Au sud de Crocus, capitale du pays de Fiore, est situé l'orphelinat de Florage. Ce dernier était en ce moment très calme, car c'était l'heure des histoires. Assise sur une chaise, une jeune femme aux cheveux châtain attachés en une longue tresse avait dans les mains un livre qu'elle s'apprêtait à conter à son auditoire juvénile.

- Autrefois, il existait un mage noir du nom de Zeleph. Grâce à ses grands pouvoirs, il s'était crée une armée de démons et il voulait conquérir le monde avec. Cependant, un groupe de mage héroïque parvint à arrêter l'Armée Noire. A travers tout le pays, les femmes et les hommes, menés par les mages de Fairy Tail sont parvenus à battre les démons, au prix de beaucoup des leurs. Il ne restait finalement que leur maître, Zeleph le mage noir. Pour le combattre, les mages envoyèrent le plus puissant d'entre eux l'affronter. C'était son propre frère, Natsu, le chasseur de dragon de feu qui se présenta donc devant Zeleph.

Un jeune garçon aux yeux aussi noirs que ses cheveux hérissés s'était levé et jeté sur la jeune femme, manquant de lui faire tomber le livre des mains.

- Dit. Natsu il le bat à la fin ?

Le corps tordu afin d'essayer de lire la fin de l'histoire, le jeune garçon tentait de s'emparer du livre, luttant contre la conteuse pour sa possession. Handicapé par sa petite taille, le jeune garçon fut vite remis à sa place par la femme à la tresse.

- Tu le sauras si tu écoutes la suite Falcon.

L'heure de la sortie mit cependant fin aux histoires, ce qui n'était pas du goût de Falcon. S'emparant d'un manteau rouge qui traînait par là, il se hissa sur une chaise et déclara avec ferveur.

- Je suis Natsu, et je suis le plus fort des mages. Rend toi Zeleph.

Il avait prit pour cible un de ses camarades. Habillé de noir, il était naturel que ce soit lui qui joue le rôle du méchant. Sous le regard souriant de leur gardienne, les jeunes garçons faisaient semblant de se battre et de se lancer des sorts. Rapidement, ils se montrèrent de plus en plus doués à singer un combat, jusqu'à faire douter les spectateurs de la réalité de l'altercation. La jeune femme se rua entre les deux et, tant bien que mal, parvint à les séparer, au prix de sa coiffure.

Les larmes aux yeux alors qu'elle remettait ses cheveux en place, la jeune femme avait puni les deux garnements, ne sachant pas lequel avait envenimé les choses. Ce qui ne satisfaisait aucun des deux garçons.

- Mais Livitha, on n'a rien fait.

- On jouait.

Insensible à la négociation des deux pensionnaires, Livitha les laissait à l'intérieur pendant qu'elle surveillait les autres qui jouaient dehors. Elle avait conté à de nombreuses reprises des histoires similaires, et à chaque fois, c'était Falcon qui montrait le plus d'entrain. Parfois même trop. Après avoir écouté les fables des guildes d'antan, il se prenait toujours pour un mage et répandait le chaos. Il effrayait ainsi les enfants, Livitha, et de potentiels parents.

Jours, semaines, puis mois passaient avec à chaque fois le même dénouement, Falcon restait à l'orphelinat, séparé de ses anciens camarades. Il ne semblait pas en être affecté puisqu'il avait toujours la même joie lorsque venait le temps des contes. Il apprit ainsi l'histoire de Fiore, transformée en récit de légende par Livitha, car c'était là le seul moyen qu'elle avait trouvé pour leur donner des cours. Certainement que malgré elle, la jeune femme avait été vague dans ses récits, car Falcon en était venu à la questionner de plus en plus.

- Dit, pourquoi les guildes de mages ont été interdites si c'est elles qui ont chassé les démons ?

- Parce qu'au départ, c'est avec la magie que Zeleph a crée les démons. Alors il a été décidé que c'était trop dangereux de laisser à tous le loisir d'utiliser la magie.

- Mais les gens comme Zeleph, ça arrive pas souvent. Et si y a des mages pour l'arrêter, ça ira.

Un sourire tendre au coin des lèvres, Livitha pencha la tête sur le côté.

- C'est un autre point de vue.

- Oui bah c'est nul.

Livitha ébouriffa les cheveux du jeune homme pour l'empêcher de faire la moue.

- Tu n'as vraiment pas de chance.

Les yeux grands ouverts, Falcon fixait sa gardienne.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Rien, ce n'est rien.

Sans y réfléchir davantage, Falcon quitta la compagnie de la jeune femme qui le regardait partir. Le seul moyen pour lui d'être comme les héros qu'il admire serait de rejoindre le Conseil ou le Dark Chess. Ces deux options n'avaient que peu en commun avec ce que Falcon avait en tête quand il parlait de guilde.

Heureusement pour Falcon, il n'eut pas à choisir, car apparemment, il n'avait aucune prédisposition à la magie. Il avait pourtant essayé plusieurs fois de créer des cercles, mais, sans formation ou motivation préalable, la magie restait impossible.

Sans fantaisie, Falcon demeura donc à l'orphelinat, passant de trop agité à trop grincheux, puis à trop vieux pour intéresser une famille. Il devint rapidement plus qu'un pensionnaire, mais un assistant de Livitha pour encadrer les nouveaux arrivants.

Au cours de sa dix-septième année, c'est Falcon qui restait pendant que Livitha partait faire des achats. En l'absence de cette dernière, de potentiels parents visitaient l'institut sous l'œil de Siward, le vieux propriétaire du bâtiment. Un vieil homme au crâne dégarni mais coiffé d'une couronne de cheveux blancs ainsi que d'une forte odeur de papier neuf et d'encre métallique qui semblait le suivre partout où il allait.

Pendant que certains semblaient avoir fait leur choix et attendaient de remplir certains papiers, un homme d'âge mûr dont la nuque-longue grisonnante s'agitait au gré du vent entra silencieusement dans l'orphelinat. Du coin de l'œil, le propriétaire remarqua le nouveau venu et commençant alors à se triturer les ongles en regardant autour de lui. Portant un uniforme militaire blanc orné d'une bandoulière de cuir, il n'y avait aucun doute sur le fait qu'il provenait du Conseil Magique. L'arrivant s'approcha de Siward et lui murmura quelques mots à l'oreille, de manière à ne pas être entendu.

- C'est bientôt la Cérémonie de Sothakal, combien en avez-vous cette année ?

Le regard de Siward hésita quelques instants en passant sur les jeunes garçon présents dans la salle, y compris Falcon, qui comprenait que quelque chose clochait, que cet homme n'apportait pas de bonnes nouvelles et la ceinture ornée d'un poignard du militaire ne faisait rien pour le rassurer.

- Cela fait déjà sept ans ? Ils ne sont que trois à avoir plus de dix ans, dont Falcon, le jeune homme là-bas, qui est né en neuf cent soixante-cinq.

La volte-face de l'inconnu ne faisait rien pour rassurer Falcon qui se dirigea alors vers les deux adultes, les poings serrés pour calmer ses mains tremblantes. Son regard défiait celui de l'inconnu qui n'avait cependant rien de malicieux, mais simplement l'ennui de quelqu'un qui faisait son travail. Observé sous toutes les coutures par le vieil homme qui semblait perdu dans ses réflexions, Falcon commençait à perdre patience.

- Vous regardez quoi là ?

Surpris par l'attitude du jeune garçon, le vieil homme leva la tête et gardant ses yeux dans ceux du jeune garçon, donnant à ce dernier la désagréable sensation d'être jugé. Il secoua ensuite la tête et reprit un faciès neutre avant d'entamer la conversation.

- Pardonne mes manières jeune homme. Je me nomme Athelstan, je suis envoyé par l'empire pour recruter les déshérités pour l'armée impériale. Alors je me demandais si…

- Les déshérités ? Vous parlez de qui là ?

- Et bien, les gens comme toi, les orphelins, les abandonnés, ceux qui ne manqueront à personne si jamais leur carrière militaire était tragiquement… écourtée. Tu comprendras donc que les orphelins sont des recrues de choix pour nous.

Les articulations blanches à cause de ses poings serrés, Falcon se retenait de ne pas sauter à la gorge d'Athelstan afin de ne pas attirer de problèmes à l'institut. Mais la manière qu'avait cet homme de les considérer comme de la chair à canon semblait avoir allumé une flamme dans le coeur de Falcon.

- Mais le plus vieux après moi ici à onze ans, il n'a aucune envie de s'enrôler dans l'armée.

- Ce n'est pas un enrôlement jeune homme, c'est une conscription. Je ne vous demande pas votre avis, l'Empire vous recrute dans son armée, vous devrez être prêt d'ici la fin de la semaine.

Athelstan fit alors demi-tour en se raclant bruyamment la gorge. Le regard noir qu'il jeta sur Siward lui fit bien comprendre que ce dernier serait tenu pour responsable si tout ne se passait pas comme prévu et que lui et l'orphelinat aurait à en subir les conséquences.

Une fois le militaire disparu derrière les portes, Falcon se retourna vers Siward qui affichait un sourire gêné et compatissant.

- C'est nécessaire pour que l'orphelinat continue d'exister mon garçon. Nous ne sommes pas les seuls à laisser ainsi partir…

- Vous ne les laissez pas partir, vous les vendez comme des objets.

Les yeux clos, le vieil homme tenta de poser sa main sur l'épaule du garçon aux cheveux hérissés, mais ce dernier le repoussa d'un mouvement de torse. Son regard tourné vers le sol, Siward laissa partir Falcon et continua, d'une voix monocorde.

- Tu es jeune, tu comprendras que rien n'est gratuit et que nous avons tous quelque chose à nous reprocher.

Sans prêter attention aux derniers mots de Siward, Falcon regagna son poste, continuant de surveiller les jeunes alors que les potentiels parents reprenaient une activité normale après avoir tourné leur attention vers Falcon et Athelstan.

De longues minutes plus tard, Livitha était de retour. Immédiatement assaillie par Falcon, ce dernier lui fit un compte rendu de ce qu'il s'était passé pendant son absence et lui demandait si elle était au courant.

- Falcon, si nous refusons de faire cela, l'orphelinat ne pourra plus exister. Est-ce que tu sais combien d'enfant nous aidons chaque année, alors qu'une infime partie se retrouve enrôlée dans l'armée ?

Bouche bée, Falcon ne comprenait pas comment il pouvait être le seul à trouver cette situation anormale, comment l'on pouvait envoyer à la mort ainsi des enfants sous prétexte d'en sauver davantage.

Ses inamovibles idéaux en tête, Falcon erra dans les environs de l'orphelinat le restant de la journée, cherchant de lui-même une solution à cette aberration tout en se demandant comment ils avaient pu en arriver là.

Bien plus vite que le jeune homme ne l'aurait voulu, Athelstan était de retour, et les jeunes garçons supposés partant étaient prêts, sauf Falcon. Afin d'éviter tout problème, Siward envoya Livitha à la recherche du jeune homme qui demeura malgré tout introuvable. Agacé et se mordant les lèvres, Athelstan semblait rendre responsable Siward de l'absence de Falcon.

- Je n'ai pas toute la journée vieil homme, où est-il ?

La sueur s'écoulant abondamment de son front, le propriétaire était démuni, incapable d'en faire plus pour retrouver le disparu. Sur le point de quitter les lieux, Athelstan tomba alors sur le garçon tant recherché qui se tenait sur le pas de la porte, Livitha à bout de souffle derrière lui. Les yeux fixés sur ceux du militaire, Falcon semblait tendu, ses bras étaient raides et ses poings serrés.

- Ils ne partiront pas avec vous.

La main d'Athelstan recouvrit alors son visage puis se referma jusqu'à ne plus finir que par lui pincer l'arête du nez. Il regarda ensuite vers le plafond tout en serrant le poing qui s'était formé devant lui.

- Soit tu viens avec nous, soit je t'arrête pour entrave à la fonction d'un agent de l'Empire. C'est ta dernière chance jeune homme.

Falcon sentit alors une main se poser sur son épaule, Livitha, au teint pâle, s'approcha alors de lui pour chuchoter.

- S'il te plaît Falcon, ne fait pas d'histoire, tu vas t'attirer des ennuis.

D'un mouvement d'épaule, le brun se dégagea de ce qui devenait une étreinte et s'avança vers l'envoyé impérial. Avant d'avoir pû faire quoi que ce soit, Falcon fut propulsé en arrière par un violent coup de pied du militaire. Les dents serrées, Athelstan s'avança, bien décidé à en finir avec ce dissident. Il rencontra Livitha sur le chemin, cette dernière recouvrant Falcon de son corps pour le protéger.

- S'il vous plaît, ce n'est qu'un enfant. Ne lui faites pas de mal.

- Écarte-toi femme.

Sans attendre la moindre réponse, Athelstan agrippa la longue tresse de Livitha et l'obligea à lâcher Falcon, en vain. Le serrant contre elle, le militaire ne pouvant atteindre le jeune homme sans passer par sa protectrice.

Soudainement soulagé de sa douleur au crâne, Livitha s'aperçut alors que l'envoyé de l'Empire l'avait lâché afin de prendre son arme à sa ceinture. Falcon, les yeux enfin ouverts, vit qu'un couteau quittait peu à peu son fourreau, et fut soudain prit d'une peur panique et parcouru d'un frisson, lui interdisant tout mouvement. Sa stratégie n'étant plus viable, Livitha se releva, écarta les bras et fit obstacle à Athelstan. Ce dernier portait son poignard pointe vers le haut et s'avançait lentement vers les deux jeunes personnes. Il agrippa le poignet de la protectrice et la tira en arrière, hors d'atteinte de Falcon auquel Athelstan tournait maintenant le dos.

Le sang glacé et transi de peur, Falcon ne parvint à bouger que lorsque la vie de Livitha fut menacée. Le militaire avait totalement oublié la raison de sa venue et souhaitant maintenant simplement se débarrasser des gêneurs, pour ce faire, il s'approchait de Livitha, le poignard à la main, prêt à frapper. La jeune femme désarmée ne put que lever le bras pour se protéger en attendant la sentence. Cette dernière ne vint cependant jamais, Falcon ayant attrapé Athelstan à la taille et le tirant en arrière. La gorge serrée et les larmes aux coins des yeux, Falcon se sentait responsable de la situation et ne voulait surtout pas que d'autres souffrent à cause de lui. Il voulait simplement que l'orphelinat soit libre de ce militaire, mais maintenant, son seul souhait était de sauver ceux qu'il avait mit en mauvaise posture en agissant de manière irréfléchie, et ce, à tout prix.

Dans un hurlement à arracher les tympans, Falcon usa de toutes ses forces pour empêcher Athlestan d'agir, mais sa frêle stature ne lui donnait pas la force nécessaire pour cela. Maudissant son impuissance, Falcon s'entêta malgré tout, suppliant tous les dieux de bien vouloir faire tout s'arrêter. Sa prière ne fut pas exaucée, du moins pas de la manière souhaitée. Sans le savoir, Falcon fit apparaître sous ses pieds un cercle magique de la couleur d'un ciel orageux. Ce dernier, exhalant une constante rafale de vent, fit se briser les vitres, s'éclater les portes contre les murs, et renversa tout ce qui pouvait l'être dans la pièce, fut-ce des meubles ou des personnes, à l'exception de Falcon et Athelstan. Le vent se mit alors à tournoyer, emportant tout ceux qui n'avaient pas réussi à s'agripper à quelque chose dans sa furie.

Soulevant Falcon et Athelstan du sol, les deux personnes entrèrent dans une vrille alors que Livitha les regardait s'élever dans une tornade qui prenait peu à peu une couleur noire, parcourue d'étincelles électriques. Falcon se refusait à lâcher son compagnon d'infortune, pensant que ce dernier avait plus de chance d'en réchapper. En se heurtant au plafond, la tornade avait atteint sa taille maximale et commençait maintenant à se tordre, comme un animal souhaitant passer par un trou trop petit, les éclairs se faisaient également plus présents, et menaçaient d'incendier le bâtiment de bois.

A bout de force, Falcon ne put s'empêcher de lâcher Athelstan, et, à sa grande surprise, ce dernier fut propulsé hors de la tornade, à travers les portes défoncées plus tôt par la rafale, il alla s'écraser dans le mur d'en face, creusant un cratère où il resta encastré. La tête de Falcon s'éclaircissant enfin, la tornade en fit de même et déposa en douceur son seul occupant. Falcon était bien la seule chose restée intacte dans le carnage, peu de meubles demeuraient entier, et tous étaient allongés, sinon assis.

Personne ne comprenait vraiment ce qu'il venait de se passer, et celle qui avait l'esprit le plus clair était Livitha, qui se précipita vers le jeune garçon regardant hébété autour de lui. Il appréhendait difficilement ce qu'il venait de réaliser, et surtout il ignorait comment cela était possible, car rien n'avait laissé présager qu'il était capable de magie. Il fut sorti de sa torpeur par la jeune femme qui posa ses mains sur ses épaules et lui dit avec une voix bien trop douce pour la situation.

- Falcon. Falcon ! Il faut vite que tu ailles préparer quelques affaires, il faut que tu partes.

Étrangement fatigué, le jeune garçon peinait à soutenir le regard de son interlocutrice et peinait à comprendre ce qu'elle disait. Elle jeta ensuite un rapide coup d'oeil pour s'assurer de l'état du militaire et, voyant qu'il était encore groggy mais se relevait doucement, elle secoua de nouveau Falcon pour qu'il suive ses ordres.

Des bourdonnements dans la tête et le souffle court, Athelstan ne s'était pas encore aperçu de son était en pensait toujours être dans la tornade. Alors qu'il attendait quelques instants que sa vue redevienne nette, il aperçut la silhouette de la jeune femme s'avancer lentement vers lui, droite et menaçante. Sans doute que c'était elle qui l'avait mit dans cet état lorsqu'il voulait s'en prendre au jeune garçon. Ou bien était-ce justement le jeune homme qui avait créé la tornade ? Lui aussi était prit dans le tourbillon, donc soit il ne contrôlait pas sa magie, soit il n'en était pas l'auteur.

Livitha ne laissait pas au militaire le loisir de la réflexion, arrivée à son niveau, elle le regarda de haut, une expression de dégoût sur le visage. Elle leva ensuite sa main vers lui, ce qui, parmi ceux connaissant la magie, était la menace d'un sort imminent.

- Partez maintenant. Vous êtes allés trop loin cette fois.

Ainsi c'était la jeune femme la mage, et le jeune garçon n'était qu'une victime collatérale ? Les instincts du soldat lui hurlaient le contraire mais il ne pouvait se permettre dans son état de mettre au défi la jeune femme d'exécuter sa menace. Le mur dans lequel il s'était écrasé lui apportait un profond soutien pour l'aider à se lever. Son dos lui faisait souffrir le martyre, mais il tentait de ne rien en faire paraître et reprit une posture fière.

- Vous avez choisi une vie où vous serez traquée et où la fuite sera votre quotidien. Pour sauver un seul garçon, vous avez compromis la sécurité de votre établissement.

- Cet orphelinat n'a rien à voir avec mes idéaux, j'ai travaillé ici pour sauver des vies, pas pour en faire perdre. Et si je ne peux plus le faire, alors autant partir.

Le visage impassible, Livitha prenait encore de haut Athelstan malgré sa taille modeste. Ce dernier ferma alors les yeux et quitta les lieux, bien décidé à revenir avec des renforts. Livitha ne lâchait pas le soldat des yeux, du moins jusqu'à ce qu'il soit hors de vue. Elle se rua alors vers l'orphelinat où Falcon avait enfin entendu l'injonction de la jeune femme et était parti rassembler ses quelques affaires. Elle en profita pour rassurer les enfants présents qui venaient de voir un homme attenter à la vie de leur gardienne et accessoirement pour la première fois une démonstration de magie de leurs propres yeux.

L'arrivée de Falcon marqua la fin du travail de Livitha, elle s'en alla ensuite voir Siward, un sourire gêné aux lèvres.

- Monsieur, je démissionne.

Un rire étouffé parvint à s'échapper des lèvres du vieil homme, mais ce dernier n'avait rien à dire de plus, et acquiesça en hochant la tête.

Le départ était précipité, aussi les au revoirs furent courts, la plupart des pensionnaires étaient dans l'incapacité de comprendre ce qui était en train de se passer et pensait que les Livitha et Falcon allaient vite revenir. Ils passeraient les prochaines semaines à comprendre que sans doute plus jamais ils ne reverraient les deux partants. Ces derniers quant à eux, prirent la direction opposée à celle d'Athelstan afin d'éviter de croiser les supposés renforts.

Après s'être assuré d'avoir laissé l'orphelinat loin derrière elle, Livitha attrapa la main de Falcon et l'obligea à s'arrêter. Le jeune homme se retourna, souhaitant connaître la raison de cette pause dans leur fuite. La tête baissée, Livitha ne pouvait se résoudre à affronter le regard de Falcon.

- Il va falloir qu'on se sépare maintenant.

Un sourire de façade était tout ce que pouvait proposer l'ancienne gardienne, mais des larmes s'ajoutèrent bientôt à son visage lorsqu'elle vit Falcon faire non de la tête en ayant lui aussi la tristesse au coin des yeux.

- Tu prendras la route du sud, par là il n'y a que des petits villages. Moi j'irais au nord vers Crocus, je me ferai voir là bas pour que les recherches se concentrent vers cette zone.

La voix tremblante de Livitha ne rassurait pas vraiment le jeune homme et il refusait de se séparer de sa gardienne. Se sentant de plus en plus responsable de la situation, il ne voulait pas que le destin de la jeune femme soit différent du sien, quoi qu'il arrive. Il sentit alors une forte pression sur ses épaules et le regard sûr de lui de Livitha.

- Tu te rappelle des histoires que je vous racontais ?

Opinant du chef, les larmes de Falcon semblaient disparaître peu à peu, suivant l'exemple de la jeune femme.

- Tu as des pouvoirs Falcon, et de nos jours, tu n'as pas beaucoup de choix. Soit tu rejoins le Dark Chess ou le Conseil et travaille pour eux, soit tu te laisses capturer. Ou bien, tu deviens le héros de ta propre histoire, et tu fuis. Trouve des gens comme toi avec qui tu te sentiras accepté, avec qui vous vous protégerez mutuellement.

En un ultime sourire, Livitha dissipa les doutes de Falcon et, avant qu'il ne s'en rende compte, le jeune homme était seul, son sac par dessus l'épaule. Surplombant une ville d'à peine quelques centaines de tête, il s'y traîna lentement, se demandant déjà ce qu'il advenait de Livitha alors que leur séparation remontait à quelques heures à peine.

Malgré l'enquête menée par le Dark Chess, aucune trace de Falcon n'a été trouvée puisque personne ne le connaissait en dehors de l'orphelinat. De son côté, Livitha avait été vue à Crocus quelques jours après les évènements mais restait introuvable. Les recherches pour Falcon furent abandonnées peu après, tandis que Livitha devenait un Mage Renégat de plus à retrouver. Libre de faire ce qu'il voulait, Falcon ne souhaitant cependant pas prendre de risque, il vivait comme un ermite à l'écart de toute grande ville.

La vie de Falcon fut ainsi celle d'un paria, il survivait comme il pouvait grâce aux larcins et parfois à la bonne volonté des villageois. Le jeune homme ne restait cependant jamais très longtemps au même endroit, car, par curiosité, il testait souvent ce que sa magie lui permettait, et cela s'était longtemps limité à la création de rafales et d'un couvert nuageux. Cependant, ces phénomènes suspects attirèrent rapidement l'attention et des membres de la Section de Traque du Conseil, ce qui forçait Falcon à fuir.

Cinq ans durant, le quotidien de Falcon était ainsi, il parcourait Fiore de long en large, et pas une fois il n'avait croisé un mage même solitaire. Tous ceux qu'il avait pu rencontrer étaient ceux du Dark Chess ou du Conseil. Les alliés introuvables et les années d'errance eurent vite fait de réduire à néant la foi que le jeune homme avait dans les histoires de Livitha. Les mages sont des hors la loi, ils ne se réunissent pas en formant des sociétés secrètes. Les guildes de mages n'existent plus, pas plus que Fairy Tail.