Notes: Bonjour, bonsoir. Je continue ces petits OS sur les Golds renégats privés de sens. Bonne lecture.


Tout était silencieux, d'un coup. Le choc des deux Athéna Exclamations fut assourdissant. Les forces de six chevaliers lancées les unes sur les autres, dans le seul but de s'anéantir. De tout arrêter. Oui, il fallait que tout cela cesse. Autant Milo, Aiolia et Mu étaient ridicules, autant Saga, Shura et lui même, Camus étaient pitoyables. Ils devaient mettre un terme à cet affrontement. À cette comédie.

Ils avaient réussi en un sens. Plus personne ne parlait, ni ne criait. Seraient-ils tous morts ? Non. Camus entendait un battement faible, mais régulier, tout proche, en lui. Son cœur. Il vivait encore. Par quel miracle ? Alors que devant ses yeux tout était bien plus noir que les tréfonds des Enfers. Alors qu'il peinait à respirer et que sa gorge était bloquée. Son souffle était saccadé et seuls ses souvenirs l'indiquaient comment inspirer et expirer calmement, sans s'affoler. Même pour lui, l'ancien chevalier du Verseau, c'était devenu une épreuve de rester en vie.

Quelque chose manquait, comme s'il était amputé d'une partie de lui. Il ne ressentait plus sa propre aura. Ce froid qui l'enveloppait. Ces cristaux qui s'échappaient de ses mains. Lui, un des rares au sein de l'armée d'Athéna à créer des cercueils de glace éternelles. Lui qui arrêtait le mouvement des atomes en gelant la matière au zéro absolu. Tout cela avait comme fui de son corps. Il avait chaud. Ce n'était pas normal pour lui. Malgré tout, sa volonté de vivre, même pour peu de temps était encore présente. Bien qu'il se demandait pourquoi leurs anciens amis ne les avaient pas encore achevés.

Camus avait accepté l'idée de mourir depuis très longtemps. Revenir au Sanctuaire, prendre la tête de leur déesse n'avait aucun sens. C'était une parfaite supercherie. Ils n'allaient pas ressusciter pour de bon. Bien évidemment que des Chevaliers au service d'Athéna ne la trahiraient jamais. Même pour quelques heures de plus à la surface de la terre. Même en jurant fidélité à Hadès, droit dans les yeux de cette impitoyable chef de l'armée des Spectres, Pandore.

Il voulait l'exprimer à ses anciens camarades dorés. Privé de la parole, il pouvait quand même le leur dire. Par la pensée. Pourtant, même cela lui était impossible. Ils étaient surveillés.

Il n'entendait que la colère de Milo et d'Aiolia, les reproches à peine dissimulés et remplis de mépris de Mu. Shura hurla de douleur. Le Scorpion lui avait infligé son Aiguille Écarlate. Saga était plongé dans le silence.

Une pression de plus en plus forte autour de son cou. Camus se sentit soulevé hors des ruines, arraché du temple de la Vierge. La douleur grandit à mesure que les doigts s'enfonçaient dans la peau, un ongle pointu s'incrustait dans la chair, un chuchotement chargé de haine sifflait à son oreille.

« Camus. Je croyais en notre amitié. En ton intégrité. Tu me déçois tellement. »

Les paroles de Milo s'insinuaient dans les oreilles du Verseau, brulantes. Ils étaient toujours amis. Il ne le trahissait pas. S'il pouvait parler, lui répondre, il le saurait. Mais aucun son distinct ne sortait de sa gorge. Rien ne prouvait qu'il était encore un chevalier d'Athéna.

« Milo, Mu, Aiolia ! Cessez le combat. Emmenez Saga, Camus et Shura jusqu'à moi. »

La voix de leur déesse, claire, résonnait en lui. Elle exigeait de les voir. Peu importait la raison. Le temps était compté. Il fallait gravir les escaliers une toute dernière fois.

Camus se laissa porter par Milo. Comme un réflexe, il posait un pied après l'autre, montait les marches de pierre, même si son corps ne l'obéissait presque plus.

Il se fiait à son ouïe encore intacte. Il essayait de se caler sur le son des bottes de l'armure du Scorpion, juste à côté. Un pas, puis l'autre.

Milo et lui étaient les derniers de ce curieux cortège. Tout devant, Mu et Saga qui allaient plus vite. Puis Aiolia et Shura. Le Verseau avait du mal à se concentrer sur leur ascension. Tous les bruits du Sanctuaire venaient à lui comme une dernière musique. Leur marche funèbre. Le vent léger comme une douce mélodie, légère, apaisante après le fracas des deux Athéna Exclamations. Les tintements des armures à chaque mouvement, comme des notes perdues sur une partition. Les battements de son propre cœur et ceux de l'horloge donnaient le rythme. Bientôt la chanson se terminerait. Une chanson sans parole ; aucun mot n'avait assez de force pour se faire une place sur ce morceau.

Il n'y avait plus rien à dire. Plus rien à soupirer. Plus rien à se reprocher. Plus rien. Même si la musique se prolongeait, le tempo serait différent. D'ailleurs y aurait-il une suite, une fois au bout ? Le chevalier du Verseau l'ignorait. Il s'accrochait à ces derniers sons, ces derniers souvenirs. Tout ce qu'il avait accompli, en tant que protecteur d'Athéna, en tant que maitre d'un chevalier de Bronze devenu son frère d'armes, son égal, et même cette dernière mission. Tout cela, il l'avait sciemment choisi. Tout cela aurait des conséquences, heureuses ou malheureuses. Il ne le saurait peut-être jamais.

Shaka y avait réfléchi auparavant. C'était sûr. Seulement lui, il s'y était préparé. C'était ce qui faisait du chevalier de la Vierge l'homme le plus proche des dieux. Et ces mots prononcés au moment de sa mort étaient gravés dans l'esprit de Camus. Ces dernières paroles comme un adieu à cette époque, comme un souhait que la vie sur terre puisse suivre son cours après la Guerre.

« Je sais pas ce que tu racontes, mais c'est vraiment triste. Meurs pas avant d'être en face d'Athéna. T'as pas intérêt, Camus. »

Milo l'entendait. Il récitait les derniers mots de Shaka, pour ne pas l'oublier. Pour rester envie, tant que le tic tac oppressant de l'horloge battait la mesure. De plus en plus fort, au fil de leur montée. Ils devaient être au niveau du temple du Sagittaire. Un peu plus loin, un peu plus haut, le bruit s'atténuait, se perdait presque dans les airs. Seuls les pas brisaient le silence. Une atmosphère qu'il connaissait bien. Camus traversait sa Maison du Verseau pour la dernière fois.

Le chevalier du Scorpion le bouscula un peu. Pour le presser. Il avait raison. Inutile de s'attarder sur les souvenirs. Le temps n'était plus aux émotions. Le temps était compté.

L'horloge se faisait entendre clairement, maintenant. Une aura puissante les attendait en haut du dernier escalier. Athéna.

Elle leur parla sans le moindre reproche dans la voix. Camus comprenait. Des paroles déterminées, sans regret. Comme Shaka au moment du dernier assaut.

Alors que le choc et l'incompréhension s'échappaient des autres chevaliers, le Verseau pleurait en silence. Ce n'était pas terminé. Au contraire. Tout allait commencer, là, avec le sacrifice d'Athéna.

Le battement de l'horloge se fit plus ténu. Saga, Shura et lui-même avait un dernier rôle à jouer, en tant que renégats. Les dernières notes de cette marche funèbre. Camus avait espoir qu'une nouvelle musique se jouerait très bientôt. Qui rassemblerait tous ces guerriers sur le champ de bataille. La chanson de tous les Chevaliers d'Athéna.


notes de fin: Merci d'avoir lu. Alors j'ai eu l'impression que c'était plus difficile à écrire que pour Shura. Il est pas facile à percer le cœur de notre glaçon, même si c'est un grand chevalier. Il ne laisse rien paraître comme faiblesse, et même en gardant l'ouïe, j'ai dû m'accrocher. Je pense faire le troisième et dernier bientôt.
Des bisous et à la prochaine.