Oups, un petit temps de retard ce matin. Parce que je ne me suis pas réveillée.
Mais bref : voici le chapitre. C'est toujours le moment de montrer King sous un autre jour alors continuons sur cette lancée. Bonne lecture !
Katakuri n'avait pas menti : King n'avait eu qu'à suivre les hurlements pour découvrir la salle de réception où se déroulait la réunion. Il y avait quelques gardes à l'extérieur mais, homies ou pas, ils étaient plus intéressés par ce qu'il se passait dans le bâtiment qu'ils étaient censé garder que par les éventuels visiteurs.
King n'était pas surpris — ni dépaysé — il connaissait ces cris. Il les subissait aussi sur Onigashima, surtout quand il avait l'outrecuidance de demander aux Tobi Roppo de faire leur travail. Et à l'intensité des insultes qui fusaient alors qu'il s'approchait, il se dit qu'il était ravi de ne pas être concerné par les affaires de ce pays.
Il se voyait mal débarquer parmi eux, comme un cheveux sur la soupe, pour leur demander directement des nouvelles des empereurs disparus. Il n'était pas téméraire à ce point là. Et étrangement, il n'avait pas envie d'attirer plus d'ennuis à Katakuri. Il n'avait plus qu'à se trouver suffisamment près pour épier les conversation, sa discrétion faire le reste. Il avait l'habitude de passer inaperçu. Et les homies étaient peut-être nombreux mais ils n'étaient pas très malins. Ils se comportaient comme des gosses et avaient la même capacité de concentration qu'eux. Sans chef pour coordonner leurs actions, ils devaient être faciles à manipuler.
Il ramassa une pierre — inanimée, dieu merci — l'enroula dans un pan de sa cape qu'il arracha aussi sec et y mit le feu juste avant de la lancer quelques mètres plus loin. Un bruit de verre brisé et des cris apeurés attirèrent leur attention et, comme il s'y attendait, ils se précipitèrent tous dans la direction du bruit. King n'eut qu'à franchir la porte d'entrée et ne rencontra pas plus de résistance.
A l'intérieur, l'air était étouffant, il avait la sensation d'entrer dans un sauna. Cette atmosphère ne l'aidait pas à se sentir serein. Il se promit de se dépêcher de sortir de là.
Les frères & sœurs Charlotte n'étaient plus très loin et ils hurlaient assez fort pour réveiller tout le quartier mais il n'était pas encore capable de distinguer le sujet de la dispute. Il avança dans le couloir, ignorant les quelques lampes fixées aux murs qui le regardaient avec méfiance.
— T'es qui toi ? Eh ! Y'a un intrus !
— Je viens de la part de Katakuri, je ne reste pas, répondit-il pour les calmer, rassuré à l'idée que leurs voix fussent incapables de couvrir celles des autres.
Il ne savait pas si c'était à cause de la cape ou si ces créatures étaient désespérément crédules, mais le mensonge passa.
— Ah, ça va alors.
Il avait le choix, soit il rentrait dans la pièce principale, celle d'où venait les cris, soit il prenait l'escalier et profitait de la mezzanine. Il prit l'escalier et fit de son mieux pour rester le plus silencieux possible. Tout en se disant que ça aurait été plus simple de trouver un journal et de faire ses propres déductions. Une curiosité déplacée le poussait à continuer.
Arrivé en haut des marches, il avait une vue plongeante sur cette belle réunion de famille, où tout le monde tapait du poing sur la table et se lançait de la nourriture au visage. La part de lui qui croyait que cette famille pouvait être plus civilisée que son équipage renonça. Au début, il se contenta d'imaginer Katakuri parmi eux dans cette situation, obligé de supporter un tel bazar pour faire bonne figure.
Il se demanda s'il était toujours stoïque dans ces moments-là ou si lui aussi s'emportait facilement et tapait du poing sur la table pour se faire entendre. Il ne l'aurait jamais cru s'il ne l'avait pas vu s'emporter contre son frère jumeau quelques heures auparavant. Frère qui était dans la pièce et qui faisait parti des plus énervés de la salle. La veine de son front était au bord de la rupture et la chaleur poisseuse qui régnait dans la pièce venait de lui.
Le frère plus jeune, Cracker, était là aussi. Contrairement aux autres il ne hurlait pas mais il arborait l'expression de celui qui vient de révéler une vérité difficile à entendre. Les femmes paraissaient plus calmes mais il émanait d'elles une même colère dévastatrice. King reconnut Brûlée, un peu en retrait, mais tout aussi exaspérée. Il devina qu'elle n'avait pas eu son avis à quant à sa présence ce soir.
Personne ne le remarqua. Tel qu'il était, tapi dans l'ombre et aussi immobile qu'une statue, il passait pour un élément du décor. Il n'avait plus qu'à tendre l'oreille. En théorie du moins, car il n'y avait pas quoi que ce soit d'intelligible à entendre dans ce brouhaha. Il ne savait même pas quel était le sujet de leur dispute.
Enfin, la femme qui était le portrait craché de Big Mom — et dont King était incapable de se remémorer le nom — réussit à obtenir quelques secondes de silence en criant plus fort que les autres. King devina que c'était l'aînée de la fratrie.
— CA SUFFIT ! Ca n'arrange pas notre situation de hurler !
Enfin des nouvelles, se dit King avant que les cris ne fusent à nouveau, où chacun essayait de couvrir la voix des autres.
— Il faut qu'on parte, et tout de suite ! Ma flotte est prête, je peux aller sur place moi-même si il faut ! Insistait Cracker, à bout de nerfs.
— C'est ça, et si tu te fais encore botter le cul loin de la maison on se retrouve encore plus vulnérables face à la Marine qui va forcément débarquer dans pas longtemps, tu bouges pas de là, lui répondait Oven.
— Il faut retrouver le Queen Mama Chanter pour savoir si c'est la vérité, Brûlée, tu as pu les retrouver ?
— Non, toujours pas depuis la dernière demie heure…
La nervosité de King augmenta un peu. Ces disputes étaient habituelles mais la situation lui paraissait vraiment préoccupante. Ils étaient en panique. Et sans avoir le détail, il savait que ce qui pouvait les mettre dans un état pareil n'était pas bon pour lui non plus.
— C'est encore un mensonge de ce vautour de Morgans, gardons la tête froide, recommanda une grande femme à la voix calme et au physique serpentin. Nous savons tous que c'est impossible, alors calmons nous. La meilleure chose à faire, c'est d'envoyer des espions à Wano. En petit comité. Maintenant que Kaido n'est plus là, il sera facile d'y accéder.
Le cœur de King s'arrêta. Comment ça "plus là" ?
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Katakuri avait rejoint la salle et, caché dans la pénombre, il cherchait King du regard. Il ne le voyait nulle part. A l'intérieur, le ton c'était un peu calmé Il espérait que son compagnon n'était pas entré pour se joindre à la fête mais son instinct savait que c'était ce qu'il avait fait. King se permettait absolument tout sans craindre quoi que ce soit. Il l'imagina, entrer dans la salle et poser ses mains sur la table pour couper la parole à tout le monde. L'image le glaça autant qu'elle lui plut.
Au moins, si il se faisait prendre, Katakuri avait une bonne excuse pour se trouver sur place. Il n'aurait plus qu'à dire qu'il lui courait après. S'il était devenu incompétent à leurs yeux, ça ne pouvait pas être pire de toute façon. Mais rien ne se passa, quelques voix s'élevèrent de temps à autres, comme à l'accoutumée, mais rien de bien notable. Katakuri était frustré, pour la première fois, il aurait voulu entrer et prendre sa place autour de la table.
King avait raison, cela faisait trop longtemps qu'ils étaient sans nouvelles et ce n'était pas normal. Il commençait à croire que ses adelphes ne cherchaient pas à le priver d'informations, ils n'en avaient pas plus que lui. Tout simplement.
Le choc arriva d'un seul coup. Une exclamation alarma Katakuri et une demie seconde plus tard le toit de la salle explosa. Les flammes fendirent le ciel, dévorèrent la toiture et une odeur de pain grillé se répandit dans l'air. Katakuri se protégea des éclats et eut le bon réflexe de deviner la suite. Il concentra son attention le nuage de braises fumantes et reconnut la silhouette massive qui s'en échappa à une vitesse prodigieuse, droit vers le ciel.
— Ses ailes sont rétablies ? Murmura-t-il pour lui même.
Il sortit de sa cachette, ignora les homies affolés qui donnaient l'alerte et chercha le meilleur point d'attaque. Il devait l'attraper avant qu'il ne s'échappe et ne s'envole trop loin.
King émergea des flammes à une vitesse phénoménale. Heureusement, Katakuri n'était pas moins rapide. Il lança son bras à toute vitesse et fut chanceux de lui attraper la cheville. Il le précipita au sol et maintint son poing fermé pour l'empêcher de fuir. Il courut pour le rejoindre, un peu surpris de ne rencontrer aucune résistance. La dernière fois qu'il avait fait ça, un ptéranodon furieux avait essayé de l'éventrer. Cette fois, il avait senti King s'écraser brutalement sans chercher à se défendre alors qu'il n'avait pas chercher à le blesser.
Par chance, il l'avait balancé dans une ruelle déjà bien abîmée par les dégâts de la dernière Tea Party. On pourrait attribuer son crash aux évènements passés et ne pas chercher plus loin. Il fila entre les bâtiments, la capuche rabattue sur le visage pour empêcher les curieux qui se précipitaient aux fenêtres de le reconnaître. Quand enfin il vit King, il ne s'était pas relevé. Il était étalé de tout son long dans la rue, une jambe vaguement maintenue en l'air par une corde à linge. Katakuri sentit l'agacement l'envahir.
— Je peux savoir où tu comptais aller ?
Il lui avait demandé ça avec son ton de grand frère fâché et se sentit un peu idiot. Il n'aurait pas dû s'attendre à autre chose de la part d'un ennemi. Il avait tenté de s'enfuir à la seconde où ses ailes avaient retrouvé leur vitalité et il ne pouvait pas le lui reprocher d'avoir agi en conséquence. Ce qui l'étonnait, c'était que King semblait avoir oublié ses menottes explosives. Si Katakuri lui avait laissé le temps de s'envoler plus haut ou plus loin, elles l'auraient amputé de ses mains.
C'était cette stupidité le mettait en colère.
— Lève-toi, dit-il en le bousculant de la pointe de sa chaussure. A cause de tes bêtises il faut partir tout de suite.
King ne répondit pas. Il fixait le ciel sans bouger d'un poil. Ses yeux étaient grands ouvert, figés en une expression de terreur qui inquiéta Katakuri. Il se pencha pour observer une éventuelle blessure ou pour l'aider à se relever, King répondit à ses inquiétudes d'une voix sépulcrale.
— Ils ont dit que Big Mom et Kaido étaient morts.
Katakuri s'immobilisa à son tour. Le temps que l'information se fasse une place dans son esprit. Il était incapable de réagir à cette affirmation.
— Quoi ?
— Je te répète ce que j'ai entendu.
Une angoisse immense submergea d'abord Katakuri. Puis sa raison le rattrapa : Mama ? Mourir ? Il savait que rien ne pouvait la tuer. Il était le mieux placer pour le savoir et cette pensée le rendit amer. Il soupira.
— C'est impossible. Je ne sais pas quelles sont leurs sources mais ils sont allé un peu vite en conclusion.
— Morgans.
— Ah ! Une bonne raison de plus de douter de cette affirmation.
— Alors pourquoi vous n'avez plus la moindre nouvelle si ce n'est pas vrai ?
— Je n'en sais rien, mais je ne crois pas à la mort de ma mère. J'ai passé assez de temps avec elle pour savoir que personne ne peut la tuer. A part elle-même.
King ne disait plus rien mais il n'en croyait pas un mot. Là où Katakuri s'était tristement résigné à ce que sa mère ne meurt jamais, King paraissait complètement dévasté à l'idée que Kaido puisse disparaître. Ce n'était pas la défaite de l'équipage aux cent bêtes qui l'avait mis dans cet état mais bien la peur du décès de son capitaine.
— Tu crois vraiment que ton capitaine pourrait se faire tuer ? J'ai rencontré Chapeau de Paille, ce n'est pas le genre d'homme à assassiner quelqu'un. Même quelqu'un comme Kaido, dit-il en repensant à la façon dont le jeune homme avait compris son geste à la fin de leur combat et avait couvert sa bouche pour préserver sa dignité.
Les yeux de King retrouvèrent un peu de leur éclat. Son expression hébétée s'effaça peu à peu. Katakuri le soupçonnait d'avoir réagi à chaud et d'avoir perdu les pédales. Son arrivée sur Totto Land avait prouvé qu'il était plus sensible et émotif qu'il ne voulait bien le montrer. Il devait s'emporter facilement.
— Et si ça peut te rassurer, nos réunions de famille ont tendance à nous laisser dramatiser avant de parvenir à une conclusion fiable. Je pense que tu es sorti avant la fin.
Des bruits de pas se rapprochaient d'eux. Katakuri n'avait pas le temps de le laisser se morfondre sur le sol à attendre qu'on les surprenne. Ils discuteraient de ça à tête reposée une fois qu'ils seraient chez lui.
— Allez ça suffit, debout !
Il lui attrapa le bras pour le forcer à se lever. King n'opposa aucune résistance, il se mit sur ses jambes et suivit Katakuri dans le dédale de Sweet City. Katakuri pensa une seconde aux dégâts occasionnés par le départ enflammé de King et constata qu'il ne ressentait pas la moindre culpabilité.
Ils coururent encore un moment, esquivant quelques soldats et homies, puis réalisèrent qu'ils ne pourraient pas regagner la baie sans être vus. Katakuri espéra que son navire n'attirerait pas trop l'attention.
Il réfléchissait à ses options et un rapide coup d'œil à l'avenir lui donna une information intéressante.
— Par ici, indiqua-t-il à King, qui continuait de le suivre sans dire un mot, l'air absent.
Il se dirigea vers une des Eglises de Mama — bâties en hommage à sa bien aimée Mère Carmel et dont elle se servait pour récolter les taxes d'âmes des habitants de l'île — il n'eut pas à attendre longtemps. Une jeune femme ouvrit timidement la porte et parut surprise de le trouver sur le seuil.
Néanmoins, elle ne posa aucune question et ouvrit grand pour laisser passer les deux géants. Katakuri la vit réagir à la présence de King par un hoquet de surprise et des joues rougissantes. Un peu agacé, il se tourna pour remettre sa capuche sur la tête de King et dissimuler ces traits. Il ne voulait pas que plus d'yeux s'égarent sur lui et augmentent le nombre de mouchards potentiels — du moins c'était l'explication rationnelle qu'il donnait à son geste. Une brève lueur de reconnaissance brilla au fond des yeux rouges de King mais il se détourna rapidement de Katakuri, presque timide.
Katakuri était trop nerveux pour y prêter attention. Il s'inclina humblement devant la civile qui leur avait ouvert la porte.
— Merci pour votre aide.
Elle rosit de plus belle en se dévissant le cou pour le regarder, elle n'en revenait pas que Katakuri puisse lui adresser la parole.
— Vous avez des ennuis ? Demanda-t-elle, avec tact, sans doute par peur d'aller trop loin par cette simple question.
Il se retint de rire. Ça devait être la première fois qu'on lui posait cette question.
— Moi non, dit-il en se tournant vers King qui restait en retrait, l'air renfrogné. Mais j'apprécierai que vous nous laissiez nous cacher ici le temps que ça se calme dehors.
— Bien sûr ! Autant que vous voulez ! S'exclama-t-elle avec ravissement.
Elle fila à travers la grande salle pour leur chercher de quoi boire. Katakuri entendit King soupirer dans son dos.
— Comment compte-t-elle nous apporter quoi que ce soit avec son gabarit ?
— Même dans une situation comme celle là, tu es désagréable. Ça veut dire que tu te sens mieux ?
Il ne répondit pas.
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King laissait ses idées se remettre en place, tout doucement. Katakuri et son calme à toute épreuve avaient un effet apaisant et maintenant il se sentait ridicule d'avoir paniqué de cette façon.
Il ne pouvait pas oublier ce qu'il avait entendu mais il se rendait compte qu'il avait surréagi. Imaginer Kaido mort lui avait retourné le cerveau, il n'avait même pas réalisé qu'il avait retrouvé l'usage de son aile avant que Katakuri ne le précipite au sol — et la lui endommage de nouveau.
Il avait honte. Il s'estimait chanceux que Katakuri ne profite pas de l'occasion pour l'humilier, n'importe qui à sa place l'aurait fait. Au contraire, il l'avait rassuré et rappelé ce qui aurait dû être une évidence : Kaido était impossible à tuer. Il n'était même pas capable de se suicider, comment pouvait-il mourir de la main de quelqu'un d'autre ? Il y avait une faille dans cette information, et ça n'aurait pas été la première fois qu'une nouvelle erronée circule partout. Mais une aussi énorme, c'était inattendu. Il était persuadé que ça avait quelque chose à voir avec la chute de Doflamingo. On ne pouvait plus se fier à rien maintenant que le courtier de l'ombre était hors course.
Cependant, quelque part au fond de lui, un doute persistait.
Il faisait de son mieux pour le faire taire en se concentrant sur la situation. Ce n'était pas agréable non plus ; il avait merdé en beauté. Il n'y avait aucune chance qu'on ne devine pas qu'il était responsable de cette explosion. Katakuri aurait dû lui mettre son poing dans la figure pourtant il n'avait même pas l'air en colère. Il était vaguement embêté de devoir attendre pour rentrer chez lui.
Son escargophone sonna. Encore une fois, il était effroyablement tranquille. Il n'avait même pas tressailli, peut-être avait-il deviné cet appel. Il posa ses yeux sur King et lui réclama le silence d'un coup d'œil. King répondit d'un haussement de sourcil vexé — comment pouvait-il croire qu'il serait assez bête pour se trahir tout seul — puis il repensa à ce qu'il avait fait et comprit qu'il n'y avait rien d'illogique à ce que Katakuri lui demande de rester calme. Il avait l'impression d'avoir régressé de trente ans.
Il décrocha et prit une voix ensommeillée.
— Qu'y a t-il ?
— Kata, c'est Oven, déclara son jumeau, furieux. Dis moi, il te manquerait pas quelque chose chez toi, par hasard ?
Il était très en colère. Comme King l'avait prédit, on l'avait reconnu. Il ne voyait pas comment Katakuri allait se sortir de cette situation. Il allait certainement le balancer pour éviter de prolonger le conflit avec sa famille. Il ne savait plus s'il devait se battre ou fuir. Il était épuisé et ne trouvait pas le courage de lutter, pas après avoir cru à la mort de son capitaine. Après tout à quoi bon ?
— Va droit au but Oven, j'aimerai bien aller me coucher ! Et je répète que tu n'es pas censé m'adresser la parole.
— Ton lunaria, t'étais pas censé le garder au moins enfermé dans ton palais !? Explosa Oven. On vient de le voir à Sweet City !
Katakuri posa ses yeux roses sur King et, voyant peut-être sa détresse, esquissa un sourire rusé.
— Bien sûr, pouffa-t-il. Et je peux savoir comment il serait arrivé là ?
— Il vole ! Andouille ! Et c'est à toi de répondre à cette question, pas à moi !
— Il a une aile brisée, il ne peut plus voler. Et quand bien même il pourrait, il a des menottes explosives aux poignets. Tu me prends pour un crétin ? S'il s'éloigne trop de moi, il saute. Alors maintenant va houspiller quelqu'un d'autre et laisse moi tranquille. Bonne nuit.
King était stupéfait par son jeu d'acteur. Il aurait cru qu'il serait incapable de mentir à un membre de sa famille mais c'était tout le contraire : c'était un expert en la matière.
— Non mais attends ! Insista Oven, la voix moins assurée. Je ne suis pas fou, un type volant vient de faire exploser notre salle de réunion, est-ce que tu peux au moins vérifier qu'il est dans sa chambre ?
— Il est en face de moi.
Un silence s'installa dans l'église. King fixait Katakuri comme s'il le voyait pour la première fois.
— Ah… Ah bon ? S'étonna Oven dont la voix trahissait l'embarras.
— Tout à fait, confirma Katakuri avant de tendre son escargophone vers King. Dis lui quelque chose, sinon il va me tenir la jambe toute la soirée.
— Bonsoir, dit King, en essayant de masquer son ahurissement.
De nouveau un silence. Katakuri n'attendit pas la réponse de Oven et raccrocha en feignant l'agacement. Il rangea son escargophone et regarda King. Il était manifestement ravi de lire la surprise et l'admiration sur son visage.
— Ils me croient incapable de désobéir, autant que ça serve.
Le respect que King éprouvait pour lui explosa. S'il avait été moins orgueilleux, il aurait ployé le genou devant lui. A son tour, il retrouva son entrain et lui adressa un sourire malicieux.
— Tu te rends compte que tu viens de lui sous entendre que j'étais dans ta chambre alors que tu allais te coucher et qu'il te dérangeait ?
Le sourire de Katakuri s'effaça aussitôt et son visage prit une teinte flamboyante. A priori : non, il ne s'était pas rendu compte. Il paniqua instantanément et perdit sa superbe en bafouillant à toute vitesse.
— Ahnonmaispasdutout, c'est pas ce que je voulais dire ! Dans ma tête on était dans mon bureau en train de bosser…
Heureusement pour lui, la jeune femme qui leur avait ouvert revint avec quelques homies et un chariot chargé de boissons et de nourriture. Katakuri sauta sur l'occasion changer de sujet et oublier l'appel de Oven.
Cette courte interaction fit renaître la chaleur dans le corps de King. Il s'approcha du chariot d'un pas léger, estimant que lui et Katakuri étaient quittes en matière de ridicule. La jeune fille chaleureuse leur proposa du thé, du café, de la brioche et d'autres douceurs sucrées — que Katakuri refusa. King se laissa tenter par une pâtisserie, dans l'espoir que son goût lui redonna un peu d'énergie.
Katakuri, encore gêné par sa bourde, évitait son regard. Il remercia la jeune fille qui s'inclina poliment, sans bouger. Elle tordait une mèche de cheveux entre ses doigts et semblait chercher ses mots. Après une petite minute, elle osa prendre la parole.
— Euh, Seigneur Katakuri ?
Katakuri posa un regard indulgent sur elle.
— Oui ?
— Je voulais vous dire que…
La pauvre se perdait dans une gestuelle effarouchée ; elle serrait les plis de sa robe d'une main, tripotait ses cheveux de l'autre et se tortillait sur un seul pied. Elle n'avait sans doute jamais espérer pouvoir croiser Katakuri de son vivant. En la voyant, King pensa aux jeunes femmes que Queen rencontrait après ses concerts.
— On est encore nombreux à vous estimer, on s'en fiche de ces horribles photos. Je me permets de faire le porte parole des citoyens de Sweet City et de vous dire qu'on espère tous que votre sanction sera vite levée.
Elle avait dit ça d'un seul souffle et prit une grande inspiration tout de suite après, soulagée du poids de ces mots. King, abasourdi, observa la réaction de Katakuri. Il y avait une lueur triste dans ses yeux.
— Merci. Je suis touché, dit-il humblement.
La jeune fille sourit et les laissa seuls, s'éloignant d'un pas léger. Katakuri était silencieux. Son aveu lui avait fait oublier sa honte de tantôt, à présent il était plongé dans un état mélancolique et sirotait sa boisson sans prêter attention à King qui le dévisageait.
Il était fasciné. Lui qui n'avait connu le respect que par la peur qu'il pouvait inspirer à autrui, il ne pouvait que rester béat d'admiration devant cet homme qui était capable de tout ça mais qui, sans s'en servir, était profondément respecté par ceux qui travaillaient pour lui et par le peuple de Totto Land. En dépit des efforts de sa famille pour le maintenir à sa place de chien de garde et en dépit de son échec récent contre un ennemi. Il surpassait tous ses frères et sœurs depuis longtemps et il ne s'en vantait même pas. Ce soir, il l'avait vu leur mentir sans scrupule — après avoir longtemps clamé sa dévotion à leur clan — parce qu'il pensait que sa cause était juste. Secrète, mais juste.
King se sentit soudain proche de lui sans savoir d'où lui venait ce sentiment.
Il se demanda si Katakuri se rendait compte de ce qu'il symbolisait. Pour un général, une machine de guerre destinée à abattre les ennemis les plus imposants, avec une prime de un milliard, on comptait sur lui non pas pour abattre mais pour protéger. Pour ces gens, il était charmant. Et King aussi, le voyait.
Dans deux semaines, ce sera au tour de King d'avoir un petit chapitre flashback et je pense que ça va être rigolo parce qu'il y aura Yamato dedans. Et que mettre un gosse insupportable dans les pattes de King c'est toujours très drôle.
Après ça, je pense que l'histoire va s'accélérer un peu. Mais je leur laisse quand même le temps de biennn se tourner autour pour s'apprivoiser.
Encore un merci à tout le monde de suivre et de commenter cette histoire. Vos retours sont toujours précieux.
