par ailleurs, son pouvoir d'attraction n'avait pas grand-chose à voir avec un charme purement esthétique :

Monsieur Temrah avait été le premier à réclamer sa présence. Juste parce que Drago était capable de compter les minutes d'infusion quand il préparait un foutu thé. Harry s'en était amusé, puis avait rapidement apprécié d'avoir cette excuse pour pouvoir le garder l'œil : « Est-ce que tu pourrais t'occuper du vieux ? Il faut simplement s'arranger pour qu'il soit toujours disponible pas trop loin. »

Fleur, ensuite. Pas si étrangement que ça, puisqu'il était toujours beaucoup plus accessible avec les femmes qu'avec les hommes, dont il continuait de se méfier. Il s'était mis Fleur dans la poche en lui parlant dans sa langue maternelle et en jouant avec elle à la nounou avec les gosses.

Donc bien sûr, les enfants aussi étaient rapidement tombés sous son charme. Et puis Bill, qui avait été heureux que sa femme ait « un ami » sur l'île quand il devait retourner à Gringotts. Et puis Madame Johnson avait débarqué et l'avait immédiatement adopté. Ensuite, plus étonnamment, Ginny et Hermione avaient été émues par le dévouement malsain qu'il avait manifesté envers Carrow, quand il leur avait demandé de le surveiller, durant la seconde émeute des prisonniers…

Harry fronça légèrement les sourcils à cette pensée : Oui, Carrow était là également, assis sur le même genre de petite chaise pliante que Drago s'était choisie.

Amycus Carrow… Harry le détestait déjà par principe avant de débarquer à Azkaban, pour les simples raisons qu'il était un Mangemort et un bourreau d'enfants. Cependant, depuis que Carrow avait presque tué son codétenu, Harry était forcé de le supporter. Pire, il était forcé de supporter sa présence aux côtés de Drago. Au début, l'idée ne lui avait pas déplu : Cette espèce de mort-vivant, s'il pouvait obéir aveuglément à Drago, serait capable de le protéger des autres détenus, et même peut-être de gardiens si le besoin s'en faisait sentir, puisqu'à l'instar de Monsieur Temrah ou de Hagrid, certains sorts rebondissaient sur lui sans effet. Sauf que rapidement, Carrow avait pris de plus en plus de place dans la vie de Drago, partageant son logement, ainsi que chaque repas où le détenu le nourrissait patiemment et avec une douceur qui rendait Harry affreusement jaloux, et enfin – Harry l'avait découvert tout récemment et avait un mal fou à se faire à l'idée – l'accompagnant jusque dans les salles de bain où il pouvait arriver à Drago de se mettre nu devant lui.

Harry n'avait désormais plus qu'une hâte : Envoyer Amycus Carrow à Sainte Mangouste, laisser les Médicomages spécialisés s'occuper de lui, et s'il fallait que celui-ci succombe, fêter secrètement l'évènement avec une bonne Biéraubeurre !

« Monsieur Potter. Je devine à votre expression que cette expédition n'a pas obtenu les résultats escomptés ? »

Harry considéra le Grand Élu Européen qui était venu à sa rencontre et l'observait de haut, avec son sempiternel air paternaliste, et vérifia que sa magie était bien rassemblée sous la peau de sa gorge avant de lui répondre :

« En effet ! Toujours introuvable ! Une mauvaise nouvelle pour vous, mais excellente pour l'estomac de mes employés et de mes prisonniers, je le crains !

– Je ne suis pas cynique à ce point, Monsieur Potter. J'admets volontiers que cette accalmie est bienvenue. Je ne nierai en revanche pas le fait que j'espère qu'elle ne durera pas trop longtemps : J'ai bien peur que vos amis et employés se lassent de cette monotonie et que nos troupes s'amenuisent. J'ai d'ailleurs pris la liberté d'appeler à mon service trois nouveaux soldats et deux excellents Dottore dans le cas où cela s'avérait nécessaire. J'aurais plaisir à vous les présenter. »

C'était la quatrième fois que Vissarion l'informait de l'arrivée de nouveaux renforts dans son carrosse. Au début, Harry n'y avait pas trop prêté attention, mais désormais, il comptait : À leur arrivée, ils étaient vingt-et-un Sorciers adultes, auxquels il fallait ajouter la dizaine d'elfes et de gobelins qu'on ne voyait jamais. Désormais, leur nombre dépassait certainement la quarantaine. Autrement dit, dépassait de loin le nombre de ses Surveillants.

« Et bien de mon côté, j'espère qu'elle durera. Je ne doute pas que vos hommes seront tout aussi heureux que les miens à retrouver leur foyer et leurs proches.

– Oh, je ne doute pas, en effet, que nous ne puissions rapidement rentrer chez nous. J'ai d'ailleurs contacté votre Ministre de la Magie à ce sujet. »

Harry plissa les yeux et jaugea Vissarion avec circonspection, en sentant sa magie pulser doucement au niveau de sa pomme d'Adam.

Ils ne se mentaient jamais entre eux. C'était un engagement qu'ils avaient pris dès le départ : La ressemblance entre le Professore Kenaran et le Professeur Dumbledore était trop frappante pour qu'il ne se méfie pas immédiatement. Il avait aussitôt prévenu le Grand Élu qu'il ne supporterait pas le moindre mensonge ni la moindre omission de sa part. Shacklebolt, McGonagall, la mère de Fleur, tous lui avaient tous confirmé que l'homme était doté d'une curiosité scientifique insatiable, et que le cas de ce bambin ayant survécu au Sortilège de Mort l'obsédait. Harry avait accepté de laisser un total accès à chacun de ses souvenirs, à chacune de ses pensées au Maléfistinien, à la seule condition qu'il n'y aurait jamais de mystère entre eux.

Vissarion avait aussitôt levé la main droite et prononcé un serment inviolable.

Après quoi, Harry avait passé six mois entre ses mains, à supporter toutes ses expériences fatigantes et ses exercices répétitifs. Tout ça pour lui confirmer, à la fin, ce qu'il savait déjà : Non, il ne restait en lui aucune trace de l'Horcruxe de Voldemort. Non, aucun maléfice ni aucune malédiction n'expliquaient ses crises de rage et de violence. Seul son mauvais caractère était à blâmer. Couplé à son pouvoir débordant, ce manque de maîtrise était toutefois dangereux. Vissarion lui avait appris à canaliser ses débordements, et pour cela, il lui en serait éternellement reconnaissant…

Éternellement, mais pas pour autant incommensurablement.

Si Vissarion prétendait qu'il pensait quitter rapidement Azkaban, c'est qu'il préparait quelque chose.

« Que dois-je comprendre ?

– Rien de plus que ce que vous comprenez déjà », louvoya Vissarion en levant la tête et en laissant son regard errer sur les personnes présentes. Comme par hasard, les yeux gris sombre s'arrêtèrent sur la zone de la tonnelle Britannique. « J'aurais du remord à vous abandonner à votre sort, mais aucun regret. Cela fait bien longtemps que je vous ai fait part de mon intérêt pour votre… protégé. »

Harry retint la Magie, mais il ne parvint pas à garder la rage à l'abri de ses entrailles : Une envie de frapper l'homme, de l'insulter, de le menacer…

Son protégé… C'était Harry qui avait utilisé le premier ce terme, dès l'arrivée de la délégation Européenne sur l'île. Vissarion avait bien évidemment préféré nommer Drago « le prisonnier » ou « l'individu » pendant des semaines… Jusqu'à ce que Harry ne le frappe au visage à la vue de tous après avoir littéralement pété un plomb. Alors Vissarion avait commencé à prononcer le mot avec une ironie mordante.

Il se haïssait tellement en y repensant… Il avait eu si peur de le perdre… Il l'avait senti venir, pourtant : Il s'était vu perdre progressivement ses moyens, il avait eu conscience de le brusquer, et même de le brutaliser… Il était venu exiger sa présence à chaque fois qu'il en avait eu besoin pour lui tirer les cheveux, lui griffer les hanches, enfoncer ses dents dans son cou… Drago n'avait pas réagi, sinon en lui accordant mille baisers enfiévrés, et Harry s'était une nouvelle fois convaincu de ce qui l'arrangeait à ce moment-là, à savoir que leur relation était un peu plus passionnée que la moyenne, et qu'il n'y avait pas à s'en faire si tous deux parvenaient à y trouver leur compte.

Merlin soit loué, il avait eu la bêtise de lui donner cette gifle devant un parterre suffisamment choqué pour qu'il en subisse les conséquences et qu'il ne puisse pas s'en tirer à si bon compte, cette fois-là : Tout le monde ou presque avait été épouvanté par son geste et son attitude, avait osé le lui faire savoir, et il s'était donc immédiatement rendu compte de son comportement.

Heureusement, parce que, s'il fallait en croire Drago, ce dernier était encore suffisamment traumatisé par tous les mauvais traitements qu'il avait subis jusque-là pour ne pas se trouver blessé de cette énième forme de violence.

Il l'avait pardonné bien trop facilement.

Harry avait pris conscience qu'il ne pouvait pas se reposer sur lui pour le lui indiquer, quand il allait trop loin. C'était à lui de réfléchir et de se maîtriser. Ça aurait de toute façon été injuste de faire peser sur Drago la responsabilité de ses dérapages à lui.

Harry respira profondément, rappelant à lui les conseils de Madame Kathleen pour garder son calme.

« Laissez Drago Malfoy en dehors de tout ça, dit-il finalement à Vissarion. Il n'a rien à voir avec le comportement du Détraqueur. Nous en avons déjà discuté.

– À de nombreuses occasions, oui. Et nous avons toujours fini par nous mettre d'accord sur notre désaccord à ce sujet. Je finirai par mettre la main sur Drago Malfoy. Avec ou sans votre consentement », finit-il par avouer franchement en baissant les yeux vers lui.

Harry sentit pulser le lien du serment inviolable. Cet aveu-là n'avait pas été prémédité. Pourtant, le vieillard lui sourit tranquillement, assumant sans vergogne sa menace. Harry ne tenta pas de cacher la colère qui l'habitait : C'était de toute façon inutile avec Vissarion, qui avait tant et tant fouillé chaque recoin de son crâne qu'il le connaissait par cœur.

« Regrettez-vous parfois d'avoir prononcé ce serment ? demanda Harry.

– Jamais, assura Vissarion en gloussant. Je trouve qu'il rend nos échanges beaucoup plus stimulants. Vous ne le pensez pas ? »

Harry jura, et s'éloigna.

Lui le regrettait. Lui s'en voulait quand il profitait de cette lointaine période de confiance pour soutirer la vérité à un homme qui n'avait plus d'autre choix que de la lui donner. Vissarion Kenaran était cependant loin d'être un imbécile, et il tirait admirablement son épingle du jeu : Il jouait avec les mots pour ne rien cacher, mais ne dire les choses qu'à moitié, ou cacher les informations essentielles sous un flot d'inepties…

Quand, à bout de nerfs, Harry avait exigé de lui qu'il lui dise tout ce qu'il avait trouvé d'intéressant sur Drago, alors il s'était lancé dans un discours interminable sur la ligné de Narcissa Malfoy née Black, sur le nombre impressionnant de Legitimens naturels que comptait cette famille surtout si l'on suivait la branche maternelle, sur leur puissance… Les noms de jeune fille s'étaient enchaînés et mélangés sous le crâne de Harry, qui avait rapidement abandonné l'espoir de comprendre où le Professore avait voulu en venir : Le Maléfistinien avait sincèrement jugé ce déballage généalogique fascinant, et le serment ne le forçait pas à être moins prolixe.

Il n'était plus qu'à quelques mètres de la tonnelle quand Drago remarqua son arrivée. Comme toujours, ses yeux vifs le parcoururent de haut en bas, puis de bas en haut, à la recherche d'une blessure ou d'un vêtement abimé. Comme toujours, Harry avait pris garde de ne rien laisser paraître de ses plongeons dans les profondeurs, de ses brefs combats avec les Krakens, requins, et autres créatures qui inquiétaient l'impressionnable petit blondinet, ou des accidents plus stupides impliquant icebergs, rochers instables et courants sous-marins.

Drago sembla satisfait de son inspection, puisqu'il lui adressa l'un de ses minces sourires qui se devinaient bien plus dans les yeux que sur ses lèvres.

Madame Johnson poursuivait son récit :

« C'est alors que les Braconniers ont attaqué ! Ils étaient deux fois plus nombreux que nous, mais nous, nous étions mieux organisés, et à l'instant même où le premier d'entre eux a bougé… Nous avons vu la cage ! »

Les quatre têtes des gamins, tous bouche bée, se tournèrent à l'unisson vers Drago, attendant une traduction, puis suivirent son regard vers Harry, qui leur adressa un sourire et un hochement de tête gêné, sachant déjà pertinemment comment ils réagiraient ensuite : Sans surprise, les bouches se fermèrent, et des regards inquiets furent échangés. Harry avait frappé leur adulte préféré et avait envoyé l'un des leurs dans le coma pour deux jours. Ils se méfiaient bien sûr de lui.

« Désolé, s'exclama-t-il quand même Madame Johnson lui accorda son attention, je ne voulais pas vous interrompre !

– Voyons, Monsieur Potter, vous ne nous dérangez jamais ! Avez-vous de nouveau besoin de mon aide pour donner un cours de Patronus à vos Surveillants ? s'extasia la vieille.

– Si ça ne vous dérange pas, oui ! prétendit Harry sans se démonter. Malfoy vous y emmènera à l'horaire habituel, si celui-ci vous convient ! Malheureusement, je vais devoir vous l'emprunter quelques minutes, si vous pensez pouvoir vous passer de lui !

– Naturellement, naturellement ! répliqua-t-elle tandis que Drago se levait poliment. Où se trouve la jeune petite Weasley ? C'est elle qui surveille ce brave Carrow en l'absence de notre petit Malfoy. MADEMOISELLE WEASLEY ?! »

Harry s'éloigna, sourire aux lèvres, et se sachant suivi.

Il se dirigea, sans trop y penser, vers le cagibi rempli d'outils de bricolage et d'établis dans lequel ils s'étaient déjà isolés, et où Harry avait pu lui dévorer la poitrine, jusqu'à le faire haleter de plaisir. À ce souvenir, il sentit sa queue durcir.

Ce n'était toutefois pas le moment. Pas alors que Vissarion venait de le mettre sur les nerfs. Cela faisait déjà trois fois qu'il avait manqué de tendresse. Deux fois, il avait même échoué à le faire jouir. Drago ne s'en était clairement pas plaint, mais avec lui, ça ne voulait pas dire grand-chose. Harry ne pouvait s'empêcher de se demander si le fier Sang-Pur n'était pas du genre à apprécier le sexe rude : Les fessées, les griffures, les étranglements… Harry sentit sa bouche se dessécher en l'imaginant aveuglé par un masque, immobilisé par un foulard noué autour des poignets… Mais c'était un sujet délicat à aborder avec lui, et une discussion qui nécessitait d'attendre d'être qu'il soit un peu plus maître de lui-même.

Ce fut ce moment que Drago choisit pour parler enfin :

« Qu'est-ce que tu as prévu, cette fois ? S'il s'agit de nourrir ton fétichisme des pieds, sache que je suis plutôt chatouilleux. C'est réellement peine perdue. »

Harry tourna lentement la tête vers l'homme adossé nonchalamment à la porte, les bras croisés, les paupières lourdes et arrogantes, la voix traînante… Ce putain d'appel à la luxure… Capable de proférer les pires insanités un moment, puis qui se ratatinait entre ses bras dès que les choses sérieuses commençaient…

« Fétichisme des pieds ? répéta Harry surpris mais intéressé.

– Ce n'est pas le cas ? s'interrogea Drago en levant un sourcil dédaigneux.

– Jusqu'ici, non, mais ça vient de changer », répondit Harry en se sentant parfaitement honnête. Comme il l'avait pressenti, il vit le visage en face de lui se troubler presque imperceptiblement, rosir, les lèvres s'entrouvrir, les yeux s'écarquiller légèrement, les sourcils se froncer… Impossible de se retenir complètement de le tourmenter : Il y avait quelque chose de si adorable dans sa façon de s'inquiéter… « Est-ce qu'on parle de tes pieds ou des miens ? Bah, peu importe ! Ça y est : J'ai des idées pour les quatre. Mais non, ce n'est pas ce que j'avais prévu pour aujourd'hui. Sors ta baguette ! »

Le visage de Drago resta figé quelques secondes, puis, récompense ultime, il partit dans l'un de ses rares et étonnants fous-rires. De moins en moins rares, mais jamais moins étonnants. Ces joues qui se coloraient, ces yeux qui s'illuminaient, ce visage maîtrisé qui d'un coup révélait celui d'une toute autre personne, joyeuse et simple… Harry doutait de s'en lasser un jour.

« Je n'y crois pas, Potter ! Est-ce que tu es réellement vexé que j'aie été dans le hangar avec les autres plutôt que de te demander des cours particuliers ?!

– Un peu. Mais c'est surtout que je veux tester une nouvelle technique d'enseignement avec toi. Baguette. »

Harry ne releva pas l'utilisation de son patronyme. S'il avait bien appris une chose avec Malfoy, c'est qu'il avait beau être convaincu de sa patience, il en fallait une sacrée dose pour l'apprivoiser totalement… Et Merlin, Harry se sentait prêt à la lui fournir.

Il vint se placer contre le dos du détenu, l'enlacer, lui relever le bras, glisser ses doigts entre les siens, sentir l'odeur de lait et de cannelle de sa peau, que venaient aromatiser mille notes de thé, d'encre, de savon, de grand air, ainsi que l'odeur plus musquée des albatros…

« Détends encore un peu les doigts… Inspire doucement… Expire… Ferme les yeux… »

Il sentit le corps se détendre doucement entre ses bras, et le souffle tranquille et régulier s'élever.

« C'est l'automne… murmura Harry contre l'oreille de Drago qui frémit à peine. Bientôt Halloween. La maison est décorée pour les fêtes. Ce soir, ce sera tarte à la citrouille. On a enfin rallumé la cheminée… »

Harry se souvenait encore parfaitement du premier cours de Patronus qu'il avait donné aux membres de l'AD, à Poudlard. Déjà à l'époque, ça avait été joyeux, extraordinairement agréable malgré la situation dans laquelle ils étaient, avec Voldemort qui s'infiltrait dans chaque recoin de leur existence. Il avait recommencé chez les Aurors, quand les autres stagiaires avaient eu du mal à suivre les instructions de leur vieux prof, Monsieur Pivert, puis encore une fois ici, à Azkaban, avec les Surveillants.

Harry se considérait comme un excellent prof sur ce sujet précis. Il savait mettre les gens à l'aise, adopter le ton nécessaire, ne pas brusquer les choses… Il devinait, à certaines attitudes, à certains gestes, ce qui bloquait l'apprentissage, et il adorait trouver les chemins détournés pour parvenir finalement au résultat escompté. Pour que NiDaïre finisse par réussir, par exemple, il avait suffi qu'il rassure Drago devant elle. C'était logique, en y repensant : Ce dont la femme avait eu besoin, c'est qu'il lui permette de s'occuper de la génération suivante.

« Dans la cuisine, on prépare les marrons glacés. Les enfants se chamaillent pour avoir le droit de lécher le fond de la casserole… »

Au fur et à mesure de son discours, il sentit la Magie de Drago se rassembler derrière son cœur, les essences du futur Patronus se lier entre elles, se solidifier, et il ferma les yeux pour savourer la sensation.

Impossible de mentir lors de l'invocation d'un Patronus. Si la Magie se formait, c'est que Drago était sincère. Il était véritablement capable de s'imaginer un futur avec lui, et surtout, d'y trouver son bonheur. Une certitude.

Il présentait les choses avec ironie, avec détachement, sans s'impliquer véritablement, en mêlant les flatteries, les bêtises et les vérités. Impossible de faire la part des choses dans tout ça : Trouvait-il réellement ces prénoms ridicules adaptés à des gosses ? Envisageait-il vraiment de perdre son nom de famille pour adopter le sien ? Était-il prêt à vivre discrètement parmi des Moldus ? Harry n'était pas un assez bon Legitimens pour le savoir, et s'il l'avait été, peu probable qu'il aurait immédiatement enquêté là-dessus. Il avait des années devant lui pour découvrir ce que Drago Malfoy était prêt à lui accorder, et la sensation était savoureuse.

La première fois, Harry l'avait laissé parlé autant qu'il le désirait, et aucune mention de Lucius Malfoy n'avait été faite. Dans cet avenir rêvé, ce monstre n'existait pas.

Harry laissa mourir doucement sa voix, mais il sentait toujours la magie de Drago pulser doucement dans sa poitrine. Un rythme lent, régulier, avec des vagues douces mais puissantes. Il voyait parfaitement à quel moment Drago pouvait prononcer la formule, et parfois, ses lèvres avaient un sursaut, une demi-seconde trop tard.

Bien sûr, Drago restait un vilain petit prétentieux. Pas du genre à prononcer un sortilège si la probabilité de réussite n'était pas au-dessus d'un certain seuil qu'il s'était auto-imposé. Il ne dirait pas un mot tant qu'il ne serait pas suffisamment sûr de lui.

Quand Harry sentit le battement régulier de la Magie faiblir, il reprit tout doucement ses conseils, d'une voix la plus basse possible, toujours en lui caressant lentement les doigts :

« Attention à ta respiration, doucement. Souffle… Voilà. Imagine une bougie devant tes lèvres. La flamme doit danser, mais ne jamais s'éteindre. »

C'était encore meilleur que le sexe.

Non, c'était tout aussi bon que le sexe, dans une ambiance tout à fait différente.

Non, le sexe avec Drago était génial, alors disons, presque aussi bon que le sexe.

Non, il avait eu raison dès le départ : Meilleur que le sexe, parce qu'il pourrait se passer de sexe s'il obtenait cette proximité et cette confiance à la place, alors que l'inverse n'était plus envisageable.

Un Patronus apparut soudain, sans qu'un mot n'ait été prononcé, les faisant tous deux sursauter, mais la voix de Ron retentit presque immédiatement :

« On lance une opération Dirico ! Il y a eu du mouvement Nord-Ouest, zone du…

– Merde ! » Harry plaqua un baiser rapide sur la joue de Drago et quitta aussitôt la pièce en courant, entendant vaguement une exhortation à la prudence accompagner son départ précipité.

Aussitôt arrivé sur la plage, il s'empara de son balai personnel, d'un autre engin de course au hasard, et alpagua le premier Surveillant désœuvré qu'il vit : Hitchin semblait attendre l'arrivée de Drago pour un compte-rendu.

Il ne prit pas le temps de l'informer de la situation : Hermione avait déjà décollé, et les deux hommes la rejoignirent immédiatement dans les airs, prenant une direction opposée au gros des troupes. Ils volèrent un moment, jusqu'à stationner à quelques mètres de l'une de ces fameuses bulles de protection magiques, d'où Harry émit un sort d'étincelles bleues pour signaler leur arrivée.

Merlin ce qu'il pouvait détester les opérations Dirico…

Quand le silence devint trop pesant, Hitchin osa enfin prendre la parole :

« Hum, fit-il en se raclant la gorge. Monsieur le Directeur ? Excusez ma curiosité, hein, mais… »

Harry soupira nerveusement en observant l'homme, qui ne semblait pas beaucoup plus à l'aise que Hermione sur un balai. Il était tout de même capable d'invoquer un Patronus corporel : Un chat au poil court et au visage écrasé qui ressemblait un peu à Pattenrond, mais pas bien résistant.

C'était tellement frustrant d'être ici alors que là-bas, peut-être… Mais ce n'était pas la faute de l'homme, alors Harry se força à répondre, d'un ton détendu :

« Première opération Dirico, Brigadier ? Aucune crainte à avoir, sauf si vous êtes du genre particulièrement frileux. Il y a des chances que le Détraqueur se trouve par là-bas », expliqua-t-il en pointant le Nord-Ouest de son doigt, où des étincelles, rouges, vertes ou bleues pouvaient surgir à chaque instant. « On part du principe que si je vais le chercher moi-même, il y a de grandes chances qu'il décide de s'enfuir. Alors on reste là pour l'encourager à pointer le bout de son nez inexistant là-bas. On n'intervient que s'il sort réellement de sa cachette, pour le prendre en tenaille, mais vraiment, vous ne risquez rien. »

Ni d'être blessé, ni de vous rendre utile, tout comme moi, songea amèrement Harry, mais il tût ces pensées et sourit bravement à l'homme qui hocha la tête, les doigts crispés sur son balai.

Harry fixait l'horizon en espérant à la fois voir un mouvement et que rien ne se passe.

Merlin, il haïssait les opérations Dirico.

Le balai de Hermione vint doucement le rejoindre, par à-coups irréguliers.

« Est-ce que ça va, Harry ? » demanda-t-elle en connaissant déjà la réponse.

Harry haussa une épaule en effectuant, au cas où, de petits mouvements d'échauffements du poignet.

« Ça va aller, prétendit-il. Je commence à avoir l'habitude. J'essaye de voir les choses du bon côté : Au moins, je suis bien accompagné ! » Et il conclut cette remarque d'un clin d'œil qui fit sourire Hermione.

Elle l'accompagnait à chaque opération Dirico, sa mauvaise maîtrise du vol la rendant malheureusement inapte à combattre au-dessus des flots. Le troisième membre de leur groupe variait à chaque fois, en revanche. Des Surveillants, la plupart du temps, mais il avait aussi embarqué d'office l'une des Dottoranda, une fois. Peu importait, au final. L'idée était simplement qu'il ne soit pas seul.

Il sourit.

Il avait imposé la chose en songeant à quel point Drago s'offusquerait s'il apprenait que ce n'était pas le cas, et tous s'étaient mépris sur ses raisons, en ventant cette soudaine prise de conscience qu'il n'était pas invulnérable.

L'idée avait en outre ses avantages : Les opérations Dirico pouvaient durer plusieurs heures, et seul au milieu des flots, Harry n'aurait pas su rester immobile. Papoter l'aidait à faire passer le temps.

« J'ai vu que ça s'était mal passé avec le Professore Kenaran, tout à l'heure, insinua doucement Hermione.

– Juste quelques opinions divergentes, répondit Harry sans la regarder. Il considère toujours Malfoy comme l'élément déclencheur du comportement du Détraqueur, alors il aimerait bien en faire son petit cobaye. Mais ça ne sera pas le cas.

– Et… Hum… Est-ce que tu as repensé à ce que je t'ai dit concernant Madame Kathleen ? »

Cette fois, Harry tourna son visage vers elle. Hermione se troubla aussitôt, mais elle garda la tête haute et le regard fixe. C'était la troisième fois qu'elle abordait le sujet, et ça faisait trois fois de trop.

Oui, c'était vrai, Harry se sentait à fleur de peau. Il en était parfaitement conscient et n'avait aucunement besoin qu'on le lui rappelle constamment. Oui, ce serait une très bonne chose quand il pourrait reprendre ses séances régulières. Il aurait des tas de choses à raconter à la psychologue, des tas de questions à lui poser, et avait hâte d'entendre ses conseils et ses encouragements.

Mais non, par tous les Sangs, non, ce n'était pas le moment !

Dès qu'il s'éloignait, il laissait le champ libre au Détraqueur d'attaquer. Au Détraqueur, ou à Vissarion. Ou à n'importe qui, putain ! Ne pouvait-elle pas comprendre ?!

Madame Kathleen l'aidait beaucoup mais il n'avait pas besoin de la consulter chaque semaine pour se voir répéter des conseils qu'il connaissait par cœur !

Hermione ne détourna pas le regard, cependant.

« Je vais très bien, grinça-t-il. Je suis fatigué et frustré que les choses s'enlisent autant, mais je vais très bien. »


« AH ! Et c'est qui qui est de mauvaise fois, MAINTENANT ?! » s'exclama Drago en brisant allégrement le 4eme mur.