Main dans la main, le couple rebroussa chemin jusqu'à leur petite villa de vacances en bord de mer. Inanimée malgré leurs deux bonnes heures de balades, la demeure crut réceptionner deux amoureux en réconciliation mais resta inerte, délaissée par le couple qui la dépassa pour débarquer sur la plage.
« Je crois qu'une surprise nous attend… observa Antoine en scrutant une nappe posée au sol recouverte de provisions.
- Ohhh… soupira Candice, émue. Ils sont mignons… ils voulaient se faire pardonner…
- Hum… »
Et pour se faire pardonner, il fallait mettre le paquet. Alors visiblement, les enfants avaient tout donné. Ils distinguèrent des boissons en tout genre et des plats recouverts par du film plastique. Et les enfants patientaient tranquillement à côté, les attendant pour dévoiler avec fierté leur travail matinal.
« Oh ! Mais c'est qu'on est attendus… s'exclama Candice pour se faire remarquer.
Les enfants firent volte-face et rencontrèrent deux adultes enlacés au sourire amusé.
- Surprise ! Lâchèrent les jumeaux en chœur.
- On a organisé un petit pique-nique…
- Et moi j'ai fait le gâteau avec Suzanne !
- C'est bien ça…
- Et d'ailleurs Suzanne, elle est où ? s'inquiéta subitement Antoine.
- Elle joue là-bas avec Lina, sa nouvelle copine… expliqua Emma en les montrant au bord de l'eau.
- Ah bah c'est super !
- Aloooors…. Commença Candice en épiant les mets sur le sol. Qu'est-ce qu'on a ?
- Apéro ? proposa Jules en montrant la bouteille de vin.
- Volontiers ! répondit la mère de famille en s'installant parterre.
- Vous avez pris le parasol ? demanda Antoine d'un ton sérieux, agenouillé aux côtés de sa compagne.
- Ah nan merde on a zappé… mais on a nos chapeaux !
- Nan mais pour Candice surtout…
- C'est pas grave…
- Tu feras attention quand même… T'es déjà super rouge ici mon cœur… observa-t-il d'une voix enfantine en frôlant ses épaules.
- Mais oui… T'inquiète pas, ce matin j'ai mis ma crème solaire spéciale peau de blonde…
- Oui enfin c'était y a plus de trois heures maintenant… Et ton chapeau il est où ?
- À la maison… Mais c'est pas grave chéri… T'inquiète pas !
- Il est 13 heures, ça tape à c't'heure-là. Je préfère pas prendre le risque… continua-t-il en se relevant.
- Antoine…
- J'en ai pour 3 minutes ! Cria-t-il en délaissant la famille à grandes enjambées. »
Les enfants rigolèrent face au dépit de leur mère. Elle connaissait Antoine protecteur mais parfois, le commissaire ne se rendait pas compte qu'il en faisait un peu trop. Pourtant, cette fois, ce sont ses enfants qui lui rappelèrent que c'était pour son bien. Et c'était vrai… Candice avait de la chance d'avoir un homme qui prenait soin d'elle. Emma l'observa, intimidée. Cela faisait désormais plus de 15h qu'elle était rongée par la culpabilité, et même si Candice ne l'admettait pas frontalement, Emma en était certaine, elle lui en voulait. Alors elle osa s'approcher à pas de loups, prête à s'excuser, avant de s'asseoir à côté d'une blonde souriante.
« Maman ?
- Hum ?
- Je voulais m'excuser parce que je… je sais que j'ai pas assuré avec cette histoire et… j'ai pas envie que tu m'en veuilles.
- Je t'en veux pas… Je suis juste étonnée de toi… C'est pas ton genre Emma…
- Je sais… Mais, depuis qu'Éloïse est née j'ai l'impression d'être juste une mère. Je l'aime mais c'est parfois difficile de faire une croix sur les sorties, les fêtes, et…
- Oui, la coupa-t-elle. Être mère c'est aussi se sacrifier… Et dès le départ tu le savais, Emma…
- Hum… Disons que j'ai pas su résister à la tentation de refaire une soirée au bar, comme avant…
- L'essentiel c'est que tout se soit bien terminé. Pour le reste, tu l'apprendras par toi-même...
- Ouais… Et Antoine ? Il… Il m'en veut encore ?
- Tu le connais, il a eu super peur… Mais c'est du passé…
- Câlin… proposa Emma en guise de réconciliation. »
Candice ouvrit ses bras, accueillant sa fille à la mine définitivement coupable. La brune finit par quitter cet antre chaleureux avant de se relever et proposer son service pour la distribution de leurs préparations. Leur mère accepta du vin dans son petit gobelet, alors qu'au loin, apparaissait un homme les bras chargés.
« Et bah tu vois ! s'exclama Jules, Vraiment traitée comme une princesse….
- C'est vrai… J'en ai de la chance…
- Ah ça… C'est sûr qu'il prend soin de toi…
- C'est presque trop parfois… mais bon, c'est ce qui fait son charme aussi… puis avec lui, je suis en sécurité…
- Ça va durer cette fois ? osa-t-il d'un ton solennel.
- Pourquoi tu me demandes ça Jules ?
- Parce qu'avec toi, les choses ne durent jamais longtemps….
- Mais lui c'est différent… Et tu le sais… »
Jules se contenta d'acquiescer avant de se jeter sur leurs préparations. Face à eux, le commissaire revenait, parasol en main, chapeau sous le bras et crème solaire dans la poche. Et encore une fois Antoine était aux petits soins rien que pour elle. Alors face à cette attitude couplée à son côté beau gosse, il était difficile pour Candice de ne pas craquer. Grand sourire, elle le fixait, alors qu'il posait à peine le parasol sur le sable brûlant.
« Et Voilà ! Parasol… Chapeau… et crème solaire.
- Mon héros… sourit-elle amoureusement en ajustant son chapeau sur sa tête. Je suis gâtée ! Ironisa-t-elle. Merci…
- Vaut mieux être prudent…
- Ah mais tout à fait ! acquiesça-t-elle en l'embrassant. Alors ? Qui est-ce qui nous présente le menu ?
- Vous avez appelé Suzanne ?
- Euh nan…
- J'y vais ! »
Les enfants acquiescèrent avant d'ouvrir ce qu'ils avaient préparés et achetés pour l'occasion. Et vu le ton entreprit par Jules, le cuisinier se croyait dans un 5 étoiles. Ses frères le taquinèrent, non sans oublier de l'imiter grossièrement sous le rire éclatant de leur mère qui regardait Antoine débarquer près de sa fille.
« Suzanne ?! Tu viens, on va manger…
- J'arrive !
- Bonjour… lança Antoine à la jeune enfant qui accompagnait la sienne.
La petite lui répondit timidement en le fixant avec insistance.
- T'as vu ce qu'on a fait ?
- Sympa le château ! Il est presque aussi gros que celui de l'an dernier, tu te rappelles ?!
- Ouais ! C'est vrai !
- Allez viens, on va te remettre de la crème aussi… et ton chapeau il est où ?
- Je l'ai laissé à Emma parce que je voulais pas le mouiller !
- Ok !
- Je pourrais revenir jouer tout à l'heure ?
- Bien sûr ! On va passer l'après-midi ici tous ensemble…
- Cool ! À tout' Lina… »
La petite lâcha un sourire, fixant le père et sa fille rebrousser chemin jusqu'à leur nappe. Déçue, elle finit par s'éclipser, laissant la famille à leur chaleureux repas. Et à la fin de ce dernier, Léo proposa de retourner à l'eau. Sans plus attendre, les plus jeunes se lancèrent dans une course effrénée jusqu'à l'océan. Leurs parents rigolèrent, s'attelant au rangement du pique-nique. Et rapidement, les deux s'installèrent sur un transat sous un parasol, Candice en profita pour sortir ses journaux qu'elle s'apprêtait à lire avec attention.
« Tu veux pas venir dans l'eau avec moi ? demanda-t-il d'une moue suppliante.
- Je vais me reposer un peu…
- Ok… bouda-t-il en ôtant son tee-shirt avant de la fixer avec hésitation. Euh… Dis…
- Oui, donne ta crème je t'en mets dans le dos ! »
Ok, donc Antoine n'avait même pas terminé sa phrase que Candice avait deviné sa question. Complices… C'était peu de le dire ! C'en était presque télépathique… Il rigola doucement avant de s'installer sur le rebord du transat de sa compagne qui lui recouvrit le dos du liquide blanchâtre. Il la remercia dans un baiser et s'enfuit presque en courant rejoindre les enfants. Elle hocha négativement la tête, se demandant finalement si elle n'avait pas emmené 6 enfants avec elle. Amusée, elle se força à se reconcentrer sur sa lecture dans un calme olympien… Candice était désormais tranquille pour se focaliser sur cette histoire de disparition.
« 48 heures d'inquiétude pour la famille de Joseph » lut-elle en tête d'article. Et chacune de ses lectures relatait les mêmes choses. Joseph, père de famille de 45 ans avait disparu depuis 48 heures. Et toute sa famille semblait dans l'incompréhension. Le type était décrit comme gentil, serviable et respecté de tous. Un quarantenaire à la figure angélique et au regard ténébreux… Sexy… observa Candice en scrutant sa photo avec minutie. Le genre d'homme à faire chavirer les cœurs… Pourtant, il était clair que sa disparition était une zone d'ombre. Sa femme racontait au journaliste que Joseph avait mentionné un rendez-vous à la banque le vendredi en fin de journée et qu'il n'était jamais revenu. Et évidemment, le banquier n'avait jamais entendu parler de ce rendez-vous… Plus encore, d'après les premières informations, son portable et ses papiers restaient également disparus et son véhicule, impossible à localiser. Que d'intrigue pour Candice qui se mit à réfléchir à de multiples théories. Et celle qui frappait le plus son esprit était celle de la fuite. L'invention d'un rendez-vous, un départ presque préparé et une famille plongée dans l'inquiétude. Voilà ce qui restait de cette histoire policière attrayante…
Et du côté du rivage, l'heure n'était pas du tout à la recherche. Au contraire, le moindre amusement était apprécié. Et Suzanne s'en donnait à cœur joie. Surtout lorsqu'il s'agissait d'embêter ses demi-frères… Immergé dans l'océan, Antoine rigolait, se satisfaisant de les voir si complices malgré le grand écart d'âge qui s'imposait entre eux. Mais rapidement, Lina les doubla, et Suzanne s'éloigna pour jouer avec sa nouvelle amie tandis qu'Antoine avait retrouvé les jumeaux pour une partie de foot qui tournait à la comédie.
« Il est super drôle ton père ! T'as de la chance toi… remarqua Lina en souriant gentiment.
- Tu rigoles ? On dirait comme ça, mais en vrai il est chiant des fois… Il a toujours peur qu'il m'arrive quelque chose…
- Mais ça veut dire qu'il est gentil…
- Ouais… Il est comment le tien ?
- Je sais pas… Ma mère dit qu'il est parti quand j'étais toute petite… Je me souviens pas…
- Ah… Moi aussi mes parents se sont séparés quand j'étais bébé… Mais je les vois encore tous les deux…
- T'imagines si nos parents devenaient amoureux ? On pourrait jouer tout le temps ensemble ! Ce serait trop cool !
- Ouais… mais mon père est déjà amoureux de Candice…
- On a qu'à essayer de changer les choses… en plus il est trop beau… et ma mère aussi… on a qu'à organiser une rencontre entre eux. Ma mère sort toujours du restaurant pour se baigner à la fin de la journée…
- Ouais… répondit Suzanne sans aucune volonté. Mais toi t'habites ici, pas nous…
- On peut toujours essayer…
- Mais et Candice ?
- Qu'est-ce que vous trafiquez ? Vous êtes drôlement sages… intervint Antoine qui sortait d'un match effréné.
- Rien ! On discutait… expliqua Suzanne sans sourire.
- Lina ! cria une voix féminine en approchant derrière eux. »
Le commissaire releva la tête, tombant sur une femme aux cheveux brun foncé et au teint hâlé. Là, Lina marquait un point, sa mère était très très belle. Antoine la dévisagea, avant d'observer une longue robe rouge, qu'elle arborait avec charisme. Souriante, elle s'approcha d'eux alors que Suzanne essayait de tirer son père dans le sens inverse.
« Maman !
- Oh bonjour ! lança-t-elle à Antoine qui souriait également.
- Bonjour !
- Vous êtes le père de Suzanne donc ?
- C'est ça !
- Fanny, enchantée !
- Antoine ! répliqua-t-il dans une poignée de main.
- Ma fille n'arrête pas de me parler d'elle et de sa famille trop cool depuis ce matin… expliqua-t-elle pour provoquer le rire d'Antoine.
Suzanne leva les yeux au ciel, agacée.
- Papa !? J'ai froid… Je vais me sécher sur le transat ! déclara-t-elle en partant tête baissée.
- Ok ! J'arrive...
- Vous êtes arrivés quand ? »
La jeune brune s'arrêta en chemin pour se retourner vers ceux qu'elle venait de quitter. Son père riait encore, amusé par ce que lui racontait cette femme qu'elle considérait désormais comme son ennemie numéro 1. Et tout cela était la faute de Lina. Elle se retourna à nouveau et aperçut Candice plongée dans sa lecture. L'appel de la sécurité… Elle osa finalement un maigre sourire et courut à nouveau vers ceux qu'elle voulait désormais retrouver.
