Après le départ de la famille Malfoy qui avait promis de venir le chercher dans l'après-midi, on l'avait amené dans le bureau du docteur Snape.
L'homme lui avait demandé de s'assoir en face de lui. Et lui avait fait le même speech que la veille : il était là pour l'aider et bla bla bla.
Harry se retint de lever les yeux au ciel lorsque l'homme s'excusa une autre fois pour ce matin. Soi-disant qu'il ne voulait pas violer son intimité.
S'il était si soucieux que cela, il ne se serait pas mêlé de ce qu'il pouvait faire ou non de son érection. L'homme n'était pas son maître et il n'avait aucun pouvoir de décision sur lui.
- J'ai l'impression que quelque chose t'agace Harry.
Sans blague ? Harry tourna son regard vers l'homme au nez tordu. Son visage n'exprimait que de la neutralité tandis qu'il l'observait, imperturbable.
- Es-tu en colère contre moi pour une quelconque raison ?
Harry hocha la tête, la mâchoire contractée.
- Est-ce que tu peux me dire cette raison ?
D'abord, Harry n'esquissa pas un mouvement avant de finalement se résigner à secouer la tête en soupirant. Comme il avait envie de lui claquer ses quatre vérités en pleine figure.
Il détestait le monde extérieur.
- Je vois. Est—ce que tu peux me l'écrire, demanda l'homme en lui tendant un petit cahier et un stylo.
Le petit brun contempla le stylo posé devant lui. Son maître n'avait jamais parlé de ça ! Est-ce qu'il en avait le droit ? Est-ce que ça ressemblait à parler ou c'était comme les mouvements de tête ? Il ne tenait pas à prendre le risque. Il ne voulait pas mettre son maître en colère. Il voulait être certain qu'il voudrait bien le reprendre après tout le tord qu'il lui avait causé. Il savait qu'ils avaient emmené son maître à cause de lui, parce qu'il avait osé venir le sauver. Il ne pouvait pas le trahir.
Severus ne dit rien pendant tout le processus de réflexion de son patient. Harry était vraiment très expressif.
- Je vais deviner dans ce cas. Ça irait comme ça ?
Le garçon hocha la tête, soulagé. Un soulagement qui n'échappa pas à Severus. Il lui faudrait les comptes rendus des témoignages du personnel de Jedusor pour en apprendre un peu plus sur le quotidien d'Harry.
- Es-tu en colère parce que je t'ai vu dans cette situation ce matin ? Non ? Alors… Est-ce que c'est par rapport à ce matin au moins ?
Un hochement de tête. Bien, ils avançaient.
- Tu n'a pas aimé quelque chose que j'ai dit ? Oui ? D'accord. Même si je ne sais pas ce que c'est, je m'excuse Harry, je ne voulais pas te blesser. Mon rôle est de t'aider à te sentir bien. Pour ça, on va devoir faire un travail d'équipe. C'est toi qui va aiguiller nos séances et si je dis quelque chose qui te déplaît, je veux que tu me le signal tout de suite, pour qu'on puisse se comprendre. Tu dois comprendre Harry que je ne sais pas ce que tu as vécu et que je ne peux pas savoir à l'avance quel sujet sera sensible pour toi. Tu comprend ?
Le garçon fronça les sourcils. Comment était-il supposé faire ça ? Le docteur ne savait rien de lui ? Grand bien lui en fasse, ça ne le regardait pas ! Et il n'avait pas à lui dire ce qu'il avait le droit de faire ou non pour commencer. Surtout quand c'était pour enfreindre les règles du maître.
Brusquement, Harry saisit le stylo et se décida pour une simple phrase, rédigée d'une écriture rageuse.
« Ne me dite pas ce que j'ai le droit de faire »
Le médecin lu ces mots a l'envers, les yeux vert tournés vers lui avec fureur. Il ne comprenait pas. Harry soupira une nouvelle fois et précisa.
« Ce matin, vous m'avez dit que j'avais le droit de me masturber. »
Il tourna son cahier vers l'homme aux cheveux noir cette fois-ci. Histoire d'être sûr que les mots soient lu correctement et compris comme ils devraient.
- D'accord, très bien. Je ne dirais plus rien sur tes droits ou interdits. Je ne voulais pas t'offenser, juste être sûr que tu n'étais pas mal alaise avec ton corps. L'adolescence, en particulier quand elle se passe comme la tienne, peut être un moment compliqué.
Harry hocha la tête et repris son cahier pour répondre.
« Je suis alaise avec mon corps. »
- J'en prend note.
L'homme n'était pas si terrible finalement. Il n'avait pas insisté pour faire valoir son point de vu. Et sa voix était calme, apaisante. Harry décida de ne pas le ranger dans une case tout de suite. Il verrait bien s'il tiendrait ses promesses.
Après un long silence, Severus se décida à lancer un nouveau sujet. Quelque chose de plus léger pour éviter d'énerver le garçon de nouveau. Il était enfin un peu détendu dans son bureau et il comptait en profiter.
- Tu es content d'aller chez les Malfoy tout à l'heure ?
Un haussement d'épaule. Harry avait un air ennuyé sur le visage. Il était presque…Maussade. Du moins, c'est le ressenti que Severus avait, et il ne se trompait que rarement.
- Tu préférerais rester à l'hôpital un peu plus longtemps ? Tu sais, nous pouvons aller à ton rythme.
Non, ce n'était pas du tout ce qu'il voulait. En fait, si Harry avait vraiment eu le choix, il serait retourné au manoir avec son maître. Mais cela ne faisait pas partie des options qu'on lui proposait.
« Narcissa a l'air gentille »
Il s'était contenté d'écrire une banalité. Mais il ne voulait pas aller sur ce terrain.
- Elle l'est, confirma Severus. C'est une bonne amie à moi, elle est très investie pour les enfants qu'on lui confie.
« Je ne suis plus un enfant »
- Qu'est-ce que tu es dans ce cas ?
Harry ne su quoi répondre. Il n'était plus un enfant depuis longtemps maintenant. Mais il ne se sentait pas adulte pour autant. Il était juste… Le Harry de son maître. Celui-ci ne mettait pas d'étiquette sur son âge. Il était, et c'était déjà très bien comme ça.
Il haussa les épaules.
- Je vois. Et Draco, tu l'as rencontré tout à l'heure. Il a ton âge. Est-ce que c'est un enfant ?
Harry se surprit à réfléchir sérieusement à la question. Il ne connaissait pas Draco. Il le trouvait beau, c'est vrai. Et il avait l'air gentil lui aussi. Mais c'était tout.
Il haussa les épaules de nouveau.
« Je ne le connais pas »
- Qu'est-ce qui caractérise un enfant selon toi ?
Il en posait de ces questions celui la ! Harry n'avait pas envie de réfléchir à tout ça. Il avait envie qu'on lui fiche la paix. Il se mit à frapper la table de manière régulière avec son stylo.
« Un enfant c'est innocent et vulnérable » finit il par écrire.
- Et toi, tu n'es pas innocent ?
Le faisait il exprès ? Il l'avait vu le matin même. Bien sûr qu'il n'était pas innocent.
« J'ai mal à la tête »
Il l'avait dit pour écourter la conversation qui l'ennuyait. Mais ce n'était pas un mensonge. Il ne disait pas de mensonges, jamais. Même pas par omission. Avec son maître en tout cas.
- Je vais te laisser regagner ta chambre. Mais je suis content d'avoir discuter avec toi. Est-ce que tu veux un peu d'aspirine avant de partir ?
Il avait acquiescé. Ça ne pourrait pas lui faire de mal, au contraire. Il se sentait en tension constante depuis qu'on l'avait arraché à sa vie. Et cela devenait difficilement soutenable d'éviter de regarder toute ces femmes, ces infirmières qui ne voulaient pas le laisser tranquille. Et il devait se méfier de tout, tout le temps. Rien n'était fait pour qu'il puisse vivre sa vie comme au manoir ici. Comme il aimait la vivre.
Après le départ de son nouveau patient, Severus pris le temps d'écrire minutieusement toute ses observations. Son avis était assez mitigé sur le diagnostique d'Harry mais il ne pouvait nier qu'il avait déjà bien avancé. Surtout pour une première vraie séance. Il avait par exemple, réussi à nouer le contact et à communiquer dans une conversation à deux sens.
Et Harry n'était pas si renfermé qu'il l'avait cru au départ. Il en était plutôt étonné. Il était même alaise, comme il s'était plu à lui écrire un peu plus tôt. Mais le pédopsychiatre ne voulait pas relâcher sa vigilance pour autant. Harry était un garçon certes alaise à l'esprit vif, mais il n'en demeurait qu'il était susceptible et s'emportait facilement. Il devait donc continuer à marcher sur des œufs s'il voulait obtenir quelque chose de leurs séances.
Songeur, il écrivit des sujets qu'il aimerait aborder avec le jeune homme la prochaine fois pour éclaircir certains points. Puis il passa au dossier suivant. Une petite fille qui viendrait consulter dans une petite demi-heure pour des problèmes de phobie-sociale.
Les flashs des appareils photo étonnèrent Harry.
On l'avait fait passer par la porte de derrière l'hôpital pour éviter ce genre de désagrément. Mais les photographes sans manière étaient plus malins que ça.
Le jeune homme à la cicatrice fut vite recouvert de la blouse de son psychiatre qui les accompagnait jusqu'à la voiture. Ce dernier le prit tout contre lui alors qu'Harry ne voyait plus rien.
Il se débattit contre ce contact imposé bien sûr, mais il n'eut pas de succès. L'homme était plus fort qu'il n'en n'avait l'air. Des larmes commençait à perler sur ses joues alors qu'ils s'approchaient de la voiture.
Malgré l'adrénaline, Severus sentait le corps qui lui résistait être secoué de sanglots. C'est pour cela qu'il prit la décision d'entrer dans la voiture avec lui. Pour lui parler, lui expliquer ce qu'il venait de se passer.
Narcissa parut d'abord étonnée de le voir la, mais n'en fit pas cas, démarrant la voiture aussi vite qu'elle put pour échapper aux vautours.
- Je suis désolé Harry.
Le garçon toujours en larmes, s'était éloigné le plus possible de son psychiatre sur la banquette arrière de la voiture aux vitres teintées. Il se tenait la, recroquevillé, sanglotant tout en surveillant l'homme qui l'avait touché du coin de l'œil. Les excuses ne servaient à rien si elles étés sans cesse répétées. C'était facile à faire après avoir trahis.
- J'étais obligé de te tenir pour pouvoir passer. C'est à cause des paparazzis, tu comprend ?
Non, il ne comprenait pas. Il l'avait touché et Harry n'avait pas su l'empêcher. Son maître allait être en colère.
- Harry…
L'homme fit un mouvement vers le garçon qui se recroquevilla davantage.
- Harry, Severus n'avait pas le choix, je sais que c'est difficile pour toi mais ça ne se reproduira plus. Personne ne te touchera jamais sans ton accord si ce n'est pas absolument nécessaire, crut bon d'intervenir Narcissa.
- C'est vrai Harry, si je ne l'avais pas fait, les paparazzis t'auraient empêché de passer. Il t'aurais garder à la merci de leurs appareils photos et leurs questions pendant des heures s'ils l'avaient pu. Ce ne sont pas des personnes qui veulent ton bien.
Harry hocha la tête, la gorge toujours serrée par des sanglots. Il avait envie d'effacer les dernières quarante huit heures. Il voulait retourner avec son maître et reprendre leur vie ou elle en était.
Personne ne dit plus rien dans la voiture. Narcissa avait bien tenté d'être un peu enjouée mais elle s'était pris un mur.
Harry ne faisait plus attention à personne, il avait préféré s'évader du regard par la fenêtre. Il voyait de plus en plus de verdure, ils quittaient Londres. Il se rappelait que Narcissa lui avait dit habiter en périphérie de la ville.
Le docteur Snape était au téléphone. Il s'appelait un taxi pour rentrer. Soi-disant qu'il ne voulait pas imposer sa présence pour le premier jours d'Harry chez les Malfoy.
Harry, lui, se demandait surtout quand serait le dernier. Les Malfoy pouvait bien être gentils, ils n'étaient pas son maître, et il lui manquait.
La maison des Malfoy était en fait un petit manoir qui n'était pas sans lui rappeler celui de son maître. Cela lui réchauffa un peu le cœur. Il était loin l'hôpital froid et bruyant.
Il attira l'attention sur lui, puis mima le fait d'écrire avec un crayon, ce que ses interlocuteurs comprirent de suite. Narcissa sortit alors le petit cahier et son stylo du petit sac contenant le peu d'affaire d'Harry. C'est-à-dire, ce cahier, ce stylo, son carnet de santé tout neuf, son rubik's cube et une brosse à dent offerte par l'hôpital. Il n'avait pas pu récupérer son collier, la police l'avait gardé. Elle lui tendit ses biens qu'Harry s'empressa de prendre pour pouvoir s'exprimer.
Il ne vit pas le petit sourire de Snape face à cet élan de sociabilité.
« Je vais habiter ici longtemps ? »
Il n'aimait pas l'hôpital, mais il n'était pas fou au point de préférer retourner chez son oncle et sa tante, et il ignorait de combien était son sursis.
Narcissa regarda d'abord son ami sans comprendre, puis se tourna vers le garçon pour répondre.
- Oui Harry, aussi longtemps que tu en aura besoin.
Le jeune homme poussa un soupir de soulagement et repris son cahier vers lui pour ajouter :
« Je ne veux pas retourner chez ma tante Pétunia. »
La blonde allait répondre mais elle fut stoppée d'un geste par le psychiatre du garçon.
- Qu'est- ce qui te fait penser qu'on te renverrais chez ta tante Harry ?
Le susnommé haussa un sourcil avant d'écrire de nouveau.
« Parce que c'est elle qui a ma garde. C'est chez elle qu'on m'a amené à la mort de mes parents. »
- Je te laisse le soin de lui expliquer si ça ne te dérange pas Narcissa, mon taxi va arriver et si je compte le temps de trajet, je suis déjà en retard pour mon prochain patient.
Les yeux verts le regardèrent avec une incompréhension franche tandis que la mère de famille acquiesçait d'un air grave. Harry avait déjà retourné son cahier vers lui quand il fut coupé net dans son élan par Snape.
- Les Malfoy ont mon numéro personnel enregistré sur leur téléphone. Si tu as besoin de quoi que ce soit, de jours comme de nuit, tu peux m'appeler ou leur demander de m'appeler à tout moment. Je répondrais toujours.
Les yeux noirs semblaient attendre une réponse, alors Harry hocha la tête pour montrer qu'il avait bien compris.
Après quelques échanges de politesse, il était parti, le laissant seul avec Narcissa qui lui souriait, bien que de manière un peu crispée lorsque celle-ci remarqua que son nouveau protégé ne l'a regardait pas du tout, alors qu'il avait eu plusieurs contacts visuels avec Severus sans problème.
- Bienvenu à la maison Harry. On se plaît à appeler cet endroit le Manoir Malfoy. Mais tu n'es pas obligé de le désigner comme tel chaque fois.
Tout dans ses explications, la jeune femme avait entrepris de remonter l'allée de cailloux blanc qui menait à la maison. L'allée de son maître était pavée.
Les portes battantes en bois finement sculptées furent rapidement passées et Harry se retrouva dans un luxe auquel il était habitué et qui ne faisait que le rassurer davantage. Mais il avait vraiment besoin de savoir, pour sa tante. Parce que son maître ne pourrait pas venir le sauver cette fois.
Son hôte lui fit une petite visite du rez-de-chaussée qu'Harry suivit à moitié. Il voulait que l'on parle du sujet qui l'intéresse, et il s'impatientait. Il avait offert un hochement de tête à Lucius lorsqu'il l'avait salué, et Narcissa lui avait indiqué que Draco était chez un ami pour le moment. Mais il s'en fichait, il voulait des réponses. Sa tutrice allait enchaîner sur l'étage quand Harry l'arrêta en donnant des petits coups dans le mur pour attirer son attention.
« Qu'est-ce que vous devait m'expliquer à propos de ma tante ? »
Il tapait du pied d'impatience, et il savait que son maître l'aurait puni pour ce genre de geste. Mais ce n'était pas à son maître qu'il s'adressait actuellement.
- D'accord, très bien. Allons nous assoir.
Elle l'avait reconduit au salon, ou un coup d'œil vers Lucius suffit à lui faire comprendre qu'il devait quitter la pièce. Assise bien en face d'Harry, elle ne dit rien lorsqu'il fixa son regard vers la fenêtre plutôt que sur elle.
- Ta tante donc… Pétunia et Vernon Dursley sont en prison depuis presque neuf ans maintenant. Pour ce qu'ils t'ont fait.
Les yeux verts se fixèrent une seconde à peine sur les yeux bleus qui leur faisaient face, sous le choc. Cependant, ceux-ci se baissèrent presque aussi vite sur ses mains crispées sur son cahier.
Le jeune homme ne comprenait pas. Son maître… Son maître avait toujours dit que les gens de dehors ne l'auraient jamais aidé, qu'ils le laissaient vivre l'enfer chez son oncle et sa tante parce qu'ils ne le trouvaient pas assez important. Qu'ils se fichaient de lui.
Seul son maître se souciait vraiment de lui.
Mais alors pourquoi… Pourquoi avait on mis ses ex-tuteurs derrière les barreaux pour lui ? Pour ce qu'ils lui avait fait ?
Et si les gens de dehors ne se fichaient vraiment pas de son sort, pourquoi l'avaient-ils arraché à son maître qui l'avait si gentiment aidé ? Qui l'avait sauvé ?
Il prit une brusque inspiration et ne se rendit compte qu'à ce moment qu'il avait cessé de respirer tout ce temps.
- Ça va Harry ?
Fermant les yeux un instant, il finit par hocher la tête. Il voulait questionner la femme au foyer, essayer de comprendre, mais les questions se bousculaient dans sa tête, sans queue ni tête. Il avait besoin de voir son maître. De lui parler, de comprendre, de se rassurer.
Il avait besoin de son maître parce qu'il avait envie de pleurer.
Parce qu'il n'y comprenait plus rien.
Parce qu'il lui manquait.
