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~Interlude~
Acte 3 : Cauchemar.
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Il était trois, peut-être quatre heures du matin et cette cinglée tambourinait toujours comme une malade à sa porte. Il avait compris la leçon, putain. Pardon pardon, auprès de qui voulait bien l'entendre, il avait fait un putain de vœu à la con.
Non seulement il avait passé une nuit infernale, mais en plus, l'autre abrutit d'Harry lui avait volé son dernier souhait. Il regarda, désabusé, la main de singe aux doigts repliés. Ça ne lui servait plus à rien maintenant...
Et puis il y avait cette stupide histoire que Gaunt avait raconté. C'était une fable, évidemment. Un conte à dormir debout qu'on racontait aux mioches pour les terrifier. Une petite voix dans sa tête lui rappela les grattements qu'il avait entendu, mais il la repoussa avec rage.
Et cette pétasse ! Bon, ouais, il avait peut-être demandé à ce qu'elle soit « folle » de lui. Mais il ne voulait pas dire cela comme ça ! Elle ne s'était pas avérée être la douce créature qu'il avait rencontrée, mais une véritable psychopathe qu'il considérait désormais comme une menace sérieuse.
Il avait tout d'abord été charmé par son attention et ses caresses subtiles, tout au long de la soirée, puis elle avait changé de visage. Il s'avait qu'elle l'avait suivi jusqu'à l'épicerie quand il était allé se réapprovisionner en bougies. Il avait trouvé cela amusant, au départ, mais cette joie s'était vite transformée en irritation. Puis, au fil de la nuit, l'inquiétude avait remplacé l'agacement.
Elle s'était accrochée à lui comme une tique, ne le laissant jamais seul une seconde. Elle chuchotait des mots doux d'une voix trop aiguë, sa main caressant son bras de manière possessive. Puis, elle avait commencé à parler de leur avenir ensemble, comme s'ils étaient déjà un couple depuis des années. Elle avait mentionné des plans pour une maison, des enfants, une vie qu'ils allaient partager. Et tout ça, c'était juste après l'avoir rencontrée. C'était flippant. Ça puait la folie à plein nez.
Billy se retrouvait face à un véritable dilemme : d'un côté, il désirait barricader ses fenêtres, de peur que cette fichue femme ne s'introduise chez lui, fouillant dans ses affaires et surveillant ses activités personnelles. Mais d'un autre côté, en obstruant ses fenêtres, il se privait de la lumière bienfaitrice du soleil.
Et... et bien sûr que non, il ne croyait pas un foutu mot du récit de Gaunt, mais alors pas un mot. Tout ça n'était que du pipeau, rien de plus. Mais... mais le soleil, tout de même... ou ne serait-ce que la lumière de la lune... enfin, puisque c'était là, gratuit, il aurait été dommage de s'en priver, non ? Et puis, ça lui donnait l'occasion de repousser un peu plus l'obscurité oppressante qui menaçait de l'engloutir à tout moment.
Un craquement sinistre résonna derrière lui il et il sursauta violemment. Il se retourna brusquement, scrutant l'obscurité avec méfiance. Il n'y avait rien. Bordel ! Ses nerfs étaient à vif, à fleur de peau. Ça ne lui ressemblait pas.
D'une main tremblante, il alluma une nouvelle bougie. Cela portait désormais leur nombre à 14. Cela lui avait coûté une petite fortune, bien entendu, mais rien ne valait la beauté de leur flamme, n'est-ce-pas ?
De nouveaux coups retentirent sur sa porte : « Dégage, connasse ! » Hurla-t-il hors de lui. Et le silence se fit. Un silence lourd, oppressant, qui sembla s'épaissir autour de lui. Et ce fut encore pire que tout.
« Qu'est-ce qu'elle fout ? Est ce qu'elle essaye de monter par le toit ? De trouver une autre entrée ? Est-ce qu'elle a abandonné ? Ou peut-être qu'elle fait juste une pause ? » Billy tendit l'oreille, mais seul le battement sourd de son sang à ses oreilles lui répondit.
Il crut apercevoir une ombre bouger à l'extérieur et, paniqué, ajouta une nouvelle bougie, juste histoire d'être sûr. Il pourrait fuir ? Prendre son or et disparaitre. Cela règlerait tous ses problèmes. Il jeta un coup d'œil par la fenêtre et n'y vit personne.
Bien. C'était le moment. D'un geste fébrile, il ouvrit son placard pour s'emparer de sa bourse, mais en la soulevant, il la trouva d'une effrayante légèreté. Il dénoua rapidement les cordons : à la place de son précieux or, de ses pièces si brillantes, il ne restait qu'un tas de feuilles mortes.
Incrédule, Billy referma la bourse, comme s'il pouvait effacer cette terrible réalité en refermant simplement le sac. Puis il la rouvrit, espérant presque miraculeusement que son trésor réapparaisse, comme par enchantement. Mais de l'or, il ne restait plus rien.
La rage l'envahit. Il balança la bourse vide à travers la pièce et celle-ci renversa une des bougies. Billy s'écroula au sol, la tête entre les mains, submergé par le désespoir. Il imaginait déjà l'homme de main désagréable de Malfoy, qui viendrait probablement le chercher dès qu'il se rendrait compte que l'or n'en était pas vraiment.
Il revoyait la dague brillante dans sa main, étincelant sinistrement dans la pénombre, et des images macabres s'imposaient à lui : son pauvre corps exsangue, vidé de tous ses organes, au coin d'une rue sombre, abandonné aux rats affamés.
Il chercha frénétiquement des solutions pour tromper le colosse. Peut-être pourrait-il se cacher dans les égouts ? Non ! Surtout pas ! Il y faisait trop sombre. Alors quitter la ville rapidement ? Chaque idée semblait plus futile que la précédente. Il avait fait un pacte de sang ; le colosse le retrouverait où qu'il aille et Billy savait qu'il n'avait nulle part où se cacher.
« C'est un cauchemar », murmura-t-il pour lui-même.
Mais Billy avait tort. Ce n'était pas encore tout à fait un cauchemar.
En tombant sur le sol, la bougie ne s'était pas éteinte et la flamme, alimentée par les feuilles mortes de la bourse, avait commencé à s'étendre, jusqu'à lécher le bas des rideaux de coton qui encadraient la fenêtre. L'odeur âcre de la fumée le tira finalement de sa torpeur, mais il était trop tard. Un début d'incendie s'embrasait dans son petit appartement, dévorant tout sur son passage.
Pris de panique, Billy chercha frénétiquement quelque chose pour éteindre le feu. Dans sa précipitation, il saisit un récipient d'huile de cuisson négligemment laissé sur la table. Sans réfléchir, il le lança sur les flammes, mais ce geste désespéré ne fit qu'aggraver la situation. Les flammes, ravies de cette nouvelle offrande, se nourrirent de l'huile, doublant de volume et engloutissant rapidement l'appartement dans un brasier infernal.
Il ne restait plus grand chose à faire, à part fuir.
Dans la rue, les bras le long du corps, il regarda son petit appartement brûler sans pouvoir faire le moindre geste. La lumière du feu était puissante, éclairant la nuit comme en plein jour. Il se sentait dévasté : sans un sou en poche, sans appartement, criblé de dettes auprès de types peu recommandables...
Alors qu'il observait ses derniers biens disparaître et que les premiers sorciers tentaient avec difficulté d'éteindre l'incendie, un gamin effrayé sortit d'une petite ruelle et le bouscula brutalement. L'enfant, tout au plus 16 ans, pointa d'un doigt tremblant l'endroit d'où il venait : « C'est horrible, m'sieur ! Là-bas ! Là-bas y'a un type tous ses boyaux à l'air ! Du sang partout. Il est mort m'sieur ! J'ai jamais vu ça. »
Billy observa avec intérêt la ruelle. La vie pouvait être une garce, mais elle savait aussi offrir des chances à saisir. Pour lui, la vie était une compétition impitoyable où seuls les plus forts et les plus rusés survivraient. Il avait toujours été prêt à écraser quiconque se mettrait en travers de ses ambitions, que ce soit en affaires ou dans la rue. Aussi, l'idée de piller le corps qu'on venait de lui signaler ne lui inspirait aucun remords. Au contraire, il y voyait une occasion de récupérer ce qu'il avait perdu.
L'impasse était sombre, seulement éclairée par l'incendie qui ravageait son appartement. Il hésita un long moment, fixant craintivement l'obscurité qui planait sur la ruelle lugubre, mais l'appel irrésistible de l'appât du gain fut plus fort et son avidité dépassa sa peur, l'incitant à affronter les ténèbres pour saisir l'opportunité qui se présentait à lui.
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