Bonjour, on se retrouve un peu plus tôt que prévu pour un nouveau flash back (j'ai adoré l'écrire, j'espère que ça vous plaira, j'adore les trucs un peu cheesy j'avoue)

La structure présent/flash back ne durera pas toute l'histoire, l'idée était d'expliquer un peu les blancs entre la fin de l'Eclipse et la rentrée scolaire de Peter, mais on arrive au bout !

Bonne lecture !


— Allez Peter… tu peux le faire !

Perché sur le toit d'un immeuble désaffecté, Peter fixait le vide, les poings serrés. Il portait le dernier costume que lui avait fabriqué son père, plus sécurisé encore que l'appartement dans lequel ils avaient emménagés à leur retour en ville — et pourtant, son cœur battait la chamade, son estomac était serré par l'appréhension et ses mains étaient anormalement moites.

— Peter, ta respiration et ton pouls sont de plus en plus élevés. Souhaites-tu que j'adresse un signal de détresse à M. Stark ?

— Quoi ? Non, non, surtout pas ! N'envoie rien à personne, Karen. Je suis juste un peu, euh, stressé, mais je gère.

— Très bien, Peter .

L'IA eut le mérite de ne pas insister — Tony avait prévenu Peter qu'à l'occasion de son seizième anniversaire, il baisserait d'un cran les protocoles de sécurité de son costume.

« Ce qui ne signifie pas que tu peux foncer tête baissée pour affronter le premier clown mangeur d'enfants venu, surtout si celui-ci t'invite dans les égouts !» avait-il dit — mais, avant que Peter n'ait eu le temps de lui demander s'il avait déjà vu un clown dans les égouts, Morgan s'était mise à rire et à lui demander s'ils pourraient bientôt aller au cirque, parce qu'elle rêvait de voir des clowns en vrai.

Peter secoua la tête. Il ne voulait pas penser à Tony, à Morgan et à la complicité qui les liait.

Il se pencha un peu plus au-dessus du vide et attacha son regard à la rue, plusieurs dizaines de mètres plus bas. Il s'agissait d'une impasse vide, nichée entre trois murs écorchés et recouverts de graffitis. Ici, personne n'aurait songé à lever le nez à la recherche de Spider-Man ; personne n'était là pour remarquer son hésitation, ses trépignements maladroits et, surtout, l'horrible tremblement qui avait pris possession de ses mains et se répercutait dans chacun de ses os, comme si son squelette s'était métamorphosé en xylophone.

Il n'avait pas remis son costume depuis l'Eclipse — depuis cet horrible moment où son corps s'était décomposé, ses atomes se disloquant sous le regard impuissant de son père. Malgré tous leurs efforts, aucune technologie de Stark Industries n'aurait pu le sauver. Il se souvenait avoir levé la main, cherchant désespérément à agripper le bras de son père, mais ses doigts s'étaient déjà désagrégés et plus rien ne pouvait le retenir au monde qu'il connaissait.

Il s'était évaporé, dans l'univers comme dans les esprits de ceux qu'il aimait.

— Peter, je suis navrée, mais si les battements de ton cœur ne ralentissent pas dans les prochaines minutes, je serais obligée d'appeler M. Stark.

L'adolescent retira précipitamment son masque et avala une grande gorgée d'air. Karen continuait de parler, mais il ne l'écoutait plus. Il se sentit vaguement coupable de se défaire de son costume, réduisant l'IA au silence, mais quel autre choix avait-il ?

Il ne fallait pas que Tony découvre à quel point il était devenu faible. Brisé. Inutile.

Il s'assit au bord du toit, les jambes balançant dans le vide. Au moins, il n'avait pas le vertige ; c'était une maigre consolation, au regard de la terreur qui s'emparait de lui lorsqu'il envisageait de reprendre ses activités de super-héros. A cet instant, il aurait payé cher pour renoncer à ses pouvoirs et être un adolescent normal — un adolescent dont l'existence n'aurait pas été balayée par le claquement de doigts d'un titan…

— La prochaine fois, murmura-t-il, enfonçant son visage entre ses mains. La prochaine, tu y arriveras.

Il fallait qu'il y arrive. Qu'il vainque la peur qui le paralysait lorsqu'il enfilait son costume, qu'il se débarrasse des souvenirs de l'Eclipse qui écrasaient son cœur comme un rouleau compresseur.

Que lui restait-il, sans Spider-Man, maintenant que Tony et Pepper n'avaient plus besoin de lui ?

Comme pour répondre à sa question, son téléphone vibra et, à sa grande surprise, le nom de MJ s'afficha sur l'écran.

« Bon, puisque tu n'as pas l'air décidé à faire le premier pas : quand est-ce qu'on se voit, loser ? »

Un sourire se dessina sur le visage de l'adolescent.

MJ n'avait pas changé : droite, fière et fragile à la fois, le regard brûlant de cette flamme qui faisait tant battre le cœur de Peter. Elle l'attendait sur la banquette de leur café habituel, les mains nouées autour d'une tasse qui dégageait un délicieux parfum de thé au jasmin. Lorsque leurs yeux se rencontrèrent, Peter lui adressa un sourire hésitant — auquel la jeune fille fit écho.

— Rassure-moi, c'est Stark qui t'impose cette coupe de cheveux ? demanda-t-elle tandis qu'il s'approchait la table, hésitant à s'installer en face d'elle ou à ses côtés, sur la banquette rose rembourrée.

Déstabilisé, Peter ouvrit la bouche, mais avant qu'il n'ait eu le temps de répondre :

— C'est une blague, bien sûr. D'après mon thérapeute, il faut parfois que je le précise, pour ne pas vexer les gens.

— Ton thérapeute ? répéta Peter, jetant finalement son dévolu sur la banquette.

MJ se serra légèrement sur le droite pour lui laisser de la place. Leurs genoux se frôlèrent, et Peter aurait pu parier que le visage de son amie avait rosi, à l'instar du sien — il sentait le sang affluer sournoisement jusqu'à ses joues.

— Mon thérapeute, confirma-t-elle sans sembler s'en formaliser. Mes parents ont pensé que ce serait une bonne idée de me forcer à raconter ma vie à un inconnu toutes les semaines. Après l'Eclipse, le fait qu'on ait été séparés les uns des autres, que la moitié des gens aient pris cinq ans dans la tête, tout ça, ils ont eu peur que je sois perturbée. Plus perturbée que d'habitude, je veux dire.

— Et ça ne te dérange pas de parler de tout ça à quelqu'un ? ne put s'empêcher de demander Peter.

Réalisant aussitôt sa propre indiscrétion, il s'empressa d'ajouter :

— Tu n'es pas obligée de me répondre, c'est pas un sujet super cool…

— Oh, je m'en fiche, répondit son amie en haussant les épaules. J'ai pas honte de voir un psy, d'ailleurs, le monde se porterait bien mieux si plus de monde en consultait un. Et puis… le mien n'est pas si nul que ça. Mais si tu le répètes à quelqu'un, je nierai avoir dit ça, prévint-elle d'un air féroce qui fit rire Peter — et, après quelques secondes d'hésitation, elle se mit à rire à son tour.

Bientôt, ils partirent tous les deux d'un irrésistible fou rire ponctué de grognements (plus ils essayaient de se retenir, et plus le volume de leurs grognements augmentait), et ce fut comme si quelque chose se débloqua dans l'atmosphère. La gêne et la distance avaient disparus : le Peter et la MJ d'antan s'étaient retrouvés et goûtaient enfin à ce délicieux sentiment de familiarité qui leur avait été arraché par l'Eclipse.

— Excusez-moi, je peux prendre votre commande ?

Peter et MJ se calmèrent enfin. Peter commanda un chocolat chaud, MJ demanda un nouveau thé au jasmin, et ils replongèrent dans le silence — un silence qui n'avait rien de pénible, au contraire : ni l'un ni l'autre n'éprouvait le besoin de le combler par des discussions superficielles. D'un regard, ils se comprenaient.

Le cœur de Peter se mit à battre plus fort.

Allez, Pete, c'est le moment de passer ton bras autour de ses épaules… vas-y !

L'adolescent fit mine de s'étirer, son bras se tendant en direction de son amie. Celle-ci eut une sorte de soubresaut, aboutissant à ce qu'elle se rapproche de lui. Il laissa toutefois son bras pendre contre la banquette, n'osant pas la toucher. Elle leva les yeux et il voulut dire quelque chose, mais elle parla en même temps :

— Alors…

— Du coup…

Ils se turent, rougirent, et reprirent :

— Vas-y…

— Non, toi, vas-y…

— Non non, je t'ai coupé la parole…

— Et voilà la commande pour les tourtereaux !

Peter et MJ faillirent s'étouffer, alors que le serveur déposait leurs tasses sous leur nez et les gratifiait d'un clin d'œil. Puis ils échangèrent un nouveau regard et se remirent à rire, quoi qu'un peu nerveusement.

— Est-ce qu'on a l'air si niais que ça ? grimaça MJ lorsque le silence fut revenu.

— Je ne dirai pas ça, protesta Peter. C'est juste que euh… on… on est heureux de se revoir, c'est tout !

— C'est vrai, admit MJ.

Elle s'empara de sa tasse et versa son eau bouillante sur le petit sachet de thé vert. Elle était concentrée, le regard à demi dissimulé par une longue mèche bouclée et la bouche légèrement pincée. Lorsqu'elle redressa le visage, Peter fut surpris par son air sérieux.

— Maintenant que tu es de retour à New-York, est-ce qu'on a une chance de te voir à Midtown, à la prochaine rentrée ?

La poitrine de Peter se serra. Il devina, à la voix de MJ, qu'elle connaissait déjà la réponse, et qu'elle la redoutait tout autant que lui.

Il ramena son bras vers lui et s'autorisa une gorgée de chocolat brûlant, avant de répondre :

— Eh bien, à ce propos… J'ai, euh, reçu une lettre du proviseur… il disait qu'il avait conscience de mon talent, blablabla, mais qu'il n'était pas certain que Midtown soit le meilleur lieu dans lequel continuer ma scolarité et que, euh, il m'invitait à m'inscrire dans un endroit un peu plus prestigieux. Que de toute façon, ils n'avaient plus de place pour moi, et qu'ils en étaient navrés, mais que c'était pour le mieux.

Le visage de MJ resta impassible, mais ses prunelles flamboyèrent.

— C'est des conneries, dit-elle, exprimant tout haut ce que Peter avait pensé en lisant les mots du proviseur.

— Je sais, soupira-t-il. Je voulais lui répondre, lui dire que c'était n'importe quoi, mais d'après Pepper, ça ne valait pas le coup. Ça aurait fait tout un tas d'histoires et ça aurait aggravé les choses.

— Ouais, tu m'étonnes, elle devait avoir la flemme de s'en occuper. Et Stark, qu'est-ce qu'il en pensait, lui ?

— Euh… pas grand-chose, je crois. Il m'a demandé ce que je voulais faire. Que c'était mon avenir, mon choix, qu'il se rangerait de mon côté quoi que je fasse.

— Et qu'est-ce que tu lui as répondu ?

Peter regarda MJ. Elle détourna les yeux :

— Tu ne retourneras pas à Midtown, hein ?

Il aurait aimé lui mentir. Prolonger l'illusion. Mais il avait appris qu'on ne pouvait pas échapper à son destin, et la réponse fusa malgré lui :

— Non.

Son chocolat lui parut écœurant, tout à coup. Trop épais, trop sucré. Il lui faisait l'effet d'un parpaing au fond de son estomac.

— Ned le sait ?

Peter hocha la tête. Il aurait été incapable de cacher une telle nouvelle à son meilleur ami ; celui-ci avait semblé déçu, mais lui avait assuré que s'il allait dans un meilleur lycée, il serait très heureux pour lui.

— Ok, dit MJ.

Elle remua sa cuillère, la fit tintinnabuler contre sa tasse, et répéta, plus fermement :

— Ok.

— MJ, je suis désolé…

Elle l'interrompit, reprenant d'une voix forte :

— Ok. Tu n'iras pas à Midtown. Je comprends. Je suppose que cet abruti de proviseur a peur que ta présence fasse venir les paparazzis, ou n'entraîne une enquête approfondie sur la gestion de sa trésorerie, après tout, la présence du fils de Tony Stark ne peut qu'attirer l'attention, surtout après ta disparition de cinq ans. Tu n'y peux rien, ce n'est pas de ta faute si tu es le fils de ton père. Tu sais déjà dans quel lycée tu vas aller ?

— Sûrement un lycée privé, répondit Peter. Tu… tu ne m'en veux pas ?

— Non, répondit-elle, et elle semblait sincère. Je ne vais pas sauter au plafond, de toute façon j'aurais l'air complètement stupide si je faisais ça, mais je ne t'en veux pas. J'ai juste… je… merde, mon psy m'a dit qu'il fallait que j'exprime mes émotions mais c'est plus facile à dire qu'à faire, j'aimerais l'y voir, pfff…

— MJ…

— J'ai peur, reprit-elle d'une voix précipitée, le regard obstinément rivé à sa petite cuillère. Voilà.

— Peur ? répéta Peter, désarçonné. Peur de quoi ?

— Peur qu'on s'éloigne. Que tu nous remplaces, que nous oublies. Que plus rien ne soit pareil.

Elle sembla lutter pour arracher son regard à sa cuillère et plonger ses yeux dans les siens. Le cœur de Peter bondit, puis se comprima.

— Je t'aime beaucoup, Peter, dit-elle.

— M-moi aussi… moi aussi, je t'aime beaucoup, MJ, balbutia Peter, la bouche soudainement sèche. Et t-tu n'as pas à avoir peur. Comment est-ce que je pourrais oublier quelqu'un comme toi ? Tu es... Tu es la personne la plus extraordinaire que j'ai jamais rencontrée !

MJ eut un faible sourire.

— Tu dis ça maintenant, mais quand tu seras là-bas, entouré de tous ces génies aux parents riches et influents, ce sera une autre histoire. Des garçons et des filles extraordinaires, il y en aura des tonnes. Moi, je serai juste une fille de Midtown avec qui tu traînais de temps en temps.

— Je ne te remplacerai pas. Et je ne vous oublierai pas, Ned et toi.

La main de MJ était posée sur la table, près de la sienne. Il effleura timidement ses doigts.

— Promets-le moi, Peter. S'il te plaît.

Sa main tressaillit ; ses doigts se refermèrent sur les siens. Elle soupira :

— J'ai l'air idiote, hein ? Il ne me manque plus qu'une bandoulière autour du cou, et on pourrait me confondre avec une gourde.

— Tu n'as pas l'air idiote, protesta Peter. Ou alors, on a l'air idiots tous les deux. D'ailleurs, ça ne me dérangerait pas. Je préfère avoir l'air idiot et être avec toi qu'avoir l'air intelligent et être tout seul.

Un nouveau sourire se glissa sur le visage de son amie.

— Espèce de beau-parleur, dit-elle.

— Je te le promets, Michelle Jones. Je ne t'oublierai pas.

Leurs mains se serrèrent et restèrent ainsi plusieurs minutes. Lorsqu'ils les détachèrent, leurs paumes, moites, eurent un mal fou à se décoller.

— Ne m'appelle plus comme ça. Il n'y a que mon père qui m'appelle Michelle, et quoi qu'en disent les psychanalystes à la noix, je n'ai pas envie de penser à lui quand je suis avec toi. Je suis MJ, déclara finalement la jeune fille.

— Désolé, Mich… euh, MJ !

— C'est comme toi. Tu es Peter. Ou Spider-Man, à la limite. Pas Peter Stark.

Elle conclut, plus bas :

— De toute façon, je trouvais que Parker t'allait mieux.

Mais Peter l'entendit à peine. Ses yeux s'étaient écarquillés, son cœur s'était remis à battre frénétiquement :

— Hein ? J-je… je ne vois pas du tout de quoi tu veux parler, je n'ai rien à voir avec Spider-Man ! En plus, euh, j-je suis allergique aux collants, ça me donne d'horribles démangeaisons à des endroits, euh, stratégiques !

Le sourire de la jeune fille se fit plus mutin. Presque doux.

— Pourtant, les collants te vont super bien. Quoi, tu te croyais si discret que ça ?

Elle ajouta, rougissant de nouveau sous les mèches qui encadraient son visage :

— Spider-Man était bien trop mignon pour être quelqu'un d'autre que toi.

Mignon ?

— Oups, je l'ai vraiment dit à voix haute ?