Bon Dimanche à tout le monde, comme promis cette semaine : un petit flashback pour King.

Il est un peu plus léger et rigolo. Même si l'enfance de Yamato est mentionnée et que c'est pas la joie de son côté. Mais la relation entre King et Yamato m'intéresse. C'est conflictuel, c'est le moins qu'on puisse dire. L'un est d'une loyauté totale à un capitaine qui lui a sauvé la vie, l'autre veut se libérer d'un père cruel et maltraitant.

J'ai voulu explorer ce côté là, je pense que King ne peut pas ne pas se soucier du fils de l'homme qu'il estime le plus.

Allez c'est parti.


15 ans auparavant.

La journée avait mal commencé et ne semblait pas vouloir s'améliorer. Queen menait des expériences dont King aurait préféré ne rien savoir mais l'odeur pestilentielle qui flottait sur le domaine le forçait à y penser. Et il n'avait malheureusement rien à faire pour s'occuper l'esprit. Kaido était enfermé dans la salle des invités avec le détestable Orochi pour parler business. Il avait essayé de se joindre à lui pour le conseiller et empêcher les manigances du shogun mais ils avaient sorti le saké avant qu'il ne puisse mettre un pied dans la pièce. King connaissait la chanson, Kaido allait boire plus que de raison et finir par rouler sous la table. Il n'avait plus qu'à se contenter de surveiller la suite des évènements. Orochi était cupide et leur "empruntait" volontiers des vivres, des armes et de la main d'œuvre avec un peu trop de familiarité.

C'était toujours à King de freiner son appétit. Il stoppait les transactions quand il le pouvait et ne manquait jamais de réclamer des contreparties pour éviter à Orochi de prendre la confiance. Kaido n'était pas inconscient, il savait très bien qu'il profitait de sa force pour son petit plaisir personnel mais il n'y voyait rien de dangereux. "C'est juste un crapaud, laisse le barboter dans sa mare, du moment que nous contrôlons le pays." Mais King détestait ça. Il trouvait humiliant de voir son capitaine servir de vache à lait à un homme pareil. Heureusement, si Orochi faisait quasiment tout ce qu'il voulait, King aussi. Il bloquait tout et lui rendait la vie infernale autant qu'il le pouvait. Ça n'arrangeait pas son rapport avec les samouraïs ou les ninjas mais il s'en fichait. Moins il se liait avec des gens, mieux c'était.

En attendant que leur entrevue se termine, il s'entraînait au sabre dans la cour du château en surveillant la salle des invités du coin de l'œil. Une nouvelle détonation gigantesque l'interrompit dans sa réflexion. Il leva les yeux au ciel en devinant ce qui en était à l'origine. Il ne comprenait vraiment pas pourquoi Kaido s'entêtait à considérer Queen comme quelqu'un de compétent alors qu'il provoquait au minium une catastrophe par jour.

Un juron typique retentit tout de suite après et Queen — les moustaches ébouriffées par l'explosion — surgit dans la cour. Sa démarche de buffle en colère indiquait qu'il n'était pas responsable de ce nouvel incident et qu'il était au bord de la crise de nerfs. Cette vision égaya un peu la journée de King.

Queen fouinait partout, en soulevant des caisses vides et plongeant sa main dans les buissons décoratifs, jusqu'à ce qu'il s'aperçoive de la présence de King.

— Tu l'as vu ? Grogna-t-il.

Une bonne dizaine de réponses désagréables lui vinrent à l'esprit mais il se retint. Il n'avait pas la tête à ça.

— Quoi donc ?

— Yamato ! Je suis sûr qu'il l'a fait exprès !

King soupira. Si Yamato commençait à faire des siennes lui aussi, Kaido allait s'énerver.

— Il est pas là, retourne à tes éprouvettes et fous moi la paix.

Queen était sur le point de répliquer quand la porte coulissante de la salle des invités s'ouvra brutalement et qu'une énorme bouteille, vide, leur tomba presque dessus.

— C'EST QUOI CE BORDEL EN BAS ? QU'EST-CE QUE VOUS FOUTEZ ?

Kaido apparut au balcon, complètement saoul et vert de rage. Son entrevue avec Orochi l'avait mis de mauvaise humeur et ce n'était bon ni pour King, ni pour Queen. Dans ce genre de situation, King n'avait aucun scrupule à balancer ses collègues sous le bus.

— Il a fait exploser un truc, dit-il en pointant Queen du doigt.

— Mais t'as vraiment aucune race, espèce de gros lèche-pompes ! S'indigna Queen d'une voix suraiguë.

Queen n'avait pas plus de dignité que lui et se contenta de balancer à son tour.

— Il y a méprise m'sieur Kaido, vous allez rire, c'est parce que Yamato a mis son nez dans…

Kaido ne le laissa même pas terminer sa phrase, son cerveau n'était de toute façon pas en état de réagir autrement qu'en étant scandalisé.

— J'EN AI MARRE DE CE GOSSE !

Il jeta le verre qu'il avait à la main, sans vraiment viser qui que ce soit. La puissance de son lancer et du choc du projectile provoqua l'effondrement d'une gargouille de pierre. Queen pâlit et King resta immobile.

— Ramenez le moi tout de suite que je lui file une correction.

Il disparut aussitôt derrière la porte coulissante, presque aussi vite qu'il était apparu. King était prêt à parier qu'il aurait oublié s'être énervé dans un quart d'heure. Mais il ne pouvait pas désobéir.

— Ah, parfait, dit Queen. Tu t'en charges, moi je croule déjà sous le boulot.

— C'était déjà mon plan, réparer tes conneries c'est un sacré boulot et je veux pas m'en mêler.

— Va chier.

Il s'éloigna en lui adressant un doigt d'honneur. King soupira. Ça faisait longtemps qu'on ne l'avait pas envoyé courir après Yamato mais ça ne lui avait pas manqué. Il rangea son sabre et réfléchit aux milliers de cachettes qu'il allait devoir inspecter. Il était déjà épuisé.

/

Yamato était doué pour se planquer. Si Kaido avait réussi à lui enseigner une chose, c'était bien a disparaître après avoir fait une connerie. C'était d'autant plus remarquable qu'il était aussi délicat et subtil qu'un éléphant dans un magasin de porcelaine. King, tout comme son père, aurait préféré qu'il développe un talent pour la stratégie, l'intimidation ou la diplomatie mais c'était tout l'inverse.

Il avait déjà vérifié les cachettes habituelles autour du château : les faux plafonds, le puits, les conteneurs d'armes, le garde-manger, l'étable et les divers coffres au trésor où il lui arrivait de s'enfermer. Ça aurait été trop facile, maintenant le petit prince d'Onigashima était habitué à ce qu'on le poursuive et faisait en sorte d'avoir une longueur d'avance en matière de cachette. Mais King était persévérant : il finissait toujours par le trouver. La plupart du temps, c'était par hasard.

King affectionnait l'isolement et choisissait les endroits les plus reculés de l'île pour se reposer. Il arrivait que lui et Yamato aient la même idée au même moment et qu'ils se tombent dessus quand King espérait être seul. Il menait donc ses recherches avec cette idée en tête : tout ce qui lui semblait tranquille et apaisant devait être inspecté.

Il se concentra sur les environs du village. Yamato préférait éviter le château quand il le pouvait, pour rester loin de son père et de son entourage. King avait espéré que la compagnie de Jack, Ulti et Page One l'aurait assagi mais il ne s'entendait avec aucun d'entre eux. Au contraire, les mettre tous les quatre ensemble dans la même pièce c'était créer un problème.

Il interrogea les rares hommes et femmes de l'équipage qu'il pouvait croiser et leurs indications approximatives le conduisirent hors du crâne, loin des environs du palais. Yamato devait errer dans la forêt quelque part. Il n'était pas étonné, plus il grandissait plus il cherchait à s'approcher de la côte. Il espérait certainement prendre la mer pour quitter Onigashima d'ici peu. King lui, priait pour qu'il ne mette jamais les pieds dans un canot ou une barque, sans quoi il coulerait avant même de voir la terre de Wano. Et il n'avait pas du tout envie d'annoncer à Kaido que son fils avait fait naufrage.

Il s'avança dans les bois en ayant l'impression d'avancer dans les hautes herbes. Il n'allait jamais le retrouver à ce train là. Il décolla et scruta la forêt avec ses yeux de rapace. Il savait que si Yamato était dans le coin, il ne lui échapperait pas.

Comme il s'y était préparé, un éclair blanc attira son attention quelque part dans les fourrés. Il piqua pour l'attraper mais le manqua de peu. Il eut tout juste le temps de voir une boule de fourrure filer dans une crevasse, logée entre deux rochers millénaires que même Kaido n'aurait pas pu déplacer à mains nues. Il serra les dents. Des fois, sa taille était un handicap vraiment frustrant.

Il changea de stratégie. Il s'accroupit près de l'entrée de sa cachette et tenta de l'avoir par le dialogue.

— Je t'ai vu, sors de là.

La seule réponse qu'il obtint fut le son d'un grattement frénétique alors que Yamato s'enfonçait plus profondément dans son terrier.

— Écoute, soit tu sors de ton plein gré, soit je t'enfume jusqu'à ce que tu ne puisses plus respirer.

Il n'avait pas l'intention de faire ça, le risque de le tuer était trop grand, mais il espérait faire appel à son instinct de survie.

— La mort avant la reddition ! Hurla-t-il depuis son trou.

— D'accord, s'exaspéra King. Puisque tu m'y oblige.

Il s'allongea sur le sol — soulagé que personne ne le voit dans cette position — et enfonça son bras jusqu'à l'épaule à l'intérieur de la crevasse. Tâtonnant dans tous les sens pour trouver Yamato. Il pouvait l'entendre creuser pour se tenir le plus loin possible.

— C'est étroit là-dedans, tu vas rester coincé avec tes conneries, se fâcha King.

— Super, ça me changera de rester coincé dans un cachot ! Grogna la petite voix en réponse.

Quelle tête de mule. King tira sur son bras le plus possible et sentit enfin ses doigts frôler quelque chose de chaud et de maigrichon.

— Ah, je te tiens !

Il referma sa poigne sur ce qu'il imaginait être un bras ou une jambe. Il entendit un grognement et le sentit se débattre au bout de ses doigts. Il n'avait plus qu'à le faire sortir. Il tira doucement, il ne voulait pas lui arracher les membres. Yamato luttait pour le faire lâcher mais il n'avait pas encore la force nécessaire.

— Allez, arrête ton cirque et sors de là.

— Non !

— Yamato, sérieusement, ça commence à bien f… AH ! S'écria-t-il alors qu'une vive douleur le lançait sur le pouce. Fils de… !

Il avait l'impression de se faire lacérer la chair malgré la présence de ses gants de cuir. King n'était pas encore habitué au nouveau pouvoir de Yamato et il avait tendance à oublier qu'il était capable de se transformer, lui aussi. Ses petits crocs étaient jeunes mais suffisamment puissants pour lui transpercer la peau. Et sa peau était très solide. Vexé par cette blessure, il l'extirpa d'un coup hors du trou.

Il se releva, observant le petit loup blanc enragé qui lui mordait la main en grondant.

— Tu es insupportable, grommela King.

Il le força à le lâcher de son autre main et l'attrapa par la peau du cou. A présent, Yamato n'était plus qu'un chiot inoffensif qui battait des pattes en hurlant.

— Tu vas la fermer oui ?

— Lâche moi ! Je suis Oden ! Je vais te faire voir la puissance des samouraïs !

Pour prouver ses dires, il lui cracha un vent glacé au visage. King se retrouva gelé une demi-seconde avant de tout faire fondre.

— Fais marcher ton cerveau je t'en supplie. Si jamais tu en as un, se moqua-t-il. Allez, je te ramène au bercail.

— Non ! Lâche moi, je te déteste, retourne faire le bon chienchien pour mon père !

King soupira et décolla loin de la forêt.

/

Yamato n'avait plus dit un mot depuis que King était revenu au château en sa compagnie. Il avait d'abord eu l'intention de l'amener à son père pour se venger de la morsure sanglante qu'il avait sur le pouce. Mais très vite, il avait changé d'avis. Kaido était toujours avec Orochi, et probablement toujours saoul comme une barrique. Et aux rires qui lui parvenaient de l'autre côté de la porte de la salle des invités, l'empereur avait certainement oublié avoir réclamé son fils quelques minutes plus tôt.

A la place, il avait entraîné le prince avec lui jusque dans les cuisines afin de lui faire manger un truc consistant. Yamato était coutumier des privations de nourriture et, King l'avait constaté après l'avoir tenu à bout de bras, il était bien trop maigre pour son âge. C'était difficile de ne pas le prendre en pitié. King ne l'aurait jamais admis à voix haute mais ça ne lui plaisait pas de voir ce gosse — aussi pénible soit-il — dans un état aussi misérable. Ca lui rappelait trop de mauvais souvenirs.

Yamato n'avait pas essayé de s'enfuir, la perspective de manger chaud était trop tentante pour qu'il continue de lui tenir tête. Mais on pouvait voir sur son visage qu'il avait honte de céder aux sirènes de la faim. Son admiration pour Oden et les principes de vie des samouraïs l'aidait à tenir tête à son père mais le faisaient aussi culpabiliser de ne pas être de taille face à ses sanctions.

— Attends moi là, lui dit-il en lui désignant un banc où s'installer pendant qu'il donnait ses instructions au cuisinier.

Yamato prit place sur le banc sans broncher. Laissant King l'observer plus attentivement. A treize ans, il paraissait en avoir neuf. Il avait des joues creuses et des yeux cernés qui avaient complètement effacé son visage rond d'enfant mais il était tout petit. Ses bras noueux et ses jambes maigrichonnes refusaient de grandir. A force de rester enfermé dans ses caves sombres et de se cacher dans les faux plafonds, sa peau était d'une pâleur maladive, très loin du teint mat de son père. Ses cheveux étaient très longs et ne semblaient pas vouloir s'arrêter de pousser mais ils étaient si emmêlés que King ne doutait pas de la vie qui devait exister dedans sans que Yamato en soit conscient. Il n'avait pas seulement besoin de manger, il avait aussi besoin de sauter à pieds joint dans une baignoire.

Après quelques minutes, le cuisinier revint avec un plateau garnis des mets préférés de King. Un grand bol de nouilles udon au curry et du poisson volant grillé, à déguster comme bon lui semblait. Il congédia les gardes et le cuisinier pour qu'on les laisse seuls, récupéra tout ce qu'il put et revint à la table de Yamato. Il ne pouvait pas lui donner sa propre assiette, au cas où son père ou Queen débarquait dans la pièce. Il ne voulait pas avoir l'air de désobéir aux ordres. Par contre, il pouvait laisser Yamato piocher dans son plat autant qu'il le voulait. Comme ça, il leur laissait la possibilité à tous les deux de nier avoir mangé ensemble.

L'adolescent avait les yeux brillants devant l'abondance de nourriture qui se trouvait face à lui mais il ne bougeait pas d'un poil. Il redoutait un piège.

— Mange, avant que je change d'avis, dit King en prenant sa forme hybride.

Yamato ne se fit pas prier. Il ignora le monstre reptilien qui lui faisait maintenant face et attrapa un énorme poisson pour le ronger avec appétit, arrachant sans mal la chair des os. Comme la plupart des zoan, il avait tout d'un ogre quand il mangeait.

King se demandait à quand remontait son dernier vrai repas. Kaido le punissait toujours en le laissant sans manger pendant plusieurs jours. King savait que Kaido avait lui-même peu apprécié de sauter des repas dans sa jeunesse et il espérait sans doute en faire une punition efficace mais il sous-estimait son fils. Ils avaient les mêmes gènes après tout, Yamato était increvable lui aussi. Malgré tout, King ne pouvait pas s'empêcher de penser que l'aspect miséreux du prince ne convenait pas à son rang.

Lui même n'avait pas très faim et il détestait se transformer pour manger mais il n'avait pas le choix tant qu'il serait dans la cuisine, à proximité de regards indiscrets. Il commença par ses nouilles au curry, laissant Yamato dévorer tout ce qu'il pouvait jusqu'à ce qu'il soit rassasié.

Son bec était pratique pour engloutir la nourriture en une fois mais il n'en retirait aucune satisfaction, le goût des aliments lui échappait totalement quand il était sous sa forme de ptéranodon. Mais il ne pouvait vraiment pas dévoiler son visage. Il ne craignait pas vraiment que Yamato le balance à qui que ce soit, mais il n'avait aucune confiance en le reste de l'équipage de Kaido. La plupart d'entre eux étaient ici par appât du gain et ne manqueraient pas l'occasion d'emmerder le lunaria ou de propager la rumeur de son existence s'ils la découvraient.

— C'est dégueu comment tu manges, lui lança Yamato, lui-même couvert de miettes de la tête aux pieds.

— Tu t'es vu ?

— Moi je suis affamé. Toi t'es juste moche.

King pouffa de rire.

— C'est pas comme ça qu'on dit "merci", ingrat.

— Je t'ai rien demandé, j'ai pas à te dire merci.

Son petit ton faussement brave amusait King. Il faisait le malin, mais il y avait trop longtemps qu'il n'avait pas parlé à qui que ce soit pour partir. Même s'il ne s'en donnait pas l'air, ça se voyait qu'il était content d'avoir une conversation qui n'était pas une dispute.

— Je sais bien que tout ce que tu veux c'est me punir, dit-il en mordant dans la chair de poisson. Je profite de manger avant de prendre une raclée, c'est tout.

— Détrompe toi. Tu as mis Queen en pétard, ça me suffit pour te foutre la paix.

Le regard de Yamato était toujours farouche mais ses petites épaules se décrispèrent. King pouvait le trouver exaspérant, il ne pouvait pas nier que sa ressemblance avec son père le rendait sympathique à ses yeux. Yamato détesterait certainement qu'on lui fasse la remarque alors il préféra garder cette réflexion pour lui, mais la parenté était flagrante. Il avait le même regard sévère et la même expression crispée que Kaido.

— Qu'est-ce que tu lui as fait au fait ? Demanda King.

— A qui ? A Queen ?

— Ouais.

— Pff, rien, dit-il en haussant les épaules. Une bouteille pleine de je ne sais pas quoi est tombée au moment où je passais et ça a explosé. Il a cru que c'était moi. Fin de l'histoire.

— Une bouteille ? S'inquiéta King. Du genre des bouteilles qu'il utilise pour ses armes bactériologiques ?

— J'en sais rien moi.

King se prit la tête dans la main. Il se jura d'étrangler Queen dès qu'il en aurait l'occasion. Heureusement qu'il n'avait été en contact avec personne en dehors de lui.

— Super, soupira-t-il. Bon, lâche ton poisson.

— Aha ! Je savais que c'était qu'une question de temps avant que tu m'en prives !

— Tu prendre un bain MAINTENANT. Avant de contaminer toute l'île avec je ne sais quelle saloperie.

/

Après un combat acharné, King avait réussi à jeter Yamato dans un bain d'eau chaude avec l'aide des quelques courtisanes qui avaient été rapatriées depuis Wano pour les servir. Il les avait briefées sur la situation et toutes avaient pris les précautions nécessaires avant de veiller à ce que Yamato se lave des pieds à la tête, afin d'éviter toute contamination. Lui savait qu'il ne risquait rien et n'était pas inquiet mais il avait été surpris par l'attitude de ses femmes. Elles s'étaient attelées à la tâche avec des gestes automatiques plein d'habitude qui en disaient long sur l'état de leur pays, quasiment privé d'eau potable. Yamato avait craché et mordu comme un chat sauvage en hurlant "Je suis Oden !"à qui voulait bien l'entendre mais c'était calmé à la vue des civils.

Il voulait bien se rebeller contre son père et ses lieutenants mais ne supportait pas d'attirer des ennuis à ceux qui n'avaient pas choisi de travailler sous les ordres de Kaido. En ça, il avait bien l'esprit chevaleresque des samourais. King se sentait parfaitement impuissant face à son obsession pour Oden.

De tous les hommes qu'il aurait pu choisir pour idole, pourquoi avait-il fallut que son choix se porte sur Oden ? Kaido pensait que c'était une façon pour lui de défier son autorité mais King n'en était pas sûr. Yamato avait commencé à singer Oden très tôt — en plus des autres signes qui leur avait fait comprendre qu'il était bien un garçon — et n'avait jamais manifesté d'animosité réelle pour son père avant qu'il se mette à le punir. Au contraire, comme tous les enfants, il avait cherché son approbation et son affection mais Kaido n'avait jamais eu beaucoup de temps pour lui.

Il lui avait expliqué son désir de le voir devenir fort pour être digne de lui et de son empire et Yamato, indéniablement costaud pour son âge, n'avait commencé à vraiment se rebeller qu'après le meurtre des daimyos emprisonnés sur l'île. Maintenant, père et fils semblaient irréconciliables.

King se sentait bizarrement concerné par le sujet. Il avait l'impression que c'était sa responsabilité de ramener Yamato sous la bannière de son père. Ou du moins, l'aider à faire ce qu'on attendait de lui et peut-être apaiser les tensions entre eux. Il avait une idée, peut-être pas une bonne idée, mais cela permettrait à Yamato d'avoir un cadre de vie plus stable.

— J'ai une proposition à te faire, déclara-t-il très sérieusement à un Yamato qui sentait enfin le savon.

— Ça m'intéresse pas, grogna-t-il.

— Si tu tiens vraiment à devenir un samouraï, si, ça devrait t'intéresser.

Yamato se tourna vers lui, méfiant mais intrigué.

— Au lieu de courir dans tous les sens toute la journée et de te rouler dans la boue comme un clébard, il serait peut-être temps que tu te disciplines un peu.

— Va te faire voir, dit-il en lui tournant le dos.

— Dire que tu admires Oden c'est une chose, mais il serait peut-être temps que tu sois au moins capable de l'imiter un minimum en combat. Et pour ça, il faut que quelqu'un t'enseigne les bases.

King avait l'impression de commettre un crime de lèse-majesté rien qu'en prononçant ces mots mais il n'avait pas le choix s'il voulait l'appâter.

— Qu'est-ce tu essayes de me dire ? Demanda Yamato, de plus en plus perdu.

— Je te proposes de t'apprendre à te battre correctement. A prendre ou à laisser.

Tous les deux se défièrent du regard quelques secondes. Yamato avait l'air d'hésiter. Il était trop au courant de sa loyauté à Kaido pour lui faire confiance.

— Tu sais que si j'apprends quoi que soit, je m'en servirai contre mon père ?

— C'est pas avec trois leçons d'escrimes que tu attendras ton père, je m'inquiète pas. Le but c'est de te former à devenir son successeur. Et moi je m'en fous que ton idole soit Oden, tant que ça t'aide à te motiver ça me va.

Il fit une pause, le temps de laisser Yamato réfléchir. Il était surpris ; jamais il n'auraiit pu imaginer qu'on lui donnerait une telle opportunité et ça devait lui poser un gros problème. S'il disait oui, il acceptait de se suivre les instructions de King et par extension : d'obéir à son père. Mais il se donnait aussi les moyens de lui tenir tête.

King pouvait presque entendre les rouages s'activer dans sa tête.

— Alors ? S'impatienta-t-il. C'est oui ou c'est non ?

— D'accord, finit-il par dire. Je veux bien essayer.

— Parfait. On commence demain.

/

— Hahaha, c'est tout ? Tu peux pas faire mieux que ça ?

— TU VAS VOIR ESPÈCE DE GROS PIAF ! Hurla Yamato.

Une pichenette avait suffit à King pour l'envoyer valdinguer cul par dessus tête à l'autre bout du terrain d'entraînement. Il s'était promis d'y aller mollo mais l'acharnement féroce de Yamato l'avait convaincu qu'il était assez résistant pour qu'il se permette de lui montrer l'étendue de sa force.

— Arrête de me foncer dessus comme un idiot, réfléchis un peu.

— C'est pas juste, t'es gros comme une montagne et moi je suis tout petit !

— Ça n'a pas empêché Oden d'attaquer ton père, dit-il avec malice.

L'argument fit mouche. Yamato grogna, se releva avec dignité et s'en alla chercher une nouvelle arme pour l'affronter. Comme King l'avait prévu, il s'empara d'un sabre bien trop lourd pour lui et le brandit avec bravoure. King secoua la tête.

— C'est trop tôt pour les sabres, pose ça.

— T'as peur de te faire trancher peut-être ?

— Le seul à qui tu vas faire mal c'est toi, tu le tiens pas bien et il y a trop d'ouvertures.

Yamato hésita mais tenta un nouvel assaut. Il sauta pour atteindre sa tête et lui porta un coup qui lui aurait peut-être fait mal s'il avait eu à faire à un adversaire plus chevronné. Il ne bougea pas d'un poil et laissa Yamato lui abattre la lame sur le visage. Une brève lueur de contentement parut dans ses yeux en voyant qu'il l'avait touché, elle disparut aussitôt face à l'absence totale de dégâts que son attaque avait provoqué.

— Je te l'ai dit, trop d'ouvertures, dit-il avant de frapper Yamato droit sur le flanc et de l'envoyer à nouveau dans le décor.

Yamato poussa un cri alors que la poussière s'élevait autour de lui.

— Tu n'arriveras pas à me blesser. Tu veux brûler les étapes. Écoute ce que je te dis un peu.

— Mais ils sont nuls tes conseils, tu veux juste me ridiculiser !

— Non, tu le fais très bien tout seul, se moqua King. Que ça te plaise ou non, il faut que tu apprennes à tenir ta garde, à parer et à encaisser.

Yamato se releva, boudeur. Comme tous les gosses, il voulait tout, tout de suite et était incapable d'entendre qu'il n'allait pas devenir un champion du sabre avant la fin de la journée.

— Il faut que tu prennes tes marques avant de choisir un style de combat. Et que tu ne comptes pas uniquement sur ton fruit du démon. Tout ce que je veux que tu fasses aujourd'hui, c'est me voir venir, contrer mon attaque et rester sur tes deux pieds en le faisant. N'essaye pas de riposter, contente toi de résister.

— Tu cherches juste un prétexte pour me taper dessus, avoue-le.

— Je te signale que c'est toi qui m'attaque depuis qu'on a commencé.

— C'est ça, tout est de ma faute, grommela-t-il de mauvaise grâce.

Il se releva, un peu dépité. King ne pouvait pas se permettre de le décourager mais il ne pouvait pas lui faire de cadeau non plus. Pour que cet entraînement soit efficace, il fallait qu'il se prenne quelques déceptions en pleine tête.

— C'est bon, on fait une pause, déclara-t-il. Tu tiens déjà plus debout.

Il invita Yamato à le rejoindre d'un signe de la main. Il avait amené de quoi manger avec lui. C'était comme ça qu'il comptait le garder, avec la promesse de le nourrir à chaque fois qu'il se présenterait à leur entraînement.

Yamato oublia très vite sa contrariété et fonça sur le bol de soupe de haricots rouge bien chaude qui n'attendait que lui. Il se baffra avec énergie, comme le jeune chien fou qu'il était et King attendit patiemment qu'il retrouve ses forces avant de retenter la pédagogie.

— Est-ce que mon père sait que tu m'entraînes ? Demanda-t-il soudainement, le prenant au dépourvu.

— Non. Je ne lui en ai pas parlé.

Il aurait certainement dut le faire avant de commencer mais il n'avait pas trouvé le bon moment. Kaido était encore saoul la dernière fois qu'il l'avait vu et il avait prétexté préférer lui en parler quand il serait enfin sobre. Mais quelque part, il savait qu'il repoussait cette discussion parce qu'il connaissait déjà l'opinion de son capitaine et il n'approuverait jamais sa décision. Ni le fait qu'il l'avait prise sans le concerter.

Yamato le dévisagea puis termina son repas, visiblement étonné d'apprendre que King faisait ça sans avoir l'aval de son père. Cet aveu les mit mal à l'aise tous les deux. King n'était pas sûr de savoir où se situait la gêne de Yamato mais il cernait bien la sienne. Il manigançait dans le dos de Kaido et il n'aimait pas ça. Est-ce qu'aider Yamato était le bon choix pour servir les intérêts de son capitaine ? Il connaissait les projets de Kaido au sujet de son fils et n'avait pas l'impression de les trahir en prenant cette décision mais il se sentait traître malgré tout.

Et l'allure de Yamato — petit, maigre et enragé — en plus de son entêtement à s'accrocher à une idole disparue, avaient sûrement quelque chose à voir dans sa décision. Mais puisqu'il ne pouvait plus reculer, il tiendrait parole et ferait du fils de son capitaine autre chose qu'un cafard rampant dans l'ombre.


Et c'est fini pour aujourd'hui. King n'est pas doué pour s'occuper d'un ado, c'est le moins qu'on puisse dire, mais pour moi ça colle bien avec le respect qu'il éprouve pour Katakuri. Lui aussi essaye de rabibocher Yamato et son père, à sa façon, tout en sachant qu'il risquerait se faire engueuler pour ça.

Dans deux semaines on revient au présent et d'ici peu, il devrait y avoir un peu d'action et de drama. Pour le meilleur bien sûr !

Petite parenthèse, j'ai écrit King qui mange sans enlever son masque parce que je sais toujours pas si Yamato l'a déjà vu sans ou pas. On va dire que à ce moment là, il l'a pas vu.

Bref, on se retrouve le 7/05 !

Et au cas où ca fait trop long à attendre, et s'il y a des fans de KidLaw dans le coin, j'ai écris un OS tout mims où Law est une sirène et il est dispo sur AO3 et ici, sur ffnet (cherchez "Law Esculape" et vous trouverez je pense). N'hésitez pas à aller jeter un coup d'œil !