Journal de la revieweuse :

Liline37 : Mdr non, c'est moi qui avais mal compris XD
J'aurais aimé développer un chouia plus Brynja mais vu la longueur de l'arc Silesta, j'ai pensé que c'était déjà trop. Non, je ne connais pas La Passe-Miroir (j'ai honte de ce que je vais avouer mais je ne lis pratiquement pas.) mais les empathes qui voient des choses à travers les gens n'est pas si rare dans la fiction il me semble :)
Pour les incantations rituelles, je n'ai pu me baser que sur le traducteur de Google car malheureusement, j'ai tout oublié de mes cours de latin de collège XD. On est loin d'un truc parfait mais grosso modo, ça donnait quelque chose comme « Ton essence te représente, ton essence fait silence, ta conscience dessine ce que tu es, ta conscience sera ton corps. » et « La douleur s'apaise, la tristesse s'en va, la colère s'éteint, oublie ce qui t'a brisée. ». Mon sens du détail et de la précision m'empêchait de faire un truc à la va-vite, merci d'avoir remarqué :)

Revenons au concret pour enfin mettre les derniers points sur les I.


CHAPITRE LXIX – APRÈS

Le silence durant lequel Welvyr analysa la scène parut interminable. Entre ce groupe d'inconnus au milieu duquel se trouvaient deux membres de sa congrégation, les murs noircis de suie et Iwen Calis blanc comme la mort retenu prisonnier par un sort de pétrification à l'autre bout de la salle, le grand maître avait de quoi s'interroger. Néanmoins, de tous ces éléments, aucun n'avait plus retenu son attention que celui-ci :

« Je sais encore reconnaître la pression magique d'un Endormi qui explose, sorts de protection ou pas », dit-il calmement, ses yeux gris vissés sur la jeune femme rousse exténuée dans les bras de Layos.

L'éclat inquiétant dans son regard fit aussitôt réagir Brynja qui se mit devant Silesta et son apprenti.

« Grand Maître, s'il vous plaît. Laissez-moi vous expliquer. »

Tout comme Welvyr, Silesta écouta un récit condensé de ce qu'elle venait de voir au-travers des souvenirs de Layos. Chaque coup d'œil que l'elfe jetait sur elle de temps à autre était une pointe acérée qui lui rappelait qu'elle était un danger.

Voir Gayle remuer d'admiration face à la complexité de la tâche qu'avait représenté le rituel à quatre mains fut la seule chose qui permit à la jeune femme de ne pas sombrer dans l'angoisse la plus totale. Son cerveau turbinait à plein régime et était à la limite de la saturation. La terreur viscérale de savoir Iwen dans la même salle qu'elle l'étreignait avec violence et elle peinait à se calmer en dépit de le savoir immobilisé et incapable d'agir.

La voix douce d'Ombrecoeur lui murmurant des sorts pour apaiser la douleur dans sa poitrine lui fit autant de bien que le fait de pouvoir respirer à nouveau normalement.

À la fin du récit de Brynja, Welvyr s'avança vers le groupuscule tout en scrutant Iwen avec froideur. Silesta se tendit de frayeur quand l'elfe s'agenouilla pour la regarder de plus près comme pour la scanner de l'intérieur.

« Hmm... On dirait qu'elle n'est pas éveillée pour autant. »

Même sans vraiment comprendre, la saltimbanque fut prise de peur. Layos secoua la tête, effaré.

« Pas éveillée ? Avec ce qu'elle vient de faire ? C'est impossible, Grand Maître. Un Endormi ne peut pas exploser deux fois sans se consumer. »

Sa mentor à ses côtés se montra plus nuancée et réservée.

« Sauf que Silesta n'était déjà plus vraiment une Endormie après sa première explosion. Mais depuis notre rituel... » Elle sourit faiblement à la jeune femme. « Peut-être est-ce de notre faute. Nous aurions dû nous contenter de te redonner un corps mais sans sceller ta magie. J'espérais te protéger d'un nouveau dérapage mais en faisant cela, j'ai peut-être déréglé ton éveil. »

Silesta ne savait comment réagir, partagée entre un affolement naissant et une reconnaissance infinie pour cette femme qui lui avait sauvé la vie. Ou plutôt rendu la vie.

« Que va-t-il lui arriver ? »

Elle tressaillit à l'entente de la voix sourde d'Astarion derrière elle. Elle n'osait pas le regarder. Que devait-il penser d'elle après avoir failli mourir avec les autres par sa faute lors de sa transe ultime ?

Observer une nouvelle fois Welvyr en train de l'analyser densément ne fut pas une solution intelligente pour espérer s'apaiser.

« Je l'ignore, finit par avouer le mage avec dépit en regardant Silesta. Votre corps actuel est fait de magie et elle n'a plus rien pour la contenir. Ce que vous venez de vivre entre ces murs peut être interprété à la fois comme une nouvelle explosion miraculeusement avortée... ou un éveil particulièrement brutal. Dans tous les cas, j'ignore comment votre magie se manifestera.

_ Vous voulez dire qu'elle pourrait aussi me rendre folle ou malade comme Feyre Calis ? Ou me tuer pour de bon ?

_ Ou peut-être votre magie vous laissera-t-elle devenir celle que vous êtes réellement. Vous repartez de zéro, en quelque sorte. »

Silesta ne sut pas si cela pouvait être interprété comme une bonne nouvelle.

Layos devait penser la même chose car son visage ne s'était pas déridé depuis l'arrivée de son supérieur. Le garçon se mordit la lèvre et regarda l'elfe.

« Grand Maître, j'aimerais votre avis sur une théorie qui m'inquiète : par les maltraitances qu'il lui a fait subir, Iwen a condensé et changé l'essence de Valyn. Après notre rituel, elle est plus un corps magique qu'humain et elle vient encore de survivre à une explosion presque sans séquelles. Alors... »

Brynja tourna la tête vers Layos, la mine grave. Elle devinait où il voulait en venir mais ce fut Gayle qui acheva de verbaliser les craintes des membres du Conclave :

« Tu penses que Silesta serait vraiment devenue une sorte de réservoir magique qui pourrait attirer d'autres vautours infâmes comme Calis ? »

Le souffle de Silesta se suspendit et son corps remua dans un réflexe instinctif de survie. La vision de Dame Aylin qui avait servi de source d'immortalité pour Ketheric Thorm lui était revenue, en plus de sa captivité avec Iwen. Hors de question qu'elle redevienne un catalyseur à drainer jusqu'à la dernière goutte.

Layos serra doucement les mains sur ses bras pour la calmer en lui murmurant que tout irait bien.

Welvyr considéra ces hypothèses en silence avant de hocher mollement de la tête. C'était tout à fait possible voire fort probable. Une source de magie brute d'aspect humain représenterait assurément un risque de convoitise pour tout mage assoiffé de puissance.

L'auditoire demeura muet. Néanmoins, le grand maître n'en avait pas terminé :

« Cependant, à moins de recroiser un être doté d'un œil très rare comme Iwen, cette demoiselle ne craint rien, assura-t-il. Même si sa magie s'expose encore de façon abrupte, de l'extérieur, elle sera prise pour ce qu'elle est : une ensorceleuse douée d'une magie fougueuse. Enfin, hormis le Sceau de l'Aurore ou Iwen, rares sont les mages qui connaissent et surtout maîtrisent des sorts de consommation. »

Il y eut un faible mouvement généralisé d'affaissement d'épaules avant que ne s'installe un nouveau silence teinté de gravité et d'appréhension. Silesta sentait le poids des yeux de ses compagnons sur elle et pour sa totale incompréhension, elle le vécut comme une violente agression extérieure. Elle n'avait été isolée de ses amis que depuis quelques heures mais le fait d'avoir replongé de façon si drastique dans son passé les avait rendus presque étrangers à ses yeux. Seuls des flashs mêlant le Pas Nocturne, Iwen et le Sceau de l'Aurore apparaissaient en désordre devant ses yeux pour occulter le reste.

La jeune femme se remit debout, soutenue par Layos qui se refusait à la lâcher. Le besoin de reprendre une forme de dignité se faisait de plus en plus viscéral. Ce fut donc à hauteur humaine et non d'objet qui traînait par terre que la saltimbanque posa à Welvyr la question que personne n'avait osé formuler :

« Que comptez-vous faire de moi ? »

Ses compagnons se tendirent dans son dos et Layos leva des yeux farouches sur le grand maître. Brynja surveillait le tout dans une douloureuse attente.

« Même si je pense que vous finirez par vous éveiller, je devrais vous tuer par précaution », répondit Welvyr avec sérieux.

Silesta ne cilla pas et soutint le regard de l'elfe qui se détourna un instant sur ses deux homologues.

« Mais faire cela serait purement arbitraire et gâcher le prototype d'un formidable nouveau rituel que nous pourrions réutiliser pour le bien des Endormis, acheva-t-il avec un sourire discret.

_ Comment ? se stupéfia Layos. Notre rituel ?

_ Bien sûr. Ce que vous avez accompli est une prouesse qui, retravaillée et peaufinée, pourrait aider à apaiser les Endormis comme Feyre ou les patients du sanatorium. Le Grand Maître est courroucé de votre désobéissance mais le mage s'incline bas devant vous. »

Gayle roula légèrement des yeux quand le visage du demi-elfe se gorgea de fierté radieuse.

Bien que fort clément quant au sort de Silesta, Welvyr insista bien auprès de ses invités clandestins de rester discrets à propos du Sceau de l'Aurore. Ce fut la seule contrepartie qu'il réclama en échange de son propre silence sur ce qui venait de se passer.

« Je pense que vous avez hâte de revoir la lumière du jour, sourit-il aux aventuriers. Je vous raccompagne. Le Grand Conseil statuera sur le sort d'Iwen Calis et je m'assurerai qu'il soit puni comme il se doit. »

De multiples sensations traversèrent Silesta à l'évocation d'une sentence pour Iwen mais son brouillard intérieur lui empêcha la moindre réaction. Seule l'envie irrépressible de quitter cette salle obscure la tenait.

« Nous nous ferions un plaisir de vous délester de cette charge, proposa Ombrecoeur avec un sourire avenant froid qui ne s'étendait pas jusqu'à ses yeux.

_ Non, Ombrecoeur, somma Silesta dans un souffle. Partons d'ici. »

Un furtif mouvement de froncement de nez commun traversa les visages des aventuriers qui ne relevèrent néanmoins pas. Ils ne voulaient pas accabler davantage leur cadette encore éprouvée.

Guidés par les membres du Conclave, nos amis leur emboîtèrent le pas, sauf Astarion qui prit soin de traîner des pieds discrètement jusqu'à se faire oublier du reste du groupe. Quand la dernière silhouette devant lui disparut dans le couloir, le roublard s'approcha avec nonchalance du prisonnier encore figé sur place.

Bien que déjà pétrifié, Iwen se raidit quand le vampire se mit à tourner avec tranquillité autour de lui. Même si le visage de cet elfe paraissait serein et détaché, il n'avait pas oublié son regard qui lui avait fait voir la mort en face.

Astarion se délecta pendant quelques tours de sa position d'ascendance. C'est vrai que le pouvoir sur autrui était grisant. Il pourrait passer des heures à se repaître de cette panique grandissante qui galvanisait en lui ses plus noirs instincts. Peut-être ne s'était-il jamais senti aussi monstre qu'en cette seconde. Pouvait-il l'être encore plus que le bourreau de celle qu'il aimait ? En voilà un pari fort attrayant. Dommage, il ne pouvait pas se permettre de trop traîner.

« Oh, j'adore les jolies lames, s'ébaudit-il tout à coup gaiement en ramassant le beau poignard ouvragé d'Iwen pour jongler avec entre ses mains. Matériaux nobles, finitions léchées, excellente prise en main, balance parfaite... Je vous le prends. »

Il s'enthousiasmait comme s'il venait de se décider de son achat auprès d'un armurier de renom. Iwen ne voyait pas l'elfe dans son dos mais il entendait très distinctement le sourire beaucoup trop calme et beaucoup trop large qu'il affichait. La sueur se faisait froide dans son cou rigide.

Un lent tracé glacé le long de sa gorge. Un flot chaud. Des mots de gel.

« Au revoir, bonhomme. »


Avant de laisser Silesta et les siens repartir, Welvyr lui annonça que si elle en ressentait le besoin, elle était la bienvenue au Sceau de l'Aurore – bien qu'il espérait qu'elle embrasse directement son destin d'ensorceleuse.

Toujours aussi prévenant envers son alliée dont il jaugeait l'instabilité psychologique actuelle, Gayle se permit de décliner l'invitation en son nom. Sans entrer dans les détails, Silesta et eux avaient bien des choses à régler avant qu'elle ne puisse commencer à se pencher sur ses nouveaux dons. Même baignée dans les limbes, la jeune femme appréciait le geste de son aîné.

Le Sceau de l'Aurore pouvait paraître extrême voire s'apparenter à une inquisition contre les ensorceleurs « anormaux » mais Silesta comprenait les enjeux et ne voulut pas éprouver de rancune. Elle en avait déjà trop eue.

Welvyr lui réitéra l'invitation en tenant à la rassurer une nouvelle fois : Iwen ne s'en tirerait pas à si bon compte. Sa sœur serait intégrée au Jardin de l'Aube pour y recevoir les mêmes soins que les autres résidents mais l'ensorceleur payerait pour avoir osé bafouer les lois du Conclave en s'en prenant de la sorte à des Endormis.

À croire qu'il en avait eu les oreilles qui sifflaient, Astarion émergea discrètement des ombres pour se fondre à l'arrière du groupe comme si de rien n'était, mais c'était sans compter sur la vigilance de Gayle qui n'eut qu'à inspecter l'expression fermée de l'arpenteur des ombres pour comprendre qu'il avait fait honneur à son titre. Il gratifia le roublard d'un discret hochement de tête d'approbation. Justice avait été rendue. Ce n'était certes pas la loi équitable des hommes qui avait été appliquée, mais pour cette fois, Gayle en était plus que satisfait et nul doute que ses camarades féminines penseraient de même.

L'instant devint vibrant de fragilité quand Silesta se retrouva face à Layos et Brynja. Ses mystères qui l'avaient visitée malgré eux presque toutes les nuits depuis son réveil à bord du nautiloïde. Quand elle les regardait, elle voyait tellement plus que ce que sa mémoire normale ne lui avait rendu. Son cœur agité se rasséréna un instant.

Personne ne s'étonna quand elle prit l'adolescent dans ses bras pour le serrer fort contre son cœur au point de le faire effroyablement rougir.

« Je voulais mourir, souffla-t-elle, les yeux humides. Je voulais que tout finisse et tu as voulu me ramener. » Layos cligna des yeux, un peu blême. « Mais tu as vu que je voulais surtout vivre. Vivre malgré tout. Vivre... pour lui. Merci, Layos. Mon visage onirique qui bondit comme un lapin. »

Le baiser qu'elle déposa sur sa frange brune acheva le garçon qui en avait presque de la vapeur sortant par les oreilles. Il bafouilla de gêne avant de reprendre sa posture la plus fière possible. Plus ou moins.

Les mains de Silesta trouvèrent naturellement celles de Brynja quand les deux femmes se dévisagèrent.

« Prends soin de toi et sois prudente, Sil... enfin, Valyn, se reprit la naine en secouant la tête.

_ Pour vous, Brynja, je serai toujours Silesta, lui sourit-elle avec une faiblesse dans la voix. Je vous dois la vie. Prenez aussi soin de vous et de Layos.

_ Je n'ai pas le choix. Cette tête de noix va encore plus se gonfler d'orgueil maintenant que le Grand Maître l'a félicité. Quinze ans et ça se prend pour le futur Elminster.

_ Hé ! On avait dit que c'était fini, les surnoms ! » s'indigna le concerné.

Le rire qu'elle eut fut ce qui lui manquait pour enfin pleinement réaliser : elle était vivante.

Hélas, il ne fut plus trop possible d'en dire autant une fois que retomba l'effervescence de la tempête d'événements. Sur le chemin du retour menant à la taverne, Silesta perdit pas après pas toute expression faciale jusqu'à ne plus montrer qu'une morne torpeur.

Comprenant que son amie était en train de re-visualiser tout ce qui venait de se passer, Ombrecoeur lui proposa un sort d'apaisement des émotions, au moins le temps de digérer, mais la saltimbanque déclina d'une voix sans timbre. Si elle commençait à se réfugier dans de faux apaisements temporaires, elle serait incapable d'arrêter.

Ses compagnons furent alors relégués dans une sorte de purgatoire depuis lequel ils ne savaient comment sortir. Quels mots fallait-il dire après avoir vu et vécu tant d'horreurs, après être tombée de si haut ? Ce silence forcé était aussi insupportable qu'il était nécessaire ; ils savaient que Silesta ne voudrait pas de pitié.

Une fois de retour, aucun d'entre eux ne se risqua à retenir Silesta quand elle monta directement à l'étage comme un robot sans vouloir grignoter ou boire quelque chose. Ils la regardèrent disparaître dans l'escalier, la gorge nouée. Elle allait sûrement se réfugier sur le toit.

Les aventuriers restants se retrouvèrent autour d'une table, encore sonnés. Le puzzle du mystère Silesta venait enfin de s'assembler dans son entièreté et ils n'y croyaient toujours pas. Silesta, une ensorceleuse. Un catalyseur magique humain.

Astarion ne cessait de regarder les marches menant à l'étage, étreint de colère à cause de son impuissance. Il avait peut-être vengé sa compagne pour qu'elle n'eût pas à se salir les mains mais il n'éprouvait nul soulagement. Il s'inquiétait pour le psyché de Silesta. Lui avait eu deux cent ans pour gérer les tortures de Cazador au fil de l'eau, mais elle ? Elle venait d'encaisser trois ans de sévices quotidiens en quelques minutes. Personne ne restait indemne d'un tel choc.

Le vampire ne se rendit compte qu'il s'était tout à coup mis debout que lorsque Gayle l'apostropha :

« Vous avez raison. Elle ne devrait pas rester seule. »

Astarion considéra le magicien un instant avant de détourner la tête, les dents serrées.

« Vous devriez aller lui parler.

_ Moi ?

_ Elle vient d'apprendre qu'elle est une mage en risquant de se faire engloutir par sa propre magie et de nous tuer. Elle est terrorisée, je le sais. »

Gayle ne répondit pas tout de suite. Il avait raison. La magie des ensorceleurs avait quelque chose d'effrayant et leur jeune amie n'était pas au cœur d'une expérience très clémente pour une totale novice. En plus de la découverte de son passé sordide, le trauma de sa nouvelle condition devait jouer aussi.

« Quand elle va lâcher, c'est votre présence qui rassérénera le plus son cœur, répliqua Gayle avec calme.

_ Laissez-moi son cœur et occupez-vous de sa magie, grinça le vampire d'une voix sourde qui transpirait une forme de défaite. C'est votre domaine. Je ne saurai pas la rassurer sur cet aspect. »


Quand Gayle passa la tête par la trappe du toit, il eut un bref sursaut de peur à voir Silesta aussi près de la rambarde avant de se calmer : elle était juste assise dessus à regarder les toits de la ville.

Il avança jusqu'à elle en regardant les reflets de ses cheveux cuivrés briller sous le soleil. Elle avait retiré sa belle robe de bal pour en revêtir une autre plus simple qu'il ne connaissait pas. Sans doute une de ses anciennes affaires apportées par Anmoira.

Pendant qu'il s'installait à ses côtés sur la rambarde de pierre, Gayle fut heureux de voir Silesta le regarder faire pour s'assurer qu'il ne s'empêtrait pas dans sa tunique. Quand le magicien s'assit enfin, la jeune femme reprit sa contemplation de l'horizon, les yeux toujours teintés d'anesthésie. Avait-elle déjà atteint le point de rupture ou était-elle encore épargnée grâce au choc ?

Gayle l'imita, espérant que le plat du panorama l'aiderait à lisser ses propres pensées. Astarion avait beau penser qu'un magicien était le mieux placé pour parler à une ensorceleuse, il en oubliait que les deux types de mages étaient foncièrement différents.

Quand Gayle avait dû dévorer des bibliothèques entières de livres et écouter des heures de cours pour parvenir là où il était – prodige ou non – Silesta n'aurait qu'à ressentir la Trame pour en faire ce qu'elle voudrait. Leur seul point commun n'était que la magie.

Il cilla. La magie...

Silesta laissa Gayle pivoter vers la terrasse pour se lever. Il avait bien mieux à faire que de rester auprès d'une muti...

« Venez », l'invita-t-il en lui tendant la main.

Elle le regarda sans bouger, espérant qu'il abandonne. Mais il tint bon et le sourire apaisant et bienveillant dont il la couvait finit par faire son effet. Elle prit sa main et le rejoignit.

« Que me voulez-vous ? lui demanda-t-elle d'une voix rauque.

_ Vous faire réaliser quelque chose. »

Le magicien la libéra pour exécuter quelques mouvements avec les mains. Après son dernier geste, une lueur mauve apparut avant de s'évanouir doucement comme un délicat feu d'artifice. Une étrange sensation se posa sur les épaules de Silesta, comme une cape chaude pendant une journée froide.

« Vous la sentez ? La Trame autour de vous », lui demanda Gayle.

Il sourit quand elle dodelina de la tête et il lui reprit les mains. Elle s'immobilisa quand elle comprit ce qu'il voulait faire, le corps soudainement raide.

« Non. J-Je ne peux pas. Je ne veux pas. C-C'est...

_ Rien ne vous arrivera, je vous le promets. Vous avez confiance en moi ? »

Comment répliquer alors qu'il montrait une telle foi en elle ?

Silesta fronça du nez, vaincue. De toute façon, si elle n'était pas éveillée, rien ne se produirait et ça s'arrêterait là. Elle essaya de détendre les muscles de ses épaules au mieux et ferma les yeux. La voix de Gayle l'enveloppa, douce et assertive.

« Après l'incantation, je veux que vous pensiez à quelque chose qui vous évoque l'apaisement. Gardez les yeux fermés si cela peut vous aider mais ce pourrait être dommage. À présent, répétez après moi : Ah-Thran Mystra-Ryl Kantrach-Ao. »

Elle opina du chef mais ne prononça pas la formule tout de suite. Tout un tas de pensées grésillantes et désagréables assaillaient son esprit en même temps que des flashs. Cette pression qui contractait sa poitrine. La peur dans la voix de ses compagnons quand ils l'avaient appelée. La terreur que ses poumons n'éclatent et d'être engloutie.

Elle trembla et sa voix s'étriqua.

« J'ai peur, Gayle. J-Je ne contrôle rien, je ne veux pas vous...

_ Je n'ai pas peur de vous. Je sais que vous pouvez réussir. Vous avez tout réussi jusqu'ici, la rassura-t-il. Essayez. »

La jeune femme inspira profondément et barra son psyché, le temps de répéter la formule.

Ses mains se resserrèrent dans celles de Gayle quand une fragrance douce et sucrée emplit son odorat jusqu'à infuser sa langue. Tout le fourmillement nerveux qui n'avait plus quitté son corps depuis qu'elle avait repris connaissance dans les sous-sols du Conclave venait de s'évaporer d'un seul coup. Elle se sentait bien. En sécurité.

Ses sens étaient soudainement si stimulés qu'elle en était perturbée. Cette sensation étrange qui flottait tout autour d'elle, à la fois suave et mystérieuse, lui rappelait l'aura d'une femme aux yeux lilas dilués d'une goutte d'argent. Mystra ? La Dame des Mystères était-elle en train de l'observer en cette seconde ? Cette douceur qui la drapait d'un voile fluide et léger était-elle la main de la déesse de la magie qui se posait sur elle pour l'accueillir ?

« Voyez, Silesta, lui souffla Gayle dont la voix lui paraissait lointaine. Voyez comme la magie n'est pas une souffrance mais une beauté. »

Ses paupières s'entrouvrirent doucement avant de s'ouvrir en grand. Elle en lâcha les mains du magicien.

La vision chimérique qui la subjugua lui fit l'effet d'une perte de connaissance. Partout autour d'elle, un halo de lumière rosée ondulait telle une aurore boréale tombée du ciel, nimbant l'air d'une teinte crépusculaire divine.

Silesta tourna lentement sur elle-même, se refusant à perdre la moindre parcelle de ce magnifique décor. Son corps se faisait léger, comme porté par les mains invisibles qui l'entraînaient dans une valse aérienne dont elle était la seule à entendre la musique.

Ses pas marquèrent un ralentissement lorsque que la jeune femme crut voir un visage s'esquisser dans la bruine onirique. Il était fugace, à peine visible et pourtant, elle pouvait en tracer le moindre trait avec la netteté d'un croquis sur une feuille de parchemin. C'était le visage de Livius. Le visage de son petit garçon.

Silesta laissa les larmes monter et elle s'abandonna au cocon de félicité que la Trame lui offrait.

Loin de l'affliger ou de la briser, cette image venait au contraire de fracasser le carcan noir qui encerclait son cœur. Elle était enfin libre de son spectre et de sa haine. Elle avait survécu et tenu pour lui. Plus rien ne retenait son fragment intérieur rongé par les ténèbres.

L'âme allégée, la saltimbanque entra dans la valse magique et se perdit dans ce tourbillon de grâce qui l'étreignait.

Son esprit se fit blanc jusqu'à ce qu'à l'issu d'un dernier tourbillon sur elle-même, le concret d'une main qui encerclait sa taille et une autre entre ses doigts ne la ramène à la réalité. Son mouvement se prolongea aussi doucement qu'Astarion venait de la réceptionner contre lui pour l'entraîner dans quelques pas de danse.

Silesta se laissa porter par le rythme lent et emporter par le calme du visage penché sur elle. Un instant, elle revit le masque de bal posé devant les yeux amarante de son compagnon et l'air mystérieux qu'il lui donnait. Elle resta ainsi accrochée à ces prunelles rubis et leur effet hypnotique pour continuer de ne pas penser.

Quand la danse prit fin, l'aurore boréale disparut et le monde lui parut soudainement bien terne et froid. Maintenant que s'était un peu apaisée sa peur envers la magie, Silesta récupéra celle qui lui pesait plus encore : la terreur de sombrer dans la détresse. Celle de ne pas pouvoir se relever de ce passé d'horreurs, celle ne pas savoir ce qu'il adviendrait d'elle, celle d'avoir perdu la confiance de ses alliés et surtout celle de l'homme qu'elle aimait. Elle ne pouvait scinder la mer déchaînée dans laquelle elle se noyait, pas plus qu'elle ne pouvait atteindre le rivage et elle en était terrifiée.

Sa conscience s'agrippa de plus belle au regard du vampire alors qu'elle se laissait aller contre lui, renversant sa tête pour ne pas briser ce contact visuel qui l'empêchait de chavirer. Tant qu'elle y serait liée, elle ne coulerait pas.

En lisant ce besoin désespéré de ne pas se noyer, Astarion en venait à regretter d'avoir arraché sa compagne à la félicité qui l'habitait peu avant. Elle reflétait cette même angoisse que sur cet autel de pierre après le rituel de Séluné. Celle qui l'implorait de ne pas l'abandonner.

L'elfe était tiraillé entre une incapacité à dire une plaisanterie pour la faire sourire, son inquiétude pour elle et l'interdiction de lui faire une grande démonstration de pitié. Silesta n'avait pas besoin de pitié ; elle avait besoin d'accepter puis de guérir. Comme lui. Comme la survivante qu'elle était aussi.

Ne demeurait alors que cette indéfectible envie de la rassurer. Non, elle n'était pas un monstre. Elle ne l'était pas lorsqu'elle avait laissé son démon intérieur s'emparer de son corps et elle ne le serait jamais même si elle était peut-être une bombe à retardement. Pas pour lui.

« Parlez-moi, l'invita-t-il avec douceur. Ne ressassez pas. Vous avez été assez mise sous silence. »

Elle ferma les yeux dans une légère grimace. Tout était si embrouillé, si agité.

« J'ai peur, Astarion, avoua-t-elle enfin d'une voix étranglée. Je suis cernée par la peur. Si je vais exploser, si je vais perdre la raison jusqu'à oublier mon nom... J-Je ne sais même pas ce que je suis vraiment.

_ Vous êtes vous. Humaine, saltimbanque, ensorceleuse, catalyseur... Qu'importe. Je m'en moque. »

Elle ravala le sanglot qui remontait à sa gorge et secoua la tête.

« Si je ne suis pas éveillée, je peux encore exploser. Je refuse de vous faire courir ce risque. Il vaudrait mieux que...

_ … vous ne finissiez pas cette phrase. Jamais de la vie. »

Astarion marqua une pause car sa voix avait sonné trop sèche à ses oreilles. Il était hors de question qu'il l'abandonne.

« Ne me laissez pas encore de côté, murmura-t-il. Je veux prendre ma place auprès de vous. »

Silesta ferma douloureusement les paupières, saisie d'une sensation aigre-douce entre culpabilité et reconnaissance.

« Si ma magie ne me consume pas d'une façon ou d'une autre, mes souvenirs auront raison de moi, dit-elle entre ses dents. Ces images... Elles tournent encore et encore. Je le vois. Iwen est partout, prêt à me faire encore du mal. Je vois encore son sourire cruel, la douleur... La douleur quand il... La souffrance quand... J-Je ne peux pas, je vais... »

Astarion se pencha et posa son front contre celui de Silesta, une main sur sa joue. Tout ce qu'il pouvait lui dire, il le lui avait déjà dit la dernière fois.

« Je suis là. Avec vous. Personne ne vous fera plus jamais de mal.

_ Astarion...

_ Je n'ai pas le pouvoir d'empêcher vos souvenirs de vous hanter pendant longtemps, pas plus que je ne peux agir sur votre magie. Je ne peux que vous assurer ceci : vous avez tenu bon alors que vous avez été au paroxysme de l'indicible et vous saurez faire face. Comme moi. »

Il ferma à son tour les yeux, perdu dans ses propres souvenirs.

« Je sais ce que vous ressentez. Plus rien ne ressemble à ce que vous avez connu, tout vous paraît noir et froid... Mais la chaleur vous enveloppera à nouveau, les couleurs reviendront, la douleur s'atténuera et les cauchemars se dissiperont. Vous avez réussi à me le prouver. Vous n'êtes pas seule, Silesta. Acceptez-moi enfin pleinement à vos côtés. Ne me repoussez pas. Je vous rattraperai chaque fois que vous tomberez. À mon tour d'être là pour vous. »

Baptisé de cette promesse, son léger baiser qu'elle accueillit fut pour elle comme la première respiration d'un nouveau-né. Elle venait de sortir la tête de l'eau et elle recevait l'oxygène qui la ramenait à la vie.

Des larmes perlant au coin de ses yeux, Silesta enroula ses bras autour du cou d'Astarion et quémanda sa bouche pour un autre baiser bien plus profond. Elle perdrait peut-être son souffle, mais ce ne serait pas au fond de l'eau.

Quand il se sépara d'elle, Astarion remarqua tout de suite la faiblesse accrue qui chargeait de plus en plus ses yeux gris de larmes. Il resserra ses bras autour de Silesta et la laissa pleurer contre lui. Il la laissa seule avec ses pensées, se contentant de lui caresser les cheveux pour l'apaiser. Aucun mot ne saurait compenser ce qu'elle avait perdu dans cette crypte.

L'elfe apprécia l'ébauche de sourire de remerciement que la jeune femme lui offrit après. Elle commençait déjà à aller de l'avant ; il était certain qu'elle y arriverait. Et il s'assurerait que ce soit le cas.

« Vous devriez manger un peu, lui conseilla-t-il. Allons rejoindre les autres.

_ Je ne sais pas...

_ J'insiste. Votre corps a été durement éprouvé. »

Elle acquiesça mollement pour le suivre. Elle devait reconnaître que la sensation de faim et de faiblesse se faisait de plus en plus ressentir après avoir laissé son brouillard psychique se dissiper.

Les visages amicaux et sereins de Gayle et Ombrecoeur en la voyant arriver emplirent d'apaisement la poitrine de la saltimbanque. C'était comme si rien n'avait changé. Ils revenaient tous d'une nouvelle péripétie dans leur croisade contre l'Absolue et ils se retrouvaient autour d'une table et d'un dîner pour se détendre. Même la tempétueuse Lae'zel affichait à son encontre une forme de respect discret qui lui fit un drôle d'effet.

Silesta adressa une inclinaison de tête et un sourire reconnaissant à Gayle qui lui rendit la pareille. Son message était bien passé. Elle ne devait pas avoir peur de son nouveau don ; au contraire, elle devrait l'apprivoiser pour mieux le comprendre, l'apprécier et, l'espérait-elle, orienter elle-même son futur destin d'ensorceleuse spéciale.

Une fois que l'humaine s'attabla auprès de ses compagnons, il y eut un flottement étrange que même le brouhaha animé et joyeux de la taverne ne sut recouvrir complètement. Chacun s'épiait en coin à se demander comment briser la glace.

Ombrecoeur se tourna vers sa camarade avec un sourire engageant.

« J'aimerais bien que vous me racontiez un peu votre vie avec le Pas Nocturne. Ce devait être épique, vu vos différents caractères.

_ Oui, je suis curieux d'en apprendre plus sur Tébur histoire de... mieux le cerner, appuya Astarion avec un sourire bien plus gredin qu'il ne voulait le laisser paraître.

_ Quant à moi, je mentirais en prétendant ne pas vouloir plus d'informations concernant la voix divine d'Anmoira. La magie des bardes est fascinante, avoua Gayle en se resservant un verre de vin.

_ Sa magie, vraiment ? siffla Lae'zel en arquant un sourcil peu convaincu. Évitez quand même de dire ça devant le drow si vous tenez à la vie. »

Figée dans une tiédeur qui se ramifiait au reste de son corps, Silesta observa ses amis se chamailler gentiment. Elle ferma les yeux pour savourer ce qui se diffusait en elle. Non. Rien n'avait changé et elle n'était pas seule. Ils étaient encore avec elle.

Alors elle se remémora et partagea.

C'était une sensation bien étrange de raconter des souvenirs qu'elle venait tout juste de récupérer. La saltimbanque vivait la découverte du récit presque comme ses amis, s'étonnant, riant ou s'attristant en même temps qu'eux au fur et à mesure qu'elle parlait. Quelques larmes surgirent parfois au détour d'une sensation retrouvée mais Silesta pouvait compter sur la prévenance des siens pour la ramener sur un autre chemin de pensée plus léger et coloré.

Elle leur raconta ses séances de préceptorat mouvementées avec Perzin, des chamailleries de filles avec Anmoira, ses facéties et ses fausses colères avec Tébur, la première fois où elle avait tenu des bolas et qui avait failli mal tourner à cause d'un faux mouvement, le jour où Ulryn avait dû gérer un prétendant un peu trop insistant envers Anmoira...

Les heures filèrent, douces-amères mais si galvanisantes pour la saltimbanque qui vit en cette vie heureuse avec le Pas Nocturne un formidable bouclier contre les quatre dernières années de son existence.

« Si, Astarion, je vous assure. Tébur vous battrait dans une épreuve d'agilité à la dague, asséna Silesta en grignotant quelques fruits secs qu'ils venaient de commander pour terminer le repas.

_ Balivernes, balaya le roublard d'un geste princier. Je consentirais éventuellement à lui reconnaître un certain esthétisme capillaire, et encore, mais... »

La confiance suffisante du vampire mourut dans une soudaine exclamation de souffrance de Silesta. La jeune femme venait de sursauter sur son siège, les mains crispées au niveau de son sternum.

« Silesta, que se passe-t-il ? demanda aussitôt Gayle. C'est votre magie ?

_ N-Non... ça me brûle ! » crissa l'humaine entre ses dents serrées.

Elle gémit. Un tison chauffé à blanc était en train d'ancrer une gravure sur sa poitrine.

Trop prise par la douleur, Silesta se recroquevilla contre la table, empêchant ainsi les autres de l'approcher en dépit de leurs injonctions. Enfin, le mal s'évanouit tout d'un coup et ne laissa qu'un picotement acerbe. Sa respiration se calma au grand soulagement de ses compagnons.

La jeune femme se redressa et tira un peu son décolleté. Ce qu'elle trouva sur son sternum la pétrifia mais de bien moindre façon que ses amis : un « R » rougeoyant et élégamment calligraphié.

Le silence hébété qui s'ensuivit fut brisé par Astarion qui se passa une main négligée dans les cheveux.

« Bon. Voyez le bon côté des choses, ma douce : la concordance des temps ne saurait être plus parfaite. »


Carrément. C'est ce qu'on appelle « la magie scénaristique » XD

Très très difficile à faire, ce chapitre. Comment gérer un tel « après » ? J'espère avoir trouvé une forme de justesse, entre peur et résilience.

Voilà, l'arc Silesta est complètement clos. À la base, il était prévu plus tôt mais je l'ai fait à la fin pour une simple raison pratique : je ne voulais pas que Silesta soit handicapée trop longtemps par ces souvenirs difficiles, histoire de ne pas la faire apparaître trop faible. Parce que mine de rien, c'est pas facile. Autant la garder dans le cœur de l'action pour ne pas trop la faire ressasser. La fin imminente de l'Absolue la gardera focus sur le principal.

Nous reprenons la suite de notre aventure principale qui arrive sur les derniers gros événements avant la baston finale. Merci d'avoir été patients avec mes délires d'auteur.

Raphouuuuuuu, we're coming for youuuuuuuuuuu !